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You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> LOISEAU v. FRANCE - 46809/99 [2004] ECHR 449 (28 September 2004) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2004/449.html Cite as: [2004] ECHR 449 |
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DEUXIÈME SECTION
AFFAIRE LOISEAU c. FRANCE
(Requête no 46809/99)
ARRÊT
STRASBOURG
28 septembre 2004
DÉFINITIF
02/02/2005
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l'affaire Loiseau c. France,
La Cour européenne des Droits de l'Homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :
MM. A.B. Baka,
président,
J.-P. Costa,
L.
Loucaides,
K.
Jungwiert,
V.
Butkevych,
Mme W.
Thomassen,
M. M.
Ugrekhelidze,
juges,
et de Mme S.
Dollé,
greffière de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil les 18 novembre 2003 et 7 septembre 2004,
Rend l'arrêt que voici, adopté à cette dernière date :
PROCÉDURE
3. La requête a été transmise à la Cour le 1er novembre 1998, date d'entrée en vigueur du Protocole no 11 à la Convention (article 5 § 2 du Protocole no 11).
EN FAIT
« (...)
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Loiseau a été recruté par le proviseur du lycée professionnel Albert Claveille de Périgueux, en qualité d'agent contractuel, (...) pendant la période du 6 novembre 1979 au 30 avril 1980 ; que l'intéressé a demandé communication des déclarations établies auprès de l'URSSAF relatives à son emploi pour les mois de novembre et de décembre 1979, les feuilles de paie correspondantes ainsi que les documents relatifs à son embauche ; que, quelle que soit la nature exacte de l'emploi réellement exercé par M. Loiseau, la circonstance que ces documents ne se trouvaient pas au rectorat ne pouvait dispenser celui-ci de les obtenir auprès du chef d'établissement employeur, lequel était placé sous le contrôle des autorités académiques ; que si le recteur allègue néanmoins avoir fait entreprendre des recherches, il n'apporte pas la preuve des diligences entreprises ; qu'ainsi, il n'établit pas qu'il était dans l'impossibilité de communiquer les documents demandés ; que, dès lors, le requérant est fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;
(...) ».
Il ne fut pas interjeté appel de ce jugement.
« (...) Quant à la communication des documents sollicités par M. Loiseau, il n'a pas été possible de réserver une suite favorable à sa demande dans la mesure où il n'existe pas trace de ceux-ci.
Leur inexistence avait déjà été portée à la connaissance de la commission d'accès aux documents administratifs par lettre du 15 mai 1990.
Je demande toutefois au recteur concerné de solliciter du proviseur de lycée professionnel en cause une attestation aux termes de laquelle il déclare expressément ne pas posséder les documents visés (...) ».
Le 20 janvier 1994, ledit proviseur a établi à l'attention du recteur une « attestation » aux termes de laquelle il « déclar[ait] que l'établissement ne posséd[ait] pas les documents visés (...) », que le recteur a transmise le 9 février 1994 au rapporteur général adjoint de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat.
« (...)
Considérant (...) qu'à la suite du jugement du 19 novembre 1992, le recteur d'académie de Bordeaux a demandé au proviseur du lycée professionnel Albert Claveille de Périgueux de lui communiquer les documents administratifs concernant M. Loiseau qu'il pouvait détenir ; que, dans une attestation du 20 janvier 1994, le proviseur du lycée professionnel a déclaré ne pas posséder les documents demandés par M. Loiseau ;
Considérant qu'il ressort de ce qui précède que l'Etat ne peut être regardé comme n'ayant pas tiré toutes les conséquences du jugement du 19 novembre 1992 ; que M. Loiseau n'est, par suite, pas fondé à demander que des astreintes soient prononcées à son encontre ;
(...) ».
EN DROIT
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...). »
A. Observation préliminaire sur la recevabilité de la requête
« La Cour rappelle qu'aux termes de l'article 35 § 1 de la Convention, elle « ne peut être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours internes (...) et dans un délai de six mois à partir de la date de la décision interne définitive ». Ce délai est en principe interrompu par la première lettre du requérant indiquant son intention de saisir la Cour – ou, avant l'entrée en vigueur du Protocole no 11, la Commission européenne des Droits de l'Homme – et donnant certaines précisions quant à la nature des griefs qu'il entend développer devant elle (voir, par exemple, Allan c. Royaume-Uni (déc.), no 48539/99, 28 août 2001). Peu importe à cet égard la date à laquelle la requête a été formellement enregistrée par le Secrétariat de la Commission ou le Greffe de la Cour.
En l'espèce, le requérant a adressé un premier courrier à la Commission le 24 avril 1995, dans lequel il exposait les faits, invoquait l'article 6 § 1 de la Convention et se plaignait du défaut d'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 19 novembre 1992 ainsi que de la durée de la procédure qu'il avait engagée devant le Conseil d'Etat aux fins de cette exécution. La décision interne définitive étant l'arrêt du Conseil d'Etat du 14 février 1996, il est manifeste que le délai de six mois de l'article 35 § 1 de la Convention a été respecté. Partant, il y a lieu de rejeter l'exception soulevée à cet égard par le Gouvernement. »
Le 10 février 2004, le Greffe de la Cour a envoyé au Gouvernement une copie de la lettre du 24 avril 1995.
Dans des observations du 2 mars 2004, le Gouvernement expose qu' « à la lecture de ce courrier, il apparaît que le seul grief dont le requérant avait expressément saisi la Cour sur le fondement de l'article 6 § 1 de la Convention était la durée excessive de l'instance ». Il « maintient (...) que la recevabilité du grief pris en l'absence d'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n'était pas manifeste au regard des termes de ce courrier, et devait à tout le moins faire l'objet d'une communication préalable du courrier de saisine et d'une possibilité pour le Gouvernement de présenter des observations sur l'interprétation pouvant être faite du contenu de ce courrier ».
B. Sur le fond
Le Gouvernement souligne tout particulièrement que l'annulation par le tribunal de la décision de refus de communication emportait comme mesure d'exécution, non pas nécessairement la communication des documents, mais l'obligation pour le recteur d'entreprendre une nouvelle recherche : si les documents étaient trouvés, ils devaient être communiqués au requérant ; dans le cas contraire, il appartenait seulement au recteur d'établir l'existence des nouvelles diligences vainement entreprises par lui à cette fin.
En l'espèce, fort de l'avis favorable de la commission d'accès aux documents administratifs du 5 avril 1990, le requérant a invité le recteur à lui fournir les documents litigieux ; le recteur a répondu le 5 mai 1990 que, ne les détenant pas, il se trouvait dans l'impossibilité de procéder à cette communication. Le requérant a alors saisi le tribunal administratif, lequel a annulé le refus du recteur par un jugement du 19 novembre 1992 (dont appel n'a pas été interjeté), au motif que la circonstance que ces documents ne se trouvaient pas au rectorat ne dispensait pas le recteur de les obtenir auprès du chef de l'établissement qui avait employé le requérant ; selon le tribunal, n'apportant pas la preuve des diligences entreprises, le recteur n'avait pas établi qu'il était dans l'impossibilité de communiquer lesdits documents.
Comme le souligne le Gouvernement, l'exécution de ce jugement requérait que le recteur fasse rechercher les documents litigieux auprès du chef de l'établissement concerné et qu'il les fournisse au requérant dans l'hypothèse où ces diligences permettaient de les trouver. Or il ressort du courrier envoyé par le recteur au rapporteur général adjoint de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat le 27 décembre 1993, ainsi que de l'attestation du proviseur de l'établissement du 20 janvier 1994, que le recteur a fait cette démarche, vainement cependant, parce que l'établissement concerné ne possédait pas ces documents. Dans son arrêt du 14 février 1996, le Conseil d'Etat déduit de ces circonstances que « l'Etat ne peut être regardé comme n'ayant pas tiré toutes les conséquences du jugement du 19 novembre 1992 ».
Pour sa part, la Cour conclut qu'il n'y a pas eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À l'UNANIMITÉ,
Dit qu'il n'y a pas eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 28 septembre 2004 en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
S. Dollé A.B.
Baka
Greffière Président