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European Court of Human Rights


You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> ASCIERTO AND BUFFOLINO v. ITALY - 20619/03 - Committee Judgment (French Text) [2013] ECHR 1091 (05 November 2013)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2013/1091.html
Cite as: [2013] ECHR 1091

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    DEUXIÈME SECTION

     

     

     

     

     

     

     

    AFFAIRE ASCIERTO ET BUFFOLINO c. ITALIE

     

    (Requêtes nos 20619/03 et 23751/03)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    ARRÊT

     

     

     

    STRASBOURG

     

    5 novembre 2013

     

     

     

     

     

     

    Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.

     

     


    En l’affaire Ascierto et Buffolino c. Italie,

    La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en un Comité composé de :

              Peer Lorenzen, président,
              András Sajó,
              Nebojša Vučinić, juges,
    et de Seçkin Erel, greffier adjoint de section f.f.,

    Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 15 octobre 2013,

    Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

    PROCÉDURE

    1.  A l’origine de l’affaire se trouvent deux Requêtes (nos 20619/03 et 23751/03) dirigées contre la République italienne et dont deux ressortissantes de cet Etat (« les requérantes », voir tableau en annexe), ont saisi la Cour en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

    2.  Les requérantes ont été représentées par Me G. di Gioia, avocat à Telese Terme. Le gouvernement italien (« le Gouvernement ») a été représenté par son ancien agent, M. I.M. Braguglia, et son ancien coagent, M. N. Lettieri.

    3.  Respectivement le 15 novembre 2006 (Requête no 23751/03) et le 1er janvier 2007 (Requête no 20619/03), les Requêtes ont été communiquées au Gouvernement. En application du Protocole no 14, elles ont été attribuées à un Comité.

    EN FAIT

    I.  LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

    4.  Les requérantes, parties à des procédures judiciaires, ont saisi les juridictions compétentes au sens de la loi « Pinto » afin de se plaindre de la durée de ces procédures.

    5.  Les faits essentiels des Requêtes ressortent des informations contenues dans le tableau en annexe au présent arrêt.

    II.  LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

    6.  Le droit et la pratique internes pertinents figurent dans l’arrêt Cocchiarella c. Italie ([GC], no 64886/01, §§ 23-31, CEDH 2006-V).

    EN DROIT

    I.  SUR LA JONCTION DES RequêteS

    7.  Compte tenu de la similitude des Requêtes quant aux faits et au problème de fond qu’elles posent, la Cour estime nécessaire de les joindre et décide de les examiner conjointement dans un seul arrêt.

    II.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION

    8.  Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, les requérantes se plaignent de la durée des procédures principales et de l’insuffisance des indemnisations « Pinto ».

    9.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.

    10.  L’article 6 § 1 de la Convention est ainsi libellé :

    « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) ».

    A.  Sur la recevabilité

    1.  Qualité de « victime »

    11.  Le Gouvernement soutient que les requérantes ne peuvent plus se prétendre « victimes » de la violation de l’article 6 § 1 car elles ont obtenu des cours d’appel « Pinto » une décision constatant le dépassement du délai raisonnable ainsi que, dans la Requête 23751/03, un redressement approprié et suffisant.

    12.  La Cour, après avoir examiné l’ensemble des faits de la cause et les arguments des parties, considère que le redressement s’est révélé insuffisant (voir Delle Cave et Corrado c. Italie, no 14626/03, §§ 26-31, 5 juin 2007 ; Cocchiarella c. Italie, précité, §§ 69-98). Partant, les requérantes peuvent toujours se prétendre « victimes », au sens de l’article 34 de la Convention.

    2.  Conclusion

    13.  La Cour constate que ces griefs ne se heurtent à aucun autre des motifs d’irrecevabilité inscrits à l’article 35 § 3 de la Convention. Aussi, les déclare-t-elle recevables.

    B.  Sur le fond

    14.  La Cour constate que les procédures litigieuses ont duré, respectivement :

    i.          no 20619/03 : 5 ans et 2 mois pour un degré de juridiction ;

    ii.        no 23751/03 : 5 ans et 11 mois pour un degré de juridiction.

    15.  La Cour a traité à maintes reprises des Requêtes soulevant des questions semblables à celles des cas d’espèce et a constaté une méconnaissance de l’exigence du « délai raisonnable », compte tenu des critères dégagés par sa jurisprudence bien établie en la matière (voir, en premier lieu, Cocchiarella précité). N’apercevant rien qui puisse mener à une conclusion différente dans la présente affaire, la Cour estime qu’il y a également lieu de constater, dans chaque Requête, une violation de l’article 6 § 1 de la Convention pour les mêmes motifs.

    III.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

    16.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,

    « Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

    A.  Dommage

    17.  Sans chiffrer leurs prétentions, les requérantes se remettent à la sagesse de la Cour pour la réparation du préjudice moral qu’elles estiment avoir subi.

    18.  Le Gouvernement est de l’avis que la Cour ne devrait rien octroyer, les requérants n’ayant subi, du fait de la longueur des procédures, aucun préjudice autre que celui déjà reconnu et indemnisé au niveau interne. En tout état de cause, il considère que le simple constat de violation fournirait en soi une satisfaction équitable suffisante.

    19.  Compte tenu de la solution adoptée dans l’arrêt Cocchiarella (précité, §§ 139-142 et 146) et statuant en équité, la Cour alloue aux requérantes les sommes indiquées dans le tableau ci-dessous, comparées aux montants qu’elle aurait octroyés en l’absence de voie de recours interne, au vu de l’objet de chaque litige et de l’enjeu des procédures.

     

     

    No 
    Requête

    Somme que la Cour aurait accordée en l’absence de voie de recours interne

     

    Pourcentage alloué par la juridiction « Pinto »

     

    Somme accordée pour dommage moral

    1.      1.

    20619/03

     

    5 000 EUR

    -

     

    2 250 EUR

    2.       

    23751/03

     

     

    6 000 EUR

    12,5%

     

    1 950 EUR

    B.  Frais et dépens

    20.  Les requérantes n’ayant pas présenté de demandes de remboursement des frais et dépens dûment documentées dans le délai imparti à cet effet, la Cour décide de ne rien accorder à ce titre.

    C.  Intérêts moratoires

    21.  La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

    PAR CES MOTIFS, LA COUR,

    1.  Décide de joindre les Requêtes ;

     

    2. Déclare les Requêtes recevables ;

     

    3.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;

     

    4.  Dit que l’Etat défendeur doit verser aux requérantes, dans les trois mois,

     

    a)  les sommes suivantes, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt,  à titre de dommage moral :

     

    i.  no 20619/03 2 250 EUR (deux mille deux cent cinquante euros) ;

    ii.  no 23751/03 1 950 EUR (mille neuf cent cinquante euros) ;

     

    b)  qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

     

    5.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

    Fait en français, puis communiqué par écrit le 5 novembre 2013, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

            Seçkin Erel                                                                      Peer Lorenzen
    Greffier adjoint f.f.                                                                   Président

     


    ANNEXE

     

     

    Numéro de Requête et date d’introduction

    Détails requérant(s)

    Procédure principale et procédure « Pinto » y relative

     

    1.

     

    no 20619/03

    introduite le 27/11/1999

     

    Assunta ASCIERTO,

    ressortissante italienne, née en 1939

     

     

    Procédure principale

    Objet : versement d’une somme s’élevant à 550 euros (EUR).

    Première instance : juge d’instance de Bénévent (RG no 3572/94), du 22 juillet 1994 au 29 septembre 1999.

     

    Procédure « Pinto »

    Première instance

    Autorité saisie : cour d’appel de Rome.

    Décision : du 22 avril 2002, déposée le 10 juin 2002 ; constat du dépassement d’une durée raisonnable ; aucune somme n’a été accordée pour dommage moral.

    Deuxième instance

    Autorité saisie : Cour de cassation.

    Décision : du 7 avril 2003, déposée le 14 mai 2003 ; confirmation de la décision de la cour d’appel.

     

    2.

     

    no 23751/03

    introduite le 22/10/1999

     

    Fiorella BUFFOLINO, ressortissante italienne, née en 1971

     

    Procédure principale

    Objet : indemnités journalières de maternité (indennità di maternità).

    Première instance : juge d’instance de Bénévent (RG no 6378/94), 1er décembre 1994 au 27 novembre 2000.

     

    Procédure « Pinto »

    Autorité saisie : cour d’appel de Rome.

    Décision : du 18 juin 2002, déposée le 27 novembre 2000 ; constat du dépassement d’une durée raisonnable ; 750 EUR pour dommage moral ; 1 000 EUR pour frais et dépens.

     


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