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European Court of Human Rights


You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> GEORGIADIS v. GREECE - 40032/08 - Committee Judgment (French Text) [2013] ECHR 953 (10 October 2013)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2013/953.html
Cite as: [2013] ECHR 953

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    PREMIÈRE SECTION

     

     

     

     

     

     

    AFFAIRE GEORGIADIS c. GRÈCE

     

    (Requête no 40032/08)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    ARRÊT

     

     

     

    STRASBOURG

     

    10 octobre 2013

     

     

    Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.


    En l’affaire Georgiadis c. Grèce,

    La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en un comité composé de :

              Elisabeth Steiner, présidente,
              Mirjana Lazarova Trajkovska,
              Linos-Alexandre Sicilianos, juges,
    et de André Wampach, greffier adjoint de section,

    Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 17 septembre 2013,

    Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

    PROCÉDURE


  1. .  A l’origine de l’affaire se trouve une Requête (no 40032/08) dirigée contre la République hellénique et dont un ressortissant de cet Etat, M. Georgios Georgiadis (« le requérant »), a saisi la Cour le 1er août 2008 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

  2. .  Le requérant est représenté par Me D. Boubouris, avocat à Athènes. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») est représenté par les délégués de son agent, Mme K. Paraskevopoulou, assesseure auprès du Conseil juridique de l’Etat, et M. C. Poulakos, auditeur auprès du Conseil juridique de l’Etat.

  3. .  Le requérant allègue des violations de son droit d’accès à un tribunal et de son droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable (article 6 § 1 de la Convention) ainsi que de son droit au respect des biens (article 1 du Protocole no 1).

  4. .  Le 6 mai 2010, la Requête a été communiquée au Gouvernement. Comme le permet l’article 29 § 1 de la Convention, il a en outre été décidé que la chambre se prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond.
  5. EN FAIT

    I.  LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE


  6. .  Le requérant est né en 1939 et réside à Athènes.
  7. 1.  Le contexte de l’affaire


  8. .  Par un contrat du 6 août 1982, le requérant, agissant en tant que mandataire de sa tante, Virginia Germanou (« V.G. »), acquit (selon l’article 235 du code civil - contrat conclu par le représentant d’un tiers avec lui-même - paragraphe 29 ci-dessous) la nue-propriété d’un terrain appartenant à celle-ci et situé sur l’île de Chios. Le contrat de vente fut transcrit sur le registre des hypothèques de l’île de Chios le 26 novembre 1982 et le requérant reçut une attestation à cet égard. Toutefois, ledit contrat ne fut pas rapporté sur le fichier immobilier du requérant.

  9. .  Le 26 janvier 1983, V.G. transféra, par voie de donation entre vifs, la propriété du terrain en cause à son frère. La transcription dudit contrat sur le registre des hypothèques fut dûment achevée. Le 4 mars 1985, le frère de V.G. transféra le terrain à sa fille, A.X. et à sa petite-fille, E.X. Ledit contrat fut transcrit sur le registre des hypothèques conformément au droit interne. Le 11 décembre 1987, V.G. décéda.
  10. 2.  La procédure civile intentée par le requérant


  11. .  Au cours de l’été 1988, lors d’un voyage sur l’île de Chios, le requérant apprit que la propriété du terrain en cause ne lui avait pas été transférée en raison de l’omission de l’employé auprès du bureau des hypothèques de l’île de Chios de rapporter le contrat de vente sur le fichier immobilier du requérant et sur celui de V.G. Il apprit aussi que la propriété du terrain avait entretemps été transférée à A.X. et E.X.

  12. .  Le 18 août 1988, suite à l’intervention du requérant, son contrat fut transcrit sur son fichier immobilier.

  13. .  Le 7 juillet 1989, le requérant saisit les juridictions civiles d’une action contre A.X. et E.X. tendant à obtenir la reconnaissance de ses droits de propriétaire sur le terrain. Le 11 avril 1995, le tribunal de grande instance de Chios fit droit à sa demande. La partie adverse interjeta appel.

  14. .  Le 23 mai 1996, la cour d’appel d’Egée infirma la décision no 61/86/5/1995, rejeta l’action du requérant et reconnut définitivement A.X. et E.X. comme propriétaires du terrain en cause.

  15. .  La cour d’appel constata que le contrat avait été transcrit sur le registre des hypothèques de l’île de Chios mais que, pour des raisons qui n’avaient pas été élucidées et qui étaient sans pertinence en l’occurrence, cette transcription n’avait été rapportée ni sur le fichier immobilier du requérant ni sur celui de V.G. Cette transcription avait eu lieu postérieurement, le 18 août 1988, après le décès de V.G. Entretemps, V.G., après avoir révoqué (le 19 janvier 1983) le mandat qu’elle avait donné au requérant, avait transféré la nue-propriété de son terrain à son frère, et le 27 janvier 1983 elle s’était aussi désistée au profit de ce dernier de l’usufruit de son terrain.

  16. .  La cour d’appel releva que comme la transcription du titre du requérant n’avait pas été rapportée dans les fichiers immobiliers des intéressés, cette transcription ne produisait aucun effet et le transfert de la nue-propriété au requérant n’avait pas eu lieu, de sorte que V.G. était restée la propriétaire du terrain et que le transfert de la propriété à son frère et aux enfants de celui-ci l’emportait sur la transcription effectuée le 18 août 1988.
  17. 3.  La procédure administrative


  18. .  Le 21 mai 1997, le requérant saisit le tribunal administratif de Lesvos d’une action en dommages-intérêts contre l’Etat, en vertu des articles 105 et 106 de la loi d’accompagnement du code civil. Dans son action, il sollicitait la somme de 29 millions de drachmes (85 106 euros (EUR) environ) à titre de dommages-intérêts pour la perte de ses droits de propriétaire sur le terrain litigieux en raison de l’omission alléguée de l’employé du bureau des hypothèques.

  19. .  Le 30 octobre 1998, le tribunal administratif fit droit à la demande du requérant et lui alloua une indemnité de 22 377 620 drachmes (65 671 EUR environ).

  20. .  Le 20 septembre 1999, l’Etat interjeta appel en alléguant, entre autres, que l’omission de l’employé du bureau des hypothèques de rapporter le contrat sur le fichier immobilier du requérant avait eu lieu en 1982 et qu’à ce moment-là, la compétence pour examiner l’action en dommages-intérêts du requérant appartenait aux juridictions civiles et non aux juridictions administratives. Plus précisément, l’Etat nota qu’en vertu de la loi no 1406/1983, entrée en vigueur le 14 décembre 1983, les juridictions administratives avaient certes été déclarées compétentes pour connaître de tous les litiges administratifs, y compris les litiges relatifs aux articles 105 et 106 de la loi d’accompagnement du code civil, mais seulement à partir du 11 juin 1985. Jusqu’à cette date restaient compétentes pour l’examen des litiges de nature administrative les juridictions civiles. Selon l’article 9 de la loi no 1406/1983, c’était la date à laquelle l’acte administratif litigieux avait été rendu ou l’omission imputée à l’administration avait eu lieu ou la date à laquelle la prétention litigieuse était née et était devenue exigible, qui était considérée comme la date déterminante pour l’application de ladite loi. En dernier lieu, l’Etat allégua que la prétention du requérant était prescrite.

  21. .  Par un arrêt du 28 mars 2002, la cour administrative d’appel du Pirée considéra que, bien que l’omission de l’employé ait été commise en 1982, la créance du requérant contre l’Etat n’était devenue exigible qu’après la publication de l’arrêt par lequel la cour d’appel d’Egée avait reconnu définitivement A.X. et E.X. propriétaires du terrain. Partant, la prétention du requérant contre l’Etat n’était devenue exigible qu’après l’entrée en vigueur de la loi no 1406/1983 et les juridictions administratives étaient compétentes pour connaître du fond du litige, sans que le moment auquel le requérant avait eu connaissance de cette omission puisse entrer en ligne de compte. De plus, la même juridiction jugea qu’en vertu de l’article 90 de la loi no 2362/1995, la prétention en cause n’était pas prescrite. Enfin, la cour d’appel réduisit la somme allouée à 20 877 620 drachmes (61 269 EUR environ).

  22. .  Le 20 février 2003, l’Etat se pourvut en cassation. Il contestait la compétence des juridictions administratives pour se prononcer sur l’affaire.

  23. .  Initialement fixée au 11 octobre 2004, l’audience fut reportée d’office au 21 mars 2005, puis aux 16 mai 2005, 17 octobre 2005, 6 février 2006 et 9 octobre 2006, date à laquelle elle eut finalement lieu.

  24. .  Le 4 février 2008, le Conseil d’Etat cassa l’arrêt attaqué pour défaut de compétence des juridictions administratives (arrêt no 429/2008).

  25. .  Le Conseil d’Etat releva que la prétention du requérant avait pris naissance en raison de l’omission de l’employé du bureau des hypothèques de compléter la transcription du contrat du 6 août 1982 et de le rapporter sur le fichier immobilier du requérant. Cette transcription aurait pu être faite jusqu’au 26 janvier 1983, ce qui aurait eu comme conséquence l’acquisition valable de la nue-propriété du bien par le requérant. Toutefois, après le transfert de la propriété du terrain au frère de V.G. et la transcription de ce transfert sur le registre des hypothèques il n’était plus possible au requérant de passer outre cette transcription par la transcription postérieure (le 18 août 1988) de son propre contrat sur son fichier immobilier.

  26. .  Le Conseil d’Etat considéra que l’omission dommageable de l’employé du bureau des hypothèques avait eu lieu le 26 janvier 1983 (date à laquelle V.G. avait transféré la propriété du terrain à son frère et à laquelle ce dernier en était ainsi devenu propriétaire) et que c’était à partir de cette date que la prétention relative à la réparation du dommage causé par la perte de la nue-propriété était née et devenue exigible par voie judiciaire, et non à partir de la date de l’arrêt de la cour d’appel d’Egée, comme l’avait à tort admis la cour administrative d’appel. En attendant que les juridictions civiles se prononcent, rien n’empêchait le requérant de saisir les juridictions civiles d’une action en indemnisation contre le bureau des hypothèques, sur le fondement de l’article 105 de la loi d’accompagnement du code civil. Ces juridictions étaient compétentes pour juger la question incidente de nature civile, conformément à l’article 284 du code de procédure civile.

  27. .  Selon le Conseil d’Etat, le requérant pouvait soumettre ses prétentions en justice indépendamment du moment auquel il avait eu connaissance de l’omission illégale du bureau des hypothèques. L’exigibilité en justice d’une prétention de nature indemnitaire était une notion objective, qui dépendait du moment auquel les conditions à l’origine d’une prétention se trouvaient remplies, et non une notion subjective, dépendant du moment, fortuit, auquel l’intéressé s’est rendu compte de la réunion de ces conditions. Par conséquent, comme la prétention du requérant avait pris naissance et pouvait être exigée par voie judiciaire avant le 11 juin 1985 (date à laquelle les juridictions administratives étaient devenues compétentes en vertu de l’article 9 de la loi no 1406/1983), c’étaient bien les juridictions civiles qui étaient compétentes pour se prononcer sur l’action du requérant.

  28. .  Une copie certifiée conforme de l’arrêt du Conseil d’Etat parvint au requérant le 11 mars 2008.
  29. II.  LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

    25.  Les dispositions pertinentes de la loi d’accompagnement du code civil sont ainsi libellées :

    Article 105

    « L’Etat est tenu de réparer le dommage causé par les actes illégaux ou omissions de ses organes lors de l’exercice de la puissance publique, sauf si l’acte ou l’omission ont eu lieu en méconnaissance d’une disposition destinée à servir l’intérêt public. La personne fautive est solidairement responsable, sous réserve des dispositions spéciales sur la responsabilité des ministres. »

    Article 106

    « Les dispositions des deux articles précédents s’appliquent aussi en matière de responsabilité des communes ou des autres personnes de droit public pour le dommage causé par les actes ou omissions de leurs organes. »


  30. .  L’article 105 de la loi d’accompagnement du code civil établit le concept d’acte dommageable spécial de droit public, créant une responsabilité extracontractuelle de l’Etat. Cette responsabilité est engagée par tous actes ou omissions illégaux ayant causé un préjudice matériel ou moral à l’administré. Les actes concernés peuvent être non seulement des actes juridiques mais également des actes matériels de l’administration, y compris des actes non exécutoires en principe.

  31. .  La loi 1406/1983 relative à la compétence des juridictions administratives se lit comme suit :
  32. Article 1

    « 1.  Relèvent de la compétence des juridictions administratives tous les litiges administratifs de fond qui n’en relèvent pas à ce jour.

    2.  Les litiges susmentionnés comprennent en particulier ceux qui sont relatifs à :

    (...)

    h)  la responsabilité de l’Etat, de communes ou d’autres personnes de droit public pour indemniser, conformément aux articles 105 et 106 de la loi d’accompagnement du code civil. »

    Article 2

    (...)

    2.  Dans les cas où les articles 105 et 106 de la loi d’accompagnement du code civil trouvent à s’appliquer et lorsque l’Etat (...) est susceptible de verser une indemnité, celui qui est lésé peut exercer une action. »

    Article 9

    « 1.  L’examen des litiges mentionnés à l’article 1 par les juridictions administratives commence :

    (...)

    c)  pour les autres litiges administratifs, à partir du 11 juin 1985 (...)

    2.  La date déterminante pour l’application des dispositions de l’article 1 de la présente loi est celle à laquelle l’acte administratif a été rendu ou l’omission a eu lieu ou celle à laquelle la prétention est née et est devenue exigible. »


  33. .  L’article 90 de la loi no 2362/1995 prévoit :
  34. Prescription des prétentions contre l’Etat

    « 1.  Toute prétention contre l’Etat est considérée prescrite après cinq ans (...). »


  35. .  Les articles 235, 1033, 1194 et 1198 du code civil se lisent respectivement comme suit :
  36. Article 235

    Acte juridique du représentant avec lui-même

    « Le représentant ne peut pas accomplir un acte juridique au nom du représenté avec lui-même personnellement ou en qualité de mandataire d’une autre personne, à moins que cet acte n’ait été autorisé par le représenté ou qu’il consiste exclusivement dans l’exécution d’une obligation.

    Est nul le contrat avec soi-même non revêtu de la forme d’un acte notarié. »

    Article 1033

    Acquisition contractuelle d’un bien immobilier

    « Pour le transfert de la propriété d’un bien immobilier, il faut un accord entre le propriétaire du bien et de la personne qui l’acquiert, selon lequel la propriété est transférée à celle-ci pour motif légitime. L’accord se passe par acte notarié et est soumis à la transcription. »

    Article 1194

    Mode de transcription

    « La transcription consiste en l’enregistrement sous forme de résumé de l’acte à transcrire sur le registre des hypothèques, par ordre chronologique de production. Le résumé contient les principales mentions de l’acte. L’enregistrement est également certifié sur l’acte transcrit, lequel est conservé dans le bureau des transcriptions.

    Quiconque justifie d’un intérêt légitime peut demander la transcription. »

    Article 1198

    Défaut de transcription

    « En cas d’absence de transcription (...), le transfert de la propriété d’un bien immobilier ne se produit pas (...). »


  37. .  Cette dernière disposition a été interprétée de manière telle que lorsque le contrat de vente du bien n’a pas été transcrit, le droit de propriété sur celui-ci ne peut pas être considéré comme ayant été transféré à l’acquéreur. En cas de transfert du bien à un tiers et de transcription du contrat par celui-ci, le tiers devient propriétaire et toute action en reconnaissance du droit de propriété du premier acquéreur est vouée à l’échec (Commentaire du code civil, Georgiadis-Stathopoulos, article 1198 et jurisprudence indiquée).

  38. .  Il ressort de la combinaison des articles 1194 du code civil et des dispositions pertinentes de la loi no 4201/1961 modifiant et complétant le statut du bureau des hypothèques de l’Etat que tout acte faisant l’objet d’une transcription doit être rapporté non seulement sur le registre des transcriptions mais aussi, en cas de vente d’un bien immeuble, sur les fichiers immobiliers du vendeur et de l’acheteur, faute de quoi aucun transfert de propriété n’est réalisé (Cour de cassation no 443/1992, cour d’appel d’Athènes no 7167/1977 et cour d’appel d’Egée no133/1996).

  39. .  Les articles 219 et 284 du code de procédure civile disposent respectivement :
  40. Article 219

    Cumul d’actions

    « 1.  Une action sous condition n’est pas permise, mais le demandeur peut, si le fondement de l’action est rejeté, fonder celle-ci sur une autre base ou soumettre une autre demande ayant le même ou un autre fondement. »

    Article 284

    Examen des questions incidentes - juridiction compétente

    « Indépendamment de la procédure litigieuse, un tribunal examine les questions incidentes, même s’il n’est pas compétent à leur égard. »


  41. .  L’article 41 de la loi no 3659/2008 du 5 mai 2008 relative à l’accélération des procédures devant les juridictions administratives prévoit :
  42. « Lorsqu’une voie de recours est rejetée de manière définitive pour défaut de compétence du tribunal, la voie de recours adéquate prévue par la loi est considérée comme ayant été exercée à la date de celle qui a été rejetée pourvu qu’elle ait été exercée devant le tribunal compétent dans un délai de deux mois à compter de la notification à l’intéressé de la décision définitive de rejet. Si la décision de rejet avait été notifiée ou était devenue définitive avant la publication de la présente loi, le délai susmentionné commence à courir à partir de cette publication.

    (...) »

    EN DROIT

    I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DES ARTICLES 6 § 1 (DROIT D’ACCÈS A UN TRIBUNAL) DE LA CONVENTION ET 1 DU PROTOCOLE No 1


  43. .  Invoquant l’article 6 de la Convention, le requérant se plaint d’une atteinte à son droit d’accès à un tribunal ainsi qu’au principe de l’égalité des armes en raison du rejet de son action en dommages-intérêts par les juridictions administratives. Invoquant l’article 1 du Protocole no 1, il se plaint aussi d’une atteinte à son droit au respect de ses biens du fait qu’il a été privé de l’indemnisation sollicitée auprès des juridictions administratives. Les deux articles se lisent ainsi :
  44. Article 6 § 1

    « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »

    Article 1 du Protocole no 1

    « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

    Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes. »


  45. .  Le Gouvernement invite la Cour à rejeter ces griefs faute pour le requérant d’avoir épuisé les voies de recours internes.

  46. .  Selon le Gouvernement, le requérant aurait pu et dû exercer trois recours. En premier lieu, une action en dommages-intérêts contre V.G., et suite au décès de celle-ci, contre ses héritiers. L’action en reconnaissance de propriété qu’il a intentée ne pouvait avoir une issue favorable pour lui et était, selon la législation et la jurisprudence pertinentes, vouée à l’échec, car la transcription du transfert de la propriété du terrain au profit de nouveaux acquéreurs était faite de manière légale et complète.

  47. .  En deuxième lieu, rien n’empêchait le requérant d’intenter aussi devant les juridictions administratives, et en même temps que l’action devant les juridictions civiles, une action en dommages-intérêts contre l’Etat, comme il l’a fait ultérieurement. Il n’existait aucun obstacle procédural à cela.

  48. .  En troisième lieu, le Gouvernement allègue que le requérant n’a pas exercé le recours qui lui était offert par l’article 41 de la loi no 3659/2008, qui laisse la possibilité au justiciable, après le rejet de son action pour défaut de compétence juridictionnelle par les juridictions administratives, de saisir les juridictions civiles dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision d’incompétence.

  49. .  Le Gouvernement affirme que le requérant et son avocat ont négligé pendant une très longue période de faire preuve de diligence au regard de la transaction portant sur le terrain et que, lorsqu’ils ont décidé de le faire, ils n’ont pas choisi les voies de recours appropriées. Leur manque de diligence consistait dans le fait qu’ils avaient négligé, au mépris de la pratique professionnelle la plus élémentaire, de demander auprès du bureau des hypothèques de Chios copie du fichier immobilier du requérant censé mentionner la transcription. Cette démarche, qui relevait de la responsabilité de l’avocat du requérant, était la seule à même d’assurer le droit de propriété sur le bien acquis.

  50. .  Le requérant soutient que l’allégation du Gouvernement selon laquelle il aurait dû engager une action contre l’Etat dès 1983 est incohérente. En 1982, le bureau des hypothèques lui avait délivré une attestation qui confirmait que la transcription avait eu lieu ; il n’avait donc aucun souci à se faire quant au transfert de la propriété du terrain. Il n’a appris le transfert de propriété au profit du frère de V.G. qu’après le décès de celle-ci, en 1987. Or, à ce moment-là, il n’était pas possible d’exercer une action en dommages-intérêts contre l’Etat car la question de la propriété devait d’abord être tranchée par une juridiction. Une action fondée sur les articles 105 et 106 de la loi d’accompagnement du code civil aurait été déclarée irrecevable conformément à l’article 219 du code de procédure civile, car il se serait agi d’une action sous condition de la survenance d’un dommage.

  51. .  La Cour rappelle que la règle de l’épuisement des voies de recours internes vise à ménager aux Etats contractants l’occasion de prévenir ou de redresser les violations alléguées contre eux avant que ces allégations ne lui soient soumises (voir, parmi beaucoup d’autres, Remli c. France, 23 avril 1996, § 33, Recueil des arrêts et décisions 1996-II, et Selmouni c. France [GC], no 25803/94, § 74, CEDH 1999-V). Cette règle se fonde sur l’hypothèse, objet de l’article 13 de la Convention - et avec lequel elle présente d’étroites affinités -, que l’ordre interne offre un recours effectif quant à la violation alléguée (Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, § 152, CEDH 2000-XI). De la sorte, elle constitue un aspect important du principe voulant que le mécanisme de sauvegarde instauré par la Convention revête un caractère subsidiaire par rapport aux systèmes nationaux de garantie des droits de l’homme (Akdivar et autres c. Turquie, 16 septembre 1996, § 65, Recueil 1996-IV).

  52. .  La Cour rappelle que l’obligation découlant de l’article 35 se limite à celle de faire un usage normal des recours vraisemblablement effectifs, suffisants et accessibles (Sofri et autres c. Italie (déc.), no 37235/97, CEDH 2003-VIII). En particulier, la Convention ne prescrit l’épuisement que des recours à la fois relatifs aux violations incriminées, disponibles et adéquats. Ils doivent exister à un degré suffisant de certitude non seulement en théorie mais aussi en pratique, sans quoi leur manquent l’effectivité et l’accessibilité voulues (Dalia c. France, 19 février 1998, § 38, Recueil 1998-I). De plus, selon les « principes de droit international généralement reconnus », certaines circonstances particulières peuvent dispenser le requérant de l’obligation d’épuiser les voies de recours internes qui s’offrent à lui (Aksoy c. Turquie, 18 décembre 1996, § 52, Recueil 1996-VI). Toutefois, le simple fait de nourrir des doutes quant aux perspectives de succès d’un recours donné, qui n’est pas de toute évidence voué à l’échec, ne constitue pas une raison valable pour justifier la non-utilisation de recours internes (Brusco c. Italie (déc.), no 69789/01, CEDH 2001-IX, et Sardinas Albo c. Italie (déc.), n56271/00, CEDH 2004-I).

  53. .  Enfin, l’article 35 § 1 de la Convention prévoit une répartition de la charge de la preuve. Pour ce qui concerne le Gouvernement, lorsqu’il excipe du non-épuisement, il doit convaincre la Cour que le recours était effectif et disponible tant en théorie qu’en pratique à l’époque des faits, c’est-à-dire qu’il était accessible, était susceptible d’offrir au requérant le redressement de ses griefs et présentait des perspectives raisonnables de succès (Akdivar et autres, précité, § 68, et Sejdovic c. Italie [GC], no 56581/00, § 46, CEDH 2006-II).

  54. .  La Cour relève que le requérant a déjà engagé deux actions. Il a, d’abord, saisi les juridictions civiles d’une action en reconnaissance de son droit de propriété sur le terrain, le 7 juillet 1989. Statuant en deuxième instance, la cour d’appel d’Egée l’a débouté en constatant que la transcription ne produisait aucun effet faute pour le requérant de l’avoir fait rapporter sur son fichier immobilier. En l’absence de cette nécessaire formalité, le transfert de la nue-propriété au requérant n’avait jamais eu lieu.

  55. .  La lecture combinée de l’article 1194 du code civil et des dispositions pertinentes de la loi no 4201/1961 modifiant et complétant le statut du bureau des hypothèques de l’Etat ne laissait pas de doute à ce sujet : tout acte faisant l’objet d’une transcription devait être rapporté non seulement sur le registre des transcriptions mais aussi, à l’occasion de la vente d’un bien immeuble, sur les fichiers immobiliers du vendeur et de l’acheteur, ce qui n’avait pas été le cas en l’espèce. Le rapport de l’inscription sur le fichier immobilier du requérant ayant été effectué postérieurement au transfert de propriété du même terrain d’abord au frère de V.G. en 1983, puis à l’enfant et au petit-enfant du premier en 1985 (et à la transcription complète de ce transfert), il ne pouvait pas rendre rétroactivement valide l’acquisition de la nue-propriété du terrain en vertu du contrat du 6 août 1982.

  56. . Le requérant a, ensuite, saisi le 21 mai 1997 les juridictions administratives d’une action en dommages-intérêts contre l’Etat, en vertu des articles 105 et 106 de la loi d’accompagnement du code civil. Dans son action, il sollicitait la somme de 29 millions de drachmes (85 106 EUR) à titre de dommages-intérêts pour la perte de ses droits de propriétaire sur le terrain litigieux en raison de l’omission alléguée de l’employé du bureau des hypothèques.

  57. .  Statuant en dernier ressort, le Conseil d’Etat a rejeté l’action du requérant pour défaut de compétence des juridictions administratives. Il a considéré qu’en attendant que les juridictions civiles se prononcent sur la question de la propriété du terrain litigieux, rien n’empêchait le requérant de saisir aussi les juridictions civiles d’une action en indemnisation contre le bureau des hypothèques, sur le fondement de l’article 105 de la loi d’accompagnement du code civil. Selon le Conseil d’Etat, la prétention du requérant avait pris naissance et était devenue exigible avant le 11 juin 1985, date fixée par l’article 9 de la loi no 1406/1983 comme celle à partir de laquelle les juridictions administratives devenaient compétentes pour connaître des litiges relatifs à la responsabilité pécuniaire de l’Etat, de communes ou d’autres personnes de droit public, conformément aux articles 105 et 106 de la loi d’accompagnement du code civil. La prétention du requérant était devenue exigible, conformément à l’article 9 § 2 de la loi no 1406/1983, le 26 novembre 1982, date de la transcription sur le registre des hypothèques, ou, au plus tard, le 26 janvier 1983, date à laquelle V.G. a transféré la propriété à son frère. Le Conseil d’Etat a aussi affirmé que c’était à partir de la dernière date susmentionnée, et non de celle de l’arrêt de la cour d’appel d’Egée, que la prétention du requérant relative à la réparation du dommage résultant de la perte de la nue-propriété était née et devenue exigible par voie judiciaire.

  58. .  La Cour rappelle qu’il ne lui incombe pas normalement de se substituer aux juridictions internes. C’est au premier chef aux autorités nationales, notamment aux cours et tribunaux, qu’il appartient d’interpréter la législation interne. Le rôle de la Cour se limite à vérifier la compatibilité avec la Convention des effets de pareille interprétation (Waite et Kennedy c. Allemagne [GC], no 26083/94, § 54, CEDH 1999-I ; Korbely c. Hongrie [GC], no 9174/02, § 72, CEDH 2008). La Cour ne peut apprécier elle-même les éléments de fait ayant conduit une juridiction nationale à adopter telle décision plutôt que telle autre, sinon, elle s’érigerait en juge de troisième ou quatrième instance et elle méconnaîtrait les limites de sa mission (Perlala c. Grèce, no 17721/04, § 25, 22 février 2007).

  59. .  La Cour considère cependant essentiel d’examiner si le requérant avait été en mesure de saisir les juridictions qui auraient pu remédier à la situation dont il se plaignait, compte tenu notamment de son allégation selon laquelle il n’avait pris connaissance de l’omission de l’employé que dans le courant de l’été 1988 et n’était donc pas informé des complications survenues lors de la transcription de son contrat.

  60. .  La Cour convient avec le Gouvernement que le requérant aurait pu et dû introduire devant les juridictions civiles une action en dommages-intérêts contre l’Etat et ceci pour les raisons exposées par le Conseil d’Etat.

  61. .  A supposer même que le requérant, assisté d’un avocat tout au long de la procédure, ait eu connaissance du caractère invalide du transfert de propriété seulement au cours de l’été 1988, comme il le prétend, il était encore en mesure de saisir les juridictions civiles d’une action en dommages-intérêts contre l’Etat. En 1988, il n’ignorait sans doute pas l’article 9 de la loi no 1406/1983.

  62. .  Il lui était enfin toujours possible - comme le soutient le Gouvernement sans être contredit par le requérant - de saisir également ces juridictions en vertu de l’article 41 de la loi no 3659/2008 (paragraphe 33 ci-dessus) dans le délai, certes bref, qui s’est écoulé entre la notification de l’arrêt du Conseil d’Etat (le 11 mars 2008) et l’entrée en vigueur de cet article (le 5 mai 2008). Le Conseil d’Etat ne s’étant pas prononcé sur la question de la prescription de la prétention du requérant, les juridictions civiles auraient été amenées, dans le cadre de ces recours, à trancher, en application de l’article 284 du code de procédure civile (paragraphe 32 ci-dessus), la question incidente de la propriété du terrain litigieux.

  63. .  Il est vrai que cette action s’ajoute aux deux actions déjà introduites par le requérant. La Cour note à cet égard que le requérant, qui était représenté par un avocat, ne pouvait pas ignorer que l’action en reconnaissance de propriété n’avait pratiquement pas de chances d’avoir une issue favorable. En effet, selon le droit interne pertinent, la seule transcription du contrat de vente d’un bien immeuble sur le registre des hypothèques n’était pas suffisante pour que le transfert de propriété fût réalisé. La Cour estime donc que le requérant a fait preuve d’une certaine négligence en omettant de s’assurer que toutes les opérations afférentes au transfert effectif de propriété aient été réalisées, de sorte qu’il ne peut désormais se plaindre d’une situation qu’il a lui-même contribué à créer par sa propre inaction (Freimanis et Līdums c. Lettonie, nos 73443/01 et 74860/01, 9 février 2006 ; Hussin c. Belgique (déc.), n70807/01, 6 mai 2004 ; McDonald c. France (déc.), no 18648/04, 29 avril 2008 et Schadel c. France (déc.), no 14599/06, 25 septembre 2008).

  64. .  Par conséquent, la Cour estime que le requérant n’a pas utilisé le ou les recours adéquats susceptibles de lui offrir le redressement de ses griefs et présentant des perspectives raisonnables de succès.

  65. .  Partant, les griefs formulés sur le terrain des articles 6 § 1 de la Convention et 1 du Protocole no 1 doivent être rejetés, conformément à l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention, pour non-épuisement des voies de recours internes.
  66. II.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION EN CE QUI CONCERNE LA DURÉE DE LA PROCÉDURE


  67. .  Le requérant allègue que la durée de la procédure civile et de la procédure administrative a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
  68. « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »


  69. .  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.
  70. A.  Sur la recevabilité


  71.   La Cour note que pour autant que ce grief est dirigé contre la procédure civile, celui-ci est tardif, cette procédure ayant pris fin le 23 mai 1996. Or, la Requête a été introduite le 1er août 2008.

  72. .  Il s’ensuit que cette partie du grief doit être déclarée irrecevable pour non-respect du délai de six mois et rejetée en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

  73. .  La Cour constate, en outre, que pour autant que ce grief vise la procédure administrative, il n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. Elle relève en outre qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.
  74. B.  Sur le fond


  75. .  La période à prendre en considération a débuté le 21 mai 1997, avec la saisine du tribunal administratif de Lesvos, et pris fin le 11 mars 2008, avec la notification de l’arrêt du Conseil d’Etat au requérant. Elle a donc duré dix ans et dix mois environ pour trois degrés de juridiction.

  76. .  La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par sa jurisprudence, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes ainsi que l’enjeu du litige pour les intéressés (voir, parmi beaucoup d’autres, Frydlender c. France [GC], no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII).

  77. .  La Cour note que si la durée de la procédure devant le tribunal administratif de Lesvos est raisonnable, celle devant la cour administrative d’appel s’est étalée sur deux ans et six mois environ, durée pour laquelle le Gouvernement ne fournit aucune explication. Mais surtout, la Cour note que le Conseil d’Etat a mis cinq ans environ pour juger l’affaire du requérant, après avoir reporté l’audience d’office à cinq reprises. Par ailleurs, le Conseil d’Etat a rendu son arrêt un an et quatre mois après l’audience.

  78. .  Au vu de ce qui précède, la Cour estime qu’en l’espèce la durée de la procédure litigieuse est excessive et ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable ».
  79. Partant, il y a eu, sur ce point, violation de l’article 6 § 1.

    III.  SUR LES AUTRES VIOLATIONS ALLÉGUÉES


  80. .  Dans sa Requête, le requérant se plaint aussi d’une atteinte au principe de l’égalité des armes, sans pour autant étayer son grief.

  81. .  Il s’ensuit que ce grief du requérant est manifestement mal fondé et qu’il doit être rejeté, en application de l’article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention.
  82. IV.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

    67.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,

    « Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »


  83. .  La Cour constate que le requérant, qui a soumis des observations en réponse à celles du Gouvernement, n’a pas déposé des prétentions au titre de l’article 41 comme il était invité à le faire. Partant, la Cour estime ne devoir lui accorder aucune somme à ce titre.
  84. PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

    1.  Déclare la Requête recevable quant au grief tiré de l’article 6 § 1 de la Convention en ce qui concerne la durée de la procédure et irrecevable pour le surplus ;

     

    2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention.

    Fait en français, puis communiqué par écrit le 10 octobre 2013, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

    André Wampach                                                                 Elisabeth Steiner
      Greffier adjoint                                                                        Présidente


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