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European Court of Human Rights


You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> SAVDA v. TURKEY (No. 2) - 2458/12 (Judgment (Merits and Just Satisfaction) : Court (Second Section)) French Text [2016] ECHR 1000 (15 November 2016)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2016/1000.html
Cite as: [2016] ECHR 1000

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    DEUXIÈME SECTION

     

     

     

     

     

     

     

    AFFAIRE SAVDA c. TURQUIE (No 2)

     

    (Requête no 2458/12)

     

     

     

     

     

     

     

     

    ARRÊT

     

     

    STRASBOURG

     

    15 novembre 2016

     

     

     

     

    Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

     


    En l’affaire Savda c. Turquie (no 2),

    La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

              Julia Laffranque, présidente,
              Işıl Karakaş,
              Nebojša Vučinić,
              Paul Lemmens,
              Ksenija Turković,
              Jon Fridrik Kjølbro,
              Stéphanie Mourou-Vikström, juges,
    et de Stanley Naismith, greffier de section,

    Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 11 octobre 2016,

    Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

    PROCÉDURE

    1.  À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 2458/12) dirigée contre la République de Turquie et dont un ressortissant de cet État, M. Halil Savda (« le requérant »), a saisi la Cour le 9 août 2011 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

    2.  Le requérant a été représenté par Me K. Doğru, avocat à Istanbul. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent.

    3.  Devant la Cour, le requérant alléguait que sa condamnation en raison de sa lecture d’une déclaration de presse soutenant les objecteurs de conscience et appelant à se soustraire aux obligations militaires a constitué une atteinte à son droit à la liberté de conscience et à son droit à la liberté d’expression.

    4.  Le 19 mai 2014, le grief concernant l’atteinte à la liberté d’expression a été communiqué au Gouvernement. La requête a été déclarée irrecevable pour le surplus conformément à l’article 54 § 3 du règlement de la Cour.

    EN FAIT

    A.  Les circonstances de l’espèce

    5.  Le requérant est né en 1974 et réside à Istanbul.

    6.  Le 1er août 2006, à 13 h 15, un groupe de cinq personnes, membres de la Plateforme antimilitariste (« la plateforme »), se réunit devant le Consulat d’Israël, à Istanbul, en soutien aux objecteurs de conscience israéliens. Au cours de ce rassemblement, le requérant, membre actif de la plateforme, lut une déclaration destinée à la presse, intitulée « Nous sommes solidaires avec les objecteurs de conscience israéliens ». La teneur de la déclaration était la suivante :

    « Amir Paster a été condamné à une peine d’emprisonnement de vingt-huit jours pour avoir dit : « Je ne voudrais pas prendre part aux opérations qui nuisent aux civils au Liban. » (...) Partout dans le monde, les souverains forcent les peuples à s’entretuer [et] tentent d’intimider par des menaces de peines d’emprisonnement ceux qui refusent de tuer. Il y a tout juste deux jours, une dizaine d’enfants ont été tués sous les bombes lancées par des avions israéliens. Il est possible de mettre fin au conflit, à l’assaut et à l’occupation par des actions et attitudes antimilitaristes. (...) Le moyen d’arrêter la guerre est de refuser d’être sa ressource humaine. Nous serons toujours solidaires avec MM. Itzik Shabbat et Amir Paster. Les antimilitaristes ne se taisent pas et ne se tairont pas. Il faut que M. Paster soit libéré, et il faut mettre fin à l’assaut et à l’intervention déclenchés au Liban.

    Nous invitons tout le monde à se soustraire au service militaire. »

    7.  À une date non précisée, une action pénale fut diligentée contre le requérant. Il lui était reproché d’avoir incité le public à se soustraire au service militaire.

    8.  Le 2 août 2008, le tribunal correctionnel d’Istanbul condamna le requérant à une peine d’emprisonnement de cinq mois sur le fondement de l’article 318 du code pénal, au motif qu’il avait incité le peuple à se soustraire au service militaire par le biais d’une déclaration publique. Dans son jugement, le tribunal soulignait que le requérant était un objecteur de conscience et que, dans sa déclaration de presse, il avait appelé les personnes qui ne s’étaient pas définies comme objecteurs de conscience à se soustraire au service militaire. Il citait la dernière phrase de la déclaration de presse dans les motifs de son jugement.

    9.  Le 30 novembre 2010, la Cour de cassation confirma l’arrêt du tribunal correctionnel, qui devint ainsi définitif.

    10.  Le 21 février 2011, cet arrêt fut notifié au requérant.

    11.  Le dossier ne contient pas d’élément relatif à l’exécution de la condamnation du requérant.

    B.  Le droit et la pratique internes pertinents

    12.  L’article 318 § 1 du code pénal, en vigueur à l’époque des faits, se lisait ainsi :

    Incitation à la désaffection à l’égard du service militaire

    « 1.  Est passible de six mois à deux ans d’emprisonnement quiconque prodigue des encouragements ou des conseils (teşvik veya telkin) ou fait de la propagande en vue d’inciter la population à se soustraire aux obligations militaires. »

    13.  Le nouvel article 318 § 1 du code pénal, tel que modifié le 11 avril 2013, dispose :

    « 1.  Est passible de six mois à deux ans d’emprisonnement quiconque encourage ou incite des soldats déjà incorporés dans l’armée à déserter ou des individus qui sont appelés sous les drapeaux à s’abstenir d’effectuer leur service militaire. »

    14.  À la demande de la Cour, le Gouvernement a soumis des exemples de jurisprudence montrant comment l’ancien article 318 § 1 du CP avait été mis en œuvre par les juridictions internes.

    i.  Les motifs d’un jugement d’acquittement de la 10e chambre du tribunal correctionnel d’Istanbul daté du 16 mai 2013, indiquaient : « (...) les propos de l’accusé traduisent son refus d’effectuer le service militaire et n’appellent pas à une rébellion armée ou à un soulèvement populaire. De même, l’accusé n’appelle pas les soldats sous les drapeaux à déserter ou les appelés à renoncer à se rendre à leur commandement. Certes, les propos en question, qui visent à l’obtention de la reconnaissance du statut d’objecteur de conscience, comportent des critiques sévères, mais ils ne sauraient tomber sous le coup de l’article 318 du code pénal. La demande de reconnaissance du statut d’objecteur de conscience n’est pas visée à l’article 318 § 1. La Convention, ratifiée par la Turquie le 18 mai 1954, reconnaît le statut d’objecteur de conscience, mais laisse aux États membres une marge d’appréciation s’agissant de mettre en pratique ou non ce statut dans leur ordre juridique interne. Pris dans leur ensemble, les propos tenus par l’accusé, même s’ils constituent des critiques sévères, restent dans les limites de la liberté d’expression garantie par l’article 26 de la Constitution et par l’article 10 de la CEDH. (...) »

    ii.  Les motifs d’un jugement d’acquittement rendu le 6 décembre 2012 par la 4e chambre du tribunal correctionnel d’Eskişehir au sujet de personnes accusées d’infraction à l’article 318 § 1 du code pénal indiquaient : « (...) Les propos des accusés ne contiennent aucun appel à la violence et ne portent pas atteinte à la paix sociale. (...) En considération du principe universel selon lequel il est impossible d’imposer à autrui une façon de penser, tel qu’il est matérialisé dans l’article 26 de la Constitution garantissant la liberté de pensée et d’expression, dans l’article 10 de la Convention ainsi que dans les articles 18 et 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, les propos des accusés restent dans les limites de la liberté d’expression. Aussi n’existe-t-il pas d’élément constitutif d’une infraction à l’article 318 § 1 du code pénal (...) »

    iii.  Dans les motifs d’un jugement d’acquittement rendu le 6 décembre 2012 à l’encontre de Halil Savda (le requérant en l’espèce) par la 4e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance d’Eskişehir pour infraction à l’article 318 § 1 du code pénal, le juge s’est exprimé comme suit : « En considération de la terreur dans laquelle la Turquie vit depuis trente ans, la situation géographique du pays et la foi du peuple turc en l’armée revêtent une importance particulière. Cela étant, la Constitution reconnaît la qualité de loi aux conventions internationales. De ce fait, au lieu de tenir compte des législations nationales restreignant la liberté d’expression, il convient de tenir compte des garanties accordées à l’exercice de cette liberté d’abord par l’article 26 de la Constitution puis par les articles 9 et 10 de la CEDH.

    Même si l’accusé avait été mis en cause pour avoir incité le peuple à la désaffection à l’égard du service militaire, ses déclarations restent dans les limites de la liberté d’expression prévue par la Constitution, par les articles 9 et 10 de la Convention et par les articles 18 et 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Ses propos ne contiennent pas d’appel à la violence et d’incitation au crime, et ils restent donc dans les limites de l’expression des idées. »

    iv.  Un jugement d’acquittement rendu le 13 septembre 2012 par le tribunal correctionnel d’Üsküdar (Istanbul) indiquait ce qui suit : « Le jugement de condamnation rendu par le tribunal de première instance a été infirmé par la Cour de cassation pour raison d’incompatibilité légale eu égard à la liberté d’expression garantie par l’article 26 de la Constitution, l’article 10 de la CEDH et sa jurisprudence. Le discours de l’accusé ne constitue pas une infraction ». La Cour de cassation demanda l’acquittement de l’accusé.

    v.  Dans une décision de non-poursuite rendue le 4 mars 2011 par le parquet d’Üsküdar (Istanbul) à la suite d’une plainte pour incitation à la désaffection à l’égard du service militaire, le procureur mentionnait ce qui suit : « Pour que les déclarations de la personne mise en cause soient sanctionnées, elles doivent, à la lumière de la jurisprudence de la Convention, comporter un appel à la violence, et représenter un danger certain et imminent pour la société. Autrement dit, le caractère erroné, choquant, inquiétant, divergent, voire délirant, du discours en question n’ayant pas d’importance, aucun élément constitutif d’un crime ne saurait être reproché à l’intéressé, qui n’a fait qu’exprimer des opinions contraires à celles de la majorité. »

    vi.  Un jugement de condamnation rendu le 15 mars 2011 par le tribunal correctionnel de Nusaybin comportait les éléments suivants : « Le discours de l’accusé mineur a été qualifié dans le cadre de l’article 318 § 1 du code pénal, en raison du lieu dans lequel l’acte incriminé a été commis, du moyen avec lequel il a été réalisé et du but qu’il poursuivait. L’accusé mineur a été condamné à six mois d’emprisonnement. (...) En application de l’article 23 de la loi no 5271, le prononcé de la peine a été suspendu, (...) les voies de recours en opposition restant ouvertes. »

    EN DROIT

    I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 10 DE LA CONVENTION

    15.  Le requérant soutient que sa condamnation au pénal a enfreint les articles 9 et 10 de la Convention. La Cour, maîtresse de la qualification juridique des faits de la cause, estime que le grief du requérant appelle un examen sur le seul terrain de l’article 10 de la Convention, qui se lit comme suit dans ses passages pertinents :

    « 1.  Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière. (...)

    2.  L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime (...) »

    A.  Sur la recevabilité

    16.  Constatant que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

    B.  Sur le fond

    1.  Principes généraux

    17.  Les principes généraux permettant d’apprécier la nécessité d’une ingérence dans l’exercice de la liberté d’expression ont été résumés dans l’arrêt Perinçek c. Suisse ([GC], no 27510/08, §§ 131-136, 196-197 et 204-208, CEDH 2015 (extraits)).

    18.  La nature et la lourdeur des peines infligées sont aussi des éléments à prendre en considération lorsqu’il s’agit de mesurer la proportionnalité de l’ingérence (Perna c. Italie [GC], no 48898/99, § 39, CEDH 2003-V). Une atteinte à la liberté d’expression peut risquer d’avoir un effet dissuasif quant à l’exercice de cette liberté. À cet égard, la Cour a considéré que le caractère relativement modéré d’une sanction, telle une amende, ne saurait suffire à faire disparaître le risque d’un tel effet dissuasif (Morice c. France [GC], n29369/10, § 127, 23 avril 2015).

    2.  Application à la présente espèce des principes susmentionnés

    a)  Sur l’existence d’une ingérence

    19.  La Cour note qu’il ne prête pas à controverse entre les parties que la condamnation litigieuse constituait une ingérence dans le droit du requérant à la liberté d’expression, protégé par l’article 10 § 1 de la Convention.

    b)  Sur la base légale de l’ingérence et le but légitime

    20.  La Cour rappelle avoir déjà noté, dans des arrêts relatifs aux objecteurs de conscience, que le cadre juridique en Turquie n’était pas suffisant pour régir de manière adéquate les situations découlant du refus d’effectuer le service militaire pour des raisons de conviction et qu’il continue d’être insuffisant (Ülke c. Turquie, no 39437/98, § 61, 24 janvier 2006, Feti Demirtaş c. Turquie, no 5260/07, § 111, 17 janvier 2012, Savda c. Turquie, no 42730/05, §§ 97-99, 12 juin 2012, et Buldu et autres c. Turquie, no 14017/08, § 88, 3 juin 2014).

    21.  La Cour considère qu’il n’est nécessaire d’examiner ni la base légale de l’ingérence litigieuse ni l’existence d’un but légitime, en raison des conclusions relatives à la nécessité dans une société démocratique exposées ci-après (voir paragraphe 29 ci-dessous).

    c)  Sur la nécessité dans une société démocratique

    22.  Le requérant soutient que l’ingérence qu’il dénonce a violé son droit à la liberté d’expression. À cet égard, il plaide que, étant lui-même objecteur de conscience, il ne peut qu’appeler personnes concernées à se soustraire au service militaire.

    23.  Le Gouvernement n’a avancé aucun argument sur ce point et s’en remet à la sagesse de la Cour pour apprécier la nécessité de pareille ingérence dans une société démocratique.

    24.  À la demande de la Cour, le Gouvernement a soumis des exemples de jurisprudence afin de montrer quelle application les juridictions nationales avaient faite de l’ancien article 318 du code pénal. La Cour a examiné ces exemples pour clarifier la mise en œuvre de cette disposition. Elle observe que, dans leur grande majorité, les magistrats ont interprété les propos des personnes mises en cause sur la base de l’article 318 du code pénal en respectant la jurisprudence de la Cour et les dispositions de l’article 10 de la Convention. Elle se félicite de cette approche des juges nationaux.

    25.  Dans la présente affaire, la Cour relève que le tribunal d’instance d’Istanbul n’a aucunement cherché à examiner si et dans quelle mesure le requérant avait exercé son droit à la liberté d’expression, et qu’il s’est borné à déclarer les propos en cause contraires à l’article 318 du code pénal tel qu’il était en vigueur à l’époque des faits. Or, la Cour a pu observer dans les autres exemples de jurisprudence nationale que les juges s’étaient livrés à un examen de la compatibilité des propos incriminés en application de l’article 318 avec les exigences de l’article 10 de la Convention.

    26.  En l’espèce, la Cour estime que le fait d’avoir « incit[é] la population à se soustraire aux obligations militaires » ne peut, en soi, suffire à justifier l’ingérence dans le droit du requérant à la liberté d’expression (Onaran c. Turquie, no 65344/01, § 27, 5 juin 2007). Elle observe notamment que, si les propos contenus dans la déclaration litigieuse donnent à l’ensemble une connotation hostile au service militaire, ils n’exhortent pas pour autant à l’usage de la violence, à la résistance armée ou au soulèvement, et qu’ils ne peuvent être vus comme un discours de haine ou un discours ayant une capacité de nuire. Aux yeux de la Cour, ce sont les éléments essentiels qui devraient être pris en considération dans le contexte dans lequel le discours a été prononcé (Bayar et Gürbüz (no 2), no 33037/07, § 29, 3 février 2015, et Perinçek, précité, § 207).

    27.  La Cour note que, le 11 avril 2013, l’article 318 du code pénal a été modifié. Il ressort de la nouvelle rédaction de cette disposition que le législateur national a précisé les éléments incriminables pour couvrir les incitations plus concrètes et tangibles telles qu’« incite[r] des soldats déjà incorporés dans l’armée à déserter ou des individus qui sont appelés sous les drapeaux à s’abstenir d’effectuer leur service militaire » (paragraphe 13 ci-dessus).

    28.  La Cour rappelle que la nature et la lourdeur des peines infligées sont aussi des éléments à prendre en compte lorsqu’il s’agit de mesurer la proportionnalité de l’ingérence.

    29.  Eu égard à tout ce qui précède, la Cour estime que la condamnation du requérant à une peine d’emprisonnement n’était pas « nécessaire dans une société démocratique ».

    30.  Il y a donc eu violation de l’article 10 de la Convention.

    II.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

    31.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,

    « Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

    A.  Dommage

    32.  Le requérant réclame 100 000 euros (EUR) pour préjudice matériel et 100 000 EUR pour préjudice moral. Le requérant ne présente aucune justification pour soutenir sa demande de préjudice matériel.

    33.  Le Gouvernement conteste ces montants, les estimant injustifiés et excessifs.

    34.  La Cour observe que le demande de préjudice matériel du requérant n’est pas étayé, par conséquent, elle rejette cette demande. En revanche, elle considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 2 500 EUR pour dommage moral.

    B.  Frais et dépens

    35.  Le requérant demande également 3 500 EUR pour les frais et dépens engagés devant les juridictions internes et devant la Cour.

    36.  Le Gouvernement indique que le requérant n’a soumis à cet égard aucun document justificatif et il demande à la Cour de rejeter cette demande.

    37.  Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce, eu égard à l’absence de pièces justificatives, la Cour rejette la demande relative aux frais et dépens.

    C.  Intérêts moratoires

    38.  La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

    PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

    1.  Déclare la requête recevable ;

     

    2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 10 de la Convention ;

     

    3.  Dit

    a)  que l’État défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 2 500 EUR (deux mille cinq cents euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral, à convertir dans la monnaie de l’État défendeur, au taux applicable à la date du règlement.

    b)  qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

     

    4.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

    Fait en français, puis communiqué par écrit le 15 novembre 2016, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.

    Stanley Naismith                                                                  Julia Laffranque
            Greffier                                                                              Présidente

     


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