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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Henkel Hellas (Taxation) French text [1999] EUECJ C-350/98 (11 November 1999)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/1999/C35098.html
Cite as: [1999] EUECJ C-350/98

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ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

11 novembre 1999 (1)

«Directive 69/335/CEE - Impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux - Impôt sur la capitalisation des bénéfices non distribués»

Dans l'affaire C-350/98,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Dioikitiko Protodikeio Peiraios (Grèce) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Henkel Hellas ABEE

et

Elliniko Dimosio,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles 4 et 7 de la directive 69/335/CEE du Conseil, du 17 juillet 1969, concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux (JO L 249, p. 25), telle que modifiée par la directive 85/303/CEE du Conseil, du 10 juin 1985 (JO L 156, p. 23),

LA COUR (sixième chambre),

composée de MM. R. Schintgen, président de la deuxième chambre, faisant fonction de président de la sixième chambre, G. Hirsch et H. Ragnemalm (rapporteur), juges,

avocat général: M. N. Fennelly,


greffier: M. H. von Holstein, greffier adjoint,

considérant les observations écrites présentées:

- pour Henkel Hellas ABEE, par Me D. Papadellis, avocat au barreau d'Athènes,

- pour le gouvernement hellénique, par Mmes K. Paraskevopoulou-Grigoriou, mandataire judiciaire au Conseil juridique de l'État, et D. Tsagkaraki, auditeur au service juridique spécial - section de droit européen du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agents,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. D. Gouloussis, conseiller juridique, et Mme H. Michard, membre du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales du gouvernement hellénique, représenté par M. M. Apessos, conseiller juridique adjoint au Conseil juridique de l'État, en qualité d'agent, et de la Commission, représentée par M. D. Gouloussis, à l'audience du 22 juin 1999,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 9 septembre 1999,

rend le présent

Arrêt

  1. Par ordonnance du 29 mai 1998, parvenue à la Cour le 24 septembre suivant, le Dioikitiko Protodikeio Peiraios (tribunal administratif de première instance du Pirée) a posé, en vertu de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), deux questions préjudicielles sur l'interprétation des articles 4 et 7 de la directive 69/335/CEE du Conseil, du 17 juillet 1969, concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux (JO L 249, p. 25), telle que modifiée par la directive 85/303/CEE du Conseil, du 10 juin 1985 (JO L 156, p. 23, ci-après la «directive 69/335»).

  2. Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant la société Henkel Hellas ABEE (ci-après «Henkel Hellas») à l'Elliniko Dimosio (État hellénique) au sujet du paiement d'une imposition sur la capitalisation des bénéfices non distribués.

    La réglementation communautaire

  3. La directive 69/335 vise notamment à harmoniser les éléments qui contribuent à la fixation et à la perception du droit sur les rassemblements de capitaux auquel sont soumis les apports en société dans la Communauté, dans le contexte de la suppression des obstacles fiscaux qui s'opposent à la libre circulation des capitaux (voir, notamment, arrêt du 17 décembre 1998, Codan, C-236/97, Rec. p. I-8679, point 3).

  4. L'article 4, paragraphe 1, de la directive 69/335 fixe la liste des opérations donnant lieu à la perception du droit d'apport. L'article 4, paragraphe 2, premier alinéa, de la directive 69/335 énumère les opérations que les États membres peuvent continuer de soumettre à ce droit dans la mesure où elles étaient taxées au taux de 1 % à la date du 1er juillet 1984. Toutefois, selon l'article 4, paragraphe 2, second alinéa, de la directive 69/335, la République hellénique détermine parmi les opérations énumérées celles qu'elle soumet au droit d'apport.

  5. L'article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la directive 69/335 vise notamment «l'augmentation du capital social d'une société de capitaux par incorporation de bénéfices, réserves ou provisions».

  6. S'agissant du taux d'imposition, l'article 7 de la directive 69/335 dispose:

    «1. Les États membres exonèrent du droit d'apport les opérations ... qui étaient exonérées ou taxées à un taux égal ou inférieur à 0,50 % à la date du 1er juillet 1984.

    L'exonération est soumise aux conditions qui étaient applicables à cette date, pour l'octroi de l'exonération ou, le cas échéant, pour l'imposition à un taux égal ou inférieur à 0,50 %.

    La République hellénique détermine les opérations qu'elle exonère du droit d'apport.

    2. Les États membres peuvent soit exonérer du droit d'apport toutes les opérations autres que celles visées au paragraphe 1, soit les soumettre à un taux unique ne dépassant pas 1 %.

    3. ...»

  7. En vertu de l'article 10, sous a), de la directive 69/335, en dehors du droit d'apport, les États membres ne perçoivent, en ce qui concerne les sociétés, associations ou personnes morales poursuivant des buts lucratifs, aucune imposition, sous quelque forme que ce soit, pour les opérations visées à l'article 4.

    La réglementation nationale

  8. La directive 69/335 a été transposée en droit interne par la loi n° 1676/1986 (FEK A'204/29.12.1986) qui, en son article 21, a fixé le droit d'apport à 1 % de la valeur imposable. Toutefois, en vertu de l'article 22, paragraphe 2, sous b), de cette loi, l'augmentation du capital par incorporation de bénéfices, réserves ou provisions est exemptée du droit d'apport.

  9. L'article 42, paragraphe 6, de la loi n° 2065/1992, applicable dans l'affaire au principal, dispose cependant:

    «Les bénéfices non distribués qui ont été imposés au nom de la personne morale sont, lorsqu'ils sont distribués sous quelque forme que ce soit ou capitalisés à une date postérieure au dépôt du projet de la présente loi au Parlement, soumis à une imposition au taux de 3 % qui ne peut entraîner ni remboursement ni compensation de l'impôt sur le revenu versé au cours de l'exercice de la réalisation de ces bénéfices».

    Le litige au principal

  10. Par délibération de l'assemblée générale des actionnaires du 31 août 1995, Henkel Hellas a procédé à l'incorporation au capital social de bénéfices non distribués déjà imposés à son nom et correspondant aux exercices 1972, 1973 et 1981 à 1989, d'un montant de 215 066 276 GRD.

  11. Henkel Hellas a soumis à l'autorité fiscale des déclarations portant liquidation de l'imposition de 3 % prévue par l'article 42, paragraphe 6, de la loi n° 2065/1992. Dans ces déclarations, elle a formulé une réserve à propos de l'application du droit de 3 % au bénéfice capitalisé, conformément aux dispositions de la législation hellénique.

  12. Dans son recours en annulation de la décision de rejet implicite de ces réserves, introduit devant le Dioikitiko Protodikeio, Henkel Hellas soutient que l'imposition au taux de 3 % frappant l'augmentation de capital par incorporation de bénéfices est directement contraire à la directive 69/335.

  13. S'interrogeant sur la conformité de cette imposition avec la directive 69/335, le Dioikitiko Protodikeio Peiraios a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1) L'imposition appliquée en Grèce en vertu de l'article 42, paragraphe 6, de la loi n° 2065/1992 constitue-t-elle un droit d'apport au sens de l'article 4 de la directive 69/335, du 17 juillet 1969, dans sa version modifiée, compte tenu du fait qu'un tel droit d'apport n'existait pas en Grèce au 1er juillet 1984?

    2) Dans l'affirmative, le taux de cette imposition peut-il, au vu des caractéristiques fiscales particulières à la Grèce, dépasser le taux de 1 % prévu par la directive précitée?»

    Sur la première question

  14. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive 69/335 s'oppose à la perception d'un impôt sur l'incorporation au capital social d'une société de capitaux de bénéfices non distribués, tel que l'impôt en cause au principal.

  15. Le gouvernement hellénique souligne que les dispositions de la loi n° 1676/1986, qui régit l'imposition des rassemblements de capitaux en Grèce, ne prévoient pas d'opération soumise au droit d'apport correspondant à l'augmentation de capital par incorporation de bénéfices, réserves ou provisions visée à l'article 4, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la directive 69/335. En revanche, l'article 22, paragraphe 2, sous b), de la même loi exonérerait expressément les augmentations de capital par incorporation de bénéfices, réserves ou provisions.

  16. Selon ce gouvernement, l'article 42 de la loi n° 2065/1992 concerne uniquement l'imposition directe du revenu et ne se rapporte pas à l'augmentation du capital social des sociétés anonymes, qui reste libre d'imposition. Il présenterait un caractère transitoire en raison de la modification du régime de la perception de l'impôt sur le revenu constitué par les bénéfices des sociétés anonymes, lesquels seraient imposables en tant que tels.

  17. Le gouvernement hellénique soutient donc que l'imposition de 3 % en cause au principal constitue un impôt direct sur le revenu. Or, la directive 69/335 viserait à la suppression des impositions indirectes, autres que le droit d'apport, qui ont les mêmes caractéristiques que ce dernier. Il conviendrait donc de constater que l'harmonisation prévue par la directive 69/335 ne porte pas sur les impôts directs qui, tel l'impôt sur le revenu des sociétés, relèveraient des compétences propres des États membres (arrêt du 26 septembre 1996, Frederiksen, C-287/94, Rec. p. I-4581, point 21).

  18. À cet égard, il convient de souligner, en premier lieu, ainsi que le gouvernement hellénique l'a confirmé, que, lors de la transposition de la directive 69/335 en droit national, la République hellénique a fait usage de la faculté que lui réserve l'article 7, paragraphe 1, dernier alinéa, de celle-ci et a expressément exonéré du droit

    d'apport l'augmentation du capital social d'une société de capitaux par incorporation de bénéfices, réserves ou provisions.

  19. Il convient de constater, en second lieu, que, dans la mesure où un impôt, tel celui en cause au principal, est perçu sur l'incorporation au capital social d'une société de capitaux de bénéfices non distribués, il frappe une des opérations qui, aux termes de l'article 4, paragraphe 2, premier alinéa, de la directive 69/335, peuvent continuer à être soumises au droit d'apport.

  20. Or, d'une part, il résulte d'une jurisprudence constante que la qualification d'une imposition, taxe, droit ou prélèvement au regard du droit communautaire incombe à la Cour en fonction des caractéristiques objectives de l'imposition, indépendamment de la qualification qui lui est donnée en droit national (voir, notamment, arrêt du 13 février 1996, Bautiaa et Société française maritime, C-197/94 et C-252/94, Rec. p. I-505, point 39).

  21. D'autre part, il importe de rappeler que, conformément à l'article 10, sous a), de la directive 69/335, en dehors du droit d'apport, les États membres ne peuvent percevoir aucune imposition, sous quelque forme que ce soit, pour les opérations visées à l'article 4, telle l'augmentation du capital social d'une société de capitaux par incorporation de bénéfices, réserves ou provisions.

  22. Dans ces conditions, force est de conclure que la directive 69/335 interdit à un État membre qui a exonéré du droit d'apport les augmentations du capital social d'une société de capitaux par incorporation de bénéfices, réserves ou provisions de soumettre les mêmes opérations à une autre imposition, quelle que soit la qualification de celle-ci en droit national.

  23. Par conséquent, il y a lieu de répondre à la première question que la directive 69/335 doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à la perception d'un impôt sur l'incorporation au capital social d'une société de capitaux de bénéfices non distribués, tel que l'impôt en cause au principal.

    Sur la seconde question

  24. Eu égard à la réponse donnée à la première question, il n'y a pas lieu d'examiner la seconde question.

    Sur les dépens

  25. 25. Les frais exposés par le gouvernement hellénique et par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

    Par ces motifs,

    LA COUR (sixième chambre),

    statuant sur les questions à elle soumises par le Dioikitiko Protodikeio Peiraios, par ordonnance du 29 mai 1998, dit pour droit:

    La directive 69/335/CEE du Conseil, du 17 juillet 1969, concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux, telle que modifiée par la directive 85/303/CEE du Conseil, du 10 juin 1985, doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à la perception d'un impôt sur l'incorporation au capital social d'une société de capitaux de bénéfices non distribués, tel que l'impôt en cause au principal.

    Schintgen

    Hirsch
    Ragnemalm

    Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 novembre 1999.

    Le greffier Le président de la sixième chambre

    R. Grass J. C. Moitinho de Almeida


    1: Langue de procédure: le grec.


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