BAILII is celebrating 24 years of free online access to the law! Would you consider making a contribution?

No donation is too small. If every visitor before 31 December gives just £1, it will have a significant impact on BAILII's ability to continue providing free access to the law.
Thank you very much for your support!



BAILII [Home] [Databases] [World Law] [Multidatabase Search] [Help] [Feedback]

Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Spain v Commission (Law governing the institutions) French Text [2010] EUECJ T-156/07 (13 September 2010)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2010/T15607_J.html
Cite as: [2010] EUECJ T-156/07, [2010] EUECJ T-156/7

[New search] [Help]


AVIS JURIDIQUE IMPORTANT: The source of this judgment is the web site of the Court of Justice of the European Communities. The information in this database has been provided free of charge and is subject to a Court of Justice of the European Communities disclaimer and a copyright notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.



DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

13 septembre 2010 (*)

« Régime linguistique – Avis de concours généraux pour le recrutement d’administrateurs – Publication dans toutes les langues officielles – Amendements – Règlement n° 1 – Articles 27, 28 et article 29, paragraphe 1, du statut – Article 1er, paragraphes 1 et 2, de l’annexe III du statut – Obligation de motivation – Principe de non-discrimination »

Dans les affaires jointes T-�156/07 et T-�232/07,

Royaume d’Espagne, représenté, dans l’affaire T-�156/07, par M. F. Díez Moreno et, dans l’affaire T-�232/07, par M. Díez Moreno et Mme N. Díaz Abad, abogados del Estado,

partie requérante,

soutenu par

République de Lituanie, représentée par M. D. Kriaučiūnas, en qualité d’agent,

partie intervenante dans les affaires T-�156/07 et T-�232/07,

et par

République hellénique, représentée Mmes S. Vodina et M. Michelogiannaki, en qualité d’agents,

partie intervenante dans l’affaire T-�156/07,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. J. Currall, L. Escobar Guerrero et H. Krämer, puis par MM. Currall, Krämer et J. Baquero Cruz, en qualité d’agents, assistés de Me A. Dal Ferro, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation, d’une part, de l’avis de concours général EPSO/AD/94/07, pour la constitution d’une réserve de recrutement d’administrateurs (AD 5) dans le domaine de l’information, de la communication et des médias (JO 2007, C 45 A, p. 3), et, d’autre part, de l’avis de concours général EPSO/AD/95/07, pour la constitution d’une réserve de recrutement d’administrateurs (AD 5) dans le domaine de l’information (bibliothèque/documentation) (JO 2007, C 103 A, p. 7) ,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. A. W. H. Meij, président (rapporteur), V. Vadapalas et L. Truchot, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 décembre 2009,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        Les articles 12 CE, 253 CE et 290 CE, énoncent :

« Article 12

Dans le domaine d’application du présent traité, et sans préjudice des dispositions particulières qu’il prévoit, est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité.

[…]

Article 253

Les règlements, les directives et les décisions adoptés conjointement par le Parlement européen et le Conseil ainsi que lesdits actes adoptés par le Conseil ou la Commission sont motivés et visent les propositions ou avis obligatoirement recueillis en exécution du présent traité.

[…]

Article 290

Le régime linguistique des institutions de la Communauté est fixé, sans préjudice des dispositions prévues par le statut de la Cour de justice, par le Conseil statuant à l’unanimité. »

2        L’article 22 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée le 7 décembre 2000 à Nice (JO C 364, p. 1), prévoit :

« L’Union respecte la diversité culturelle, religieuse et linguistique. »

3        Les articles 1er à 6 du règlement n° 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), dans leur rédaction applicable à la présente espèce, disposent :

« Article premier

Les langues officielles et les langues de travail des institutions de l’Union sont le bulgare, l’espagnol, le tchèque, le danois, l’allemand, l’estonien, le grec, l’anglais, le français, l’irlandais, l’italien, le letton, le lituanien, le hongrois, le maltais, le néerlandais, le polonais, le portugais, le roumain, le slovaque, le slovène, le finnois et le suédois.

Article 2

Les textes adressés aux institutions par un État membre ou par une personne relevant de la juridiction d’un État membre sont rédigés au choix de l’expéditeur dans l’une des langues officielles. La réponse est rédigée dans la même langue.

Article 3

Les textes adressés par les institutions à un État membre ou à une personne relevant de la juridiction d’un État membre sont rédigés dans la langue de cet État.

Article 4

Les règlements et les autres textes de portée générale sont rédigés dans les langues officielles.

Article 5

Le Journal officiel de l’Union européenne paraît dans les langues officielles.

Article 6

Les institutions peuvent déterminer les modalités d’application de ce régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. »

4        Les articles 27 et 28 et l’article 29, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») ainsi que l’article 1er, paragraphes 1 et 2, de l’annexe III dudit statut énoncent :

« Article 27

Le recrutement doit viser à assurer à l’institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutés sur une base géographique aussi large que possible parmi les ressortissants des États membres des Communautés.

Aucun emploi ne doit être réservé aux ressortissants d’un État membre déterminé.

Article 28

Nul ne peut être nommé fonctionnaire :

[…]

f)      s’il ne justifie posséder une connaissance approfondie d’une des langues des Communautés et une connaissance satisfaisante d’une autre langue des Communautés dans la mesure nécessaire aux fonctions qu’il est appelé à exercer.

Article 29

1. En vue de pourvoir aux vacances d’emploi dans une institution, l’autorité investie du pouvoir de nomination [...] ouvre la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves. La procédure de concours est déterminée à l’annexe III.

Cette procédure peut être ouverte également en vue de constituer une réserve de recrutement.

[…]

ANNEXE III

[…]

Article premier

1. L’avis de concours est arrêté par l’autorité investie du pouvoir de nomination, après consultation de la commission paritaire.

Il doit spécifier :

a)      la nature du concours (concours interne à l’institution, concours interne aux institutions, concours général, le cas échéant, commun à deux ou plusieurs institutions) ;

b)      les modalités (concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves) ;

c)      la nature des fonctions et attributions afférentes aux emplois à pourvoir ainsi que le groupe de fonctions et le grade proposés ;

d)      compte tenu de l’article 5, paragraphe 3, du statut, les diplômes et autres titres ou le niveau d’expérience requis pour les emplois à pourvoir ;

e)      dans le cas d’un concours sur épreuves, la nature des examens et leur cotation respective ;

f)      éventuellement, les connaissances linguistiques requises par la nature particulière des postes à pourvoir ;

g)      éventuellement, la limite d’âge ainsi que le report de la limite d’âge applicable aux agents en fonction depuis au minimum un an ;

h)      la date limite de réception des candidatures ;

i)      le cas échéant, les dérogations accordées en vertu de l’article 28[, sous] a), du statut.

En cas de concours général commun à deux ou plusieurs institutions, l’avis de concours est arrêté par l’autorité investie du pouvoir de nomination visée à l’article 2, paragraphe 2, du statut, après consultation de la commission paritaire commune.

2. Pour les concours généraux, un avis de concours doit être publié au Journal officiel des Communautés européennes, un mois au moins avant la date limite prévue pour la réception des candidatures et, le cas échéant, deux mois au moins avant la date des épreuves.

[...] »

 Antécédents du litige

5        Lors de sa 1 678° réunion, du 10 novembre 2004, la Commission des Communautés européennes a adopté la décision suivante (ci-après la « Décision ») :

« Sur proposition de M. Kinnock, en accord avec M. le Président, la Commission décide que les publications externes au Journal officiel des avis de vacance pour les postes d’encadrement supérieurs se fassent dorénavant en anglais, en français et en allemand, selon les termes repris au document PERS (2004) 203. Cette décision, qui prend effet immédiatement, est limitée à une période se terminant le 31 décembre 2006. ».

6        Les 28 février et 8 mai 2007, l’Office de sélection du personnel des Communautés européennes (EPSO) a publié les avis de concours EPSO/AD/94/07 et EPSO/AD/95/07 (ci-après les « avis de concours litigieux ») dans les seules éditions allemande, anglaise et française du Journal officiel (C 45 A, p. 3, et C 103 A, p. 7), en vue d’établir, d’une part, une liste de réserve destinée à pourvoir des postes vacants au sein des institutions pour des administrateurs (AD 5) dans le domaine de l’information, de la communication et des médias et, d’autre part, une liste de réserve destinée à pourvoir des postes vacants, notamment au sein du Parlement, pour des administrateurs (AD 5) dans le domaine de l’information (bibliothèque/documentation).

7        Le point I A des avis de concours litigieux, régissant les conditions d’admission aux tests d’accès, prévoyait, sous le titre 2 « Connaissances linguistiques », que tous les candidats devaient posséder une connaissance approfondie d’une des langues officielles, en tant que langue principale, et une connaissance satisfaisante de l’allemand, de l’anglais ou du français, en tant que deuxième langue obligatoirement différente de la langue principale. Il était, en outre, prévu sous le même titre que, afin de garantir la clarté et la compréhension des textes à caractère général et des communications adressées aux, ou en provenance des, candidats, les convocations aux différents tests et épreuves ainsi que toute correspondance entre l’EPSO ou le secrétariat du jury et les candidats seraient établies uniquement en allemand, en anglais ou en français. Le point I B des avis de concours litigieux indiquait, en outre, que les tests d’accès se dérouleraient « en allemand, en anglais ou en français ([deuxième] langue […]) ».

8         Le point II A des avis de concours litigieux, relatif à la nature des fonctions et aux conditions d’admission aux concours, prévoyait, sous le titre 3, sous b), « Connaissances linguistiques », que, pour être admis aux épreuves écrites, les candidats devaient posséder une connaissance approfondie d’une des langues officielles, en tant que langue principale, et une connaissance satisfaisante de l’allemand, de l’anglais ou du français, en tant que deuxième langue, obligatoirement différente de la langue principale. Le point II B des avis de concours litigieux prévoyait en outre que les épreuves écrites se dérouleraient « en allemand, en anglais ou en français ([deuxième] langue […]) ».

9        Les 20 juin et 13 juillet 2007, l’EPSO à publié deux amendements aux avis de concours litigieux dans toutes les versions linguistiques du Journal officiel (C 136 A, p. 1, et C 160, p. 14). Dans l’amendement publié le 20 juin 2007, il était indiqué que les candidats devaient posséder, pour le concours EPSO/AD/94/07, soit un diplôme sanctionnant un cycle complet d’études universitaires de trois années dans le domaine concerné, à savoir celui de l’information, de la communication et des médias, soit un diplôme sanctionnant un cycle complet d’études universitaires de trois années dans tout autre domaine, suivi d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans dans un domaine en rapport avec la nature des fonctions. Dans l’amendement publié le 13 juillet 2007, il était indiqué que les candidats devaient avoir, pour le concours EPSO/AD/95/07, un niveau universitaire de trois années dans le domaine de l’information (bibliothèque/documentation) ou un niveau universitaire de trois années suivi d’une qualification spécialisée dans ce domaine et qu’aucune expérience professionnelle n’était exigée. De surcroît, les deux amendements renvoyaient expressément à la version intégrale des avis de concours litigieux publiés dans les éditions allemande, anglaise et française du Journal officiel et ouvraient un nouveau délai de présentation des candidatures aux concours en cause.

 Procédure et conclusions des parties

10      Par requêtes déposées au greffe du Tribunal respectivement les 9 mai et 5 juillet 2007, le Royaume d’Espagne a introduit les recours dans les affaires T-�156/07 et T-�232/07.

11      Par actes déposés au greffe les 6 et 23 juillet 2007, la Commission a demandé au Tribunal de prononcer un non-lieu à statuer s’agissant desdits recours.

12      Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement les 5 octobre et 8 novembre 2007, la République de Lituanie et la République hellénique ont demandé à intervenir au soutien des conclusions du Royaume d’Espagne dans l’affaire T-�156/07. Par ordonnance du 13 décembre 2007, le président de la sixième chambre du Tribunal a admis ces interventions.

13      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 5 octobre 2007, la République de Lituanie a demandé à intervenir au soutien des conclusions du Royaume d’Espagne dans l’affaire T-�232/07. Par ordonnance du 26 novembre 2007, le président de la sixième chambre du Tribunal a admis cette intervention.

14      Par ordonnance du 14 décembre 2007, le président de la sixième chambre du Tribunal a joint les affaires T-�156/07 et T-�232/07 pour la suite de la procédure.

15      Le 15 février 2008, la République de Lituanie a déposé son mémoire en intervention.

16      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, a invité le Royaume d’Espagne, la Commission, la République hellénique et la République de Lituanie à répondre par écrit à une question. Le Royaume d’Espagne et la Commission ont déféré à cette demande.

17      Par lettres respectivement des 20 et 26 novembre 2009, la République de Lituanie et la République hellénique ont fait part de leur intention de ne pas participer à l’audience.

18      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 9 décembre 2009.

19      M. le juge T. Tchipev ayant été empêché de siéger après la clôture de la procédure orale, l’affaire a été réattribuée à M. le président de chambre Meij en tant que juge rapporteur et M. le juge Vadapalas a été désigné, en application de l’article 32, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, pour compléter la chambre.

20      Par ordonnance du 5 juillet 2010, le Tribunal (sixième chambre), dans sa nouvelle composition, a rouvert la procédure orale et les parties ont été informées qu’elles seraient entendues lors d’une nouvelle audience le 2 septembre 2010.

21      Par lettres datées respectivement des 7, 16 et 19 juillet 2010, le Royaume d’Espagne, la Commission, la République de Lituanie et la République hellénique ont informé le Tribunal qu’ils renonçaient à être entendus une nouvelle fois.

22      En conséquence, le président de la sixième chambre a décidé de clore la procédure orale.

23      Le Royaume d’Espagne, soutenu par la République de Lituanie, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les avis de concours litigieux ;

–        condamner la Commission à ce que tous les avis de concours litigieux destinés à pourvoir des postes de la fonction publique communautaire soient publiés au Journal officiel dans toutes les langues.

24      Le Royaume d’Espagne conclut en outre à ce qu’il plaise au Tribunal de condamner la Commission aux dépens.

25      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter les recours ;

–        condamner le Royaume d’Espagne aux dépens.

 En droit

 Sur la demande de non-lieu à statuer

 Arguments des parties

26      La Commission considère que les recours sont devenus sans objet dans la mesure où l’EPSO a réparé l’erreur administrative qu’a constitué la publication des avis de concours litigieux en trois langues seulement en publiant au Journal officiel un amendement pour chacun desdits avis dans toutes les langues officielles. Le libellé des amendements publiés au Journal officiel le 20 juin 2007, pour l’avis de concours EPSO/AD/94/07, et le 13 juillet 2007, pour l’avis de concours EPSO/AD/95/07, préciserait, en substance, que la réouverture du délai de présentation des candidatures n’a aucune incidence sur la situation des candidats déjà enregistrés pour lesdits concours.

27      En substance, le Royaume d’Espagne s’oppose à la demande de non-lieu à statuer formulée par la Commission.

 Appréciation du Tribunal

28      Il convient de constater que le Royaume d’Espagne ne conteste pas l’absence de publication au Journal officiel, dans toutes les langues officielles, d’une information relative à la publication des avis de concours litigieux, mais l’absence de publication intégrale au Journal officiel des avis de concours litigieux dans les langues officielles autres que l’allemand, l’anglais et le français.

29      En outre les deux amendements ne modifient pas l’exigence posée dans les avis de concours litigieux, selon laquelle les candidats doivent choisir leur deuxième langue parmi l’allemand, l’anglais et le français. Ils sont également sans effet sur l’indication, figurant dans les avis de concours litigieux, selon laquelle les épreuves ainsi que les échanges avec les candidats doivent se dérouler uniquement dans ces trois langues.

30      En conséquence, la simple publication au Journal officiel de ces deux amendements aux avis de concours litigieux dans toutes les langues officielles ne prive pas les présents recours de leur objet, dès lors notamment qu’aucune publication intégrale, au Journal officiel, des avis de concours litigieux dans les langues officielles autres que l’allemand, l’anglais et le français, n’a été effectuée.

31      Il s’ensuit que la demande de non-lieu à statuer introduite par la Commission doit être rejetée.

 Sur le fond

32      À l’appui des présents recours, le Royaume d’Espagne invoque, en substance, la violation des articles 12 CE, 253 CE et 290 CE, du règlement n° 1, de l’article 27 du statut, de l’article 1er, paragraphe 2, de l’annexe III du statut, ainsi que des principes de non-discrimination en raison de la langue, de proportionnalité et de sécurité juridique.

 Arguments des parties

33      En premier lieu, le Royaume d’Espagne rappelle que certaines considérations exposées dans les conclusions de l’avocat général M. Poiares Maduro sous l’arrêt de la Cour du 15 mars 2005, Espagne/Eurojust (C-�160/03, Rec. p. I-�2077, points 40 à 49), sont en l’espèce précieuses afin de déterminer les caractéristiques du régime linguistique communautaire.

34      Il en ressortirait que le respect de la diversité linguistique s’impose comme une exigence fondamentale à l’égard de l’ensemble des institutions et des organes communautaires et que les restrictions au principe de la diversité linguistique doivent être limitées et justifiées et ne sauraient porter atteinte à la substance du principe imposant aux institutions le respect et l’usage de toutes les langues officielles.

35      Afin d’évaluer le bien-fondé des restrictions apportées au régime linguistique communautaire, il conviendrait de distinguer trois situations différentes. Premièrement, dans le domaine des communications externes, la diversité linguistique exigerait la plus grande protection, car elle serait liée au principe démocratique de participation effective, à l’accès à la législation de la Communauté et aux institutions qui en sont les auteurs, ainsi qu’aux droits relevant de la citoyenneté européenne. Cette protection supposerait que les difficultés techniques liées au respect du principe soient surmontées par les institutions.

36      Deuxièmement, dans le domaine des relations externes découlant des procédures administratives, la règle serait que la langue de communication doit être celle de l’intéressé en relation avec l’institution. Toutefois, une telle règle admettrait certaines exceptions, qui auraient été circonscrites par la jurisprudence. Tel serait le cas lorsque les intéressés ont été en état de prendre utilement connaissance de la position de l’institution concernée ou lorsqu’il s’agit de personnes qualifiées et intéressées, bénéficiant de ressources cognitives et matérielles qui peuvent leur permettre d’être suffisamment informées.

37      Troisièmement, dans le domaine du fonctionnement interne des institutions, l’article 6 du règlement n° 1 autoriserait les institutions à choisir la langue de communication interne avec leurs agents. Toutefois, ce choix ne saurait aller jusqu’à dissocier entièrement le régime linguistique interne du régime des communications externes des institutions, en particulier dans leurs relations avec les citoyens. Il en résulterait une série de restrictions à l’autonomie fonctionnelle des institutions dans le choix de la langue de communication interne. Ainsi, cette autonomie dans le choix de la langue de communication interne devrait être exercée uniquement dans les limites reconnues par le traité, ainsi que dans le respect de l’équilibre géographique et linguistique de l’Union et du principe de non-discrimination. Ce choix ne devrait pas non plus créer de différences de traitement injustifiées entre les citoyens de l’Union. Le recrutement du personnel d’une institution devrait être organisé sur une base aussi large que possible parmi les ressortissants des États membres. Le choix de la langue de communication interne devrait se fonder sur des considérations objectives, en tenant compte de l’histoire de l’institution, du lieu de son siège, de la nature des fonctions qui lui incombent ou des nécessités de communication externes.

38      En l’espèce, la publication au Journal officiel en seulement trois langues officielles des avis de concours litigieux serait contraire aux articles 1er à 6 du règlement n° 1.

39      Ce choix représenterait une mesure irrationnelle et contraire au principe de proportionnalité, dans la mesure où il octroierait un avantage à un groupe restreint de langues, à savoir l’allemand, l’anglais et le français, en violation de toutes les conditions énumérées ci-dessus, qui représenteraient les éléments constitutifs du régime linguistique communautaire. Même si ce choix avait été fait dans un souci d’économie lié aux difficultés d’organiser les nouveaux concours dans toutes les langues officielles dans une Union élargie à 27, il aurait abouti à conférer un statut privilégié à certaines langues sur la base de critères inconnus. En outre, aucune étude pertinente portant sur différentes possibilités autres que l’imposition d’un système de trilinguisme n’aurait été effectuée et communiquée aux États membres.

40      Le Royaume d’Espagne ajoute qu’il est vrai que l’article 6 du règlement n° 1 permet aux institutions de déterminer les modalités d’application du régime linguistique communautaire dans leurs règlements intérieurs. Toutefois, aucune règle écrite n’indiquerait que l’allemand, l’anglais et le français sont les langues internes de la Commission. En outre, les avis de concours litigieux seraient destinés à pourvoir des postes qui s’adressent à un public extérieur, ce qui ne relèverait pas du régime linguistique communautaire interne, mais du régime linguistique communautaire externe. Le fait que la Commission puisse utiliser un nombre limité de langues dans ses procédures internes ne devrait pas avoir d’incidence sur le régime linguistique des institutions fixé par le Conseil de l’Union en application de l’article 290 CE, ni sur les modalités de recrutement du personnel des institutions. À cet égard, le Royaume d’Espagne rappelle qu’il n’existe pas de « priorités » entre les langues officielles.

41      En deuxième lieu, le Royaume d’Espagne invoque l’incompétence de la Commission pour adopter la Décision, qui serait à l’origine des avis de concours litigieux, en ce que seul le Conseil statuant à l’unanimité, conformément à l’article 290 CE, disposerait de la compétence pour fixer le régime linguistique communautaire ou y déroger.

42      En troisième lieu, le Royaume d’Espagne fait valoir que la publication, au Journal officiel, des avis de concours litigieux en trois langues seulement est contraire à l’article 12 CE. Il serait impossible de savoir pourquoi les publications se feraient en trois langues et non en deux, en quatre ou en une. Cela constituerait, notamment, une violation du principe d’égalité entre langues, impliquant ainsi une violation du principe d’égalité entre les États membres, et aboutirait à une discrimination injustifiée ayant comme conséquence directe la violation de ces mêmes principes d’égalité et de non-discrimination entre les citoyens.

43      En effet, la publication, au Journal officiel, en trois langues, des avis de concours litigieux impliquerait que tous les citoyens qui ne lisent pas l’une des trois versions concernées n’ont pas accès aux informations nécessaires pour concourir aux postes à pourvoir, ce qui reviendrait à leur imposer une charge discriminatoire. En l’espèce, cette publication sélective ferait naître une situation avantageuse injustifiée en faveur des citoyens qui comprennent au moins une des trois langues concernées par rapport aux autres citoyens de l’Union, tout en n’accordant pas la même valeur aux versions linguistiques du Journal officiel.

44      En quatrième lieu, le Royaume d’Espagne considère que la publication sélective au Journal officiel des avis de concours litigieux en trois langues seulement est contraire au principe de sécurité juridique. Ainsi, le fait de permettre uniquement à quelques citoyens de l’Union de prendre connaissance de certains actes communautaires et de dénier ce droit à d’autres citoyens de l’Union créerait une situation d’insécurité juridique, d’incertitude et de doute à l’égard des informations obtenues par ces derniers à la lecture du Journal officiel dans leur propre langue. De surcroît, cette situation créerait deux types de versions du Journal officiel, à savoir une version qui serait réellement fiable et qui représenterait pour les citoyens de l’Union une garantie absolue de connaître tous les actes communautaires susceptibles de leurs conférer des droits et de leur imposer des obligations et celle qui ne le serait pas en ce qu’elle ne permettrait pas à de nombreux citoyens de l’Union d’être informés des actions communautaires.

45      En cinquième lieu, le Royaume d’Espagne soutient que la publication au Journal officiel des avis de concours litigieux en trois langues seulement viole les règles en matière d’accès à la fonction publique. Le statut contiendrait des dispositions visant à fixer les principes régissant le recrutement et la sélection, parmi lesquels figureraient une base géographique aussi large que possible, la non-discrimination et l’impossibilité de réserver des emplois à des ressortissants d’un État membre. Il renverrait à l’article 1er, paragraphe 2, de son annexe III, aux termes duquel, pour les concours généraux, l’avis de concours doit être publié au Journal officiel, paraissant dans toutes les langues officielles. Or, les avis de concours litigieux constitueraient des actes administratifs de portée générale destinés à tous les citoyens, dont la publication, au Journal officiel, dans toutes les langues officielles, serait expressément exigée.

46      Lors de l’audience, le Royaume d’Espagne a fait valoir que la Commission n’avait fourni aucune motivation au sens de l’article 253 CE concernant son choix de publier intégralement au Journal officiel les avis de concours litigieux en seulement trois langues, à savoir l’allemand, l’anglais et le français.

47      La République de Lituanie soutient l’intégralité des arguments du Royaume d’Espagne.

48       La Commission conteste l’ensemble des arguments du Royaume d’Espagne.

 Appréciation du Tribunal

–       Sur le deuxième grief

49      Tout d’abord, il convient de rappeler que les recours sont dirigés contre les avis de concours litigieux et non contre la Décision, qui, selon le Royaume d’Espagne, constituerait le fondement juridique desdits avis.

50      Ensuite, il convient de constater que la Décision ne s’applique pas aux publications externes au Journal officiel d’avis de concours, mais seulement aux publications externes audit Journal d’avis de vacance (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 novembre 2008, Italie/Commission, T-�185/05, Rec. p. II-�3207, point 114).

51      Il s’ensuit que le deuxième grief du Royaume d’Espagne doit être rejeté en raison de son caractère inopérant.

–       Sur les autres griefs

52      En premier lieu, il convient de relever qu’aucune disposition ni aucun principe de droit communautaire n’impose que des avis de concours, tels que ceux en cause en l’espèce, soient systématiquement publiés au Journal officiel dans toutes les langues officielles (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 115).

53      Il est vrai que les postes à pourvoir visés par les avis de concours litigieux sont susceptibles d’intéresser potentiellement des candidats en provenance de tout État membre. Toutefois, ainsi qu’il a déjà été jugé par la Cour, les nombreuses références dans le traité CE à l’emploi des langues, dont, notamment, l’article 290 CE, invoqué par le Royaume d’Espagne et la République de Lituanie, ne peuvent être considérées comme étant la manifestation d’un principe général de droit communautaire assurant à chaque citoyen le droit à ce que tout ce qui serait susceptible d’affecter ses intérêts soit rédigé dans sa langue en toutes circonstances (arrêt de la Cour du 9 septembre 2003, Kik/OHMI, C-�361/01 P, Rec. p. I-�8283, point 82, et arrêt Italie/Commission, précité, point 116).

54      Un tel principe, impliquant l’obligation des institutions de publier systématiquement au Journal officiel des avis de concours dans toutes les langues officielles, ne saurait non plus être déduit du règlement n° 1. Il a ainsi été jugé que ce règlement n’est pas applicable aux relations entre les institutions et leurs fonctionnaires et agents, en ce qu’il fixe uniquement le régime linguistique applicable entre les institutions et un État membre ou une personne relevant de la juridiction de l’un des États membres (arrêts du Tribunal du 5 octobre 2005, Rasmussen/Commission, T-�203/03, RecFP p. I-�A-�279 et II-�1287, point 60, et Italie/Commission, précité, point 117).

55      Les fonctionnaires et autres agents des Communautés, ainsi que les candidats à de tels postes, relèvent de la seule juridiction des Communautés, s’agissant de l’application des dispositions du statut, y compris celles relatives au recrutement au sein d’une institution. En outre, l’article 6 du règlement n° 1 permet expressément aux institutions de déterminer les modalités d’application du régime linguistique dans leurs règlements intérieurs (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 7 février 2001, Bonaiti Brighina/Commission, T-�118/99, RecFP p. I-�A-�25 et II-�97, point 13, et Italie/Commission, précité, point 118).

56      L’assimilation aux fonctionnaires et autres agents des Communautés des candidats à de tels postes, en matière de régime linguistique applicable, trouve sa justification dans le fait que lesdits candidats entrent en relation avec une institution uniquement aux fins d’obtenir un poste de fonctionnaire ou d’agent, pour lequel certaines connaissances linguistiques sont nécessaires et peuvent être exigées par les dispositions communautaires applicables pour pourvoir le poste en cause (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 119).

57      C’est, donc, à tort que le Royaume d’Espagne prétend que les avis de concours litigieux ont été adoptés en violation de l’article 290 CE et du règlement n° 1.

58      En deuxième lieu, il convient de constater que les modalités de publication des avis de concours litigieux ne doivent pas conduire à une discrimination fondée sur la langue entre les candidats (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 127).

59      D’une part, une telle discrimination est interdite expressis verbis par l’article 1er, quinquies, paragraphe 1, du statut, le paragraphe 6 du même article énonçant que, dans le respect du principe de non-discrimination et du principe de proportionnalité, toute limitation à ces principes doit être objectivement et raisonnablement justifiée et doit répondre à des objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 128).

60      D’autre part, l’article 27 du statut s’oppose, lui aussi, à ce que l’administration exige des candidats à un poste une connaissance parfaite d’une langue officielle déterminée, lorsque cette condition linguistique a pour effet de réserver ledit poste à une nationalité déterminée, sans que cela soit justifié par des raisons ayant trait au fonctionnement du service (arrêt de la Cour du 4 mars 1964, Lassalle/Parlement, 15/63, Rec. p. 57, 73 et 74, et arrêt Italie/Commission, précité, points 128 et 129).

61      Il s’ensuit que, si l’administration décide de publier au Journal officiel le texte intégral d’avis de concours pour des postes à pourvoir au sein des institutions uniquement dans certaines langues, elle doit, afin d’éviter une discrimination fondée sur la langue entre les candidats potentiellement intéressés par ledit avis, adopter des mesures appropriées afin d’informer l’ensemble desdits candidats de l’existence de l’avis de concours concerné et des éditions dans lesquelles il a été publié de manière intégrale (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 130).

62      Pour autant que cette condition est remplie, la publication au Journal officiel d’un avis de concours dans un nombre restreint de langues n’est pas susceptible de conduire à une discrimination entre les différents candidats, s’il est constant que ces derniers possèdent une maîtrise suffisante d’au moins une de ces langues, leur permettant de prendre utilement connaissance du contenu dudit avis (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 131).

63      À cet égard, il convient de rappeler la jurisprudence selon laquelle le fait que des documents adressés par l’administration à un de ses fonctionnaires soient rédigés dans une langue autre que la langue maternelle de ce fonctionnaire ou la première langue étrangère choisie par lui n’est constitutif d’aucune violation des droits dudit fonctionnaire, s’il possède une maîtrise de la langue utilisée par l’administration lui permettant de prendre effectivement et facilement connaissance du contenu des documents en question. Cette conclusion est également valable s’agissant d’un acte adressé à l’ensemble des fonctionnaires ou à des candidats à une procédure de sélection, tel qu’un avis de concours (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 132, et la jurisprudence citée).

64      Il y a lieu de rappeler, également, que, eu égard à l’article 28, sous f), du statut, tout candidat à une procédure de recrutement doit justifier une connaissance approfondie d’une des langues officielles et une connaissance satisfaisante d’une autre langue officielle, dans la mesure nécessaire aux fonctions qu’il est appelé à exercer. Il s’agit de connaissances linguistiques minimales nécessaires pour le recrutement de fonctionnaires communautaires, l’administration pouvant, le cas échéant, fixer des conditions linguistiques plus sévères pour le recrutement à un poste déterminé (arrêt Italie/Commission, précité, point 133).

65      Ainsi, lorsque les nécessités du service ou celles de l’emploi l’exigent, l’administration peut légitimement spécifier les langues dont la connaissance approfondie ou satisfaisante est requise. Dans ce dernier cas, la circonstance que le texte des avis de concours concernés soit uniquement disponible dans ces langues n’est pas susceptible de conduire à une discrimination entre les candidats, dès lors qu’ils doivent tous maîtriser au moins l’une de ces langues (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 134).

66      En revanche, la publication au Journal officiel du texte de l’avis de concours uniquement dans certaines langues officielles, alors même que des personnes ayant seulement des connaissances d’autres langues officielles seraient recevables à poser leur candidature, est susceptible de conduire, en l’absence d’autres mesures visant à permettre à cette dernière catégorie de candidats potentiels de prendre utilement connaissance du contenu de cet avis, à une discrimination à leur détriment (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 135).

67      En effet, dans cette hypothèse, les candidats en question se trouveraient dans une position moins avantageuse par rapport aux autres candidats, dès lors qu’ils ne seraient pas en mesure de prendre utilement connaissance des qualifications exigées par l’avis de concours ainsi que des conditions et des règles de la procédure de recrutement. Or, une telle connaissance constitue un préalable nécessaire à la présentation optimale de leur candidature, en vue de maximiser leurs chances d’être retenus pour le poste en cause (voir, par analogie, arrêt Italie/Commission, précité, point 136).

68      En l’espèce, il convient de constater que les avis de concours litigieux ont été publiés, de manière intégrale, dans les seules langues allemande, anglaise et française. Toutefois, deux amendements, informant succinctement le public de l’existence et du contenu des avis de concours litigieux et renvoyant aux éditions allemande, anglaise et française pour obtenir leur texte intégral ont été publiés au Journal officiel dans toutes les langues officielles.

69      Ces deux amendements ont remédié à l’absence de publication au Journal officiel des avis de concours litigieux dans toutes les langues officielles.

70      En effet, les deux amendements reprennent, de manière plus succincte, le contenu desdits avis, notamment certaines conditions d’admission, qui y sont indiquées conformément à l’article 1er de l’annexe III du statut. Ainsi, l’amendement publié le 20 juin 2007, relatif notamment à l’avis de concours EPSO/AD/94/07, précise que les candidats doivent posséder soit un diplôme sanctionnant un cycle complet d’études universitaires de trois années dans le domaine concerné, à savoir celui de l’information, de la communication et des médias, soit un diplôme sanctionnant un cycle complet d’études universitaires de trois années dans tout autre domaine, suivi d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans dans un domaine en rapport avec la nature des fonctions. L’amendement publié le 13 juillet 2007, qui reprend certaines conditions d’admission contenues dans l’avis de concours EPSO/AD/95/07, indique que les candidats doivent également avoir un niveau universitaire de trois années dans le domaine de l’information (bibliothèque/documentation) ou un niveau universitaire de trois années suivi d’une qualification spécialisée dans ce domaine et qu’aucune expérience professionnelle n’est exigée.

71      Les deux amendements précisent également la nature des deux concours, à savoir des concours généraux, leurs modalités, à savoir des concours sur titres et épreuves, ainsi que le groupe de fonctions et le grade proposés. Ils indiquent, enfin, que les délais de présentation des candidatures sont de nouveau ouverts.

72      Au surplus, les deux amendements, publiés dans toutes les langues officielles, renvoient, de manière explicite, aux éditions allemande, anglaise et française du Journal officiel, dans lesquelles les avis de concours litigieux ont été publiés. Ils ont donc permis à toute personne intéressée par les concours en cause, qui devait maîtriser au moins l’une des langues susmentionnées, de prendre connaissance de l’intégralité desdits avis.

73      Certes, les amendements n’ont pas fourni d’autres informations concernant les conditions d’admission à remplir par les candidats ou le déroulement des tests d’accès ainsi que des épreuves écrites et orales. Toutefois, ils ont fourni les informations essentielles sur le contenu des avis de concours litigieux, permettant aux intéressés d’apprécier l’opportunité de faire acte de candidature.

74      Une éventuelle publication intégrale du contenu des avis de concours litigieux dans les autres langues officielles n’aurait présenté aucun intérêt pour les éventuels candidats qui ne maîtrisaient pas l’allemand, l’anglais ou le français, dans la mesure où ils ne remplissaient en toute hypothèse pas les conditions d’admission.

75      Il est vrai qu’aucune règle écrite de droit communautaire n’indique que l’allemand, l’anglais et le français sont les langues internes de la Commission et d’autres institutions ou organes communautaires, comme le soutient le Royaume d’Espagne. Toutefois, une institution ou un organe communautaire peut choisir une ou plusieurs langues sur le plan interne, pour autant que ce choix soit fondé sur des considérations objectives, liées aux besoins fonctionnels spécifiques de l’institution ou de l’organe concerné, compte tenu, notamment, de la diversité du personnel recruté. L’utilisation de plusieurs langues au sein des services de l’institution ou de l’organe concerné peut en effet justifier la connaissance de l’une de ces langues de travail. Dans ce cas, cependant, exiger une connaissance d’une de ces langues apparaît suffisant. En effet, l’exigence d’une connaissance cumulative de différentes langues ne saurait être justifiée par des besoins de communication interne et ne pourrait correspondre qu’à la volonté d’accorder un statut privilégié à certaines langues officielles (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général M. Poiares Maduro sous l’arrêt Espagne/Eurojust, précitées, points 49 et 56).

76      En l’espèce, les deux avis de concours litigieux précisent que, pour être admis à participer aux concours en cause, les candidats doivent posséder une connaissance approfondie d’une des langues officielles et une connaissance satisfaisante, en tant que deuxième langue, de l’allemand, de l’anglais ou du français, étant entendu que les tests d’accès et les épreuves devaient se dérouler dans la deuxième langue, obligatoirement différente de la langue principale.

77      Il convient d’observer que l’exigence de connaissance linguistique inscrite dans les avis de concours litigieux ne porte pas sur l’ensemble des deuxièmes langues, les candidats potentiels à ces concours n’étant tenus de connaître de manière satisfaisante que l’une d’elles.

78      Il convient, en outre, de constater que le Royaume d’Espagne n’a fait état d’aucun élément concret de nature à remettre en cause le choix de l’allemand, de l’anglais et du français en tant que deuxièmes langues.

79      Il résulte de tout ce qui précède que, en publiant au Journal officiel les avis de concours litigieux dans un nombre restreint de langues, la Commission n’a pas violé l’article 12 CE.

80      En outre, il convient de relever que, dans la mesure où la publication intégrale au Journal officiel, en trois langues seulement, des avis de concours litigieux, suivie par la publication des deux amendements, n’est pas de nature à affecter l’accès des personnes intéressées – répondant aux qualifications linguistiques requises – au texte intégral des avis de concours, la circonstance, invoquée par le Royaume d’Espagne, qu’une telle publication octroierait un avantage à un groupe restreint de langues ne permet pas de considérer qu’elle n’est ni appropriée ni nécessaire au regard des finalités d’ordre organisationnel qu’elle poursuit. Elle n’est, dès lors, pas contraire au principe de proportionnalité.

81      L’EPSO n’a pas, non plus, violé l’article 27 du statut, dès lors que les mesures adoptées ne sont pas susceptibles de favoriser, dans le cadre de procédures de recrutement, des candidats de certaines nationalités, à savoir ceux issus des pays de langues allemande, anglaise et française.

82      En publiant au Journal officiel les avis de concours litigieux dans un nombre restreint de langues, L’EPSO n’a pas violé l’article 1er, paragraphe 2, de l’annexe III du statut. En effet, cette disposition ne contient aucune règle imposant la publication au Journal officiel d’un avis de concours dans toutes les langues officielles.

83      En troisième lieu, s’agissant de la violation alléguée du principe de sécurité juridique, il convient de relever que celui-ci exige que tout acte des institutions qui produit des effets juridiques soit clair, précis et porté à la connaissance de l’intéressé, de telle manière que celui-ci puisse connaître avec certitude le moment à partir duquel ledit acte existe et commence à produire ses effets juridiques (arrêt du Tribunal du 3 octobre 2006, Hewlett-Packard/Commission, T-�313/04, non publié au Recueil, point 66).

84      En l’espèce, les avis de concours litigieux ont été portés à la connaissance des intéressés, à savoir les candidats potentiels, par la publication, au Journal officiel, dans toutes les langues officielles, des deux amendements. Les intéressés, en particulier, les candidats potentiels de langue maternelle autre que l’allemand, l’anglais et le français, ont ainsi pu prendre utilement connaissance des conditions de participation aux concours en cause.

85      Il s’ensuit que l’argument du Royaume d’Espagne, tiré de ce que la publication au Journal officiel des avis de concours litigieux en trois langues seulement violerait le principe de sécurité juridique, doit être rejeté.

86      En quatrième lieu, s’agissant de la violation de l’article 253 CE invoquée par le Royaume d’Espagne lors de l’audience, en ce que l’EPSO n’aurait fourni aucune motivation concernant son choix de publier intégralement au Journal officiel les avis de concours litigieux en seulement trois langues, le Tribunal relève que, selon une jurisprudence constante, un défaut de motivation constitue un moyen d’ordre public qui doit être soulevé d’office par le juge communautaire (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 20 février 1997, Commission/Daffix, C-�166/95 P, Rec. p. I-�983, point 24) et qui, par conséquent, peut être invoqué par les parties à tout stade de la procédure (arrêts du Tribunal du 13 décembre 2001, Krupp Thyssen Stainless et Acciai speciali Terni/Commission, T-�45/98 et T-�47/98, Rec. p. II-�3757, point 125, et du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T-�44/00, Rec. p. II-�2223, point 210). Dès lors, la circonstance que le grief tiré d’un défaut de motivation n’a été soulevé par le Royaume d’Espagne que lors de l’audience n’emporte pas la conséquence que le Tribunal ne peut l’examiner en l’espèce.

87      Il ressort du statut que le rôle essentiel de l’avis de concours consiste à informer les intéressés d’une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s’agit, afin de les mettre en mesure d’apprécier, d’une part, s’il y a lieu pour eux de faire acte de candidature et, d’autre part, quelles pièces justificatives sont d’importance pour les travaux du jury et doivent, par conséquent, être jointes aux actes de candidature (ordonnance du Tribunal du 3 avril 2001, Zaur-Gora et Dubigh/Commission, T-�95/00 et T-�96/00, RecFP p. I-�A-�79 et II-�379, point 47). Or, les avis de concours litigieux, tels qu’amendés, remplissent cette fonction essentielle (voir points 62 à 74 ci-dessus).

88      Donc, il n’incombait pas à l’administration de justifier, dans les avis de concours litigieux, le choix des trois langues à utiliser en tant que deuxième langue pour participer aux concours, dès lors qu’il est constant que celui-ci répond à ses exigences internes.

89       C’est par conséquent à tort que le Royaume d’Espagne prétend que les avis de concours litigieux violent l’article 253 CE.

 Sur les dépens

90      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Par ailleurs, aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, dudit règlement, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens.

91      En l’espèce, le Royaume d’Espagne ayant succombé et la Commission ayant conclu à la condamnation de celui-ci aux dépens, il y a lieu de condamner le Royaume d’Espagne à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission. La République de Lituanie et la République hellénique supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Royaume d’Espagne supportera ses dépens ainsi que ceux de la Commission européenne.

3)      La République de Lituanie et la République hellénique supporteront leurs propres dépens.

Meij

Vadapalas

Truchot

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 septembre 2010.

Signatures

Table des matières


Cadre juridique

Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur la demande de non-lieu à statuer

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le fond

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

– Sur le deuxième grief

– Sur les autres griefs

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’espagnol.


BAILII: Copyright Policy | Disclaimers | Privacy Policy | Feedback | Donate to BAILII
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2010/T15607_J.html