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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Merck Sharp & Dohme Corporation (Intellectual property) French Text [2011] EUECJ C-125/10 (09 June 2011)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/C12510_O.html

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AVIS JURIDIQUE IMPORTANT: The source of this judgment is the web site of the Court of Justice of the European Communities. The information in this database has been provided free of charge and is subject to a Court of Justice of the European Communities disclaimer and a copyright notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.



CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES Bot

présentées le 9 juin 2011 (1)

Affaire C-�125/10

Merck Sharp & Dohme Corp., anciennement Merck & Co.,

contre

Deutsches Patent- und Markenamt

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundespatentgericht (Allemagne)]

«Propriété intellectuelle et industrielle – Brevets – Règlement (CEE) n° 1768/92 – Article 13, paragraphe 1 – Certificat complémentaire de protection pour les médicaments – Conditions de délivrance – Règlement (CE) n° 1901/2006 – Article 36 – Prorogation de la durée du certificat complémentaire de protection – Possibilité de délivrer ce certificat dans le cas où la période écoulée entre la date du dépôt de la demande de brevet de base et la date de la première autorisation de mise sur le marché dans la Communauté est inférieure à cinq ans»





1.        Dans la présente procédure préjudicielle, la Cour est invitée à préciser les conséquences de l’adoption du règlement (CE) n° 1901/2006 du Parlement européen et du Conseil (2) sur les conditions de délivrance d’un certificat complémentaire de protection (ci-après le «CCP») destiné à prolonger l’exclusivité d’exploitation d’un médicament conférée par un brevet.

2.        L’élaboration d’un médicament nécessite des recherches longues et coûteuses. Afin de permettre aux laboratoires pharmaceutiques de rentabiliser les investissements nécessaires à ces recherches et, partant, de promouvoir celles-ci, les États membres ont prévu, dans leur droit interne ou, par voie conventionnelle, au niveau européen (3), que les médicaments pouvaient faire l’objet d’un brevet destiné à garantir à leur titulaire un droit exclusif d’exploitation pendant une durée déterminée (4).

3.        Cependant, la commercialisation d’un médicament dans un État membre est subordonnée à l’obtention préalable d’une autorisation de mise sur le marché (ci-après l’«AMM»), délivrée soit par l’autorité compétente de cet État (5), soit, depuis l’entrée en vigueur du règlement (CEE) n° 2309/93 du Conseil (6), par la Communauté européenne (7).

4.        Le délai s’écoulant entre le dépôt d’une demande de brevet et l’obtention d’une AMM peut être relativement long. En effet, alors qu’un brevet pour un médicament doit être demandé très tôt, afin d’éviter tout risque de divulgation ou l’aboutissement de recherches menées en parallèle, l’obtention d’une AMM peut prendre plusieurs années, afin d’accomplir les recherches nécessaires à la vérification de l’efficacité, de la sécurité et de la qualité du produit (8).

5.        La durée utile du monopole d’exploitation conféré par le brevet s’en trouve donc réduite d’autant.

6.        Afin de pallier cet inconvénient de manière uniforme dans les États membres, le législateur communautaire, dans le règlement (CEE) n° 1768/92 du Conseil (9), a prévu la possibilité pour les laboratoires pharmaceutiques d’obtenir un CCP qui, à l’expiration du brevet de base, confère à son titulaire les mêmes droits que ceux attachés au brevet pendant une période destinée à compenser la durée de la procédure d’obtention de l’AMM lorsque celle-ci excède le délai normal estimé à cinq ans.

7.        Le règlement n° 1768/92 prévoit ainsi, à son article 13, que le CCP produit effet au terme légal du brevet pour une durée égale à celle écoulée entre la date du dépôt de la demande de brevet et la date de la première AMM dans la Communauté, réduite d’une période de cinq ans et sans pouvoir excéder cinq ans à compter de la date à laquelle il produit effet.

8.        Le règlement pédiatrique, quant à lui, a pour fait générateur le constat selon lequel de nombreux médicaments étaient mis sur le marché sans avoir fait réellement l’objet d’études en ce qui concerne leurs effets pédiatriques, ce qui ne permettait pas de les employer de manière efficace et sûre pour soigner les enfants.

9.        Le législateur communautaire a donc prévu, dans ce règlement, que, sauf dérogation, un médicament ne pouvait obtenir une AMM qu’après avoir fait l’objet d’études devant permettre de déterminer si et comment il peut être utilisé en pédiatrie.

10.      En contrepartie de la réalisation de ces études supplémentaires, le législateur communautaire a prévu, dans le règlement pédiatrique, que la durée du CCP devait être augmentée de six mois.

11.      Dans la présente affaire, la Cour est interrogée sur le point de savoir si et dans quelle mesure un opérateur économique peut bénéficier de cette prorogation de six mois lorsqu’il s’est écoulé moins de cinq ans entre la demande de brevet et la date d’obtention de l’AMM.

12.      Il s’agit de savoir, en d’autres termes, si un CCP peut être délivré avec une durée négative ou nulle afin de faire courir ladite prorogation de six mois à compter soit du point de départ de cette durée négative, c’est-à-dire antérieurement à la date d’échéance du brevet de base, soit, s’il convient d’arrondir une telle durée négative à zéro, de la date d’échéance du brevet de base.

13.      Dans les présentes conclusions, nous indiquerons que la question posée ne trouve pas de réponse précise dans le contenu et le système du règlement n° 1768/92 et du règlement pédiatrique et qu’elle doit donc être déduite des objectifs qu’ils poursuivent.

14.      Nous exposerons que le règlement n° 1768/92 a pour but de garantir au titulaire d’un brevet une période d’exclusivité d’une durée maximale de quinze ans à compter de l’obtention de l’AMM et que le règlement pédiatrique a pour objet de prolonger de six mois le CCP délivré dans ce but. Nous soutiendrons que l’effet utile de ces deux règlements pris ensemble est de garantir au titulaire d’un brevet une période d’exclusivité de quinze ans et six mois à compter de l’obtention de l’AMM.

15.      Par conséquent, nous proposerons à la Cour de dire pour droit que le titulaire d’un brevet peut bénéficier de la prorogation de six mois instaurée par le règlement pédiatrique lorsqu’il s’est écoulé moins de cinq ans entre la demande de brevet et la date d’obtention de l’AMM, et que cette prorogation doit commencer à courir à compter de la date déterminée en appliquant à la date d’échéance du brevet la valeur négative du CCP.

I –    Le cadre juridique

16.      Le Bundespatentgericht (Allemagne) a visé, dans sa question préjudicielle, le règlement (CE) n° 469/2009 du Parlement européen et du Conseil (10), qui reprend le contenu du règlement n° 1768/92 sans en modifier la substance. Cependant, le règlement n° 469/2009 n’est entré en vigueur que le 6 juillet 2009, soit postérieurement à l’adoption de la décision faisant l’objet du recours dans l’affaire au principal. Le règlement applicable est donc le règlement n° 1768/92.

A –    Le règlement n° 1768/92

17.      Le règlement n° 1768/92 expose, à ses troisième à cinquième considérants, que la période qui s’écoule entre le dépôt d’une demande de brevet pour un nouveau médicament et l’AMM dudit médicament réduit la protection effective conférée par le brevet à une durée insuffisante pour amortir les investissements effectués dans la recherche, ce qui pénalise celle-ci et fait courir le risque d’un déplacement des centres de recherche hors des États membres.

18.      Les huitième et neuvième considérants du règlement n° 1768/92 énoncent:

«considérant que la durée de la protection conférée par le [CCP] doit être déterminée de telle sorte qu’elle permette une protection effective suffisante; que, à [cet] effet, le titulaire, à la fois d’un brevet et d’un [CCP], doit pouvoir bénéficier au total de quinze années d’exclusivité au maximum à partir de la première [AMM], dans la Communauté, du médicament en question;

considérant néanmoins que tous les intérêts en jeu, y compris ceux de la santé publique, dans un secteur aussi complexe et sensible que le secteur pharmaceutique doivent être pris en compte; que, à cet effet, le [CCP] ne saurait être délivré pour une durée supérieure à cinq ans; que la protection qu’il confère doit en outre être strictement limitée au produit couvert par l’[AMM de celui-ci] en tant que médicament».

19.      L’article 3 du règlement n° 1768/92 est intitulé «Conditions d’obtention du [CCP]». Il est rédigé comme suit:

«Le [CCP] est délivré, si, dans l’État membre où est présentée la demande visée à l’article 7 et à la date de cette demande:

a)      le produit est protégé par un brevet de base en vigueur;

b)      le produit, en tant que médicament, a obtenu une [AMM] en cours de validité conformément à la directive 65/65[…] ou à la directive 81/851/CEE [(11)] suivant les cas;

c)      le produit n’a pas déjà fait l’objet d’un [CCP];

d)      l’[AMM] mentionnée au point b) est la première [AMM] du produit, en tant que médicament.»

20.      En vertu des articles 4 et 5 du règlement n° 1768/92, la protection conférée par le CCP ne s’applique qu’au produit couvert par l’AMM du médicament correspondant et comprend les mêmes droits que ceux conférés par le brevet de base.

21.      L’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 1768/92 prévoit que la demande de CCP doit être déposée dans un délai de six mois à compter de la date à laquelle le produit, en tant que médicament, a obtenu l’AMM. Le même article dispose, à son paragraphe 3, que la demande de prorogation du CCP peut être présentée lorsque la demande de CCP est déposée ou qu’elle est à l’examen et que les exigences énoncées à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1768/92 sont respectées. Selon l’article 7, paragraphe 4, de ce même règlement, la demande de prorogation d’un CCP déjà délivré est déposée au plus tard deux ans avant l’expiration du CCP.

22.      L’article 8 du règlement n° 1768/92 énumère les mentions que la demande de CCP doit contenir. Il prévoit, notamment, que, si la demande de CCP contient une demande de prorogation, elle doit inclure une copie de la déclaration attestant la conformité à un plan d’investigation pédiatrique visé à l’article 36 du règlement pédiatrique.

23.      L’article 10 du règlement n° 1768/92, intitulé «Délivrance de [CCP] ou rejet de la demande de [CCP]», énonce:

«1.      Lorsque la demande de [CCP] et le produit qui en fait l’objet satisfont aux conditions prévues par le présent règlement, l’autorité [compétente] délivre le [CCP].

2.      Sous réserve du paragraphe 3, l’autorité [compétente] rejette la demande de [CCP] si cette demande ou le produit qui en fait l’objet ne satisfait pas aux conditions prévues par le présent règlement.

[…]»

24.      L’article 13 du règlement n° 1768/92, intitulé «Durée du [CCP]», dispose:

«1.      Le [CCP] produit effet au terme légal du brevet de base pour une durée égale à la période écoulée entre la date du dépôt de la demande du brevet de base et la date de la première [AMM] dans la Communauté, réduite d’une période de cinq ans.

2.      Nonobstant le paragraphe 1, la durée du [CCP] ne peut être supérieure à cinq ans à compter de la date à laquelle il produit effet.

3.      Les périodes prévues aux paragraphes 1 et 2 sont prorogées de six mois en cas d’application de l’article 36 du règlement [pédiatrique]. Dans ce cas, la période prévue au paragraphe 1 du présent article ne peut faire l’objet que d’une seule prorogation.»

25.      L’article 14, sous a), du règlement n° 1768/92 énonce que le CCP s’éteint «au terme de la durée prévue à l’article 13 [de celui-ci]».

B –    Le règlement pédiatrique

26.      Les vingt-sixième à vingt-huitième considérants du règlement pédiatrique énoncent:

«(26) Dans le cas des produits pour lesquels des données pédiatriques doivent être présentées, si toutes les mesures figurant dans le plan d’investigation pédiatrique approuvé sont réalisées, si le produit est autorisé dans tous les États membres et si des données pertinentes sur les résultats des études sont incluses dans les informations relatives au produit, une récompense devrait être accordée sous la forme d’une prorogation de six mois du [CCP] instauré par le règlement […] n° 1768/92 […]

(27)      Une demande de prorogation du [CCP] en vertu du présent règlement ne devrait être admissible que quand un [CCP] est délivré au sens du règlement […] n° 1768/92.

(28)      Comme la récompense porte sur la réalisation d’études pédiatriques et non la démonstration de la sécurité et de l’efficacité d’un produit auprès de la population pédiatrique, elle devrait être accordée même si l’indication pédiatrique n’est pas autorisée. Toutefois, pour améliorer les informations disponibles sur l’usage de médicaments au sein de la population pédiatrique, il convient d’inclure dans les informations relatives au produit autorisé des données pertinentes concernant son utilisation sur des populations pédiatriques.»

27.      L’article 36 du règlement pédiatrique est rédigé comme suit:

«1.      Lorsqu’une demande présentée conformément à l’article 7 ou 8 comprend les résultats de l’ensemble des études réalisées selon un plan d’investigation pédiatrique approuvé, le titulaire du brevet ou du [CCP] a droit à une prorogation de six mois de la période visée à l’article 13, paragraphes 1 et 2, du règlement […] n° 1768/92.

Le premier alinéa s’applique également lorsque la réalisation du plan d’investigation pédiatrique approuvé n’aboutit pas à l’autorisation d’une indication pédiatrique, mais que les résultats des études effectuées apparaissent dans le résumé des caractéristiques du produit et, le cas échéant, dans la notice du médicament concerné.

[…]

4.      Les paragraphes 1, 2 et 3 s’appliquent aux produits qui sont couverts par un [CCP], conformément au règlement […] n° 1768/92, ou par un brevet ouvrant droit au [CCP]. […]

[…]»

II – Le litige au principal et la question préjudicielle

28.      Merck Sharp & Dohme Corp., anciennement Merck & Co. (ci-après «Merck»), est titulaire d’un brevet européen portant sur des composés inhibiteurs de la dipeptidyl peptidase pour le traitement ou la prévention du diabète. Ce brevet a été demandé le 5 juillet 2002.

29.      Le 14 septembre 2007, Merck a demandé au Deutsches Patent- und Markenamt (Office des brevets et des marques allemand) la délivrance d’un CCP pour la substance pharmaceutique sitagliptine couverte par ledit brevet, le cas échéant pour la forme d’un sel acceptable au niveau pharmaceutique, en particulier pour le phosphate de sitagliptine monohydraté. Elle a indiqué comme date de première AMM, dans l’Union européenne et en Allemagne, le 21 mars 2007, qui est la date de l’autorisation européenne délivrée pour le médicament sous la marque Januvia, médicament contenant la substance sitagliptine phosphate monohydraté.

30.      Cette demande a été rejetée par décision du 1er juillet 2008 au motif qu’il ne s’était écoulé qu’une période de quatre ans, huit mois et seize jours entre la date du dépôt de la demande de brevet de base et celle de la délivrance de la première AMM, de sorte que le calcul de la durée du CCP aurait débouché sur une durée négative de trois mois et quatorze jours.

31.      Merck a introduit un recours contre cette décision devant le Bundespatentgericht.

32.      Elle soutient que la durée du CCP ne fait pas partie des conditions de sa délivrance, que ce CCP doit lui être délivré parce qu’elle remplit toutes les conditions requises à cet effet et que cette délivrance est nécessaire afin de lui permettre de demander ultérieurement une prorogation dudit CCP.

33.      Merck indique qu’un plan d’investigation pédiatrique a été autorisé par l’autorité compétente le 27 mars 2009 et que les études prescrites dans ce plan doivent être achevées avant l’année 2017.

34.      Elle fait valoir que le CCP devrait lui être délivré avec une durée négative ou nulle, afin de faire courir la prorogation de six mois prévue par le règlement pédiatrique à compter soit du 21 mars 2022, soit de la date d’expiration de la validité du brevet de base, le 5 juillet 2022.

35.      La juridiction de renvoi expose que, jusqu’à l’adoption du règlement pédiatrique, il était admis qu’un CCP ne pouvait être délivré que s’il s’était écoulé plus de cinq ans entre la demande de brevet et l’obtention de la première AMM du médicament en question. Elle s’interroge sur le point de savoir si, à la suite de l’entrée en vigueur de ce règlement, il convient de retenir une autre interprétation et de délivrer des CCP d’une durée négative ou nulle.

36.      La juridiction de renvoi souligne, d’une part, que ni le règlement pédiatrique ni le règlement n° 469/2009 n’ont prévu expressément la possibilité de délivrer de tels CCP et que cette solution irait à l’encontre du sens courant du mot «durée» visé à l’article 13 du règlement n° 469/2009.

37.      Elle indique, d’autre part, que cet article 13 ne fait pas partie des conditions de délivrance d’un CCP et que la délivrance de CCP d’une durée négative ou nulle serait conforme à l’objectif poursuivi par le règlement pédiatrique. Elle expose que, si cette interprétation doit prévaloir, il serait encore nécessaire de préciser le point de départ de la prorogation du CCP. Il importerait ainsi de savoir si le délai de six mois doit commencer à courir avant la date d’expiration du brevet, à la date fixée en retenant une valeur négative au CCP, ou bien s’il faut arrondir celle-ci à zéro et faire courir le délai de six mois à compter de la date d’expiration dudit brevet.

38.      La juridiction de renvoi expose, à cet égard, que la situation de la requérante au principal a mis en évidence l’existence de pratiques différentes dans les États membres. Ainsi, les autorités compétentes de la République de Bulgarie, du Royaume des Pays-Bas ainsi que du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord auraient délivré à celle-ci un CCP ayant une durée négative et celles de la République hellénique un CCP de durée nulle. De même, en Estonie et en Lettonie, les décisions refusant l’octroi d’un CCP auraient été annulées par les chambres de recours.

39.      La juridiction de renvoi indique que, au vu de ces considérations, elle a estimé nécessaire de saisir la Cour d’une demande d’interprétation de l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 469/2009. Le Bundespatentgericht pose la question préjudicielle suivante:

«Des médicaments peuvent-ils faire l’objet de la délivrance d’un [CCP] lorsque la période qui s’est écoulée entre le dépôt de la demande du brevet de base et la date de la première [AMM] dans la Communauté est inférieure à cinq ans?»

III – Notre analyse

40.      La juridiction de renvoi a exposé très clairement l’enjeu de la présente procédure préjudicielle. Elle doit déterminer si la requérante dans le litige au principal est en droit d’obtenir un CCP pour le produit en cause alors qu’il ne s’est écoulé que quatre ans, huit mois et seize jours, soit moins de cinq ans, entre la date du dépôt de la demande de brevet de base et celle de la délivrance de la première AMM.

41.      Cette question se pose parce que le règlement pédiatrique fait dépendre l’octroi de la prorogation de six mois du CCP de l’obtention de ce CCP et que, en vertu du règlement n° 1768/92, la durée dudit CCP est égale à la durée de la période écoulée entre la date de la demande de brevet et celle de l’obtention de la première AMM, réduite de cinq ans. Il s’agit donc de savoir si l’octroi de la prorogation prévue par le règlement pédiatrique doit être subordonné à la condition que le titulaire du brevet soit en mesure d’obtenir un CCP d’une durée positive.

42.      En cas de réponse positive à cette interrogation, la requérante au principal ne pourra donc bénéficier d’aucune prorogation des droits exclusifs qui lui sont conférés par son brevet. En revanche, en cas de réponse négative, il convient encore de préciser le point de départ du délai de six mois.

43.      Il faut, en effet, indiquer si ce délai de six mois devra courir à compter de la date déterminée en fonction de la valeur négative du CCP ou bien, en arrondissant celle-ci à zéro, à compter de la date d’échéance du brevet, à savoir, dans la présente affaire, le 5 juillet 2022.

44.      Dans le premier cas de figure, le délai de six mois devra courir à compter du 21 mars 2022 (12), de sorte que les droits exclusifs conférés à la requérante au principal par le brevet de base seront prolongés de deux mois et seize jours après la date d’échéance normale de celui-ci, soit jusqu’au 21 septembre 2022.

45.      Cela signifie, si cette solution était retenue, que le titulaire du brevet de base ne pourrait bénéficier de la prorogation de six mois prévue par le règlement pédiatrique que si la période écoulée entre la date de la demande de brevet et celle de l’obtention de la première AMM est supérieure à quatre ans et six mois.

46.      Dans le second cas de figure, les droits exclusifs de la requérante au principal seront prolongés jusqu’au 5 janvier 2023. Cela signifierait, si cette solution devait être retenue, que le titulaire du brevet pourrait toujours bénéficier de la prorogation prévue par le règlement pédiatrique pour la durée totale de six mois, quelle que soit la durée écoulée entre la date de la demande de brevet et celle de l’obtention de la première AMM.

47.      Afin de pouvoir répondre à ces interrogations, la juridiction de renvoi demande, en substance, si et dans quelle mesure le règlement n° 1768/92, lu à la lumière du règlement pédiatrique, doit être interprété en ce sens que des médicaments peuvent faire l’objet d’un CCP lorsque la période qui s’est écoulée entre le dépôt de la demande de brevet de base et la date de la première AMM dans la Communauté est inférieure à cinq ans.

48.      Les parties qui sont intervenues devant la Cour ont défendu des positions opposées.

49.      Ainsi, les gouvernements hongrois et du Royaume-Uni, comme la requérante au principal, ont invité la Cour à répondre par l’affirmative à la question posée, ces gouvernements précisant également que le délai de six mois devait commencer à courir à compter de la date d’expiration «négative» du CCP.

50.      À l’inverse, les gouvernements français, lituanien et portugais ainsi que la Commission européenne ont soutenu qu’il convenait de répondre par la négative à la question examinée, et ce pour plusieurs motifs fondés sur le libellé des dispositions pertinentes, le système auquel elles se rattachent et les objectifs qu’elles poursuivent.

51.      Concernant, tout d’abord, le libellé des dispositions pertinentes, la Commission fait observer que l’article 13 du règlement n° 1768/92 dispose, à son paragraphe 1, que le CCP «produit effet au terme légal du brevet de base» et, à son paragraphe 2, que la durée d’un tel CCP ne peut être supérieure à cinq ans à compter de la date à laquelle il produit effet, si bien que ce CCP doit avoir nécessairement une durée positive. Le gouvernement français estime également qu’un CCP d’une durée nulle ou négative est inapte à produire un tel effet et, par conséquent, dépourvu de tout objet.

52.      Dans le même sens, le gouvernement portugais fait valoir que l’article 13, paragraphe 3, du règlement n° 1768/92 prévoit la prorogation de six mois du CCP au titre de l’article 36 du règlement pédiatrique, ce qui implique que ce CCP dispose d’une période de validité susceptible d’être prorogée.

53.      Le gouvernement lituanien, quant à lui, soutient, en ce qui concerne les conditions de délivrance du CCP, que celles prévues aux articles 3, 7 et 8 du règlement n° 1768/92 ne sont pas exclusives et qu’il n’y a pas d’obligation d’octroyer ce CCP si ces dernières sont remplies. En outre, l’article 11 dudit règlement prévoirait l’obligation d’indiquer la durée du CCP, de sorte que cette durée devrait être calculée avant la délivrance de celui-ci.

54.      En outre, la Commission souligne qu’aucune des modifications apportées au règlement n° 1768/92 par le règlement pédiatrique ne permettrait de penser que la condition relative à la durée de cinq ans aurait été supprimée. En revanche, il ressortirait du vingt-septième considérant du règlement pédiatrique que la récompense sous forme d’une prorogation de six mois s’inscrirait dans le cadre du système de CCP existant et ne pourrait être accordée que si un CCP au titre du règlement n° 1768/92 a été octroyé. Ladite récompense aurait donc un caractère accessoire.

55.      Concernant, ensuite, le système auquel les dispositions pertinentes se rattachent, selon le gouvernement français et la Commission, l’interprétation systématique de l’article 13 du règlement n° 1768/92 ne saurait remettre en cause l’appréciation selon laquelle un CCP doit avoir une durée positive dans la mesure où ce règlement ne contient aucune indication selon laquelle un CCP pourrait avoir une durée négative.

56.      En outre, les gouvernements lituanien et portugais estiment qu’il n’est pas possible de tirer d’argument convaincant de la position des articles 10, 11 et 13 dudit règlement ni d’en déduire qu’il y a lieu d’apprécier la demande de CCP en plusieurs phases.

57.      Concernant, enfin, les objectifs du règlement n° 1768/92, les gouvernements français et lituanien ainsi que la Commission exposent que ce règlement a pas pour but de compenser non pas toute la durée de la procédure nécessaire à l’obtention d’une AMM, mais seulement celle qui excède cinq ans, et ce afin de garantir l’équilibre entre les intérêts en jeu.

58.      Par conséquent, selon les gouvernements français et lituanien, dans l’hypothèse où la durée de la période entre la demande de brevet et la première AMM serait inférieure à cinq ans, le CCP, s’il était délivré, n’entrerait jamais en vigueur. De même, il serait possible, dans ce cas, de percevoir les revenus produits par la vente du médicament pendant plus de quinze ans après la date de dépôt de la demande de brevet et donc d’amortir les investissements effectués dans la recherche.

59.      Le gouvernement lituanien indique, à cet égard, que la solution inverse créerait une distorsion de concurrence en raison du fait que le titulaire du brevet obtiendrait une longue période de protection.

60.      Nous ne sommes pas convaincu par ces arguments. L’analyse du système du règlement n° 1768/92 et du règlement pédiatrique et plus encore de leurs objectifs nous fait pencher, au contraire, en faveur de la thèse défendue par la requérante au principal ainsi que par les gouvernements hongrois et du Royaume-Uni, selon laquelle un CCP doit pouvoir être délivré lorsqu’il s’est écoulé moins de cinq ans entre la demande de brevet et la date d’obtention de la première AMM. Nous sommes également d’avis, comme ces gouvernements, que la prorogation de six mois doit commencer à courir à compter non pas de la date d’échéance du brevet, mais de la date d’effet du CCP, déterminée en appliquant à ladite date d’échéance la valeur négative de la durée de ce CCP.

61.      Nous fondons notre position sur les considérations suivantes.

62.      À titre liminaire, force est de constater que la question examinée ne trouve pas de réponse claire dans les dispositions du règlement n° 1768/92 et du règlement pédiatrique. En effet, aucune disposition de ces règlements n’indique explicitement si l’obtention d’un CCP d’une durée positive constitue ou non une condition nécessaire de l’octroi de la prorogation de six mois prévue par le règlement pédiatrique. Il convient donc, conformément à la jurisprudence, de déduire la réponse à cette interrogation du système mis en place par lesdits règlements et des objectifs qu’ils poursuivent (13).

63.      Lorsque nous examinons le système du règlement n° 1768/92 et du règlement pédiatrique, il est significatif, à notre avis, que la durée du CCP ne figure pas parmi les conditions d’octroi de la prorogation de six mois instaurée par le règlement pédiatrique, citées aux articles 7 et 8 de ce règlement. La durée du CCP est visée uniquement à l’article 36 dudit règlement qui, rappelons-le, dispose simplement que, lorsqu’une demande présentée conformément à l’article 7 ou 8 du règlement pédiatrique comprend les résultats des études réalisées selon le plan d’investigation pédiatrique approuvé, le titulaire d’un brevet ou d’un CCP a droit à une prorogation de six mois de la période visée à l’article 13 du règlement n° 1768/92.

64.      De même, lorsque nous examinons l’économie du règlement n° 1768/92, nous relevons que la durée du CCP ne figure pas non plus parmi les conditions d’obtention de fond, énumérées à l’article 3 de ce règlement, ou de forme, visées aux articles 7 à 9 dudit règlement. Les règles relatives à la durée du CCP, énoncées à l’article 13 du règlement n° 1768/92, apparaissent également à la suite des dispositions de ce règlement relatives à la délivrance ou au rejet du CCP, contenues à l’article 10 de celui-ci.

65.      Par conséquent, la durée positive du CCP ne peut pas être considérée comme une condition de délivrance de ce CCP requise explicitement par le règlement n° 1768/92. Il s’ensuit qu’aucun enseignement déterminant pour la présente affaire ne peut être tiré du vingt-septième considérant du règlement pédiatrique, selon lequel une demande de prorogation ne devrait être admissible que quand un CCP est délivré au sens du règlement n° 1768/92.

66.      Si, comme la juridiction de renvoi l’a souligné, la délivrance d’un CCP ayant une durée nulle ou négative n’était pas envisageable avant l’entrée en vigueur du règlement pédiatrique, cette non-délivrance s’imposait, à notre avis, non pas à cause d’une véritable interdiction légale, mais pour une simple raison de bon sens, tenant au fait qu’un tel CCP se trouvait dépourvu de toute utilité.

67.      En effet, jusqu’à l’adoption de ce règlement, la seule utilité d’un CCP était de prolonger les droits exclusifs conférés par le brevet de base à son titulaire, ce qui impliquait, bien évidemment, que ce CCP ait une durée positive et, partant, compte tenu des modalités de calcul prévues à l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 1768/92, qu’il se soit écoulé plus de cinq ans entre la demande de brevet et la date d’obtention de la première AMM.

68.      Or, ce n’est plus le cas depuis l’entrée en vigueur du règlement pédiatrique, puisque l’obtention de ce CCP conditionne aussi la possibilité de bénéficier d’une prorogation supplémentaire de six mois et que cette prorogation, tel est l’enjeu de la présente affaire, peut s’appliquer et faire perdurer, pour un temps donné, les droits exclusifs du titulaire du brevet alors même que la durée du CCP est nulle ou négative.

69.      Il ne saurait donc être tiré argument de la pratique antérieure pour répondre à la question posée et, à ce stade de l’analyse, il y a lieu de retenir, selon nous, que le système du règlement n° 1768/92 et du règlement pédiatrique ne s’oppose pas à ce qu’un CCP soit octroyé alors qu’il s’est écoulé moins de cinq ans entre la demande de brevet et la date d’obtention de la première AMM.

70.      L’examen du système de ces règlements laissant ainsi ouverte la question examinée, c’est donc dans les objectifs poursuivis par lesdits règlements qu’il convient d’en trouver la réponse. Nous allons exposer maintenant que ces objectifs justifient clairement, à notre avis, de répondre par l’affirmative à la question posée.

71.      Le règlement n° 1768/92, comme nous l’avons indiqué, a pour objectif de compenser la perte du droit de bénéficier des droits exclusifs d’exploitation pendant la période nécessaire à l’obtention de la première AMM, lorsque cette période excède cinq ans. Il vise également à protéger les intérêts des consommateurs et des systèmes de santé des États membres en assurant que le monopole d’exploitation ainsi garanti n’excède pas ce qui est apparu nécessaire à l’amortissement des investissements et ne retarde pas abusivement le moment où le produit en cause tombe dans le domaine public.

72.      À cet effet, le législateur communautaire a prévu que le titulaire du brevet pouvait obtenir un CCP d’une durée équivalente à la période écoulée entre la demande de brevet et la date d’obtention de la première AMM, réduite de cinq ans, sans que la durée de ce CCP puisse elle-même excéder cinq ans.

73.      Comme il est indiqué au huitième considérant du règlement n° 1768/92, le législateur communautaire a voulu que ce règlement ait pour effet de garantir au titulaire d’un brevet un monopole d’exploitation de quinze ans au maximum à compter de l’obtention de la première AMM du médicament en question.

74.      Le règlement pédiatrique, quant à lui, a pour but, ainsi qu’il est indiqué à son vingt-sixième considérant, d’accorder une récompense sous la forme d’une prorogation de six mois du CCP aux laboratoires qui ont effectué l’ensemble des recherches préconisées dans le plan d’investigation pédiatrique établi pour le produit en cause.

75.      Ce règlement vise donc à compenser par une période d’exclusivité supplémentaire de six mois le coût et les contraintes résultant de l’obligation de soumettre les médicaments à des études additionnelles destinées à évaluer leurs effets pédiatriques.

76.      Lorsque nous examinons les objectifs poursuivis par ces deux règlements ensemble, nous pouvons en déduire que le législateur communautaire a voulu que le titulaire d’un brevet de base puisse bénéficier au total d’un monopole d’exploitation d’une durée totale de quinze ans et six mois, et non pas seulement de quinze ans comme la Commission le soutient. Ainsi, il convient de souligner que, lorsqu’il s’est écoulé plus de cinq ans entre la demande de brevet et l’octroi de la première AMM, l’effet cumulé du règlement n° 1768/92 et du règlement pédiatrique est d’octroyer au titulaire du brevet un monopole de quinze ans et six mois.

77.      Admettre, comme les gouvernements français, lituanien et portugais ainsi que la Commission qu’il n’y a pas lieu d’appliquer la prorogation prévue par le règlement pédiatrique dès lors qu’il s’est écoulé moins de cinq ans entre la demande de brevet et la date d’obtention de la première AMM au motif que l’intéressé, dans cette situation, a bénéficié de quinze ans de monopole d’exploitation a donc pour conséquence de priver ce règlement d’une grande partie de son effet utile.

78.      Cette thèse est également contestable, selon nous, parce qu’elle produit des résultats disproportionnés. En effet, selon que le titulaire du brevet a obtenu son AMM cinq ans plus un jour après la demande de brevet de base ou bien cinq ans après exactement, il pourra bénéficier d’une prorogation de ses droits exclusifs pendant une durée de six mois ou d’aucune prolongation du tout.

79.      Une telle différence de traitement à cause d’un simple écart de 24 heures est, selon nous, réellement excessive. Elle ne correspond pas non plus au système du CCP mis en place par le règlement n° 1768/92, en vertu duquel la durée de cinq ans visée à l’article 13, paragraphe 2, de celui-ci constitue non pas une période incompressible, mais une limite destinée à garantir que le titulaire du brevet pourra bénéficier d’un monopole d’exploitation de quinze ans au maximum à compter de la première AMM.

80.      La mise en œuvre de la prorogation prévue par le règlement pédiatrique doit donc, à notre avis, obéir à la même logique et avoir pour effet que l’application combinée du règlement n° 1768/92 et du règlement pédiatrique ait pour conséquence de garantir au titulaire d’un brevet un monopole d’exploitation de quinze ans et six mois.

81.      En outre, la thèse défendue par les gouvernements français, lituanien et portugais ainsi que la Commission présente encore un inconvénient. L’importance des conséquences économiques qui pourraient résulter, si cette thèse était suivie, d’un simple écart de 24 heures dans la date d’obtention d’une AMM serait susceptible de pousser les laboratoires pharmaceutiques à vouloir retarder cette date d’obtention de l’AMM, ce qui va à l’encontre de la protection de la santé publique. En effet, ainsi qu’il est rappelé au quatrième considérant du règlement pédiatrique, cet intérêt général requiert qu’un médicament soit mis sur le marché et puisse ainsi être utilisé pour soigner les patients dès que possible.

82.      Les objectifs du règlement n° 1768/92 et du règlement pédiatrique conduisent, selon nous, à répondre par l’affirmative à la question posée. Ils permettent également d’apporter les précisions suivantes sur le point de départ de la prorogation de six mois, lorsqu’il s’est écoulé moins de cinq ans entre la demande de brevet et la date d’obtention de la première AMM.

83.      Pour les motifs que nous venons d’exposer, la durée du CCP lorsqu’il s’est écoulé moins de cinq ans entre la demande de brevet et la date d’obtention de la première AMM ne saurait être «arrondie à zéro» pour faire courir le délai de six mois, systématiquement, à partir de la date d’échéance de ce brevet. L’objet du règlement pédiatrique, lu en combinaison avec celui du règlement n° 1768/92, est, comme nous l’avons indiqué, de garantir au titulaire du brevet de base un monopole d’exploitation à compter de la première AMM d’une durée totale maximale de quinze ans et six mois. Il n’a pas pour but de proroger la date d’échéance de tous les brevets d’une durée de six mois.

84.      Une telle prorogation systématique, en effet, compromettrait l’équilibre, voulu par le législateur communautaire, entre, d’une part, l’amortissement des recherches nécessaires à l’élaboration des médicaments et, d’autre part, l’intérêt économique des consommateurs et des systèmes nationaux de sécurité sociale, puisqu’elle pourrait avoir pour effet de conférer des monopoles d’exploitation d’une durée supérieure à cette limite de quinze ans et six mois.

85.      Elle serait également de nature à créer une inégalité de traitement entre les opérateurs économiques, puisque l’application combinée du règlement n° 1768/92 et du règlement pédiatrique n’aurait plus pour effet de soumettre le monopole d’exploitation des titulaires d’un brevet de base à la même durée maximale.

86.      C’est pourquoi nous proposons à la Cour de répondre à la question posée que le règlement n° 1768/92, lu à la lumière du règlement pédiatrique, doit être interprété en ce sens que des médicaments peuvent faire l’objet d’un CCP lorsque la période qui s’est écoulée entre le dépôt de la demande de brevet de base et la date de la première AMM dans la Communauté est inférieure à cinq ans. Dans ce cas, le délai de six mois prévu par le règlement pédiatrique commence à courir à compter de la date déterminée en déduisant de la date d’échéance du brevet la différence entre cinq ans et la durée de la période écoulée entre le dépôt de la demande de brevet et l’obtention de la première AMM.

IV – Conclusion

87.      Au vu des considérations qui précèdent, nous proposons de répondre de la manière suivante à la question posée par le Bundespatentgericht:

«Le règlement (CEE) n° 1768/92 du Conseil, du 18 juin 1992, concernant la création d’un certificat complémentaire de protection pour les médicaments, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1901/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, lu à la lumière du règlement n° 1901/2006, doit être interprété en ce sens que des médicaments peuvent faire l’objet d’un certificat complémentaire de protection lorsque la période qui s’est écoulée entre le dépôt de la demande de brevet de base et la date de la première autorisation de mise sur le marché dans la Communauté européenne est inférieure à cinq ans.

Dans ce cas, le délai de six mois prévu par le règlement n° 1901/2006 commence à courir à compter de la date déterminée en déduisant de la date d’échéance du brevet la différence entre cinq ans et la durée de la période écoulée entre le dépôt de la demande de brevet et l’obtention de la première autorisation de mise sur le marché.»


1 – Langue originale: le français.


2 – Règlement du 12 décembre 2006 relatif aux médicaments à usage pédiatrique, modifiant le règlement (CEE) n° 1768/92, les directives 2001/20/CE et 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004 (JO L 378, p. 1, ci-après le «règlement pédiatrique»).


3 – La convention sur la délivrance de brevets européens a été signée à Munich le 5 octobre 1973 et elle est entrée en vigueur le 7 octobre 1977.


4 – En vertu de l’article 63 de cette convention, la durée du brevet européen est de vingt ans à compter de la date de dépôt de la demande.


5 – Voir article 3 de la directive 65/65/CEE du Conseil, du 26 janvier 1965, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives, relatives aux spécialités pharmaceutiques (JO 1965, 22, p. 369), et article 6 de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO L 311, p. 67).


6 – Règlement du 22 juillet 1993 établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance des médicaments à usage humain et à usage vétérinaire et instituant une agence européenne pour l’évaluation des médicaments (JO L 214, p. 1).


7 – Voir article 3 du règlement n° 2309/93.


8 – Voir Chemtob-Concé, M.-C., «Le certificat complémentaire de protection: un instrument devenu insuffisant pour assurer la rentabilité de l’innovation pharmaceutique», Gazette du Palais, octobre 2008, n° 283, p. 42.


9 – Règlement du 18 juin 1992 concernant la création d’un certificat complémentaire de protection pour les médicaments (JO L 182, p. 1), tel que modifié par le règlement pédiatrique (ci-après le «règlement n° 1768/92»).


10 – Règlement du 6 mai 2009 concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments (JO L 152, p. 1).


11 –      Directive du Conseil du 28 septembre 1981 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux médicaments vétérinaires (JO L 317, p. 1).


12 – Soit la date d’échéance normale du brevet, le 5 juillet 2022, réduite de trois mois et quatorze jours, c’est-à-dire la durée de la période écoulée entre la demande de brevet, le 5 juillet 2002, et celle de la première AMM, le 21 mars 2007, réduite de cinq ans.


13 – Voir, pour un exemple d’interprétation d’une disposition du règlement n° 1768/92 dans sa version initiale en la replaçant dans son contexte et en fonction de son esprit et de sa finalité, arrêt du 11 décembre 2003, Hässle (C-�127/00, Rec. p. I-�14781, point 55).


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