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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Freistaat Sachsen and Land Sachsen-Anhalt v Commission (State aid) French Text [2011] EUECJ C-459/10 (21 July 2011) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/C45910.html Cite as: EU:C:2011:515, ECLI:EU:C:2011:515, [2011] EUECJ C-459/10 |
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ARRET DE LA COUR (sixième chambre)
21 juillet 2011 (*)
«Pourvoi – Aides d’État – Aide en faveur d’un projet de formation concernant certains emplois sur le nouveau centre de DHL à l’aéroport de Leipzig/Halle – Recours en annulation contre la décision déclarant une partie de l’aide incompatible avec le marché commun – Examen de la nécessité de l’aide – Absence de prise en compte des effets incitatifs de l’aide et de ses externalités positives sur le choix du site»
Dans l’affaire C-459/10 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 16 septembre 2010,
Freistaat Sachsen,
Land Sachsen-Anhalt,
représentés par Me A. Rosenfeld, Rechtsanwalt,
parties requérantes,
l’autre partie à la procédure étant:
Commission européenne, représentée par M. B. Martenczuk, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse en première instance,
LA COUR (sixième chambre),
composée de M. A. Arabadjiev (rapporteur), président de chambre, MM. A. Rosas et U. Lõhmus, juges,
avocat général: M. P. Mengozzi,
greffier: M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par leur pourvoi, le Freistaat Sachsen et le Land Sachsen-Anhalt demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 juillet 2010, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission (T-396/08, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté leur recours visant à l’annulation partielle de la décision 2008/878/CE de la Commission, du 2 juillet 2008, relative à l’aide d’État que l’Allemagne envisage d’accorder à DHL (JO L 312, p. 31, ci-après la «décision litigieuse»).
Le cadre juridique
Le règlement (CE) n° 68/2001
2 Le règlement (CE) n° 68/2001 de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l’application des articles 107 et 108 du traité FUE aux aides à la formation (JO L 10, p. 20) a été adopté en vertu du règlement (CE) n° 994/98 du Conseil, du 7 mai 1998, sur l’application des articles 107 et 108 TFUE à certaines catégories d’aides d’État horizontales (JO L 142, p. 1), qui habilite la Commission européenne à déclarer, conformément à l’article 107 TFUE, que les aides à la formation sont, dans certaines conditions, compatibles avec le marché commun et ne sont pas soumises à l’obligation de notification prévue à l’article 108, paragraphe 3, TFUE.
3 Le quatrième considérant du règlement n° 68/2001 prévoit, en substance, que ce dernier n’exclut pas la possibilité pour les États membres de notifier une aide à la formation et que la Commission examinera cette notification notamment à la lumière des critères fixés par ce règlement.
4 Selon l’article 3, paragraphe 1, dudit règlement, les aides individuelles, accordées en dehors de tout régime, qui remplissent toutes les conditions de ce même règlement sont compatibles avec le marché commun au sens de l’article 107, paragraphe 3, TFUE et sont exemptées de l’obligation de notification prévue à l’article 108, paragraphe 3, TFUE.
5 L’article 4 du règlement n° 68/2001 détermine les limites que l’intensité des aides individuelles à la formation doit respecter pour que celles-ci puissent être exemptées de ladite obligation. Conformément à la définition qui figure à l’article 2 de ce règlement, l’intensité d’une aide correspond au montant brut de celle-ci exprimé en pourcentage des coûts admissibles du projet.
6 Selon l’article 5 du règlement n° 68/2001, ladite exemption ne s’applique pas si le montant de l’aide accordée à une même entreprise pour un projet individuel de formation est supérieur à 1 million d’euros. En effet, ainsi qu’il ressort de la seconde phrase du seizième considérant de ce règlement, les aides supérieures à ce montant demeurent soumises aux dispositions de l’article 108, paragraphe 3, TFUE.
Les antécédents du litige
7 DHL est l’un des principaux groupes opérant dans le secteur des colis express. Il est détenu à 100 % par Deutsche Post AG. Après avoir négocié avec plusieurs aéroports, DHL a décidé, au cours de l’année 2005, de déplacer sa plate-forme européenne de fret aérien de l’aéroport de Bruxelles (Belgique) à celui de Leipzig/Halle (Allemagne). DHL y a ainsi construit un nouveau centre logistique de colis express et de fret aérien qui est exploité intégralement depuis le mois d’avril 2008. Dans le cadre de cette implantation, DHL s’est vu attribuer une aide régionale d’un montant de 70,855 millions d’euros, à l’égard de laquelle la Commission, par la décision du 20 avril 2004 concernant l’aide d’État N 608/2003 – Centre logistique aérien pour DHL Airways GmbH à Leipzig/Halle, n’a pas soulevé d’objections.
8 Par lettre du 21 décembre 2006, les autorités allemandes ont notifié à la Commission un projet d’aide à la formation en faveur de DHL. Elles ont ainsi fait part de leur intention de subventionner les mesures de formation que DHL entendait mettre en œuvre pour 485 salariés de son centre de logistique, à concurrence de 7 753 307 euros. Cette aide devait être apportée pour moitié par le Freistaat Sachsen et pour moitié par le Land Sachsen-Anhalt.
9 Par lettre du 27 juin 2007, la Commission a informé la République fédérale d’Allemagne de sa décision d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE. Le 2 juillet 2008, la Commission a adopté la décision litigieuse, dans laquelle elle a constaté que l’aide en cause s’appliquait, d’une part, à des coûts, d’un montant de [confidentiel](1) euros, que DHL devrait de toute façon supporter, même sans cette aide, et, d’autre part, à des coûts, d’un montant de [confidentiel] euros, relatifs à des activités de formation allant au-delà de ce qui était imposé par la loi et de ce qui était nécessaire au fonctionnement de l’entreprise.
10 Par conséquent, la Commission a considéré que la tranche de l’aide qui n’était pas nécessaire pour les mesures de formation en cause ne serait pas investie dans des mesures de formation supplémentaires, mais couvrirait des charges d’exploitation normales de l’entreprise, permettant ainsi de réduire les coûts que celle-ci devait normalement supporter. Elle a donc estimé que cette tranche de l’aide était de nature à fausser la concurrence et à affecter les conditions des échanges et que, par conséquent, elle ne se justifiait pas sur la base de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE. Constatant qu’aucune des autres conditions d’exemption prévues à l’article 107, paragraphes 2 et 3, TFUE, n’était remplie, la Commission a considéré que l’aide de 6 175 198 euros n’était pas compatible avec le marché commun.
11 La Commission a en revanche autorisé les autres mesures notifiées, représentant un montant de [confidentiel] euros.
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
12 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 septembre 2008, le Freistaat Sachsen et le Land Sachsen-Anhalt ont introduit un recours en annulation de la décision litigieuse. À l’appui de ce recours, ils ont soulevé cinq moyens tirés, respectivement, d’une violation du règlement n° 68/2001, de la méconnaissance des externalités positives des mesures de formation en cause, de la méconnaissance des effets incitatifs de l’aide en cause sur le choix du site, de l’application de critères non pertinents pour apprécier le caractère nécessaire de cette aide et, enfin, d’une insuffisance de motivation.
13 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours.
Sur le premier moyen, tiré de la violation du règlement n° 68/2001
14 Aux points 35 à 59 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné puis rejeté le moyen selon lequel, en introduisant le critère de la nécessité de l’aide en cause dans son appréciation de celle-ci, la Commission aurait violé le règlement n° 68/2001. Il a tout d’abord constaté qu’il ressortait du quatrième considérant de ce règlement que la Commission pouvait examiner la compatibilité de l’aide en cause au regard d’autres critères que ceux énoncés dans ce même règlement.
15 Rappelant ensuite que, pour qu’une aide puisse bénéficier d’une des dérogations prévues à l’article 107, paragraphe 3, TFUE, elle doit être non seulement conforme à l’un des objectifs visés à l’article 107, paragraphe 3, sous a à d), TFUE, mais également nécessaire pour atteindre ces objectifs, le Tribunal a constaté qu’une aide permettant de réaliser une formation qui aurait de toute façon été mise en œuvre par l’entreprise bénéficiaire, y compris sans l’obtention de ladite aide, ne saurait être considérée comme «nécessaire». Le Tribunal en a conclu que la Commission a, à juste titre, également apprécié l’aide en cause au regard du critère de nécessité.
16 Concernant les arguments des requérants relatifs à la pratique décisionnelle antérieure de la Commission, le Tribunal a relevé que, selon une jurisprudence constante, c’est dans le seul cadre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE que doit être appréciée la légalité d’une décision de la Commission constatant qu’une aide ne répond pas aux conditions d’application de la dérogation prévue à cette disposition, et non au regard d’une pratique décisionnelle antérieure, à supposer celle-ci établie.
Sur le troisième moyen, tiré de la méconnaissance des effets incitatifs de l’aide en cause sur le choix du site
17 Au terme de son raisonnement effectué aux points 75 à 98 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le moyen tiré de la méconnaissance des effets incitatifs de l’aide en cause sur le choix du site après avoir constaté que l’objectif des aides à la formation est non pas d’influencer le choix du site d’implantation d’une entreprise, mais d’améliorer la qualification des travailleurs. Il a donc rejeté l’argument selon lequel la limitation de l’appréciation de l’aide en cause à la situation de DHL après le choix du site de l’aéroport de Leipzig/Halle est illicite et méconnaît le fait que cette aide était nécessaire pour que DHL s’installe sur ce site.
18 Le Tribunal a ensuite constaté que la Commission ne s’est référée qu’à la nécessité de procéder à des formations indépendamment du site choisi et non au fait de supporter des coûts de formation comparables sur d’autres sites. Il en a déduit que l’argument relatif à cet examen devait être écarté comme étant inopérant et, en tout état de cause, à titre surabondant, comme non fondé, les requérants n’ayant apporté aucun élément permettant de démontrer que la Commission aurait à tort considéré que DHL aurait dû organiser les activités de formation pour son nouveau centre en dehors de Bruxelles, indépendamment du site choisi.
Sur le quatrième moyen, tiré de l’application de critères non pertinents pour apprécier le caractère nécessaire de l’aide en cause
19 Au terme de son raisonnement effectué aux points 105 à 120 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le quatrième moyen, tiré de l’application de critères non pertinents pour apprécier le caractère nécessaire de l’aide en cause, en rappelant que, lorsque la Commission examine la compatibilité d’une aide d’État avec le marché commun, elle doit prendre en compte tous les éléments pertinents. Il en a déduit qu’il était loisible à la Commission de prendre en considération les éléments de fait concrets relatifs au bénéficiaire de l’aide en cause, et notamment sa pratique et sa stratégie commerciales. Le Tribunal a, à cet égard, considéré que ces éléments sont pertinents pour apprécier le caractère nécessaire de ladite aide.
20 Le Tribunal a par ailleurs considéré que la Commission avait pu, à bon droit, estimer que certaines des mesures de formation en cause étaient imposées par la stratégie ou la pratique interne de DHL ou par Deutsche Post AG, de sorte qu’elles auraient été mises en œuvre même sans l’aide en cause. Il a jugé que c’était également à bon droit que, s’agissant de certaines formations non imposées par la loi, la Commission a relevé que DHL avait l’intention de fournir elle-même les services liés à l’exploitation de son centre logistique et que les autorités allemandes n’avaient pas apporté la preuve que DHL ne dispenserait pas ces formations en l’absence d’aide.
21 En outre, le Tribunal a estimé que c’est à bon droit que la Commission a pris en compte, dans le cadre de l’examen du critère de la nécessité de l’aide en cause, l’existence d’une législation nationale imposant la formation du personnel, car dans un tel cas, les entreprises sont obligées de mettre en œuvre les mesures de formation et ne peuvent pas sous-investir dans celle-ci. Le Tribunal a donc rejeté l’argument selon lequel l’approche de la Commission ne viserait pas à augmenter le niveau général de formation et serait contradictoire avec l’objectif du règlement n° 68/2001. Le Tribunal a, en outre, rejeté l’argument tiré de ce que l’entreprise bénéficiaire subirait une discrimination ou une pénalisation injustifiée.
Sur le deuxième moyen, tiré de la méconnaissance des externalités positives des mesures de formation en cause
22 Au terme de son raisonnement effectué aux points 126 à 137 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le deuxième moyen, tiré de la méconnaissance des externalités positives des mesures de formation en cause, au motif qu’une aide à la formation qui produit des effets positifs externes ne saurait être considérée comme compatible avec le marché commun si elle ne remplit pas le critère de la nécessité. Il a relevé à cet égard qu’il ressort de l’examen des premier, troisième et quatrième moyens, qu’aucun élément ne permet de considérer que c’est à tort que la Commission a estimé qu’une partie de l’aide en cause n’était pas nécessaire. Partant, le Tribunal a considéré que la Commission a pu, à bon droit, ne pas examiner si ladite aide était créatrice d’externalités positives, celle-ci ne remplissant pas le critère de la nécessité, et a jugé qu’il ne saurait être inféré du règlement n° 68/2001 que l’existence d’externalités positives impliquerait automatiquement la compatibilité d’une aide à la formation avec le marché commun.
Sur le cinquième moyen, tiré d’une insuffisance de motivation
23 Aux points 143 à 154 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le cinquième moyen, tiré d’une insuffisance de motivation, en considérant que la décision litigieuse expose à suffisance de droit les raisons pour lesquelles la Commission a appliqué le critère de la nécessité aux fins d’apprécier la compatibilité de l’aide en cause avec le marché commun. S’agissant de l’argument selon lequel le prétendu changement de pratique de la Commission, en ce qui concerne la prise en compte des externalités positives, aurait dû être motivé, le Tribunal a relevé que, puisqu’une partie de cette aide ne pouvait être autorisée dans la mesure où le critère de la nécessité n’était pas satisfait, la Commission n’avait pas à examiner la question des externalités positives de ladite aide, ni par conséquent à justifier un prétendu changement de pratique à cet égard.
Les conclusions des parties devant la Cour
24 Les requérants demandent à la Cour de déclarer leur pourvoi recevable et fondé, d’annuler l’arrêt attaqué et d’annuler partiellement la décision litigieuse ou, à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal.
25 La Commission demande à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner les requérants aux dépens.
Sur le pourvoi
26 À l’appui de leur pourvoi, les requérants soulèvent quatre moyens relatifs à des erreurs de droit qu’aurait commis le Tribunal dans son examen de la décision litigieuse.
Sur le premier moyen, tiré d’une appréciation erronée du caractère nécessaire de l’aide en cause
27 Les requérants reprochent au Tribunal, premièrement, d’avoir violé le quatrième considérant, la seconde phrase du seizième considérant et l’article 5 du règlement n° 68/2001. S’agissant d’aides non exemptées de l’obligation de notification à la Commission, ce règlement exclurait non pas son application en général, mais seulement l’exemption de cette obligation. Les requérants déduisent du quatrième considérant du règlement n° 68/2001 que des mesures non exemptées de ladite obligation doivent être examinées, prioritairement, à la lumière des critères de droit matériel fixés par ce règlement, à défaut d’une justification tirée des particularités du cas d’espèce, ce que ni le Tribunal ni la Commission n’ont relevé. Les requérants rappellent à cet égard que ces critères, qui ne prévoient pas que soit appréciée la nécessité des aides, étaient en l’espèce remplis.
28 Deuxièmement, les requérants reprochent au Tribunal d’avoir violé l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE en s’abstenant d’examiner si les aides à la formation contribuent, ou peuvent contribuer, par leurs effets positifs, à la réalisation des objectifs visés à cette disposition. Il découlerait à cet égard des onzième et quatorzième considérants du règlement n° 68/2001 que la réalisation de ces objectifs est effectivement favorisée par de telles aides.
29 Troisièmement, les requérants reprochent au Tribunal d’avoir violé le principe d’égalité de traitement car, conformément à la pratique décisionnelle de la Commission, la nécessité d’aides à la formation non exemptées de l’obligation de notification à la Commission ne serait ni examinée ni constatée. Tout en admettant que c’est dans le seul cadre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE que doit être appréciée la légalité d’une décision de la Commission, les requérants soutiennent que la Commission ne peut s’écarter sans justification objective de sa pratique décisionnelle antérieure.
30 S’agissant de l’argumentation des requérants relative à la violation du règlement n° 68/2001, il importe, à titre liminaire de rappeler, ainsi que l’a affirmé le Tribunal au point 38 de l’arrêt attaqué, que l’aide en cause était d’un montant supérieur à un million d’euros et que, par conséquent, elle était, conformément à l’article 5 du règlement n° 68/2001, exclue de l’exemption de l’obligation de notification. Le seizième considérant dudit règlement précise en effet que de telles aides demeurent soumises à cette obligation.
31 Ainsi que le font valoir les requérants, l’application de ce règlement n’est alors exclue que du point de vue de cette exemption et non du fond du droit. Il ressort en effet du quatrième considérant du règlement n° 68/2001 que les aides à la formation qui sont notifiées doivent être examinées par la Commission à la lumière des critères fixés par ce règlement. Il convient toutefois de considérer que l’utilisation, audit considérant, du terme «notamment» signifie que de telles aides doivent être examinées en particulier, mais non exclusivement, à la lumière desdits critères. Elles peuvent donc être examinées à l’aune d’autres critères ou dispositions.
32 Il convient en outre de relever, ainsi que le Tribunal l’a fait au point 49 de l’arrêt attaqué, qu’il ressort du dixième considérant du règlement n° 68/2001 que l’objectif des aides à la formation est de corriger l’imperfection du marché liée au fait que les entreprises de l’Union sous-investissent généralement dans la formation de leurs travailleurs. Il en découle que la raison d’être de l’octroi de telles aides est d’inciter les entreprises à mettre en œuvre des mesures de formation qui ne l’auraient pas été sans l’octroi de ces aides.
33 Dans ce contexte, il ne saurait être reproché à la Commission de considérer qu’une aide à la formation doit, pour être compatible avec le marché commun, être «nécessaire» pour mettre en œuvre des mesures de formation et ainsi atteindre les objectifs visés à l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE.
34 En effet, ainsi que le Tribunal l’a relevé au point 52 de l’arrêt attaqué, une aide permettant de réaliser une formation qui aurait de toute façon été mise en œuvre par l’entreprise bénéficiaire, sans l’obtention de ladite aide, viserait, en réalité, à libérer une entreprise des coûts qu’elle aurait dû normalement supporter dans le cadre de sa gestion courante ou de ses activités normales. Or, les aides au fonctionnement, à savoir les aides qui visent à libérer une entreprise desdits coûts, faussent en principe les conditions de concurrence (voir arrêt du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, C-156/98, Rec. p. I-6857, point 30 et jurisprudence citée).
35 La circonstance qu’une aide à la formation puisse avoir des effets positifs pour des branches ou des secteurs économiques déterminés et ainsi contribuer à la réalisation des objectifs visés à l’article 107, paragraphe 3, sous a) et c), TFUE, est dénuée de pertinence à cet égard. Il convient en effet de relever que, par sa nature, une aide à la formation peut contribuer à la réalisation desdits objectifs. Ce constat est toutefois sans préjudice de l’examen du caractère nécessaire de cette aide.
36 Dans ces conditions, il ne saurait être reproché au Tribunal d’avoir constaté que la Commission a, à juste titre, considéré que l’aide à la formation ne peut être déclarée compatible avec le marché commun au sens de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE que si elle n’est pas directement nécessaire aux activités de l’entreprise bénéficiaire.
37 S’agissant de l’argument des requérants relatif à la violation du principe d’égalité de traitement, il convient de relever qu’ils invoquent une pratique décisionnelle antérieure de la Commission dont ils ne démontrent pas l’existence. En effet, ainsi que les requérants le relèvent eux-mêmes, la Commission a apprécié le caractère nécessaire d’aides à la formation non exemptées de l’obligation de notification dans ses décisions du 11 mars 2008 concernant l’aide d’État C 35/2007 (ex N 256/2007) que la Belgique envisage de mettre à exécution en faveur de Volvo Cars Gent (JO L 236 du 3.9.2008, p. 45) et du 2 décembre 2009 concernant l’aide d’État C 39/08 (ex N 148/08) que la Roumanie prévoit d’accorder pour une formation assurée par Ford Craiova (JO L 167 du 1.7.2010, p. 1, points 83 et suivants). Dans ces conditions, l’existence d’une telle pratique décisionnelle ne saurait être considérée comme établie.
38 En tout état de cause, ainsi que les requérants l’admettent, c’est dans le seul cadre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE que doit être appréciée la légalité d’une décision de la Commission constatant qu’une aide ne répond pas aux conditions d’application de cette dérogation, et non à l’aune d’une prétendue pratique antérieure (voir, en ce sens, arrêt du 30 septembre 2003, Freistaat Sachsen e.a./Commission, C-57/00 P et C-61/00 P, Rec. p. I-9975, point 53).
39 À la lumière de l’ensemble de ces constatations et appréciations énoncées dans l’arrêt attaqué, il apparaît que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en constatant que c’est à bon droit que la Commission a apprécié l’aide en cause sur le fondement de article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, non seulement au regard des critères fixés par le règlement n° 68/2001, mais également au regard du critère de nécessité.
40 Il convient donc de rejeter le premier moyen comme non fondé.
Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit consistant à méconnaître l’effet incitatif de l’aide en cause pour le choix du site
41 Les requérants soutiennent que l’effet incitatif de l’aide en cause pour le choix du site aurait dû être pris en compte car il ressort du règlement n° 68/2001, du point 4.20 des lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale (JO 1998, C 74, p. 9), du point 73 des lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale pour la période 2007-2013 (JO 2006, C 54, p.13) et de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE que les aides à la formation contribuent ou peuvent contribuer aux finalités régionales. Au point 79 de l’arrêt attaqué, le Tribunal serait en outre parti à tort du principe selon lequel seules les aides régionales peuvent favoriser les établissements localisés dans les régions défavorisées ainsi que l’implantation de nouvelles entreprises.
42 Il convient à cet égard de rappeler, ainsi que le Tribunal l’a relevé au point 78 de l’arrêt attaqué, que l’objectif des aides à la formation est non pas d’influencer le choix du site d’implantation d’une entreprise, mais d’améliorer la qualification des travailleurs. En effet, ainsi qu’il a été rappelé aux points 32 et 35 du présent arrêt, les aides à la formation peuvent permettre de corriger l’imperfection du marché liée au fait que les entreprises de l’Union sous-investissent généralement dans la formation de leurs travailleurs. Ainsi que l’a affirmé le Tribunal au point 80 de l’arrêt attaqué, c’est donc dans le contexte des aides à finalités régionales, et non dans celui des aides à la formation, que l’examen de l’effet incitatif de l’aide sur le choix du site doit être opéré. Dès lors, la question de savoir si les aides à la formation contribuent ou peuvent contribuer aux finalités régionales n’est pas pertinente en l’espèce.
43 S’agissant de la prétendue erreur commise par le Tribunal au point 79 de l’arrêt attaqué, il suffit de relever, d’une part, que le Tribunal n’y fait que citer un extrait du point 1, paragraphe 4, des lignes directrices concernant les aides d’État à finalités régionales. D’autre part, il ne ressort d’aucun point de l’arrêt attaqué que le Tribunal aurait considéré que seules les aides régionales peuvent favoriser les établissements localisés dans les régions défavorisées et l’implantation de nouvelles entreprises.
44 Compte tenu de ce qui précède, il convient de rejeter le moyen tiré d’une erreur de droit en ce qui concerne l’absence de prise en compte des effets incitatifs de l’aide en cause sur le choix du site comme non fondé.
Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur de droit consistant à appliquer des critères non pertinents dans l’appréciation du caractère nécessaire de l’aide en cause
Sur la première branche du troisième moyen, tirée d’une erreur de droit consistant à prendre en considération la pratique et la stratégie commerciales.
45 Les requérants font valoir que, selon une jurisprudence constante, l’existence d’une aide et sa compatibilité doivent être appréciées au regard de données et de critères objectifs (voir, notamment, arrêts du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission, C-182/03 et C-217/03, Rec. p. I-5479, point 137, ainsi que du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a., C-341/06 P et C-342/06 P, Rec. p. I-4777, point 95), alors que la prise en considération de la pratique et de la stratégie commerciales du bénéficiaire de l’aide ferait jouer des critères subjectifs.
46 Les requérants soutiennent, en outre, que le Tribunal a violé le principe d’égalité de traitement car, dans des affaires comparables, la Commission n’a pas examiné le critère de la nécessité de l’aide à l’aune de telles données.
47 Les requérants font également valoir que la prise en compte desdites données désavantage, au regard des aides d’État, les entreprises qui, en raison de décisions qui leur appartiennent ou de normes internes, établissent un niveau élevé de formation. Cette pratique ne serait dès lors pas compatible avec l’objectif du règlement n° 68/2001 et de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, ainsi que, plus généralement, avec les objectifs de l’Union tendant à assurer un niveau élevé d’emploi et de formation sur le marché commun.
48 S’agissant, en premier lieu, de l’argument des requérants selon lequel une aide devrait être appréciée au regard de données et de critères objectifs, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort du point 36 du présent arrêt, une aide à la formation qui apporte une amélioration de la situation financière de l’entreprise bénéficiaire doit, pour être considérée comme compatible avec le marché commun, être nécessaire pour atteindre les objectifs visés à l’article 107, paragraphe 3, sous a) et c), TFUE. La Commission devant être en mesure d’examiner si tel est le cas, il lui incombe de prendre en considération tous les éléments pertinents, notamment les circonstances économiques pertinentes au moment où les aides sont accordées (voir, en ce sens, arrêt du 3 octobre 1991, Italie/Commission, C-261/89, Rec. p. I-4437, point 21).
49 Il ne saurait dès lors être reproché au Tribunal d’avoir considéré que la Commission pouvait prendre en compte les éléments de fait concrets relatifs à l’entreprise bénéficiaire de l’aide et, notamment, sa pratique et sa stratégie commerciales, ces éléments permettant de déterminer, notamment, si cette entreprise comptait, y compris en l’absence d’aide, mettre en œuvre les mesures de formation. En effet, si tel était le cas, l’aide envisagée ne saurait être considérée comme nécessaire pour atteindre les objectifs visés à l’article 107, paragraphe 3, sous a) et c), TFUE.
50 En ce qui concerne, en deuxième lieu, l’argument tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement, il suffit de rappeler, ainsi qu’il ressort du point 38 du présent arrêt, que c’est dans le seul cadre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, que doit être appréciée la légalité d’une décision de la Commission et non au regard d’une pratique décisionnelle antérieure de celle-ci.
51 S’agissant, en troisième lieu, de l’argument relatif à l’effet désavantageux de la prise en compte desdits éléments à l’égard des entreprises qui prévoient un niveau élevé de formation, il y a lieu de relever qu’un tel argument n’est pas pertinent dans le cadre de l’examen de la compatibilité d’une aide à la formation au regard de l’article 107, paragraphe 3, sous a) et c), TFUE. En effet, ainsi que l’a affirmé le Tribunal au point 112 de l’arrêt attaqué, l’analyse de la Commission ne doit dépendre que de l’appréciation objective de la compatibilité avec le marché commun des aides à la formation.
52 Il découle de ce qui précède que la première branche du troisième moyen doit être rejetée comme non fondée.
Sur la seconde branche du troisième moyen, tirée d’une erreur de droit consistant dans la prise en considération des dispositions législatives nationales
53 Selon les requérants, la Cour a affirmé dans l’arrêt du 17 septembre 1980, Philip Morris/Commission (730/79, Rec. p. 2671, point 26) que la compatibilité d’une aide avec le traité FUE doit être appréciée dans le cadre du droit de l’Union et non dans celui d’un seul État membre. Dès lors, des arguments ou des critères tirés du droit national seraient à cet égard sans pertinence.
54 Selon les requérants, la prise en considération de normes nationales concernant la formation aurait pour effet que les États membres choisissant de ne pas légiférer en faveur d’un niveau élevé de formation constituent des sites plus attrayants pour les entreprises. Ce résultat serait absurde et inconciliable avec le sens et l’objectif du règlement n° 68/2001 et de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE.
55 À cet égard, il convient, d’une part, de renvoyer aux considérations déjà exprimées, notamment, aux points 48 et 49 du présent arrêt, en ce qui concerne la prise en compte de la pratique et de la stratégie commerciales. Ces considérations sont valables, mutatis mutandis, pour ce qui concerne la prise en compte des dispositions législatives nationales.
56 Il ne saurait dès lors être reproché au Tribunal d’avoir considéré que la Commission pouvait prendre en compte, dans le cadre de l’examen du critère de la nécessité de l’aide en cause, l’existence d’une législation nationale imposant la formation du personnel, ces éléments permettant de déterminer, notamment, si l’entreprise devait, y compris en l’absence d’aide, mettre en œuvre des mesures de formation. En effet, si tel était le cas, l’aide envisagée ne saurait être considérée comme nécessaire pour atteindre les objectifs visés à l’article 107, paragraphe 3, sous a) et c), TFUE.
57 En outre, eu égard aux circonstances de l’espèce entièrement différentes de celles de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Philip Morris/Commission, précité, la référence à cet arrêt n’est pas pertinente. Par ailleurs, l’affirmation de la Cour selon laquelle «la compatibilité de l’aide en question avec le traité doit être appréciée dans le cadre communautaire et non dans celui d’un seul État membre» se rapportait à la question de l’affectation des conditions des échanges entre États membres. Cette affirmation ne signifie nullement que la comptabilité d’une aide ne peut être appréciée au regard d’éléments relevant du cadre législatif de l’État membre concerné.
58 S’agissant, d’autre part, de l’argument relatif à l’effet désavantageux de la prise en compte de ces éléments à l’égard des entreprises qui prévoient un niveau élevé de formation, il y a lieu de relever, ainsi qu’il ressort du point 51 du présent arrêt, qu’un tel argument n’est pas pertinent dans le cadre de l’examen de la compatibilité d’une aide à la formation au regard de l’article 107, paragraphe 3, sous a) et c), TFUE.
59 La seconde branche du troisième moyen et, partant, le troisième moyen dans son ensemble doivent ainsi être rejetés comme non fondés.
Sur le quatrième moyen, tiré d’une méconnaissance par le Tribunal des effets externes positifs des mesures de formation en cause
60 Selon les requérants, la méconnaissance des effets positifs externes de l’aide en cause, au motif que celle-ci ne remplit pas le critère de la nécessité, constitue une erreur de droit et est contraire à l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE. Les requérants renvoient à leurs observations concernant le premier moyen du pourvoi.
61 Il convient, à cet égard, de renvoyer aux considérations déjà exprimées, notamment, aux points 35 et 36 du présent arrêt. En effet, ainsi qu’il ressort de ce dernier point, une aide qui n’est pas nécessaire pour atteindre l’un des objectifs visés à l’article 107, paragraphe 3, TFUE, ne saurait être considérée comme compatible avec le marché commun. La circonstance qu’elle ait des effets externes positifs pour des branches ou des secteurs économiques déterminés est donc dénuée de pertinence à cet égard.
62 Dès lors, il convient de rejeter le quatrième moyen comme non fondé.
63 Étant donné qu’aucun des moyens des requérants n’a été accueilli, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son ensemble.
Sur les dépens
64 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation des requérants et ceux-ci ayant succombé en leurs moyens, il y a lieu de les condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) déclare et arrête:
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Le Freistaat Sachsen et le Land Sachsen-Anhalt sont condamnés aux dépens.
Signatures
* Langue de procédure: l’allemand.
1 Données confidentielles occultées