Schonberger v Court of Auditors (Judgment) French Text [2014] EUECJ T-26/14 (16 October 2014)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2014/T2614.html
Cite as: ECLI:EU:T:2014:887, [2014] EUECJ T-26/14, EU:T:2014:887

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

16 octobre 2014(*)

« Pourvoi - Fonction publique - Fonctionnaires - Promotion - Exercice de promotion 2011 - Taux multiplicateurs de référence - Contradictoire »

Dans l’affaire T-26/14 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 5 novembre 2013, Schönberger/Cour des comptes (F-14/12, RecFP, EU:F:2013:167), et tendant à l’annulation de cet arrêt,

Peter Schönberger, demeurant à Luxembourg (Luxembourg), représenté par Me O. Mader, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Cour des comptes de l’Union européenne, représentée par Mmes B. Schäfer et I. Ní Riagáin Düro, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),

composé de MM. M. Jaeger, président, A. Dittrich (rapporteur) et S. Frimodt Nielsen, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la procédure écrite,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le requérant, M. Peter Schönberger, demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 5 novembre 2013, Schönberger/Cour des comptes (F-14/12, RecFP, EU:F:2013:167, ci-après l’« arrêt attaqué »), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la Cour des comptes de l’Union européenne du 26 mai 2011 de ne pas le promouvoir au grade AD 13 dans le cadre de l’exercice de promotion 2011 (ci-après la « décision litigieuse »).

 Faits à l’origine du litige

2        Les faits qui sont à l’origine du litige sont énoncés aux points 7 à 15 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

« 7      Alors fonctionnaire du Parlement européen de grade A 5, affecté à la direction générale ‘Commissions et délégations’, le requérant a été détaché dans l’intérêt du service auprès de la Cour des comptes à compter du 1er janvier 2002.

8      Le 1er mai 2004, le grade A 5 détenu par le requérant a été renommé A*11.

9      Le 1er janvier 2005, le requérant a été promu par le Parlement au grade A*12, grade renommé AD 12 à compter du 1er mai 2006.

10      Le 1er janvier 2007, le requérant est devenu fonctionnaire de la Cour des comptes.

11      Par la communication au personnel n° 76/2010, du 15 décembre 2010, relative aux critères de promotion pour l’exercice de promotion 2011, le secrétaire général de la Cour des comptes, au point IV de cette communication, intitulé ‘Les critères adoptés par la commission paritaire de promotion’, a rappelé le principe de l’examen comparatif des mérites et formulé que ‘[l]e statut [des fonctionnaires de l’Union européenne] cont[enait] des dispositions qui impliquent, pour les carrières normales […], un taux moyen de promotion tous les quatre à cinq ans’, renvoyant, s’agissant des dispositions statutaires en cause, à une note de bas de page faisant référence en particulier à l’article 6, paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne] ainsi qu’à l’article 9 de l’annexe XIII [de ce] statut.

12      Par la communication au personnel n° 37/11, du 11 avril 2011, relative aux promotions aux grades AD 13 et AD 14 pour l’exercice de promotion 2011, le secrétaire général de la Cour des comptes a informé le personnel que trois postes seraient disponibles pour la promotion au grade AD 13. Dans cette communication, il était également précisé que chaque décision de promotion ‘ser[ait] prise sur la base d’une recommandation formulée par un groupe préparatoire’ et que celui-ci ‘appliquer[ait] les critères fixés par la commission paritaire de promotion dans le cadre de l’exercice de promotion 2011 et publiés dans la communication au personnel no 76/2010, du 15 décembre 2010’.

13      Par la communication au personnel n° 43/2011, du 26 mai 2011, le secrétaire général de la Cour des comptes a publié la liste des trois fonctionnaires promus au grade AD 13, liste arrêtée par la Cour des comptes en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination. Le nom du requérant ne figurait pas sur cette liste […]

14      Par note du 30 juillet 2011, le requérant a introduit une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne] contre la décision litigieuse.

15      Par décision du 18 novembre 2011, la Cour des comptes a rejeté la réclamation. »

 Procédure en première instance et arrêt attaqué

3        Par acte déposé au greffe du Tribunal de la fonction publique le 4 février 2012, le requérant a introduit un recours, enregistré sous la référence F-14/12, visant à l’annulation de la décision litigieuse.

4        Le requérant concluait, en première instance, à ce qu’il plût au Tribunal de la fonction publique (arrêt attaqué, point 17) :

-        annuler la décision litigieuse ;

-        annuler la décision du 18 novembre 2011 portant rejet de sa réclamation ;

-        condamner la Cour des comptes aux dépens.

5        La Cour des comptes concluait, en première instance, à ce que le Tribunal de la fonction publique rejetât le recours comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondé et condamnât le requérant aux dépens (arrêt attaqué, point 18).

6        Par l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique, après avoir regardé le recours comme dirigé contre la seule décision litigieuse, a rejeté les deux moyens soulevés par le requérant à l’appui de ses conclusions tendant à l’annulation de la décision litigieuse et, par conséquent, le recours dans son ensemble.

7        En premier lieu, il a rejeté, aux points 37 à 50 de l’arrêt attaqué, le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 6, paragraphe 2, et de l’article 45, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), sans statuer sur la recevabilité de celui-ci. Par ce moyen, le requérant faisait valoir, selon le point 46 de l’arrêt attaqué, que, compte tenu du nombre de fonctionnaires de grade AD 12 en activité et promouvables au grade AD 13 au 1er janvier 2010, l’application du taux figurant à l’article 9 de l’annexe XIII du statut aurait dû conduire la Cour des comptes, dans le cadre de l’exercice de promotion 2011, à ouvrir treize postes à la promotion au grade AD 13 et non, comme cela aurait été le cas, seulement trois postes.

8        À cet égard, le Tribunal de la fonction publique a indiqué que, selon l’article 6, paragraphe 1, du statut, un tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à chaque institution fixait le nombre des emplois pour chaque grade et chaque groupe de fonctions. D’après l’article 6, paragraphe 2, première phrase, du statut, sans préjudice du principe de promotion fondée sur le mérite, énoncé à l’article 45 du statut, ce tableau garantirait que, pour chaque institution, le nombre d’emplois vacants pour chaque grade est égal, au 1er janvier de chaque année, au nombre de fonctionnaires en activité au grade inférieur au 1er janvier de l’année précédente, multiplié par les taux fixés, pour ce grade, à l’annexe I, point B, du statut. Selon l’article 6, paragraphe 2, dernière phrase, du statut, les taux fixés dans cette annexe s’appliqueraient sur une base quinquennale moyenne à compter du 1er mai 2004 (arrêt attaqué, point 38).

9        Il s’ensuit, selon le Tribunal de la fonction publique, que les institutions ne sont pas tenues, dans le cadre de chaque exercice de promotion, d’ouvrir à la promotion, pour un grade déterminé, un nombre d’emplois vacants strictement égal au nombre de fonctionnaires en activité au grade inférieur au 1er janvier de l’année précédant celle au cours de laquelle l’exercice de promotion est organisé, multiplié par le taux fixé, pour ce grade, à l’annexe I, point B, du statut. Selon lui, il suffit simplement que les institutions veillent à ce que, pour chaque période quinquennale, le nombre total d’emplois vacants soit égal à la somme des emplois vacants qui résulterait, au titre de chacun des cinq exercices de promotion se déroulant au cours de la période quinquennale, de l’application du taux fixé, pour ce grade, à l’annexe I, point B, du statut (arrêt attaqué, points 39 et 40).

10      Aux points 41 à 44 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a considéré que l’article 9 de l’annexe XIII du statut fixait, notamment pour les promotions au grade AD 13, des taux progressifs sur une base annuelle jusqu’au 30 avril 2011 distincts du taux figurant à l’annexe I, point B, du statut, mais que cette disposition ne devait pas être interprétée en ce sens qu’il incomberait à l’administration de fixer, pour chacun des exercices de promotion prévus par cet article, un nombre d’emplois vacants strictement égal au nombre de fonctionnaires de grade AD 12 en activité au 1er janvier de l’année précédant celle au cours de laquelle l’exercice de promotion était organisé, multiplié par le taux fixé, pour ce grade à l’article 9 de l’annexe XIII du statut.

11      Selon le Tribunal de la fonction publique, dès lors que l’exercice de promotion 2011 faisait partie de la période quinquennale qui, à la Cour des comptes, aurait couvert les exercices de promotion 2010 à 2014, la circonstance que seulement trois postes aient été ouverts à la promotion 2011 n’était pas, par elle-même, constitutive d’une méconnaissance de l’article 9 de l’annexe XIII du statut. Il a précisé qu’il appartiendrait en définitive à la Cour des comptes, dans le cadre du dernier exercice de promotion de la période quinquennale en litige, à savoir l’exercice de promotion 2014, d’ouvrir à la promotion au grade AD 13 un nombre de postes tel que le nombre des postes qui serait ouvert à la promotion au grade AD 13 au titre des exercices de promotion 2010 à 2014 soit finalement égal à la somme des postes qui, au titre de chacun de ces exercices successifs, seraient ouverts sur la base d’une application stricte des taux fixés à l’article 9 de l’annexe XIII du statut et à l’annexe I, point B, dudit statut (arrêt attaqué, points 48 et 49).

12      En second lieu, le Tribunal de la fonction publique a rejeté, aux points 55 à 59 de l’arrêt attaqué, le second moyen, tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement. Selon lui, le requérant ne pouvait être regardé comme étant dans une situation comparable à celle des fonctionnaires ayant bénéficié, dans le cadre des exercices de promotion antérieurs à l’exercice 2011, d’une promotion au grade AD 13. Par ailleurs, il serait de jurisprudence constante que d’éventuelles différences entre les mesures adoptées par les institutions ne sauraient être invoquées à l’appui d’un moyen tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement par des fonctionnaires d’une autre institution.

 Procédure devant le Tribunal et conclusions des parties

13      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 8 janvier 2014, le requérant a formé le présent pourvoi.

14      Le 4 avril 2014, la Cour des comptes a déposé le mémoire en réponse.

15      La procédure écrite a été close le 28 avril 2014, sans que le requérant ait présenté, au titre de l’article 143, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, une demande visant à compléter le pourvoi par un mémoire en réplique.

16      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois) a constaté qu’aucune demande de fixation d’une audience n’avait été présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et a décidé de statuer sans phase orale de la procédure, conformément à l’article 146 du règlement de procédure.

17      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

-        annuler l’arrêt attaqué ;

-        faire droit aux conclusions présentées en première instance ;

-        condamner la Cour des comptes aux dépens.

18      La Cour des comptes conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

-        rejeter le pourvoi ;

-        condamner le requérant aux dépens.

 Sur le pourvoi

19      À l’appui du pourvoi, le requérant soulève sept moyens. Les six premiers concernent le rejet par le Tribunal de la fonction publique de son premier moyen en première instance, tandis que le septième a trait au rejet de son second moyen en première instance.

20      Le premier moyen est tiré du fait que le Tribunal de la fonction publique aurait omis de statuer sur le premier moyen en première instance, selon lequel, avec seulement trois postes, le nombre de postes ouverts à la promotion pour l’exercice 2011 était inférieur de dix unités à la moyenne quinquennale prévue par le statut pour la période allant de 2007 à 2011. Par son deuxième moyen, le requérant fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a déformé la position des parties dans la mesure où il aurait déclaré que les exercices de promotion de 2010 à 2014 constituaient la période quinquennale en litige. Le troisième moyen est tiré d’une violation des droits de la défense en ce que le requérant n’aurait pas été mis en mesure de prendre position sur la période quinquennale que le Tribunal de la fonction publique a présumée pertinente, tandis que le quatrième moyen est tiré d’une violation de l’obligation de motivation en raison du fait que le Tribunal de la fonction publique n’aurait pas expliqué les raisons pour lesquelles la période quinquennale allant de 2010 à 2014 devait être considérée comme la période de référence. Par les cinquième et sixième moyens, le requérant fait valoir, d’une part, que l’interprétation du statut par le Tribunal de la fonction publique allait à l’encontre de la volonté du législateur de commencer une nouvelle période quinquennale en 2014 et, d’autre part, une violation du principe de la confiance légitime. Enfin, le septième moyen est tiré d’une application erronée du principe d’égalité de traitement.

21      Le Tribunal estime adéquat d’examiner, tout d’abord, le troisième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense.

22      Le requérant fait valoir que, dès lors qu’il n’a pas été mis en mesure de prendre position sur la question de savoir si, pour l’exercice de promotion 2011, la période quinquennale allant de 2010 à 2014 devait être considérée comme la période en cause, le Tribunal de la fonction publique a enfreint ses droits de la défense en méconnaissant le principe du contradictoire. Ainsi qu’il ressortirait du point 48 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique aurait considéré comme décisive la circonstance que l’exercice de promotion 2011 appartenait à la période allant de 2010 à 2014. Le Tribunal de la fonction publique n’aurait indiqué ni dans ses mesures d’organisation de la procédure ni lors de la procédure orale que cette période devait être considérée comme la période pertinente. Au lieu de se fonder sur les arguments des parties, le Tribunal de la fonction publique aurait remplacé ceux-ci de sa propre initiative. Il ne pourrait être exclu que, sans cette irrégularité, la procédure aurait eu une autre issue.

23      Il ressort de la jurisprudence que les droits de la défense occupent une place éminente dans l’organisation et le déroulement d’un procès équitable et incluent le principe du contradictoire. Ce principe s’applique à toute procédure susceptible d’aboutir à une décision d’une institution affectant de manière sensible les intérêts d’une personne. Il implique, en règle générale, le droit pour les parties à un procès d’être en mesure de prendre position sur les faits et les documents sur lesquels sera fondée une décision judiciaire ainsi que de discuter les preuves et les observations présentées devant le juge et les moyens de droit relevés d’office par le juge, sur lesquels celui-ci entend fonder sa décision. En effet, pour satisfaire aux exigences liées au droit à un procès équitable, il importe que les parties puissent débattre contradictoirement tant des éléments de fait que des éléments de droit qui sont décisifs pour l’issue de la procédure (voir arrêts du 17 décembre 2009, Réexamen M/EMEA, C-197/09 RX-II, Rec, EU:C:2009:804, points 39 à 41, et du 4 décembre 2013, ETF/Schuerings, T-107/11 P, RecFP, EU:T:2013:624, point 51 et jurisprudence citée).

24      En l’espèce, il convient de relever que, après avoir constaté, au point 47 de l’arrêt attaqué, que les taux multiplicateurs fixés à l’article 9 de l’annexe XIII du statut s’appliquaient sur une base quinquennale, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le premier moyen en première instance en considérant, au point 48 de cet arrêt, que l’exercice de promotion 2011 faisait partie de la période quinquennale qui, à la Cour des comptes, avait couvert les exercices de promotion 2010 à 2014 et que, dès lors, la circonstance que seulement trois postes aient été ouverts à la promotion 2011 n’était pas, par elle-même, constitutive d’une méconnaissance de l’article 9 de l’annexe XIII du statut. Selon lui, il appartiendrait en définitive à la Cour des comptes, dans le cadre du dernier exercice de promotion de la période quinquennale en litige, à savoir l’exercice de promotion 2014, d’ouvrir à la promotion au grade AD 13 un nombre de postes tel que le nombre des postes qui serait ouvert à la promotion au grade AD 13 au titre des exercices de promotion 2010 à 2014 soit finalement égal à la somme des postes qui, au titre de chacun de ces exercices successifs, seraient ouverts sur la base d’une application stricte des taux fixés à l’article 9 de l’annexe XIII du statut et à l’annexe I, point B, dudit statut (arrêt attaqué, point 49).

25      En premier lieu, force est de constater que, en rejetant le premier moyen en première instance au motif que la période quinquennale en cause était celle allant de 2010 à 2014, le Tribunal de la fonction publique n’a pas seulement procédé à une substitution de motifs, mais a également fondé ce rejet sur des éléments de fait et de droit qui n’avaient pas été débattus devant lui, de sorte qu’il a violé le principe du contradictoire.

26      Contrairement à ce qu’allègue la Cour des comptes, aucun élément du dossier en première instance ne permet de considérer que la question décisive de savoir si, pour l’exercice de promotion 2011, la période quinquennale allant de 2010 à 2014 devait être considérée comme la période en cause a fait l’objet d’un débat contradictoire devant le Tribunal de la fonction publique.

27      En effet, afin de motiver la décision litigieuse, la Cour des comptes ne s’était pas fondée sur l’interprétation de l’article 6, paragraphe 2, du statut telle qu’effectuée par le Tribunal de la fonction publique selon laquelle les taux multiplicateurs en cause devaient s’appliquer sur la période quinquennale allant de 2010 à 2014 et selon laquelle, dès lors, la circonstance que seulement trois postes aient été ouverts à la promotion 2011 n’était pas constitutive d’une méconnaissance de l’article 9 de l’annexe XIII du statut.

28      Ainsi qu’il ressort de la décision de la Cour des comptes du 18 novembre 2011 rejetant la réclamation du requérant et des considérations de la Cour des comptes figurant dans le mémoire en défense en première instance, cette dernière a fait valoir que les taux multiplicateurs en cause devaient s’appliquer, s’agissant de l’exercice de promotion 2011, sur la base quinquennale allant de 2007 à 2011. En appliquant les règles de calcul prévues à l’article 6, paragraphe 2, du statut sur cette période, la Cour des comptes a considéré qu’elle devait, en principe, créer au moins treize postes disponibles pour les promotions au grade AD 13 dans le cadre de l’exercice de promotion 2011. Toutefois, la Cour des comptes a considéré qu’elle était tenue de réduire le nombre de ces postes afin de respecter le principe de l’équivalence entre la progression des carrières moyennes dans la structure des carrières en vigueur avant et après le 1er mai 2004. Elle serait revenue, pour l’ensemble de la période allant de 2005 à 2011, à un nombre de promotions proche de l’équilibre. Selon elle, le fait qu’elle était, en 2011, en déficit de deux promotions pour l’ensemble de la période allant de 2005 à 2011 lui semblait acceptable eu égard, d’une part, au fait qu’elle aurait dépassé le nombre minimal de postes à ouvrir dans le cadre des premiers exercices de promotion après 2004 et, d’autre part, aux contraintes budgétaires. La Cour des comptes a souligné que ce déficit devrait être corrigé prochainement.

29      Il ressort de la note en bas de page n° 2 de la décision de la Cour des comptes du 18 novembre 2011 rejetant la réclamation du requérant ainsi que du mémoire en défense que la Cour des comptes a expressément décidé de ne pas considérer la période allant de 2010 à 2014 comme la base quinquennale visée à l’article 6, paragraphe 2, du statut. Selon elle, la méthode consistant à ouvrir une nouvelle période de cinq ans de 2010 à 2014 ne permettait pas de respecter l’esprit de l’article 6 du statut, notamment la possibilité de prendre des mesures correctrices et de faire des adaptations en cas de divergence des taux dans les premières années, ni d’assurer la cohérence du système avec le tableau des effectifs, le respect du principe d’équivalence ou la discipline budgétaire.

30      S’il est vrai que, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, prévues à l’article 55 du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, ce dernier a invité la Cour des comptes à répondre à deux questions concernant l’exercice de promotion 2012, il n’en demeure pas moins qu’il ne ressort aucunement de ces questions que le Tribunal de la fonction publique remettait en cause la période quinquennale prise en compte par la Cour des comptes.

31      Enfin, en ce qui concerne l’argument de la Cour des comptes selon lequel elle aurait évoqué, lors de la procédure orale en première instance, le nombre d’emplois vacants dans le tableau des effectifs 2013, celui-ci ne permet pas, en l’absence de toute mention dans le procès-verbal de l’audience relative au contenu des débats, de considérer que la question de la période quinquennale prise en compte par la Cour des comptes a été abordée devant le Tribunal de la fonction publique (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2013, L/Parlement, T-317/10 P, RecFP, EU:T:2013:413, point 110).

32      En second lieu, il convient d’examiner la question de savoir si le procédé adopté par le Tribunal de la fonction publique peut être légitimé en soutenant que, même en l’absence de l’irrégularité en cause, la procédure ne pouvait aboutir à un résultat différent de sorte que le non-respect du principe du contradictoire n’aurait pas pu exercer d’influence sur le contenu de l’arrêt attaqué et n’aurait pas porté atteinte aux intérêts du requérant (voir arrêt Réexamen M/EMEA, EU:C:2009:804, point 52 et jurisprudence citée).

33      À cet égard, il y a lieu de relever qu’un débat devant le Tribunal de la fonction publique concernant la période quinquennale visée par l’article 6, paragraphe 2, du statut aurait permis de préciser que la période prise en compte par la Cour des comptes dans la décision litigieuse était celle allant de 2007 à 2011 et que le rejet du premier moyen en première instance en prenant en compte la période allant de 2010 à 2014 correspondrait à une substitution de motifs.

34      Il convient de rappeler que le Tribunal de la fonction publique est, en vertu de l’article 270 TFUE et de l’article 91, paragraphe 1, du statut, dans les litiges autres que ceux de caractère pécuniaire, compétent pour effectuer un contrôle de légalité d’un acte faisant grief (arrêt du 16 décembre 2010, Conseil/Stols, T-175/09 P, RecFP, EU:T:2010:534, point 22). L’article 264 TFUE prévoit que, si le recours est fondé, l’acte contesté est déclaré nul et non avenu. Le juge de l’Union ne peut donc, en toute hypothèse, substituer sa propre motivation à celle de l’auteur de l’acte attaqué (arrêts du 27 janvier 2000, DIR International Film e.a./Commission, C-164/98 P, Rec, EU:C:2000:48, point 38 ; du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C-487/06 P, Rec, EU:C:2008:757, point 141, et du 28 février 2013, Portugal/Commission, C-246/11 P, EU:C:2013:118, point 85).

35      Dès lors, il ne saurait être exclu que l’appréciation du Tribunal de la fonction publique ait pu être différente s’il avait mis le requérant en mesure de présenter ses observations sur la période quinquennale visée à l’article 6, paragraphe 2, du statut et que, par conséquent, le respect du principe du contradictoire ait pu exercer une influence sur le contenu de l’arrêt attaqué.

36      Il y a donc lieu d’accueillir le troisième moyen et, par conséquent, d’annuler l’arrêt attaqué, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens soulevés dans le cadre du présent pourvoi.

 Sur les conséquences de l’annulation de l’arrêt attaqué

37      Conformément à l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe I du statut de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé, le Tribunal annule la décision du Tribunal de la fonction publique et statue lui-même sur le litige. Il renvoie l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique pour qu’il statue, lorsque le litige n’est pas en état d’être jugé.

38      En l’espèce, le requérant a soulevé, à l’appui du recours en première instance, deux moyens, qui étaient tirés, premièrement, d’une violation de l’article 6, paragraphe 2, et de l’article 45, paragraphe 1, du statut et, deuxièmement, d’une violation du principe d’égalité de traitement. La Cour des comptes a considéré, en première instance, que ces moyens étaient irrecevables ou, à titre subsidiaire, non fondés. Il ressort des points 37, 50 et 58 de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique a rejeté ces moyens sur le fond sans statuer sur leur recevabilité.

39      S’agissant du premier moyen, le requérant a fait valoir en substance que, dans le cadre de l’exercice de promotion 2011, seuls trois postes avaient été ouverts à la promotion au grade AD 13, alors que, selon l’article 6, paragraphe 2, du statut lu en combinaison avec l’article 9 de l’annexe XIII du statut, au moins treize emplois auraient dû l’être. En ce qui concerne la question de savoir si ce moyen est recevable, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, un fonctionnaire n’est pas habilité à agir dans l’intérêt de la loi ou des institutions et ne peut faire valoir, à l’appui d’un recours en annulation, que des griefs qui lui sont personnels. En particulier, seuls peuvent être considérés comme faisant grief des actes affectant directement et immédiatement la situation juridique des intéressés, cette appréciation ne devant pas se faire in abstracto, mais au regard de la situation personnelle du requérant (voir arrêt du 24 avril 2009, Sanchez Ferriz e.a./Commission, T-492/07 P, RecFP, EU:T:2009:116, point 26 et jurisprudence citée). Pour établir son intérêt à obtenir une annulation de la décision litigieuse, au motif que le taux de promotion prétendument applicable pour le grade concerné n’avait pas été respecté, il appartenait au requérant de démontrer que, compte tenu de sa situation personnelle, il n’était pas exclu qu’il ait pu parvenir au seuil de promotion, si le taux de promotion susmentionné avait été appliqué (voir, en ce sens, arrêt Sanchez Ferriz e.a./Commission, EU:T:2009:116, point 34).

40      Il y a lieu de relever que l’examen de la question de savoir si le requérant a apporté une telle preuve nécessite de procéder à une appréciation des faits, qui n’a pas été effectuée par le Tribunal de la fonction publique, à savoir l’appréciation des éléments produits par le requérant relatifs à sa situation personnelle par rapport à l’exercice de promotion 2011 pour démontrer que l’annulation qu’il poursuit pourrait lui ouvrir la perspective d’être promu. Or, l’appréciation des faits est du ressort du juge en première instance. En outre, les parties n’ont pas présenté d’observations au Tribunal sur cette question. Dans ces circonstances, le Tribunal considère que le présent litige n’est pas en état d’être jugé. Dès lors, il y a lieu de renvoyer l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique.

 Sur les dépens

41      L’affaire étant renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique, il convient de réserver les dépens afférents à la présente procédure de pourvoi.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

déclare et arrête :

1)      L’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 5 novembre 2013, Schönberger/Cour des comptes (F-14/12), est annulé.

2)      L’affaire est renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique.

3)      Les dépens sont réservés.

Jaeger

Dittrich

Frimodt Nielsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 octobre 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.

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