Greece v Commission (Judgment) French Text [2014] EUECJ T-632/11 (06 November 2014)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2014/T63211.html
Cite as: EU:T:2014:934, [2014] EUECJ T-632/11, ECLI:EU:T:2014:934

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

6 novembre 2014(*)

« FEOGA – Section ‘Garantie’ – FEAGA et Feader – Dépenses exclues du financement – Règlement (CE) nº 1782/2003 – Régime des droits au paiement unique – Coopération loyale – Équité – Proportionnalité – Réserve nationale – Critères d’attribution – Correction financière forfaitaire – Risque pour le Fonds – Règlement (CE) n° 1493/1999 – Secteur vitivinicole – Régimes de distillation et de paiements en faveur de l’utilisation de certains moûts – Aides à la restructuration et à la reconversion des vignobles »

Dans l’affaire T‑632/11,

République hellénique, représentée par M. I. Chalkias et Mme S. Papaïoannou, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. D. Triantafyllou et Mme A. Marcoulli, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision d’exécution 2011/689/EU de la Commission, du 14 octobre 2011, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO L 270, p. 33), en ce que cette dernière concerne la République hellénique,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich, président, J. Schwarcz et Mme V. Tomljenović (rapporteur), juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 mars 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le présent recours concerne certaines dépenses effectuées par la République hellénique dans le domaine de la politique agricole commune (ci-après la « PAC ») et, plus particulièrement, les corrections financières appliquées par la Commission européenne pour écarter du financement de l’Union européenne lesdites dépenses.

2        Dans le cadre de l’exercice de son pouvoir d’enquête prévu à l’article 9, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la PAC (JO L 160, p. 103), et son successeur, l’article 37 du règlement (CE) nº 1290/2005, du 21 juin 2005, relatif au financement de la PAC (JO L 209, p. 1), les services de la Commission ont effectué des vérifications des dépenses en Grèce. Lors de ces vérifications, la Commission a constaté plusieurs carences, notamment, d’une part, dans l’application du régime des droits au paiement unique, et, d’autre part, dans le domaine des aides relatives au secteur du vin.

I –  Enquête relative au régime des droits au paiement unique

3        La Commission a effectué des vérifications en Grèce, du 6 au 10 novembre 2006, dans le cadre de l’enquête portant la référence AA/2006/48b, concernant l’application du régime des droits au paiement unique, pendant l’année financière 2006.

4        Par lettre du 13 avril 2007, la Commission a transmis ses observations à la République hellénique concernant les carences identifiées, auxquelles celle-ci a répondu par lettre du 12 juillet 2007.

5        Le 14 novembre 2008, une réunion bilatérale a eu lieu entre la Commission et la République hellénique, et, par la suite, la Commission a transmis à celle-ci le procès-verbal de la réunion bilatérale. Par lettre du 14 juillet 2009, la République hellénique a fait part à la Commission de ses commentaires sur le procès-verbal.

6        Le 27 mai 2010, la Commission a formellement communiqué ses conclusions à la République hellénique.

7        Le 28 juin 2010, la République hellénique a saisi l’organe de conciliation.

II –  Enquête relative au secteur du vin

8        La Commission a effectué des vérifications en Grèce du 22 juin au 1er juillet 2005 dans le cadre de l’enquête portant la référence VT/VI/2005/07/GR, concernant les aides relatives aux régimes de distillation et en faveur de l’utilisation de certains moûts, et de restructuration et conversion des vignobles, pour les années financières 2004 et 2005.

9        Par lettre du 22 décembre 2005, la Commission a transmis ses observations à la République hellénique concernant les carences identifiées, auxquelles la République hellénique a répondu le 21 février 2006.

10      Le 20 septembre 2006, une réunion bilatérale a eu lieu entre la Commission et la République hellénique, et ensuite la Commission a transmis à celle-ci le procès-verbal de la réunion bilatérale. Par lettre du 3 avril 2007, la République hellénique a fait part à la Commission de ses commentaires sur le procès-verbal.

11      Le 10 février 2010, la Commission a communiqué formellement ses conclusions à la République hellénique.

12      Le 24 mars 2010, la République hellénique a saisi l’organe de conciliation.

III –  Procédure de conciliation et adoption de la décision attaquée

13      Le 4 octobre 2010, l’organe de conciliation a émis deux rapports communiquant son avis dans les enquêtes, portant, respectivement, les références AA/2006/48b et VT/VI/2005/07/GR.

14      Le 30 mars 2011, la Commission a communiqué sa position finale à la République hellénique.

15      Par la décision d’exécution 2011/689/EU de la Commission, du 14 octobre 2011, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO L 270, p. 33, ci-après la « décision attaquée »), la Commission a écarté du financement communautaire certaines dépenses déclarées par la République hellénique.

16      La décision attaquée vise, dans un tableau qui y est annexé, les corrections financières suivantes :

–        dans le cadre du régime des droits au paiement unique pour l’année financière 2006 :

–        une correction forfaitaire de 5 % d’un montant de 11 191 152,98 euros au titre de la non-comptabilisation de la superficie fourragère pour les producteurs ovins ;

–        une correction ponctuelle d’un montant de 2 951 138,27 euros au titre du calcul inexact du plafond de la moyenne régionale ;

–        une correction forfaitaire de 10 % d’un montant de 10 460 620,42 euros au titre des critères d’octroi des droits de la réserve nationale ;

–        dans le secteur du vin, pour les faiblesses constatées dans les contrôles clés ainsi que des lacunes dans la création d’un casier viticole et l’accès à celui-ci :

–        dans le cadre du régime de distillation :

–        une correction forfaitaire de 10 % d’un montant total de 252 757,14 euros pour l’année financière 2004 ;

–        une correction forfaitaire de 10 % d’un montant total de 471 948,20 euros pour l’année financière 2005 ;

–        dans le cadre du régime de paiements en faveur de l’utilisation de certains moûts :

–        une correction forfaitaire de 10 % d’un montant total de 341 649,98 euros pour l’année financière 2004 ;

–        une correction forfaitaire de 10 % d’un montant total de 371 061,43 euros pour l’année financière 2005 ;

–        dans le cadre du régime de restructuration :

–        une correction forfaitaire de 10 % d’un montant total de 713 964,37 euros pour l’année financière 2004 ;

–        une correction forfaitaire de 10 % d’un montant total de 695 736,36 euros pour l’année financière 2005 ;

–        dans le cadre du régime d’autres distillations :

–        une correction forfaitaire de 10 % d’un montant total de 28 978,93 euros pour l’année financière 2004 ;

–        une correction forfaitaire de 10 % d’un montant total de 41 646,07 euros pour l’année financière 2005.

17      Les motifs des corrections financières effectuées par la Commission sont résumés dans le rapport de synthèse du 24 juin 2011, concernant les résultats des vérifications de la Commission dans le contexte de la procédure d’apurement de conformité, conformément à l’article 7, paragraphe 4, du règlement nº 1258/1999 et à l’article 31 du règlement nº 1290/2005 (ci-après le « rapport de synthèse »).

 Procédure et conclusions des parties

18      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 14 décembre 2011, la République hellénique a introduit le présent recours.

19      La République hellénique conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce que cette dernière la concerne ;

–        condamner la Commission aux dépens.

20      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la République hellénique aux dépens.

I –  En droit

21      À l’appui du recours, la République hellénique invoque quatre moyens. Les trois premiers moyens concernent les corrections financières appliquées dans le cadre du régime des droits au paiement unique. Le quatrième moyen concerne les corrections forfaitaires appliquées dans le cadre des régimes de distillation et de paiements en faveur de l’utilisation de certains moûts ainsi que de restructuration et de conversion des vignobles.

22      Lors de l’audience, la République hellénique a précisé que, dans le cadre du recours, elle ne demandait pas la réformation de la décision attaquée, mais se limitait à demander l’annulation de cette dernière dans la mesure où celle-ci la concerne.

A –  Sur les trois premiers moyens relatifs aux corrections financières appliquées dans le cadre du régime des droits au paiement unique

23      La République hellénique invoque trois moyens relatifs aux corrections financières appliquées dans le cadre du régime du paiement unique. Le premier moyen est tiré d’une violation des principes d’équité, de coopération loyale et de proportionnalité ainsi que du défaut de base juridique pour l’application des orientations. Le deuxième moyen est tiré, premièrement, d’une violation de l’article 42 du règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la PAC et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) n° 2019/93, (CE) n° 1452/2001, (CE) n° 1453/2001, (CE) n° 1454/2001, (CE) n° 1868/94, (CE) n° 1251/1999, (CE) n° 1254/1999, (CE) n° 1673/2000, (CEE) n° 2358/71 et (CE) n° 2529/2001 (JO L 270, p. 1). Deuxièmement, il est tiré d’une violation de l’article 21 du règlement (CE) nº 795/2004 de la Commission, du 21 avril 2004, portant modalités d’application du régime de paiement unique prévu par le règlement n° 1782/2003 (JO L 141, p. 1). Troisièmement, il est tiré d’une appréciation erronée des faits. Le troisième moyen est tiré d’une violation de l’article 31 du règlement nº 1290/2005.

1.     Sur le premier moyen, tiré de la violation des principes d’équité, de coopération loyale et de la proportionnalité ainsi que du défaut de base juridique pour l’application des orientations et des erreurs d’appréciation

24      Le premier moyen soulevé par la République hellénique se divise en trois branches.

25      La République hellénique fait valoir dans la première branche que, en 2006, la première année où la nouvelle PAC et, notamment, le nouveau régime des droits au paiement unique a été appliqué par elle, la Commission n’aurait pas dû imposer des corrections financières pour les irrégularités constatées, relatives à l’interprétation du règlement n° 1782/2003 et du règlement nº 795/2004. Selon elle, vu la complexité de la nouvelle PAC et la nature des irrégularités constatées, la Commission aurait dû se limiter à des recommandations et à des conseils. Dans la mesure où la décision attaquée impose des corrections financières, elle serait contraire aux principes d’équité et de coopération loyale et résulterait d’une erreur de la Commission dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation.

26      Par la deuxième branche, la République hellénique fait valoir que la Commission n’aurait pas dû imposer des corrections forfaitaires sur le fondement des lignes directrices, définies dans le document n° VI/5330/97 de la Commission, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie » (ci-après les « orientations »). Selon elle, la nouvelle PAC ne comporte pas de base juridique permettant d’appliquer des orientations, qui ont été établies sur le fondement de l’ancienne PAC et leur application relève d’une application erronée par la Commission de sa marge d’appréciation. Par ailleurs, la nouvelle PAC n’aurait aucun lien ni similitude avec les régimes précédents et les règles du financement de la nouvelle PAC, prévues par le règlement n° 1290/2005, seraient radicalement différentes des règles précédentes.

27      Par la troisième branche, la République hellénique soutient que l’application des orientations à la nouvelle PAC a conduit à l’adoption de sanctions disproportionnées.

28      La Commission s’oppose à ces arguments.

a)     Sur la première branche, tirée d’une violation des principes d’équité et de coopération loyale ainsi que d’une erreur d’appréciation

29      Premièrement, il convient de souligner que la Commission n’est pas tenue de prendre en charge pour le FEAGA les dépenses effectuées par un État membre, qui sont fondées sur une application objectivement erronée, mais sur la base d’une interprétation adoptée de bonne foi du droit de l’Union, sauf si l’interprétation erronée du droit de l’Union peut être imputée à une institution de l’Union (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 25 novembre 1980, Belgique/Commission, 820/79, Rec. p. 3537, point 11 ; du 27 janvier 1981, Italie/Commission, 1251/79, Rec. p. 205, point 17, et du Tribunal du 19 juin 2009, Espagne/Commission, T‑369/05, non publié au Recueil, point 67).

30      Or, en l’espèce, la République hellénique n’apporte aucun élément permettant de considérer que son interprétation du droit de l’Union était imputable à un comportement de la Commission.

31      Deuxièmement, la République hellénique n’évoque aucun problème d’interprétation spécifique que les dispositions concernées auraient posé, mais se borne à signaler des problèmes d’interprétation générale concernant les dispositions applicables. En effet, elle prétend que le règlement n° 1782/2003 et le règlement n° 795/2004 ont généré une multitude de questions et de problèmes juridiques concernant l’interprétation et le mode d’application des dispositions relatives au mode de calcul des droits à l’aide unique et de la moyenne régionale pour l’octroi des droits de la réserve nationale ainsi que la question de savoir si l’adoption de critères sociaux lors de l’octroi des droits de la réserve nationale était permise et comment déterminer la valeur des droits de la réserve nationale.

32      Troisièmement, les principes d’équité et de coopération loyale ne sauraient obliger la Commission de prendre en charge pour le FEAGA les dépenses effectuées sur la base d’une interprétation erronée du droit de l’Union par les autorités nationales dans les circonstances de l’espèce.

33      S’agissant, tout d’abord, du principe d’équité invoqué par la République hellénique, il y a lieu de rappeler que l’équité ne permet pas de déroger à l’application des dispositions de droit de l’Union hors les cas prévus par la réglementation (arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, First City Trading e.a., C‑263/97, Rec. p. I‑5537, point 48, et arrêt du Tribunal du 7 décembre 2004, Koninklijke Coöperatie Cosun/Commission, T‑240/02, Rec. p. II‑4237, point 57). En l’occurrence, ni le règlement n° 1782/2003 ni le règlement n° 795/2004 ne prévoyait de dérogation à l’application des corrections financières dans le cas des dépenses non conformes au droit de l’Union.

34      Ensuite, le principe de coopération loyale, prévu à l’article 4, paragraphe 3, TUE, revêt un caractère réciproque. En effet, il oblige les États membres à prendre toutes les mesures propres à garantir la portée et l’efficacité du droit de l’Union et impose aux institutions de l’Union des devoirs réciproques de coopération loyale avec les États membres (ordonnance de la Cour du 13 juillet 1990, Zwartvelt e.a., C‑2/88 IMM, Rec. p. Ι‑3365, point 17, et arrêt de la Cour du 16 octobre 2003, Irlande/Commission, C‑339/00, Rec. p. Ι‑11757, point 71).

35      À cet égard, concernant, d’une part, les obligations de la République hellénique, il convient de rappeler que le règlement n° 1782/2003, qui régissait la nouvelle PAC et le régime du paiement unique, est entré en vigueur le 28 octobre 2003, le règlement n° 795/2004 est entré en vigueur le 7 mai 2004 et le règlement (CE) n° 1974/2004 de la Commission, du 29 octobre 2004, modifiant le règlement n° 795/2004 (JO L 345, p. 85), est entré en vigueur le 27 novembre 2004. Les États membres avaient la possibilité d’appliquer le régime de paiement unique à partir du 1er janvier 2005, et la République hellénique, quant à elle, s’est engagée à mettre le régime de paiement unique en application à partir de 2006. Dès lors, la République hellénique avait plus de deux ans pour s’adapter au régime du paiement unique, tel que régi par le règlement n° 1782/2003, et plus d’un an pour s’adapter en ce qui concerne les dispositions du règlement n° 795/2004, tel que modifié par le règlement n° 1974/2004. À partir de 2006, la République hellénique était obligée d’appliquer, comme l’ensemble des États membres, les règles prévues par lesdits règlements.

36      D’autre part, quant aux obligations de la Commission, le prétendu caractère complexe des dispositions méconnues par l’État membre et le fait qu’il s’agisse de la première année de leur mise en œuvre ne sauraient suffire pour établir une atteinte au principe de coopération loyale de la part de la Commission lorsque cette dernière applique des corrections financières, conformément à la réglementation applicable, relatives aux dépenses qui ne sont pas conformes au droit de l’Union.

37      Enfin, l’argument tiré d’une erreur d’appréciation de la Commission n’est aucunement étayé par la République hellénique, de sorte que le Tribunal n’est pas en mesure d’apprécier le bien-fondé. Dès lors, il doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable en application de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure.

38      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter la première branche du premier moyen comme étant non fondée.

b)     Sur la deuxième branche relative au défaut d’une base juridique pour appliquer les orientations et à une erreur d’appréciation dans le cadre de leur application

39      Premièrement, s’agissant du grief tiré d’un défaut de base juridique permettant l’application des orientations dans le cadre de la nouvelle PAC, il y a lieu de relever que l’argumentation selon laquelle les orientations ne pourraient pas être appliquées dans le cadre du nouveau régime des droits au paiement unique, faute de nouvelle définition des contrôles clés et des contrôles secondaires qui tiendrait compte des caractéristiques particulières de ce nouveau régime, est fondé sur une prémisse erronée et doit être rejeté.

40      À cet égard, il convient de constater que, s’il est vrai, comme le fait valoir la République hellénique, que la nouvelle PAC implique des modifications importantes, caractérisées par le nouveau régime des droits au paiement unique, c’est à tort que celle-ci soutient que les règles pertinentes de financement de la PAC instaurées par le règlement n° 1290/2005 sont radicalement différentes, par rapport à celles prévues dans le règlement (CEE) n° 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la PAC (JO L 94, p.13), dans le cadre duquel les orientations ont été rédigées (arrêt du Tribunal du 13 décembre 2012, Grèce/Commission, T‑588/10, non publié au Recueil, point 100, point 85).

41      En effet, les orientations ont été rédigées en 1997 dans le cadre de l’application de la réglementation, applicable à l’époque, relative au financement de la PAC, le règlement n° 729/70, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1287/95 du Conseil, du 22 mai 1995 (JO L 125, p. 1), et, en particulier, son article 5, paragraphe 2.

42      L’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, tel que modifié par le règlement n° 1287/95, prévoyait que la Commission :

c)      décide des dépenses à écarter du financement [de l’Union] visé aux articles 2 et 3, lorsqu’elle constate que des dépenses n’ont pas été effectuées conformément aux règles [de l’Union].

[…]

La Commission évalue les montants à écarter au vu notamment de l’importance de la non‑conformité constatée. La Commission tient compte, à cet effet, de la nature et de la gravité de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à [l’Union] […] »

43      Il convient d’observer que le règlement n° 729/70 a été abrogé par le règlement n° 1258/1999, dont l’article 7, paragraphe 4, était toutefois rédigé en des termes identiques à ceux de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, tel que modifié. Ensuite, lorsque le règlement n° 1258/1999 a été abrogé par le règlement n° 1290/2005, l’article 31 de ce dernier règlement a repris l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 en des termes analogues, en prévoyant ce qui suit :

« 1. La Commission décide des montants à écarter du financement [de l’Union] lorsqu’elle constate que des dépenses […] n’ont pas été effectuées conformément aux règles [de l’Union]

2. La Commission évalue les montants à écarter au vu, notamment, de l’importance de la non‑conformité constatée. La Commission tient compte de la nature et de la gravité de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à [l’Union]. 

[…] »

44      Deuxièmement, il ressort des visas de la décision attaquée qu’elle a été adoptée sur le double fondement de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 et de l’article 31 du règlement n° 1290/2005. En effet, dans le cas des corrections financières appliquées dans le cadre du régime du paiement unique, qui concernaient l’ensemble des demandes de l’année 2006, le règlement n° 1258/1999 s’appliquait aux dépenses encourues jusqu’au 15 octobre 2006, et le règlement n° 1290/2005, conformément à son article 47, n’était applicable qu’aux dépenses encourues à partir du 16 octobre 2006. L’application consécutive des deux dispositions précitées aux corrections financières pour les dépenses encourues en 2006 était possible du fait qu’elles étaient quasi identiques.

45      Troisièmement, pour autant que la République hellénique soutienne que les orientations ont été établies sur le fondement d’une base juridique formelle dans le règlement n° 729/70, cet argument doit être rejeté. Ce règlement ne prévoit pas explicitement la rédaction de telles orientations et ces dernières, pour leur part, ne visent pas ce règlement. En effet, les orientations émanent d’un document interne de la Commission qui est mis à la disposition des États membres et qui a été rédigé en 1997 en tenant compte de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 729/70, tel que modifié par le règlement n° 1287/95.

46      Quatrièmement, il y a lieu de relever que rien ne s’oppose à ce que la Commission, afin d’assumer pleinement l’habilitation prévue à l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, dans sa version résultant du règlement n° 1287/95, à l’article 7, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement n° 1258/1999 ou à l’article 31, paragraphe 1, du règlement n° 1290/2005, adopte des orientations concernant les corrections financières et donne mission aux services concernés de les appliquer. Ces orientations contribuent à assurer que, lorsque la Commission prend des décisions en application de ces dispositions, les États membres ou les autorités désignées par eux bénéficient, dans des situations comparables, d’un traitement identique. De telles orientations sont susceptibles de renforcer la transparence des décisions individuelles adressées aux États membres. Les orientations indiquent ainsi les lignes générales sur le fondement desquelles la Commission envisage, en application de la réglementation pertinente, d’adopter ultérieurement des décisions individuelles dont la légalité pourra être contestée par l’État membre concerné devant le Tribunal (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 6 avril 2000, Espagne/Commission, C‑443/97, Rec. p. I‑2415, points 31 à 33, et arrêt du Tribunal du 17 mai 2013, Grèce/Commission, T‑294/11, non encore publié au Recueil, point 154).

47      Cinquièmement, si la République hellénique soutient que seuls les critères prévus à l’article 31, paragraphe 2, du règlement n° 1290/2005 sont à prendre en considération lors de l’évaluation des montants à écarter du financement, il ne ressort pas de la lecture des orientations que celles‑ci prévoient, à cet égard, des critères différents. Au contraire, elles se limitent à préciser la méthode et les paramètres que la Commission utilisera pour le calcul des montants à écarter du financement, sur la base des critères prévus à l’article 31, paragraphe 2, du règlement n° 1290/2005, lesquels étaient également prévus à l’article 7, paragraphe 4, quatrième alinéa, du règlement n° 1258/1999 et à l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, dans sa version résultant du règlement n° 1287/95 (arrêt Grèce/Commission, point 40 supra, point 98).

48      En effet, les orientations indiquent que, lorsqu’il est impossible de déterminer le montant réel des paiements irréguliers et, de ce fait, le montant des pertes financières subies par l’Union, ce sont des corrections forfaitaires qui sont appliquées en fonction de l’évaluation du risque de perte encouru par le budget de l’Union du fait des contrôles déficients. Le montant de la correction forfaitaire prévue dans les orientations varie entre 2, 5, 10 et 25 %, voire plus, des dépenses déclarées par un État membre, en fonction de l’importance des manquements constatés dans la mise en œuvre des contrôles. À cet effet, les orientations opèrent une distinction entre les contrôles clés et les contrôles secondaires.

49      Conformément à l’annexe 2 des orientations (pages 11 à 13), lorsqu’un ou plusieurs contrôles clés ne sont pas effectués ou le sont si mal ou si rarement qu’ils sont inefficaces, il convient d’appliquer une correction à hauteur de 10 % des dépenses déclarées. Lorsque tous les contrôles clés sont effectués, mais le sont sans respecter le nombre, la fréquence ou la rigueur préconisés, il convient d’appliquer une correction à hauteur de 5 % des dépenses déclarées. Si l’État membre effectue correctement les contrôles clés, mais omet de réaliser un ou plusieurs contrôles secondaires, la correction applicable est une correction à hauteur de 2 % des dépenses déclarées. Dans des cas exceptionnels, l’application de taux de correction plus élevés peut être décidée.

50      Les contrôles clés et les contrôles secondaires sont définis à l’annexe 2, page 11 des orientations, dans les termes suivants :

« Les contrôles clés sont les vérifications physiques et administratives requises pour contrôler les éléments quant au fond, en particulier la réalité de l’objet de la demande, la quantité et les conditions qualitatives, y compris le respect des délais, les exigences de récoltes, les délais de rétention, etc. Ils sont effectués sur le terrain et par regroupement avec des informations indépendantes, telles que les registres cadastraux. Les contrôles secondaires sont les opérations administratives nécessaires pour traiter correctement les demandes, telles que la vérification du respect des délais de soumission, l’identification de demandes en doublon pour un même objet, l’analyse du risque, l’application de sanctions et la supervision adéquate des procédures. »

51      En outre, la Commission a élaboré une définition des contrôles clés et secondaires pour chaque régime d’aides dans son document AGRI/17933/2000, du 24 juin 2003, sur les « ‘contrôles clés’, ‘contrôles secondaires’, et autres » (ci-après le « document AGRI/17933/2000 »). En ce qui concerne le régime du paiement unique, les contrôles clés et secondaires sont définis dans le document AGRI/64041/2005 sur « les contrôles clés et les contrôles secondaires dans le secteur des aides à la surface applicables depuis les demandes de l’année 2005 » (ci-après le « document AGRI/64041/2005 »). À cet effet, il y a lieu de révéler que la République hellénique ne contredit pas l’observation de la Commission selon laquelle ledit document a été mis à la disposition des États membres et discuté avec ceux-ci au sein du comité FEAGA.

52      Enfin, à la page 12 de l’annexe 2 des orientations, la Commission précise que le taux de correction doit être appliqué à la part des fonds pour laquelle la dépense a constitué un risque. Ainsi, lorsque la carence résulte de l’absence d’adoption d’un système de contrôle approprié par un État membre, la correction doit être appliquée à toutes les dépenses relevant de la mesure concernée.

53      Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter la thèse de la République hellénique selon laquelle les orientations ne sauraient trouver application dans le cadre de la nouvelle PAC.

54      S’agissant de l’argument tenant à une application erronée de la marge d’appréciation de la Commission, la République hellénique soutient que les carences constatées dans la décision attaquée ne font pas apparaître les contrôles clés que la République hellénique n’aurait pas effectués et pour lesquels des corrections financières de 5 et de 10 % ont été imposées. Cependant, il convient de relever qu’il ressort des points 12.7.5.1 et 12.7.5.2 du rapport de synthèse que les manquements de la République hellénique à ses obligations, invoqués par la Commission pour justifier l’imposition des taux de correction forfaitaire de 5 % et de 10 %, concernaient des contrôles clés, tels que définis dans les orientations et le document AGRI/64041/2005. Sous réserve de l’analyse de l’exactitude matérielle de ces constatations, qui est contestée par la République hellénique dans son troisième moyen, cet argument doit, par conséquent, être écarté.

55      Au regard de ces considérations et dès lors que l’article 31, paragraphe 1, du règlement n° 1290/2005 est libellé en des termes quasi identiques à ceux de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, dans sa version résultant du règlement n° 1287/95, sous l’empire duquel les orientations, définies par la Commission en 1997, ont été adoptées, il convient de conclure que rien n’interdisait à la Commission de les appliquer également dans l’exercice des compétences que l’article 31, paragraphe 1, du règlement n° 1290/2005 lui attribuait (arrêt Grèce/Commission, point 46 supra, point 158).

56      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter la deuxième branche du premier moyen comme étant non fondée.

c)     Sur la troisième branche relative à la violation du principe de proportionnalité

57      La République hellénique invoque une violation du principe de proportionnalité résultant de l’application, au cas d’espèce, des orientations, dans le contexte tout à fait différent de la nouvelle PAC. En particulier, elle soutient que, dans le secteur des aides à la surface, les corrections forfaitaires de 10, voire de 15 %, pour des carences constatées en 2004 et en 2005, relatives à certaines aides, correspondaient à des montants de l’ordre de 63 millions d’euros. En comparaison, en raison de la réforme de la PAC et de l’augmentation très significative de la base de calcul des corrections forfaitaires qui en a résulté, la correction forfaitaire de 10 % qui a été imposée pour les aides à la surface, en 2006, correspondrait à un montant dépassant 210 millions d’euros, et la correction forfaitaire de 5 % qui a été imposée, en 2007, s’élèverait à un montant qui dépasserait 122 millions d’euros. Selon la République hellénique, ce résultat aurait dû conduire la Commission à réviser ou à reformuler les orientations et à réduire les taux des corrections. Or, ayant appliqué les orientations telles quelles, dans le cadre de la nouvelle PAC, les corrections forfaitaires qui en ont résulté seraient disproportionnées.

58      La République hellénique ajoute que la Commission a, elle-même, admis, dans une lettre du 25 juin 2008, contenant le procès‑verbal d’une réunion bilatérale, que l’application des orientations à la nouvelle PAC a impliqué des conséquences beaucoup plus préjudiciables pour les États membres. Selon la République hellénique, il ressort de ces éléments que la Commission a, elle-même, reconnu le caractère disproportionné des résultats d’une application stricte des orientations à la nouvelle PAC.

59      Or, il convient d’abord de rappeler que, selon la jurisprudence, le principe de proportionnalité, en tant que principe général du droit de l’Union, exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs poursuivis par la réglementation en cause. Ainsi, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (arrêts de la Cour du 12 juillet 2001, Jippes e.a., C‑189/01, Rec. p. I‑5689, point 81, et du Tribunal du 6 mai 2010, Comune di Napoli/Commission, T‑388/07, non publié au Recueil, point 143).

60      Ensuite, il convient de rappeler qu’une correction arrêtée par la Commission, conformément aux orientations qu’elle a adoptées en la matière, tend à éviter la mise à la charge du FEAGA et du Feader de montants n’ayant pas servi au financement d’un objectif poursuivi par la réglementation de l’Union en cause et ne constitue pas une sanction (voir arrêt du Tribunal du 31 mars 2011, Grèce/Commission, T‑214/07, non publié au Recueil, point 136, et la jurisprudence citée). La jurisprudence a ainsi reconnu que les taux forfaitaires retenus dans les orientations permettent à la fois le respect du droit de l’Union et la bonne gestion des ressources de l’Union ainsi que d’éviter que la Commission n’exerce son pouvoir discrétionnaire en imposant aux États membres des corrections démesurées et disproportionnées (arrêts du Tribunal du 10 septembre 2008, Italie/Commission, T‑181/06, non publié au Recueil, point 234, et du 17 mai 2013, Grèce/Commission, point 46 supra, point 175).

61      En l’espèce, il y a lieu de souligner que, sous la même réserve que celle énoncée au point 54 ci‑dessus, l’imposition en l’espèce des corrections forfaitaires de 5 et de 10 % était conforme aux orientations.

62      Néanmoins, la République hellénique considère que la Commission aurait dû s’écarter des orientations en l’espèce, dès lors que, en raison de l’augmentation significative de la base de calcul de la correction forfaitaire, augmentation qui, selon la République hellénique, est le résultat direct de l’adoption de la nouvelle PAC, le taux de correction, prévu dans les orientations et effectivement imposé, a conduit à une correction largement supérieure à celles imposées dans des cas analogues dans le passé, en chiffres absolus.

63      À cet égard, il y a lieu de révéler que le montant absolu des corrections financières est le résultat du même calcul mathématique dans le cadre de la nouvelle PAC, à savoir l’application par la Commission du taux forfaitaire, calculé sur la somme que l’État membre a reçue au titre de l’aide en question pendant l’année financière concernée. Comme la Commission le fait valoir à juste titre, le fait que les montants des corrections imposées sont supérieurs à ceux préalablement imposés est dû au fait que les corrections étaient alors imposées par produit, ou par organisation de marché, sans que la totalité des produits soit toujours contrôlée. Par contre, après la réforme de la PAC, la grande partie des aides directes au revenu des agriculteurs ont été intégrées dans le système de paiement unique, qui est attribué sur la base des surfaces cultivées. De ce fait, les irrégularités concernant le régime de paiement unique, qui, de par sa nature, a un caractère global, puisqu’il est lié à la surface et non à une culture spécifique, prennent une dimension plus importante, et, par conséquent, entraînent une correction plus élevée, car le contrôle est également devenu global. La logique et les principes à la base du système n’ont cependant pas changé, les corrections, dorénavant devenues universelles, étant le corollaire logique des paiements universels introduits par la nouvelle PAC. Le rapport entre paiement et, le cas échéant, correction étant alors le même sous les régimes de l’ancienne PAC et de la nouvelle PAC. Le système demeure donc proportionnel.

64      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la troisième branche du premier moyen doit également être rejetée comme étant non fondée. Partant, le premier moyen dans son ensemble doit être rejeté.

2.     Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 42 du règlement nº 1782/2003 et de l’article 21 du règlement nº 795/2004 ainsi que d’une appréciation erronée des faits

65      Par le deuxième moyen, la République hellénique fait valoir, en substance, que c’est à tort que la Commission a conclu que les critères institués par la République hellénique pour l’octroi des droits de la réserve nationale n’étaient pas conformes à l’article 42 du règlement nº 1782/2003 et à l’article 21 du règlement n° 795/2004. Selon elle, la Commission s’est fondée sur une interprétation erronée de ces dispositions.

66      Avant d’apprécier le bien-fondé de ce moyen, il convient de préciser les critères d’octroi des droits de la réserve nationale appliqués par la République hellénique.

67      L’article 27, paragraphe 1, de l’arrêté ministériel conjoint 292464/2005, tel que modifié par l’arrêté 2626427/2006, définit les catégories de bénéficiaires des droits de la réserve nationale pour 2006. Sont visés, d’une part, les agriculteurs qui ont été intégrés dans un régime des « jeunes agriculteurs » après la période de référence ou qui ont débuté leur activité agricole après le 31 décembre 2002 ou en 2002, sans recevoir d’aide directe au titre de cette année et, d’autre part, les agriculteurs qui, jusqu’au 15 mai 2004, ont investi pour augmenter les capacités de leur exploitation, qui ont acheté des droits à des primes ou qui ont participé à des programmes agroenvironnementaux.

68      L’article 3 de l’arrêté ministériel conjoint 292464/2005 définit les « jeunes agriculteurs » comme les agriculteurs qui ont adhéré à un programme de jeunes agriculteurs dans le cadre du règlement (CE) nº 1257/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, concernant le soutien au développement rural par le FEOGA et modifiant et abrogeant certains règlements (JO L 160, p. 80). Par ailleurs, l’article 8 dudit règlement vise des jeunes agriculteurs dans la mesure où il prévoit des aides destinées à faciliter l’installation des jeunes agriculteurs de moins de 40 ans, possédant des connaissances et compétences professionnelles suffisantes et, s’installant pour la première fois en qualité de chef d’exploitation sur une exploitation agricole dont la viabilité économique peut être démontrée et qui satisfait à certain nombre de normes minimales.

69      Lors d’une première phase d’octroi des droits de la réserve nationale pour 2006, les autorités grecques ont octroyé des droits, d’une part, aux bénéficiaires desdits droits visés dans la première catégorie à l’article 27, paragraphe 1, de l’arrêté 292464/2005, c’est-à-dire aux agriculteurs ayant intégré un programme de jeunes agriculteurs après la période de référence, c’est-à-dire, à partir de 2002, et, d’autre part, aux agriculteurs ayant moins de 40 ans. Le nombre de droits octroyés était régi par la règle appelée « 7 + 2 + 1 », selon laquelle les autorités grecques avaient octroyé sept droits, d’une valeur unitaire de 750 euros, pour les agriculteurs ayant intégré un programme de jeunes agriculteurs et ceux ayant moins de 40 ans, augmentés de deux droits, d’une valeur unitaire égale, pour les habitants des régions montagneuses ou défavorisées, et augmentés d’un droit, d’une valeur unitaire égale, pour ceux qui avaient déjà au moins trois enfants. Ensuite, il y avait certaines réductions des droits octroyés dans le cas où l’agriculteur disposait des droits provisoires ou définitifs. Les agriculteurs qui se sont vu octroyer des droits de la réserve nationale au cours de la première phase étaient tenus d’activer un nombre de droits égal à celui qui leur avait été octroyé, en déclarant dans leur demande d’activation un nombre équivalant d’hectares cultivés de cultures éligibles, en plus de leurs droits définitifs.

70      Lors de la seconde phase d’octroi des droits de la réserve nationale pour 2006, les autorités grecques auraient octroyé les droits à la réserve nationale selon la même règle que celle applicable lors de la première phase, à savoir la règle appelée « 7 + 2 + 1 », à trois catégories de bénéficiaires, à savoir les agriculteurs ayant moins de 40 ans, qui n’avaient pas intégré un programme agroenvironnemental après la période de référence ou qui avaient des plans d’amélioration approuvés et qui, en outre, avaient présenté une demande d’activation et avaient déclaré dans leur demande d’activation un nombre équivalant d’hectares cultivés de cultures éligibles, en plus de leurs droits définitifs, les agriculteurs ayant moins de 40 ans, qui ont augmenté leur exploitation de plus de 20 % par rapport à la période de référence et les investisseurs qui avaient présenté une demande à cet effet et qui remplissaient, preuves à l’appui, le critère de l’investisseur, c’est-à-dire qu’ils avaient acheté des terres ou des animaux ou bien qu’ils avaient un loyer à long terme.

71      Or, il ressort du point 12.7.5.2 du rapport de synthèse que la Commission a constaté que les critères d’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs relatifs à l’âge de l’agriculteur et le nombre de membres de sa famille ne garantissaient pas une égalité de traitement entre les agriculteurs, contrairement à l’article 42 du règlement nº 1782/2003. En ce qui concerne les critères d’octroi des droits de la réserve nationale aux agriculteurs ayant effectué des investissements, ils ne reflétaient pas la nature et la valeur des investissements pour les investisseurs, contrairement à l’article 21 du règlement n° 795/2004.

72      À cet égard, il y a lieu de rappeler que les obligations des États membres relatives à l’octroi des droits de la réserve nationale se distinguent selon les différentes catégories de bénéficiaires prévues par l’article 42, paragraphes 3, 4 et 5, du règlement n° 1782/2003.

73      Plus précisément, les États membres sont obligés d’utiliser la réserve nationale afin d’établir les montants de référence pour l’octroi des droits au paiement pour les agriculteurs se trouvant dans une « situation spéciale », notamment, conformément à l’article 21 du règlement n° 795/2004, ceux qui ont fait des investissements (article 42, paragraphe 4, du règlement n° 1782/2003). Par contre, les paragraphes 3 et 5 de l’article 42 du règlement n° 1782/2003 confèrent, de manière expresse, aux États membres, la possibilité d’utiliser ou non la réserve nationale, respectivement, pour octroyer des montants de référence aux agriculteurs qui ont commencé à exercer une activité agricole après le 31 décembre 2002 ou en 2002, mais sans percevoir de paiements directs pendant cette année-là, et aux agriculteurs dans les zones soumises à des programmes de restructuration ou de développement.

74      Dès lors, le Tribunal estime logique d’apprécier les arguments avancés par la République hellénique à l’appui du deuxième moyen, en premier lieu, en ce qui concerne l’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs et, en second lieu, en ce qui concerne l’octroi des droits de la réserve nationale aux agriculteurs ayant effectué des investissements.

a)     Sur les arguments relatifs à l’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs

75      Tout d’abord, il y a lieu d’observer, premièrement, que la Commission n’a pas critiqué l’octroi des droits de la réserve nationale aux bénéficiaires ayant adhéré à un programme de « jeunes agriculteurs », dont un des critères d’adhésion était le fait d’avoir moins de 40 ans, mais uniquement dans la mesure où les autorités grecques ont simplement appliqué le critère d’âge pour octroyer lesdits droits. Il n’est pas contesté, deuxièmement, que les autorités grecques ont octroyé des droits de la réserve nationale au titre de l’article 42, paragraphe 3, du règlement nº 1782/2003 aux nouveaux agriculteurs.

76      La question devant le Tribunal est, dès lors, limitée à celle de savoir si la Commission s’est fondée sur une interprétation erronée de l’article 42 du règlement nº 1782/2003 en constatant que les critères d’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs relatifs à l’âge de l’agriculteur et le nombre de membres de sa famille ne garantissaient pas une égalité de traitement entre les agriculteurs.

77      L’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs relève de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003. En effet, il ressort du considérant 29 dudit règlement que la référence aux agriculteurs ayant commencé à exercer une activité agricole après la date prévue audit article vise les nouveaux agriculteurs. Spécifiquement, ledit considérant prévoit que la réserve nationale « peut être utilisée également pour faciliter la participation des nouveaux agriculteurs au régime ». Cela est confirmé par l’article 2, sous k), du règlement d’application n° 795/2004 en vertu duquel doit être considéré comme « agriculteur commençant à exercer une activité agricole » aux fins de cet article, « toute personne physique ou morale n’ayant jamais exercé d’activité agricole en son nom et à son propre compte ».

78      De surcroit, l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003 s’applique exclusivement aux nouveaux agriculteurs, ceux-ci ne devant pas simplement être pris en compte en priorité. En effet, si tel était le cas, ce paragraphe, contrairement aux paragraphes 4 et 5 dudit article, ne comporterait aucune délimitation du groupe des bénéficiaires. En outre, la réserve nationale n’atteindrait pas son objectif si elle était tout d’abord constituée par une réduction linéaire des montants de référence de tous les agriculteurs (article 42, paragraphe 1, dudit règlement), puis reversée à tous les agriculteurs. Par conséquent, l’expression « en priorité » renvoie plutôt au rapport mutuel entre les paragraphes 3 à 5 de cet article. En effet, alors que le paragraphe 4 de l’article en question impose impérativement aux États membres d’utiliser la réserve nationale pour les agriculteurs se trouvant dans une situation spéciale, les paragraphes 3 et 5 du même article leur laissent une option. Ensuite, la possibilité d’utiliser la réserve nationale, prévue audit paragraphe 3, prévaut, à cet égard, sur celle visée audit paragraphe 5, qui concerne les agriculteurs dans certaines zones. En effet, le paragraphe 7 de l’article en cause prévoit à cet égard que les droits de la réserve nationale à octroyer doivent être réduits de manière linéaire lorsqu’elle ne suffit pas à couvrir les cas visés aux paragraphes 3 et 4 du même article. Mais cela n’est pas prévu pour les cas visés au paragraphe 5 de cet article, lesquels ne peuvent être pris en compte que lorsque la réserve nationale suffit pour les cas visés auxdits paragraphes 3 et 4.

79      Dès lors, il ressort de l’analyse de l’objectif de la réserve nationale, ainsi que de l’économie de l’article 42 du règlement n° 1782/2003, que le domaine d’application du paragraphe 3 de cet article se réfère exclusivement aux nouveaux agriculteurs au sens où ils sont définis dans ce règlement (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Mme Kokott sous l’arrêt de la Cour du 15 septembre 2011, Unió de Pagesos de Catalunya, C‑197/10, Rec. p. I‑8495, I‑8497, points 45 à 49).

80      Il s’ensuit que, dans la mesure où la thèse de la République hellénique doit être comprise dans le sens que les agriculteurs, tels que définis à l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003, se réfèrent aux nouveaux agriculteurs de moins de 40 ans, cette thèse ne peut être accueillie.

81      Cependant, comme la République hellénique le relève à bon droit, la réserve nationale est limitée. En effet, il découle de l’article 42, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 1782/2003 que les ressources disponibles à cet effet ne peuvent dépasser un certain plafond. Il peut donc être utile aux États membres de restreindre les paiements issus de la réserve nationale.

82      À cet égard, force est de constater que l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003 laisse aux États membres une certaine marge d’appréciation pour établir les montants de référence « selon des critères objectifs et de manière à assurer l’égalité de traitement entre les agriculteurs et à éviter des distorsions du marché et de la concurrence », comme dans le cas des paragraphes 4 et 5 dudit article.

83      Il convient de noter que, s’il y a une différence dans le libellé du paragraphe 3 de l’article 42 du règlement n° 1782/2003, comparé aux paragraphes 4 et 5 dudit article, celle-ci semble ne pas être significative. Ainsi, le paragraphe 3 de cet article prévoit que les États membres disposent d’une marge d’appréciation pour « octroyer […] les montants de références […] selon des critères objectifs et de manière à assurer l’égalité de traitement entre les agriculteurs et à éviter des distorsions du marché et de la concurrence. » Les paragraphes 4 et 5 du même article prévoient que les États membres disposent d’une marge d’appréciation pour « établir, selon des critères objectifs et de manière à assurer l’égalité de traitement entre les agriculteurs et à éviter des distorsions du marché et de la concurrence, les montants de référence ». Tout d’abord, il ne semble pas y avoir une raison logique pour que la marge de discrétion des États membres soit différente en ce qui concerne les bénéficiaires visés dans le paragraphe 3 de l’article en question. Cette interprétation est reflétée dans l’article 6, paragraphe 5, et l’article 21, paragraphe 1, du règlement n° 795/2004, qui rappellent la marge de discrétion prévue dans les paragraphes 3 à 5 de l’article 42 du règlement n° 1782/2003, sans distinguer ces paragraphes. Plus précisément, l’article 6, paragraphe 5, et l’article 21, paragraphe 1, du règlement n° 795/2004 prévoient que les droits de la réserve nationale sont calculés « en divisant un montant de référence établi par l’État membre concerné selon des critères objectifs et de manière à assurer l’égalité de traitement entre les agriculteurs et à éviter des distorsions du marché ou de la concurrence » par un certain nombre d’hectares.

84      En ce qui concerne l’étendue de cette marge d’appréciation, la Cour a retenu que rien ne s’opposait à ce que les États membres fixent un montant de référence égal à zéro en application de l’article 42, paragraphe 4, du règlement n° 1782/2003, pourvu qu’ils le fassent sur la base de critères objectifs (arrêt de la Cour du 22 octobre 2009, Elbertsen, C‑449/08, Rec. p. I‑10241, point 29).

85      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans la mise en œuvre de la réglementation de l’Union, les États membres sont tenus non seulement de se conformer aux dispositions du règlement concerné, mais aussi de respecter les principes généraux du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 4 juin 2009, JK Otsa Talu, C‑241/07, Rec. p. I‑4323, point 46).

86      Il convient en particulier de signaler, dans ce contexte, que l’interdiction de la discrimination fondée sur l’âge a le caractère d’un droit fondamental, en vertu de l’article 21, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (voir conclusions de l’avocat général M. Bot sous l’arrêt de la Cour du 19 janvier 2010, Kücükdeveci, C‑555/07, Rec. p. I‑365, I‑367, point 77), et qu’elle doit être respectée par les États membres, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, de ladite charte lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union.

87      Selon une jurisprudence constante, le principe de l’égalité de traitement ou de la non-discrimination, dont l’interdiction de la discrimination fondée sur l’âge n’est qu’une expression particulière (arrêt Kücükdeveci, point 86 supra, point 50), exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt de la Cour du 11 juillet 2006, Franz Egenberger, C‑313/04, Rec. p. I‑6331, point 33, et la jurisprudence citée). À cet effet, doivent être pris en considération les principes et objectifs du domaine dont relève l’acte en cause (arrêt de la Cour du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a., C‑127/07, Rec. p. I‑9895, point 26).

88      S’agissant du cas d’espèce, sont dans une position comparable, en ce qui concerne l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003, tous les nouveaux agriculteurs qui ont demandé les droits de la réserve nationale.

89      En octroyant des droits de la réserve nationale aux agriculteurs se trouvant dans une position comparable selon la règle appelée « 7 + 2 + 1 », à savoir en fonction de leur âge, de la situation de leur exploitation et du nombre de leurs enfants, la République hellénique a traité de manière différente les agriculteurs se trouvant dans des situations comparables. Cela n’est pas contesté.

90      S’agissant de l’existence d’une justification objective relative au critère de l’âge de l’agriculteur, la République hellénique fait valoir que le critère d’âge est conforme aux objectifs poursuivis par la nouvelle PAC, à savoir le soutien aux jeunes agriculteurs et la viabilité de l’agriculture. Ces objectifs seraient non seulement consacrés dans le régime de soutien des nouveaux agriculteurs de moins de 40 ans dans le domaine du développement rural, notamment dans le règlement (CE) n° 1698/2005 du Conseil, du 20 septembre 2005, concernant le soutien au développement rural par le Feader (JO L 277, p. 1), mais aussi dans une proposition législative de la Commission, qui était en cours d’examen lors de la procédure écrite. Par la proposition législative en question, portant sur la réforme des aides directes et de paiement unique, la Commission aurait proposé que les droits de la réserve nationale soient octroyés, en priorité, à des jeunes agriculteurs de moins de 40 ans.

91      Dans ses écritures, la Commission s’est opposée à la République hellénique, faisant valoir que les mesures prévues par le règlement n° 1698/2005 au soutien des nouveaux agriculteurs de moins de 40 ans n’étaient pas pertinentes. À cet égard, elle soutenait que les objectifs du règlement n° 1782/2003 et du règlement n° 1698/2005 étaient distincts. En effet, l’objectif du régime de paiement unique sous le règlement n° 1782/2003 serait de soutenir le revenu des agriculteurs, ce qui aurait exclu de favoriser les agriculteurs de moins de 40 ans, nonobstant la proposition législative en question, alors que, dans le cas du règlement n° 1698/2005, les objectifs seraient, d’une part, l’octroi d'avantages particuliers aux jeunes agriculteurs afin de faciliter non seulement leur installation, mais également l’adaptation structurelle de leur exploitation, une fois établis, et, d’autre part, la retraite anticipée de la profession agricole qui devrait permettre une importante transformation structurelle des exploitations faisant l’objet de la cession par le biais de la mesure d’aide à l’installation des jeunes agriculteurs.

92      Au cours de la période écoulée entre la procédure écrite et l’audience, la proposition législative en question a donné lieu à l’adoption du règlement (UE) nº 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (CE) nº 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) nº 73/2009 du Conseil (JO L 347, p  608). Ledit règlement, qui est l’ultime successeur du règlement n° 1782/2003, prévoit à son article 30, paragraphe 6, que « [l]es États membres utilisent leur réserve nationale […] pour attribuer, en priorité, des droits au paiement aux jeunes agriculteurs et aux agriculteurs qui commencent à exercer une activité agricole ». Les jeunes agriculteurs sont définis à l’article 50, paragraphe 2, du règlement nº  1307/2013 comme des personnes physiques qui, notamment, sont âgées de 40 ans, au maximum, au cours de l’année d’introduction de la demande de paiement.

93      En réponse aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience concernant la cohérence entre l’argument selon lequel le soutien aux agriculteurs de moins de 40 ans n’était pas un objectif de la PAC, sauf dans le cadre du développement rural, et la proposition législative ayant donné lieu à l’adoption du règlement nº  1307/2013, prévoyant un tel soutien dans le régime du paiement unique et de la réserve nationale, la Commission a simplement observé que tel était le cas auparavant. Par ailleurs, la Commission a désavoué sa critique concernant le critère de l’âge qui a été appliqué par la République hellénique, constatant que le problème essentiel de l’octroi des droits de la réserve nationale par cette dernière résidait dans le fait qu’il ne reflétait pas la valeur des investissements.

94      Or, il convient de constater, ainsi que la Commission l’a justement retenu, que l’objectif du régime de paiement unique, conformément au règlement n° 1782/2003, était de soutenir le revenu des agriculteurs. Cela ressort du considérant 21 dudit règlement qui prévoit que « [l]es régimes de soutien relevant de la politique agricole commune fournissent une aide directe au revenu, notamment en vue d’assurer un niveau de vie équitable à la population agricole ».

95      En outre, l’objectif de la transformation structurelle des exploitations qui vise à garantir la viabilité des exploitations, tel que reconnu par le juge de l’Union (arrêt de la Cour du 11 avril 2013, Soukupová, C‑401/11, non encore publié au Recueil, point 24), n’était pas exclusif au régime du développement rural, contrairement à l’argument de la Commission. En effet, la promotion d’une agriculture durable est visée par le considérant 5 du règlement n° 1782/2003. À cet égard, il y a lieu d’observer que les régimes du développement rural et du soutien du revenu des agriculteurs par le biais des paiements directs dans le cadre de la PAC ne doivent pas être conçus comme des régimes strictement séparés, mais plutôt comme des régimes partageant une relation symbiotique. En effet, il est également prévu audit considérant du règlement n° 1782/2003 que, pour promouvoir l’agriculture durable, il convient de réduire progressivement les paiements directs afin de réaliser des économies permettant de financer des mesures de développement rural.

96      Par ailleurs, l’avocat général Mme Kokott, dans ses conclusions sous l’arrêt Unió de Pagesos de Catalunya, point 79 supra (points 68 à 70), a conclu à la légitimité d’un critère ne permettant qu’aux jeunes agriculteurs ayant déjà perçu une aide à l’installation dans le cadre de l’article 22 du règlement n° 1698/2005 de bénéficier de la réserve nationale. L’avocat général a retenu, en particulier au point 69 de ses conclusions, que la réglementation espagnole concernée « [continuait] à contribuer au développement rural conformément aux objectifs généraux de la PAC » et que « [l]es chances de succès des agriculteurs méritant une aide et ayant déjà bénéficié d’une aide dans le cadre de leur première installation en [seraient] encore renforcées, ce qui [garantissait] simultanément une utilisation judicieuse et cohérente des budgets d’aide de l’Union ».

97      Il s’ensuit que l’argument se fondant sur une distinction fondamentale entre les objectifs du régime du paiement unique et ceux du régime du développement rural pour exclure l’objectif de soutien aux nouveaux agriculteurs de moins de 40 ans du régime du paiement unique ne peut être accueilli.

98      À titre surabondant, il y a lieu de relever que l’objectif de soutien aux jeunes agriculteurs a été longtemps consacré dans d’autres domaines de la PAC, en dehors du régime du développement rural, notamment à l’article 128, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003 concernant la réserve nationale de droits à la prime à la vache allaitante, qui prévoit l’attribution des droits « aux nouveaux arrivants, aux jeunes agriculteurs et à d’autres agriculteurs prioritaires », et à l’article 11 du règlement (CE) n° 1493/1999 du Conseil, du 19 mai 1999, portant organisation commune du marché vitivinicole (JO L 179, p. 1).

99      Dans ce contexte, l’affirmation de la Commission avancée lors de l’audience selon laquelle le soutien des nouveaux agriculteurs de moins de 40 ans, consacré dans le régime du paiement unique par le règlement nº 1307/2013, n’était pas un objectif de la PAC en 2006, doit aussi être écartée.

100    Il s’ensuit que c’est à tort que la Commission a constaté que le critère d’âge appliqué par la République hellénique, afin d’octroyer, en priorité, des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs de moins de 40 ans, ayant ou non adhéré à un programme de jeunes agriculteurs, était contraire à l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003. Par conséquent, il y a lieu d’accueillir le deuxième moyen de la République hellénique en ce qui concerne l’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs au titre de cette disposition, sans qu’il y ait besoin de se prononcer sur le critère tenant au nombre d’enfants de l’agriculteur.

b)     Sur les arguments relatifs à l’octroi des droits de la réserve nationale aux agriculteurs ayant effectué des investissements

101    La République hellénique ne contredit pas la constatation de la Commission que les critères établis par la République hellénique pour octroyer des droits de la réserve nationale aux agriculteurs n'auraient pas tenu compte de la valeur et de la nature de l’investissement du demandeur.

102    Cependant, la République hellénique fait valoir que, pour se voir octroyer des droits de la réserve nationale, les demandeurs étaient tenus de joindre des justificatifs de la nature et de la valeur des investissements, qui ont été vérifiées lors des contrôles effectués par l’Organismos pliromon kai elenchou koinotikon enischyseon prosanatolismou kai engyiseon (organisme grec de paiement et de contrôle des aides d’orientation et de garantie, ci-après l’« Opekepe »). En outre, elle ajoute que, pour que les droits en question soient activés, il a été demandé aux bénéficiaires des droits de la réserve nationale de présenter une demande à cet égard. Elle estime que, de cette manière, aucun producteur n’a reçu un nombre de droits plus importants que ceux qui sont proportionnels à la surface qu’il possédait ou qu’il avait acquise.

103    Dès lors, il convient d’examiner si, en constatant que les critères d’octroi des droits de la réserve nationale aux agriculteurs ayant effectué des investissements ne reflétaient pas la nature et la valeur des investissements, contrairement à l’article 21 du règlement n° 795/2004, la Commission a méconnu ledit article, dans la mesure où ces agriculteurs n’auraient pas reçu, de fait, un nombre de droits plus importants que ceux qui sont proportionnels à la surface qu’ils possédaient ou qu’ils avaient acquise.

104    Or, l’octroi des droits de la réserve nationale aux agriculteurs ayant effectué des investissements relève de l’article 42, paragraphe 4, du règlement n° 1782/2003, lu en combinaison avec l’article 21 du règlement n° 795/2004. Le premier article prévoit que les États membres utilisent la réserve nationale pour établir les montants de référence pour les agriculteurs se trouvant dans une situation spéciale, telle que définie par la Commission. Se trouve dans une situation spéciale, notamment, un agriculteur qui a effectué des investissements dans des capacités de production ou a acheté des terres, tel que stipulé dans le second article.

105    Il y a lieu de rappeler que l’article 42, paragraphe 4, du règlement n° 1782/2003, ainsi que l’article 6, paragraphe 5, et l’article 21, paragraphe 1, du règlement n° 795/2004 requièrent que les États membres établissent des montants de référence pour l’octroi des droits de la réserve nationale selon des critères « objectifs », qui assurent l’« égalité de traitement entre les agriculteurs » et évitent des « distorsions du marché et de la concurrence. » En plus, ce dernier article prévoit que ce montant de référence doit être divisé par un nombre d’hectares inférieur ou égal au nombre d’hectares que l’agriculteur a acquis.

106    Il résulte de l’article 21 du règlement n° 795/2004 que la valeur des droits de la réserve nationale, octroyés aux agriculteurs ayant effectué des investissements, doit avoir une corrélation avec le nombre d’hectares que l’agriculteur a acquis.

107    Or, en substance, la République hellénique se borne à argumenter que les agriculteurs en question devaient prouver leur qualité d’investisseur, avec des justificatifs démontrant la nature et la valeur des investissements. En outre, elle constate qu’un agriculteur ne pouvait activer les droits de la réserve nationale sans preuve qu’il détenait un nombre d’hectares correspondant au nombre de droits octroyés. Cet argument n’est pas pertinent. En effet, comme la Commission le soutient à juste titre, les démarches décrites par la République hellénique ne concernent que des vérifications et ne démontrent en rien que celle-ci ait calculé les droits de la réserve nationale octroyés aux investisseurs de la manière prévue à l’article 21 du règlement n° 795/2004.

108    Il s’ensuit que l’argument de la République hellénique selon lequel la Commission s’est fondée sur une interprétation erronée de l’article 21 du règlement nº 795/2004 en concluant que l’octroi des droits de la réserve nationale aux investisseurs ne reflétait pas la nature et la valeur des investissements doit être rejeté comme non fondé.

109    Par conséquent, le deuxième moyen de la République doit être accueilli pour autant qu’il concerne l’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs au titre de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003 et rejeté pour autant qu’il concerne l’octroi des droits de la réserve nationale aux agriculteurs ayant effectué des investissements au sens de l’article 21 du règlement nº 795/2004, au titre de l’article 42, paragraphe 4, du règlement n° 1782/2003.

110    Dès lors, se trouve posée la question de savoir quelles sont les conséquences juridiques à tirer de cette conclusion, et, plus spécifiquement, s’il y a lieu d’annuler l’ensemble de la correction forfaitaire de 10 % de la totalité des dépenses de la République hellénique relatives à la réserve nationale ou si une annulation partielle de cette correction peut être prononcée dans la mesure où la Commission a constaté que le critère d’âge appliqué par la République hellénique, afin d’octroyer, en priorité, des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs de moins de 40 ans, était contraire à l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003.

111    À cet égard, il convient de rappeler que le juge de l’Union n’est pas fondé à annuler partiellement la décision attaquée en cas d’indivisibilité de ses dispositions. Il convient donc de vérifier si le montant des droits de la réserve nationale octroyés aux nouveaux agriculteurs au titre de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003 est détachable de la correction forfaitaire de 10 % au titre des critères d’octroi des droits de la réserve nationale mentionnée au point 16 ci-dessus (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 9 juin 2005, Espagne/Commission, C‑287/02, Rec. p. I‑5093, points 71 à 74).

112    Or, il y a lieu de souligner que la République hellénique fait valoir par son troisième moyen, pris en sa seconde branche, que la Commission a violé l’article 31 du règlement nº 1290/2005 en ce que, pour la correction forfaitaire de 10 % relative à la réserve nationale, elle aurait dû utiliser comme montant de référence seulement les dépenses relatives aux droits de la réserve nationale octroyés aux agriculteurs ayant effectué des investissements au titre de l’article 42, paragraphe 4, du règlement nº 1782/2003, à savoir 40 899 337,50 euros, et non la totalité des dépenses relatives aux droits octroyés à toutes les catégories de bénéficiaires de la réserve nationale. La Commission n’a pas contesté l’exactitude de ce montant dans ses écritures.

113    À cet égard, il y a lieu de considérer que la correction forfaitaire de 10 % au titre des critères d’octroi des droits de la réserve nationale mentionnée au point 16 ci-dessus constitue l’addition d’une correction forfaitaire de 10 % des droits de la réserve nationale octroyés aux nouveaux agriculteurs au titre de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003, et d’une correction forfaitaire de 10 % des droits de la réserve nationale octroyés aux agriculteurs ayant effectué des investissements au titre de l’article 42, paragraphe 4, dudit règlement. Par conséquent, il est possible de limiter la correction financière relative à la réserve nationale au seul montant relevant effectivement des droits de la réserve nationale octroyés aux agriculteurs ayant effectué des investissements au titre de l’article 42, paragraphe 4, du règlement nº 1782/2003.

114    En raison du caractère détachable du montant des dépenses relatif aux droits de la réserve nationale octroyés aux nouveaux agriculteurs, il en découle que, sans qu’il y ait lieu d’annuler l’ensemble de la correction financière de 10 % relative aux dépenses liées à l’octroi des droits de la réserve nationale, une annulation partielle de cette correction peut être prononcée dans la mesure où la Commission a constaté que l’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs par la République hellénique était contraire à l’article 42 du règlement n° 1782/2003 (voir en ce sens, et par analogie, arrêt du 9 juin 2005, Espagne/Commission, C‑287/02, Rec. p. I‑5093, points 75 et 76), sous réserve de l’analyse du troisième moyen.

3.     Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 31 du règlement nº 1290/2005

115    Le troisième moyen est divisé en deux branches. Dans le cadre de la première branche, la République hellénique soutient que l’article 31 du règlement n° 1290/2005 ne s’applique pas à des carences relatives aux critères d’octroi des droits de la réserve nationale. La seconde branche est tirée d’une violation dudit article en ce qui concerne la correction forfaitaire de 10 % relative aux critères d’octroi des droits de la réserve nationale, et en ce qui concerne la correction forfaitaire de 5 % relative à l’absence de calcul des superficies des éleveurs d’ovins et de caprins dans le calcul des superficies et des montants de référence.

a)     Observations liminaires

116    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le FEAGA ne finance que les dépenses effectuées conformément aux droits de l’Union dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (arrêts de la Cour du 8 mai 2003, Espagne/Commission, C‑349/97, Rec. p. I‑3851, point 45, et du 24 février 2005, Grèce/Commission, C‑300/02, Rec. p. I‑1341, point 32 ; arrêts du Tribunal du 14 février 2008, Espagne/Commission, T‑266/04, non publié au Recueil, point 97, et du 12 septembre 2012, Grèce/Commission, T‑356/08, non publié au Recueil, point 12).

117    En outre, il appartient à la Commission, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, non de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEAGA (arrêt de la Cour du 11 janvier 2001, Grèce/Commission, C‑247/98, Rec. p. I‑1, points 7 à 9 ; arrêts du Tribunal du 1er juillet 2009, Espagne/Commission, T‑259/05, non publié au Recueil, point 112, et du 12 septembre 2012, Grèce/Commission, point 116 supra, point 13).

118    En effet, la gestion du financement du FEAGA repose principalement sur les administrations nationales chargées de veiller à la stricte observation des règles de l’Union. Ce régime, fondé sur la confiance entre les autorités nationales et l’Union, ne comporte aucun contrôle systématique de la part de la Commission, que celle-ci serait d’ailleurs matériellement dans l’impossibilité d’assurer. Seul l’État membre est en mesure de connaître et de déterminer avec précision les données nécessaires à l’élaboration des comptes du FEAGA, la Commission ne jouissant pas de la proximité nécessaire pour obtenir les renseignements dont elle a besoin auprès des agents économiques (arrêts de la Cour du 1er octobre 1998, Irlande/Commission, C‑238/96, Rec. p. I‑5801, point 30, et du 7 juillet 2005, Grèce/Commission, C‑5/03, Rec. p. I‑5925, point 97 ; arrêt du Tribunal du 17 octobre 2012, Espagne/Commission, T‑491/09, non publié au Recueil, point 25).

119    C’est, en conséquence, à l’État membre qu’il incombe de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (arrêt du 12 septembre 2012, Grèce/Commission, point 116 supra, point 13).

120    L’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système de contrôle fiable et opérationnel. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle (arrêts de la Cour du 28 octobre 1999, Italie/Commission, C‑253/97, Rec. p. I‑7529, point 7 ; du 8 mai 2003, Espagne/Commission, point 116 supra, point 48, et du 24 février 2005, Grèce/Commission, point 116 supra, point 35 ; arrêt du Tribunal du 12 juillet 2011, Slovénie/Commission, T‑197/09, non publié au Recueil, point 40).

121    C’est à la lumière de ces considérations de principe qu’il convient d’examiner le troisième moyen.

 Sur la première branche, tirée de l’application de l’article 31 du règlement n° 1290/2005 à des carences concernant les critères d’octroi des droits de la réserve nationale

122    La République hellénique fait valoir que l’imposition d’une correction financière est subordonnée à la constatation par la Commission que les dépenses effectuées par le FEAGA n’ont pas été réalisées conformément aux règles de l’Union. En pareil cas, la Commission décide des montants qui doivent être écartés, en tenant compte de l’absence de mise en conformité, de la nature et de la gravité de la violation ainsi que du préjudice financier subi par l’Union. Selon la République hellénique, à supposer que les critères d’octroi des droits de la réserve nationale n’aient pas été conformes à l’article 42 du règlement n° 1782/2003, cela n’était pas susceptible de constituer une violation de l’article 31 du règlement n° 1290/2005. Dès lors, la Commission ne pouvait pas avoir recours à cet article pour imposer une correction financière.

123    En outre, la République hellénique soutient qu’imposer une correction financière en vertu de l’article 31 du règlement n° 1290/2005 suppose que les dépenses non conformes aux dispositions de l’Union aient conduit à un préjudice financier pour l’Union, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Pour qu’un tel préjudice se produise dans les circonstances de l’espèce, il aurait fallu que l’application des critères d’octroi des droits de la réserve nationale conduise à verser de tels droits à des agriculteurs qui n’étaient pas des bénéficiaires prévus à l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003. Tel ne serait pas le cas en l’espèce.

124    La Commission s’oppose aux arguments de la République hellénique.

125    S’agissant de l’argument de la République hellénique selon lequel l’application des critères d’octroi des droits de la réserve nationale non conformes à l’article 42 du règlement n° 1782/2003 ne peut constituer une violation de l’article 31 du règlement n° 1290/2005, il suffit de constater que la correction financière en question n’était pas fondée sur une violation de ce dernier article. Il ressort du rapport de synthèse que la correction financière de 10 % relative aux critères d’octroi des droits de la réserve nationale était imposée au titre d’une violation de l’article 42 du règlement n° 1782/2003. Par ailleurs, l’article 31 du règlement n° 1290/2005 ne prévoit des obligations que pour la Commission.

126    L’argument de la République hellénique selon lequel le paiement d’une aide irrégulière peut ne pas entraîner de préjudice pour le FEAGA est également fondé sur une prémisse erronée. Il suffit de rappeler à cet égard que le FEAGA ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions de l’Union (point 116 ci-dessus). En conséquence, tout versement irrégulier d’une aide entraîne donc un préjudice au titre du FEAGA. Permettre ce préjudice revient à vider de leur substance tous les contrôles instaurés par les règlements n° 1258/1999 et n° 1290/2005 et serait contraire au principe de l’aide individuelle et au contrôle du bien-fondé de cette aide (voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 25 juillet 2006, Belgique/Commission, T‑221/04, non publié au Recueil, point 86).

127    Il s’ensuit que l’article 31 du règlement n° 1290/2005, qui prévoit que la Commission écarte du financement de l’Union des dépenses qui n'ont pas été effectuées conformément aux règles de l’Union, ne s’oppose pas à l’imposition d’une correction forfaitaire pour l’application de critères d’octroi des droits de la réserve nationale non conforme à l’article 42 du règlement n° 1782/2003.

128    À la lumière de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le troisième moyen, pris en sa première branche.

 Sur la seconde branche, tirée d’une violation de l’article 31 du règlement n° 1290/2005 en ce qui concerne l’imposition des corrections forfaitaires

–       Application d’une correction forfaitaire de 10 % relative aux critères d’octroi des droits de la réserve nationale

129    La République hellénique fait valoir, à titre subsidiaire, que la correction forfaitaire de 10 %, imposée par la Commission, relative au constat que les critères d’octroi des droits de la réserve nationale n’étaient pas conformes à l’article 42 du règlement n° 1782/2003, n’était pas justifiée en l’occurrence. À cet égard, elle soutient que les orientations prévoient une correction forfaitaire de 10 % seulement lorsqu’un ou plusieurs contrôles clés n’ont pas été effectués ou ont été effectués de manière défectueuse ou selon une fréquence limitée. Elle ajoute que les contrôles clés consistaient en des contrôles sur place et administratifs concernant les données quant au fond, comme l’existence de l’objet de la demande et des conditions de qualité. Par définition, l’adoption et l’application des critères d’octroi des droits de la réserve nationale, même s’ils ne sont pas objectifs, ne s’analyseraient pas comme étant une absence de contrôle clé au sens des orientations.

130    Par ailleurs, selon la République hellénique, cet argument est même confirmé par le document AGRI/64041/2005, invoqué par la Commission dans ses écritures. Ce document ferait référence à l’obligation de prévoir une « procédure de répartition des droits sur la réserve nationale ». Cela signifierait que relève d’un contrôle clé le respect par les États membres de l’obligation de réglementer la procédure de répartition des droits de la réserve nationale. Il ne serait mentionné nulle part que le fait pour les États membres de respecter des critères précis, lors de la répartition nationale entre plusieurs bénéficiaires, relève d’un contrôle clé.

131    La Commission s’oppose aux arguments de la République hellénique.

132    Tout d’abord, la thèse de la République hellénique, selon laquelle le manquement à l’obligation de réglementer la procédure de répartition des droits de la réserve nationale relève d’un contrôle clé, justifiant l’imposition d’une correction financière de 10 %, alors que les manquements relatifs au non-respect des critères précis, lors de la répartition nationale entre plusieurs bénéficiaires, relève d’un contrôle secondaire, ne justifiant qu’une correction moindre, est illogique et ne saurait être accueillie.

133    En effet, les constatations de la Commission concernant les critères d’octroi des droits de la réserve nationale s’inscrivent dans le cadre de la détermination même du nombre ou de la valeur des droits de la réserve nationale dus et de ce fait relèvent du champ d’application des contrôles clés (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 9 septembre 2011, Grèce/Commission, T‑344/05, non publié au Recueil, point 312).

134    Cette conclusion est confirmée par les termes du document AGRI/64041/2005, qui prévoit ce qui suit :

« 1. Contrôles clés

Les droits correctement déterminés sont octroyés aux agriculteurs.

Cela nécessite :

[…]

–        La détermination correcte des droits lors de l’entrée en vigueur du régime (voir article 43/article 59 du règlement n° 1782/2003). Les points importants comprennent, notamment :

[…]

–        (Une procédure pour) l’octroi des droits de la réserve nationale (article 42 du règlement n° 1782/2003 et articles 6 et 7 du règlement n° 795/2004). »

135    Il résulte ainsi du document AGRI/64041/2005 que les « contrôles clés », énumérés en son point 1, paragraphe 1, comprennent non seulement la mise en place d’une procédure pour la détermination correcte des droits de la réserve nationale, mais également l’octroi desdits droits. En effet, les termes « une procédure pour » apparaissent entre parenthèses, ce qui indique que le texte qui suit, à savoir « l’octroi des droits de la réserve nationale » peut aussi être lu indépendamment. Dès lors, l’argument de la République hellénique selon lequel ce document ne définit pas comme contrôle clé le respect par les États membres des critères précis de l’octroi des droits de la réserve nationale lors de la répartition des droits entre plusieurs bénéficiaires, ne saurait prospérer.

136    En tout état de cause, à supposer que les constatations de la Commission concernant les critères d’octroi des droits de la réserve nationale ne relèveraient pas du document AGRI/64041/2005, cela ne serait pas déterminant.

137    À cet égard, il y a lieu de rappeler que les orientations n’indiquent que les lignes générales sur le fondement desquelles la Commission envisage d’imposer les corrections forfaitaires (voir ci-dessus points 46 à 50) et elles ne sont pas exhaustives.

138    Il y a lieu de constater que, lorsqu’il n’est pas possible d’évaluer précisément les pertes subies par le FEAGA, une correction forfaitaire, telle que prévue dans les orientations, peut être envisagée par la Commission (arrêt de la Cour du 18 septembre 2003, Royaume-Uni/Commission, C‑346/00, Rec. p. I‑9293, point 53).

139    En outre, lorsque la Commission, au lieu de rejeter la totalité des dépenses concernées par l’infraction, s’est efforcée d’établir des règles visant à instaurer un traitement différencié des cas d’irrégularités selon le niveau de carence et le degré de risque encourus par le FEAGA, l’État membre doit démontrer que ces critères sont arbitraires et inéquitables (arrêts de la Cour du 22 avril 1999, Pays-Bas/Commission, C‑28/94, Rec. p. I‑1973, point 56, et du 21 mars 2002, Espagne/Commission, C‑130/99, Rec. p. I‑3005, point 44 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 1er octobre 1998, Italie/Commission, C‑242/96, Rec. p. I‑5863, point 75).

140    À cet égard, il y a lieu de constater que la République hellénique n’apporte pas d’élément permettant de considérer que les critères appliqués par la Commission dans le cas d’espèce, en se fondant sur le document AGRI/64041/2005, pour déterminer le taux de la correction forfaitaire relative aux critères d’octroi des droits de la réserve nationale, soient arbitraires et inéquitables.

141    Il résulte de tout ce qui précède que l’argument de la République hellénique concernant le taux de 10 % de la correction forfaitaire imposée par la Commission relative à l’octroi des droits de la réserve nationale doit être écarté.

142    Enfin, concernant l’argument de la République hellénique selon lequel le montant de référence utilisé par la Commission pour la correction forfaitaire relative à la réserve nationale était erroné et aurait dû être limité à la valeur des droits de la réserve nationale octroyés aux agriculteurs ayant effectué des investissements, compte tenu de la conclusion relative au deuxième moyen au point 114 ci-dessus, il n’est pas nécessaire de statuer sur celui-ci.

–       Application d’une correction forfaitaire de 5 % concernant l’absence de calcul des superficies des éleveurs d’ovins et de caprins dans le calcul de la superficie et des montants de référence

143    À titre liminaire, il convient de souligner que, sous le régime de paiement unique, tout agriculteur bénéficie d’un droit à paiement par hectare en vertu de l’article 43, paragraphe 1, du règlement nº 1782/2003. La valeur des droits au paiement est calculée en divisant le montant de référence, à savoir la moyenne sur trois ans des montants totaux d’aides directes reçues par l’agriculteur au cours de la période de référence (2000 à 2002), par le nombre moyen d’hectares ayant généré des aides directes durant la période de référence. Le nombre de droits au paiement est égal au nombre moyen d’hectares (article 37, paragraphe 1, article 38 et article 43, paragraphe 1, du règlement nº 1782/2003).

144    Par dérogation, et afin de faciliter le travail d’évaluation du nombre d’hectares fourragers qui incombe aux administrations nationales, les États membres pouvaient choisir, comme dans le cas de la République hellénique, d’utiliser, pour la détermination des droits à paiement, la superficie fourragère déclarée par l’agriculteur dans sa demande d’aide à la surface pour 2004, en vertu de l’article 28, paragraphe 1, du règlement nº 795/2004, tel que modifié par le règlement n° 1974/2004.

145    Toutefois, le paragraphe 2 de l’article 28 du règlement nº 795/2004 prévoit que, dans les cas où la superficie fourragère déclarée par l’agriculteur dans sa demande d’aide à la surface pour 2004 est inférieure à sa superficie pendant la période de référence, l’agriculteur doit déclarer toute la superficie fourragère qu’il a détenue au cours de la période de référence.

146    Dans tous les cas, le nombre d’hectares inclut toutes les superficies fourragères disponibles pendant toute l’année civile et, conformément à l’article 5 du règlement (CE) n° 2419/2001 de la Commission, du 11 décembre 2001, portant modalités d’application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d’aides communautaires établis par le règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil (JO L 327, p. 11), pour l’élevage des animaux, cela comprend les superficies utilisées en commun et les superficies soumises à une culture mixte, tel que prévu à l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1782/2003.

147    Or, il ressort du point 12.7.1.1 du rapport de synthèse que, pour calculer la valeur des droits au paiement unique pour les éleveurs des ovins et caprins, la République hellénique n’a pas pris en compte l’ensemble de la superficie fourragère disponible pour l’année 2006 dans le calcul de la superficie et des montants de référence. Même dans les cas où il était clairement établi que l’agriculteur avait déclaré, durant la période de référence, une superficie fourragère supérieure à celle déclarée dans sa demande d’aide à la surface pour 2004, les autorités grecques ne se sont pas fondées sur la surface déclarée durant la période de référence pour l’établissement des droits au paiement, contrairement à ce que prévoit l’article 28, paragraphe 2, du règlement n° 795/2004.

148    Par conséquent, la Commission a estimé que les agriculteurs grecs avaient reçu un nombre trop faible de droits au paiement, d’une valeur unitaire trop élevée, et détenaient, d’une manière générale, un nombre d’hectares supérieur au nombre de droits qui leur avaient été alloués.

149    En ce qui concerne le risque pour le Fonds, celui-ci était double. Premièrement, au niveau de l’agriculteur, si ce dernier disposait d’un nombre d’hectares supérieur au nombre de droits au paiement octroyés, il pouvait bénéficier d’autres aides auxquelles il n’aurait pas eu droit, si ces superficies fourragères avaient été prises en compte, car les terres en excès sont disponibles à une activation de droits acquis par l’agriculteur, à travers le droit de la réserve nationale ou sur le marché. Il pouvait également cesser d’exploiter les terres en excès, tout en continuant de recevoir l’intégralité du montant de référence sur la base d’une superficie inférieure. Ainsi bénéficiait-il d’une aide à laquelle il n’aurait pas eu droit si sa superficie fourragère avait été prise en compte. Deuxièmement, au niveau de la superficie fourragère en excès, qui n’est pas nécessaire à l’activation des droits au paiement détenus, elle pouvait être abandonnée et ne pas être maintenue dans de bonnes conditions agricoles et environnementales, ce qui est contraire à l’objectif de la PAC.

150    Enfin, il y a lieu de souligner que, à la suite de la procédure de conciliation, la Commission a accepté l’argument de la République hellénique, selon lequel le risque pour le Fonds était lié exclusivement aux montants de référence calculés sur la base des primes pour les ovins et caprins en 2006. Cependant, les autorités greques n’étant pas en mesure de fournir une analyse exacte des risques susmentionnés générés pour le Fonds, la Commission a estimé que l’application d’une correction forfaitaire était l’option la plus appropriée et a fixé ladite correction forfaitaire à 5 % des montants de références générés pour les éléveurs d’ovins et de caprins (point 12.7.5.1 du rapport de synthèse).

151    La République hellénique fait valoir que, lors de la détermination du taux de la correction forfaitaire, la Commission n’a pas pris en compte certaines informations qui réduisaient la probabilité qu’un risque survienne pour le Fonds. À cet égard, elle invoque trois arguments. Premièrement, elle estime que la Commission n’a pas pris en compte le fait que l’ensemble des superficies fourragères déclarées en Grèce en 2006 (2 740 014 hectares) dépassaient le total des superficies fourragères déclarées en 2004 (2 630 085,55 hectares). Selon elle, cela démontre qu’il n’existait pas réellement un risque d’abandon des superficies.

152    Deuxièmement, la République hellénique prétend que la Commission n’a pas pris en compte le fait que les éleveurs grecs d’ovins et de caprins ne possédaient pas des superficies qui leurs étaient propres pour l’élevage des animaux et le fait que les superficies qu’ils utilisaient pour l’élevage des animaux étaient des pâturages communs dont le droit d’utilisation était concédé par les autorités municipales. Selon elle, la superficie qui était concédée chaque année à un éleveur d’ovins ou de caprins correspondait à la superficie fourragère qu’il déclarait pendant la période de référence (2004) pour devenir bénéficiaire du paiement de l’aide financière et était calculée exclusivement par rapport au cheptel disponible chaque année, à savoir le nombre au total d’animaux éligibles parmi les caprins et les ovins. Par conséquent, même si des droits à la surface avaient été calculés pour les éleveurs grecs d’ovins et de caprins, ces éleveurs, du fait de l’impossibilité pour eux de faire usage desdits droits à la surface et de déclarer un nombre d’hectares correspondant, conserveraient, en vertu de l’article 7 du règlement n° 795/2004, le droit de céder à la réserve nationale tous leurs droits à la surface et de les remplacer par des droits de la réserve nationale équivalant en nombre à leurs hectares restant disponibles.

153    Troisièmement, la République hellénique prétend que la Commission n’a pas tenu compte du fait que les autorités grecques avaient déclaré 706 748,26 hectares de superficie fourragère, utilisés par les éleveurs d’ovins et de caprins, pour lesquels des droits à la surface avaient été octroyés.

154    La Commission conteste les arguments de la République hellénique.

155    En l’espèce, il est constant que la République hellénique n’a pas pris en compte toutes les superficies disponibles pour les éleveurs d’ovins et de caprins pour calculer les superficies et les montants de référence, comme c’est prévu à l’article 43 du règlement n° 1782/2003 et à l’article 28 du règlement n° 795/2004, tel que modifié par le règlement n° 1974/2004. À cet égard, il y a lieu de révéler d’emblée que le fait, invoqué par la République hellénique dans le deuxième argument, que les superficies utilisées par les éleveurs grecs pour l’élevage des animaux sont des pâturages communs, n’influence en rien l’obligation de prendre en compte toutes les superficies disponibles. En effet, l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1782/2003 précise clairement que le nombre d’hectares à prendre en compte pour calculer les montants de référence inclut toutes les superficies fourragères, y compris pour l’élevage des animaux, les superficies utilisées en commun (voir ci-dessus point 146).

156    En outre, contrairement à ce que la République hellénique pourrait suggérer dans le premier argument, le fait que les agriculteurs ayant reçu un paiement sur la base du régime applicable aux ovins et aux caprins sous le régime antérieur, en 2004, n’étaient pas soumis à l’obligation de présenter une déclaration relative à la superficie fourragère dont ils disposaient est sans conséquence. En effet, il ne signifie pas pour autant que lesdits agriculteurs ne relèvent pas de l’article 43 du règlement n° 1782/03 et de l’article 28 du règlement n° 795/2004.

157    Or, le respect de cette obligation dans le régime de la nouvelle PAC est essentiel. En effet, le nombre d’hectares constitue le dénominateur pour calculer la valeur des droits de paiement unique et le nombre de droits de paiement est égal au nombre d’hectares. Ainsi, comme la Commission l’a invoqué à juste titre, lorsque l’agriculteur dispose d’un nombre d’hectares supérieur à celui pris en compte pour calculer les superficies et le montant de référence, il reçoit moins de droits au paiement, d’une valeur unitaire trop élevée. En outre, il peut bénéficier d’autres aides auxquelles il n’aurait pas eu droit si ces superficies fourragères avaient été prises en compte, car les terres en excès sont disponibles à une activation de droits acquis par l’agriculteur, à travers le droit de la réserve nationale ou sur le marché. Concernant l’ampleur de la carence en question, la Commission constate, sans être contredite par la République hellénique, que la quantité d’hectares, non prise en compte dans ce cas, s’élève aux deux tiers des superficies fourragères disponibles.

158    En outre, il relève du rapport final, arrêté le 1er décembre 2010 par l’organe de conciliation, qui a été saisi par la République hellénique, que les autorités grecques étaient d’accord avec les services de la Commission lors de l’enquête, concernant le risque que les hectares non déclarés en 2006 pouvaient être à la base d’un calcul de droits de la réserve nationale. Il ressort également de ce rapport que, afin de contrecarrer cette possibilité, les autorités grecques ont adopté un arrêté ministériel en 2009 qui impose une superficie louée par bail d’une durée supérieure ou égale à six ans pour obtenir des droits de la réserve nationale.

159    En vue de l’adoption de l’arrêté ministériel en 2009 pour contrecarrer le risque que les hectares non déclarés en 2006 pouvaient être à la base d’un calcul de droits de la réserve nationale, il semble contradictoire pour la République hellénique de maintenir devant le Tribunal que les éleveurs d’ovins et de caprins avaient le droit de céder à la réserve nationale tous leurs droits à la surface et de les remplacer par des droits de la réserve nationale équivalant en nombre à leurs hectares restant disponibles, en vertu de l’article 7 du règlement n° 795/2004.

160    En tout état de cause, la République hellénique ne contredit pas la Commission qui constate que ces éleveurs ne semblent relever d’aucune des catégories de bénéficiaires de la réserve nationale. En effet, l’article 7 du règlement n° 795/2004 concerne l’application de l’article 42, paragraphe 5, du règlement n° 1782/2003, c’est-à-dire la faculté pour les États membres d’octroyer des droits de la réserve nationale aux agriculteurs dans les zones soumises à des programmes de restructuration ou de développement concernant telle ou telle forme d’intervention publique en vue d’éviter que les terres agricoles ne soient abandonnées ou de compenser des désavantages spécifiques dont souffrent les agriculteurs dans ces zones. Cependant, la République hellénique ne fait même pas valoir que les éleveurs grecs d’ovins et de caprins se trouvent dans des zones prévues à l’article 42, paragraphe 5, du règlement n° 1782/2003.

161    En outre, accueillir un tel argument reviendrait à admettre qu’un État membre peut justifier de dépenses irrégulières relatives aux droits à la surface sur la base de l’hypothèse que, en l’absence de ces dépenses, les dépenses relatives aux droits de la réserve nationale seraient plus importantes. Ce résultat viderait de leur substance tous les contrôles instaurés par les règlements nos 1258/1999 et 1290/2005 et serait contraire au principe de l’aide individuelle et au contrôle du bien-fondé de cette aide. Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter cet argument.

162    En ce qui concerne le risque que l’agriculteur cesse d’exploiter les superficies en excès tout en continuant de recevoir l’intégralité du montant de référence sur la base d’une superficie inférieure ou que ces terres soient abandonnées et ne soient pas maintenues dans de bonnes conditions agricoles et environnementales, le fait que les superficies fourragères déclarées en 2006 dépassaient légèrement les superficies fourragères déclarées en 2004 ne semble pas pertinent.

163    En tout état de cause, même à supposer que l’argument de la République hellénique selon lequel la légère augmentation des superficies fourragères déclarées entre 2004 et 2006 démontre qu’il n’existait pas réellement un risque d’abandon des superficies, cela ne saurait suffire à remettre en cause l’appréciation de la Commission concernant le risque pour le FEAGA de l’absence de prise en compte des superficies fourragères en l’occurrence. Ainsi, cet argument n’a pas d’influence sur le risque, identifié par la Commission, qu’une telle absence de prise en compte des superficies fourragères disponibles résulte en moins de droits au paiement d’une valeur unitaire trop élevée, et le risque que les terres en excès sont disponibles à une activation de droits acquis par l’agriculteur, à travers les droits de la réserve nationale.

164    Enfin, le troisième argument de la République hellénique doit également être rejeté. Comme la Commission le soutient, sans être contredite par la République hellénique, elle a pris en compte le fait que celle-ci a calculé des montants de référence sur la base des 706 748,26 hectares fourragers utilisés par les éleveurs d’ovins et de caprins, précisément pour conclure que ce montant ne représentait qu’un tiers des superficies fourragères admissibles.

165    Il résulte de tout ce qui précède que le troisième moyen de la requérante ne peut être accueilli.

B –  Sur le quatrième moyen, concernant les corrections forfaitaires imposées dans le cadre des régimes de distillation et de paiements en faveur de l’utilisation de certains moûts et de restructuration et conversion des vignobles

166    La République hellénique fait valoir, en substance, que, pour imposer des corrections forfaitaires d’un taux de 10 % sur le total des dépenses effectuées pour les exercices 2004 et 2005 dans les régimes de distillation et de paiements en faveur de l’utilisation de certains moûts et de restructuration et conversion des vignobles, la Commission s’est fondée sur une appréciation erronée des faits. En outre, elle soutient que ces corrections étaient disproportionnées et contraires aux principes directeurs relatifs aux corrections forfaitaires.

1.     Première branche, tirée d’une appréciation erronée des faits

167    La République hellénique fait valoir que c’est à tort que la Commission a conclu que le casier viticole ne fonctionnait pas, que l’attribution de la gestion dudit casier à des organismes non dépendants de l’Opekepe constituait une entrave à sa gestion et à son contrôle et que l’Opekepe ne pouvait pas faire l’usage recommandé de ce casier, principalement au motif qu’il n’avait pas un accès direct et indépendant aux données du fichier en raison d’une informatisation insuffisante.

168    En ce qui concerne l’éligibilité des raisins vinifiés, la République hellénique fait également valoir que la Commission a constaté, à tort, qu’il y avait un problème à cet égard et que la traçabilité était mauvaise. Elle explique en détail les contrôles croisés qui sont prévus par les arrêtés ministériels pour vérifier l’éligibilité des produits vinicoles. À cet effet, elle a fourni au Tribunal les arrêtés ministériels en question, des modèles de formulaire de contrôle ainsi que des justificatifs de remboursement des montants indûment versés.

169    En ce qui concerne la distillation obligatoire des sous-produits, la République hellénique conteste les constats de la Commission selon lesquels il n’y avait aucune estimation ou détermination des quantités de marc retirées et il y avait seulement quelques analyses pour déterminer le titre alcoométrique moyen. Elle fait valoir que la Commission a aussi conclu à tort que, par conséquent, il n’y avait pas de garantie du retrait contrôlé des sous-produits ni du respect du titre alcoométrique moyen au niveau individuel ou de groupe, contrairement aux exigences prévues à l’article 27 du règlement n° 1493/1999. À cet effet, elle explique les contrôles prévus par les arrêtés ministériels pour le retrait des sous-produits et de l’analyse du titre alcoométrique par les services compétents. Comme preuve, elle a fourni au Tribunal, à titre indicatif, des fiches de prélèvements pour l’analyse du titre alcoométrique, ainsi que des lettres que les autorités grecques ont envoyées à la Commission.

170    Enfin, la République hellénique conteste les constats de la Commission concernant une série de problèmes liés au cadre juridique national, au système de gestion et aux défaillances des contrôles sur place. Elle fait observer que les carences constatées par la Commission, lors de la mission, ne signifient pas nécessairement qu’il y eu une surcompensation, étant donné que, de manière générale, il y a des échecs de plantation, des erreurs et des catastrophes dans le domaine de l’agriculture. Elle conteste aussi le constat que la condition de la réduction de 25 % de la surface du vignoble restructuré n’a jamais été appliquée. Plus précisément, elle fait valoir que, pour les viticulteurs en question, à savoir ceux qui avaient planté leur vignoble irrégulièrement en variété de sultanine, une réduction de 25 % a été appliquée après le déracinement de ces vignobles. Par conséquent, aucune réduction supplémentaire de la superficie n’aurait pu être appliquée.

171    La Commission fait valoir, en substance, que la République hellénique n’a pas étayé ses arguments.

172    Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence exposée aux points 117 à 120 ci-dessus, c’est à l’État membre qu’il incombe de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission. L’État membre concerné ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système de contrôle fiable et opérationnel. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle.

173    C’est à la lumière de ces considérations de principe qu’il convient d’examiner le quatrième moyen.

a)     Opération du casier viticole

174    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, conformément à la réglementation de l’Union, les États membres devaient établir un casier viticole dans un délai de six ans, c’est-à-dire en 1992 au plus tard [article 4 du règlement (CEE) n° 2392/1986 du Conseil, du 24 juillet 1986, portant établissement du casier viticole communautaire (JO L 208, p. 1)]. Cependant, compte tenu des difficultés techniques rencontrées par les États membres, cette date limite a été prorogée jusqu’au 31 décembre 1996 et, ensuite, pour la République hellénique, jusqu’au 31 décembre 2000 [respectivement, par l’article 1er du règlement (CE) n° 1549/95 du Conseil, du 29 juin 1995, modifiant le règlement n° 2392/1986 (JO L 148, p. 37), et par l’article 1er du règlement (CE) n° 1631/98 du Conseil, du 20 juillet 1998, modifiant le règlement n° 2392/1986 (JO L 210, p. 14)].

175    Le casier viticole devait contenir, pour chaque exploitation dans laquelle des vignes étaient cultivées, des informations relatives à son identification et à sa localisation, à la référence des parcelles plantées en vignes, à ses caractéristiques générales et aux caractéristiques des vignes qui la composaient et des produits qui en étaient issus (article 2 du règlement n° 2392/1986). En outre, les États membres étaient tenus de mettre en place les moyens matériels nécessaires pour permettre la gestion informatisée dudit casier, par un ou plusieurs organismes désignés (article 5, paragraphes 1 et 2, dudit règlement), d’assurer la mise à jour régulière de ce casier (article 5, paragraphe 3, de ce règlement), et de procéder, pour chaque exploitation, à la vérification des informations recueillies par rapport à la situation réelle (article 5, paragraphe 4, du même règlement). Enfin, les États membres devaient prendre les mesures nécessaires pour que leurs instances chargées de l’application de la réglementation vitivinicole et de son contrôle aient accès aux informations du même casier (article 7 du règlement en question).

176    En l’espèce, il convient d’abord de souligner que la Commission n’a pas imposé une correction forfaitaire au titre des carences constatées relatives à l’opération du casier viticole en lui-même. Cependant, étant donné que ledit casier est un outil de contrôle essentiel, assurant le bon fonctionnement du marché vitivinicole et des aides correspondantes, elle a considéré que les dysfonctionnements résultant de ce dernier généraient des risques graves pour le FEAGA.

177    Dans la mesure où les constatations de la Commission concernant les dysfonctionnements du casier viticole peuvent être entendues comme contribuant aux autres carences constatées par la Commission dans le cadre des régimes de distillation et de paiements en faveur de l’utilisation de certains moûts et de restructuration et de conversion des vignobles pour lesquelles la Commission a imposé des corrections forfaitaires, il convient d’analyser les arguments avancés par la République hellénique.

178    Premièrement, la République hellénique constate que le casier viticole était achevé le 31 octobre 2003 et qu’il était fonctionnel et fiable en 2004 et en 2005. Cependant, ni la lettre, datée du 24 novembre 2003 et adressée par les autorités grecques à la Commission, qui fait état du travail important qui a été achevé, le 31 octobre 2003, à cet égard, ni les tableaux des ortho-photographies pour chaque département du territoire national et des parcelles viticoles par département ne suffisent à démontrer que ledit casier était achevé ou opérationnel.

179    Il en va de même pour le rapport final concernant l’assistance technique relative à la mise en œuvre du casier viticole et oléicole en Grèce. D’une part, contrairement à ce que soutient la République hellénique, les pages 11 et 12 de ce rapport final ne démontrent pas que le casier viticole était tout à fait fiable et totalement fonctionnel, mais il élabore simplement des méthodes pour établir ledit casier dans les divers départements. D’autre part, comme la Commission le fait observer à juste titre, ce rapport se réfère, dans ses conclusions, à des actions supplémentaires nécessaires à l’égard de ce casier. Plus particulièrement, le rapport révèle que quelques données devaient encore être traitées, quelques contrôles n’étaient pas encore suffisants, le navigateur (browser) et le système de mise à jour (updating system) pour le casier en question restaient limités et qu’une version finale de l’application en question était prévue pour le premier trimestre de 2004, et que d’autres problèmes subsistaient, liés à l’absence de soutien réel de tous les acteurs, y compris les agriculteurs et les autorités locales. Dans ce contexte, l’argument de la République hellénique selon lequel les conclusions du rapport attestent le caractère fiable du même casier doit aussi être rejeté.

180    En outre, l’argument de la République hellénique selon lequel les compagnies privées ont effectué des vérifications sur place pour 10 % des déclarations des producteurs n’est pas pertinent, car comme elle le fait observer à juste titre, cela n’était pas remis en question par la Commission. Par ailleurs, les constats de la République hellénique dans ses écritures ne sont ni cohérents ni précis en ce qui concerne le taux des déclarations vérifiées, indiquant que les superficies vérifiées par ces compagnies « représentaient 10 % du total de chaque contrat » ou étaient « à hauteur de 10 % ». En tout état de cause, l’extrait d’un contrat conclu avec une de ces compagnies et des directives adressées à des prestataires n’établissent pas, à suffisance de droit, que les compagnies en question aient réellement effectué des vérifications. Il en va de même pour le procès-verbal, fourni par la République hellénique, qui concerne les vérifications pour trois départements sur plus de 40 en Grèce, pour l’année 2003, et non pour les années 2004 et 2005, comme la Commission l’observe à juste titre.

181    Enfin, l’argument de la République hellénique selon lequel « le montant total des discordances à l’issue du contrôle de qualité était à peine de 3,21 % » doit aussi être rejeté. Bien qu’il ne soit pas évident de comprendre ce que la République hellénique entend exactement par l’expression « contrôle de qualité » dans ce contexte, il est certain, à partir du document auquel elle fait référence, que cela ne peut pas se référer à un contrôle de la qualité du casier viticole lui-même. En effet, le document en question consiste en un tableau, préparé par les autorités grecques, qui indique des déclarations discordantes pour l’année 2004, par chaque compagnie « chargée du projet » (implicitement les compagnies chargés de vérifier des déclarations des producteurs), et pour les départements qui leur ont été attribués. Selon ce tableau, il y avait 27 080 déclarations discordantes parmi celles qui ont été vérifiées. Pour chaque département, le taux des déclarations discordantes représentait un taux allant de 0 à 6,20 %, et c’est à partir de ces données que la République hellénique parvient à un taux moyen de déclarations discordantes de 3,21 %. Par ailleurs, d’une part, ce tableau ne saurait suffire, à lui seul, à démontrer que les vérifications en question ont été effectuées, question qui, en tout état de cause, n’est pas pertinente (voir point 179 ci-dessus). D’autre part, contrairement à ce que soutient la République hellénique, il n’est pas non plus démontré que le taux des déclarations discordantes était, au total, de 3,21 % en Grèce, car, notamment, la République hellénique ne fournit même pas une indication cohérente et précise du taux des superficies qui étaient, selon elle, vérifiées en Grèce par ces entreprises (voir point 179 ci-dessus).

182    Deuxièmement, la République hellénique constate que, pour la gestion et la mise à jour du casier viticole, ce sont les services de l’État qui jouent un rôle essentiel et que le rôle des sociétés prestataires est subsidiaire. Elle explique que les directions du développement rural (DDR) et les associations de producteurs agricoles avaient accès à une application informatisée qui permettait, uniquement, de visualiser les données des producteurs et des parcelles ainsi que de présenter et d’enregistrer les demandes de modification et les demandes de nouvelles inscriptions. Par contre, pour les modifications, inscriptions et radiations de données alphanumériques et cartographiques des vignobles ainsi que de données alphanumériques des producteurs, seuls avaient accès à l’application concernée les opérateurs du ministère et de l’administration régionale.

183    Or, d’une part, la lettre du 16 mai 2012, envoyée par la direction de la gestion des casiers du ministère du Développement agricole et des denrées alimentaires grec portant sur les informations relatives à l’opération du casier viticole, ne démontre pas que la Commission avait tort de conclure que, en 2004 et en 2005, l’attribution de la gestion dudit casier, à des organismes non dépendants de l’Opekepe, constituait une entrave à sa gestion et à son contrôle. Il en va de même pour les documents distribués par le ministère des Services de gestion du registre aux utilisateurs, expliquant la mise à jour de ce casier, et les constatations, indiquées dans la lettre du 29 novembre 2011, adressée par le ministère de l’Agriculture au Conseil juridique de l’État, tels que repris au point 69 de la requête. D’autre part, cet argument est affaibli par le constat de la République hellénique que certaines modifications enregistrées par les producteurs ou groupes de producteurs, à savoir les « changements cartographiques qui concernent la localisation des parcelles non déclarées lors de l’établissement [du casier en question] ou qui avaient une localisation erronée », n’ont pas été « appréciées avec précision ». Cela met en doute la distinction, en pratique, entre la possibilité, pour les producteurs et des entités privées, d’enregistrer des données et la possibilité, réservée aux opérateurs du ministère et de l’administration régionale, de modifier les données dans le même casier.

184    De surcroît, il ressort des documents fournis par les parties au Tribunal que, lors de l’enquête, la République hellénique a admis que, seulement « [d]epuis novembre 2005, des utilisateurs spécialisés des [DDR] [pouvaient] accéder directement au casier viticole pour mettre à jour les modifications (alphanumériques et cartographiques) » et que « la procédure de mise à jour [avait] débuté en février 2006 ». Dès lors, la République hellénique semble admettre que, en 2004 et jusqu’à la fin de 2005, les DDR ne pouvaient pas accéder directement au casier viticole et que ledit casier n’était même pas mis à jour pendant cette période.

185    Cette conclusion n’est pas remise en cause par le document fourni par la République hellénique émanant de la direction de la gestion des casiers du ministère du Développement agricole et des denrées alimentaires grec par lequel ont été envoyés les codes d’accès pour la présentation des demandes.

186    À la lumière de tout ce qui précède, force est de constater que la République hellénique n’a pas démontré que les constats de la Commission, concernant les dysfonctionnements du casier viticole, étaient erronés.

b)     Contrôles relatifs à l’admissibilité des produits aux régimes d’aides, la distillation obligatoire et les paiements en faveur de l’utilisation des moûts

187    Les règles de l’Union sur l’organisation commune du marché vitivinicole applicables, relevant du règlement nº 1493/1999, prévoyaient, notamment, la gestion du potentiel viticole, l’interdiction de plantation des vignes pour la production de vin, sauf dans les cas prévus, et la distillation obligatoire des sous-produits de la vinification ainsi que du vin dans certains circonstances. Ces règles prévoyaient également des aides pour la distillation et les paiements en faveur de l’utilisation de certains moûts, ainsi que des déclarations obligatoires de la part des producteurs de raisins, des producteurs de moûts et des distillateurs et des contrôles administratifs et vérifications sur place afin de veiller au respect des conditions requises.

188    Or, il ressort du rapport de synthèse que le problème de l’admissibilité des produits aux régimes d’aides était lié à l’existence en Grèce de nombreuses variétés de vignes à double classement, qui parfois pouvaient bénéficier de plusieurs régimes d’aides. S’agissant du vin issu de raisins de « double classement », à savoir des raisins de variétés figurant dans le classement pour la même unité administrative en tant que variétés à raisins de cuve et en tant que variétés destinées à une autre utilisation, l’article 28, paragraphe 1, du règlement n° 1493/1999 prévoit sa distillation obligatoire dans un délai déterminé, dans la mesure où les quantités vinifiées vont au-delà du plafond des quantités normalement vinifiées. Sauf dérogation, ce vin ne pouvait circuler qu’à destination d’une distillerie.

189    Or, lors de la mission, les services de la Commission ne pouvaient pas affirmer que les contrôles étaient de nature à garantir l’admissibilité des raisins vinifiés. En effet, la traçabilité entre la parcelle ou la superficie de provenance et les raisins livrés ou transformés n’était pas établie dans la plupart des cas. Auprès des producteurs visités, les services de la Commission ont constaté la livraison de variétés à risque, à savoir de double ou triple classements, tels la sultanine ou le rozaki, sans pour autant pouvoir s’assurer que ces variétés pouvaient être considérées comme admissibles à la vinification.

190    Les services de la Commission ont aussi noté, lors de la mission, qu’il existait une pléthore de contrôles sur place qui ne donnaient presque jamais d’assurance raisonnable quant à leurs résultats, par exemple, l’échantillon de vin livré pour la distillation n’était pas prélevé au niveau de chaque livraison, mais à la fin de toutes les livraisons.

191    En outre, en ce qui concerne les paiements en faveur de l’utilisation des moûts, les services de la Commission ont constaté que le retrait sous contrôle des marcs ne consistait qu’en quelques analyses pour en déterminer le titre alcoométrique moyen. D’après les informations reçues, les analyses ne concernaient qu’une dizaine de lots par région, avec une fréquence temporelle non définie. Il n’y avait aucune évaluation sur les quantités retirées ou sur leur destination. Dès lors, les contrôles n’étaient en mesure de certifier ni la quantité ni le respect du taux alcoométrique minimal.

192    Premièrement, pour sa part, la République hellénique se borne essentiellement à invoquer en détail les contrôles croisés prévus par les arrêtés ministériels pour assurer l’éligibilité des raisins vinifiés, la distillation obligatoire et le retrait contrôlé des marcs, et à fournir des modèles de formulaires non remplis. Cependant, elle ne saurait infirmer les constatations de la Commission qu’en étayant ses allégations par des éléments établissant la réalité de ses contrôles sur place. À cet égard, les documents fournis au Tribunal par la République hellénique concernant quatre demandes des autorités grecques aux agriculteurs afin de rembourser une partie des aides payées et la preuve que les autorités grecques ont reçu cinq paiements en remboursement, les constatations par les autorités grecques pendant l’enquête, une liste par département des établissements vinicoles, et la lettre du ministère de l’Agriculture, du 2 septembre 2003, citant la nécessité d’intensifier les contrôles, ne sont pas susceptibles de prouver la suffisance des contrôles en question. L’existence des règles au niveau national qui prévoient les contrôles en question ne démontre pas, non plus, que ces contrôles ont été réellement effectués.

193    Deuxièmement, il convient de relever que la République hellénique ne contredit pas l’argument de la Commission selon lequel même les documents qui ont été fournis par la République hellénique évoquent une nécessaire « intensification » des contrôles. Il en va de même en ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel les contrôles croisés avec des déclarations de récoltes ne sont pas possibles, dans la mesure où ces déclarations ne sont pas présentées par les producteurs. De plus, la lettre du 21 février 2006, adressée par l’Opekepe à la Commission, fournie au Tribunal par la République hellénique, constate que les producteurs n’étaient pas disposés à présenter ces déclarations et mentionne des difficultés à croiser les déclarations de récolte et de production dans les délais prévus.

194    Troisièmement, comme la Commission le soutient à juste titre, ce document confirme également le non-respect de l’obligation de prélever l’échantillon de vin conformément aux règlements de l’Union. En effet, l’article 65, paragraphe 8, du règlement (CE) n° 1623/2000 de la Commission, du 25 juillet 2000, fixant les modalités d’application du règlement n° 1493/1999, en ce qui concerne les mécanismes de marché (JO L 194, p. 45), impose, aux distillateurs, de communiquer des déclarations à l’organisme d’intervention, pour chaque producteur qui lui a livré du vin et pour chaque livraison, concernant la quantité, la couleur et le titre alcoométrique volumique acquis du vin ainsi que le numéro du document de transport du vin, la preuve de la distillation de la quantité totale de vin figurant dans le contrat ou dans la déclaration et la preuve qu’il a payé au producteur le prix d’achat prévu. En effet, la lettre en question, datée du 21 février 2006, de l’Opekepe à la Commission, constate qu’un prélèvement de l’échantillon sur le vin destiné à la distillation est seulement prévu avant la conclusion de chaque contrat. Par ailleurs, cette lettre constate que, compte tenu des observations des contrôleurs de la Commission, les autorités grecques prévoyaient de modifier les dispositions nationales concernées, pour l’avenir.

195    Quatrièmement, les fiches de prélèvement, fournies par la République hellénique, qui correspondent aux sondages pour contrôler le titre alcoométrique des sous-produits ne démontrent pas le respect des règles relatives à la distillation obligatoire et les paiements en faveur de l’utilisation des moûts, contrairement à ce qu’elle soutient. En ce qui concerne la distillation obligatoire du vin qui dépasse les quantités normalement vinifiées, le titre alcoométrique ne permet pas de vérifier si les raisins en question relèvent de variétés admissibles, s’ils relèvent de variétés de double classement ou, si la quantité de vin produite ne dépassait pas celle qui était normalement vinifiée, conformément aux articles 2, 19 et 28 du règlement n° 1493/1999. En ce qui concerne la distillation obligatoire des sous-produits, ces contrôles qui étaient effectués « principalement » dans les grands établissements viticoles, selon la République hellénique, ne permettent pas de respecter l’article 27, paragraphe 3, dudit règlement, qui prévoit la livraison obligatoire à la distillation de la totalité des sous-produits de la vinification, dont la quantité d’alcool doit être au moins égale à 10 % du volume d’alcool contenu dans le vin produit, lorsque celui-ci a été obtenu par vinification directe des raisins et au moins égale à 5 % du volume d’alcool contenu dans le vin produit lorsque le vin a été obtenu par vinification de moûts de raisins.

196    En ce qui concerne les paiements en faveur de l’utilisation des moûts, les contrôles effectués « principalement » dans les grands établissements viticoles ne permettent pas non plus de respecter l’article 34, paragraphe 3, du règlement n° 1493/99 qui prévoit que le montant de l’aide due est fixé en euros par pourcentage de volume en puissance et par hectolitre de moûts de raisins concentrés ou concentrés rectifiés.

197    Il résulte de tout ce qui précède que la République hellénique n’a pas démontré que les constats de la Commission concernant les contrôles relatifs à l’admissibilité des produits aux régimes d’aides, la distillation obligatoire et les paiements en faveur de l’utilisation des moûts étaient erronés.

c)     Restructuration et reconversion des vignobles

198    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, en vue d’adapter la production à la demande du marché, l’article 11 du règlement n° 1493/1999 prévoyait une aide pour la restructuration et la reconversion des vignobles, à savoir la reconversion variétale, la réimplantation des vignobles et les améliorations des techniques de gestion liées à l’adaptation de la production à la demande.

199    Il ressort, par ailleurs, du rapport de synthèse que le régime de la restructuration et de la reconversion des vignobles soulevait une série de problèmes en Grèce, liés, à la fois, au cadre juridique national, au système de gestion et aux défaillances des contrôles sur place.

200    En ce qui concerne le cadre juridique national, le rapport de synthèse se réfère à une décision interministérielle autorisant la restructuration des vignobles plantés en sultanine, pour lesquels une aide à l’hectare est payée au titre du régime « raisins secs », vers un vignoble à raisins de cuve. Ladite décision interministérielle prévoit que, dans ces cas, le vignoble restructuré voit sa surface réduite de 25 %. La Commission a constaté que l’inclusion de variétés de vignes bénéficiant d’une aide à l’hectare n’était pas conforme au règlement n° 1493/1999, dans la mesure où elles étaient en dehors du champ d’application de ce dernier. Elle a également constaté que, en aucun cas, la réduction de 25 % de la surface n’avait été appliquée.

201    La République hellénique ne remet pas en cause ces constats, mais se borne à contredire la Commission en constatant que la réduction ne s’appliquait pas aux producteurs concernés, car cela résulterait en une double réduction de 25 % de la surface, dans la mesure où une réduction de 25 % aurait déjà été appliquée après le déracinement des vignobles plantés en sultanine. Toutefois, force est de constater que cet argument n’est aucunement étayé par la République hellénique, de sorte que le Tribunal n’est pas en mesure d’en apprécier le bien-fondé. Dès lors, il doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable en application de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure.

202    Quant au système de gestion et aux défaillances des contrôles sur place, le rapport de synthèse constate que les services de la Commission ont découvert des divergences considérables entre les dépenses financées et la réalité, lors de la mission. Plus précisément, le choix de gestion du régime opéré par la République hellénique est fondé sur l’approche par action. Chacune des actions, dont celles définissant l’arrachage, la préparation du sol, la replantation et le surgreffage, est gérée de manière autonome et la procédure de paiement est appliquée à chaque action séparément. Cependant, ce choix est également accompagné par l’obligation pour les bénéficiaires de justifier les coûts encourus. Lors de la mission, les services de la Commission ont constaté que cette obligation n’était pas respectée. À titre d’exemple, pour plusieurs des bénéficiaires visités, les piquets utilisés sur une superficie donnée n’étaient pas neufs, le nombre de plants achetés excédait celui qui était prévu selon la densité de plantation programmée et le coût de la main-d’œuvre ne corroborait pas le total de l’aide octroyée.

203    À cet égard, la République hellénique fait observer qu’il existe des échecs de plantation, des erreurs et des catastrophes dans le domaine de l’agriculture. Cependant, elle ne soutient pas pour autant qu’un ou plusieurs de ces facteurs étaient à la base des écarts constatés par les services de la Commission, lors de la mission, entre les dépenses et les aides octroyées. Par conséquent, cette observation, qui revêt un caractère général et non spécifique aux circonstances de l’espèce, n’est pas de nature à remettre en cause les constats de la Commission concernant le système de gestion et les défaillances des contrôles sur place pour les aides à la restructuration et la reconversion des vignobles.

2.     Seconde branche, tirée de la violation du principe de proportionnalité et des principes directeurs relatifs aux corrections financières

204    La République hellénique fait valoir que la Commission ne lui fait pas grief de n’avoir pas appliqué ou d’avoir appliqué de manière insuffisante un contrôle clé, tel qu’énuméré à l’annexe 11 des orientations, qui justifierait une correction de 5 ou de 10 %. Par conséquent, les insuffisances qu’elle mentionne concerneraient des contrôles secondaires qui justifieraient une correction qui ne saurait dépasser 2 %. Dès lors, les corrections forfaitaires imposées, relatives aux carences constatées par la Commission dans le secteur du vin, violeraient le principe de proportionnalité.

205    La Commission conteste ces arguments.

206    Tout d’abord, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence précitée aux points 117 à 120 ci-dessus, s’il appartient à la Commission de prouver l’existence d’une violation des règles de l’Union, une fois cette violation établie, il revient à l’État membre de démontrer, le cas échéant, que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à en tirer.

207    En ce qui concerne le type de correction appliquée, il y a lieu de rappeler que, ainsi que l’indiquent les orientations, lorsqu’il n’est pas possible d’évaluer précisément les pertes subies par l’Union, une correction forfaitaire peut être envisagée par la Commission.

208    À cet égard, les orientations prévoient que, lorsqu’un ou plusieurs contrôles clés ne sont pas effectués ou sont si mal ou si rarement réalisés qu’ils sont inefficaces pour déterminer l’éligibilité d’une demande ou prévenir des irrégularités, l’application d’une correction à hauteur de 10 % est justifiée, car il est raisonnablement permis de penser qu’il existait un risque élevé de pertes importantes pour le FEAGA.

209    Premièrement, en l’espèce, les carences à l’origine des corrections forfaitaires en cause résultaient de l’absence de contrôles efficaces constatés par la Commission relatifs à l’admissibilité des produits vinifiés et la traçabilité des raisins, à la distillation obligatoire des vins au-delà du plafond des quantités normalement vinifiées, à la distillation obligatoire de la totalité des sous-produits, au titre alcoométrique de la totalité des sous-produits de la vinification, à la corroboration entre les coûts encourus et les aides à la reconstruction et la reconversion des vignobles ainsi qu’à l’éligibilité des variétés de vignes bénéficiant de cette aide. À la lumière des orientations, les carences de tels contrôles clés, indispensables aux fins de la détection des irrégularités dans le cadre du régime de distillation, du régime de l’utilisation des moûts et du régime de la reconstruction et de la reconversion des vignobles justifiaient l’application d’un taux de correction de 10 % aux dépenses concernées.

210    Deuxièmement, il y a lieu de rejeter comme non fondé l’argument de la République hellénique selon lequel les carences en question ne relèvent pas des contrôles clés, en raison du fait qu’elles ne sont pas énumérées à l’annexe 11 des orientations. D’une part, il convient de souligner que, telle qu’elle ressort des orientations, l’énumération des contrôles clés et secondaires, pour les divers secteurs, n’est pas exhaustive, et le fait qu’une carence constatée ne relèverait pas des orientations ne serait pas déterminant (voir ci-dessus point 137 à 139). D’autre part, ladite annexe ne concerne que les aides à la restructuration et à la reconversion des vignobles dans le secteur du vin, tel qu’il ressort du titre de ladite annexe. Par ailleurs, sont définis comme contrôles clés dans cette annexe tant l’éligibilité de la nature des actions envisagées (contrôle clé numéro 1) que les contrôles au cours de la réalisation des plans (contrôle clé numéro 2). Dès lors, il ressort de l’annexe en question que les carences constatées par la Commission relatives à l’éligibilité des variétés de vignes bénéficiant des aides à la reconstruction et à la reconversion des vignobles, ainsi que la corroboration entre les coûts encourus et les aides octroyées, sont des contrôles clés au sens de ce document.

211    À la lumière des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que le quatrième moyen ne peut être accueilli.

212    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu, d’une part, d’annuler la décision attaquée en ce qu’elle prévoit une correction financière de 10 % relative aux dépenses liées à l’octroi des droits de la réserve nationale dans la mesure où ladite correction porte sur les droits de la réserve nationale octroyés aux nouveaux agriculteurs par la République hellénique au titre de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003, et, d’autre part, de rejeter le recours pour le surplus.

 Sur les dépens

213    Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs de conclusions.

214    Le recours ayant été partiellement accueilli, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :      

1)      La décision d’exécution 2011/689/EU de la Commission, du 14 octobre 2011, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), est annulée en tant qu’elle impose à la République hellénique une correction forfaitaire relative à l’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission européenne et la République hellénique supporteront leurs propres dépens.

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 novembre 2014.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

I –  Enquête relative au régime des droits au paiement unique

II –  Enquête relative au secteur du vin

III –  Procédure de conciliation et adoption de la décision attaquée

Procédure et conclusions des parties

I –  En droit

A –  Sur les trois premiers moyens relatifs aux corrections financières appliquées dans le cadre du régime des droits au paiement unique

1.  Sur le premier moyen, tiré de la violation des principes d’équité, de coopération loyale et de la proportionnalité ainsi que du défaut de base juridique pour l’application des orientations et des erreurs d’appréciation

a)  Sur la première branche, tirée d’une violation des principes d’équité et de coopération loyale ainsi que d’une erreur d’appréciation

b)  Sur la deuxième branche relative au défaut d’une base juridique pour appliquer les orientations et à une erreur d’appréciation dans le cadre de leur application

c)  Sur la troisième branche relative à la violation du principe de proportionnalité

2.  Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 42 du règlement nº 1782/2003 et de l’article 21 du règlement nº 795/2004 ainsi que d’une appréciation erronée des faits

a)  Sur les arguments relatifs à l’octroi des droits de la réserve nationale aux nouveaux agriculteurs

b)  Sur les arguments relatifs à l’octroi des droits de la réserve nationale aux agriculteurs ayant effectué des investissements

3.  Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 31 du règlement nº 1290/2005

a)  Observations liminaires

Sur la première branche, tirée de l’application de l’article 31 du règlement n° 1290/2005 à des carences concernant les critères d’octroi des droits de la réserve nationale

Sur la seconde branche, tirée d’une violation de l’article 31 du règlement n° 1290/2005 en ce qui concerne l’imposition des corrections forfaitaires

–  Application d’une correction forfaitaire de 10 % relative aux critères d’octroi des droits de la réserve nationale

–  Application d’une correction forfaitaire de 5 % concernant l’absence de calcul des superficies des éleveurs d’ovins et de caprins dans le calcul de la superficie et des montants de référence

B –  Sur le quatrième moyen, concernant les corrections forfaitaires imposées dans le cadre des régimes de distillation et de paiements en faveur de l’utilisation de certains moûts et de restructuration et conversion des vignobles

1.  Première branche, tirée d’une appréciation erronée des faits

a)  Opération du casier viticole

b)  Contrôles relatifs à l’admissibilité des produits aux régimes d’aides, la distillation obligatoire et les paiements en faveur de l’utilisation des moûts

c)  Restructuration et reconversion des vignobles

2.  Seconde branche, tirée de la violation du principe de proportionnalité et des principes directeurs relatifs aux corrections financières

Sur les dépens


* Langue de procédure : le grec.

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