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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Airport Handling v Commission (Order) French Text [2014] EUECJ T-688/14_CO (28 November 2014) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2014/T68814_CO.html Cite as: [2014] EUECJ T-688/14_CO |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL
28 novembre 2014 (*)
« Référé – Aides d’État – Obligation de récupérer une aide accordée par l’opérateur public d’un aéroport en faveur d’une société filiale chargée de services de gestion – Mise en liquidation de ladite société – Constitution d’une nouvelle société chargée de services de gestion – Décision de la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen en matière d’aides d’État en vue d’examiner l’existence d’une continuité économique entre les deux sociétés – Demande de sursis à exécution – Irrecevabilité manifeste du recours principal – Irrecevabilité – Défaut d’urgence »
Dans l’affaire T‑688/14 R,
Airport Handling SpA, établie à Somma Lombardo (Italie), représentée par Mes R. Cafari Panico et F. Scarpellini, avocats,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par MM. S. Noë et G. Conte, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande de mesures provisoires visant, en substance, au sursis à l’exécution de la décision C (2014) 4537 final de la Commission, du 9 juillet 2014, d’ouvrir la procédure formelle d’examen, au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, relative à la constitution de la société Airport Handling [SA.21420 (2014/NN) – Italie – Constitution d’Airport Handling],
LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL
rend la présente
Ordonnance
Antécédents du litige
1 Le groupe SEA, dont la société mère est la Società per azioni esercizi aeroportuali (SEA), a pour objet principal la construction et l’exploitation d’aéroports, ainsi que l’exercice de toute activité connexe et complémentaire au trafic aérien. Le capital social de SEA s’élève à 27,5 millions d’euros et est actuellement partagé entre la municipalité de Milan (Italie), qui détient 54,81 %, l’actionnaire privé Fondi Italiani per le Infrastrutture SGR, propriétaire de 44,31 %, et d’autres petits actionnaires qui détiennent ensemble 0,88 %.
2 SEA est chargée, notamment, de la gestion des aéroports de Milan-Linate et de Milan-Malpensa. À ce titre, elle a le droit et est tenue de garantir – en les assurant directement ou par l’intermédiaire de tiers – tous les services et les activités connexes, tels que l’arrivée et le départ des avions, la gestion de la sécurité aéroportuaire, les prestations de services d’assistance à terre pour les passagers et les marchandises, les activités commerciales à l’intérieur des aéroports, y compris la gestion d’infrastructures non aéronautiques comme les hôtels et les structures destinées à la logistique.
3 En 1998, SEA a créé une société distincte, SEA Handling, et lui a transféré l’activité d’assistance en escale. SEA Handling a débuté ses activités en 2002.
4 À l’issue d’une enquête préliminaire engagée en 2006 au regard d’une prétendue aide d’État octroyée à SEA Handling, la Commission européenne a ouvert, en juin 2010, la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, en ce qui concerne cette aide. La procédure a été clôturée par la décision C (2012) 9448 final de la Commission, du 19 décembre 2012, déclarant incompatible avec le marché intérieur l’aide d’État accordée par SEA à SEA Handling. Dans cette décision, la Commission, d’une part, a estimé que certaines augmentations de capital effectuées par SEA en faveur de SEA Handling pour un montant total d’environ 360 millions d’euros constituaient des aides d’État incompatibles avec le marché intérieur et, d’autre part, a ordonné à la République italienne de procéder à la récupération de ladite somme, augmentée des intérêts encourus.
5 À la suite de la décision C (2012) 9448, SEA a pris contact, en août 2013, avec les services de la Commission au sujet des modalités de mise en œuvre de ladite décision et en vue de préciser ses projets d’opérer à l’avenir sur le marché des services d’assistance en escale dans les aéroports. Dans ce contexte, ont été discutées la question d’une liquidation et d’une sortie organisée du marché de SEA Handling ainsi que celle d’une éventuelle continuité économique entre SEA Handling et une nouvelle société que SEA avait l’intention de créer.
6 Le 9 septembre 2013, SEA a effectivement constitué une nouvelle société, à savoir la requérante, Airport Handling SpA, qui a pour objet, notamment, la fourniture en Italie et à l’étranger de tout type de service d’assistance en escale aux passagers, marchandises, aéronefs et équipages de tous véhicules qui en font la demande. Le 28 novembre 2013, SEA a soumis à la Commission, par l’intermédiaire de la République italienne, un document précisant la proposition qu’elle avait soumise aux services de la Commission en août 2013 et qui concernait la constitution de la requérante, cette dernière devant opérer sans aucune continuité par rapport à SEA Handling qui, pour sa part, devait être mise en liquidation et sortir définitivement du marché.
7 Le 13 février 2014, la Commission a été informée de la décision de SEA de constituer un organe indépendant – un trust spécialisé – auquel étaient confiés la gestion et le contrôle de la requérante. Le 7 avril 2014, d’autres précisions et engagements relatifs à l’exécution de la décision C (2012) 9448 et à la création de la requérante ont été communiqués à la Commission. Ainsi, SEA l’a informée qu’elle garantirait l’ouverture du capital de la requérante à des opérateurs privés en deux phases (à savoir, vente à un investisseur privé de 20 à 30 % des actions dans les deux ans et ensuite ouverture du capital à des tiers privés jusqu’à la cession de participations majoritaires) et, en même temps, constituerait un trust afin d’assurer dans l’intervalle une absence totale de continuité entre SEA Handling et la requérante.
8 En avril 2014, SEA Handling a averti ses clients de la cessation imminente de ses activités dans les aéroports de Milan-Linate et de Milan-Malpensa.
9 Le 9 juin 2014, SEA Handling a été mise en liquidation avec effet au 1er juillet 2014.
10 Le 30 juin 2014, SEA a créé Milan Airport Handling Trust, chargé du contrôle et de la gestion de la requérante pour assurer l’absence de continuité par rapport à SEA Handling. En outre, Milan Airport Handling Trust a été chargé de céder, à partir du 10 mars 2015, à des investisseurs tiers, privés et indépendants, une première part au moins égale à 30 % du capital de la requérante, pour ensuite assister SEA dans la recherche d’autres associés privés auxquels elle céderait d’autres parts du capital de la requérante.
11 Le 3 juillet 2014 la Commission a reçu, par l’intermédiaire de la République italienne, un compte-rendu des actions et des développements relatifs aux modalités d’exécution de la décision C (2012) 9448 et à la création de la requérante. La Commission a été informée, d’une part, de la mise en liquidation de SEA Handling et de l’ouverture de la procédure visant à déterminer l’actionnaire privé qui acquerrait une participation d’au moins 30 % du capital de la requérante et, d’autre part, de la constitution de Milan Airport Handling Trust.
12 C’est dans ces circonstances que, le 9 juillet 2014, la Commission a adopté la décision C (2014) 4537 final par laquelle elle a ouvert la procédure formelle d’examen, au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, relative à la constitution de la société Airport Handling [SA.21420 (2014/NN) – Italie – Constitution d’Airport Handling] (ci-après la « décision attaquée »).
13 Dans la décision attaquée, la Commission est parvenue à l’évaluation préliminaire que la création de la requérante avait pour but ou pour résultat d’éviter la restitution de l’aide initialement octroyée à SEA Handling. En effet, il y aurait eu un transfert en faveur de la requérante de l’avantage concurrentiel dont a bénéficié SEA Handling en raison des prétendues aides d’État reçues, la requérante pouvant être considérée comme le successeur économique de SEA Handling. Par conséquent, l’ordre de récupération initialement adressé à cette dernière pourrait éventuellement être étendu à la requérante. En outre, la Commission a estimé probable que la constitution de la requérante et l’apport de 25 millions d’euros constituaient une aide d’État incompatible avec le droit de l’Union européenne, en ce que cet apport, réalisé au moyen de ressources d’État, serait imputable aux autorités publiques italiennes, qui auraient accordé un avantage économique sélectif à la requérante.
14 Le 27 août 2014, SEA a conféré au trust la totalité de sa participation dans le capital de la requérante. À la suite de ces opérations, le trust est devenu titulaire de la totalité des parts de SEA dans le capital de la requérante et a désigné un nouveau conseil d’administration et un nouveau collège des commissaires aux comptes, en totale indépendance par rapport à SEA. Le même jour, le trust, en sa qualité d’associé unique de la requérante, a décidé de créer et d’émettre des titres participatifs d’une valeur totale de 20 millions d’euros à souscrire par SEA.
Procédure et conclusions des parties
15 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 septembre 2014, la requérante a demandé l’annulation de la décision attaquée.
16 Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 25 septembre 2014, la requérante a introduit la présente demande en référé, dans laquelle elle conclut, en substance, à ce qu’il plaise au président du Tribunal :
– ordonner, le cas échéant en vertu de l’article 105, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, le sursis à l’exécution de la décision attaquée et, par conséquent, enjoindre à la Commission de s’abstenir de publier cette décision au Journal officiel de l’Union européenne ;
– adopter toute autre mesure provisoire jugée nécessaire ou appropriée ;
– en tout état de cause, condamner la Commission aux dépens de la présente procédure.
17 Par ordonnance du 29 septembre 2014, le président du Tribunal a, en vertu de l’article 105, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement de procédure, enjoint à la Commission de ne pas publier la décision attaquée au Journal officiel.
18 Dans ses observations sur la demande en référé, déposées au greffe du Tribunal le 10 octobre 2014, la Commission conclut, en substance, à ce qu’il plaise au président du Tribunal :
– révoquer l’ordonnance du 29 septembre 2014 ;
– rejeter la demande de mesures provisoires ;
– condamner la requérante aux dépens.
19 Par mémoire du 20 octobre 2014, la requérante a pris position sur la question d’irrecevabilité soulevée dans les observations de la Commission.
En droit
20 Il ressort d’une lecture combinée des articles 278 TFUE et 279 TFUE, d’une part, et de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, d’autre part, que le juge des référés peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire les mesures provisoires nécessaires, et ce dans le respect des règles prévues par l’article 104 du règlement de procédure.
Sur la recevabilité
21 En vertu de l’article 104, paragraphe 1, du règlement de procédure, une demande en référé n’est recevable que si elle émane d’une partie à une affaire dont le Tribunal est saisi. Cette règle implique que le recours principal, sur lequel se greffe la demande en référé, puisse être effectivement examiné par le juge du fond (voir ordonnance du 17 juillet 2013, Borghezio/Parlement, T‑336/13 R, EU:T:2013:385, point 23 et jurisprudence citée).
22 Dans ce contexte, il est de jurisprudence constante que la recevabilité du recours principal ne doit pas, en principe, être examinée dans le cadre d’une procédure de référé. Cependant, quand l’irrecevabilité manifeste du recours principal est soulevée, la partie sollicitant les mesures provisoires doit établir l’existence d’éléments permettant de conclure, à première vue, à la recevabilité de ce recours, sur lequel se greffe la demande en référé, afin d’éviter qu’elle puisse, par la voie du référé, obtenir le sursis à l’exécution d’un acte dont elle se verrait par la suite refuser l’annulation, son recours étant déclaré irrecevable lors de son examen au fond. Un tel examen, par le juge des référés, de la recevabilité du recours principal est nécessairement sommaire, compte tenu du caractère urgent de la procédure de référé (voir ordonnance Borghezio/Parlement, point 21 supra, EU:T:2013:385, point 24 et jurisprudence citée).
23 Ainsi, dans le cadre d’une procédure de référé, la recevabilité du recours principal ne peut être appréciée que de prime abord et le juge des référés ne doit déclarer cette demande irrecevable que si la recevabilité du recours principal peut être totalement exclue. À défaut, statuer sur la recevabilité du recours principal au stade du référé lorsque celle-ci n’est pas prima facie totalement exclue reviendrait à préjuger la décision du Tribunal statuant dans l’affaire principale (voir ordonnance Borghezio/Parlement, point 21 supra, EU:T:2013:385, point 25 et jurisprudence citée).
24 En l’espèce, la Commission excipe de l’irrecevabilité de la demande en référé, motif pris de ce que le recours principal formé contre la décision attaquée doit, selon elle, être déclaré manifestement irrecevable. Elle souligne que la décision attaquée a ouvert la procédure formelle d’examen en matière d’aides d’État et qu’un recours dirigé contre une telle décision n’est recevable que si la mesure étatique examinée est « en cours d’exécution ». En effet, l’ouverture de cette procédure ne produirait des effets juridiques qu’en ce qui concerne la future mise en œuvre de la mesure en question. Or, en l’espèce, la décision attaquée concernerait la constitution de la société requérante par SEA et l’injection de capital de 25 millions d’euros effectuée par celle-ci. Ces mesures ne seraient plus « en cours d’exécution », mais auraient déjà été mises en place, de sorte qu’elles ne pourraient créer aucune obligation de « suspension ». Par conséquent, la décision attaquée n’emporterait aucun effet juridique autonome.
25 À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le recours introduit par une personne physique ou morale qui vise à obtenir l’annulation d’un acte adopté par une institution de l’Union n’est recevable que si les effets juridiques obligatoires de cet acte sont de nature à affecter les intérêts de ladite personne, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (voir, en ce sens, arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec, EU:C:1981:264, point 9, et du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission, C‑463/10 P et C‑475/10 P, Rec, EU:C:2011:656, point 37).
26 En l’occurrence, par son recours principal, la requérante vise à obtenir l’annulation d’une décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen, au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE ainsi que des articles 6 et 7 du règlement (CE) nº 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO L 83, p. 1). S’agissant de déterminer si une telle décision constitue un acte qui vise à produire des effets de droit obligatoires susceptibles d’affecter les intérêts de la requérante en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique, il ressort d’une jurisprudence bien établie que, lorsque la Commission qualifie une mesure en cours d’exécution d’aide d’État nouvelle, une telle décision emporte des effets juridiques autonomes, en particulier en ce qui concerne la suspension de la mesure considérée (arrêts du 9 octobre 2001, Italie/Commission, C‑400/99, Rec, EU:C:2001:528, point 62 ; du 23 octobre 2002, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T‑346/99 à T‑348/99, Rec, EU:T:2002:259, point 33, et du 25 mars 2009, Alcoa Trasformazioni/Commission, T‑332/06, EU:T:2009:79, point 35). Cette conclusion s’impose non seulement dans le cas où la mesure en cours d’exécution est considérée par les autorités de l’État membre concerné comme une aide existante, mais également dans le cas où ces autorités estiment que la mesure visée par la décision d’ouverture ne tombe pas dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (voir, par analogie, arrêts Diputación Foral de Álava e.a./Commission, précité, EU:T:2002:259, point 33, et Alcoa Trasformazioni/Commission, précité, EU:T:2009:79, point 35).
27 En effet, une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen à l’égard d’une mesure en cours d’exécution et qualifiée d’aide nouvelle par la Commission modifie nécessairement la portée juridique de la mesure considérée ainsi que la situation juridique des entreprises qui en sont bénéficiaires, notamment en ce qui concerne la poursuite de la mise en œuvre de cette mesure. Jusqu’à l’adoption d’une telle décision, l’État membre, les entreprises bénéficiaires et les autres opérateurs économiques peuvent penser que la mesure est licitement mise en œuvre en tant que mesure générale ne tombant pas dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE ou en tant qu’aide existante. En revanche, après l’adoption d’une telle décision, il existe à tout le moins un doute important sur la légalité de cette mesure, qui, sans préjudice de la faculté de solliciter des mesures provisoires auprès du juge des référés, doit conduire l’État membre à en suspendre l’application, dès lors que l’ouverture de la procédure formelle d’examen exclut une décision immédiate concluant à la compatibilité avec le marché intérieur qui permettrait de poursuivre licitement l’exécution de ladite mesure. Une telle décision pourrait également être invoquée devant un juge national appelé à tirer toutes les conséquences découlant de la violation de l’article 108, paragraphe 3, dernière phrase, TFUE. Enfin, elle est susceptible de conduire les entreprises bénéficiaires de la mesure à refuser en tout état de cause de nouveaux versements ou de nouveaux avantages, ou à provisionner les sommes nécessaires à d’éventuelles compensations financières ultérieures. Les milieux d’affaires tiendront également compte, dans leurs relations avec lesdits bénéficiaires, de la situation juridique et financière fragilisée de ces derniers (arrêts Italie/Commission, point 26 supra, EU:C:2001:528, point 59 ; Diputación Foral de Álava e.a./Commission, point 26 supra, EU:T:2002:259, point 34, et Alcoa Trasformazioni/Commission, point 26 supra, EU:T:2009:79, point 36).
28 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient de déterminer si la décision attaquée constitue un acte qui vise à produire des effets de droit obligatoires et, donc, un acte susceptible de recours, au sens de l’article 263 TFUE.
29 La thèse défendue par la Commission peut être résumée en ce sens que, en règle générale, une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, en n’exprimant qu’une évaluation juridique préliminaire et constituant donc un simple acte préparatoire par rapport à la décision qui mettra fin à cette procédure, ne produit pas d’effets de droit obligatoires sur la situation juridique du bénéficiaire de l’aide présumée. Selon la Commission, ce n’est que par exception qu’une telle décision constitue un acte attaquable, à savoir lorsque la mesure qu’elle vise est en cours d’exécution puisque, en raison de son effet suspensif, l’État membre destinataire est tenu de suspendre l’aide. La requérante considère, en revanche, que toute décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen peut être contestée devant le juge de l’Union.
30 À cet égard, il y a lieu de considérer qu’une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen emporte des effets juridiques autonomes lorsque, au vu des conclusions qu’elle contient, elle produit un effet immédiat, certain et suffisamment contraignant sur l’État membre qui en est destinataire et sur le ou les bénéficiaires de la mesure d’aide sous examen. Il s’agit donc d’une décision qui, par son seul effet et sans que d’autres mesures prises par la Commission ou une autre autorité soient nécessaires, oblige l’État membre destinataire à adopter une ou plusieurs mesures afin de s’y conformer (arrêt du 16 octobre 2014, Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, T‑129/13, EU:T:2014:895, point 33).
31 Tel est le cas lorsque la Commission décide d’ouvrir la procédure formelle d’examen à l’égard d’une mesure d’aide mise à exécution sans avoir été notifiée et toujours en cours d’exécution à la date à laquelle la décision est adoptée. Dans ce cas, la portée de la mesure sous examen est nécessairement modifiée, eu égard à la conclusion provisoire de la Commission sur son caractère d’aide d’État illégale, car mise en œuvre sans avoir été notifiée. Au regard d’une telle appréciation, qui fait naître un doute important sur la légalité de la mesure sous examen, l’État membre destinataire de la décision doit suspendre l’application de cette mesure. Il s’agit là d’un effet immédiat, certain et suffisamment contraignant de la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, l’État membre étant tenu de suspendre l’application de la mesure sous examen par l’effet de la seule décision et afin de tirer les conséquences de ses conclusions provisoires quant à l’illégalité de ladite mesure (voir arrêt Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, point 30 supra, EU:T:2014:895, point 34 et jurisprudence citée).
32 D’ailleurs, le juge de l’Union considère que, lorsque la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen à l’égard d’une mesure en cours d’exécution, les juridictions nationales sont tenues d’adopter toutes les mesures nécessaires en vue de tirer les conséquences d’une éventuelle violation de l’obligation de suspension de l’exécution de ladite mesure. À cette fin, le juge national peut décider de suspendre l’exécution de la mesure sous examen et d’enjoindre la récupération des montants déjà versés. Il peut aussi décider d’ordonner des mesures provisoires afin de sauvegarder, d’une part, les intérêts des parties concernées et, d’autre part, l’effet utile de la décision de la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen (arrêt Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, point 30 supra, EU:T:2014:895, points 35 et 36 et jurisprudence citée).
33 À la différence d’une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen à l’égard d’une mesure en cours d’exécution, une décision de cette nature visant une mesure qui n’est plus en cours d’exécution n’emporte pas d’effets juridiques autonomes, faute de posséder une portée immédiate, certaine et suffisamment contraignante envers l’État membre destinataire et le ou les bénéficiaires de la mesure sous examen (voir arrêt Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, point 30 supra, EU:T:2014:895, point 37).
34 Ainsi, l’État membre n’est pas tenu d’agir en recouvrement des aides versées au bénéficiaire en raison de l’adoption d’une telle décision. À cet égard, il convient de constater que le règlement n° 659/1999, lui-même, impose des conditions très strictes à la Commission lorsqu’elle envisage d’enjoindre à l’État membre concerné la récupération provisoire de l’aide : son article 11, paragraphe 2, exige que le caractère d’aide de la mesure concernée ne fasse pas de doute, qu’il y ait urgence à agir et qu’il existe un risque sérieux de préjudice substantiel et irréparable pour un concurrent. De telles conditions, certes fixées pour l’adoption d’une décision distincte et d’une portée différente de la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, constituent des indices de l’inexistence, pour l’État membre destinataire, d’une obligation générale de récupération des aides illégalement versées, découlant de cette seule dernière décision. Par ailleurs, l’article 14, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999 prévoit expressément que, après l’adoption d’une décision finale constatant l’incompatibilité d’une aide avec le marché intérieur, la Commission n’exige pas la récupération de celle-ci si, ce faisant, elle va à l’encontre d’un principe général du droit de l’Union (arrêt Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, point 30 supra, EU:T:2014:895, point 38).
35 En outre, il a été jugé, d’une part, que le juge national n’était pas tenu d’ordonner la récupération d’une aide mise à exécution en méconnaissance de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, lorsque la Commission avait adopté une décision finale constatant la compatibilité de ladite aide avec le marché intérieur au sens de l’article 107 TFUE, mais qu’il était tenu d’ordonner au bénéficiaire de l’aide le paiement d’intérêts au titre de la période d’illégalité. D’autre part, lors d’un litige devant un juge national ayant pour objet le recouvrement d’une aide, l’obligation, pour ce juge, d’adopter des mesures de sauvegarde n’existe que si les conditions justifiant de telles mesures sont réunies, à savoir si la qualification d’aide d’État ne fait pas de doute, si l’aide est sur le point d’être ou a été mise à exécution et si ne sont pas constatées des circonstances exceptionnelles rendant inappropriée une récupération, sinon le juge national doit rejeter la demande (voir arrêt Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, point 30 supra, EU:T:2014:895, point 39 et jurisprudence citée).
36 Au vu de ce qui précède, force est de considérer qu’une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen à l’égard d’une mesure qui n’est plus en cours d’exécution ne produit aucun effet immédiat, certain et suffisamment contraignant sur l’État membre pour l’obliger à récupérer l’aide illégalement versée (arrêt Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, point 30 supra, EU:T:2014:895, point 40).
37 S’agissant du caractère certain des effets juridiques autonomes produits par la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, il convient de constater que, contrairement à l’obligation de suspendre la mesure sous examen découlant d’une telle décision prise à l’égard d’une mesure en cours d’exécution, la récupération d’une aide illégale n’est, en règle générale, susceptible d’intervenir qu’à l’occasion d’un litige devant le juge national dont l’issue est, par nature, incertaine, eu égard aux différents paramètres, mentionnés au point 35 ci-dessus, que ce juge doit prendre en considération pour condamner le bénéficiaire d’une aide illégale à la reverser (arrêt Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, point 30 supra, EU:T:2014:895, point 41).
38 Il résulte de tout ce qui précède qu’une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen à l’encontre d’une mesure qui n’est plus en cours d’exécution n’emporte pas d’effets juridiques autonomes et, partant, ne produit pas d’effets de droit obligatoires, de sorte qu’elle ne constitue manifestement pas un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE.
39 En l’espèce, il ressort de la décision attaquée que les mesures adoptées par SEA et faisant l’objet de la procédure formelle d’examen sous l’aspect de leur compatibilité avec l’article 107 TFUE sont, d’une part, la constitution de la société requérante et, d’autre part, l’apport du capital de 25 millions d’euros aux fins du démarrage de cette dernière. Quant aux arguments soulevés dans la décision attaquée relatifs, notamment, à la possibilité d’une continuité économique entre SEA Handling et la requérante, à l’éventualité d’une extension à la seconde de l’ordre de récupération initialement adressé à la première et au soupçon de la Commission que la création de la requérante puisse avoir pour but réel de contourner ledit ordre de récupération, il s’agit là des motifs principaux ayant amené la Commission à ouvrir la procédure formelle d’examen au regard de la constitution de la requérante et de l’apport du capital de démarrage, et non de « mesures » supplémentaires qui viendraient s’ajouter aux deux mesures examinées.
40 En ce qui concerne la première de ces deux mesures, il est constant que la société requérante a effectivement été constituée le 9 septembre 2013 et qu’elle est devenue opérationnelle au cours de la première moitié de l’année 2014 à mesure que SEA Handling a cessé ses activités (voir points 6 à 11 ci-dessus). Par conséquent, la première mesure avait, à l’évidence, été mise en œuvre à la date d’ouverture de la procédure formelle d’examen.
41 Quant à la seconde mesure, la requérante affirme que l’apport en capital de 25 millions d’euros n’était pas encore survenu à la date d’ouverture de l’« enquête ». Force est cependant de constater qu’elle ne prétend ainsi pas que ladite mesure était en cours d’exécution à la date d’ouverture de la « procédure formelle d’examen ». Invitée par le juge des référés à commenter les questions de recevabilité soulevées par la Commission – qui portaient précisément sur l’état d’achèvement des mesures litigieuses à la date d’ouverture de la procédure formelle d’examen –, la requérante, si elle voulait contester valablement l’allégation de la Commission selon laquelle l’apport en capital litigieux avait déjà eu lieu à cette date, aurait dû fournir non seulement des indications précises relatives à la seule date pertinente, mais également un extrait de ses documents comptables faisant apparaître la date exacte à laquelle ce capital lui avait été apporté. En revanche, la référence à l’« enquête » menée par la Commission apparaît trop vague, du fait que cette dernière avait été saisie, depuis le mois d’août 2013, des projets visant à constituer une nouvelle société qui prendrait la relève de SEA Handling (voir points 5 à 11 ci-dessus), alors que la procédure formelle d’examen n’a été ouverte que le 9 juillet 2014. Enfin, le juge des référés ne saurait négliger le fait que l’ancienne société mère de la requérante, SEA, loin de contester avoir apporté, avant cette date d’ouverture, à la requérante la somme de 25 millions d’euros, a affirmé – dans le cadre de la procédure de référé parallèle qu’elle a engagée contre la décision attaquée – avoir investi du capital et des ressources considérables dans la création et le démarrage de la requérante (voir ordonnance du 27 novembre 2014, SEA/Commission, T‑674/14 R, non publiée, point 39). Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que la seconde mesure avait, elle aussi, déjà été mise en œuvre à la date d’ouverture de la procédure formelle d’examen.
42 Il s’ensuit, à première vue, que la décision attaquée, en ce qu’elle vise des mesures qui ne sont plus en cours d’exécution, est manifestement dépourvue d’effets de droit obligatoires autonomes sur la situation juridique de la requérante et ne saurait donc constituer un acte attaquable, au sens de l’article 263 TFUE.
43 Aucun des arguments avancés par la requérante en sens contraire ne permet de revenir sur la conclusion du point 42 ci-dessus.
44 Premièrement, la requérante soutient que la décision attaquée complique, au point de le rendre impossible, le processus d’ouverture de son capital social et l’investissement de la part de tiers. À cet égard, il suffit de relever que ledit processus ne fait pas l’objet de la décision attaquée, la Commission n’ayant soulevé aucun doute sérieux quant à la recherche d’opérateurs économiques privés intéressés par des investissements dans le capital de la requérante. En tout état de cause, la décision attaquée ne peut être regardée comme interdisant, de manière immédiate, certaine et suffisamment contraignante, cette recherche prévue par la requérante. En d’autres termes, une fois la société requérante créée, devenue opérationnelle et dotée du capital de démarrage de 25 millions d’euros, la décision attaquée ne constitue, à elle seule, aucun obstacle juridique à la mise en œuvre dudit processus.
45 Deuxièmement, la requérante fait valoir qu’elle risque de subir un préjudice grave en termes de réputation et d’image à l’égard des transporteurs et des opérateurs aéroportuaires, si la décision attaquée n’est pas suspendue, ce qui compromettrait les rapports commerciaux avec ces opérateurs ainsi que la conclusion de nouveaux contrats. En effet, la décision attaquée la désignerait comme une société économiquement instable, dont le plan industriel n’est pas crédible et sur laquelle pèse la menace grave d’une possible extension de l’obligation de restitution des aides soi-disant perçues par SEA Handling. Sa situation financière apparaîtrait donc moins solide aux yeux du marché et des investisseurs potentiels. La requérante ajoute qu’elle est soumise au risque, rendu concret par la décision attaquée, que des tiers concurrents puissent saisir une juridiction nationale et réclamer une protection face à des aides soi-disant perçues par elle, en en demandant le remboursement ainsi que la réparation des dommages soi-disant subis. Enfin, elle serait encline à provisionner les sommes nécessaires pour faire face au risque de remboursement, les soustrayant ainsi à son activité économique quotidienne.
46 À cet égard, force est de constater qu’aucun de ces risques et effets préjudiciables ne saurait être considéré comme étant une conséquence juridique immédiate, certaine et suffisamment contraignante de la décision attaquée pour l’État membre destinataire, pour SEA et pour la requérante en tant que bénéficiaire des mesures faisant l’objet de la procédure formelle d’examen. Ces risques et effets constituent plutôt de simples conséquences de fait, indirectes, de l’ouverture de cette procédure. Même si la décision attaquée fait naître des doutes importants quant à la compatibilité des mesures litigieuses, un tel constat ne permet pas, pris isolément, de considérer que cette décision produirait des effets juridiques autonomes tels que ceux exposés au point 30 ci-dessus.
47 En effet, dans la mesure où la requérante allègue que la décision attaquée pourrait l’amener à provisionner les sommes destinées à faire face à d’éventuelles demandes de restitution, une telle réaction de sa part, loin d’être un effet juridique autonome de la décision attaquée, constituerait une mesure de gestion d’entreprise, adoptée en fonction de ses intérêts économiques et financiers. Une telle action serait opérée plutôt au regard du droit comptable national applicable et de l’évaluation de la perte financière envisagée (voir, en ce sens, arrêt Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, point 30 supra, EU:T:2014:895, point 55).
48 En ce qui concerne les prétendues réactions négatives des milieux d’affaires à l’égard de la situation incertaine de la requérante en tant que bénéficiaire d’une mesure d’aide, il y a lieu de constater qu’elles ne sauraient davantage être considérées comme des effets de droit obligatoires, dès lors qu’il ne s’agit que de simples conséquences factuelles et non des effets juridiques qu’une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen est destinée à produire. Certes, le juge de l’Union a pris en considération la circonstance que les milieux d’affaires tiendront compte, dans leurs relations avec le bénéficiaire d’une mesure d’aide illégale, de la situation juridique et financière fragilisée de ce dernier. Néanmoins, il est évident que de telles considérations ne font que mettre en lumière les conséquences factuelles des effets de droit obligatoires en raison desquels une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen à l’encontre d’une mesure en cours d’exécution est qualifiée d’acte attaquable (voir, en ce sens, arrêt Alpiq RomIndustries et Alpiq RomEnergie/Commission, point 30 supra, EU:T:2014:895, point 56 et jurisprudence citée).
49 Dans la mesure où la requérante craint d’être confrontée, pendant la procédure formelle d’examen, à des procédures devant des juridictions nationales quand bien même les mesures litigieuses ne seraient plus en cours d’exécution, ces juridictions pouvant ordonner la récupération des sommes déjà versées ou prendre des mesures provisoires, il convient d’admettre que, saisi d’une demande en ce sens, le juge national peut ordonner la récupération de l’aide versée, que la mesure d’aide soit ou ne soit plus en cours d’exécution. Toutefois, une telle possibilité ne peut être regardée comme un effet immédiat, certain et suffisamment contraignant de la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen. En effet, cette décision n’emporte un tel effet à l’égard de l’État membre que dans l’hypothèse où la mesure concernée est en cours d’exécution, puisque, dans ce dernier cas, l’État membre est tenu, par la décision même, de suspendre la mesure d’aide sans qu’il soit nécessaire de saisir le juge national (voir points 31 et 32 ci-dessus). En outre, il ressort des principes énoncés plus haut que le juge national n’a pas l’obligation d’ordonner la récupération de l’aide versée (voir points 34 et 35 ci-dessus), laquelle ne peut intervenir, en règle générale, qu’à l’occasion d’un litige juridictionnel dont l’issue est, par nature, incertaine (voir point 37 ci-dessus).
50 Quant au risque d’extension à la requérante de l’obligation de récupérer l’aide octroyée à SEA Handling, il convient de reconnaître que l’interdiction de mise à exécution des aides d’État prévue par l’article 108, paragraphe 3, TFUE ne distingue pas selon que l’aide illégale a été entièrement exécutée ou est toujours en cours d’exécution au moment où la procédure formelle d’examen est ouverte, toute aide illégale déclarée non compatible avec le marché intérieur par la Commission ayant vocation à être récupérée par l’État membre qui l’a accordée. Toutefois, ces considérations ne sont pas de nature à influer sur le point de savoir si une décision d’ouvrir cette procédure, telle que la décision attaquée, est un acte qui emporte des effets juridiques autonomes, à savoir, qui, au vu des conclusions qu’il contient, produit un effet immédiat, certain et suffisamment contraignant sur l’État membre qui en est destinataire et sur le ou les bénéficiaires de la mesure d’aide sous examen (voir point 30 ci-dessus). Or, ainsi qu’il vient d’être jugé, la décision attaquée n’impose, à elle seule, aucune obligation juridique de recouvrer une quelconque aide versée (voir point 34 ci-dessus).
51 Il s’ensuit que la demande en référé doit être rejetée comme irrecevable du fait que le recours principal sur lequel elle se greffe apparaît, à première vue, manifestement irrecevable.
52 Au demeurant, ce rejet est confirmé par l’examen de la condition relative à l’urgence.
Sur l’urgence
53 Selon une jurisprudence constante, le caractère urgent d’une demande en référé doit s’apprécier par rapport à la nécessité de statuer provisoirement, afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite les mesures provisoires, étant précisé qu’un préjudice de caractère purement financier n’est normalement pas irréparable, dès lors qu’il peut faire l’objet d’une compensation financière ultérieure, à moins qu’il apparaisse que, en l’absence de ces mesures, ladite partie se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril son existence avant l’intervention de l’arrêt mettant fin à la procédure principale ou que ses parts de marché seraient modifiées de manière importante au regard, notamment, de la taille et du chiffre d’affaires de son entreprise ainsi que des caractéristiques du groupe auquel elle se rattache par son actionnariat. En outre, l’octroi des mesures provisoires sollicitées n’est justifié que si l’acte contre lequel elles sont dirigées constitue la cause déterminante du préjudice grave et irréparable allégué, alors qu’un préjudice de nature purement hypothétique, en ce qu’il est fondé sur la survenance d’événements futurs et incertains, ne saurait justifier l’octroi de mesures provisoires [voir, en ce sens, ordonnances du 7 mars 2013, EDF/Commission, C‑551/12 P(R), Rec, EU:C:2013:157, points 41 et 54 ; du 16 novembre 2007, Dimos Peramatos/Commission, T‑312/07 R, EU:T:2007:345, points 34 et 35, et du 17 janvier 2013, Slovénie/Commission, T‑507/12 R, EU:T:2013:25, point 14].
54 Pour pouvoir apprécier si le préjudice allégué présente un caractère grave et irréparable, le juge des référés doit disposer d’indications concrètes et précises, étayées par des preuves documentaires détaillées et certifiées, qui démontrent la situation financière de la partie qui sollicite les mesures provisoires et permettent d’apprécier les conséquences qui résulteraient vraisemblablement de l’absence des mesures demandées. Il s’ensuit que ladite partie doit produire, pièces à l’appui, une image fidèle et globale de sa situation financière [ordonnance du 27 avril 2010, Parlement/U, T‑103/10 P(R), RecFP, EU:T:2010:164, points 37 et 39 ; voir également, en ce sens, ordonnance du 20 avril 2012, Fapricela/Commission, C‑507/11 P(R), EU:C:2012:231, point 35].
55 En l’espèce, la requérante fait valoir que, en cas de rejet de sa demande en référé, la décision attaquée lui causerait un préjudice grave et irréparable à cinq égards.
56 Premièrement, cette décision créerait un obstacle insurmontable au processus délicat d’ouverture de son capital social à des investisseurs tiers privés, aucun investisseur n’étant disposé à investir dans le capital d’une société qui court le risque sérieux d’être appelée à rembourser de soi-disant aides d’État d’un montant énorme. Deuxièmement, la décision attaquée donnerait de la requérante l’image d’une société instable du point de vue financier, sur laquelle pèse la grave menace d’une éventuelle extension de l’obligation de restitution des aides soi-disant perçues par SEA Handling, ce qui l’exposerait inévitablement au risque grave de voir ses rapports compromis avec les autres opérateurs du marché. Selon la requérante, ces préjudices seraient largement aggravés par une publication de la décision attaquée au Journal officiel de l’Union européenne.
57 À cet égard, il convient de constater que la requérante s’est abstenue de fournir des indications concrètes et précises, étayées par des preuves documentaires, susceptibles de démontrer sa situation financière et celle de Milan Airport Handling Trust conformément à la jurisprudence citée aux points 53 et 54 ci-dessus. La requérante n’a donc pas établi qu’il lui serait impossible de supporter, durant la procédure principale, les prétendus inconvénients pour le processus d’ouverture de son capital social et pour ses rapports avec les autres opérateurs du marché, sans que l’exercice de son activité d’assistance en escale aux aéroports de Milan-Linate et de Milan-Malpensa soit gravement et irrémédiablement compromise.
58 En ce qui concerne les effets préjudiciables d’une publication de la décision attaquée au Journal officiel de l’Union européenne, force est de relever que cette décision a déjà reçue une vaste publicité, en ce que son adoption a fait l’objet d’un communiqué de presse publié sur le site Internet de la Commission, que l’ouverture de la procédure formelle d’examen a été largement divulguée dans la presse italienne et internationale et que le groupe SEA a fait mention, dans son rapport financier semestriel du 30 juin 2014, publié sur son site Internet, de l’ouverture par la Commission d’« une enquête formelle afin de déterminer si l’apport de capital de 25 millions d’euros en faveur d’Airport Handling […] est conforme aux règles en vigueur en matière d’aides d’État ». Par conséquent, la publication redoutée de la décision attaquée ne saurait guère être considérée comme étant la cause déterminante du préjudice allégué, les opérateurs du secteur étant déjà parfaitement informés des doutes sérieux émis par la Commission et de l’ouverture de la procédure formelle d’examen. Au demeurant, à supposer que la publicité de l’ouverture de cette procédure ait réellement l’effet préjudiciable allégué, ce préjudice se serait déjà réalisé. Or, la finalité de la procédure de référé n’est pas d’assurer la réparation d’un préjudice déjà subi (voir, en ce sens, ordonnance du 27 août 2008, Melli Bank/Conseil, T‑246/08 R, EU:T:2008:301, point 53 et jurisprudence citée).
59 Troisièmement, dans la mesure où la requérante prétend que la décision attaquée fait obstacle à toute capitalisation ultérieure de la société, en raison du risque que toute nouvelle mesure en ce sens soit considérée comme une nouvelle aide d’État, empêchant l’évolution normale de son activité ou d’éventuels projets d’expansion, la Commission a rétorqué, à juste titre, que la procédure formelle d’examen ouverte à l’égard de la requérante concernait uniquement deux mesures adoptées par SEA, à savoir la constitution de la requérante et l’apport de son capital de démarrage, et non d’éventuelles mesures futures de capitalisation (voir points 39 et 44 ci-dessus). Par conséquent, la décision attaquée ne saurait constituer la cause déterminante de l’éventuel échec d’une capitalisation ultérieure de la requérante.
60 Quatrièmement, la requérante soutient que la décision attaquée l’expose au risque concret que le liquidateur de SEA Handling se sente obligé de mettre en cause le contrat par lequel cette dernière lui a temporairement loué les équipements nécessaires pour fournir les services d’assistance à terre, avec les conséquences irrémédiables que cela comporterait sur le caractère opérationnel de la requérante.
61 Toutefois, ainsi que la Commission l’a relevé à bon droit, la requérante n’a pas fourni le moindre élément concret indiquant que le liquidateur aurait l’intention de procéder à une résiliation anticipée de ce contrat ni qu’il aurait déjà entrepris des démarches préliminaires en ce sens. La requérante ne s’est pas non plus prononcée sur les procédures judiciaires nationales qui devraient être menées avant qu’un juge puisse résilier ledit contrat. En tout état de cause, la requérante sera obligée, une fois que le contrat sera venu à échéance, d’acquérir sur le marché les équipements dont elle a besoin. Or, elle est restée silencieuse quant au préjudice grave et irréparable qui résulterait pour elle d’une acquisition anticipée de ces équipements, et ce en dépit de la puissance économique et financière du groupe SEA auquel elle appartient.
62 Cinquièmement, la requérante affirme que la décision attaquée l’incite fortement à ne pas participer à la procédure publique tendant à la vente des équipements de SEA Handling. Force est cependant de constater que, au point 27 de la demande en référé, elle a déclaré, elle-même, qu’elle resterait fidèle à l’engagement pris par le gouvernement italien, s’agissant de l’exécution de la décision C (2012) 9448, et qu’elle ne prendrait pas part à la procédure publique d’adjudication des équipements de SEA Handling. Il apparaît donc que la requérante a volontairement pris un engagement en ce sens, sans avoir été influencée par la décision attaquée. En tout état de cause, elle a omis de préciser pour quelle raison l’acquisition sur le marché, plutôt qu’auprès de SEA Handling, des équipements en cause entraînerait un préjudice grave et irréparable pour elle.
63 Il résulte de tout ce qui précède que la demande en référé doit également être rejetée pour défaut d’urgence. Dans ces circonstances, il n’est pas besoin de vérifier l’existence d’un fumus boni juris puisque les conditions d’octroi d’une mesure provisoire – urgence et fumus boni juris – sont cumulatives et qu’une demande en référé doit être rejetée si l’une d’elles fait défaut [ordonnance du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec, EU:C:1996:381, point 30].
64 Enfin, il y a lieu de rapporter l’ordonnance du 29 septembre 2014 rendue au titre de l’article 105, paragraphe 2, du règlement de procédure, par laquelle il a été enjoint à la Commission de ne pas publier la décision attaquée au Journal officiel de l’Union européenne. Dans la mesure où la requérante fait état, dans ce contexte, de « sérieux problèmes de confidentialité quant au texte à publier », il suffit de noter qu’il s’agit là d’une problématique qui fera éventuellement l’objet d’un futur litige détaché de la présente affaire.
Par ces motifs,
LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL
ordonne :
1) La demande en référé est rejetée.
2) L’ordonnance du 29 septembre 2014 rendue dans l’affaire T‑688/14 R est rapportée.
3) Les dépens sont réservés.
Fait à Luxembourg, le 28 novembre 2014.
Le greffier | Le président |
E. Coulon | M. Jaeger |
* Langue de procédure : l’italien.
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