Alfa Acciai v Commission (Judgment) French Text [2014] EUECJ T-85/10 (09 December 2014)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2014/T8510.html
Cite as: EU:T:2014:1037, [2014] EUECJ T-85/10, ECLI:EU:T:2014:1037

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

9 décembre 2014 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché des ronds à béton en barres ou en rouleaux – Décision constatant une infraction à l’article 65 CA, après l’expiration du traité CECA, sur le fondement du règlement (CE) n° 1/2003 – Fixation des prix et des délais de paiement – Limitation ou contrôle de la production ou des ventes – Excès de pouvoir – Droits de la défense – Infraction unique et continue – Amendes – Fixation du montant de départ – Circonstances atténuantes – Durée de la procédure administrative »

Dans l’affaire T‑85/10,

Alfa Acciai SpA, établie à Brescia (Italie), représentée par Mes D. Fosselard, S. Amoruso et L. Vitolo, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. R. Sauer et B. Gencarelli, puis par M. Sauer et Mme R. Striani, en qualité d’agents, assistés de Me P. Manzini, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet, à titre principal, une demande d’annulation de la décision C (2009) 7492 final de la Commission, du 30 septembre 2009, relative à une procédure d’application de l’article 65 CA (affaire COMP/37.956 – Ronds à béton armé, réadoption), telle que modifiée par la décision C (2009) 9912 final de la Commission, du 8 décembre 2009, en ce qu’elle constate une violation de l’article 65 CA par la requérante et la condamne à une amende de 7,175 millions d’euros, ou, à titre subsidiaire, une demande de réduction du montant de cette amende,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur), faisant fonction de président, MM. A. Popescu et G. Berardis, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 27 novembre 2013,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Dispositions du traité CECA

1        L’article 36 CA prévoyait :

« La Commission, avant de prendre une des sanctions pécuniaires ou de fixer une des astreintes prévues au présent traité, doit mettre l’intéressé en mesure de présenter ses observations.

Les sanctions pécuniaires et les astreintes prononcées en vertu des dispositions du présent traité peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction.

Les requérants peuvent se prévaloir, à l’appui de ce recours, dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article 33 du présent traité, de l’irrégularité des décisions et recommandations dont la méconnaissance leur est reprochée. »

2        L’article 47 CA se lisait comme suit :

« La Commission peut recueillir les informations nécessaires à l’accomplissement de sa mission. Elle peut faire procéder aux vérifications nécessaires.

La Commission est tenue de ne pas divulguer les informations qui, par leur nature, sont couvertes par le secret professionnel, et notamment les renseignements relatifs aux entreprises et concernant leurs relations commerciales ou les éléments de leur prix de revient. Sous cette réserve, elle doit publier les données qui sont susceptibles d’être utiles aux gouvernements ou à tous autres intéressés.

La Commission peut prononcer, à l’encontre des entreprises qui se soustrairaient aux obligations résultant pour elles des décisions prises en application des dispositions du présent article ou qui fourniraient sciemment des informations fausses, des amendes, dont le montant maximum sera de 1 % du chiffre d’affaires annuel, et des astreintes, dont le montant maximum sera de 5 % du chiffre d’affaires journalier moyen par jour de retard.

Toute violation par la Commission du secret professionnel ayant causé un dommage à une entreprise pourra faire l’objet d’une action en indemnité devant la Cour, dans les conditions prévues à l’article 40. »

3        L’article 65 CA disposait :

« 1. Sont interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d’association d’entreprises et toutes pratiques concertées qui tendraient, sur le marché commun, directement ou indirectement, à empêcher, restreindre ou fausser le jeu normal de la concurrence et en particulier :

a)      à fixer ou déterminer les prix ;

b)      à restreindre ou à contrôler la production, le développement technique ou les investissements ;

c)      à répartir les marchés, produits, clients ou sources d’approvisionnement.

[…]

4. Les accords ou décisions interdits en vertu du paragraphe 1 du présent article sont nuls de plein droit et ne peuvent être invoqués devant aucune juridiction des États membres.

La Commission a compétence exclusive, sous réserve des recours devant la Cour, pour se prononcer sur la conformité avec les dispositions du présent article desdits accords ou décisions.

5. La Commission peut prononcer contre les entreprises qui auraient conclu un accord nul de plein droit, appliqué ou tenté d’appliquer, par voie d’arbitrage, dédit, boycott ou tout autre moyen, un accord ou une décision nuls de plein droit ou un accord dont l’approbation a été refusée ou révoquée, ou qui obtiendraient le bénéfice d’une autorisation au moyen d’informations sciemment fausses ou déformées, ou qui se livreraient à des pratiques contraires aux dispositions du paragraphe 1, des amendes et astreintes au maximum égales au double du chiffre d’affaires réalisé sur les produits ayant fait l’objet de l’accord, de la décision ou de la pratique contraires aux dispositions du présent article, sans préjudice, si cet objet est de restreindre la production, le développement technique ou les investissements, d’un relèvement du maximum ainsi déterminé à concurrence de 10 % du chiffre d’affaires annuel des entreprises en cause, en ce qui concerne l’amende, et de 20 % du chiffre d’affaires journalier, en ce qui concerne les astreintes. »

4        Conformément à l’article 97 CA, le traité CECA a expiré le 23 juillet 2002.

 Dispositions du traité CE

5        L’article 305, paragraphe 1, CE énonçait :

« Les dispositions du présent traité ne modifient pas celles du traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l’acier, notamment en ce qui concerne les droits et obligations des États membres, les pouvoirs des institutions de cette Communauté et les règles posées par ce traité pour le fonctionnement du marché commun du charbon et de l’acier. »

 Règlement n° 1/2003

6        Aux termes de l’article 4 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1), pour « l’application des articles 81 [CE] et 82 [CE], la Commission dispose des compétences prévues par le présent règlement ».

7        L’article 7 du règlement n° 1/2003, intitulé « Constatation et cessation d’une infraction », prévoit :

« 1. Si la Commission, agissant d’office ou saisie d’une plainte, constate l’existence d’une infraction aux dispositions de l’article 81 [CE] ou [de l’article] 82 [CE], elle peut obliger par voie de décision les entreprises et associations d’entreprises intéressées à mettre fin à l’infraction constatée [...] Lorsque la Commission y a un intérêt légitime, elle peut également constater qu’une infraction a été commise dans le passé.

[...] »

8        L’article 14 du règlement n° 1/2003 dispose :

« 1. La Commission consulte un comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes avant de prendre une décision en application des articles 7, 8, 9, 10 et 23, de l’article 24, paragraphe 2, et de l’article 29, paragraphe 1.

2. Pour l’examen des cas individuels, le comité consultatif est composé de représentants des autorités de concurrence des États membres. Pour les réunions au cours desquelles sont examinées d’autres questions que les cas individuels, un représentant supplémentaire de l’État membre, compétent en matière de concurrence, peut être désigné. Les représentants désignés peuvent, en cas d’empêchement, être remplacés par d’autres représentants.

3. La consultation peut avoir lieu au cours d’une réunion convoquée et présidée par la Commission, qui se tient au plus tôt quatorze jours après l’envoi de la convocation, accompagnée d’un exposé de l’affaire, d’une indication des pièces les plus importantes et d’un avant-projet de décision. En ce qui concerne les décisions au titre de l’article 8, la réunion peut avoir lieu sept jours après la publication du dispositif d’un projet de décision. Lorsque la Commission envoie l’avis de convocation d’une réunion dans un délai inférieur à ceux qui sont indiqués plus haut, cette réunion peut avoir lieu à la date proposée si aucun État membre ne soulève d’objection. Le comité consultatif émet un avis écrit sur l’avant-projet de décision de la Commission. Il peut émettre un avis même si des membres sont absents et ne sont pas représentés. Sur demande d’un ou de plusieurs membres, les positions exprimées dans l’avis sont motivées.

4. La consultation peut également avoir lieu en suivant une procédure écrite. Toutefois, la Commission organise une réunion si un État membre en fait la demande. En cas de recours à la procédure écrite, la Commission fixe un délai d’au moins quatorze jours aux États membres pour formuler leurs observations et les transmettre à tous les autres États membres. Lorsque les décisions à prendre relèvent de l’article 8, le délai n’est plus de quatorze, mais de sept jours. Lorsque la Commission fixe, pour la procédure écrite, un délai inférieur à ceux qui sont indiqués plus haut, le délai proposé s’applique si aucun État membre ne soulève d’objection.

5. La Commission tient le plus grand compte de l’avis du comité consultatif. Elle informe ce dernier de la façon dont elle a tenu compte de son avis.

6. Si l’avis du comité consultatif est rendu par écrit, il est joint au projet de décision. Si le comité consultatif en recommande la publication, la Commission procède à cette publication en tenant compte de l’intérêt légitime des entreprises à ce que leurs secrets d’affaires ne soient pas divulgués.

7. À la demande d’une autorité de concurrence d’un État membre, la Commission inscrit à l’ordre du jour du comité consultatif les affaires qui sont traitées par une autorité de concurrence d’un État membre au titre de l’article 81 ou 82 du traité. La Commission peut également procéder à une telle inscription en agissant de sa propre initiative. Dans les deux cas, la Commission informe l’autorité de concurrence concernée.

Une autorité de concurrence d’un État membre peut notamment présenter une demande concernant une affaire dans laquelle la Commission a l’intention d’intenter une procédure ayant l’effet visé à l’article 11, paragraphe 6.

Le comité consultatif ne rend pas d’avis sur les affaires traitées par les autorités de concurrence des États membres. Il peut aussi débattre de questions générales relevant du droit communautaire de la concurrence. »

9        L’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 dispose :

« La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence :

a)      elles commettent une infraction aux dispositions de l’article 81 [CE] ou [de l’article] 82 [CE …] »

10      L’article 27, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003 énonce ce qui suit :

« Avant de prendre les décisions prévues aux articles 7, 8 et 23 et à l’article 24, paragraphe 2, la Commission donne aux entreprises et associations d’entreprises visées par la procédure menée par la Commission l’occasion de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs retenus par la Commission. La Commission ne fonde ses décisions que sur les griefs au sujet desquels les parties concernées ont pu faire valoir leurs observations. Les plaignants sont étroitement associés à la procédure. »

11      Aux termes de l’article 33 du règlement n° 1/2003, « [a]vant de publier un projet de disposition et d’adopter celle-ci, la Commission consulte le comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes ».

 Règlement n° 773/2004

12      L’article 10 du règlement (CE) n° 773/2004 de la Commission, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO L 123, p. 18), dispose :

« 1. La Commission informe par écrit les parties concernées des griefs soulevés à leur encontre. La communication des griefs est notifiée à chacune d’elles.

2. Lors de la notification de la communication des griefs, la Commission donne aux parties concernées la possibilité de l’informer par écrit de leur point de vue dans un délai qu’elle fixe. La Commission n’est pas tenue de prendre en considération les observations écrites reçues après l’expiration de ce délai.

3. Dans leurs observations écrites, les parties peuvent exposer tous les faits dont elles ont connaissance et qui entrent en ligne de compte dans leur défense contre les griefs soulevés par la Commission. Elles joignent en annexe tout document attestant les faits exposés […] »

13      L’article 14 du règlement n° 773/2004 prévoit :

« 1. Les auditions sont conduites en toute indépendance par un conseiller-auditeur.

2. La Commission invite les personnes qui doivent être entendues à assister à l’audition à la date qu’elle fixe.

3. La Commission invite les autorités de concurrence des États membres à prendre part à l’audition. Elle peut également inviter les fonctionnaires et agents d’autres autorités des États membres. »

 Communication de la Commission sur certains aspects du traitement des affaires de concurrence résultant de l’expiration du traité CECA

14      Le 18 juin 2002, la Commission des Communautés européennes a adopté la communication sur certains aspects du traitement des affaires de concurrence résultant de l’expiration du traité CECA (JO C 152, p. 5, ci-après la « communication du 18 juin 2002 »).

15      Au point 2 de la communication du 18 juin 2002, il est précisé que l’objet de celle-ci est :

« […]

–        de récapituler, à l’intention des opérateurs économiques et des États membres dans la mesure où ils sont concernés par le traité CECA et son droit dérivé, les modifications les plus importantes du droit matériel et procédural découlant de la transition vers le régime du traité CE […],

–        d’expliquer comment la Commission entend régler les problèmes spécifiques posés par la transition du régime CECA au régime CE dans le domaine des ententes et des abus de position dominante […], du contrôle des concentrations […] et du contrôle des aides d’État […] »

16      Le point 31 de la communication du 18 juin 2002, qui figure dans la subdivision consacrée aux problèmes spécifiques posés par la transition du régime du traité CECA au régime du traité CE, est libellé comme suit :

« Si, dans l’application des règles communautaires de la concurrence à des accords, la Commission constate une infraction dans un domaine relevant du traité CECA, le droit matériel applicable est, quelle que soit la date d’application, celui en vigueur au moment où les faits constitutifs de l’infraction se sont produits. En tout état de cause, sur le plan procédural, le droit applicable après l’expiration du traité CECA sera le droit CE […] »

 Objet du litige

17      La présente affaire a pour objet, à titre principal, une demande d’annulation de la décision C (2009) 7492 final de la Commission, du 30 septembre 2009, relative à une procédure d’application de l’article 65 CA (affaire COMP/37.956 – Ronds à béton armé, réadoption) (ci-après la « première décision »), telle que modifiée par la décision C (2009) 9912 final de la Commission, du 8 décembre 2009 (ci-après la « décision modificative ») (la première décision, telle qu’elle a été modifiée par la décision modificative, étant ci-après dénommée la « décision attaquée »), en ce qu’elle constate une violation de l’article 65 CA par la requérante et la condamne à une amende de 7,175 millions d’euros, ou, à titre subsidiaire, une demande de réduction du montant de cette amende.

18      Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que les sociétés suivantes avaient enfreint l’article 65 CA :

–        Alfa Acciai SpA (ci-après « Alfa » ou la « requérante ») ;

–        Feralpi Holding SpA (ci-après « Feralpi ») ;

–        Ferriere Nord SpA ;

–        IRO Industrie Riunite Odolesi SpA (ci-après « IRO ») ;

–        Leali SpA et- les Acciaierie e Ferriere Leali Luigi SpA en liquidation (ci-après « AFLL ») (ces deux sociétés étant ci-après dénommées ensemble « Leali-AFLL ») ;

–        Lucchini SpA et SP SpA, en liquidation (ces deux sociétés étant ci-après dénommées ensemble « Lucchini-SP ») ;

–        Riva Fire SpA (ci-après « Riva ») ;

–        Valsabbia Investimenti SpA et Ferriera Valsabbia SpA (ces deux sociétés étant ci-après dénommées ensemble « Valsabbia »).

 Antécédents du litige

19      La requérante est une entreprise dont le siège est sis à Brescia (Italie), qui est active dans le secteur des ronds à béton en Italie depuis 1986.

20      D’octobre à décembre 2000, la Commission a effectué, conformément à l’article 47 CA, des vérifications auprès d’entreprises italiennes productrices de ronds à béton et auprès d’une association d’entreprises sidérurgiques italiennes. Elle leur a également adressé des demandes de renseignements, en vertu de l’article 47 CA (considérant 114 de la première décision).

21      Le 26 mars 2002, la Commission a ouvert la procédure administrative et formulé des griefs au titre de l’article 36 CA (ci-après la « communication des griefs ») (considérant 114 de la première décision). La requérante a présenté des observations écrites sur la communication des griefs. Une audition a eu lieu le 13 juin 2002 (considérant 118 de la première décision).

22      Le 12 août 2002, la Commission a formulé des griefs supplémentaires (ci-après la « communication des griefs supplémentaires »), adressés aux destinataires de la communication des griefs. Dans la communication des griefs supplémentaires, fondée sur l’article 19, paragraphe 1, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204), la Commission expliquait sa position concernant la poursuite de la procédure après l’expiration du traité CECA. Un délai a été accordé aux entreprises concernées pour la présentation de leurs observations et une seconde audition en présence des représentants des États membres a eu lieu le 30 septembre 2002 (considérant 119 de la première décision).

23      À l’issue de la procédure, la Commission a adopté la décision C (2002) 5087 final, du 17 décembre 2002, relative à une procédure d’application de l’article 65 CA (COMP/37.956 – Ronds à béton) (ci-après la « décision de 2002 »), par laquelle elle a constaté que les entreprises destinataires de celle-ci avaient mis en œuvre une entente unique, complexe et continue sur le marché italien des ronds à béton en barres ou en rouleaux, qui avait pour objet ou pour effet la fixation des prix et qui avait également donné lieu à une limitation ou à un contrôle concertés de la production ou des ventes, contraire à l’article 65, paragraphe 1, CA (considérant 121 de la première décision). La Commission a, dans cette décision, infligé à la requérante une amende d’un montant de 7,175 millions d’euros.

24      Le 5 mars 2003, la requérante a formé un recours devant le Tribunal contre la décision de 2002. Par arrêt du 25 octobre 2007, SP e.a./Commission (T‑27/03, T‑46/03, T‑58/03, T‑79/03, T‑80/03, T‑97/03 et T‑98/03, Rec. p. II‑4331), le Tribunal a annulé la décision de 2002. Le Tribunal a relevé que, eu égard notamment au fait que la décision de 2002 ne comportait aucune référence à l’article 3 et à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, cette décision était fondée uniquement sur l’article 65, paragraphes 4 et 5, CA (arrêt SP e.a./Commission, précité, point 101). Dès lors que ces dispositions avaient expiré le 23 juillet 2002, la Commission ne pouvait plus tirer de compétence de celles-ci, éteintes au moment de l’adoption de la décision de 2002, pour constater une infraction à l’article 65, paragraphe 1, CA et pour imposer des amendes aux entreprises qui auraient participé à ladite infraction (arrêt SP e.a./Commission, précité, point 120).

25      Par lettre du 30 juin 2008, la Commission a informé la requérante et les autres entreprises concernées de son intention de réadopter une décision, en modifiant la base juridique par rapport à celle qui avait été choisie pour la décision de 2002. Elle a en outre précisé que, compte tenu de la portée limitée de l’arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, la décision réadoptée serait fondée sur les preuves présentées dans la communication des griefs et dans la communication des griefs supplémentaires. Un délai a été accordé aux entreprises concernées pour présenter leurs observations (considérants 6 et 123 de la première décision). La requérante a présenté des observations.

 Première décision

26      Le 30 septembre 2009, la Commission a adopté la première décision, laquelle a été notifiée à la requérante par lettre du 2 octobre 2009.

27      Dans la première décision, la Commission a constaté que les restrictions de la concurrence visées dans celle-ci avaient pour origine une entente entre producteurs italiens de ronds à béton et entre ces derniers et leur association, qui avait eu lieu durant la période comprise entre 1989 et 2000 et qui avait eu pour objet ou pour effet de fixer ou de déterminer les prix et de limiter ou de contrôler la production ou les ventes par le biais de l’échange d’un nombre considérable d’informations relatives au marché des ronds à béton en Italie (considérants 7 et 399 de la première décision).

28      S’agissant de l’appréciation juridique des comportements en cause en l’espèce, en premier lieu, la Commission a souligné, aux considérants 353 à 369 de la première décision, que le règlement n° 1/2003 devait être interprété comme lui permettant de constater et de sanctionner, après le 23 juillet 2002, les ententes dans les secteurs relevant du champ d’application du traité CECA ratione materiae et ratione temporis. Au considérant 370 de la première décision, elle a indiqué que celle-ci avait été adoptée conformément aux règles procédurales du traité CE et du règlement n° 1/2003. Aux considérants 371 à 376 de la première décision, la Commission a par ailleurs rappelé que les principes qui régissaient la succession des règles dans le temps pouvaient conduire à l’application de dispositions matérielles qui n’étaient plus en vigueur au moment de l’adoption d’un acte par une institution de l’Union européenne, sous réserve de l’application du principe général de la lex mitior, en vertu duquel une personne ne peut être sanctionnée pour un fait qui ne constitue pas un délit au sens de la législation entrée en vigueur postérieurement. Elle a conclu que, en l’espèce, le traité CE n’était pas in concreto plus favorable que le traité CECA et que, par conséquent, le principe de la lex mitior ne pouvait de toute façon pas être valablement invoqué pour contester l’application du traité CECA aux comportements en cause en l’espèce.

29      En deuxième lieu, s’agissant de l’application de l’article 65, paragraphe 1, CA, premièrement, la Commission a relevé que l’entente avait pour objet la fixation des prix en fonction de laquelle avait également été établi la limitation ou le contrôle de la production ou des ventes. Selon la Commission, en ce qui concerne la fixation des prix, l’entente s’était essentiellement articulée autour des accords ou pratiques concertées relatifs au prix de base pendant la période allant du 15 avril 1992 au 4 juillet 2000 (et, jusqu’en 1995, autour des accords ou pratiques concertées relatifs aux délais de paiement) et autour des accords ou pratiques concertées relatifs aux « suppléments » pendant la période allant du 6 décembre 1989 au 1er juin 2000 (considérants 399 et 400 de la première décision).

30      Deuxièmement, s’agissant des effets sur le marché des pratiques restrictives en cause, la Commission a indiqué que, dès lors qu’il était question d’une entente dont l’objectif était d’empêcher, de limiter ou d’altérer le jeu normal de la concurrence, il n’était pas nécessaire de vérifier qu’elle avait produit des effets sur le marché (considérant 512 de la première décision). Elle a toutefois estimé que l’entente avait eu des effets concrets sur le marché (considérants 513 à 518 de la première décision). En particulier, la Commission a conclu que l’entente avait influencé le prix de vente pratiqué par les producteurs de ronds à béton en Italie, même si les mesures prises au sein de l’entente n’avaient pas toujours immédiatement produit les résultats espérés par les entreprises qui y participaient. En outre, selon la Commission, il a pu y avoir des phénomènes aux effets différés. Par ailleurs, les entreprises en cause représentaient environ 21 % du marché italien des ronds à béton en 1989, 60 % en 1995 et environ 83 % en 2000, ce qui indiquerait un effet croissant sur le marché des augmentations de prix concertées. La Commission a enfin souligné que le fait que les initiatives prises en cette matière étaient, dès 1989, communiquées à l’ensemble des producteurs de ronds à béton avait accru l’importance de ces effets également durant les premières années de l’entente (considérant 519 de la première décision).

31      En troisième lieu, la Commission a identifié les destinataires de la première décision. Pour ce qui concerne la requérante, la Commission a indiqué, aux considérants 526 à 529 de la première décision, qu’Alfa était une entreprise à laquelle étaient imputables, outre ses propres comportements, ceux d’Alfa Acciai Srl, de l’Acciaieria Megara SpA (à partir de 1996) et des Acciaierie di Sicilia SpA.

32      En quatrième lieu, la Commission a considéré que l’article 65, paragraphe 2, CA et l’article 81, paragraphe 3, CE étaient inapplicables en l’espèce (considérants 567 à 570 de la première décision). Elle a également souligné que les règles en matière de prescription énoncées à l’article 25 du règlement n° 1/2003 ne l’empêchaient pas d’adopter la première décision (considérants 571 à 574 de la première décision).

33      En cinquième lieu, s’agissant du calcul du montant des amendes infligées en l’espèce, la Commission a indiqué que, en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, elle pouvait infliger des amendes aux entreprises qui avaient violé les règles de concurrence. Le plafond des amendes prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 étant différent de celui fixé à l’article 65, paragraphe 5, CA, la Commission a indiqué qu’elle appliquerait le plafond le plus bas, conformément au principe de la lex mitior (considérant 576 de la première décision). Elle a également indiqué que, ainsi qu’elle en avait informé les entreprises concernées par lettre du 30 juin 2008, elle avait décidé d’appliquer, en l’espèce, les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l’article 65, paragraphe 5, [CA] (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les « lignes directrices de 1998 »). Elle a ajouté que, en l’espèce, toutefois, elle tiendrait compte du fait qu’elle avait déjà décidé du montant des amendes qu’elle comptait infliger aux entreprises en cause lors de l’adoption de la décision de 2002 (considérants 579 et 580 de la première décision).

34      Premièrement, la Commission a considéré qu’une entente ayant pour objet la fixation des prix, mise en œuvre de différentes manières, notamment en ayant recours à la limitation ou au contrôle de la production ou des ventes, constituait une infraction très grave au droit de la concurrence de l’Union (considérant 591 de la première décision). La Commission a rejeté les arguments des entreprises en cause selon lesquels la gravité de l’infraction serait atténuée eu égard aux effets concrets limités sur le marché et au contexte économique dans lequel celles-ci auraient évolué (considérants 583 à 596 de la première décision). Selon la Commission, sans préjudice du caractère très grave de l’infraction, elle a tenu compte, lors de la détermination du montant de base de l’amende, des caractéristiques spécifiques de la présente affaire, en l’occurrence le fait qu’elle portait sur un marché national qui était soumis, à l’époque des faits, à une réglementation particulière du traité CECA et sur lequel les entreprises destinataires de la première décision détenaient, dans les premiers temps de l’infraction, des parts limitées (considérant 599 de la première décision).

35      Deuxièmement, la Commission a considéré le poids spécifique de chaque entreprise et a classé celles-ci en fonction de leur importance relative sur le marché en cause. Dès lors que les parts de marché relatives atteintes par les destinataires de la première décision au cours de la dernière année complète de l’infraction (1999) n’avaient pas été considérées par la Commission comme représentatives de la présence effective de ces dernières sur le marché en cause au cours de la période de référence, la Commission a distingué, sur la base des parts de marché moyennes au cours de la période 1990-1999, trois groupes d’entreprises, à savoir, premièrement, Feralpi et Valsabbia, à qui elle a appliqué un montant de départ de l’amende de 5 millions d’euros, deuxièmement, Lucchini-SP, Alfa, Riva et Leali-AFLL, à qui elle a appliqué un montant de départ de l’amende de 3,5 millions d’euros, et, troisièmement, IRO et Ferriere Nord, à qui elle a appliqué un montant de départ de 1,75 million d’euros (considérants 599 à 602 de la première décision).

36      Afin d’assurer à l’amende un effet suffisamment dissuasif, la Commission a augmenté le montant de départ de l’amende de Lucchini-SP de 200 % et celui de Riva de 375 % (considérants 604 et 605 de la première décision).

37      Troisièmement, la Commission a estimé que l’entente avait duré du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000. S’agissant de la participation de la requérante à l’infraction, la Commission a relevé que celle-ci s’étendait du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 (considérant 606 de la première décision).

38      L’infraction ayant duré plus de dix ans et six mois pour l’ensemble des entreprises, à l’exception de Ferriere Nord, le montant de départ de l’amende a été augmenté de 105 % pour toutes les entreprises, à l’exception de Ferriere Nord, dont le montant de départ a été majoré de 70 %. Les montants de base des amendes ont, partant, été fixés comme suit :

–        Feralpi : 10,25 millions d’euros ;

–        Valsabbia : 10,25 millions d’euros ;

–        Lucchini-SP : 14,35 millions d’euros ;

–        Alfa : 7,175 millions d’euros ;

–        Riva : 26,9 millions d’euros ;

–        Leali-AFLL : 7,175 millions d’euros ;

–        IRO : 3,58 millions d’euros ;

–        Ferriere Nord : 2,97 millions d’euros (considérants 607 et 608 de la première décision).

39      Quatrièmement, pour ce qui concerne les circonstances aggravantes, la Commission a relevé que Ferriere Nord avait déjà été destinataire d’une décision de la Commission, adoptée le 2 août 1989, pour sa participation à une entente portant sur la fixation des prix et la limitation des ventes dans le secteur des treillis soudés et a augmenté de 50 % le montant de base de son amende. Aucune circonstance atténuante n’a été retenue par la Commission (considérants 609 à 623 de la première décision).

40      Cinquièmement, s’agissant de l’application de la communication concernant la non-imposition d’amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 1996, C 207, p. 4, ci-après la « communication sur la coopération de 1996 »), la Commission a indiqué que Ferriere Nord lui avait fourni des indications utiles qui lui avaient permis de mieux comprendre le fonctionnement de l’entente avant l’envoi de la communication des griefs, en sorte qu’elle lui avait octroyé une réduction de 20 % du montant de son amende. La Commission a considéré que les autres entreprises en cause n’avaient pas satisfait aux conditions de ladite communication (considérants 633 à 641 de la première décision).

41      Le dispositif de la première décision se lit comme suit :

« Article premier

Les entreprises suivantes ont enfreint l’article 65, paragraphe 1, [CA] en participant, au cours des périodes indiquées, à un accord continu et/ou à des pratiques concertées concernant les ronds à béton en barres ou en rouleaux, qui avaient pour objet et/ou pour effet la fixation des prix et la limitation et/ou le contrôle de la production ou des ventes sur le marché commun :

–        [Leali-AFLL], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [Alfa], du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000 ;

–        [Valsabbia Investimenti et Ferriera Valsabbia], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [Feralpi], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [IRO], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [Lucchini-SP], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [Riva], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [Ferriere Nord], du 1er avril 1993 au 4 juillet 2000.

Article 2

Les amendes suivantes sont infligées pour les infractions visées à l’article 1er :

–        [Alfa] : 7,175 millions d’EUR ;

–        [Feralpi] : 10,25 millions d’EUR ;

–        [Ferriere Nord] : 3,57 millions d’EUR ;

–        [IRO] : 3,58 millions d’EUR ;

–        [Leali et AFLL], solidairement : 6,093 millions d’EUR ;

–        [Leali] : 1,082 million d’EUR ;

–        [Lucchini et SP], solidairement : 14,35 millions d’EUR ;

–        [Riva] : 26,9 millions d’EUR ;

–        [Valsabbia Investimenti et Ferriera Valsabbia], solidairement : 10,25 millions d’EUR ;

[…] »

 Développements postérieurs à la notification de la première décision

42      Par lettres envoyées entre le 20 et le 23 novembre 2009, huit des onze sociétés destinataires de la première décision, à savoir la requérante, Riva, Feralpi, Ferriere Nord, Lucchini, Ferriera Valsabbia, Valsabbia Investimenti et IRO, ont indiqué à la Commission que l’annexe de la première décision, telle que notifiée à ses destinataires, ne contenait pas les tableaux illustrant les variations de prix.

43      Le 24 novembre 2009, les services de la Commission ont informé tous les destinataires de la première décision qu’ils feraient le nécessaire pour qu’une décision contenant lesdits tableaux leur soit notifiée. Ils ont également précisé que les délais applicables au paiement de l’amende et à un éventuel recours juridictionnel commenceraient à courir à la date de notification de la « décision complète ».

 Décision modificative

44      Le 8 décembre 2009, la Commission a adopté la décision modificative, qui intégrait dans son annexe les tableaux manquants et corrigeait les renvois numérotés auxdits tableaux dans huit notes en bas de page. La décision modificative a été notifiée à la requérante le 9 décembre 2009.

45      Le dispositif de la décision modificative portait modification des notes en bas de page nos 102, 127, 198, 264, 312, 362, 405 et 448 de la première décision. Les tableaux figurant en annexe de la décision modificative ont été ajoutés comme annexes de la première décision.

 Procédure et conclusions des parties

46      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 février 2010, la requérante a introduit le présent recours.

47      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’article 1er de la décision attaquée, dans la partie qui la concerne ;

–        à titre subsidiaire, annuler l’article 1er de la décision attaquée, dans la mesure où elle lui impute la participation à une infraction avant le 13 février 1996 ;

–        annuler l’article 2 de la décision attaquée, dans la partie qui la concerne ;

–        à titre subsidiaire, réformer l’article 2 de la décision attaquée afin d’annuler ou de réduire de manière significative le montant de l’amende à laquelle elle a été condamnée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

48      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

49      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale dans la présente affaire et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, a demandé aux parties de produire des documents. Celles-ci y ont déféré dans le délai imparti.

50      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 27 novembre 2013.

 En droit

51      Au soutien de son recours, la requérante invoque formellement quatre moyens. Le premier est tiré d’un excès de pouvoir de la Commission. Le deuxième est tiré d’une violation des articles 14 et 33 du règlement n° 1/2003, des articles 10 et 14 du règlement n° 773/2004 et de ses droits de la défense. Le troisième est tiré d’une violation de l’article 65, paragraphe 1, CA et de l’interprétation erronée de la notion d’infraction unique et continue. Enfin, le quatrième est tiré d’illégalités commises dans la fixation du montant de l’amende (fixation du montant de départ et absence de reconnaissance de circonstances atténuantes) et d’une durée excessive de la procédure administrative. Dans une partie introductive relative aux « particularités du contenu de la décision » attaquée, la requérante soulève également une violation potentielle du principe de collégialité.

 Observations liminaires

52      Il y a lieu de relever que, dans le cadre de son exposé des faits dans la partie introductive de la requête, la requérante formule plusieurs critiques à l’encontre de la décision attaquée. Ainsi, au point 1.3 de la requête, la requérante relève les prétendues « graves contradictions » dont la décision attaquée serait entachée, premièrement, en ce qui concerne l’étendue du marché géographique en cause et la motivation de la décision attaquée relative à cette question, deuxièmement, en ce qui concerne la continuité présumée de l’entente, troisièmement, eu égard à la violation potentielle du principe de collégialité dans la procédure d’adoption de la décision attaquée et, quatrièmement, s’agissant de la détermination du montant des amendes, au vu de la crise ayant frappé le secteur concerné. Interrogée à cet égard lors de l’audience, la requérante a précisé que ces considérations complétaient les arguments expressément formulés dans les moyens correspondants de la requête.

53      Dans ses écritures, la Commission affirme que la requérante a formulé, dans la partie de la requête intitulée « En fait », des remarques critiques à l’encontre de la décision attaquée, sans toutefois relever de vice de légalité. Selon la Commission, ces remarques ne constitueraient pas des moyens de recours.

54      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure , toute requête doit indiquer l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui (arrêt du Tribunal du 30 janvier 2007, France Télécom/Commission, T‑340/03, Rec. p. II‑107, point 166). Par ailleurs, le juge de l’Union a jugé qu’il convenait d’admettre que l’énonciation des moyens du recours n’était pas liée à la terminologie et à l’énumération du règlement de procédure et que la présentation de ces moyens, par leur substance plutôt que par leur qualification légale, pouvait suffire dès lors que lesdits moyens se dégageaient de la requête avec suffisamment de netteté (voir ordonnance du Tribunal du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, Rec. p. II‑1703, point 55, et la jurisprudence citée).

55      À cet égard, il doit être relevé que la requérante a formulé un moyen tiré de l’illégalité de la fixation du montant de l’amende, qui se fonde notamment sur la définition du marché en cause et la grave crise qui a frappé le secteur. En outre, la requérante invoque spécifiquement, dans la requête, un moyen tiré de la violation de l’article 65, paragraphe 1, CA, en raison d’une interprétation erronée de la notion d’infraction unique et continue. Enfin, même si le point intitulé « Violation potentielle du principe de collégialité dans la procédure d’adoption de la décision » figure effectivement dans la partie de la requête intitulée « En fait », il suffit de constater que ce moyen se dégage de la requête avec suffisamment de netteté.

56      Eu égard à ces considérations, les observations formulées par la requérante relatives au marché géographique en cause, à l’absence de continuité de l’entente et à la grave crise qui aurait touché le secteur seront examinées dans le cadre des troisième et quatrième moyens. La prétendue violation du principe de collégialité est examinée à titre liminaire.

 Sur la violation alléguée du principe de collégialité

57      La requérante fait observer que la décision qui lui a été notifiée le 2 octobre 2009 était incomplète, puisque dépourvue d’annexes, ce que la Commission aurait reconnu dans sa lettre du 27 novembre 2009. Dès lors que la Commission aurait fondé sa conviction sur la base d’un texte incomplet, elle aurait violé le principe de collégialité, lequel aurait impliqué que les sujets de droit concernés par ses décisions fussent assurés que celles-ci avaient été effectivement prises par le collège et correspondaient exactement à la volonté de ce dernier. À cet égard, l’adoption de la décision modificative n’aurait pas permis de purger le vice de procédure consistant en la notification d’une décision incomplète, ni de garantir que, au moment de l’adoption de cet acte, le collège des membres de la Commission avait examiné le texte intégral de celui-ci. Par ailleurs, la décision attaquée ferait systématiquement référence aux tableaux omis lors de la notification de la première décision, qui s’avéreraient essentiels afin d’apprécier les effets de la prétendue entente.

58      À titre liminaire, il y a lieu de constater que la première décision ne comportait pas ses annexes, parmi lesquelles figuraient plusieurs tableaux auxquels il était fait référence aux considérants 451 (tableau 13), 513 (tableaux 1 et 3), 515 (tableaux 1 à 3), 516 (tableaux 9, 11 à 14 et 16) et 518 (tableaux 11, 12 et 14) ainsi qu’aux notes en bas de page n° 102 (tableaux 15 à 17), 127 (tableaux 18 à 21), 198 (tableaux 22 et 23), 264 (tableaux 24 et 25), 312 (tableau 26), 362 (tableau 27), 405 (tableau 28), 448 (tableaux 29 et 30) et 563 (ensemble des tableaux annexés à la décision) de la première décision. La Commission affirme à cet égard que les tableaux joints à la décision modificative ne feraient qu’illustrer, sous forme schématique et synthétique, les éléments déjà contenus dans la première décision.

59      En premier lieu, il doit être rappelé que le principe de collégialité repose sur l’égalité des membres de la Commission dans la participation à la prise de décision et implique notamment, d’une part, que les décisions soient délibérées en commun et, d’autre part, que tous les membres du collège soient collectivement responsables, sur le plan politique, de l’ensemble des décisions arrêtées (arrêts de la Cour du 23 septembre 1986, AKZO Chemie et AKZO Chemie UK/Commission, 5/85, Rec. p. 2585, point 30, et du 15 juin 1994, Commission/BASF e.a., C‑137/92 P, Rec. p. I‑2555, point 63). Par ailleurs, le dispositif et les motifs d’une décision, qui doit être obligatoirement motivée en vertu de l’article 15 CA, constituent un tout indivisible, de sorte qu’il appartient uniquement au collège des membres de la Commission, en vertu du principe de collégialité, d’adopter à la fois l’un et les autres, toute modification des motifs dépassant une adaptation purement orthographique et grammaticale étant du ressort exclusif du collège (voir, par analogie, arrêt Commission/BASF e.a., précité, points 66 à 68, et arrêt du Tribunal du 18 janvier 2005, Confédération nationale du Crédit mutuel/Commission, T‑93/02, Rec. p. II‑143, point 124).

60      En l’espèce, il y a lieu de considérer, d’une part, que la requérante n’allègue pas l’absence de délibération en commun de la décision attaquée, ni la responsabilité collective du collège, sur le plan politique, de cette décision et, d’autre part, que l’absence, en annexe de la première décision, des tableaux mentionnés au point 58 ci-dessus ne saurait entraîner l’illégalité de la décision attaquée que si une telle absence n’avait pas permis au collège de sanctionner la conduite visée à l’article 1er de la décision attaquée en pleine connaissance de cause, c’est-à-dire sans avoir été induit en erreur sur un point essentiel par des inexactitudes ou des omissions (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 10 juillet 1991, RTE/Commission, T‑69/89, Rec. p. II‑485, points 23 à 25 ; du 27 novembre 1997, Kaysersberg/Commission, T‑290/94, Rec. p. II‑2137, point 88 ; du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission, T‑25/95, T‑26/95, T‑30/95 à T‑32/95, T‑34/95 à T‑39/95, T‑42/95 à T‑46/95, T‑48/95, T‑50/95 à T‑65/95, T‑68/95 à T‑71/95, T‑87/95, T‑88/95, T‑103/95 et T‑104/95, Rec. p. II‑491, point 742, et du 17 février 2011, Zhejiang Xinshiji Foods et Hubei Xinshiji Foods/Conseil, T‑122/09, non publié au Recueil, points 104 et 105).

61      Premièrement, s’agissant des tableaux 15 à 17, mentionnés dans la note en bas de page n° 102 de la première décision, il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon cette note en bas de page, la reproduction de « données concernant les modifications des prix des ‘suppléments de dimension’ qui ont caractérisé l’industrie des ronds à béton en Italie entre décembre 1989 et juin 2000 ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien de la première phrase du considérant 126 de la première décision, qui est libellée comme suit :

« Au cours de la première réunion dont la Commission a eu connaissance (celle du 6 décembre 1989, à l’[Association des industriels de Brescia]), les participants ont décidé à l’unanimité d’augmenter, à partir du lundi 11 décembre 1989, les suppléments liés au diamètre pour les ronds à béton, en barres et en rouleaux, destinés au marché italien (+10 ITL/kg pour les ‘suppléments’ de 14 à 30 mm, + 15 ITL/kg pour ceux de 8 à 12 mm, + 20 ITL/kg pour ceux de 6 mm ; augmentation générale de 5 ITL/kg pour le matériel en rouleaux). »

62      Il y a lieu de constater que la Commission a expressément indiqué, audit considérant, les augmentations des suppléments liés au diamètre pour les ronds à béton qui avaient été décidées par les participants à la réunion du 6 décembre 1989 ainsi que leur date d’entrée en vigueur. Par ailleurs, s’agissant des augmentations ultérieures qui, selon la note en bas de page n° 102 de la première décision, sont également reprises dans ces tableaux (dès lors qu’ils couvrent la période comprise entre 1989 et 2000), il doit être relevé qu’elles ne font pas l’objet du point 4.1 de la première décision, auquel se rapporte le considérant 126, relatif au comportement des entreprises entre 1989 et 1992. En tout état de cause, ces augmentations sont également mentionnées notamment aux considérants 126 à 128 et 133 (pour les années 1989-1992), 93 et 94 (pour les années 1993-1994), 149 à 151, 162 et 163 (pour 1995), 184 et 185 (pour 1996), 199, 200 et 213 (pour 1997), 269 (pour 1999) et 296 à 304 (pour 2000) ainsi qu’aux considérants 439 et 515 de la première décision.

63      Deuxièmement, en ce qui concerne les tableaux 18 à 21, mentionnés dans la note en bas de page n° 127 de la première décision, il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon cette note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents concernant la période fin 1989/fin 1992, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien du considérant 131 de la première décision, qui énonce ce qui suit :

« En ce qui concerne les prix de base des ronds à béton pratiqués durant la période d’application de l’accord susmentionné, notons que IRO et (l’ancienne) Ferriera Valsabbia SpA ont appliqué, à partir du 16 avril 1992, le prix de 210 ITL/kg et, à partir du 1er/6 mai 1992, celui de 225 ITL/kg. À partir du 1er/8 juin 1992, IRO, (l’ancienne) Ferriera Valsabbia SpA, Acciaieria di Darfo SpA et Acciaierie e Ferriere Leali Luigi SpA ont appliqué le prix de 235 ITL/kg. »

64      Il doit dès lors être constaté que, tout en s’appuyant sur cinq pages du dossier administratif, mentionnées dans la note en bas de page n° 126 de la première décision, la Commission a expressément indiqué, audit considérant, les prix de base qui avaient été fixés par les entreprises qui y étaient mentionnées, ainsi que leur date d’entrée en vigueur. En outre, il doit être relevé que la Commission, au considérant 419 de la première décision, a considéré que le premier comportement relatif à la fixation du prix de base avait eu lieu au plus tard le 16 avril 1992. Les éventuelles données figurant dans les tableaux 18 à 21 de la première décision, relatives aux prix de base pour la période comprise, selon la note en bas de page n° 127 de la première décision, entre la « fin [de]1989 » et le 16 avril 1992, sont partant sans pertinence pour la compréhension des griefs de la Commission figurant au considérant 131 de la première décision.

65      Troisièmement, s’agissant des tableaux 22 et 23, mentionnés dans la note en bas de page n° 198 de la première décision, il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents concernant les années 1993 et 1994, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien du considérant 145 de la première décision, qui est rédigé comme suit :

« Comme prévu dans la télécopie de la Federacciai du 25 novembre 1994, une nouvelle réunion s’est tenue le 1er décembre 1994 à Brescia, au cours de laquelle ont été prises les décisions précisées dans une autre télécopie de la Federacciai reçue par les entreprises le 5 décembre 1994. Ces décisions avaient pour objet :

–        les prix des ronds à béton (320 ITL/kg, base au départ de Brescia, avec effet immédiat) ;

–        les paiements (à partir du 1er janvier 1995, le délai maximum sera de 60/90 jours fin de mois ; à partir du 1er mars 1995, le délai sera limité à 60 jours) et les rabais ;

–        la production (obligation, pour chacune des entreprises, de communiquer à la Federacciai, avant le 7 décembre 1994, les poids en tonnes de ronds à béton produits en septembre, octobre et novembre 1994).

Alfa Acciai Srl a adopté le nouveau prix de base le 7 décembre 1994. Le 21 décembre 1994, Acciaieria di Darfo SpA l’a également adopté, et Alfa Acciai Srl a confirmé à nouveau le même prix. Le prix de base de [Lucchini-SP] relatif à janvier 1995 était aussi de 320 ITL/kg. »

66      À cet égard, il doit être souligné que les tableaux visés dans la note en bas de page n° 198 de la première décision ont été mentionnés par la Commission au soutien de son affirmation selon laquelle « Alfa Acciai Srl a[vait] adopté le nouveau prix de base le 7 décembre 1994 », « [l]e 21 décembre 1994, Acciaieria di Darfo SpA l’a[vait] également adopté, et Alfa Acciai Srl a[vait] confirmé à nouveau le même prix ». Or, le « nouveau prix de base » et le « même prix » auxquels il était fait référence étaient le prix de 320 lires italiennes par kilo (ITL/kg), mentionné au premier tiret dudit considérant. Les éventuelles données figurant dans les tableaux 22 et 23 de la première décision, relatives aux prix de base pour la période comprise entre 1993 et le 7 décembre 1994, sont dès lors sans pertinence pour la compréhension des griefs de la Commission figurant au considérant 145 de la première décision.

67      Quatrièmement, pour ce qui concerne les tableaux 24 et 25, mentionnés dans la note en bas de page n° 264 de la première décision, il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini Siderurgica, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1995, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien du considérant 174 de la première décision, qui est rédigé comme suit :

« Par la suite, dans un document remontant aux premiers jours d’octobre 1995, en possession de la Federacciai (manuscrit de la secrétaire du directeur général faisant fonction), il est affirmé que :

–        la clientèle remettait en discussion les paiements (d’où la nécessité d’une communication qui réaffirme la fermeté sur les paiements) ;

–        depuis la semaine précédente, le prix des ronds à béton avait encore diminué de 5/10 ITL/kg, se situant ainsi autour de 260/270 ITL/kg dans la zone de Brescia, avec des cotations inférieures à 250 ITL/kg en dehors de cette zone ;

–        la situation du marché plutôt confuse rendait difficile la tâche de donner des chiffres précis pour le prix ; et

–        il fallait demander aux entreprises les données relatives aux commandes des semaines 39 (du 25 au 29 septembre 1995) et 40 (du 2 au 6 octobre 1995). »

68      Il doit ainsi être relevé que, au considérant 174 de la première décision, la Commission s’est limitée à rendre compte du contenu d’un document manuscrit de la secrétaire du directeur général faisant fonction, établi en octobre 1995. À cet égard, la Commission ne s’est référée aux tableaux 24 et 25 qu’au soutien de l’affirmation figurant dans ce document, selon laquelle « la situation du marché plutôt confuse rendait difficile la tâche de donner des chiffres précis pour le prix ». Les tableaux 24 et 25 apparaissent dès lors sans pertinence pour la compréhension des griefs de la Commission figurant au considérant 174 de la première décision.

69      Cinquièmement, s’agissant du tableau 26, mentionné dans la note en bas de page n° 312 de la première décision, il y a lieu de constater qu’il comporte, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini Siderurgica, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1996, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ce tableau est mentionné par la Commission à l’appui de l’affirmation figurant au considérant 200 de la première décision, selon laquelle, « [d]urant la période qui va du 22 octobre 1996 au 17 juillet 1997, il y a[vait] eu au moins douze réunions des responsables commerciaux des entreprises, qui [s’étaient] déroulées [… en particulier le] mardi 22 octobre 1996, où a[vaient] été confirmés pour le mois de novembre 1996 le prix de 230 ITL/kg base départ Brescia et le maintien de la cotation de 210 ITL/kg exclusivement pour les livraisons d’octobre ».

70      Force est partant de constater que, nonobstant l’absence du tableau 26 de la première décision, la Commission a expressément mentionné, au considérant 200 de celle-ci, les prix de base de la période en cause ainsi que le moment de leur entrée en vigueur.

71      Sixièmement, pour ce qui concerne le tableau 27, mentionné dans la note en bas de page n° 362 de la première décision, il comporte, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini Siderurgica, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1997, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ce tableau est mentionné par la Commission au soutien de l’affirmation figurant au considérant 216 de la première décision, lequel est libellé comme suit :

« Quoi qu’il en soit, [Lucchini-SP …], Acciaieria di Darfo SpA, Alfa Acciai Srl, Feralpi Siderurgica Srl, IRO, Riva Prodotti Siderurgici SpA et (l’ancienne) Ferriera Valsabbia SpA sont les sept entreprises auxquelles est destinée une communication (datée du 24 novembre 1997) de M. Pierluigi Leali, ayant pour objet l’‘Accord prix-livraisons’ […]‘Le prix de 270 ITL/kg n’a été demandé que par peu d’entreprises, en vain – continuait la communication –, alors qu’en réalité, la cotation s’est stabilisée à 260 ITL/kg, avec quelques pics inférieurs, comme beaucoup l’ont confirmé lors de la dernière réunion des responsables commerciaux. Nous notons toutefois avec une satisfaction partielle que la chute s’est arrêtée grâce au contingentement des livraisons que nous respectons tous et qui, conformément aux accords, sera vérifié par des inspecteurs externes nommés à cet effet.’ ‘En cette fin de mois – poursuivait encore la communication –, qui se traîne désormais par inertie, il est indispensable d’intervenir par un durcissement immédiat sur la cotation minimum de 260 ITL/kg (qui n’aura certainement pas d’influence sur les acquisitions peu nombreuses de cette période). Avec la planification des livraisons de décembre convenues (- 20 % par rapport à novembre), nous sommes certainement en mesure de maintenir le niveau de prix convenu ; il est toutefois indispensable – concluait M. Pierluigi Leali – que personne n’accepte de dérogations sur le prix minimum établi (260 ITL/kg)’. »

72      Il résulte ainsi du libellé dudit considérant que la Commission s’est limitée à reproduire les termes de la communication du 24 novembre 1997 qui y est mentionnée. Le tableau 27 apparaît dès lors sans pertinence pour la compréhension du grief de la Commission figurant au considérant 216 de la première décision.

73      Septièmement, s’agissant du tableau 28, mentionné dans la note en bas de page n° 405 de la première décision, il y a lieu de constater qu’il comporte, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini/Siderpotenza, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1998, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ce tableau est mentionné par la Commission au soutien de l’affirmation figurant au considérant 241 de la première décision, lequel est libellé comme suit :

« Le 11 septembre 1998, M. Pierluigi Leali a envoyé une communication […] dans laquelle, en référence à l’intention exprimée (au cours d’une rencontre le 9 septembre 1998) de maintenir la cotation minimum à ‘170 ITL base départ’ ???, on notait ‘des comportements anormaux, à savoir des cotations inférieures en moyenne de 5 ITL/kg au niveau établi, et qui étaient encore plus importantes dans certaines zones du Sud’. ‘Pour notre part – écrivait M. Pierluigi Leali – le niveau minimum convenu est maintenu grâce à une réduction en conséquence du flux de commandes’. ‘Nous espérons – concluait la communication – que, lors de la réunion des responsables commerciaux de ce mardi 15, l’on pourra observer une bonne tenue des prix, en mesure de faire remonter éventuellement la cotation’. »

74      Il ressort donc des termes mêmes dudit considérant que la Commission s’est limitée à reproduire le contenu de la communication du 11 septembre 1998 qui y est mentionnée. Le tableau 28 apparaît dès lors sans pertinence pour la compréhension du grief de la Commission figurant au considérant 241 de la première décision.

75      Huitièmement, s’agissant des tableaux 29 et 30, mentionnés dans la note en bas de page n° 448 de la première décision, il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini/Siderpotenza, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1999, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien de l’affirmation figurant au considérant 276 de la première décision, lequel se lit comme suit :

« Des informations supplémentaires sur la situation du marché des ronds à béton en Italie durant cette période sont contenues dans un document rédigé par Leali le 10 novembre 1999, et en particulier dans la section intitulée ‘Bénéfices et limites de l’accord commercial de 1999’ où l’on peut lire : ‘L’accord de base conclu entre les producteurs nationaux a permis, durant l’année 1999, d’inverser la situation de faiblesse des prix qui avait caractérisé les deux exercices précédents (1997 et 1998) et de récupérer plus de 50 ITL/kg brut de marge. Durant l’année 1998, la marge brute moyenne (prix de vente – coût des matières premières) était de 70 ITL/kg, et pendant cinq mois, elle était descendue sous ce seuil’. ‘L’accord obtenu a permis de stabiliser les prix de vente en cours d’année, et les producteurs ont pu bénéficier de la situation des coûts de la matière première, en accroissant la marge brute de plus de 50 ITL/kg, pour la porter à 122 ITL/kg net.’ »

76      Il ressort donc du libellé du considérant 276 de la première décision que la Commission s’est limitée à reproduire le contenu de la communication du 10 novembre 1999 qui y est mentionnée. L’absence des tableaux 29 et 30 est dès lors sans incidence sur la compréhension du grief de la Commission figurant au considérant 276 de la première décision.

77      Neuvièmement, le tableau 13, mentionné au considérant 451 de la première décision, est cité au soutien de l’affirmation selon laquelle, « [e]n ce qui concerne l’année 1997, il convient de constater qu’elle a[vait] été caractérisée, au cours de son premier semestre, par une augmentation constante du prix de base fixé par l’entente anticoncurrentielle : 190 ITL/kg, fixé lors de la réunion du 30 janvier ; 210 ITL/kg, fixé lors de la réunion du 14 février ; 250 ITL/kg, fixé lors de la réunion du 10 juillet (considérant 200) » et selon laquelle, « [a]u cours de la même période, le prix de base moyen de marché a[vait], lui aussi, augmenté constamment, passant des 170 ITL/kg de janvier aux 240 ITL/kg de juillet (tableau 13 en annexe) ; en septembre de la même année, le prix de base moyen de marché a encore augmenté, pour atteindre les 290 ITL/kg (tableau 13 en annexe) ». Il y a dès lors lieu de constater que la Commission a expressément indiqué, audit considérant, les augmentations du prix de base relatives à l’année 1997, en sorte que ledit tableau n’apparaît pas indispensable à la compréhension du raisonnement de la Commission.

78      Dixièmement, il doit être relevé que, au considérant 496 de la première décision (note en bas de page n° 563 de la première décision), la Commission s’est référée, de manière globale, aux « tableaux annexés à la présente décision », aux fins de soutenir l’affirmation selon laquelle « [s]es informations […] montr[ai]ent que toutes les entreprises impliquées dans la présente procédure [avaie]nt publié des barèmes durant la période en cause ». Il y a toutefois lieu de souligner que le considérant 496 de la première décision fait également référence aux considérants 419 à 433 de celle-ci, qui « dressent la liste de toutes les occasions avérées où le prix de base a fait l’objet de discussions entre les entreprises (y compris l’association) ». À cet égard, la Commission a précisé que, « [p]armi ces occasions, certaines [avaie]nt déjà été mentionnées lorsque le concours de volontés a[vait] été évoqué (considérants 473 à 475) », que, « [p]our les autres occasions, entre 1993 et 2000, il [fallait] recourir à la notion de concertation » et que « [l]’objet de cette concertation était d’influer sur le comportement des producteurs sur le marché et de rendre public le comportement que chacun d’entre eux se proposait d’adopter concrètement en matière de détermination du prix de base ». L’ensemble des tableaux annexés à la première décision n’apparaissent donc pas indispensables à la compréhension du grief de la Commission.

79      Onzièmement, pour ce qui concerne les références aux tableaux 1 à 3, 9, 11 à 14 et 16 aux considérants 513, 515, 516 et 518 de la première décision, il doit être souligné que lesdits considérants s’insèrent dans la subdivision de la première décision relative aux effets sur le marché des pratiques restrictives et qu’il résulte de l’analyse de leur contenu que les tableaux qui y sont mentionnés soit ne font que reprendre les données chiffrées qui y sont mentionnées, soit ne sont pas indispensables à la compréhension du raisonnement de la Commission s’agissant des effets de l’entente.

80      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de considérer que le collège des membres de la Commission disposait, lors de l’adoption de la décision attaquée, d’une connaissance pleine et entière des éléments sur la base desquels la mesure reposait. Il s’ensuit que le collège des membres de la Commission a sanctionné la conduite visée à l’article 1er de la décision attaquée en pleine connaissance de cause.

81      Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le présent moyen.

 Sur le moyen tiré d’un excès de pouvoir de la Commission

82      Par le présent moyen, la requérante invoque un excès de pouvoir de la Commission, en ce que celle-ci n’aurait pas été compétente pour sanctionner la violation de l’article 65 CA à la suite de l’expiration du traité CECA, en utilisant comme base juridique l’article 7, paragraphe 1, et l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003.

83      La requérante affirme que, faute d’une décision contraire des États membres, les dispositions du traité CECA ne pouvaient pas trouver à s’appliquer après l’expiration de celui-ci, le 23 juillet 2002. En faisant application des dispositions du traité CECA après son expiration, la Commission aurait violé l’article 97 CA, selon lequel les dispositions dudit traité ont été conclues pour une durée de 50 ans à dater de son entrée en vigueur sans que des mesures transitoires spécifiques soient prévues.

84      D’une part, dans ses arrêts du 31 mars 2009, ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission (T‑405/06, Rec. p. II‑771) et du 1er juillet 2009, ThyssenKrupp Stainless/Commission (T‑24/07, Rec. p. II‑2309), le Tribunal se serait fondé sur son arrêt du 12 septembre 2007, González y Díez/Commission (T‑25/04, Rec. p. II‑3121). Or, cette affaire serait très différente de la présente espèce. Pour procéder en l’espèce d’une manière conforme à l’approche retenue dans ladite affaire, la Commission aurait dû sanctionner Alfa pour une violation de l’article 81 CE, au moyen d’une décision fondée sur cette disposition, à l’issue d’une procédure menée conformément au règlement n° 1/2003.

85      D’autre part, par un arrêt du 19 janvier 2010, la cour d’appel de Paris (France) serait parvenue à une conclusion identique dans une affaire présentant des analogies avec le cas d’espèce. Dans cette affaire, la cour d’appel aurait considéré que, une fois venues à expiration, les dispositions du traité CECA ne pouvaient plus produire aucun effet. La cour d’appel aurait soutenu l’approche de l’Autorité de la concurrence française, qui aurait fait application de l’article 81 CE à des faits survenus sous l’empire du traité CECA, mais sanctionnés postérieurement à l’expiration dudit traité.

86      Par ailleurs, la requérante fait valoir que la Commission ne peut pas utiliser le règlement n° 1/2003 comme base juridique pour appliquer l’article 65, paragraphe 1, CA. Il ressortirait tant des considérants introductifs que du libellé de l’article 23 du règlement n° 1/2003 que celui-ci confère à la Commission le pouvoir d’infliger des amendes en cas de violation des articles 81 CE et 82 CE, et non en cas d’infraction à l’article 65 CA, en sorte que la Commission aurait commis un détournement de pouvoir manifeste.

87      Premièrement, si, certes, selon la requérante, l’instauration et le maintien d’un régime de libre concurrence auraient constitué un des objectifs essentiels du traité CE et du traité CECA, le Tribunal, dans son arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, aurait indiqué que l’interprétation cohérente des dispositions de droit matériel des différents traités n’avait aucune incidence sur les compétences attribuées aux différentes institutions par les différents traités, en sorte que l’argument de la Commission tiré de l’unicité de l’ordre juridique auquel appartenaient le traité CECA et le traité CE serait dépourvu de pertinence.

88      Deuxièmement, la nature de lex specialis du traité CECA, rappelée par la Commission, aurait pour conséquence qu’à son expiration la lex generalis deviendrait automatiquement applicable. En matière de concurrence, il s’ensuivrait que, depuis le 24 juillet 2002, les comportements des entreprises qui relevaient autrefois du traité CECA relevaient à compter de cette date des articles 81 CE et 82 CE. Toutefois, le présent moyen ne porterait pas sur l’application de l’article 81 CE, mais sur la compétence de la Commission pour constater et sanctionner une violation de l’article 65, paragraphe 1, CA après l’expiration de ce traité, sur le fondement d’un règlement du Conseil de l’Union européenne qui ne mentionnerait même pas ladite norme.

89      Troisièmement, la Commission ne saurait se fonder sur la continuité de l’ordre juridique de l’Union et des objectifs qui président à son fonctionnement, ni sur le fait que la distorsion de concurrence résultant du non-respect des normes relatives aux ententes serait susceptible d’étendre ses effets dans le temps au-delà de l’expiration du traité CECA, sous l’empire du traité CE. Il serait en effet douteux que les effets de la présumée entente à laquelle aurait participé la requérante jusqu’en 2001 se fussent prolongés jusqu’en 2009. Au contraire, il serait probable que, au moment de l’intervention de la décision attaquée, ces effets auraient disparu.

90      Quatrièmement, dans l’ordre juridique de l’Union, les institutions ne disposeraient que de compétences d’attribution. Il s’ensuivrait que la Commission aurait dû prévoir que certaines décisions en matière d’ententes punissables sous le régime CECA ne pourraient pas être adoptées en temps utile sous ce régime et que, en conséquence, elle ne disposerait pas de la base juridique appropriée pour agir dans de tels cas. La Commission aurait d’ailleurs adopté une approche totalement différente en matière de lutte antidumping.

91      En premier lieu, il convient de rappeler que les traités communautaires ont instauré un nouvel ordre juridique au profit duquel les États ont limité, dans des domaines de plus en plus étendus, leurs droits souverains et dont les sujets sont non seulement les États membres, mais également leurs ressortissants (arrêts de la Cour du 5 février 1963, van Gend & Loos, 26/62, Rec. p. 1 ; du 15 juillet 1964, Costa, 6/64, Rec. p. 1141, 1159 ; avis de la Cour 1/91, du 14 décembre 1991, Rec. p. I‑6079, point 21 ; arrêts SP e.a./Commission, point 24 supra, point 70, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 63).

92      Au sein de cet ordre juridique communautaire, les institutions ne disposent que de compétences d’attribution. Pour cette raison, les actes communautaires mentionnent dans leur préambule la base juridique qui habilite l’institution concernée à agir dans le domaine en cause. Le choix de la base juridique appropriée revêt en effet une importance de nature constitutionnelle (voir arrêts SP e.a./Commission, point 24 supra, point 71, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 64, et la jurisprudence citée).

93      En l’espèce, il doit être constaté que le préambule de la décision attaquée comporte des références à des dispositions du traité CECA, à savoir les articles 36 CA, 47 CA et 65 CA, mais également la mention du traité CE, du règlement n° 17, en particulier de son article 11, du règlement n° 1/2003, à savoir de son article 7, paragraphe 1, de son article 18 et de son article 23, paragraphe 2, et celle du règlement (CE) n° 2842/98 de la Commission, du 22 décembre 1998, relatif à l’audition dans certaines procédures fondées sur les articles [81 CE] et [82 CE] (JO L 354, p. 18).

94      Il importe de relever en outre que, dans les motifs de la décision attaquée, la Commission a indiqué, au considérant 1, que « [l]a présente décision constat[ait] une infraction à l’article 65, paragraphe 1, [CA] et [qu’elle était] adoptée sur la base de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003 ». Au considérant 3 de la décision attaquée, la Commission a ajouté que, « [p]ar la présente décision, [… elle] inflige[ait] des amendes aux entreprises destinataires au titre de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 ».

95      Au considérant 350 de la décision attaquée, la Commission a ainsi indiqué qu’elle estimait que « l’article 7, paragraphe 1, et l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 constitu[aient] les bases juridiques appropriées qui l’autoris[aient] à adopter la présente décision » et que, « [s]ur la base de l’article 7, paragraphe 1, [elle …] constat[ait] une infraction à l’article 65, paragraphe 1, [CA] et oblige[ait] les destinataires de la présente décision à y mettre fin, tandis qu’en vertu de l’article 23, paragraphe 2, elle leur inflige[ait] des amendes » (voir également considérant 361 de la décision attaquée).

96      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que la décision attaquée, par laquelle la Commission a constaté une infraction à l’article 65, paragraphe 1, CA et infligé une amende à la requérante, trouve sa base juridique dans l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003 pour la constatation de l’infraction et dans l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 pour l’imposition de l’amende.

97      En deuxième lieu, il convient de rappeler que la disposition constituant la base juridique d’un acte et habilitant l’institution de l’Union à adopter l’acte en cause doit être en vigueur au moment de l’adoption de celui-ci (arrêts de la Cour du 4 avril 2000, Commission/Conseil, C‑269/97, Rec. p. I‑2257, point 45 ; du 29 mars 2011, ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., C‑201/09 P et C‑216/09 P, Rec. p. I‑2239, point 75, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, C‑352/09 P, Rec. p. I‑2359, point 88 ; arrêts SP e.a./Commission, point 24 supra, point 118, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 74), ce qui est incontestablement le cas de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, qui constituent la base juridique de la décision attaquée.

98      En troisième lieu, il importe de souligner que les traités communautaires ont institué un ordre juridique unique, dans le cadre duquel, ainsi que cela est reflété à l’article 305, paragraphe 1, CE, le traité CECA constituait un régime spécifique dérogeant aux règles à vocation générale établies par le traité CE (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 57, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 75, et la jurisprudence citée).

99      Le traité CECA constituait ainsi, en vertu de l’article 305, paragraphe 1, CE, une lex specialis dérogeant à la lex generalis qu’était le traité CE (arrêt de la Cour du 24 octobre 1985, Gerlach, 239/84, Rec. p. 3507, points 9 à 11 ; avis de la Cour 1/94, du 15 novembre 1994, Rec. p. I‑5267, points 25 à 27 ; arrêts SP e.a./Commission, point 24 supra, point 111, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 76, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 70 et 73).

100    Il en résulte que, en ce qui concerne le fonctionnement du marché commun, les règles du traité CECA et l’ensemble des dispositions prises pour son application sont demeurées en vigueur, nonobstant l’intervention du traité CE (arrêts de la Cour Gerlach, point 99 supra, point 9, et du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, Rec. p. I‑7869, point 100 ; arrêt ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 77, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 70 et 73).

101    Toutefois, dans la mesure où des questions ne faisaient pas l’objet de dispositions du traité CECA ou de réglementations adoptées sur la base de ce dernier, le traité CE et les dispositions prises pour son application pouvaient, même avant l’expiration du traité CECA, s’appliquer à des produits relevant du traité CECA (arrêts de la Cour du 15 décembre 1987, Deutsche Babcock, 328/85, Rec. p. 5119, point 10, et Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, point 100 supra, point 100 ; arrêts du Tribunal du 25 octobre 2007, Ferriere Nord/Commission, T‑94/03, non publié au Recueil, point 83, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 78, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 70 et 73).

102    En vertu de son article 97, le traité CECA est venu à expiration le 23 juillet 2002. En conséquence, le 24 juillet 2002, le champ d’application du régime général issu du traité CE s’est étendu aux secteurs qui étaient régis initialement par le traité CECA (arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 58, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 79, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, points 59 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 70 et 73).

103    Si le passage du cadre juridique du traité CECA à celui du traité CE a entraîné, à compter du 24 juillet 2002, une modification des bases juridiques, des procédures et des règles de fond applicables, celle-ci s’inscrit dans le contexte de l’unité et de la continuité de l’ordre juridique communautaire et de ses objectifs (arrêts González y Díez/Commission, point 84 supra, point 55 ; ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 59, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 80, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, points 60 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 71 et 73).

104    À cet égard, il y a lieu de relever que l’instauration et le maintien d’un régime de libre concurrence, au sein duquel les conditions normales de concurrence sont assurées et qui est notamment à l’origine des règles en matière d’aides d’État et d’ententes entre entreprises, constituent l’un des objectifs essentiels tant du traité CE que du traité CECA (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 60, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 81, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, points 60 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 71 et 73).

105    Dans ce contexte, quoique les règles des traités CECA et CE régissant le domaine des ententes divergent dans une certaine mesure, il convient de souligner que les notions d’accord et de pratiques concertées sous l’empire de l’article 65, paragraphe 1, CA répondent à celles d’accord et de pratiques concertées au sens de l’article 81 CE et que ces deux dispositions sont interprétées de la même manière par le juge de l’Union. Ainsi, la poursuite de l’objectif d’une concurrence non faussée dans les secteurs relevant initialement du marché commun du charbon et de l’acier n’est pas interrompue du fait de l’expiration du traité CECA, cet objectif étant également poursuivi dans le cadre du traité CE et par la même institution, la Commission, autorité administrative chargée de la mise en œuvre et du développement de la politique de la concurrence dans l’intérêt général de la Communauté européenne (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 61, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 82, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, points 60 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 71 et 73).

106    La continuité de l’ordre juridique communautaire et des objectifs qui président à son fonctionnement exige ainsi que, en tant qu’elle succède à la Communauté européenne du charbon et de l’acier, et dans le cadre procédural qui est le sien, la Communauté européenne assure, à l’égard des situations nées sous l’empire du traité CECA, le respect des droits et des obligations qui s’imposaient eo tempore tant aux États membres qu’aux particuliers en vertu du traité CECA et des règles prises pour son application. Cette exigence s’impose d’autant plus dans la mesure où la distorsion de la concurrence résultant du non-respect des règles en matière d’ententes est susceptible d’étendre ses effets dans le temps après l’expiration du traité CECA, sous l’empire du traité CE (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 63, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 83, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, points 62 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 72 et 73).

107    La Cour a ainsi également rappelé que la succession des traités CECA, CE et TFUE assurait, en vue de garantir une libre concurrence, que tout comportement correspondant à l’état de fait prévu à l’article 65, paragraphe 1, CA, qu’il ait eu lieu avant ou après le 23 juillet 2002, ait pu être sanctionné par la Commission et puisse continuer de l’être (arrêts ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 65 à 67 et 77, et ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, points 55 à 57 et 65).

108    Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence, d’une part, que, conformément à un principe commun aux systèmes juridiques des États membres, dont les origines peuvent être retracées jusqu’au droit romain, il y a lieu, en cas de changement de législation, d’assurer, sauf expression d’une volonté contraire par le législateur, la continuité des structures juridiques et, d’autre part, que ce principe s’applique aux modifications du droit primaire de l’Union (arrêts de la Cour du 25 février 1969, Klomp, 23/68, Rec. p. 43, point 13, et ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, points 63).

109    Or, il n’existe aucun indice de ce que le législateur de l’Union aurait souhaité que les comportements collusoires interdits sous l’empire du traité CECA puissent échapper à l’application de toute sanction après l’expiration de ce dernier (arrêt ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, point 64).

110    En effet, d’une part, la Cour a relevé que le Conseil et les représentants des gouvernements des États membres avaient indiqué être prêts à adopter toutes les mesures nécessaires pour faire face aux conséquences de l’expiration dudit traité. D’autre part, elle a souligné que la Commission avait précisé qu’elle ne devait soumettre des propositions de dispositions transitoires que si une telle démarche était jugée nécessaire et que, au regard des principes généraux de droit applicables, elle considérait qu’une telle nécessité faisait défaut dans le domaine du droit des ententes (arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, point 75).

111    Dans ces circonstances, il serait contraire à la finalité ainsi qu’à la cohérence des traités et inconciliable avec la continuité de l’ordre juridique de l’Union que la Commission soit sans qualité pour assurer l’application uniforme des normes se rattachant au traité CECA qui continuent de produire des effets même après l’expiration de ce dernier (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 juillet 2007, Lucchini, C‑119/05, Rec. p. I‑6199, point 41).

112    Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la requérante, le règlement n° 1/2003 et, plus particulièrement, son article 7, paragraphe 1, et son article 23, paragraphe 2, doivent être interprétés en ce sens qu’ils permettent à la Commission de constater et de sanctionner, après le 23 juillet 2002, les ententes réalisées dans les secteurs relevant du champ d’application du traité CECA ratione materiae et ratione temporis, et ce quand bien même les dispositions précitées dudit règlement ne mentionneraient pas expressément l’article 65 CA (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 64, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 84, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, point 74, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, points 72, 73 et 87). La requérante ne saurait davantage affirmer que, ce faisant, la Commission aurait commis un détournement de pouvoir manifeste.

113    En quatrième lieu, il convient de relever que l’application, au sein de l’ordre juridique de l’Union, des règles du traité CE dans un domaine initialement régi par le traité CECA doit intervenir dans le respect des principes gouvernant l’application de la loi dans le temps. À cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante que, si les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur, il n’en est pas de même des règles de fond. En effet, ces dernières doivent être interprétées, en vue de garantir le respect des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, comme ne visant des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur que dans la mesure où il ressort clairement de leurs termes, finalités ou économie qu’un tel effet doit leur être attribué (arrêts de la Cour du 12 novembre 1981, Meridionale Industria Salumi e.a., 212/80 à 217/80, Rec. p. 2735, point 9, et du 10 février 1982, Bout, 21/81, Rec. p. 381, point 13 ; arrêts du Tribunal du 19 février 1998, Eyckeler & Malt/Commission, T‑42/96, Rec. p. II‑401, point 55 ; ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 65, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 85, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, point 79).

114    Dans cette perspective, s’agissant de la question des dispositions matérielles applicables à une situation juridique définitivement acquise antérieurement à l’expiration du traité CECA, la continuité de l’ordre juridique de l’Union et les exigences relatives aux principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime imposent l’application des dispositions matérielles prises en application du traité CECA aux faits relevant de leur champ d’application ratione materiae et ratione temporis. La circonstance selon laquelle, en raison du fait que le traité CECA a expiré, le cadre réglementaire en question n’est plus en vigueur au moment où l’appréciation de la situation factuelle est opérée ne modifie pas cette considération, dès lors que cette appréciation porte sur une situation juridique définitivement acquise à une époque où étaient applicables les dispositions matérielles prises en application du traité CECA (arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 66, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 86, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, point 79 ; voir également, en ce sens, arrêt Ferriere Nord/Commission, point 101 supra, point 96).

115    En l’espèce, s’agissant des règles de fond, il convient d’observer que la décision attaquée concerne une situation juridique définitivement acquise antérieurement à l’expiration du traité CECA le 23 juillet 2002, la période infractionnelle allant du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000 (voir point 37 ci-dessus). En l’absence de tout effet rétroactif du droit matériel de la concurrence applicable depuis le 24 juillet 2002, il y a lieu de constater que l’article 65, paragraphe 1, CA constitue la règle de fond applicable et effectivement appliquée par la Commission dans la décision attaquée, étant rappelé qu’il résulte précisément de la nature de lex generalis du traité CE par rapport au traité CECA, consacrée à l’article 305 CE, que le régime spécifique issu du traité CECA et des règles prises pour son application est, en vertu du principe lex specialis derogat legi generali, seul applicable aux situations acquises avant le 24 juillet 2002 (voir, en ce sens, arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 68, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 89, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, point 77, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, point 79).

116    Par ailleurs, la décision attaquée a été adoptée sur la base de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, à la suite d’une procédure conduite conformément au règlement n° 17 et au règlement n° 1/2003. Les dispositions relatives à la base juridique et à la procédure suivie jusqu’à l’adoption de la décision attaquée relèvent des règles de procédure au sens de la jurisprudence visée au point 113 ci-dessus. Dès lors que la décision attaquée a été adoptée après l’expiration du traité CECA, c’est à bon droit que la Commission a fait application des règles contenues dans le règlement n° 1/2003 (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 84 supra, point 67, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra, point 87, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 97 supra, points 74 et 77, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 97 supra, point 90 ; voir également, en ce sens, arrêt Ferriere Nord/Commission, point 101 supra, point 96).

117    Eu égard à l’ensemble des développements qui précèdent, l’argument de la requérante fondé sur l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 19 janvier 2010 ne saurait prospérer. Il y a, en tout état de cause, lieu de relever, à l’instar de la Commission, que, dans cet arrêt, la cour d’appel de Paris a expressément relevé que la question qu’elle devait trancher était différente de celles qui avaient été soumises au Tribunal dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra. Ainsi, la cour d’appel de Paris a considéré, en se référant notamment auxdits arrêts, que les juridictions européennes « n’[avaie]nt jamais abordé la question précise […] d’une saisine à fin de sanctions d’une autorité nationale de concurrence, et ce postérieurement au 23 juillet 2002, pour des comportements commis ou commencés avant cette date et continués après » et, que, « à plus forte raison, les juges européens n’[avaie]nt jamais remis en cause le principe selon lequel une loi qui n’a plus d’objet perd son empire, et tous les prolongements de ce principe ». À cet égard, il est constant, en l’espèce, que les comportements infractionnels ont pris fin le 4 juillet 2000, soit avant l’expiration du traité CECA.

118    Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le présent moyen.

 Sur le moyen tiré d’une violation des droits de la défense

 Sur la violation de l’article 10 du règlement n° 773/2004 en raison de l’absence d’envoi d’une nouvelle communication des griefs

119    La requérante fait valoir que la Commission, en omettant d’adresser aux entreprises en cause une nouvelle communication des griefs et en se limitant à leur adresser la lettre du 30 juin 2008 pour les informer de son intention de réadopter la décision de 2002, a violé l’article 10 du règlement n° 773/2004.

120    En l’espèce, la Commission aurait adopté la décision attaquée en en modifiant la base juridique par rapport à celle qui avait été choisie pour la décision de 2002. Dès lors que la base juridique constitue un élément fondamental d’une décision, la Commission aurait dû envoyer une nouvelle communication des griefs. En outre, il conviendrait de noter que, dans la décision attaquée, la Commission n’aurait pas seulement corrigé un vice de procédure, mais aurait également procédé à de nouvelles appréciations en ce qui concerne la position des parties au regard de l’amende, en sorte qu’il aurait fallu donner à celles-ci la possibilité d’exercer pleinement leurs droits de la défense.

121    La requérante ajoute que la nature juridique de la lettre du 30 juin 2008 n’est pas claire, puisqu’il s’agirait d’un acte qui n’est ni régi ni mentionné par le règlement n° 1/2003 ou le règlement n° 773/2004. Ayant estimé que la réception de cette lettre précédait la transmission d’une nouvelle communication des griefs, la requérante aurait réduit au minimum ses observations en réponse à cette lettre. La Commission aurait d’ailleurs reconnu, dans le cadre de la procédure ayant mené à l’adoption de la décision de 2002, la nécessité d’adresser la communication des griefs supplémentaires aux entreprises en cause, pour les informer qu’elle comptait se fonder sur une base juridique différente pour adopter cette décision. La communication des griefs supplémentaires serait en tout état de cause insuffisante, puisqu’elle se serait référée à l’imposition d’amendes conformément à l’article 65, paragraphe 5, CA, alors que la Commission aurait exercé son pouvoir d’infliger des sanctions dans la décision attaquée conformément à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003.

122    Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense dans toute procédure susceptible d’aboutir à des sanctions, notamment à des amendes ou à des astreintes, constitue un principe fondamental du droit de l’Union, qui doit être observé, même s’il s’agit d’une procédure ayant un caractère administratif. À cet égard, la communication des griefs constitue la garantie procédurale appliquant le principe fondamental du droit de l’Union qui exige le respect des droits de la défense dans toute procédure. Ce principe exige notamment que la communication des griefs adressée par la Commission à une entreprise à l’encontre de laquelle elle envisage d’infliger une sanction pour violation des règles de concurrence contienne les éléments essentiels retenus à l’encontre de cette entreprise, tels que les faits reprochés, la qualification qui leur est donnée et les éléments de preuve sur lesquels la Commission se fonde, afin que cette entreprise soit en mesure de faire valoir utilement ses arguments dans le cadre de la procédure administrative engagée à son égard (voir arrêts de la Cour du 3 septembre 2009, Papierfabrik August Koehler e.a./Commission, C‑322/07 P, C‑327/07 P et C‑338/07 P, Rec. p. I‑7191, points 34 et 36, et la jurisprudence citée, et Prym et Prym Consumer/Commission, C‑534/07 P, Rec. p. I‑7415, points 26 à 28).

123    L’article 27, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003 et l’article 10 du règlement n° 773/2004, qui font application de ce principe, prescrivent à la Commission de ne retenir dans sa décision finale que les griefs au sujet desquels les entreprises et associations d’entreprises intéressées ont eu l’occasion de faire connaître leur point de vue.

124    Le respect des droits de la défense exige en effet que l’entreprise intéressée ait été mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances allégués ainsi que sur les documents retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une infraction à son égard (voir arrêt de la Cour du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec. p. I‑123, point 66, et la jurisprudence citée).

125    À titre liminaire, il convient de rappeler que, au considérant 6 de la décision attaquée, la Commission a souligné que, compte tenu de la portée limitée de l’arrêt SP e.a., point 24 supra (qui n’aborde aucune question factuelle), la décision attaquée se fondait sur les éléments de preuve déjà présentés dans la communication des griefs et dans la communication des griefs supplémentaires tout en tenant compte de l’appréciation du Tribunal concernant la définition de la base juridique qui habilitait la Commission à agir, et que les faits décrits dans cette décision correspondaient donc intégralement à la description qui en était faite dans la première décision, à l’exception des récents développements relatifs à la restructuration de certaines entreprises.

126    En premier lieu, il y a lieu de souligner que la requérante ne fait pas valoir, dans le présent moyen, que la décision attaquée porterait sur des comportements autres que ceux sur lesquels elle s’est déjà expliquée dans ses réponses à la communication des griefs et à la communication des griefs supplémentaires.

127    Premièrement, la requérante affirme que la modification, après l’annulation par le Tribunal de la décision de 2002, de la base juridique pour l’adoption de la décision attaquée constitue un élément fondamental de cette dernière, qui justifiait que la Commission adressât aux parties une nouvelle communication des griefs.

128    Un tel argument ne saurait toutefois être retenu. Il doit en effet être souligné, contrairement à ce que soutient la requérante que la Commission avait déjà informé les entreprises en cause des conséquences, notamment s’agissant du choix de la base juridique, qu’elle entendait tirer de l’expiration du traité CECA dans la communication des griefs supplémentaires et que la requérante a eu la possibilité de faire valoir ses observations à ce sujet, ce qu’elle a d’ailleurs fait dans sa réponse à ladite communication. En outre, les développements consacrés par une décision à la base juridique sur laquelle elle se fonde doivent être considérés comme étrangers à tout nouveau grief, puisqu’ils ne portent pas sur des comportements autres que ceux sur lesquels les entreprises ont pu déjà s’expliquer (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, Rec. p. I‑8375, point 103, et arrêt du Tribunal du 19 mars 2003, CMA CGM e.a./Commission, T‑213/00, Rec. p. II‑913, point 114).

129    En tout état de cause, par sa lettre du 30 juin 2008, la Commission a informé les entreprises en cause, à la suite de l’annulation de la décision de 2002 par le Tribunal, de son intention de réadopter cette décision à l’égard de toutes les parties pour lesquelles le Tribunal l’avait annulée. Elle a, une nouvelle fois, précisé à la requérante la base juridique l’autorisant à réadopter la décision ainsi que les dispositions matérielles et procédurales applicables. La requérante a eu la possibilité de faire valoir ses observations, ce qu’elle a d’ailleurs fait le 31 juillet 2008 dans un document de neuf pages.

130    Deuxièmement, la requérante affirme que la communication des griefs doit mettre l’entreprise en mesure de se défendre non seulement contre une constatation de l’infraction, mais également contre l’imposition d’une amende. Ce serait pour cette raison qu’une décision de la Commission mentionne la base juridique utilisée pour sanctionner les entreprises visées par les griefs qu’elle comporte. Or, les parties n’auraient pas été informées de la base juridique que la Commission envisageait d’utiliser pour imposer des sanctions aux entreprises en cause.

131    Un tel argument ne saurait non plus être accueilli.

132    Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, l’obligation de la Commission au stade de la communication des griefs se limite à exposer les griefs avancés et à énoncer, de manière claire, les faits sur lesquels elle se fonde ainsi que la qualification qui leur est donnée, afin que ses destinataires puissent se défendre utilement. La Commission n’est pas obligée d’exposer les conclusions qu’elle tire des faits, documents et arguments juridiques (voir arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, Rec. p. II‑2501, point 453, et la jurisprudence citée).

133    La Cour a par ailleurs déjà souligné que, lorsque, à la suite de l’annulation d’une décision en matière de concurrence, la Commission choisit de réparer la ou les illégalités constatées et d’adopter une décision identique qui n’est pas entachée de ces illégalités, cette décision concerne les mêmes griefs, sur lesquels les entreprises se sont déjà prononcées (arrêt Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, point 128 supra, point 98).

134    Il s’ensuit que la Commission n’avait pas l’obligation, à la suite de l’annulation de la décision de 2002, de donner la possibilité aux entreprises en cause d’être entendues sur le choix de la base juridique utilisée pour leur infliger des amendes dans la décision attaquée.

135    Troisièmement, la requérante fait valoir que la Commission ne s’est pas limitée à réadopter la décision de 2002, mais a également exercé une nouvelle fois son pouvoir de sanction en prenant en considération des éléments nouveaux, qui auraient conduit à une diminution du montant final de l’amende imposée à Lucchini-SP.

136    Outre que la requérante se limite à invoquer une diminution du montant de l’amende infligée à une autre entreprise, sans toutefois soulever une quelconque inégalité de traitement, il ressort de la jurisprudence que, dès lors que la Commission indique expressément, dans sa communication des griefs, qu’elle va examiner s’il convient d’infliger des amendes aux entreprises concernées et qu’elle énonce les principaux éléments de fait et de droit susceptibles d’entraîner l’imposition d’une amende, tels que la gravité et la durée de l’infraction supposée et le fait d’avoir commis celle-ci de propos délibéré ou par négligence, elle remplit son obligation de respecter le droit des entreprises à être entendues. Ce faisant, elle leur donne les éléments nécessaires pour se défendre non seulement contre la constatation d’une infraction, mais également contre le fait de se voir infliger une amende. En revanche, la Commission n’est pas obligée, dès lors qu’elle a indiqué les éléments de fait et de droit sur lesquels elle entend fonder son calcul du montant des amendes, de préciser la manière dont elle se servirait de chacun de ces éléments pour la détermination du niveau de l’amende (voir arrêt du Tribunal du 19 mai 2010, Wieland-Werke e.a./Commission, T‑11/05, non publié au Recueil, points 129 et 130, et la jurisprudence citée).

137    Or, la Commission a fait état de tels éléments au point 314 de la communication des griefs. En particulier, la Commission a rappelé que, en fixant le montant de chaque amende, elle devait tenir compte de toutes les circonstances pertinentes, en particulier de la gravité et de la durée de l’infraction. Elle a ajouté que, dans l’évaluation de la gravité de l’infraction, elle tiendrait compte des faits décrits précédemment et évalués selon le principe qu’un accord ou une pratique concertée comme un cartel de prix et de répartition des marchés constituait une infraction très grave au droit de l’Union. En outre, elle a indiqué qu’en évaluant la gravité de l’infraction elle tiendrait compte de sa nature propre, de son impact concret sur le marché, s’il était mesurable, et de l’étendue du marché géographique concerné et que le rôle joué par chacune des entreprises participant à l’infraction serait évalué individuellement. Elle a finalement souligné que, dans la détermination du montant de l’amende à imposer à chaque entreprise, elle tiendrait compte de chaque circonstance aggravante et atténuante et proposerait de fixer les amendes à un niveau de nature à garantir leur caractère suffisamment dissuasif.

138    Quatrièmement, s’agissant de la lettre du 30 juin 2008, il y a lieu de relever que, dans cette lettre, qui ne formule pas de griefs à l’égard des entreprises destinataires, la Commission a mentionné son intention de réadopter la décision annulée par l’arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, et a spécifiquement indiqué que, étant donné la portée limitée de cet arrêt, qui ne concernait pas le fond de l’affaire, la décision réadoptée se fonderait à nouveau sur les preuves présentées dans la communication des griefs et la communication des griefs supplémentaires. Elle a également invité les entreprises en cause à lui transmettre leurs éventuelles observations dans un délai d’un mois suivant réception de cette lettre. La requérante ne saurait dès lors soutenir qu’elle aurait estimé que la réception de la lettre du 30 juin 2008 précédait l’adoption d’une nouvelle communication des griefs.

139    En second lieu, force est de constater que la requérante ne conteste pas que, au moment de l’annulation de la décision de 2002, les actes préparatoires accomplis par la Commission permettaient une analyse exhaustive du comportement des entreprises en cause au regard de l’article 65, paragraphe 1, CA.

140    Or, selon une jurisprudence constante, l’annulation d’un acte de l’Union n’affecte pas nécessairement les actes préparatoires, la procédure visant à remplacer l’acte annulé pouvant en principe être reprise au point précis auquel l’illégalité est intervenue (arrêts de la Cour du 12 novembre 1998, Espagne/Commission, C‑415/96, Rec. p. I‑6993, points 31 et 32, et Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, point 128 supra, point 73 ; arrêt du Tribunal du 25 juin 2010, Imperial Chemical Industries/Commission, T‑66/01, Rec. p. II‑2631, point 125).

141    Dès lors que, ainsi qu’il a été rappelé au point 24 ci-dessus, la décision de 2002 a été annulée en raison du fait que l’article 65, paragraphes 4 et 5, CA n’était plus en vigueur le 23 juillet 2002 et que la Commission ne pouvait dès lors plus tirer de compétence desdites dispositions, éteintes au moment de l’adoption de ladite décision, pour constater une infraction à l’article 65, paragraphe 1, CA et pour imposer des amendes aux entreprises qui auraient participé à ladite infraction, l’exécution de l’arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, imposait à la Commission de reprendre la procédure au point précis où l’illégalité était intervenue, à savoir au moment de l’adoption de la décision de 2002. La Commission n’avait dès lors pas l’obligation d’adresser à la requérante une nouvelle communication des griefs.

142    Il s’ensuit que la première branche du présent moyen doit être rejetée.

 Sur la violation des articles 14 et 33 du règlement n° 1/2003 et de l’article 14 du règlement n° 773/2004, en raison de l’impossibilité pour la requérante de communiquer sa position aux États membres

143    La requérante affirme que ses droits de la défense ont été violés en raison du fait que la Commission n’a pas donné au comité consultatif, visé à l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003, la possibilité de s’exprimer utilement quant à l’adoption de la décision attaquée. Elle soutient à cet égard que, faute d’une communication des griefs à laquelle elles auraient pu répondre, les parties auraient été privées de la possibilité d’informer les États membres de leur position quant à la réadoption de la décision de 2002, et notamment de leur communiquer des arguments décisifs pour le calcul du montant de l’amende, tels que la longueur de la procédure et l’état de crise dans lequel était plongé le secteur. À cet égard, la requérante ignorerait si une copie de sa réponse à la lettre du 30 juin 2008 a été communiquée aux États membres et, en conséquence, à quel titre ceux-ci se seraient prononcés.

144    À titre liminaire, il y a lieu de relever, ainsi que la Commission l’a indiqué au considérant 382 de la décision attaquée, qu’il n’y a pas de lien formel entre, d’une part, la consultation du comité consultatif prévu aux articles 14 et 33 du règlement n° 1/2003 et, d’autre part, la tenue d’une audition conformément à l’article 14 du règlement n° 773/2004.

145    En effet, tandis que l’article 12, paragraphe 1, du règlement n° 773/2004 prévoit que la Commission donne aux parties auxquelles elle adresse une communication des griefs la possibilité de développer leurs arguments lors d’une audition et que l’article 14, paragraphe 3, du même règlement dispose que la Commission invite les autorités de la concurrence des États membres à prendre part à l’audition, les articles 14 et 33 du règlement n° 1/2003 ne concernent pas la tenue de l’audition devant le conseiller-auditeur, mais prévoient la consultation par la Commission d’un comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes avant de prendre une décision, notamment en application des articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003.

146    S’agissant de la prétendue violation de l’article 14 du règlement n° 773/2004, relatif à la conduite des auditions par le conseiller-auditeur, il y a lieu de rappeler que le droit des entreprises et des associations d’entreprises intéressées de faire connaître leur point de vue, lors de la phase écrite et de la phase orale de la procédure administrative, au sujet des griefs retenus par la Commission constitue un élément essentiel des droits de la défense (arrêt de la Cour du 21 septembre 1989, Hoechst/Commission, 46/87 et 227/88, Rec. p. 2859, point 52, et arrêt du Tribunal du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, Rec. p. II‑931, point 248).

147    Toutefois, dès lors que, ainsi qu’il ressort des développements figurant aux points 122 à 142 ci-dessus, la Commission n’avait pas l’obligation d’adopter une nouvelle communication des griefs et que les entreprises en cause avaient déjà eu la possibilité d’être entendues oralement lors de l’audition du 13 juin 2002, consécutive à la communication des griefs, et lors de l’audition du 30 septembre 2002, qui avait fait suite à la communication des griefs supplémentaires, la Commission n’avait pas l’obligation d’organiser une nouvelle audition.

148    Si, certes, ainsi que le souligne la requérante, les États membres n’ont pas participé à l’audition relative au fond de l’affaire, il a été rappelé au point 113 ci-dessus que l’application, au sein de l’ordre juridique de l’Union, des règles du traité CE dans un domaine initialement régi par le traité CECA doit intervenir dans le respect des principes gouvernant l’application de la loi dans le temps, les règles de procédure étant généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur. Or, les règles du traité CECA, qui étaient alors en vigueur, et notamment l’article 36 CA, ne prévoyaient pas une telle participation, contrairement à l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 773/2004.

149    Ainsi que la Commission le souligne, cette dernière a toutefois tenu les États membres pleinement informés de la procédure, en leur adressant, avant l’adoption de la décision de 2002, la communication des griefs, la communication des griefs supplémentaires, des copies des observations écrites sur les deux communications des griefs, une copie de l’étude Lear (Laboratorio di Economia, Antitrust, Regolamentazione), intitulée « L’industrie du rond à béton armé en Italie de 1989 à 2000 » (ci-après l’« étude Lear »), commandée par les entreprises Alfa, Feralpi, IRO, SP et Valsabbia, un résumé des arguments des parties exposés lors de l’audition et l’enregistrement de celle-ci en anglais. La Commission a également transmis aux autorités nationales de la concurrence, le 7 septembre 2009, les réponses des entreprises en cause à la lettre du 30 juin 2008.

150    Pour ce qui concerne la prétendue violation des articles 14 et 33 du règlement n° 1/2003, qui prévoient la consultation par la Commission d’un comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes avant de prendre une décision, notamment en application des articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003, il suffit de constater que cet argument manque en fait, dès lors qu’il ressort du procès-verbal de la réunion de la Commission au cours de laquelle la première décision a été adoptée que le comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes a été consulté avant l’adoption de la décision attaquée et, après que les documents les plus importants concernant la présente affaire avaient été transmis à ses membres conformément à l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003 (considérant 383 de la décision attaquée), a donné son avis lors de sa réunion du 18 septembre 2009 portant sur un avant-projet de décision dans la présente affaire.

151    À cet égard, il ressort de l’avis du comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes donné lors de sa réunion du 18 septembre 2009 portant sur un avant-projet de décision dans l’affaire COMP/37.956 – Ronds à béton, réadoption (JO 2011, C 98, p. 13), qui a été produit par la Commission, que le comité consultatif a marqué son accord avec la Commission, premièrement, sur l’application de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 en tant que base légale, deuxièmement, sur la procédure suivie de réadoption de la décision, troisièmement, sur l’application de l’article 65, paragraphe 1, CA en tant que loi matérielle malgré son expiration, quatrièmement, sur l’évaluation des faits constituant des accords ou des pratiques concertées au sens de l’article 65, paragraphe 1, CA, cinquièmement, sur l’évaluation faite par la Commission du produit et de l’étendue géographique du marché affectés par l’entente, sixièmement, sur la conclusion de la Commission selon laquelle le délai de prescription n’avait pas expiré, septièmement, sur les montants de base des amendes, huitièmement, sur l’augmentation du montant de base due à une circonstance aggravante, neuvièmement, sur le montant de réduction de l’amende fondée sur la communication de la Commission sur la coopération de 1996, et dixièmement, sur le montant final des amendes. Ledit comité a également recommandé la publication de son avis au journal officiel de l’Union européenne.

152    Eu égard aux développements qui précèdent, il y a également lieu de rejeter la présente branche du moyen, ainsi que le moyen dans son ensemble.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 65, paragraphe 1, CA

153    La requérante fait valoir que la Commission a erronément interprété la notion d’infraction unique et continue et, ce faisant, a violé l’article 65, paragraphe 1, CA. D’une part, divers éléments suggéreraient l’existence de deux ententes distinctes et autonomes, l’une allant de 1989 à 1995 et l’autre de 1996 à 2000. D’autre part, les comportements décrits dans la décision attaquée auraient connu une interruption nette et évidente en 1995 et en 1996, mais aussi une série de moments de rupture au cours de toute la période concernée.

 Sur la nature unique de l’entente

154    La requérante soutient que la décision attaquée révèle divers éléments qui contredisent les conclusions de la Commission relatives à la nature unique de l’entente. Il y aurait eu deux ententes distinctes, dont l’une se serait déroulée entre 1989 et 1995 et l’autre entre 1996 et 2000. Pour fonder cette conclusion, la requérante se réfère à l’évolution, à partir de 1996, du nombre d’entreprises concernées par l’entente, du rôle joué par Federacciai et des sujets de discussion abordés par les participants.

155    Il convient tout d’abord de rappeler que la notion d’infraction unique vise une situation dans laquelle plusieurs entreprises ont participé à une infraction constituée d’un comportement continu ou répété poursuivant un seul but économique visant à fausser la concurrence ou bien encore d’infractions individuelles liées entre elles par une identité d’objet (même finalité de l’ensemble des éléments) et de sujets (identité des entreprises concernées, conscientes de participer à l’objet commun) (arrêts du Tribunal du 8 juillet 2008, BPB/Commission, T‑53/03, Rec. p. II‑1333, point 257 ; du 28 avril 2010, Amann & Söhne et Cousin Filterie/Commission, T‑446/05, Rec. p. II‑1255, point 89 ; du 24 mars 2011, Aalberts Industries e.a./Commission, T‑385/06, Rec. p. II‑1223, point 86, et du 27 juin 2012, Coats Holdings/Commission, T‑439/07, non encore publié au Recueil, point 141).

156    Ensuite, il y a lieu de relever qu’une violation de l’article 81, paragraphe 1, CE peut résulter non seulement d’un acte isolé, mais également d’une série d’actes ou bien encore d’un comportement continu. Cette interprétation ne saurait être contestée au motif qu’un ou plusieurs éléments de cette série d’actes ou de ce comportement continu pourraient également constituer en eux-mêmes, et pris isolément, une violation de ladite disposition. Lorsque les différentes actions s’inscrivent dans un « plan d’ensemble », en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence au sein du marché intérieur, la Commission est en droit d’imputer la responsabilité de ces actions en fonction de la participation à l’infraction considérée dans son ensemble (arrêts de la Cour Aalborg Portland e.a./Commission, point 124 supra, point 258 ; du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, non encore publié au Recueil, point 41, et du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission, C‑444/11 P, non encore publié au Recueil, point 49 ; arrêts du Tribunal du 12 décembre 2007, BASF et UCB/Commission, T‑101/05 et T‑111/05, Rec. p. II‑4949, point 161 ; Amann & Söhne et Cousin Filterie/Commission, point 155 supra, point 90 ; Aalberts Industries e.a./Commission, point 155 supra, point 87, et Coats Holdings/Commission, point 155 supra, point 142).

157    En outre, selon une jurisprudence constante, la notion d’infraction unique peut se rapporter à la qualification juridique d’un comportement anticoncurrentiel consistant en l’existence d’accords, de pratiques concertées et de décisions d’associations d’entreprises (arrêts du Tribunal du 20 mars 2002, HFB e.a./Commission, T‑9/99, Rec. p. II‑1487, point 186 ; BASF et UCB/Commission, point 156 supra, point 159 ; Amann & Söhne et Cousin Filterie/Commission, point 155 supra, point 91, et Coats Holdings/Commission, point 155 supra, point 143).

158    Il importe également de préciser que la notion d’objectif unique ne saurait être déterminée par une référence générale à une distorsion de concurrence sur le marché concerné par l’infraction, dès lors que l’atteinte à la concurrence constitue, en tant qu’objet ou effet, un élément inhérent à tout comportement relevant du champ d’application de l’article 65, paragraphe 1, CA. Une telle définition de la notion d’objectif unique risquerait de priver la notion d’infraction unique et continue d’une partie de son sens, dans la mesure où elle aurait pour conséquence que plusieurs comportements concernant un secteur économique, interdits par l’article 65, paragraphe 1, CA, devraient systématiquement être qualifiés d’éléments constitutifs d’une infraction unique. Ainsi, aux fins de qualifier différents agissements d’infraction unique et continue, il y a lieu de vérifier s’ils présentent un lien de complémentarité, en ce sens que chacun d’entre eux est destiné à faire face à une ou à plusieurs conséquences du jeu normal de la concurrence, et contribuent, par le biais d’une interaction, à la réalisation de l’ensemble des effets anticoncurrentiels voulus par leurs auteurs, dans le cadre d’un plan global visant un objectif unique. À cet égard, il y a lieu de tenir compte de toute circonstance susceptible d’établir ou de remettre en cause ledit lien, telle que la période d’application, le contenu, y compris les méthodes employées, et, corrélativement, l’objectif des divers agissements en question (voir, en ce sens et par analogie, arrêts BASF et UCB/Commission, point 156 supra, points 179 à 181 ; Amann & Söhne et Cousin Filterie/Commission, point 155 supra, point 92, et Aalberts Industries e.a./Commission, point 155 supra, point 88).

159    Enfin, il y a lieu de rappeler qu’une entreprise ayant participé à une infraction unique et complexe par des comportements qui lui sont propres, qui relèvent des notions d’accord ou de pratique concertée ayant un objet anticoncurrentiel au sens de l’article 65, paragraphe 1, CA et qui visent à contribuer à la réalisation de l’infraction dans son ensemble peut être également responsable des comportements mis en œuvre par d’autres entreprises dans le cadre de la même infraction pour toute la période de sa participation à ladite infraction. Tel est le cas lorsqu’il est établi que l’entreprise en question connaissait les comportements infractionnels des autres participants ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque (voir, en ce sens et par analogie, arrêts de la Cour du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, Rec. p. I‑4125, points 83 et 203 ; Commission/Verhuizingen Coppens, point 156 supra, point 42 ; Team Relocations e.a./Commission, point 156 supra, point 50 ; du Tribunal BASF et UCB/Commission, point 156 supra, point 160, et du 6 mars 2012, UPM-Kymmene/Commission, T‑53/06, non publié au Recueil, point 52).

160    C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’examiner le présent moyen.

161    Dans la décision attaquée, la Commission a constaté, au considérant 437, que les comportements concernant la fixation du prix de base et des délais de paiement, qui se sont succédé du 16 avril 1992 au 4 juillet 2000, apparaissaient comme des épisodes de la mise en pratique d’un seul et même dessein visant la fixation d’un prix minimal convenu. En effet, chacun de ces comportements (à la seule exception de l’accord initial d’avril 1992) se serait concrétisé sous forme de modalités, plus ou moins semblables dans le temps, à travers lesquelles le prix minimal convenu était fixé.

162    Au considérant 444 de la décision attaquée, la Commission a relevé que, étant donné que le prix de base et les « suppléments de dimension » sont les deux composants principaux du prix des ronds à béton, les comportements visant à la fixation de l’un et des autres ne pouvaient être considérés comme constituant deux ententes différentes et étaient en réalité les deux parties, absolument complémentaires, de la même entente. Ainsi, ce qui compterait sur le marché serait le prix total, en sorte que les comportements tendant à la fixation d’un prix de base minimal et ceux qui tendent à l’uniformisation des prix des « suppléments de dimension » constitueraient une seule infraction ayant pour objet la fixation du prix total des ronds à béton, y compris à travers la limitation ou le contrôle de la production ou des ventes.

163    S’agissant de cette partie de l’entente, la Commission a affirmé, au considérant 458 de la décision attaquée, que, puisqu’ils visaient à la mise en pratique d’un seul et même dessein visant la fixation d’un prix minimal convenu, tous les comportements concernant la limitation ou le contrôle de la production ou des ventes qui se sont succédé du 13 juin 1995 au 23 mai 2000 apparaissaient comme des épisodes de la mise en pratique de ce dessein. Elle a ajouté que le fait qu’il y ait eu des comportements distincts, à savoir, premièrement, des contacts réciproques et des rencontres périodiques entre des concurrents pour discuter et définir leurs propres politiques commerciales, deuxièmement, des ententes périodiques sur les prix de base minimaux ou prix « visés » (ou les termes de paiement) et sur les prix des « suppléments » de dimension pour la vente du produit en Italie, troisièmement, des ententes concernant des mesures destinées à faciliter la pratique de ces prix « visés », quatrièmement, l’échange d’informations détaillées sur des données confidentielles propres relatives, en particulier, à la production ou aux ventes, et, cinquièmement, la répartition du marché italien, par l’attribution d’un quota de vente à chacune des entreprises impliquées, n’empêchait pas que l’on puisse définir tous les comportements susmentionnés comme constituant une seule infraction.

164    Au considérant 507 de la décision attaquée, la Commission a conclu que l’unité d’objectif des différents comportements adoptés ne faisait aucun doute, puisque tant les ententes sur les prix de base que celles sur les suppléments auraient eu pour objet l’augmentation du prix des ronds à béton sur le marché italien. Les accords ou pratiques concertées concernant les délais de paiement auraient eu le même objet que ceux concernant la fixation du prix de base, étant donné que le fait de renoncer à accorder des délais de paiement plus longs que ceux de ses concurrents, en uniformisant les charges financières que, du fait de ces délais, les clients étaient tenus de supporter, équivaudrait à supprimer, ou du moins à réduire, de possibles différences entre les prix des concurrents. Dans la mesure où les comportements en cause auraient visé, pendant plus de dix ans, le même objectif, la Commission aurait abouti à la conclusion qu’il s’agissait d’une infraction unique.

165    En premier lieu, la requérante soutient que de nombreux documents cités dans la décision attaquée comme preuves de l’entente prétendument unique et continue concernent un nombre d’entreprises en grande partie différentes de celles qui ont été sanctionnées dans la décision attaquée. Inversement, les documents cités dans la décision attaquée comme preuves de l’entente présumée à partir de 1996 concerneraient des réunions qui se seraient déroulées dans un cercle très réduit par rapport aux entreprises qui auraient participé à l’entente depuis 1989 dans le cadre de Federacciai, puisque seules huit à onze entreprises seraient restées impliquées. Or, pour considérer une entente comme unique, il importerait que les entreprises impliquées soient (en grande partie) les mêmes, ce qui ressortirait également de la pratique décisionnelle de la Commission. Dès lors que, en 1995, 22 producteurs de ronds à béton auraient été membres de Federacciai, dont seuls onze auraient été invités aux réunions organisées par M. Leali, les initiatives promues par ce dernier s’avéreraient ne pas être liées à l’adhésion à Federacciai ou aux activités de celle-ci.

166    Un tel argument ne saurait être retenu. Ainsi qu’il a été rappelé aux points 155 et 158 ci-dessus, la notion d’infraction unique vise une situation dans laquelle plusieurs entreprises ont participé à une infraction constituée d’un comportement continu poursuivant un seul but économique visant à fausser la concurrence ou bien encore d’infractions individuelles liées entre elles par une identité d’objet et de sujets. Ainsi, aux fins de qualifier différents agissements d’infraction unique et continue, il y a lieu de vérifier s’ils présentent un lien de complémentarité, en ce sens que chacun d’entre eux est destiné à faire face à une ou à plusieurs conséquences du jeu normal de la concurrence, et contribuent, par le biais d’une interaction, à la réalisation de l’ensemble des effets anticoncurrentiels voulus par leurs auteurs, dans le cadre d’un plan global visant un objectif unique.

167    Si, certes, l’identité des entreprises ayant pris part à l’infraction constitue un élément pertinent à prendre en considération aux fins d’apprécier le caractère unique d’une infraction, il n’en demeure pas moins que le critère essentiel qui permet de qualifier une entente d’« unique » réside dans le fait que les différentes actions s’inscrivent dans un plan d’ensemble, en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence (voir point 156 ci-dessus). À cet égard, le Tribunal a déjà considéré qu’une entente ne perdait pas son caractère unique du fait de la diminution de plus de la moitié du nombre de participants à celle-ci. Le Tribunal a ainsi affirmé que, pour autant que l’objectif des pratiques anticoncurrentielles soit resté le même, le fait que certaines caractéristiques ou que l’intensité des pratiques en cause ait changé n’était pas concluant (arrêt Aalberts Industries e.a./Commission, point 155 supra, points 103 et 105).

168    En l’espèce, il y a lieu de relever qu’il ressort du dispositif de la décision attaquée que l’ensemble des destinataires de celle-ci ont participé à l’infraction du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000, à l’exception, d’une part, de la requérante, qui a participé à l’infraction du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000, et, d’autre part, de Ferriere Nord, qui n’a participé à l’entente que du 1er avril 1993 au 4 juillet 2000. Il y a, partant, contrairement à ce que soutient la requérante, une identité entre les entreprises à l’égard desquelles la Commission a constaté une participation à l’entente au cours de la période postérieure à 1996 et celles pour lesquelles la participation a été constatée par la Commission pour la période antérieure à cette date.

169    Il est vrai, ainsi que le soulève la requérante, que de nombreux documents cités dans la décision attaquée, antérieurs à 1996, concernent des entreprises auxquelles la Commission n’a pas communiqué de griefs. Une telle circonstance est toutefois sans pertinence sur la qualification de l’entente d’infraction unique, d’autant plus qu’aucune infraction n’a été constatée à l’égard de ces entreprises. La Commission a ainsi expliqué, aux considérants 551 et 552 de la décision attaquée, que les entreprises impliquées dans la présente procédure étaient les plus importantes du secteur et celles à l’égard desquelles les enquêtes avaient permis de rassembler le plus de preuves. Elle a également précisé que la plupart des entreprises italiennes actives dans le secteur au début de la période en question avaient entre-temps cessé d’y opérer. Selon la Commission, sur les 22 entreprises toujours en activité en 1995, les neuf destinataires de la décision attaquée représentaient, en 1998, une part de marché de 86,9 % du marché italien des ronds à béton. La Commission a ajouté qu’elle n’a pas été en mesure de prouver la participation des entreprises non destinataires de la décision attaquée à l’entente pour les comportements adoptés par les plus grandes entreprises, puisque Federacciai ne les avait pas fait connaître à l’ensemble du secteur.

170    En outre, s’agissant de la pratique décisionnelle invoquée par la requérante, il doit être rappelé que, selon la jurisprudence, les décisions concernant d’autres affaires ne revêtent qu’un caractère indicatif en ce qui concerne l’existence éventuelle d’une discrimination, étant donné qu’il est peu vraisemblable que les circonstances propres à celles-ci, telles que les marchés, les produits, les pays, les entreprises et les périodes concernés, soient identiques (voir arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission, C‑76/06 P, Rec. p. I‑4405, point 60, et la jurisprudence citée).

171    Par ailleurs, pour ce qui concerne la décision 2006/460/CE de la Commission, du 17 décembre 2002, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE à l’encontre de SGL Carbon AG, Le Carbone-Lorraine SA, Ibiden Co. Ltd, Tokai Carbon Co. Ltd, Toyo Tanso Co. Ltd, GrafTech International Ltd, NSCC Techno Carbon Co. Ltd, Nippon Steel Chemical Co. Ltd, Intech EDM BV et Intech EDM AG (affaire COMP/E-2/37.667 – Graphites spéciaux) (résumé publié au JO 2006, L 180, p. 20), dans laquelle, selon la requérante, la Commission aurait constaté deux infractions distinctes en se fondant sur le fait que les comportements relatifs à une première entente auraient impliqué six entreprises, tandis que la concertation mise en œuvre dans une seconde entente n’aurait concerné que deux de ces six entreprises, il y a lieu de relever que l’argument de la requérante est fondé sur une prémisse erronée, puisque, ainsi que le souligne à juste titre la Commission, il s’agissait d’une affaire caractérisée par deux marchés pertinents, à savoir le marché du graphite spécial et le marché du graphite isostatique. S’agissant de la décision 2002/742/CE de la Commission, du 5 décembre 2001, relative à une procédure d’application de l’article 81 CE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/E-1/36.604 – Acide citrique) (JO 2002, L 239, p. 18), et de l’arrêt du Tribunal du 27 septembre 2006, Jungbunzlauer/Commission (T‑43/02, Rec. p. II‑3435), rendu dans le cadre d’un recours ayant pour objet l’annulation de cette décision, également invoqués par la requérante, force est de constater que deux ententes distinctes avaient également été constatées, d’une part, dans le secteur du gluconate de sodium et, d’autre part, dans le secteur de l’acide citrique (arrêt Jungbunzlauer/Commission, précité, points 308 à 314). Dans la présente affaire en revanche, l’entente a été constatée sur le seul marché italien des ronds à béton crantés en barres ou en rouleaux.

172    En deuxième lieu, la requérante soutient qu’un autre élément démontrant l’existence de deux groupes de faits autonomes et distincts est le rôle qu’aurait joué Federacciai, exclusivement pendant la période allant de 1989 à 1995, afin de promouvoir et de coordonner l’entente présumée. Selon la requérante, cette association n’aurait plus joué aucun rôle dans le cadre des événements de la période s’étendant de 1996 à 2000. Dans la première partie de l’entente, les documents auraient été envoyés sur papier à en-tête de l’association et auraient été adressés à l’attention des producteurs de ronds à béton, tandis que les documents postérieurs à 1995 auraient été envoyés sur papier à en-tête de M. Leali à un nombre restreint de sociétés, qui auraient opéré dans le nord et le nord-est de l’Italie.

173    Force est toutefois de constater qu’un tel argument, au vu de la jurisprudence rappelée au point 156 ci-dessus, est dénué de pertinence aux fins de qualifier l’entente d’infraction unique, ce qui importe étant que les différentes actions s’inscrivent dans un « plan d’ensemble », en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence.

174    Par ailleurs, ainsi que le relève à juste titre la Commission, la requérante ne saurait affirmer que Federacciai n’a plus joué aucun rôle dans le cadre des événements de la période allant de 1996 à 2000, puisqu’il ressort de la décision de 2002, devenue définitive à l’égard de Federacciai, et notamment de ses considérants 504 et 505, que Federacciai a participé à l’entente du 6 décembre 1989 au 24 juillet 1998. De surcroît, s’agissant de la période postérieure à 1996, Federacciai a notamment organisé douze réunions ou a communiqué aux entreprises les résultats de celles-ci durant la période allant du 22 octobre 1996 au 17 juillet 1997 (considérant 200 de la décision attaquée). En outre, Federacciai a parfois consulté les entreprises et communiqué à celles-ci par télécopie le résultat de ces consultations (considérant 201 de la décision attaquée). Le 24 octobre 1997, une télécopie de Federacciai a aussi informé les entreprises que, « au cours de la réunion des responsables commerciaux des sociétés productrices de ronds à béton du 23.10 dernier, le prix minimum de 300 ITL/kg, base départ Brescia, avait été confirmé à l’unanimité » (considérant 212 de la décision attaquée). Enfin, Federacciai a envoyé aux entreprises une télécopie le 20 juillet 1998, dans laquelle était constaté un niveau du prix de base (pour le mois de juillet) de 210 ITL/kg. La même télécopie faisait ensuite mention d’une réunion de confirmation des producteurs avant les vacances d’été, afin de vérifier ces situations (considérant 240 de la décision attaquée).

175    Il doit encore être souligné que le caractère unique de l’infraction résulte du fait que les comportements en cause s’inscrivent dans un plan global poursuivant un objectif commun. Ainsi, un tel caractère résulte de l’unicité de l’objectif poursuivi par chaque participant à l’entente et non des modalités d’application de celle-ci (arrêts Cimenteries CBR e.a./Commission, point 60 supra, points 4027 et 4127, et BPB/Commission, point 155 supra, point 255). Or, dans les circonstances de l’espèce, les accords et pratiques concertées s’inscrivaient dans un plan d’ensemble qui s’inscrivait dans une série d’efforts des entreprises en cause poursuivant un seul but économique, à savoir influencer l’évolution des prix (voir points 161 à 164 ci-dessus).

176    En troisième lieu, la requérante affirme que, tandis que les discussions coordonnées par Federacciai auraient porté sur le niveau des prix, les discussions tenues pendant les réunions convoquées par M. Leali auraient porté sur la possibilité de réduire la production et auraient été destinées à adopter des solutions communes pour faire face à la crise.

177    Cet argument est lui aussi dénué de fondement.

178    Premièrement, il ressort de la décision attaquée, et notamment de ses considérants 183, 184 à 186, 192, 199, 200, 210 à 214, 218, 228, 269, 277, 280 à 284, 286 à 296, 298 à 300 et 305 que, même après 1995, l’entente a eu pour objet la fixation des prix de base et des suppléments de dimension, plusieurs réunions à cet effet s’étant d’ailleurs déroulées dans les locaux de la requérante à Brescia.

179    Deuxièmement, il y a lieu de considérer que la limitation de la production et les ententes sur les prix étaient étroitement liées et visaient à influencer l’évolution de ces derniers.

180    Ainsi, il ressort, tout d’abord, du considérant 183 de la décision attaquée, relatif à une réunion du 8 février 1996, qu’il était apparu indispensable que les titulaires se rencontrent pour juger de l’opportunité de prendre des mesures extraordinaires (par exemple, des exportations en lieu et place d’arrêts de production supplémentaires) pour faire face au recul du prix des ronds à béton à 210 ITL/kg.

181    Ensuite, lors d’une réunion du 13 février 1996, plusieurs entreprises, parmi lesquelles la requérante, se sont engagées non seulement à arrêter la production des laminoirs pendant plusieurs semaines et à exporter une partie de la production, mais également à fixer le prix de base à 230 ITL/kg (considérant 183 de la décision attaquée).

182    En outre, au considérant 207 de la décision attaquée, la Commission se réfère à un document interne de Lucchini dans lequel il est écrit que « les exportations effectuées par certains producteurs (Feralpi, IRO, Valsabbia, Riva), ajoutées aux arrêts de production à réaliser au cours du mois de novembre par certains autres producteurs (Leali, Lucchini, Alfa Acciai, Darfo), devraient stabiliser le marché du mois à venir et, à tout le moins, empêcher une probable diminution des prix ».

183    Par ailleurs, au considérant 231 de la décision attaquée, la Commission se réfère à une télécopie du 3 juin 1998 de M. Leali, qui se réfère notamment au fait qu’« il [était] évident que les effets sur le marché ne [pouvaient] pas encore être visibles et que, probablement, la réduction de la production pour la période de mars et avril n’[était] peut-être pas du tout suffisante ».

184    Enfin, un document interne de Lucchini du mois de novembre 1999, cité par la Commission au considérant 277 de la décision attaquée, se réfère également au fait que « l’arrêt de production convenu entre les producteurs n’a pas produit l’effet désiré, à savoir une augmentation minime des prix ».

185    Eu égard à l’ensemble de ces éléments, la requérante ne saurait soutenir que les discussions coordonnées par Federacciai et que les réunions convoquées par M. Leali n’avaient pas le même objet.

186    En quatrième lieu, la requérante soutient qu’il serait justifié de considérer les faits examinés comme deux ententes séparées dès lors qu’il ne serait pas opportun de sanctionner, en 2009, et pour une série de faits commis par environ 40 entreprises à partir de 1989, 8 seulement des entreprises en question qui auraient représenté à peine 30 % de la production nationale de ronds à béton au cours de la période en cause.

187    Un tel argument est toutefois manifestement dénué de toute pertinence aux fins de déterminer le caractère unique de l’entente.

188    Eu égard aux développements qui précèdent, il y a lieu de considérer que c’est à bon droit que la Commission a constaté que l’entente constituait une infraction unique.

 Sur la nature continue de l’entente

189    La requérante fait valoir que l’entente a fait l’objet de « nombreuses interruptions, dont la plus éclatante se serait produite fin 1995 ». Ainsi, l’entente gérée par Federacciai serait entrée en crise, puis aurait définitivement cessé dans les derniers mois de 1995. Eu égard à l’absence de continuité de l’entente, les faits antérieurs à 1996 seraient prescrits.

190    Il y a lieu de rappeler qu’il résulte de l’article 25, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et de l’article 1er, paragraphe 2, de la décision 715/78/CECA de la Commission, du 6 avril 1978, relative à la prescription en matière de poursuites et d’exécution dans le domaine d’application du traité CECA (JO L 94, p. 22), que, pour les infractions continues ou répétées, la prescription commence à courir à compter du jour où l’infraction a pris fin.

191    Selon la jurisprudence, lorsqu’il y a un litige sur l’existence de l’infraction, l’exigence de sécurité juridique, dont doivent bénéficier les opérateurs économiques, implique que la Commission, qui a la charge de la preuve des infractions qu’elle constate, avance des éléments de preuve propres à établir, à suffisance de droit, l’existence des faits constitutifs de l’infraction. S’agissant, plus particulièrement, de la durée alléguée d’une infraction, le même principe de sécurité juridique impose que, en l’absence d’éléments de preuve susceptibles d’établir directement la durée d’une infraction, la Commission invoque, au moins, des éléments de preuve qui se rapportent à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, de façon qu’il puisse être raisonnablement admis que cette infraction s’est poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises (arrêts du Tribunal du 7 juillet 1994, Dunlop Slazenger/Commission, T‑43/92, Rec. p. II‑441, point 79 ; du 6 juillet 2000, Volkswagen/Commission, T‑62/98, Rec. p. II‑2707, point 188, et du 29 juin 2012, GDF Suez/Commission, T‑370/09, non encore publié au Recueil, point 138).

192    Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation des règles de concurrence. De tels indices et coïncidences permettent, lorsqu’ils sont évalués globalement, de révéler non seulement l’existence de comportements ou d’accords anticoncurrentiels, mais également la durée d’un comportement anticoncurrentiel continu et la période d’application d’un accord conclu en violation des règles de concurrence (voir arrêt de la Cour du 21 septembre 2006, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, C‑105/04 P, Rec. p. I‑8725, points 94 et 95, et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal du 17 mai 2013, MRI/Commission, T‑154/09, non encore publié au Recueil, point 191).

193    S’agissant de l’absence de preuve quant à l’existence d’un accord au cours de certaines périodes déterminées ou, tout au moins, quant à sa mise en œuvre par une entreprise au cours d’une période donnée, il convient de rappeler que le fait que la preuve de l’infraction n’a pas été apportée pour certaines périodes déterminées ne fait pas obstacle à ce que l’infraction soit regardée comme constituée durant une période globale plus étendue que celles-ci, dès lors qu’une telle constatation repose sur des indices objectifs et concordants. Dans le cadre d’une infraction s’étendant sur plusieurs années, le fait que les manifestations de l’entente interviennent à des périodes différentes, pouvant être séparées par des laps de temps plus ou moins longs, demeure sans incidence sur l’existence de cette entente, pour autant que les différentes actions qui font partie de cette infraction poursuivent une seule finalité et s’inscrivent dans le cadre d’une infraction à caractère unique et continu (arrêts de la Cour Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, point 192 supra, points 97 et 98, et du 21 septembre 2006, Technische Unie/Commission, C‑113/04 P, Rec. p. I‑8831, point 169 ; voir également, en ce sens, arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 124 supra, point 260, et arrêt MRI/Commission, point 192 supra, point 193). Ainsi, dans le cadre d’un accord global s’étendant sur plusieurs années, un décalage de quelques mois entre les manifestations de l’entente importe peu. Le fait que les différentes actions s’inscrivent dans un « plan d’ensemble » en raison de leur objet identique est par contre déterminant (arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 124 supra, point 260).

194    À cet égard, si la période séparant deux manifestations d’un comportement infractionnel est un critère pertinent afin d’établir le caractère continu d’une infraction, il n’en demeure pas moins que la question de savoir si ladite période est ou non suffisamment longue pour constituer une interruption de l’infraction ne saurait être examinée dans l’abstrait. Au contraire, il convient de l’apprécier dans le contexte du fonctionnement de l’entente en question (arrêts du Tribunal du 19 mai 2010, IMI e.a./Commission, T‑18/05, Rec. p. II‑1769, point 89, et Coats Holdings/Commission, point 155 supra, point 150).

195    S’agissant de l’existence d’une infraction continue en l’espèce, la Commission, au considérant 437 de la décision attaquée, a relevé que la partie de l’objet de l’entente concernant la fixation du prix de base – et, jusqu’au 30 septembre 1995, la fixation des délais de paiement – présentait un caractère de « continuité », c’est-à-dire d’un comportement infractionnel réitéré dans le temps (du 16 avril 1992 au 4 juillet 2000) en exécution du même dessein visant la fixation d’un prix minimal convenu. Elle a ajouté qu’il s’agissait d’une infraction unique qui, à la lumière de sa nature complexe et continue, pouvait être définie comme étant une seule infraction s’étant concrétisée à travers un comportement continu constitué tant par des accords que par des pratiques concertées. Au considérant 442 de la décision attaquée, relatif à la partie de l’entente sur la fixation des prix des suppléments de dimension, elle a relevé que le caractère continu de l’infraction était « très facilement repérable dans la nature complète de l’objet des comportements d’infraction réitérés dans le temps (la fixation de prix uniformes pour les ‘suppléments de dimension’) », ce qui confirmait que tous les comportements décrits étaient l’exécution d’un même dessein, visant, précisément, la fixation de prix uniformes entre tous les concurrents pour lesdits suppléments. Enfin, au considérant 458 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que la partie de l’entente relative au contrôle ou à la limitation de la production ou des ventes était, tout comme la partie relative aux prix, de nature complexe (accord ou pratique concertée) et continue (mise en pratique du même dessein anticoncurrentiel) et qu’il était permis de conclure que tous les comportements en question constituaient une seule infraction unique, complexe et continue.

196    À cet égard, en réponse aux arguments des parties relatifs à l’absence de caractère continu de l’entente, selon lesquels, d’une part, les comportements en cause auraient été ponctuels et d’une durée éphémère et, d’autre part, ces mêmes comportements n’auraient eu aucun effet pendant toute la période en cause, la Commission a souligné, aux considérants 509 et 510 de la décision attaquée, que le dossier a fait apparaître que les mêmes comportements avaient été adoptés en matière de prix de base, de suppléments, de délais de paiement et de contrôle ou de limitation de la production ou des ventes, et ce pendant de longues années. La Commission a ainsi relevé qu’il existait des preuves de réunions de contrôle des comportements concertés, ce qui montrerait que la situation sur le marché était surveillée en permanence et que de nouvelles initiatives étaient adoptées quand les entreprises impliquées le jugeaient nécessaire. La Commission a, en outre, noté que, sur l’ensemble de la période examinée, aucune entreprise ne s’était désolidarisée publiquement de ces comportements.

197    À titre liminaire, d’une part, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante, réitéré dans le cadre de la présente branche, selon lequel les comportements des huit entreprises sanctionnées constitueraient, à partir de 1996, une « autre entente » que celle qui s’est déroulée entre 1989 et 1995, de même que les arguments de la requérante, figurant dans la partie factuelle de la requête, et déjà formulés dans le cadre de la contestation par la requérante de la nature unique de l’entente retenue par la Commission, pour les motifs figurant aux points 165 à 188 ci-dessus.

198    D’autre part, il y a lieu de considérer que, dans la présente branche, la requérante fait valoir que c’est l’entente dans sa globalité qui aurait connu certaines interruptions, et non pas sa propre participation à celle-ci.

199    En premier lieu, la requérante soutient que l’entente a été interrompue entre la fin de l’année 1995 et le début de l’année 1996.

200    Pour démontrer cette interruption, la requérante rappelle, tout d’abord, qu’elle a mis fin à tout type de rapport avec Federacciai au début de l’année 1995 tandis que Valsabbia est restée associée à Federacciai jusqu’au 31 décembre 1995. La fin de leur adhésion à Federacciai aurait été suivie d’une rupture complète avec celle-ci, également en ce qui concerne les prix. Le 2 mai 1995, Alfa aurait publié un prix de base du rond à béton inférieur à l’objectif fixé par Federacciai et le prix d’Alfa n’aurait augmenté qu’une seule fois en août 1995, pour ensuite diminuer progressivement avec celui des autres producteurs pendant les derniers mois de 1995. Ensuite, après sa communication d’août 1995, Federacciai aurait cessé de recommander un prix de base pendant au moins cinq mois, jusqu’en février 1996. Ainsi, au début du mois d’octobre 1995, la Federacciai aurait affirmé que la situation plutôt confuse du marché rendait difficile l’établissement d’un prix de référence précis (considérant 174 de la décision attaquée). Cette période aurait été marquée par une absence totale d’homogénéité des prix et par la prise de conscience que certains producteurs n’entendaient plus coopérer (considérant 172 de la décision attaquée), ce qui serait décisif et contraire à la thèse d’une infraction unique et continue. Enfin, la requérante relève la différence entre les prix publiés et les objectifs de prix, en septembre et en octobre 1995, et se réfère notamment au contenu d’un rapport de Ferriere Nord pour l’année 1998 relatif à l’échec de toutes les tentatives de coordination entre opérateurs du marché. À cet égard, la requérante rappelle que, sur une période d’environ dix ans, trois entreprises sur quatre ont cessé leurs activités, parce que, au cours de la période au cours de laquelle l’entente présumée aurait été mise en œuvre, les prix des ronds à béton auraient connu un effondrement dû à une véritable guerre des prix. Ainsi, même si les parties avaient entretenu des contacts, ceux-ci auraient eu des effets purement marginaux et négligeables sur le fonctionnement du marché.

201    Premièrement, il convient de relever, à l’instar de la Commission, que la requérante ne conteste pas la réalité des comportements illicites qui lui sont reprochés et n’émet aucune objection à l’égard du considérant 556 de la décision attaquée, où sont résumés ces comportements, et à l’égard des nombreux autres considérants de la décision attaquée, auxquels celui-ci fait référence et où les comportements anticoncurrentiels de la requérante et des autres entreprises en cause sont décrits en détail.

202    Deuxièmement, s’agissant de la fin de l’adhésion de la requérante et de Valsabbia à Federacciai, il y a lieu de souligner que cette circonstance ne saurait à elle seule, eu égard à la jurisprudence rappelée au point 159 ci-dessus, démontrer une quelconque interruption de l’entente.

203    À cet égard, la requérante ne conteste pas la constatation de la Commission selon laquelle, malgré la révocation de son inscription à Federacciai, elle a continué à recevoir les communications de cette association relatives à la fixation du prix de base et des suppléments de dimension (considérant 149 de la décision attaquée) et a continué à appliquer les prix des suppléments de dimension établis par l’entente (considérant 150 de la décision attaquée).

204    Selon les considérants pertinents de la décision attaquée, dont le contenu n’est pas contesté par la requérante, malgré cette révocation, cette entreprise a répondu à la communication que lui a envoyée Leali, sur indication de Federacciai, relative à l’exécution d’une des décisions (regroupement coordonné des arrêts de production) prises lors de la réunion du 13 juin 1995 (considérants 152, 153, 157 et 158 de la décision attaquée).

205    La Commission a par ailleurs indiqué, au considérant 556 de la décision attaquée, que l’unique conséquence de la révocation de la requérante de son adhésion à Federacciai a été l’absence de transmission à celle-ci des données relatives à sa propre activité, du 23 janvier 1995 au 31 décembre 2000. Malgré l’absence de transmission de données à Federacciai, la requérante a toutefois également participé, à partir du 13 février 1996, à la partie de l’entente relative à la limitation ou au contrôle de la production ou des ventes, puisque, à cette date, elle a adhéré à un programme d’arrêts concertés de laminoirs, visant à l’augmentation concertée du prix de base, ce fait étant devenu possible avec l’apparition de Leali dans le rôle de coordinateur des activités de l’entente, et notamment de la partie de l’entente relative au contrôle ou à la limitation de la production ou des ventes.

206    Troisièmement, la requérante ne saurait soutenir que l’entente a connu une interruption en raison du fait que Federacciai aurait cessé de recommander un prix de base à compter du mois d’août 1995.

207    D’une part, les entreprises participant à l’entente ont continué à recevoir, au début du second semestre 1995, des communications de Federacciai (à détruire après en avoir pris connaissance) notamment, les 4, 19 et 21 juillet 1995 (voir également le projet de communication de Federacciai du 31 juillet 1995 visé au considérant 167 de la décision attaquée), relatives à la fixation du prix de base et, y compris jusqu’au 30 septembre 1995 aux délais de paiement (considérants 160, 163, 164 et 168 de la décision attaquée). Alfa a également continué à participer à la pratique concertée et aux autres comportements collusoires relatifs aux prix des suppléments de dimension (considérants 162 et 177 de la décision attaquée). Elle a également dûment souscrit au formulaire d’engagement relatif aux délais de paiement convenus à partir du 1er septembre 1995 (considérants 164 et 165 de la décision attaquée). Le 29 août 1995, Federacciai a communiqué à l’ensemble de ses membres le contenu d’une réunion du même jour au cours de laquelle ont été prises des décisions relatives à la fixation du prix de base et aux délais de paiement (considérant 168 de la décision attaquée).

208    D’autre part, force est de constater que, alors même que la requérante estime que l’entente s’est interrompue entre août 1995 et février 1996, elle se réfère elle-même à une communication de Federacciai du 13 septembre 1995 adressée au membre délégué du conseil d’administration d’AFLL relative à la transmission des commandes enregistrées en Italie et sur tous les marchés. Dans la même communication, le directeur général faisant fonction de Federacciai a informé AFLL qu’il avait contacté les plus grands producteurs italiens de ronds à béton et leur avait transmis la recommandation visant à « faire barrière », que le membre délégué du conseil d’administration d’AFLL lui avait transmise (considérant 172 et note en bas de page 260 de la décision attaquée).

209    Dans une télécopie de Federacciai du 25 septembre 1995, celle-ci a également demandé aux entreprises en cause de lui fournir des données sur les commandes enregistrées en septembre en Italie et sur les marchés étrangers, lesquelles lui ont été communiquées par onze entreprises (considérant 173 de la décision attaquée).

210    Il ressort en outre d’un document en possession de Federacciai, cité au considérant 174 de la décision attaquée, que, premièrement, la clientèle remettait en discussion les paiements (d’où la nécessité d’une communication qui réaffirme la fermeté sur les paiements), deuxièmement, depuis la semaine précédente, le prix des ronds à béton avait encore diminué de 5/10 ITL/kg, se situant ainsi autour de 260/270 ITL/kg dans la zone de Brescia, avec des cotations inférieures à 250 ITL/kg en dehors de cette zone, troisièmement, la situation du marché plutôt confuse rendait difficile la tâche de donner des chiffres précis pour le prix et, quatrièmement, il fallait demander aux entreprises les données relatives aux commandes des semaines 39 (du 25 au 29 septembre 1995) et 40 (du 2 au 6 octobre 1995).

211    Au considérant 177 de la décision attaquée, la Commission a finalement fait état d’une télécopie, adressée par le directeur général faisant fonction de Federacciai aux entreprises participant à l’entente, pour les informer, en référence à une télécopie précédente de la même Federacciai, du lundi 16 octobre 1995 relative à une proposition de modification des suppléments de dimension, que la proposition avait divisé les opérateurs et n’avait pas obtenu une majorité ample ou qualifiée. L’examen de cette proposition et l’éventuelle décision en découlant étaient donc renvoyés à une discussion devant avoir lieu lors d’une réunion future des opérateurs.

212    Quatrièmement, la requérante ne saurait, pour démontrer l’absence de continuité de l’entente, se fonder sur la prétendue absence totale d’homogénéité des prix et sur la prise de conscience que certains producteurs n’entendaient plus coopérer, ou encore sur le fait qu’elle aurait été opposée à la proposition de modification des suppléments de dimension.

213    Ainsi que la Commission l’a rappelé au considérant 504 de la décision attaquée, selon la jurisprudence, le fait pour l’entreprise en cause de ne pas avoir respecté les prix convenus n’est pas de nature à infirmer l’objet anticoncurrentiel des réunions et, dès lors, la participation de la requérante aux ententes, mais tendrait tout au plus à démontrer qu’elle n’a pas mis en œuvre les accords en question (voir arrêt du Tribunal du 6 avril 1995, Tréfilunion/Commission, T‑148/89, Rec. p. II‑1063, point 79, et la jurisprudence citée). Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que l’article 65, paragraphe 1, CA interdit les accords qui « tendraient » à empêcher, à restreindre ou à fausser le jeu normal de la concurrence. Il s’ensuit qu’est interdit, au sens de cette disposition, un accord ayant pour objet de restreindre la concurrence, mais dont les effets anticoncurrentiels n’auraient pas été établis (arrêt de la Cour du 2 octobre 2003, Ensidesa/Commission, C‑198/99 P, Rec. p. I‑11111, points 59 et 60, et arrêt du Tribunal du 11 mars 1999, Thyssen Stahl/Commission, T‑141/94, Rec. p. II‑347, point 277) (voir également considérant 463 de la décision attaquée).

214    Dans ce contexte, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel si une entreprise décide de publier un tarif CECA contenant des prix différents des prix concertés ou suggérés dans le cadre de l’entente, elle prendrait ses distances par rapport à celle-ci. Il est en effet de jurisprudence constante que le fait qu’une entreprise ne se plie pas aux résultats de réunions ayant un objet manifestement anticoncurrentiel n’est pas de nature à la priver de sa pleine responsabilité du fait de sa participation à l’entente, dès lors qu’elle ne s’est pas distanciée publiquement du contenu de ces réunions (voir également considérant 481 de la décision attaquée). En outre, il incombe à l’entreprise en cause d’établir sa distanciation de l’entente en apportant la preuve que sa participation aux réunions était dépourvue de toute finalité anticoncurrentielle et en démontrant qu’elle avait indiqué à ses concurrents qu’elle participait à ces réunions dans une optique différente de la leur. Il s’ensuit que la notion de distanciation publique en tant qu’élément d’exonération de la responsabilité doit être interprétée de manière restrictive. Dans le contexte d’une entente, seule l’entreprise qui établit avoir manifesté de manière ferme et claire son désaccord avec les démarches interdites entreprises dans le cadre de celle-ci est susceptible de remplir le critère de la distanciation publique tel qu’exigé par la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 décembre 2003, Adriatica di Navigazione/Commission, T‑61/99, Rec. p. II‑5349, points 135 et 137, et la jurisprudence citée). La publication d’un tarif CECA contenant des prix différents des prix concertés ou suggérés dans le cadre de l’entente ne saurait suffire à cet égard.

215    Cinquièmement, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel, pour ce qui concerne 1996, il serait « douteux » que les entreprises aient conclu de nouvelles ententes. La requérante fait observer à cet égard que le premier semestre de 1996 aurait été caractérisé par une tentative de M. Leali, qui aurait échoué, d’aligner un nombre réduit d’entreprises. Les accords présumés auraient toutefois été ignorés.

216    Selon la requérante, l’invitation du 4 janvier 1996 aurait concerné une « réunion conviviale », et seul un groupe limité d’entreprises aurait confirmé sa participation à cette réunion. À l’issue de la réunion, aucune recommandation n’aurait été formulée, ni sur les prix ni sur les quantités. Une deuxième réunion, qui se serait déroulée à la mi-janvier 1996, n’aurait, de manière analogue, débouché sur aucune recommandation. Une nouvelle réunion aurait été prévue au début de février 1996, mais n’aurait pas semblé produire de résultats (considérant 181 de la décision attaquée). Le 8 février 1996, les entreprises auraient constaté une chute des prix et la nécessité d’une rencontre entre les gérants. À la suite d’une réunion le 13 février 1996, des mesures de contingentement de la production auraient été prévues, auxquelles il y aurait eu une adhésion substantielle, et non unanime, comme l’affirmerait la Commission au considérant 185 de la décision attaquée. La requérante ajoute que, malgré le fait que, à partir de février 1996, Federacciai aurait recommencé à indiquer de nouveaux objectifs de prix, les entreprises les auraient ignorées ou ne les auraient suivis que pendant quelques jours. À la fin de février 1996, M. Leali aurait été contraint d’admettre que les prix sur le marché étaient différents de ceux qui étaient indiqués dans ses rappels comme étant « décidés » (considérant 187 de la décision attaquée). Le considérant 188 de la décision attaquée se référerait à une réunion d’urgence le 5 mars 1996. M. Leali n’aurait toutefois pas fourni d’indication de prix pour tout le mois de mars 1996 et, à la suite de telles indications en avril, les entreprises n’y auraient donné aucune suite.

217    À cet égard, pour ce qui concerne la prétendue interruption de l’entente jusqu’au mois de février 1996, il doit être relevé, tout d’abord, que le 28 décembre 1995, AFLL a invité les « titulaires » des principales entreprises, parmi lesquelles la requérante, à participer à une réunion le 4 janvier 1996 (considérant 178 de la décision attaquée) et que la requérante ne conteste pas les constatations de la Commission selon lesquelles elle a participé aux différents aspects sous lesquels se présentait le système collusoire, toujours opérationnel (considérants 178, 180 à 183 de la décision attaquée). Ainsi, elle a participé à la réunion organisée par Leali pour le 4 janvier 1996 (considérant 180 de la décision attaquée).

218    S’agissant de l’objet de cette réunion, il ressort de la télécopie de confirmation adressée la veille par M. Leali à la requérante et aux autres entreprises que ce dernier recommandait aux entreprises d’apporter le bilan de la production de ronds à béton en 1995 et la prévision pour 1996, de sorte que, si tous étaient d’accord, certaines considérations pourraient être faites sur des données concrètes. Cette télécopie mentionne également que les uniques absents étaient le représentant de Ferriere Nord, qui avait préalablement donné son adhésion aux initiatives qui devraient être décidées à l’unanimité, et un représentant de Riva. Cette réunion ne saurait dès lors être qualifiée de simple réunion « conviviale ».

219    Par ailleurs, la requérante a été invitée par Leali aux réunions des 18 janvier, 5 et 13 février 1996. Elle a également reçu la communication du 20 février 1996 de Leali, qui faisait état de l’unanimité des adhésions au programme de limitation de la production (considérant 185 de la décision attaquée), et la note du 23 février 1996 de Leali concernant notamment l’application du prix de base convenu (considérant 186 de la décision attaquée), ainsi que les autres communications ultérieures de Leali adressées aux entreprises participant activement à l’entente (considérants 187 à 190 de la décision attaquée).

220    Enfin, il doit être souligné que la requérante fait partie des entreprises que Leali, dans une convocation à une réunion du 7 janvier 1997, a remerciées « pour la collaboration et la disponibilité manifestées durant l’année 1996 afin de maintenir une situation de marché ordonnée » (considérant 202 de la décision attaquée).

221    En second lieu, la requérante relève qu’il ressort des tableaux relatifs aux années 1997 et 1998 que Leali recommandait rarement un objectif de prix et qu’un tel objectif était, en tout état de cause, systématiquement ignoré par le marché. L’existence d’une entente sur les prix de base après 1996 n’apparaîtrait pas clairement, étant donné que la seule année au cours de laquelle les prix sembleraient correspondre aux niveaux pratiqués par Leali serait l’année 2000. À cet égard, les tarifs publiés en vertu de la réglementation CECA seraient largement diffusés, en sorte qu’il ne serait pas possible que les concurrents d’une entreprise puissent rester dans l’ignorance de la décision de celle-ci de ne pas suivre la politique de prix ayant éventuellement été concertée, ce qui équivaudrait à une prise de distance de l’entreprise par rapport à l’entente.

222    Un tel argument doit lui aussi être rejeté. Outre que la requérante ne prétend même pas que l’entente a subi une interruption entre 1997 et 1998, force est de constater, d’une part, qu’elle ne conteste pas la réalité des comportements, relatifs notamment aux années 1997 et 1998, visés au considérant 556 de la décision attaquée (voir point 201 ci-dessus) et, d’autre part, que les éléments avancés par la requérante ne sauraient en tout état de cause démontrer une telle interruption, pour les motifs exposés au point 213 ci-dessus.

223    Eu égard aux développements qui précèdent il y a lieu de rejeter le moyen dans son ensemble.

 Sur le moyen tiré de la violation des lignes directrices de 1998, des principes d’égalité de traitement et de proportionnalité et de l’obligation de motivation dans l’appréciation de la conduite de la requérante et la fixation du montant de l’amende

224    Dans le cadre du présent moyen, la requérante conteste la fixation du montant de l’amende. Premièrement, la fixation du montant de départ reposerait sur une définition erronée du marché géographique et sur une surévaluation des effets, potentiels ou concrets, de l’infraction. En appréciant la gravité de l’infraction, la Commission aurait également omis de prendre en considération plusieurs éléments importants, tels que la pression concurrentielle exercée par des produits de substitution des ronds à béton, la variation de la nature de l’entente dans le temps ainsi que la crise grave que traverserait le secteur en cause. Deuxièmement, la Commission se serait trompée dans l’évaluation du poids spécifique de la requérante sur le marché. Troisièmement, la Commission n’aurait pas dûment tenu compte de certaines circonstances atténuantes. Quatrièmement, la requérante invoque la durée excessive de la procédure. Enfin, cinquièmement, la requérante prétend que le montant de l’amende doit être réduit eu égard à l’absence de caractère continu de l’infraction et à la prescription des faits antérieurs à 1996.

 Observations liminaires

225    Il convient de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence constante que la Commission bénéficie d’un large pouvoir d’appréciation pour ce qui est de la méthode de calcul du montant des amendes. Cette méthode, circonscrite par les lignes directrices de 1998, comporte différents éléments de flexibilité permettant à la Commission d’exercer son pouvoir d’appréciation en conformité avec les dispositions de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 (voir, en ce sens, arrêt Papierfabrik August Koehler e.a./Commission, point 122 supra, point 112, et la jurisprudence citée).

226    La gravité des infractions au droit de la concurrence de l’Union doit être établie en fonction d’un grand nombre d’éléments, tels que, notamment, les circonstances particulières de l’affaire, son contexte et la portée dissuasive des amendes, et ce sans qu’ait été établie une liste contraignante ou exhaustive de critères devant obligatoirement être prise en compte (arrêts de la Cour du 19 mars 2009, Archer Daniels Midland/Commission, C‑510/06 P, Rec. p. I‑1843, point 72, et Prym et Prym Consumer/Commission, point 122 supra, point 54).

227    Ainsi qu’il a été exposé au point 33 ci-dessus, la Commission a, en l’espèce, déterminé le montant des amendes en faisant application de la méthode définie dans les lignes directrices de 1998.

228    Si les lignes directrices de 1998 ne sauraient être qualifiées de règle de droit à l’observation de laquelle l’administration serait, en tout cas, tenue, elles énoncent toutefois une règle de conduite indicative de la pratique à suivre dont l’administration ne peut s’écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe d’égalité de traitement (voir arrêt de la Cour du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 209, et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal du 8 octobre 2008, Carbone-Lorraine/Commission, T‑73/04, Rec. p. II‑2661, point 70).

229    En adoptant de telles règles de conduite et en annonçant par leur publication qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, la Commission s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d’une violation de principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime (voir arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 228 supra, point 211, et la jurisprudence citée ; arrêt Carbone-Lorraine/Commission, point 228 supra, point 71).

230    En outre, les lignes directrices de 1998 déterminent, de manière générale et abstraite, la méthodologie que la Commission s’est imposée aux fins de la fixation du montant des amendes et assurent, par conséquent, la sécurité juridique des entreprises (arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 228 supra, points 211 et 213).

231    Conformément aux lignes directrices de 1998, la méthodologie applicable pour le calcul du montant de l’amende repose sur la fixation d’un montant de base auquel s’appliquent des majorations pour tenir compte des circonstances aggravantes et des diminutions pour tenir compte des circonstances atténuantes.

232    Selon le point 1 des lignes directrices de 1998, le montant de base est déterminé en fonction de la gravité et de la durée de l’infraction.

233    S’agissant de l’appréciation de la gravité de l’infraction, les lignes directrices de 1998 indiquent, au point 1 A, premier et deuxième alinéas, ce qui suit :

« [L]’évaluation du caractère de gravité de l’infraction doit prendre en considération la nature propre de l’infraction, son impact concret sur le marché lorsqu’il est mesurable et l’étendue du marché géographique concerné. Les infractions seront ainsi classées en trois catégories permettant de distinguer les infractions peu graves, les infractions graves et les infractions très graves. »

234    Il ressort des lignes directrices de 1998 que les infractions peu graves pourront, par exemple, consister en des « restrictions, le plus souvent verticales, visant à limiter les échanges, mais dont l’impact sur le marché reste limité, ne concernant en outre qu’une partie substantielle, mais relativement étroite du marché communautaire » (point 1 A, deuxième alinéa, premier tiret, des lignes directrices de 1998). Quant aux infractions graves, la Commission précise qu’« il s’agira le plus souvent de restrictions horizontales ou verticales de même nature que dans le cas [des infractions peu graves], mais dont l’application est plus rigoureuse, dont l’impact sur le marché est plus large et qui peuvent produire leurs effets sur des zones étendues du marché commun ». Elle indique également qu’il pourrait « s’agir de comportements abusifs de position dominante » (point 1 A, deuxième alinéa, second tiret, des lignes directrices de 1998). S’agissant des infractions très graves, la Commission indique qu’il s’agit « pour l’essentiel de restrictions horizontales de type ‘cartels de prix’ et de quotas de répartition des marchés, ou autres pratiques portant atteinte au bon fonctionnement du marché intérieur, telles que celles visant à cloisonner les marchés nationaux ou d’abus caractérisés de position dominante d’entreprise en situation de quasi-monopole » (point 1 A, deuxième alinéa, troisième tiret, des lignes directrices de 1998).

235    La Commission précise également que, d’une part, à l’intérieur de chacune de ces catégories, et notamment pour les catégories dites « graves » et « très graves », l’échelle des sanctions retenues permettra de différencier le traitement qu’il convient d’appliquer aux entreprises selon la nature des infractions commises et, d’autre part, qu’il est nécessaire de prendre en considération la capacité économique effective des auteurs d’infraction à créer un dommage important aux autres opérateurs, notamment aux consommateurs, et de déterminer le montant de l’amende à un niveau qui lui assure un caractère suffisamment dissuasif (point 1 A, troisième et quatrième alinéas, des lignes directrices de 1998).

236    Selon les lignes directrices de 1998, pour les infractions « très graves », le montant de départ envisageable des amendes va au-delà de 20 millions d’euros ; pour les infractions « graves », celui-ci peut varier entre 1 et 20 millions d’euros ; enfin, pour les infractions « peu graves », le montant de départ envisageable des amendes est compris entre 1 000 euros et 1 million (point 1 A, deuxième alinéa, premier à troisième tiret, des lignes directrices de 1998).

237    Pour ce qui concerne la durée de l’infraction, selon le point 1 B des lignes directrices de 1998, celle-ci devrait être prise en considération de manière à distinguer :

–        les infractions de courte durée (en général inférieure à un an), pour lesquelles aucun montant additionnel n’est prévu ;

–        les infractions de moyenne durée (en général de un à cinq ans), pour lesquelles un montant pouvant aller jusqu’à 50 % du montant retenu pour la gravité de l’infraction est prévu ;

–        les infractions de longue durée (en général au-delà de cinq ans), pour lesquelles un montant pouvant être fixé pour chaque année à 10 % du montant retenu pour la gravité de l’infraction est prévu.

238    Enfin, ainsi que la Cour l’a rappelé dans ses arrêts du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑389/10 P, non encore publié au Recueil, point 129), et du 8 décembre 2011, KME e.a./Commission (C‑272/09 P, non encore publié au Recueil, point 102), il appartient au juge de l’Union d’effectuer le contrôle de légalité qui lui incombe sur la base des éléments apportés par la partie requérante au soutien des moyens invoqués. Lors de ce contrôle, le juge ne saurait s’appuyer sur la marge d’appréciation dont dispose la Commission, ni en ce qui concerne le choix des éléments pris en considération lors de l’application des critères mentionnés dans les lignes directrices de 1998, ni en ce qui concerne l’évaluation de ces éléments pour renoncer à exercer un contrôle approfondi tant de droit que de fait.

239    C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’examiner le présent moyen.

 Sur la fixation du montant de départ de l’amende

240    La requérante soutient que la Commission, en se concentrant sur l’objet de l’entente, sans mener une enquête effective sur tous les autres critères d’appréciation de l’impact d’une entente anticoncurrentielle, a donné une interprétation très restrictive des lignes directrices de 1998 et a ignoré la jurisprudence de la Cour. Il en découlerait un préjudice pour toutes les entreprises concernées, qui subiraient une condamnation à des amendes très élevées et disproportionnées au regard des caractéristiques de l’affaire en cause.

–       Sur l’étendue géographique du marché en cause

241    La requérante soutient que la Commission affirme, de manière succincte et sans démonstration, que l’appréciation de la gravité de l’infraction ne saurait être affectée par le fait que ses effets se seraient limités au seul territoire italien. La conclusion figurant à cet égard au considérant 592 de la décision attaquée serait dépourvue de motivation appropriée et ne pourrait être partagée.

242    Aux considérants 47 à 60 de la décision attaquée, la Commission a défini le marché géographique en cause des ronds à béton crantés en barres ou en rouleaux comme étant le territoire de l’Italie. Aux fins de la définition du marché géographique, la Commission s’est référée au fait que le produit provenant d’autres zones géographiques a représenté, sur la base des données de l’office statistique de l’Union européenne (Eurostat) (considérant 26 de la décision attaquée), entre 0 et 6 % du total des ventes sur le territoire italien, en sorte que les flux du produit vers l’Italie ont été très limités au cours de la période en cause. Elle s’est également référée au manque structurel d’intérêt économique pour les entreprises des autres États membres à vendre des ronds à béton en Italie (considérant 50 de la décision attaquée).

243    S’agissant des conséquences de la limitation des effets de l’entente au seul territoire italien, la Commission a indiqué qu’une entente ayant pour objet la fixation des prix, mise en œuvre de différentes manières, notamment en ayant recours à la limitation ou au contrôle de la production ou des ventes, constituait une infraction très grave au droit de l’Union. Elle a ajouté que, toutefois, l’entente avait eu des effets sur une partie limitée du marché commun, en l’occurrence la totalité du territoire de l’Italie (considérant 591 de la décision attaquée).

244    La Commission a cependant estimé que la limitation des effets de l’entente au seul marché italien ne permettait pas de réduire la gravité de l’infraction de « très grave » à « grave », car il convenait de tenir compte de l’importance de la production italienne. Ainsi, l’Italie aurait été le premier pays producteur de ronds à béton de la Communauté. En outre, le chiffre d’affaires des entreprises destinataires de la présente décision aurait représenté plus de 80 % du marché en 2000 et aurait été de l’ordre de 900 millions d’euros en 2000-2001. Enfin, l’affirmation des parties selon laquelle l’entente n’avait eu aucun effet n’aurait pas pu être retenue (considérant 592 de la décision attaquée). La Commission a finalement indiqué que le fait que l’entente avait eu un objet anticoncurrentiel devait en tout cas peser davantage pour la qualification de l’infraction que l’absence d’effets constatés (considérant 595 de la décision attaquée).

245    Nonobstant ce qui précède, la Commission a relevé, au considérant 599 de la décision attaquée, que, sans préjudice du caractère très grave de l’infraction, elle avait tenu compte, lors de la détermination du montant de départ de l’amende, des caractéristiques spécifiques de la présente affaire et, en l’occurrence, du fait qu’elle portait sur un marché national qui était soumis, à l’époque des faits, à une réglementation particulière du traité CECA et sur lequel les entreprises destinataires de la décision détenaient, dans les premiers temps de l’infraction, des parts limitées.

246    À titre liminaire, il convient de souligner que la requérante conteste uniquement la définition du marché géographique en cause aux fins d’apprécier la gravité de l’infraction et la fixation du montant de l’amende.

247    En premier lieu, en ce qui concerne les développements à cet égard dans la décision attaquée (voir points 242 à 245 ci-dessus), il y a lieu de rejeter le grief de la requérante tiré d’une prétendue insuffisance de motivation quant à la prise en compte de l’étendue du marché géographique en cause aux fins d’établir la gravité de l’infraction.

248    En deuxième lieu, la requérante formule plusieurs arguments visant à démontrer que le marché des ronds à béton a une dimension communautaire, sur lequel les entreprises en cause n’auraient jamais détenu une part de marché supérieure à 25 %. Ainsi, sur la base d’une définition erronée du marché géographique aux fins de l’appréciation de la gravité de l’infraction, la Commission aurait surévalué les effets concrets ou potentiels de l’entente (considérant 593 de la décision attaquée).

249    Il doit être rappelé à cet égard qu’il ressort d’une jurisprudence constante que l’effet d’une pratique anticoncurrentielle n’est pas un critère déterminant dans l’appréciation de la gravité d’une infraction. Des éléments relevant de l’aspect intentionnel peuvent avoir plus d’importance que ceux relatifs auxdits effets, surtout lorsqu’il s’agit d’infractions intrinsèquement graves telles que la fixation des prix (voir arrêt Prym et Prym Consumer/Commission, point 122 supra, point 96, et arrêt du Tribunal du 13 juillet 2011, General Technic-Otis e.a./Commission, T‑141/07, T‑142/07, T‑145/07 et T‑146/07, Rec. p. II‑4977, point 159, et la jurisprudence citée).

250    C’est ainsi que la nature de l’infraction joue un rôle primordial, notamment, pour caractériser les infractions de « très graves ». Il résulte de la description des infractions très graves par les lignes directrices de 1998 que des accords ou des pratiques concertées visant notamment, comme en l’espèce, la fixation des prix peuvent emporter, sur le seul fondement de leur nature propre, la qualification de « très graves », sans qu’il soit nécessaire de caractériser de tels comportements par un impact ou une étendue géographique particuliers (voir, en ce sens, arrêts de la Cour Prym et Prym Consumer/Commission, point 122 supra, point 75, et du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C‑125/07 P, C‑133/07 P, C‑135/07 P et C‑137/07 P, Rec. p. I‑8681, point 103). Cette conclusion est corroborée par le fait que, si la description des infractions graves mentionne expressément l’impact sur le marché et les effets sur des zones étendues du marché commun, celle des infractions très graves, en revanche, ne mentionne aucune exigence d’impact concret sur le marché ni de production d’effets sur une zone géographique particulière (voir arrêt General Technic-Otis e.a./Commission, point 249 supra, point 160, et la jurisprudence citée).

251    Partant, au vu de leur objet, les infractions visées par la décision attaquée sont, par nature, très graves, même s’il devait être établi que les entreprises en cause ont détenu une part de marché qui aurait été inférieure à 25 % sur le marché communautaire des ronds à béton. Les arguments de la requérante visant à démontrer la dimension nationale du marché en cause sont, partant, inopérants en l’espèce aux fins de contester la qualification de l’infraction de « très grave ».

252    En troisième lieu, la requérante affirme que, même en admettant que la définition nationale du marché géographique soit correcte, les conclusions de la Commission quant à la gravité de l’infraction seraient contraires à sa propre pratique décisionnelle, selon laquelle elle qualifierait de seulement « graves » des infractions, même très importantes, telles que des restrictions horizontales, par leur objet, lorsqu’elles sont commises dans un contexte limité ou n’ont de toute manière pas d’effet sur le fonctionnement du marché intérieur. La requérante se réfère à cet égard à la décision 1999/210/CE de la Commission, du 14 octobre 1998, relative à une procédure d’application de l’article [81 CE] (affaire IV/F-3/33.708 – British Sugar plc, affaire IV/F-3/33.709 – Tate & Lyle plc, affaire IV/F-3/33.710 – Napier Brown & Company Ltd, affaire IV/F-3/33.711 – James Budgett Sugars Ltd) (JO 1999, L 76, p. 1), à la décision 2003/25/CE de la Commission, du 11 décembre 2001, relative à une procédure ouverte au titre de l’article 81 [CE] (affaire COMP/E-1/37.919 (ex. 37.391) – Frais bancaires pour la conversion de monnaies de la zone euro – Allemagne) (JO 2003, L 15, p. 1), et au communiqué de presse IP/02/1139 du 24 juillet 2002, relatif à l’affaire qui a ensuite fait l’objet de la décision 2003/355/CE de la Commission, du 9 avril 2003, modifiant la décision 2003/207/CE relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] (affaire COMP/36.700 – Gaz médicaux et industriels) (JO L 123, p. 49).

253    Un tel argument ne saurait toutefois être accueilli.

254    Il résulte en effet d’une jurisprudence constante qu’une pratique décisionnelle de la Commission ne saurait servir de cadre juridique aux amendes en matière de concurrence (arrêts de la Cour du 21 septembre 2006, JCB Service/Commission, C‑167/04 P, Rec. p. I‑8935, points 201 et 205, et Britannia Alloys & Chemicals/Commission, point 170 supra, point 60 ; arrêt General Technic-Otis e.a./Commission, point 249 supra, point 163).

255    Par ailleurs, il ressort également de la jurisprudence que l’étendue du marché géographique ne représente qu’un des trois critères pertinents, selon les lignes directrices de 1998, aux fins de l’appréciation globale de la gravité de l’infraction. Parmi ces critères interdépendants, la nature de l’infraction joue un rôle primordial. En revanche, l’étendue du marché géographique n’est pas un critère autonome en ce sens que seules des infractions concernant plusieurs États membres seraient susceptibles de recevoir la qualification de « très graves ». Ni le traité CE, ni le règlement nº 1/2003, ni les lignes directrices de 1998, ni la jurisprudence ne permettent de considérer que seules des restrictions géographiquement très étendues peuvent être qualifiées ainsi. En outre, le territoire entier d’un État membre, même s’il est, en comparaison avec les autres États membres, relativement petit, constitue, en tout état de cause, une partie substantielle du marché commun (arrêt de la Cour du 9 novembre 1983, Nederlandsche Banden-Industrie-Michelin/Commission, 322/81, Rec. p. 3461, point 28 ; arrêts du Tribunal du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, Rec. p. II‑5169, point 311, et General Technic-Otis e.a./Commission, point 249 supra, point 164). Dès lors que l’entente en cause couvrait l’ensemble du territoire de l’Italie, il doit être considéré qu’elle représentait une partie substantielle du marché commun.

256    La requérante ne saurait soutenir à cet égard que, « [p]our ce qui concerne l’importance de la production italienne, l’important ne serait pas tant la part de la production communautaire détenue par les producteurs italiens, que l’importance du marché italien dans la Communauté », qui ne serait pas telle que la décrit la Commission, étant donné que les parties auraient exporté jusqu’à 30 % de leur production, une telle donnée n’étant nullement étayée et étant en tout état de cause sans pertinence.

257    Elle ne saurait davantage se fonder sur le chiffre d’affaires prétendument plus important des entreprises en cause dans les décisions de la Commission mentionnées au point 252 ci-dessus, ni sur le fait que les marchés nationaux en cause dans ces décisions représenteraient aussi une part significative du marché commun, pour les motifs exposés au point 254 ci-dessus.

258    Il s’ensuit que c’est à tort que la requérante affirme que la Commission aurait dû qualifier l’entente de seulement « grave ».

259    Eu égard à l’ensemble des développements qui précèdent, il y a lieu de rejeter le présent grief de la première branche du présent moyen.

–       Sur l’impact de l’entente sur le marché

260    La requérante fait valoir que la Commission n’a pas correctement apprécié les effets de l’entente sur le marché.

261    À titre liminaire, s’agissant de l’obligation ou non pour la Commission d’établir, aux fins du calcul du montant de l’amende, l’existence d’un impact concret de l’infraction sur le marché, il convient de rappeler que, si cet impact est un élément à prendre en considération pour évaluer la gravité de l’infraction, il s’agit d’un critère parmi d’autres, tels que la nature propre de l’infraction et l’étendue du marché géographique. De même, il ressort du point 1 A, premier alinéa, des lignes directrices de 1998 que cet impact est à prendre en considération uniquement lorsqu’il est mesurable (arrêts de la Cour du 9 juillet 2009, Archer Daniels Midland/Commission, C‑511/06 P, Rec. p. I‑5843, point 125, et Prym et Prym Consumer/Commission, point 122 supra, point 74 ; arrêts du Tribunal du 9 juillet 2003, Archer Daniels Midland et Archer Daniels Midland Ingredients/Commission, T‑224/00, Rec. p. II‑2597, point 184, et du 13 juillet 2011, ThyssenKrupp Liften Ascenseurs e.a./Commission, T‑144/07, T‑147/07 à T‑150/07 et T‑154/07, Rec. p. II‑5129, point 207).

262    Pour ce qui concerne la prise en compte des effets de l’entente pour la détermination du montant de l’amende infligée aux entreprises en cause, premièrement, la Commission a rappelé, aux considérants 589 et 595 de la décision attaquée, que l’effet qu’a pu avoir un accord ou une pratique concertée sur le jeu normal de la concurrence n’était pas un critère déterminant dans l’appréciation du montant adéquat de l’amende et que des éléments relevant de l’aspect intentionnel, et donc de l’objet d’un comportement, peuvent en effet avoir plus d’importance que ceux relatifs à ses effets, surtout lorsqu’ils ont trait à des infractions intrinsèquement graves, telles que la fixation des prix et la répartition des marchés. Or, l’infraction constatée en l’espèce constituerait une infraction particulièrement grave au droit de l’Union (considérant 591 de la décision attaquée).

263    Deuxièmement, la Commission a considéré, au considérant 520 de la décision attaquée, que l’affirmation des parties selon laquelle l’entente n’avait eu aucun effet ne pouvait pas être retenue. La Commission s’est à cet effet référée aux considérants 513 à 524 de la décision attaquée, dans lesquels elle a examiné les effets concrets de l’entente et a conclu que celle-ci avait influencé le prix de vente pratiqué par les producteurs de ronds à béton en Italie, même si les mesures prises au sein de l’entente n’avaient pas toujours immédiatement produit les résultats espérés par les entreprises qui y participaient. La Commission a également relevé que l’incidence insuffisante de certaines initiatives concernant les prix avait également conduit les entreprises en cause à les combiner avec d’autres mesures sur les volumes ou à modifier les mesures prises sur les prix. Par ailleurs, la Commission a souligné que les entreprises en cause représentaient environ 21 % du marché italien des ronds à béton en 1989, 60 % en 1995 et 83 % en 2000, ce qui a rendu l’effet sur le marché d’augmentations de prix concertées de plus en plus important. Enfin, la Commission a ajouté que le fait que les initiatives prises en cette matière étaient, dès 1989, communiquées à l’ensemble des producteurs de ronds à béton accroissait l’importance de ces effets durant les premières années de l’entente (considérant 519 de la décision attaquée).

264    Troisièmement, la Commission a souligné que la circonstance que l’entente avait eu des effets sur une partie limitée du marché commun, en l’occurrence la totalité du territoire de l’Italie, n’atténuait pas la gravité de l’infraction, eu égard à l’importance de la production italienne (considérant 592 de la décision attaquée).

265    La Commission a toutefois tenu compte, lors de la détermination du montant de départ de l’amende, du fait que l’entente avait porté sur un marché national qui était soumis, à l’époque des faits, à une réglementation particulière du traité CECA et sur lequel les entreprises en cause détenaient, dans les premiers temps de l’infraction, des parts limitées (considérant 599 de la décision attaquée).

266    En premier lieu, la requérante affirme que, lors de la procédure administrative, elle a produit des données techniques et économiques, non contestées par la Commission, à l’appui de circonstances ayant une incidence significative sur l’appréciation de l’impact effectif de l’entente présumée sur le marché. Ces données concerneraient les variations de prix des ronds à béton en Italie, qui auraient été conformes aux variations enregistrées sur d’autres marchés de l’Union, la réduction drastique des opérateurs sur le marché, la différence des prix pratiqués sur le marché par les entreprises en cause et la diminution de 32 % des prix des ronds à béton sur le marché italien au cours de la période allant de 1989 à 2000, malgré des coûts de production pratiquement inchangés.

267    À titre liminaire, il doit être relevé que la requérante se réfère, dans sa requête, à de prétendues données techniques et économiques qui n’auraient pas été contestées par la Commission au cours de la procédure administrative, sans toutefois préciser ou produire les données en cause, ni étayer son argument. Si, certes, dans sa réplique, la requérante renvoie à l’étude Lear, « déjà citée précédemment », force est de constater que, dans la requête, les seuls renvois globaux à cette étude figurent, d’une part, dans la partie factuelle de celle-ci, qui concerne spécifiquement l’étendue du marché géographique en cause, pour étayer l’affirmation de la requérante selon laquelle, pendant la période concernée, les prix italiens des ronds à béton auraient connu la même évolution que dans les autres États membres et, d’autre part, dans la branche du présent moyen relative à l’étendue géographique du marché en cause, relative à la fixation du montant de départ de l’amende au regard de l’étendue géographique du marché en cause. L’étude Lear n’a dès lors pas été invoquée aux fins d’apporter la preuve des circonstances que la requérante invoque, mentionnées au point 266 ci-dessus. Par ailleurs, un tel renvoi ne peut pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui doivent figurer dans la requête (arrêt de la Cour du 31 mars 1992, Commission/Danemark, C‑52/90, Rec. p. I‑2187, point 17 ; ordonnances du Tribunal du 29 novembre 1993, Koelman/Commission, T‑56/92, Rec. p. II‑1267, point 21, et Asia Motor France e.a./Commission, point 54 supra, point 49), et, en outre, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier dans les annexes les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (arrêts du Tribunal du 7 novembre 1997, Cipeke/Commission, T‑84/96, Rec. p. II‑2081, point 34, et du 21 mars 2002, Joynson/Commission, T‑231/99, Rec. p. II‑2085, point 154).

268    En tout état de cause, premièrement, la requérante ne saurait soutenir que la Commission n’a pas contesté les données qu’elle aurait produites dans le cadre de la procédure administrative. Il doit être souligné que la Commission a tenu compte de l’étude Lear aux considérants 50 à 53, 62, 513, 521 et 585 de la décision attaquée. Dans le cadre de son évaluation, elle a notamment indiqué que l’étude Lear n’invalidait pas sa position, selon laquelle il n’était pas intéressant pour les entreprises des autres États membres d’exporter vers l’Italie (considérant 50 de la décision attaquée), et que la théorie des flux avancée par l’étude Lear était fondée « sur des affirmations d’école, sur des théories économiques et non sur des considérations de fait » (considérant 51 de la décision attaquée).

269    S’agissant en particulier des conclusions de l’étude Lear sur les effets de l’entente, la Commission a relevé, au considérant 513 de la décision attaquée, ce qui suit :

« […L]a Commission, ayant comme points de référence les prix moyens des suppléments de décembre 1989-janvier 1990 et mai-juin 2000 […], estime que l’augmentation du prix des suppléments est d’au moins 40 % en termes réels. Cela signifie que, même si on voulait considérer comme importantes les réductions du prix de base en termes réels, les données ne semblent pas supporter la thèse de l’étude Lear d’une réduction du prix total du 32 % en termes réels. De toute façon, l’étude Lear se fonde sur des hypothèses nécessaires à la reconstruction d’une partie des données (relatives à la première période) qui n’étaient pas disponibles. »

270    Or, la requérante ne fournit, dans le présent recours, aucun élément afin de contredire ces affirmations. En outre, en réponse à l’argument des parties selon lequel l’étude Lear serait arrivée à la conclusion que les comportements en cause n’avaient eu aucun effet sur le marché, au considérant 521 de la décision attaquée, la Commission a rappelé la jurisprudence du Tribunal selon laquelle une analyse économique ne pouvait pas effacer la réalité incontournable de preuves documentaires (arrêt Cimenteries CBR e.a./Commission, point 60 supra, point 1088).

271    Deuxièmement, force est de constater, à l’instar de la Commission, que la requérante n’apporte aucun élément de preuve au soutien de son affirmation selon laquelle le prix des ronds à béton en Italie aurait varié de manière parfaitement conforme aux variations enregistrées sur d’autres marchés de l’Union, à l’exception d’un renvoi global à l’étude Lear, effectué pour soutenir un argument qui ne concerne pas les variations du prix des ronds à béton en Italie par rapport aux autres États membres (voir point 267 ci-dessus).

272    Troisièmement, la prétendue fermeture, alléguée, mais non étayée, de nombreux sites de production, qui aurait entraîné la réduction drastique du nombre d’opérateurs sur le marché, ne permet pas non plus de démontrer l’absence d’effets de l’entente sur le marché. À cet égard ne saurait être retenu l’argument de la requérante selon lequel il serait difficile d’envisager l’existence d’une entente efficace en présence d’une réduction rapide et significative du nombre d’entreprises actives sur le marché sur une période de temps limitée, dès lors que, ainsi que le souligne la Commission, la réduction du nombre d’entreprises dans un secteur peut découler d’un nombre important de facteurs autres que la prétendue absence d’effets sur le marché de pratiques anticoncurrentielles auxquelles elles auraient participé.

273    Quatrièmement, la requérante affirme que les tableaux annexés à la décision et le « rapport économique » indiquent clairement que les prix pratiqués par les entreprises étaient très souvent complètement différents, ce qui résulterait des factures transmises par la requérante à la Commission pendant la procédure administrative.

274    Un tel argument ne saurait toutefois être accueilli.

275    Outre que cet argument n’est pas non plus étayé, il doit être rappelé que, selon la jurisprudence, il y a lieu de présumer, sous réserve de la preuve contraire qu’il incombe aux opérateurs intéressés de rapporter, que les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché. Il en est d’autant plus ainsi lorsque la concertation a lieu sur une base régulière au cours d’une longue période (arrêt Commission/Anic Partecipazioni, point 159 supra, point 121 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 8 juillet 1999, Hüls/Commission, C‑199/92 P, Rec. p. I‑4287, point 162, et la jurisprudence citée).

276    Par ailleurs, les factures éventuellement produites par la requérante au cours de la procédure administrative ne sauraient constituer la preuve du fait que la requérante n’a pas tenu compte des informations échangées avec les autres opérateurs, dès lors que, ainsi que la Commission l’a relevé au considérant 494 de la décision attaquée, sur la base d’échantillons, il n’est pas possible de vérifier si le prix moyen pratiqué correspond au prix de barème ou diverge de celui-ci, puisqu’il n’est pas possible de déterminer, par exemple, quelles factures correspondent à des clients normaux ou privilégiés. Ainsi, il peut seulement être affirmé que, pour les transactions attestées par des documents, les prix était différents, mais cela ne démontre en rien que les prix pratiqués pour l’ensemble des transactions réalisées durant les jours ou les périodes suivant les augmentations aient été différents de ceux des barèmes.

277    Cinquièmement, la requérante affirme que, pendant la période en cause, le prix des ronds à béton a connu une diminution de 32 %, en dépit de coûts de production demeurés inchangés.

278    Outre que cet argument n’est, lui non plus, pas étayé, il doit être relevé que les conclusions de l’étude Lear, à laquelle se réfère la requérante, ont été écartées par la Commission aux considérants 513, 514, 521 à 523 et 585 de la décision attaquée, celle-ci ayant relevé que les données ne semblaient pas supporter la thèse de l’étude Lear d’une réduction du prix total de 32 % en termes réels (voir également point 268 ci-dessus).

279    À cet égard, la requérante a affirmé, dans sa réplique, sans autres explications, ce qui suit :

« [E]n utilisant les tableaux joints à la Décision, on note ce qui suit. Le 1er janvier 1990, le prix constaté pour le supplément de diamètre, pour un rond à béton de 16 pouces, était d’environ 125 ITL/kg, tandis que le prix de base était d’environ 320 ITL/kg, pour un total de 445 ITL/kg. En réévaluant le prix en question au 30 juin 2000 (c’est-à-dire à l’époque de la fin de l’infraction), on arrive à un montant d’environ 655 ITL/kg. Au contraire, toujours sur la base des tableaux joints à la Décision, le prix du supplément pour le même produit était monté à 290 ITL, tandis que le prix de base était de seulement 210 ITL, pour un total de 500 ITL/kg environ. La différence est de près de 24 % par rapport au prix réévalué. Cette donnée, basée sur les données figurant au tableau joint à la Décision, bien que très approximative, a été tellement importante qu’elle a annulé la pertinence de tout autre calcul éventuellement effectué sur l’augmentation des suppléments. »

280    À cet égard, il ressort de l’affirmation de la requérante que le prix du supplément pour un diamètre de 16 pouces est passé de 125 ITL/kg en 1989 à 290 en 2000, ce qui semble plutôt confirmer la constatation, figurant au considérant 515 de la décision attaquée, selon laquelle, entre 1989 et 2000, le niveau des prix des suppléments de dimension a été multiplié environ par deux. Lors de l’audience, la requérante a, certes, indiqué que l’augmentation du prix des suppléments avait été neutralisée par une diminution considérable du prix de base. Toutefois, comme indiqué au considérant 490 de la décision attaquée, le prix total des ronds étant composé du prix de base et du supplément, et ce dernier étant considéré comme hors concurrence et non négociable, l’augmentation du supplément se traduisait par une réduction de la variabilité du prix total et donc par une réduction de la marge d’incertitude de ce prix.

281    En deuxième lieu, la requérante soutient que la Commission a reconnu, au considérant 476 de la décision attaquée, que sur 20 cas de recommandations de prix par Federacciai ou Leali, les entreprises n’auraient respecté les indications reçues que dans 12 cas, ce qui ressortirait également des tableaux annexés à la décision attaquée. Pour les autres, la Commission se fonderait sur des déclarations de tiers pour soutenir que les recommandations auraient eu un impact sur les décisions des opérateurs. Or, pour rapporter la preuve des effets de l’entente, la Commission aurait dû procéder à une vérification détaillée des données du marché afin de déterminer si les entreprises concernées avaient effectivement suivi les prix recommandés.

282    Premièrement, il doit être relevé que le considérant 476 de la décision attaquée n’a pas le contenu que lui prête la requérante, celui-ci disposant que, « [d]ans l’arrêt Thyssen Stahl […], le Tribunal a constaté que ‘les entreprises concernées [avaie]nt exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d’une manière déterminée en matière de prix, à savoir de faire en sorte que les prix convenus lors des réunions en cause soient atteints ou, le cas échéant, maintenus’ » et qu’« “un tel concours de volontés constitu[ait] un ‘accord’ au sens de l’article 65, paragraphe 1, du traité” ». Ledit considérant indique, par ailleurs, que « [l]’affirmation du Tribunal s’applique, mutatis mutandis, aux circonstances dans lesquelles les entreprises ont exprimé leur volonté commune en matière de délais de paiement et de contrôle/limitation de la production ou des ventes ». Or, malgré une observation en ce sens de la Commission aux points 176 et 177 du mémoire en défense, la requérante n’a pas formulé la moindre correction sur ce point dans la réplique.

283    Deuxièmement, la requérante ne précise pas les prétendues déclarations de tiers qui auraient été utilisées par la Commission pour soutenir que les recommandations auraient eu un impact sur les décisions des opérateurs. Elle ne mentionne pas davantage les considérants pertinents de la décision attaquée, ce que la Commission a d’ailleurs également relevé dans son mémoire en défense, sans que la requérante y réponde dans la réplique. En vertu de l’article 21 du statut de la Cour et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, toute requête doit indiquer l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui (arrêt France Télécom/Commission, point 54 supra, point 166). Il s’ensuit que ce grief de la requérante est irrecevable.

284    Troisièmement, la requérante ne saurait soutenir que, pour rapporter la preuve des effets de l’entente, la Commission aurait dû procéder à une vérification détaillée des données du marché afin de déterminer si les entreprises concernées avaient effectivement suivi les prix recommandés. Selon la jurisprudence, il est légitime pour la Commission de déduire que l’infraction a eu des effets du fait que les membres de l’entente avaient pris des mesures pour appliquer les prix convenus, par exemple, en les annonçant aux clients, en donnant à leurs employés l’instruction de les utiliser comme base de négociation et en surveillant leur application par leurs concurrents et leurs propres services de vente. En effet, pour conclure à un impact sur le marché, il suffit que les prix convenus aient servi de base pour la fixation des prix de transaction individuels, limitant ainsi la marge de négociation des clients (arrêts du Tribunal du 17 décembre 1991, Hercules Chemicals/Commission, T‑7/89, Rec. p. II‑1711, points 340 et 341 ; du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, point 146 supra, points 743 à 745, et Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, point 255 supra, point 285).

285    En revanche, il ne saurait être exigé de la Commission, lorsque la mise en œuvre d’une entente est établie, de démontrer systématiquement que les accords ont effectivement permis aux entreprises concernées d’atteindre un niveau de prix de transaction supérieur à celui qui aurait prévalu en l’absence d’entente (arrêts du Tribunal Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, point 255 supra, point 286, et du 28 avril 2010, Gütermann et Zwicky/Commission, T‑456/05 et T‑457/05, Rec. p. II‑1443, point 129).

286    En troisième lieu, l’association nationale des entreprises de façonnage de fer (ci-après l’« Ansfer ») aurait signalé lors de la procédure administrative que le marché italien avait toujours été caractérisé par une véritable et forte concurrence et qu’elle n’avait jamais constaté de comportements anticoncurrentiels sur le marché italien des ronds à béton.

287    Un tel argument doit être rejeté dès lors que, ainsi que la Commission l’a souligné au considérant 524 de la décision attaquée, la déclaration de l’Ansfer ne pouvait pas effacer une donnée incontestable, consistant en des preuves attestées par des documents de l’infraction.

288    Eu égard aux développements qui précèdent, il y a lieu de rejeter le présent grief de la première branche du présent moyen.

–       Sur la pression concurrentielle exercée par les autres producteurs sur le marché des ronds à béton

289    La requérante soutient que, dans l’appréciation des effets de l’entente sur le marché, la Commission a totalement ignoré la pression concurrentielle exercée par les produits de substitution des ronds à béton. Il ressortirait de la décision 89/515/CEE de la Commission, du 2 août 1989, relative à une procédure d’application de l’article [81 CE] (IV/31.553 – Treillis soudés) (JO L 260, p. 1, ci-après la « décision Treillis soudés »), que d’autres produits, n’appartenant pas au marché des ronds à béton, ont exercé sur les prix des pressions tellement fortes qu’elles ont empêché les mesures adoptées d’avoir un effet significatif sur le marché. Aux fins de la détermination de la sanction, il conviendrait de déterminer la capacité potentielle de l’entente de nuire aux consommateurs, au regard notamment de l’existence de produits alternatifs.

290    Dans la décision attaquée, la Commission a indiqué que le marché du produit en cause est celui des ronds à béton crantés en barres ou en rouleaux, puisqu’il constitue un marché distinct de celui des autres produits longs en acier (considérant 28 de la décision attaquée). À cet égard, la Commission a ajouté, s’agissant spécifiquement du treillis soudé, que, « même s’il est utilisé dans le même secteur que les ronds à béton crantés (secteur de la construction), le treillis soudé n’est pas un produit pour l’armature de structures portantes ; c’est un produit de renforcement qui, dans quelques usages limités seulement (par exemple : armature des planchers et des murs non portants), peut remplacer et remplace généralement (dans la mesure où il permet une économie de temps et de main-d’œuvre et moins de déchets) ce qu’on appelle les ‘ronds de renforcement’ » (considérant 29 de la décision attaquée).

291    Pour ce qui concerne la prétendue contrainte concurrentielle exercée par le treillis soudé, la Commission a souligné, aux considérants 594 et 595 de la décision attaquée, ce qui suit :

« [A]u-delà des déclarations de nature générale, en particulier pour ce qui concerne la référence à la décision Treillis soudés, les parties n’ont pas démontré que d’autres produits, n’appartenant pas au marché des ronds à béton, ont exercé sur les prix des pressions tellement fortes qu’elles ont empêché les mesures adoptées d’avoir un effet significatif sur le marché. Même sans tenir compte du fait que, pour la Commission, l’entente a eu un effet restrictif sur la concurrence, le fait qu’elle ait eu un objet anticoncurrentiel, ce qui est très grave en soi, doit, en tout cas, peser davantage pour la qualification de l’infraction [de] très grave que l’absence d’effets constatés […] »

292    À titre liminaire, il convient de souligner que, alors même que la requérante affirme que la Commission a totalement ignoré la pression concurrentielle exercée par les produits de substitution des ronds à béton lors de la fixation des amendes, elle ne conteste pas la définition du marché de produits figurant aux considérants 28 à 46 de la décision attaquée. Or, ainsi qu’il ressort notamment du paragraphe 2 de la communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (JO 1997, C 372, p. 5), c’est la définition du marché qui permet d’identifier et de définir le périmètre à l’intérieur duquel s’exerce la concurrence entre les entreprises et doit permettre de déterminer s’il existe des concurrents réels, capables de peser sur le comportement des entreprises en cause ou de les empêcher d’agir indépendamment des pressions qu’exerce une concurrence effective.

293    Par ailleurs, la requérante se limite à invoquer, de manière spécifique, la pression concurrentielle qui serait exercée par le treillis soudé, et ce aux seules fins de démontrer que l’entente n’a pas eu les effets constatés dans la décision attaquée. Or, une telle argumentation ne serait susceptible d’être suivie que si, dans l’hypothèse où une telle pression concurrentielle du treillis soudé serait avérée, la Commission aurait été amenée à constater que l’entente n’avait pas eu d’impact sur le marché retenu par elle. En effet, seule une telle démonstration est de nature à invalider l’appréciation du montant de l’amende effectuée par la Commission en fonction de la gravité de l’infraction (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 septembre 2006, Archer Daniels Midland/Commission, T‑329/01, Rec. p. II‑3255, points 229 à 231).

294    En premier lieu, il y a lieu de souligner que, contrairement à ce soutient la requérante, la Commission n’a pas « totalement ignoré » l’éventuelle pression concurrentielle exercée par les produits de substitution des ronds à béton, et en particulier du treillis soudé (voir points 290 et 291 ci-dessus).

295    En deuxième lieu, force est de constater que la requérante n’apporte pas le moindre élément visant à démontrer que, au cours de la période infractionnelle dans la présente affaire, d’autres produits, quand bien même ils n’appartiendraient pas au marché des ronds à béton, ont exercé sur les prix des pressions tellement fortes qu’ils ont empêché les mesures adoptées d’avoir un effet significatif sur le marché.

296    En effet, la requérante se limite à affirmer que la Commission aurait tenu compte de l’interdépendance des ronds à béton et du treillis soudé aux fins du calcul du montant de l’amende dans la décision Treillis soudés. Or, ainsi qu’il a été rappelé au point 254 ci-dessus, selon une jurisprudence constante, la pratique décisionnelle de la Commission ne saurait servir de cadre juridique aux amendes en matière de concurrence. Elle dispose dans le domaine de la fixation des amendes d’un large pouvoir d’appréciation et elle n’est pas liée par les appréciations qu’elle a portées antérieurement (voir arrêt Erste Group Bank e.a./Commission, point 250 supra, point 123, et la jurisprudence citée).

297    Il s’ensuit que le fait que la Commission ait pu tenir compte, dans une décision antérieure, concernant une autre période infractionnelle (dans la décision Treillis soudés, la période infractionnelle s’étendait du 27 mai 1980 au 5 novembre 1985), aux fins du calcul du montant de l’amende, de l’interdépendance du treillis soudé et des ronds à béton ne lui imposait pas, à supposer qu’une telle interdépendance ait existé au cours de la période infractionnelle en l’espèce, ce qui n’est même pas allégué, de tenir compte de cet élément dans la fixation du montant de l’amende infligée à la requérante en l’espèce, d’autant plus que, dans la décision Treillis soudés, la Commission avait déjà souligné que le treillis soudé ne pouvait pas remplacer entièrement les ronds à béton (considérant 202 de la décision Treillis soudés).

298    En tout état de cause, il importe de constater qu’il ressort du système communautaire de sanctions pour violation des règles de concurrence, tel que mis en place par le règlement n° 1/2003 et interprété par la jurisprudence, que les ententes méritent, en raison de leur nature propre, les amendes les plus sévères. Leur éventuel impact concret sur le marché, notamment la question de savoir dans quelle mesure la restriction de concurrence a abouti à un prix de marché supérieur à celui qui aurait prévalu dans l’hypothèse d’une absence de cartel, n’est pas un critère déterminant pour la détermination du niveau des amendes. Il convient d’ajouter qu’il résulte des lignes directrices de 1998 que les accords ou les pratiques concertées visant notamment, comme en l’espèce, la fixation des prix peuvent, sur le seul fondement de leur nature propre, être qualifiés de « très graves », sans qu’il soit nécessaire de caractériser de tels comportements par un impact ou une étendue géographique particuliers. Cette conclusion est corroborée par le fait que, si la description des infractions « graves » mentionne expressément l’impact sur le marché et les effets sur des zones étendues du marché commun, celle des infractions « très graves », en revanche, ne mentionne aucune exigence d’impact concret sur le marché ni de production d’effets sur une zone géographique particulière (voir arrêt du Tribunal du 6 mai 2009, KME Germany e.a./Commission, T‑127/04, Rec. p. II‑1167, points 65 et 66, et la jurisprudence citée).

299    En l’espèce, l’entente en cause avait pour objet la fixation des prix, mise en œuvre de différentes manières, notamment en ayant recours à la limitation ou au contrôle de la production ou des ventes, et pouvait donc être qualifiée d’infraction très grave sans que la Commission soit tenue de démontrer un impact concret de celle-ci sur le marché.

300    Il s’ensuit que le présent grief de la première branche du présent moyen doit être rejeté.

–       Sur le changement de nature de l’entente au cours du temps

301    La requérante affirme que la Commission a reconnu, au considérant 597 de la décision attaquée, que l’entente avait été relativement moins grave avant 1995. Or, la Commission aurait appliqué, à tort, le même taux de majoration du montant de l’amende pour chacune des années de fonctionnement de l’entente présumée (considérant 607 de la décision attaquée), ce qui constituerait une violation du principe de non-discrimination, de même qu’un manquement à l’obligation de fournir, dans la décision attaquée, une motivation adéquate de son choix.

302    Dans la décision attaquée, la Commission a indiqué que, si, certes, alors que, avant 1995, l’entente pouvait être considérée comme étant « relativement moins grave », puisque les comportements étaient moins structurés et donc relativement moins dangereux pour la concurrence, la gravité de l’infraction s’était accrue par la suite, lorsque de nouvelles mesures restrictives, telles que le contrôle ou la réduction de la production ou des ventes, avaient été introduites. Selon la Commission, ce comportement, qui, dans les faits, était toujours lié à l’augmentation du prix, avait rendu l’entente encore plus structurée (considérant 597 de la décision attaquée).

303    La Commission a également indiqué que l’infraction avait duré plus de dix ans et demi pour l’ensemble des entreprises, à l’exception de Ferriere Nord, pour laquelle la durée de l’infraction avait été de plus de sept ans, et que, pour cette raison, le montant de l’amende serait augmenté de 105 % pour toutes les entreprises, à l’exception de Ferriere Nord, qui se verrait appliquer une augmentation de 70 % (considérant 607 de la décision attaquée).

304    En premier lieu, il convient de rappeler que les lignes directrices de 1998 établissent une distinction entre les infractions de courte durée (en général inférieure à un an), pour lesquelles le montant de départ retenu au titre de la gravité ne devrait pas être majoré, les infractions de moyenne durée (en général de un à cinq ans), pour lesquelles ce montant peut être majoré de 50 %, et les infractions de longue durée (en général au-delà de cinq ans), pour lesquelles ce montant peut être majoré pour chaque année de 10 % (point 1 B, premier alinéa, premier à troisième tiret, des lignes directrices de 1998).

305    Il ressort des points 153 à 222 ci-dessus que la requérante a participé à une entente unique et continue du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000, soit une période infractionnelle de plus de dix ans et six mois, correspondant à une infraction de longue durée.

306    C’est donc en application des règles que la Commission s’est imposées dans les lignes directrices de 1998 et sans violer le principe de non-discrimination que celle-ci a augmenté de 105 %, soit 10 % pour chaque année complète, le montant de départ de l’amende au titre de la durée de l’infraction (voir arrêt General Technic-Otis e.a./Commission, point 249 supra, point 229, et la jurisprudence citée).

307    En substance, l’argumentation de la requérante aboutit à confondre le critère de gravité et celui de durée prévus par l’article 23, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003. En effet, par son argumentation, elle met en cause l’augmentation du montant de départ de l’amende à concurrence de 10 % par an en se référant à des éléments liés à l’appréciation de la gravité de l’infraction (voir, en ce sens, arrêt General Technic-Otis e.a./Commission, point 249 supra, point 230).

308    En deuxième lieu, ainsi qu’il a été rappelé au point 235 ci-dessus, l’échelle des sanctions retenues par la Commission permet de différencier le traitement qu’il convient d’appliquer aux entreprises selon la nature des infractions commises. Or, en l’espèce, la Commission a jugé opportun de fixer le montant de départ de l’amende infligée à la requérante à 3,5 millions d’euros, soit moins d’un cinquième du seuil minimal de 20 millions d’euros qui est normalement prévu par les lignes directrices de 1998 pour ce type d’infraction très grave (voir point 1 A, deuxième alinéa, troisième tiret, des lignes directrices de 1998).

309    En troisième lieu, dès lors que la Commission a indiqué, au considérant 579 de la décision attaquée, qu’elle appliquerait les lignes directrices de 1998 pour le calcul du montant des amendes et qu’elle a mentionné, au considérant 597 de la décision attaquée, que l’infraction commise par la requérante avait duré plus de dix ans et demi et que, pour cette raison, le montant de l’amende serait augmenté de 105 %, il y a lieu de considérer que la décision est motivée à suffisance de droit.

310    Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le présent grief de la première branche du présent moyen.

–       Sur l’absence de réduction du montant de l’amende en raison de la grave crise qui a frappé le secteur

311    La requérante affirme, d’une part, que, eu égard à sa pratique décisionnelle, il est étonnant que la Commission n’ait reconnu aucune pertinence, lors de la détermination du montant de l’amende, à l’existence d’une très grave crise du secteur des ronds à béton au cours de la période infractionnelle et n’ait en rien motivé ce choix. La demande sur le marché italien des ronds à béton aurait diminué d’un tiers pendant la période allant de 1989 à 1999, entraînant une vive concurrence avec une chute vertigineuse des prix et la fermeture d’un grand nombre de sites de production. La requérante affirme, d’autre part, que la Commission n’aurait pas tenu compte, lors de l’adoption de la décision attaquée, des conditions extraordinaires dans lesquelles les entreprises condamnées auraient été plongées à ce moment-là.

312    En premier lieu, ainsi qu’il a été rappelé au point 254 ci-dessus, il résulte d’une jurisprudence constante qu’une pratique décisionnelle de la Commission ne saurait servir de cadre juridique aux amendes en matière de concurrence. Les arguments de la requérante fondés sur des décisions antérieures de la Commission sont partant dépourvus de pertinence.

313    En deuxième lieu, s’agissant de l’existence d’un contexte de crise au cours de la période infractionnelle, il doit être relevé que la Commission a indiqué, au considérant 64 de la décision attaquée, qu’elle connaissait le contexte économique du secteur de l’acier dans l’Union, et du rond à béton en particulier. Au considérant 68 de la décision attaquée, la Commission a également considéré, sans être contredite par la requérante, que, s’agissant des conditions de crise manifeste dans le secteur de la sidérurgie, les ronds à béton, qui ne rentrent plus dans le champ d’application du système de quotas depuis le 1er janvier 1986, avaient été exclus du « régime de surveillance », en raison du fait que les ronds à béton étaient pour plus de 80 % fabriqués par de petites entreprises à faibles coûts qui ne connaissaient normalement pas de difficultés. Or, la requérante ne fournit pas d’éléments permettant de remettre en cause cette conclusion.

314    Il ne saurait être considéré que la Commission a commis une erreur d’appréciation quant aux conséquences à tirer du contexte prétendument difficile du marché. En effet, le fait qu’un marché connaisse des difficultés économiques à un moment donné ne signifie en rien que l’infraction ne saurait être qualifiée de très grave (arrêt UPM-Kymmene/Commission, point 159 supra, point 147).

315    En troisième lieu, la requérante invoque les conditions extraordinaires dans lesquelles les entreprises condamnées auraient été plongées lors de l’adoption de la décision attaquée, sans toutefois étayer une telle affirmation. Il doit à cet égard être relevé qu’un tel argument est au demeurant dépourvu de pertinence aux fins d’établir la gravité de l’infraction et de fixer le montant de départ de l’amende.

316    Il y a lieu dès lors de rejeter le cinquième grief de la première branche du présent moyen, ainsi que la première branche dans son ensemble.

 Sur le caractère illégal de la détermination de la sanction infligée à la requérante et sur la détermination erronée du poids spécifique de la requérante sur le marché

317    La requérante conteste la répartition des entreprises en cause en catégories aux fins de la fixation du montant de départ de l’amende. Elle fait valoir que les parts de marché historiques sont paradoxalement plus grandes entre les entreprises d’une même catégorie qu’entre les différentes catégories, ce qui entraînerait des distorsions manifestes en termes de sanction. Les lignes directrices de 1998 prescriraient d’appliquer un traitement différencié en cas de disparité considérable dans la taille des entreprises qui commettent le même type d’infraction, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce. En l’espèce, la part de marché de la requérante serait de 2,9 % supérieure à celle d’IRO. Or, elle se serait vu infliger une amende de 50 % supérieure à celle de cet opérateur. Il en résulterait une disparité de traitement et une violation du principe de proportionnalité. Ainsi, la Commission aurait dû fixer pour toutes les entreprises (sauf peut-être pour Ferriere Nord) un montant de départ équivalent au montant de départ fixé pour IRO.

318    En premier lieu, il ressort des lignes directrices de 1998 que celles-ci prévoient l’appréciation de la gravité de l’infraction en tant que telle, sur la base de laquelle un montant de départ général peut être fixé (point 1 A, deuxième alinéa, des lignes directrices de 1998). En second lieu, la gravité est analysée par rapport à la nature des infractions commises et aux caractéristiques de l’entreprise concernée, notamment sa taille et sa position sur le marché pertinent, ce qui peut donner lieu à la pondération du montant de départ, au classement des entreprises en catégories et à la fixation d’un montant de départ spécifique (point 1 A, troisième à septième alinéa, des lignes directrices de 1998).

319    Il y a également lieu de rappeler que, dans le cadre du calcul du montant des amendes infligées au titre de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, un traitement différencié entre les entreprises concernées est inhérent à l’exercice des pouvoirs qui incombent à la Commission en vertu de cette disposition. En effet, dans le cadre de sa marge d’appréciation, la Commission est appelée à individualiser la sanction en fonction des comportements et des caractéristiques propres aux entreprises concernées afin de garantir, dans chaque cas d’espèce, la pleine efficacité des règles de la concurrence de l’Union (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, Rec. p. 1825, point 109 ; Britannia Alloys & Chemicals/Commission, point 170 supra, point 44, et du 18 juillet 2013, The Dow Chemical Company e.a./Commission, C‑499/11 P, non encore publié au Recueil, point 87).

320    C’est ainsi que les lignes directrices de 1998 disposent que, pour une infraction de gravité donnée, il peut convenir, dans les cas impliquant plusieurs entreprises comme les cartels, de pondérer le montant de départ général des amendes pour établir un montant de départ spécifique tenant compte du poids, et donc de l’impact réel, du comportement infractionnel de chaque entreprise sur la concurrence, notamment lorsqu’il existe une disparité considérable dans la dimension des entreprises auteurs d’une infraction de même nature (point 1 A, sixième alinéa, des lignes directrices de 1998). En particulier, il est nécessaire de prendre en considération la capacité économique effective des auteurs de l’infraction à créer un dommage important aux autres opérateurs, notamment aux consommateurs (point 1 A, quatrième alinéa, des lignes directrices de 1998).

321    Les lignes directrices de 1998 précisent également que le principe d’égalité de sanction pour un même comportement peut conduire, lorsque les circonstances l’exigent, à l’application de montants différenciés pour les entreprises concernées sans que cette différenciation obéisse à un calcul arithmétique (point 1 A, septième alinéa, des lignes directrices de 1998).

322    Dès lors, pour vérifier si une répartition des membres d’une entente en catégories est conforme aux principes d’égalité de traitement et de proportionnalité, il y a lieu de vérifier si la répartition opérée par la Commission est cohérente et objectivement justifiée (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal CMA CGM e.a./Commission, point 128 supra, points 406 et 416 ; du 15 mars 2006, BASF/Commission, T‑15/02, Rec. p. II‑497, point 157, et du 8 octobre 2008, Schunk et Schunk Kohlenstoff-Technik/Commission, T‑69/04, Rec. p. II‑2567, point 184).

323    Ainsi qu’il a été relevé au point 35 ci-dessus, dans la décision attaquée, la Commission a distingué trois groupes d’entreprises sur la base des parts de marché moyennes au cours de la période allant de 1990 à 1999, lesquelles ont été calculées comme suit (considérants 79, 82, 85, 87, 89, 94, 98 à 100, 104, 107, 599 à 602 de la décision attaquée) : Feralpi (10,31 %) et Valsabbia (10,03 %) ont été placées dans le premier groupe ; Lucchini (7,92 %), Alfa (7,87 %), Riva (7 %) et Leali (6,4 %) ont été placées dans le deuxième groupe ; IRO (4,99 %) et Ferriere Nord (3,65 %) ont été placées dans le troisième groupe.

324    La requérante fait valoir que la part de marché moyenne de Ferriere Nord est de 2,9 % et non de 3,65 %, comme le mentionne la décision attaquée. Pour calculer cette dernière part de marché, la Commission aurait utilisé une période (allant de 1992 à 1999) d’une durée différente de celle utilisée pour calculer les parts des autres entreprises (période allant de 1990 à 1999).

325    Il ressort du considérant 87 de la décision attaquée que Ferriere Nord est active dans le secteur des ronds à béton depuis le mois d’avril 1992 et n’a commencé à participer à l’infraction que le 1er avril 1993. Or, la pondération du montant de départ général a pour objet d’établir un montant de départ spécifique tenant compte du poids, et donc de l’impact réel, du comportement infractionnel de chaque entreprise sur la concurrence (voir point 320 ci-dessus). C’est partant à juste titre que la Commission n’a pas calculé la part de marché moyenne de Ferriere Nord sur la base de la période allant de 1990 à 2000, sous peine d’attribuer à cette entreprise un poids relatif artificiellement atténué.

326    Dès lors que cette entreprise n’a commencé à participer à l’infraction que le 1er avril 1993, il y a lieu de considérer que c’est à tort que la Commission a calculé la part de marché moyenne de Ferriere Nord sur la période allant de 1992 à 2000 (ce qui ressort d’une lecture combinée des considérants 87 et 601 de la décision attaquée). En effet, elle aurait dû calculer la part de marché moyenne de cette société sur la période allant de 1993 à 2000, ce qui aurait abouti à une part de marché moyenne de cette entreprise de 3,12 % au cours de cette période.

327    Eu égard à cette considération, c’est à juste titre que la requérante prétend que la part de marché moyenne du troisième groupe n’équivaut pas à 35 % de la part de marché moyenne du premier groupe, comme indiqué au considérant 601 de la décision attaquée, la Commission ayant d’ailleurs reconnu une erreur lors de l’audience. La part de marché moyenne du troisième groupe s’élève à 4,06 %, soit 39,4 % de la part de marché moyenne du premier groupe. Il n’y a toutefois pas lieu, comme le suggère la requérante, de rééquilibrer le montant des amendes infligées en appliquant un critère de proportionnalité, suivant lequel la majoration infligée au deuxième groupe par rapport au troisième serait seulement de 70 % et non de 100 %, ce qui aboutirait à une sanction d’environ 3 millions d’euros au lieu des 3,5 millions infligés dans la décision attaquée.

328    En effet, outre que, ainsi qu’il a été souligné au point 321 ci-dessus, conformément au point 1 A, septième alinéa, des lignes directrices de 1998, la différenciation entre entreprises ayant participé à une même infraction ne doit pas obéir à un calcul arithmétique (voir, en ce sens, arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 228 supra, point 266, et arrêt BASF/Commission, point 322 supra, point 149), il ressort du considérant 601 de la décision attaquée que, dans la décision attaquée, les montants de départ des sanctions infligées aux entreprises des deuxième et troisième groupes ont été calculés en pourcentage de la part de marché moyenne des entreprises du premier groupe. L’erreur commise dans le calcul de la part de marché moyenne de la troisième catégorie est partant sans incidence sur le montant de départ de l’amende infligée à la requérante.

329    En tout état de cause, il doit être constaté que la première catégorie comprend les entreprises avec une part de marché moyenne supérieure à 10 % ; la deuxième catégorie comprend les entreprises ayant une part de marché moyenne située entre 6 et 8 % ; enfin, la troisième catégorie comprend les entreprises ayant une part de marché inférieure à 5 %. La répartition opérée par la Commission apparaît dès lors cohérente et objectivement justifiée.

330    Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter la deuxième branche du présent moyen.

 Sur l’existence de circonstances atténuantes

331    La requérante rappelle que, selon les lignes directrices de 1998, la Commission peut appliquer une diminution du montant de base de l’amende pour des circonstances atténuantes particulières telles que le rôle exclusivement passif ou suiviste dans la réalisation de l’infraction ou encore la non-application effective des accords ou des pratiques infractionnelles.

332    Il y a lieu de rappeler que, conformément au point 3 des lignes directrices de 1998, le rôle exclusivement passif ou suiviste d’une entreprise dans la réalisation de l’infraction constitue, s’il est établi, une circonstance atténuante, étant précisé que ce rôle passif implique l’adoption par l’entreprise concernée d’un « profil bas », c’est-à-dire d’une absence de participation active à l’élaboration du ou des accords anticoncurrentiels. Parmi les éléments de nature à révéler le rôle passif d’une entreprise au sein d’une entente, peuvent être pris en compte le caractère sensiblement plus sporadique de ses participations aux réunions par rapport aux membres ordinaires de l’entente de même que son entrée tardive sur le marché ayant fait l’objet de l’infraction, indépendamment de la durée de sa participation à celle-ci, ou encore l’existence de déclarations expresses en ce sens émanant de représentants d’entreprises tierces ayant participé à l’infraction (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 9 juillet 2003, Cheil Jedang/Commission, T‑220/00, Rec. p. II‑2473, points 167 et 168 ; du 30 septembre 2009, Arkema/Commission, T‑168/05, non publié au Recueil, points 148 et 149, et du 27 juin 2012, Berning & Söhne/Commission, T‑445/07, non publié au Recueil, point 217).

333    Par ailleurs, les lignes directrices de 1998 prévoient également, en leur point 3, que la non-application effective des accords peut également constituer une circonstance atténuante. À cette fin, il importe de vérifier si les circonstances avancées par la requérante sont de nature à établir que, pendant la période au cours de laquelle elle a adhéré aux accords infractionnels, elle s’est effectivement soustraite à leur application en adoptant un comportement concurrentiel sur le marché ou, à tout le moins, qu’elle a clairement et de manière considérable enfreint les obligations visant à mettre en œuvre cette entente, au point d’avoir perturbé le fonctionnement même de celle-ci (arrêt KME Germany e.a./Commission, point 238 supra, points 93 et 96 ; arrêts du Tribunal du 8 juillet 2004, Dalmine/Commission, T‑50/00, Rec. p. II‑2395, point 292 ; du 15 mars 2006, Daiichi Pharmaceutical/Commission, T‑26/02, Rec. p. II‑713, point 113, et Carbone-Lorraine/Commission, point 228 supra, point 196).

334    À cet égard, une entreprise qui poursuit, malgré la concertation avec ses concurrents, une politique plus ou moins indépendante sur le marché peut simplement tenter d’utiliser l’entente à son profit. Si des circonstances atténuantes étaient reconnues dans un tel cas, il serait trop aisé pour les entreprises de minimiser le risque de devoir payer une lourde amende dès lors qu’elles pourraient profiter d’une entente illicite et bénéficier ensuite d’une réduction du montant de l’amende au motif qu’elles n’auraient joué qu’un rôle limité dans la mise en œuvre de l’infraction, alors que leur attitude avait incité d’autres entreprises à se comporter d’une manière plus nuisible à la concurrence (arrêt KME Germany e.a./Commission, point 238 supra, points 94 et 96 ; arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑44/00, Rec. p. II‑2223, points 277 et 278, et Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, point 255 supra, point 491).

335    En premier lieu, la requérante soutient que la Commission semble reconnaître, dans la décision attaquée (considérant 176 et note en bas de page 303) qu’elle n’a pas fourni les données demandées par Federacciai et Leali pour la mise au point d’un système de contrôle de la production, se refusant à fournir ses données individuelles d’octobre 1995 à septembre 1996. En outre, la requérante aurait quitté Federacciai en 1995. Par ailleurs, elle aurait démontré au cours de la procédure, sans être démentie par la Commission, qu’elle n’avait que très rarement appliqué les prix indiqués par Federacciai et Leali et s’était dissociée des activités de Federacciai ou de Leali en publiant des tarifs contenant des prix inférieurs aux prix recommandés, qu’elle avait constamment augmenté sa production et ses ventes, au moins jusqu’en 1999, et qu’elle avait investi dans son appareil de production afin de renforcer sa position concurrentielle et d’augmenter sa production. Or, la Commission n’aurait pas tenu compte de ces éléments dans la décision attaquée et n’aurait pas exposé les motifs de ce choix.

336    Premièrement, la requérante ne saurait se fonder sur le fait qu’elle n’aurait pas fourni les données demandées par Federacciai et Leali pour la mise au point d’un système de contrôle de la production, ni sur la fin de son adhésion à Federacciai en 1995 pour bénéficier d’une circonstance atténuante au regard de son comportement prétendument passif.

337    D’une part, il ne suffit pas que, pendant certaines périodes de l’entente, ou à l’égard de certaines parties de l’entente, l’entreprise concernée ait adopté un « profil bas » (voir, en ce sens, arrêts Jungbunzlauer/Commission, point 171 supra, point 254, et Carbone-Lorraine/Commission, point 228 supra, point 179). Ainsi, l’approche consistant à dissocier l’appréciation de l’attitude d’une entreprise selon l’objet des accords ou des pratiques concertées en cause apparaît pour le moins théorique lorsque ces derniers s’inscrivent dans une stratégie générale, qui détermine les lignes d’action des membres de l’entente sur le marché et limite leur liberté commerciale, visant, comme en l’espèce, à poursuivre un objectif anticoncurrentiel identique et un but économique unique, à savoir fausser l’évolution normale des prix et restreindre la concurrence sur le marché en cause (voir, en ce sens, arrêt Carbone-Lorraine/Commission, point 228 supra, point 180).

338    D’autre part, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 203 ci-dessus, malgré la fin de l’adhésion de la requérante à Federacciai et l’absence de transmission de données à celle-ci, la requérante a participé également, à partir du 13 février 1996, à la partie de l’entente relative à la limitation ou au contrôle de la production ou des ventes, puisque, à cette date, elle a adhéré à un programme d’arrêts concertés de laminoirs, visant à l’augmentation concertée du prix de base, ce fait étant devenu possible avec l’apparition de Leali dans le rôle de coordinateur des activités de l’entente, et notamment de la partie de l’entente relative au contrôle ou à la limitation de la production ou des ventes.

339    Deuxièmement, la requérante ne saurait invoquer, aux fins d’obtenir une réduction du montant de son amende, qu’elle se serait dissociée des autres entreprises à plusieurs reprises. En effet, dès lors qu’une entreprise a participé, même sans y jouer un rôle actif, à une ou plusieurs réunions ayant un objet anticoncurrentiel, elle doit être considérée comme ayant participé à l’entente, à moins qu’elle ne prouve s’être ouvertement distanciée de la concertation illicite. En effet, par sa présence aux réunions, l’entreprise adhère ou tout au moins fait croire aux autres participants qu’elle adhère en principe au contenu des accords anticoncurrentiels qui y sont conclus (voir arrêt du Tribunal du 8 juillet 2008, Lafarge/Commission, T‑54/03, non publié au Recueil, point 767, et la jurisprudence citée) (voir également point 214 ci-dessus).

340    À cet égard, le fait qu’une entreprise, dont la participation à une concertation avec ses concurrents est établie, ne se soit pas comportée sur le marché d’une manière conforme à celle convenue avec ses concurrents ne constitue pas nécessairement un élément devant être pris en compte, en tant que circonstance atténuante, lors de la détermination du montant de l’amende à infliger. En effet, ainsi qu’il a été rappelé aux points 333 et 334 ci-dessus, une entreprise qui poursuit, malgré la concertation avec ses concurrents, une politique plus ou moins indépendante sur le marché peut simplement tenter d’utiliser l’entente à son profit. L’argument de la requérante tiré de la prétendue augmentation de sa production doit dès lors également être rejeté.

341    En second lieu, la requérante serait une entreprise familiale, ne disposant ni d’un service juridique ni d’une infrastructure juridico-économique lui permettant de mieux apprécier le caractère infractionnel de son comportement et les conséquences en découlant du point de vue du droit de la concurrence.

342    Toutefois, ainsi que la Commission l’a souligné au considérant 596 de la décision attaquée, après la fin de l’état de crise manifeste, les opérateurs du secteur sidérurgique ne pouvaient nourrir aucun doute raisonnable sur les conséquences des comportements restrictifs de la concurrence qu’ils avaient mis en pratique, d’autant que certaines communications de Federacciai portaient déjà en 1995 la mention « À détruire après lecture », ce qui ne laisse aucun doute quant à leur nature illicite.

343    Eu égard aux développements qui précèdent, il y a lieu de rejeter la troisième branche du présent moyen.

 Sur la durée de la procédure

344    La requérante rappelle que le respect par la Commission d’un délai raisonnable lors de l’adoption de décisions à l’issue des procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général du droit de l’Union, dont le juge de l’Union assure le respect. En l’espèce, la procédure à l’issue de laquelle a été adoptée la décision attaquée aurait été extrêmement longue. Tout d’abord, l’examen du recours en annulation de la décision de 2002 aurait pris cinq années. À la suite de cet arrêt, la Commission aurait mis deux années pour réadopter la décision, alors qu’elle se serait fondée sur les mêmes motifs, qu’elle aurait prononcé les mêmes amendes et qu’elle n’aurait pas permis aux parties de répondre à une nouvelle communication des griefs. Cette durée excessive aurait porté atteinte au droit de la requérante d’obtenir un jugement impartial dans des délais adéquats. Dans sa réplique, la requérante a affirmé que c’est la durée excessive de l’ensemble de la procédure –administrative et judiciaire – qui serait imputable à la Communauté, au sens de l’ensemble de ses institutions, dans la mesure où elle n’aurait pas été en mesure de garantir aux parties l’adoption d’une décision dans des délais convenables.

345    Interrogée à cet égard lors de l’audience, la requérante a indiqué que son moyen visait uniquement la durée de la procédure administrative.

346    Il y a lieu de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence constante que l’observation d’un délai raisonnable dans la conduite de la procédure administrative en matière de politique de la concurrence constitue un principe général du droit de l’Union, qui figure expressément à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, dont les juridictions de l’Union assurent le respect (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 décembre 2012, Bavaria/Commission, C‑445/11 P, non publié au Recueil, point 77, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 16 juin 2011, Bavaria/Commission, T‑235/07, Rec. p. II‑3229, point 316).

347    Il est également de jurisprudence constante que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure administrative s’apprécie en fonction des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, du contexte dans lequel elle s’inscrit, des différentes étapes procédurales qui ont été suivies, de la complexité de l’affaire ainsi que de son enjeu pour les différentes parties intéressées (arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, point 128 supra, point 187 ; arrêts du Tribunal du 16 septembre 1999, Partex/Commission, T‑182/96, Rec. p. II‑2673, point 177, et du 30 septembre 2003, Aristoteleio Panepistimio Thessalonikis/Commission, T‑196/01, Rec. p. II‑3987, point 230).

348    En outre, il y a lieu de rappeler que le dépassement d’un délai raisonnable, à le supposer établi, ne justifie pas nécessairement l’annulation de la décision. En effet, s’agissant de l’application des règles de concurrence, le dépassement du délai raisonnable ne peut constituer un motif d’annulation que, dans le cas d’une décision constatant des infractions, dès lors qu’il a été établi que la violation de ce principe a porté atteinte aux droits de la défense des entreprises concernées. En dehors de cette hypothèse spécifique, le non-respect de l’obligation de statuer dans un délai raisonnable est sans incidence sur la validité de la procédure administrative au titre du règlement n° 17 et du règlement n° 1/2003 (arrêts de la Cour du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission, C‑185/95 P, Rec. p. I‑8417, point 49, et Technische Unie/Commission, point 193 supra, points 47 et 48 ; arrêt du Tribunal du 18 juin 2008, Hoechst/Commission, T‑410/03, Rec. p. II‑881, point 227).

349    Une telle violation est toutefois susceptible d’amener le Tribunal à réduire le montant de l’amende infligée (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2011, Bavaria/Commission, point 346 supra, point 340).

350    En l’espèce, la communication des griefs a été adressée à la requérante le 26 mars 2002, soit environ 20 mois après la fin de l’infraction, en juillet 2000, et 17 mois après le début de l’enquête, en octobre 2000. La Commission a adopté la communication des griefs supplémentaires le 12 août 2002, soit cinq mois plus tard. Quant à la décision de 2002, elle est intervenue le 17 décembre 2002, soit neuf mois après la communication des griefs et quatre mois après la communication des griefs supplémentaires.

351    Une telle durée ne peut pas, dans les circonstances de l’espèce, être considérée comme excessive. Il suffit de relever, à cet égard, qu’il s’agissait d’une enquête impliquant plusieurs entreprises et nécessitant l’examen d’un nombre important de questions de fait et de droit, relatives notamment à l’expiration du traité CECA.

352    S’agissant de la procédure juridictionnelle lancée par le recours de la requérante contre la décision de 2002, il convient de relever que la période pendant laquelle le juge de l’Union a examiné la légalité de la décision de 2002 n’est pas à prendre en compte lors de la détermination de la durée de la procédure devant la Commission (voir, en ce sens, arrêts du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, point 146 supra, point 123, et Imperial Chemical Industries/Commission, point 140 supra, point 102).

353    Pour ce qui concerne enfin la période comprise entre le prononcé de l’arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, le 25 octobre 2007, et l’adoption de la première décision, le 30 septembre 2009, modifiée le 8 décembre 2009, soit une durée de près de deux ans, force est de constater qu’elle n’excède pas le délai raisonnable. Si, certes, la Commission s’est fondée sur les mêmes griefs dans la décision de 2002 et dans la décision attaquée, elle a, à la suite de l’arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, complété sa décision par une appréciation juridique détaillée des conséquences juridiques de l’expiration du traité CECA à la lumière des arrêts SP e.a./Commission, point 24 supra, ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 84 supra (considérants 342 à 398 de la décision attaquée).

354    Le 30 juin 2008, elle a également adressé aux entreprises en cause une lettre afin de les informer de son intention de réadopter la décision de 2002 après en avoir corrigé la base juridique, tout en invitant les parties à présenter leurs observations éventuelles dans un délai d’un mois (considérant 123 de la décision attaquée).

355    Après avoir examiné l’ensemble des observations des entreprises en cause, la Commission leur a également adressé, entre les mois de juillet et de septembre 2008, des demandes de renseignements, la dernière réponse de la part des entreprises lui étant parvenue en septembre 2008. De nouvelles demandes de renseignements ont été adressées aux entreprises entre les mois de juin et de juillet 2009. Le comité consultatif a finalement été consulté en septembre 2009.

356    Eu égard à l’ensemble de ces éléments, la durée de la procédure administrative ne peut pas, dans les circonstances de l’espèce, être considérée comme excessive.

357    Il s’ensuit que la présente branche doit être rejetée, de même que le présent moyen.

358    Au regard de ce qui précède, il y a lieu de rejeter les conclusions en annulation dans leur intégralité. En outre, en ce qui concerne la demande, présentée à titre subsidiaire, tendant à la réformation du montant de l’amende imposée à la requérante, eu égard notamment aux considérations qui précèdent, il n’y a pas lieu, dans l’exercice du pouvoir de pleine juridiction du Tribunal, de faire droit à cette demande.

 Sur les dépens

359    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

360    La requérante ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens dans la présente affaire, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Alfa Acciai SpA est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Popescu

Berardis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 décembre 2014.

Signatures

Table des matières


Cadre juridique

Dispositions du traité CECA

Dispositions du traité CE

Règlement n° 1/2003

Règlement n° 773/2004

Communication de la Commission sur certains aspects du traitement des affaires de concurrence résultant de l’expiration du traité CECA

Objet du litige

Antécédents du litige

Première décision

Développements postérieurs à la notification de la première décision

Décision modificative

Procédure et conclusions des parties

En droit

Observations liminaires

Sur la violation alléguée du principe de collégialité

Sur le moyen tiré d’un excès de pouvoir de la Commission

Sur le moyen tiré d’une violation des droits de la défense

Sur la violation de l’article 10 du règlement n° 773/2004 en raison de l’absence d’envoi d’une nouvelle communication des griefs

Sur la violation des articles 14 et 33 du règlement n° 1/2003 et de l’article 14 du règlement n° 773/2004, en raison de l’impossibilité pour la requérante de communiquer sa position aux États membres

Sur le moyen tiré de la violation de l’article 65, paragraphe 1, CA

Sur la nature unique de l’entente

Sur la nature continue de l’entente

Sur le moyen tiré de la violation des lignes directrices de 1998, des principes d’égalité de traitement et de proportionnalité et de l’obligation de motivation dans l’appréciation de la conduite de la requérante et la fixation du montant de l’amende

Observations liminaires

Sur la fixation du montant de départ de l’amende

– Sur l’étendue géographique du marché en cause

– Sur l’impact de l’entente sur le marché

– Sur la pression concurrentielle exercée par les autres producteurs sur le marché des ronds à béton

– Sur le changement de nature de l’entente au cours du temps

– Sur l’absence de réduction du montant de l’amende en raison de la grave crise qui a frappé le secteur

Sur le caractère illégal de la détermination de la sanction infligée à la requérante et sur la détermination erronée du poids spécifique de la requérante sur le marché

Sur l’existence de circonstances atténuantes

Sur la durée de la procédure

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’italien.

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