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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Orthogen v OHMI - Arthrex (IRAP) (Judgment) French Text [2015] EUECJ T-253/13 (12 November 2015) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2015/T25313.html Cite as: ECLI:EU:T:2015:843, EU:T:2015:843, [2015] EUECJ T-253/13 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)
12 novembre 2015 (*)
« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marque communautaire verbale IRAP – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 »
Dans l’affaire T‑253/13,
Orthogen AG, établie à Düsseldorf (Allemagne), représentée par Mes M. Finger et S. Krüger, avocats,
partie requérante,
contre
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par Mme D.Walicka, puis par M. A. Schifko, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant
Arthrex GmbH, établie à Garching (Allemagne), représentée par Mes R. Greiffenberg et O. Stöckel, avocats,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 21 février 2013 (affaire R 382/2012‑1), relative à une procédure de nullité entre Arthrex GmbH et Orthogen AG,
LE TRIBUNAL (première chambre),
composé de M. H. Kanninen, président, Mme I. Pelikánová et M. E. Buttigieg (rapporteur), juges,
greffier : M. E. Coulon,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 6 mai 2013,
vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 5 août 2013,
vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 8 août 2013,
vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 5 décembre 2013,
vu le mémoire en duplique de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 7 mars 2014,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 14 janvier 2004, la requérante, Orthogen AG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal IRAP.
3 Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 1, 5, 10, 42 et 44 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 1 : « Produits chimiques destinés aux laboratoires et à l’analyse in vitro » ;
– classe 5 : « Produits et préparations pharmaceutiques et vétérinaires, en particulier pour l’hygiène ; cytosine et préparations contenant de la cytosine, en particulier pour le traitement de maladies du système moteur et du système nerveux ; substances thérapeutiques naturelles, en particulier pour le traitement des maladies du système moteur et du système nerveux ; médicaments et ensembles pour le traitement et le diagnostic de maladies, en particulier du système moteur et du système nerveux, en particulier tests génétiques de détection de l’ostéoporose, tests génétiques de détection des rhumatismes ; diagnostics basés sur l’ADN pour maladies rhumatismales et maladies du système moteur et du système nerveux ; ensembles de purification par affinité, ensembles destinés à accomplir des thérapies géniques, ensembles d’immuno-cytologie, kits pour la réaction en chaîne de polymérase ; micro-organismes, plasmagènes, cultures de micro-organismes ; séquences d’ADN, vecteurs de clonage, anticorps monoclonaux et polyclonaux ; systèmes de culture de cellules à usage diagnostique et thérapeutique ; cellules élevées in vitro, en particulier cellules cartilagineuses pour le traitement de déficiences ; enzymes purifiés, enzymes partiellement purifiés et réagents biochimiques ; recombinaisons purifiées et protéines naturelles, additifs de croissance cellulaire » ;
– classe 10 : « Articles orthopédiques, en particulier orthèses, pouvant éventuellement être chargées ou remplies de substances thérapeutiques ; appareils d’exploitation de tests diagnostiques in vitro et in vivo à usage médical sur la base de prises de sang ; prothèses et endoprothèses ; seringues, récipients de laboratoire » ;
– classe 42 : « Recherche scientifique et industrielle, en particulier développement de tests de réaction en chaîne de polymérase, de tests immunologiques relatifs aux paramètres du métabolisme osseux et de systèmes de cultures de cellules à usage médical et thérapeutique ; recherche dans le domaine des maladies du métabolisme du système moteur ; développement de diagnostics basés sur l’ADN pour maladies rhumatismales et maladies du système moteur, en particulier arthrose, scléroses multiples et maladies du métabolisme osseux ainsi que du système nerveux ; clonage et expression de nouveaux gènes, étude des effets de substances, également de substances naturelles, ainsi que des paramètres significatifs dans le cas de maladies du système moteur et du système nerveux ; développement de thérapies génétiques contre les rhumatismes, les maladies auto-immunes, l’arthrose, les maladies nerveuses, les maladies osseuses et les maladies du système nerveux ; développement de cytosine et de préparations contenant de la cytosine pour le traitement de maladies du système moteur et du système nerveux ; élevage de cellules in vitro, en particulier pour le traitement de déficiences et pour la confection de préparations autologues contenant de la cytosine » ;
– classe 44 : « Soins médicaux et hygiéniques, à savoir dans le domaine du traitement d’affections du système moteur, du système nerveux et du système immunitaire ».
4 La demande d’enregistrement a été rejetée par décision de l’examinateur du 20 juillet 2005 pour les produits relevant de la classe 5, au motif que le terme « irap » était descriptif des produits compris dans cette classe, et donc dépourvu de caractère distinctif.
5 La marque demandée a été enregistrée le 11 août 2006 pour les produits et services relevant des classes 1, 10, 42 et 44 (ci-après la « marque communautaire »).
6 Le 30 mars 2010, l’intervenante, Arthrex GmbH, a introduit auprès de l’OHMI, au titre de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, une demande visant à faire déclarer la nullité de la marque communautaire au motif qu’elle avait été enregistrée en violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), c) et d), de ce règlement.
7 Par décision du 19 décembre 2011, la division d’annulation a annulé la marque communautaire pour tous les produits et les services compris dans les classes 1, 10, 42 et 44 sur le fondement des motifs de refus de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009.
8 Le 17 février 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.
9 Par décision du 21 février 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Sur le plan procédural, elle a en particulier considéré que la décision de la division d’annulation était suffisamment motivée. Les produits et les services concernés formeraient des catégories homogènes, si bien qu’une motivation globale était suffisante. Par ailleurs, la division d’annulation n’aurait pas substitué abusivement sa propre appréciation à celle de l’examinateur, la mission de la division d’annulation consistant précisément à examiner, sur demande d’un tiers, la décision d’enregistrement dans sa globalité en ce qui concerne l’applicabilité des motifs de refus qui ont été invoqués. Sur le plan matériel, la chambre de recours a retenu que la majeure partie du public pertinent se composait de spécialistes des domaines médico-scientifiques. Selon la décision attaquée, au regard des pièces produites par l’autre partie lors de la procédure administrative, le public pertinent reconnaissait le terme « irap » comme l’abréviation de « protéine antagoniste du récepteur de l’interleukine 1 », soit « interleukin-1 receptor antagonist protein » en anglais, et ne percevait donc pas le terme « irap » comme une marque indiquant une origine. Il existerait un rapport suffisamment spécifique et concret entre le signe IRAP en tant qu’abréviation d’une protéine et les différents produits et services visés. La chambre de recours a conclu que le signe IRAP était dès lors dépourvu de caractère distinctif pour les produits et les services en cause. Quant à l’argument fondé sur le caractère distinctif acquis après usage, au sens de l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, dans les espaces germanophone et anglophone, les preuves produites seraient globalement insuffisantes pour établir un tel caractère. Par conséquent, la division d’annulation aurait, à bon droit, annulé l’enregistrement de la marque IRAP.
Conclusions des parties
10 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner l’OHMI aux dépens, y compris ceux de la procédure de recours.
11 L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
12 La requérante invoque deux moyens, tirés de la violation, respectivement, de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 en combinaison avec l’article 64, paragraphe 1, du même règlement, et de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.
Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 en combinaison avec l’article 64, paragraphe 1, de ce règlement
13 La requérante fait valoir que la division d’annulation et la chambre de recours ont indûment substitué leur propre appréciation relative à l’existence d’un motif absolu de refus d’enregistrement de la marque communautaire à celle retenue par l’examinateur lors de la procédure d’enregistrement de ladite marque. Ce faisant, la chambre de recours aurait méconnu les compétences conférées par l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 et l’article 64, paragraphe 1, dudit règlement.
14 L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.
15 Il résulte des termes mêmes de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 que la nullité de la marque communautaire est déclarée, sur demande présentée auprès de l’OHMI, lorsque la marque communautaire a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7 du même règlement.
16 Ainsi que le fait valoir à juste titre l’OHMI, l’objet de la procédure administrative de nullité prévue à l’article 56, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, en combinaison avec l’article 52 du même règlement, est notamment de permettre à l’OHMI de revoir la validité de l’enregistrement d’une marque et d’adopter une position qu’il aurait dû, le cas échéant, adopter d’office en vertu de l’article 37, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 [arrêt du 30 mai 2013, ultra air/OHMI – Donaldson Filtration Deutschland (ultrafilter international), T‑396/11, Rec, EU:T:2013:284, point 20].
17 Contrairement à ce que soutient la requérante, c’est dès lors à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 15 de la décision attaquée, que la mission de la division d’annulation était précisément de procéder à un examen complet de la décision d’enregistrement et qu’elle n’avait donc pas abusivement substitué sa propre appréciation à celle de l’examinateur.
18 En effet, l’objection de la requérante fondée sur la décision de la division d’annulation du 31 janvier 2000, Mortar & Pestle (affaire C000172734/1), dont il résulterait que la division d’annulation serait liée par l’appréciation valablement exercée par l’examinateur en ce qui concerne l’existence ou l’absence de motifs absolus de refus de la marque demandée, doit être rejetée également.
19 Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’argumentation de l’OHMI et de l’intervenante, selon laquelle la décision susmentionnée du 31 janvier 2000, outre qu’elle ne serait pas pertinente, ne consacrerait pas l’existence d’une règle générale imposant à la division d’annulation de ne pas s’éloigner indûment de l’appréciation retenue par l’examinateur dans le cadre de la procédure d’enregistrement de la marque demandée, pareille décision ne saurait, en tout état de cause, prévaloir sur les dispositions précitées, telles qu’interprétées par le juge de l’Union.
20 L’article 64, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 dispose pour sa part que, à la suite de l’examen au fond du recours, la chambre de recours statue sur le recours et qu’elle peut, ce faisant, exercer les compétences de l’instance qui a pris la décision attaquée devant elle.
21 Selon la jurisprudence, il résulte de cette disposition que, par l’effet du recours dont elle est saisie, en l’occurrence contre une décision de la division d’annulation, la chambre de recours peut procéder à un nouvel examen complet du fond de l’annulation, tant en droit qu’en fait, c’est‑à‑dire, en l’occurrence, se prononcer elle‑même sur l’annulation en la rejetant ou en la déclarant fondée, confirmant ou infirmant en cela la décision attaquée devant elle [voir, par analogie, arrêts du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, Rec, EU:C:2007:162, points 56 et 57, et du 3 juillet 2013, Airbus/OHMI (NEO), T‑236/12, Rec, EU:T:2013:343, point 21].
22 Il s’ensuit que le moyen tiré d’une violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 et de l’article 64, paragraphe 1, de ce règlement doit être rejeté.
Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009
23 La requérante fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a conclu à l’absence de caractère distinctif du signe IRAP pour les produits et les services en cause. La décision attaquée se fonderait sur une conception excessivement étroite du public pertinent. Par ailleurs, contrairement à ce que la chambre aurait retenu, le terme « irap » ne constituerait pas l’abréviation de « protéine antagoniste du récepteur de l’interleukine 1 » et ne serait pas non plus compris en ce sens. Même si tel était le cas, il n’existerait en tout état de cause pas de rapport suffisamment direct et concret entre la marque communautaire et les produits et les services en cause pour considérer que le signe IRAP serait dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.
24 L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.
25 Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.
26 Selon une jurisprudence constante, les marques visées par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009 sont celles qui sont réputées incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service en cause afin de permettre au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative [voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2015, Steinbeck/OHMI – Alfred Sternjakob (BE HAPPY), T‑707/13 et T‑709/13, EU:T:2015:252, point 19 et jurisprudence citée].
27 Il résulte d’une jurisprudence bien établie que le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (voir arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, Rec, EU:C:2010:29, point 34 et jurisprudence citée).
28 S’agissant, en premier lieu, de la détermination du public pertinent ainsi que de la perception par celui-ci de la marque contestée, d’une part, la chambre de recours a considéré que les produits et les services en cause, bien qu’ils puissent également viser le consommateur final, s’adressaient en premier lieu aux spécialistes de domaines médico-scientifiques, en raison de leur spécialité, et que ces spécialistes disposaient de connaissances de la terminologie spécifique et prêtaient un niveau d’attention accru aux produits et aux services en cause. D’autre part, elle a observé que ce public spécialisé qui représente la majeure partie du public pertinent reconnaîtra dans le terme « irap » une abréviation de « protéine antagoniste du récepteur de l’interleukine 1 » et ne percevra donc pas le terme « irap » comme une indication de l’origine.
29 Cette conclusion doit être approuvée.
30 S’agissant premièrement de la détermination du public pertinent, il y a lieu de relever que la décision attaquée ne nie pas que les produits et les services en cause s’adressent, outre aux milieux spécialisés, également aux personnes privées non spécialistes en tant que consommateurs finals.
31 Néanmoins, comme la chambre de recours l’a souligné au point 18 de la décision attaquée, eu égard à la spécialité des produits et des services concernés, qui sont notamment des produits chimiques, des articles orthopédiques, récipients de laboratoire et des services portant sur la recherche scientifique et sur les soins médicaux et hygiéniques, il convient de présumer que lesdits produits et services s’adressent principalement aux milieux spécialisés, bien que le consommateur final puisse également y être confronté.
32 Il s’ensuit que, contrairement à ce que prétend la requérante, la chambre de recours n’a pas fondé sa décision sur une conception du public pertinent réduite arbitrairement aux milieux spécialisés. Partant, il convient de rejeter cet argument.
33 S’agissant deuxièmement de la perception du terme « irap », qui, selon la requérante, n’est ni utilisé ni compris comme l’abréviation de « protéine antagoniste du récepteur de l’interleukine 1 » par le public pertinent, il convient de relever, tout d’abord, que la protéine en question est dénommée « interleukin-1 receptor antagonist protein » en anglais, langue qui est généralement maîtrisée par le public spécialisé, ce que les parties ne contestent pas. Ensuite, force est de constater que la suite des lettres majuscules « I », « R », « A » et « P » se compose de la première lettre de chaque mot de cette dénomination en anglais et en allemand. Enfin, la chambre de recours a fait état, au point 19 de la décision attaquée, d’un certain nombre de documents afin d’étayer la conclusion énoncée au point 20 de la même décision, selon laquelle le terme « irap » était déjà utilisé et reconnu dans les milieux scientifiques concernés comme une abréviation désignant la protéine antagoniste du récepteur de l’interleukine 1 sans discontinuité depuis plus de dix ans avant le dépôt, le 14 janvier 2004, de la demande de marque communautaire jusqu’à l’introduction de la demande en nullité le 30 mars 2010, et que ces documents établissaient clairement que le terme « irap » était l’abréviation de ladite protéine.
34 L’objection formulée dans ce contexte par la requérante selon laquelle la décision attaquée s’est fondée à tort sur des publications provenant des États-Unis d’Amérique, alors qu’il n’y aurait pas lieu de tenir compte d’éléments de preuve d’origine extracommunautaire, ne saurait infirmer cette conclusion.
35 Ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 21 de la décision attaquée, il y a lieu de supposer, d’une part, que le public spécialisé se trouvant sur le territoire de l’Union européenne, qui est anglophone ou à tout le moins dispose de connaissances suffisantes en anglais, a accès à ces publications rédigées en anglais, langue qui domine les matières spécialisées telle que l’orthopédie moléculaire en l’espèce [voir, en ce sens, arrêt 15 novembre 2011, Abbott Laboratories/OHMI (RESTORE), T‑363/10, EU:T:2011:662, point 29], et, d’autre part, que les spécialistes dans ces domaines soumis à de fortes influences internationales utilisent les publications extérieures à l’Union comme ouvrages de référence tout comme ils utilisent les ouvrages d’origine communautaire.
36 Quant à l’argument de la requérante selon lequel les personnes privées, n’ayant pas suivi de formation médicale ou vétérinaire et ne disposant donc pas de connaissances de la terminologie spécifique, ne perçoivent pas la dénomination IRAP comme l’abréviation d’une protéine déterminée, il convient de relever que, comme le souligne à juste titre l’OHMI et ainsi que l’admet la requérante elle-même, une marque est annulée sur le fondement de motifs absolus de refus dès lors qu’elle est perçue comme une indication descriptive ou non distinctive par une partie significative du public pertinent, ce qui est le cas en l’occurrence.
37 À cela s’ajoute que, comme l’observe l’OHMI, il est raisonnable d’envisager que le consommateur final ignorant la terminologie scientifique se fasse conseiller par des spécialistes, autrement dit la partie avertie du public pertinent, à l’occasion de l’achat de ce type de produits ou du recours à ce type de services [voir, en ce sens, arrêts du 9 juillet 2010, Exalation/OHMI (Vektor‑Lycopin), T‑85/08, Rec, EU:T:2010:303, points 42 et 43, et du 16 décembre 2010, Fidelio/OHMI (Hallux), T‑286/08, Rec, EU:T:2010:528, points 48, 49 et 56].
38 S’agissant de l’objection de la requérante selon laquelle le public spécialisé utilise, en règle générale, l’abréviation « IL-1Ra » qui est l’abréviation techniquement correcte pour désigner la protéine antagoniste du récepteur de l’interleukine 1 contrairement au terme « irap », il suffit de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence bien établie que doit être refusé à l’enregistrement un signe qui, en au moins une de ses significations potentielles, désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [voir arrêt du 12 juillet 2012, medi/OHMI (medi), T‑470/09, EU:T:2012:369, point 29 et jurisprudence citée].
39 Partant, il est indifférent qu’il existe une autre abréviation, en l’occurrence « IL-1Ra », pour désigner la protéine en question dans la terminologie scientifique, dès lors qu’il est établi que cette protéine est également désignée par le terme « irap », ce qui ressort également de la documentation à laquelle la requérante a fait référence dans sa propre publicité et qu’elle ne saurait donc contester.
40 Contrairement à ce qu’affirme la requérante, c’est dès lors à bon droit que la chambre de recours a jugé que le terme « irap » ne pouvait pas être perçu comme un terme de fantaisie.
41 Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a constaté que le public spécialisé, qui compose la majeure partie du public pertinent et qui connaît la terminologie spécifique, comprenait le terme « irap » comme désignant la protéine antagoniste du récepteur de l’interleukine 1 et en a conclu que la marque contestée était perçue par une partie significative du public pertinent comme l’abréviation d’une protéine et non pas comme une indication de l’origine des produits et des services en cause.
42 S’agissant, en second lieu, de l’appréciation du caractère distinctif de la marque contestée par rapport aux produits et aux services visés, la requérante soutient que, même si le signe IRAP était perçu comme l’abréviation de la protéine en question, le rapport entre les produits et les services en cause, d’une part, et cette protéine, d’autre part, serait faible, voire totalement inexistant. En tout état de cause, il ne serait pas suffisamment direct et concret pour permettre au public pertinent de percevoir immédiatement et sans autre réflexion la marque comme une description desdits produits et services. La requérante conteste, en substance, le caractère descriptif du terme « irap » et fait valoir que ce dernier n’est donc pas perçu par le public visé comme une indication matérielle sur les produits et les services concernés, mais bien comme une indication de l’origine commerciale desdits produits et services.
43 À cet égard, il convient de rappeler que la chambre de recours a fondé sa décision sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009, relatif à l’absence de caractère distinctif d’une marque et non pas sur l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement, relatif au caractère descriptif d’une marque, et que c’est également sur cette disposition que la requérante fonde son recours.
44 Dès lors, il n’est pas nécessaire de vérifier si la marque contestée est descriptive des produits et des services concernés. Il convient, en revanche, de déterminer si la marque possède un minimum de caractère distinctif, lequel suffirait, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, à faire obstacle à l’application du motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009 [arrêts du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec, EU:T:2002:41, point 39, et du 23 janvier 2014, Novartis/OHMI (CARE TO CARE), T‑68/13, EU:T:2014:29, point 13].
45 En effet, s’il existe un certain chevauchement entre le champ d’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et celui de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement en ce que les signes descriptifs visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce règlement sont, également, dépourvus de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement, la dernière de ces dispositions se distingue de la première en ce qu’elle couvre l’ensemble des circonstances dans lesquelles un signe n’est pas de nature à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, Rec, EU:C:2011:139, points 46 et 47).
46 En l’espèce, la requérante fait valoir qu’elle ne commercialise aucune protéine sous la dénomination IRAP, mais qu’elle commercialise des produits et des procédures visant à fabriquer du sérum sanguin, et qu’il n’a pas non plus été démontré que la protéine en question jouait un rôle prépondérant dans le cadre de la « thérapie IRAP » de l’arthrose, à savoir le traitement par autotransfusion pour l’inhibition de l’arthrite, alors que, pour être considéré comme descriptif, le signe en cause doit désigner les produits ou les services concernés soit directement, soit par mention de l’une de leurs caractéristiques essentielles.
47 Or, la jurisprudence citée par la requérante au soutien de cet argument concerne les critères applicables à l’appréciation du caractère descriptif d’une marque tirés de l’interprétation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. En ce qui concerne l’appréciation de l’absence de caractère distinctif, il suffit, au contraire, que le public pertinent puisse établir un lien suffisamment direct entre le signe et les produits et les services, en d’autres termes, que dans le domaine visé par la marque, le public perçoive ce signe comme fournissant des informations sur la nature des produits et des services qu’elle désigne, et non comme indiquant leur origine, pour conclure qu’une marque ne satisfait pas aux conditions prévues par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 [voir, en ce sens, arrêt du 25 avril 2013, Bayerische Motoren Werke/OHMI (ECO PRO), T‑145/12, EU:T:2013:220, point 20 et jurisprudence citée].
48 À cela s’ajoute qu’il est indifférent que les caractéristiques des produits ou des services qui sont susceptibles d’être décrites soient essentielles ou accessoires sur le plan commercial. Toute entreprise doit pouvoir utiliser librement de tels signes pour décrire n’importe quelle caractéristique de ses propres produits ou services, quelle que soit son importance sur le plan commercial [voir, par analogie, à propos de l’article 3, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/104/CEE, arrêt du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec, EU:C:2004:86, point 102].
49 Par conséquent, il est indifférent que la protéine désignée par le terme « irap » ne soit pas commercialisée en tant que telle par la requérante ou qu’elle ne constitue pas une caractéristique essentielle des produits et des services qu’elle commercialise.
50 Ainsi qu’il a été rappelé ci-dessus, conformément à une jurisprudence constante, afin d’apprécier si la marque IRAP est dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il convient de déterminer si cette dernière est en mesure d’indiquer l’origine commerciale des produits et des services pour lesquels elle a été enregistrée ou si, au contraire, elle fournit des informations sur la nature desdits produits et services (voir arrêt ECO PRO, point 47 supra, EU:T:2013:220, point 20 et jurisprudence citée).
51 En l’espèce, comme le souligne à juste titre l’OHMI, la chambre de recours a examiné et motivé à suffisance de droit, aux points 26 à 30 de la décision attaquée, la mesure dans laquelle la protéine en question pouvait intervenir ou être utilisée pour les différentes catégories de produits et de services visées, d’où elle a déduit un rapport suffisamment spécifique et concret entre le signe IRAP en tant qu’abréviation de cette protéine et lesdits produits et services. Dans ce cadre, elle a détaillé ce lien en ce qui concerne chacune des classes de produits et de services pour lesquelles la marque contestée a été enregistrée.
52 Il ressort par ailleurs du point 40 de la décision attaquée que la requérante elle-même a produit une brochure indiquant la thérapie IRAP comme étant fondée sur une concentration élevée de la protéine en question.
53 Force est donc de constater que l’effet thérapeutique de cette protéine dans les procédés médico-scientifiques dont relève l’activité de la requérante a été suffisamment démontré et, partant, un rapport suffisamment direct et concret peut être établi entre le signe IRAP et la nature des produits et des services en cause.
54 Il en est d’autant plus ainsi que, même si la requérante soutient qu’elle n’a jamais admis qu’il pouvait exister un rapport éventuel entre, d’une part, ses produits et ses services et, d’autre part, la protéine en question, elle a néanmoins affirmé que celle-ci était un composant présent à une infime concentration dans le sang et dans le sérum sanguin fabriqué à partir du produit qu’elle commercialise et en a déduit un rapport « très lointain » avec les produits et les services en cause. Ainsi, comme l’a justement relevé l’OHMI, la requérante elle-même ne conteste pas le rapport qui peut exister entre les produits et les services en cause et la protéine désignée par la marque.
55 Il s’ensuit que les milieux spécialisés qui, comme il a été indiqué précédemment, sont les destinataires principaux des produits et des services en cause et qui comprennent le terme « irap » comme une abréviation de la protéine antagoniste du récepteur de l’interleukine 1, seront en mesure d’établir un lien suffisamment direct entre cette protéine et les produits et les services en cause.
56 Dès lors, il y a lieu de considérer que la marque contestée fournit des informations sur la nature des produits et des services concernés et ne saurait donc être perçue par le public pertinent comme une indication d’origine commerciale.
57 Certes, comme la requérante le fait valoir, le lien entre le signe et les produits et les services n’est pas de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description desdits produits et services ou de l’une de leurs caractéristiques et de considérer la marque communautaire comme descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. Toutefois, cette dernière doit être annulée sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement dès lors qu’elle est perçue par le public pertinent comme fournissant des informations sur la nature des produits et des services en cause, et non comme indiquant leur origine.
58 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que, même si, conformément à la jurisprudence citée au point 44 ci-dessus, un faible caractère distinctif suffit à faire obstacle à l’application de la cause de nullité absolue prévue à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009, en l’espèce, la marque communautaire ne présente pas ce minimum de caractère distinctif nécessaire.
59 Enfin, il convient de relever que la requérante n’a pas contesté devant le Tribunal la constatation de la chambre de recours selon laquelle elle n’avait pas démontré que la marque communautaire avait acquis, pour les produits et les services en cause, un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009.
60 C’est dès lors à bon droit que la chambre de recours a considéré que le signe IRAP était dépourvu de caractère distinctif pour les produits et les services en cause et a confirmé la décision de la division d’annulation.
61 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le second moyen et, partant, le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
62 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter les dépens de l’OHMI et de l’intervenante, conformément aux conclusions de ces derniers.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (première chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Orthogen AG supportera ses propres dépens ainsi que les dépens exposés par l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) et par Arthrex GmbH.
Kanninen | Pelikánová | Buttigieg |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 novembre 2015.
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.
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