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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> SACE and Sace BT v Commission (Judgment) French Text [2015] EUECJ T-305/13 (25 June 2015)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2015/T30513.html
Cite as: ECLI:EU:T:2015:435, [2015] EUECJ T-305/13, EU:T:2015:435

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ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

25 juin 2015(*)

« Aides d’État – Assurance crédit à l’exportation – Couverture de réassurance accordée par une entreprise publique à sa filiale – Apports en capital pour couvrir les pertes de la filiale – Notion d’aides d’État – Imputabilité à l’État – Critère de l’investisseur privé – Obligation de motivation » 

Dans l’affaire T‑305/13,

Servizi assicurativi del commercio estero SpA (SACE), établie à Rome (Italie),

Sace BT SpA, établie à Rome,

représentées par Mes M. Siragusa et G. Rizza, avocats,

parties requérantes,

soutenues par

République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. S. Fiorentino, avvocato dello Stato,

partie intervenante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. G. Conte, D. Grespan et Mme K. Walkerová, en qualité d’agents,

partie défenderesse,


ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2014/525/UE de la Commission, du 20 mars 2013, concernant les mesures SA.23425 (11/C) (ex NN 41/10) mises à exécution par l’Italie en 2004 et 2009 en faveur de Sace BT SpA (JO 2014, L 239, p. 24),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude (rapporteur), président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. I. Ulloa Rubio, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 décembre 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Les requérantes, Servizi assicurativi del commercio estero SpA (SACE) et sa filiale à 100 %, Sace BT SpA, sont actives dans le secteur de l’assurance-crédit à l’exportation, c’est-à-dire de l’assurance des risques liés aux crédits à l’exportation finançant des transactions dans l’Union européenne ainsi qu’avec de nombreux pays tiers.

 Communication sur l’assurance crédit à l’exportation

2        La Commission des Communautés européennes a adressé, le 19 septembre 1997, une communication aux États membres, faite conformément à l’article [108, paragraphe 1, TFUE] concernant l’application des articles [107 TFUE] et [108 TFUE] à l’assurance crédit à l’exportation à court terme (JO C 281, p. 4, ci-après la « communication sur l’assurance crédit à l’exportation »). Cette communication, telle que modifiée par les communications aux États membres de 2001 (JO C 217, p. 2) et de 2005 (JO C 325, p. 22), était applicable jusqu’au 31 décembre 2012 à la suite de la modification de sa période d’application par la communication de 2010 (JO C 329, p. 6). Au point 4.2 de cette communication, la Commission avait invité les États membres, en vertu de l’article 93, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 88, paragraphe 1, CE puis article 108, paragraphe 1, TFUE), à modifier leurs régimes d’assurance crédit à l’exportation dans le domaine des risques cessibles, de façon que les organismes privés ou publics d’assurance crédit à l’exportation ne puissent plus bénéficier, pour ces risques, d’aides d’État sous la forme notamment de garanties d’État couvrant des emprunts ou des pertes, d’apports en capital dans des circonstances inacceptables pour un investisseur privé en économie de marché ou de services de réassurance fournis par l’État soit directement soit indirectement, par l’intermédiaire d’un autre organisme d’assurance crédit à l’exportation public ou agissant avec le soutien de l’État, à des conditions plus favorables que celles du marché de la réassurance privée.

3        Les risques cessibles étaient définis au point 2.5, premier alinéa, de la communication sur l’assurance crédit à l’exportation, telle que modifiée par la communication de 2001, « comme étant les risques commerciaux et politiques afférents à des débiteurs publics et non publics établis dans l’un des pays énumérés en annexe. Pour ces risques, la durée de risque maximale est de moins de deux ans (délai de fabrication plus durée habituelle du crédit à compter du point de départ normal Union de Berne) ». Le point 2.5, deuxième alinéa, de la communication sur l’assurance crédit à l’exportation, telle que modifiée par la communication de 2001, précise, en outre, que « [t]ous les autres risques [risques de catastrophes et risques commerciaux et politiques sur des pays ne figurant pas dans la liste jointe à la communication] sont considérés comme n’étant pas encore cessibles ». La liste des pays à risques cessibles comprend tous les États membres de l’Union ainsi que des pays de l’OCDE.

 SACE

4        Avant sa transformation en 2004 en société anonyme, SACE était un organisme de droit public italien, l’istituto SACE. En 1998, afin de se conformer au point 4.2 de la communication sur l’assurance crédit à l’exportation (voir point 2 ci-dessus), l’istituto SACE avait mis fin à son activité d’assurance des risques cessibles concernant les contrats d’assurance directe.

5        En 2004, SACE a été transformée en société anonyme dont le ministère de l’Économie et des Finances italien (ci-après le « MEF ») était l’actionnaire unique. Ultérieurement, en novembre 2012, SACE a été acquise par la Cassa depositi e prestiti, un organisme public italien contrôlé à 70 % par le MEF.

6        Selon l’article 4, paragraphe 1, de ses statuts, SACE a pour objet social l’assurance, la réassurance, la coassurance et la garantie des risques de caractère politique, des risques de catastrophe, des risques économiques, commerciaux et de change ainsi que des risques complémentaires auxquels sont exposés les opérateurs italiens et les sociétés qui leur sont liées ou qu’ils contrôlent, dans leur activité avec l’étranger et l’internationalisation de l’économie italienne. Selon l’article 4, paragraphe 2, desdits statuts, SACE a en outre pour objet la fourniture, dans les conditions du marché et le respect de la réglementation de l’Union, de garanties et de couvertures d’assurance à des entreprises étrangères en ce qui concerne des opérations de portée stratégique pour l’économie italienne sous l’angle de l’internationalisation, de la sécurité économique et de l’activation des processus de production et d’emploi en Italie.

7        Le décret-loi n° 269 du 30 septembre 2003, converti, après modifications, en loi n° 326, du 24 novembre 2003 , dont l’article 6 contient les dispositions relatives à la transformation, à partir du 1er janvier 2004, de l’istituto SACE en société anonyme (voir point 4 ci-dessus), a délimité les opérations de SACE, en tenant compte de l’évolution du marché concerné.

8        À cet égard, l’article 6, paragraphe 12, du décret-loi n° 269 autorise en particulier SACE à opérer, sous certaines conditions, dans le secteur des risques cessibles. En effet, cet article énonce notamment ce qui suit :

« La société SACE SpA peut exercer des activités d’assurance et de couverture des risques cessibles, tels que définis par le droit de l’Union. Les activités visées au présent paragraphe sont exercées en tenant une comptabilité distincte de celle relative aux activités qui bénéficient de la garantie de l’État ou en constituant à cette fin une [société anonyme]. Dans ce dernier cas, la participation détenue par SACE SpA ne peut être inférieure à 30 % [et certains fonds injectés précédemment] ne peuvent être utilisés pour la souscription de son capital. [L’activité de couverture des risques cessibles] ne bénéficie pas de la garantie de l’État. »

9        L’article 5, paragraphe 1, des statuts de SACE prévoit que les engagements pris par cette société dans l’exercice de son activité dans le secteur de l’assurance, de la coassurance et de la garantie des risques définis comme étant des risques non cessibles par la réglementation de l’Union bénéficient de la garantie de l’État sur la base de la réglementation en vigueur. Cette même disposition précise que les activités bénéficiant de la garantie de l’État sont soumises aux délibérations du Comitato interministeriale per la programmazione economica (comité interministériel de programmation économique, ci-après le « CIPE »), conformément aux dispositions du décret législatif n° 143, du 31 mars 1998, redéfinissant la garantie applicable à SACE en vertu de la loi italienne n° 227, du 24 mai 1977. Selon l’article 2, paragraphe 3, du décret législatif n° 143, les opérations et les catégories de risques que SACE peut assumer doivent être déterminées par le CIPE. En outre, l’article 8, paragraphe 1, de ce décret législatif prévoit que, au plus tard le 30 juin de chaque année, le CIPE délibère sur le plan prévisionnel des engagements d’assurance de SACE. La loi d’approbation du budget de l’État définit les limites globales des engagements bénéficiant de la garantie, en établissant une distinction entre les garanties selon que leur durée est inférieure ou supérieure à vingt-quatre mois.

10      L’article 5, paragraphe 2, des statuts de SACE exclut de la garantie de l’État les activités de celui-ci dans le secteur de l’assurance et de la garantie des risques cessibles. Il prévoit que ces activités sont exercées par cette société soit en établissant une comptabilité séparée, soit en constituant à cette fin une société anonyme.

 Sace BT

11      En 2004, dans le cadre législatif rappelé aux points 8 à 10, ci-dessus, SACE a décidé de constituer la filiale Sace BT, en tant qu’entité distincte, de manière à isoler la gestion des « risques cessibles » au sens de la communication sur l’assurance crédit à l’exportation. Sace BT a été dotée d’un capital social de 100 millions d’euros, entièrement financé par SACE. En outre, SACE a procédé à un transfert de capital, d’un montant de 5,8 millions d’euros, au fonds de réserve de Sace BT.

12      Selon l’article 2, paragraphe 1, de ses statuts, Sace BT a pour objet social l’exercice, tant en Italie qu’à l’étranger, de l’activité d’assurance et de réassurance dans toutes les branches de préjudice, dans les limites fixées par les autorisations spécifiques. En vertu de l’article 15, paragraphe 3, desdits statuts, les membres du conseil d’administration sont nommés et révoqués par l’assemblée générale. Aux termes de l’article 17 de ces statuts, la gestion de Sace BT incombe exclusivement aux membres du conseil d’administration.

13      Il ressort de la décision 2014/525/UE de la Commission, du 20 mars 2013, concernant les mesures SA.23425 (11/C) (ex NN 41/10) mises à exécution par l’Italie en 2004 et 2009 en faveur de Sace BT SpA (JO 2014, L 239, p. 24, ci-après la « décision attaquée »), que, lors de la période pertinente, les activités de Sace BT s’articulaient autour de trois axes : la branche « assurance crédit » (54 % des primes en 2011), la branche « cautionnements » (30 %) et la branche relative aux autres secteurs concernant les risques de la construction (13 %).

14      Dans le cadre de la branche « assurance crédit », Sace BT était active dans le domaine de l’assurance crédit à l’exportation à court terme pour ce qui concerne les risques cessibles, au sens de la communication sur l’assurance crédit à l’exportation. La société proposait, en outre, une couverture d’assurance crédit pour les transactions effectuées en Italie (assurance des transactions commerciales nationales). Par ailleurs, Sace BT continuait à consacrer une petite part de son portefeuille à la branche des risques non cessibles à court terme (voir considérant 22, tableau 1, de la décision attaquée). La décision attaquée indique que, selon les informations communiquées par les autorités italiennes, cette activité était exercée aux conditions du marché et sans garantie de l’État, au même titre que les autres activités.

 Procédure administrative et décision attaquée

15      À la suite d’une plainte reçue en juin 2007, la Commission a ouvert une enquête préliminaire concernant d’éventuelles aides d’État susceptibles de découler de diverses mesures mises à exécution par SACE en faveur de Sace BT. En février 2011, la Commission a ouvert une procédure formelle d’examen, au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, à l’égard des quatre mesures suivantes, prises en faveur de Sace BT :

–        la dotation en capital initial d’un montant de 100 millions d’euros, sous forme de capital social, et l’apport de capital au fonds de réserve pour un montant de 5,8 millions d’euros, effectués le 27 mai 2004 (ci-après la « première mesure ») ;

–        une couverture de réassurance en excédent de sinistre pour les risques cessibles de l’année 2009, accordée le 5 juin 2009 et portant sur la part des risques (estimée à 74,15 %) non couverte par des acteurs tiers opérant sur le marché (ci-après la « deuxième mesure ») ;

–        un apport en capital de 29 millions d’euros, accordé le 18 juin 2009 (ci-après la « troisième mesure ») ;

–        un apport en capital de 41 millions d’euros, accordé le 4 août 2009 (ci-après la « quatrième mesure »).

16      Aucune de ces quatre mesures n’avait été notifiée à la Commission, les autorités italiennes ayant estimé, d’une part, qu’elles n’étaient pas imputables à l’État et, d’autre part, qu’elles étaient conformes au critère de l’investisseur privé en économie de marché.

17      Au terme de la procédure formelle d’examen, la Commission a adopté, le 20 mars 2013, la décision attaquée.

18      Pour démontrer l’imputabilité des mesures en cause à l’État italien, la Commission se fonde, au considérant 177 de la décision attaquée, sur des critères généraux, relatifs aux liens organiques entre les membres du conseil d’administration de SACE et l’État italien, à la circonstance que SACE n’exerce pas ses activités dans les conditions du marché et au fait que la loi prévoit que SACE doit détenir au moins 30 % du capital de Sace BT. En outre, au considérant 178 de la décision attaquée, la Commission invoque des indices spécifiques consistant en des déclarations effectuées par des membres du conseil d’administration de SACE lors de l’adoption de ces mesures.

19      En ce qui concerne l’existence d’un avantage, la Commission estime d’abord, aux considérants 127 à 130 de la décision attaquée, que la deuxième mesure confère un avantage à Sace BT, au motif qu’un réassureur privé n’aurait pas souscrit une couverture de réassurance aussi élevée en sa faveur, aux conditions accordées par SACE. S’agissant ensuite des troisième et quatrième mesures, la Commission considère, aux considérants 132 à 168 de la décision attaquée, que SACE n’a pas agi comme un investisseur privé avisé. Elle allègue à titre principal que cette société n’a pas procédé à une évaluation préalable de la rentabilité des apports en capital en cause. Dans un souci d’exhaustivité, elle effectue à titre complémentaire une analyse rétrospective de la rentabilité de ces deux mesures et conclut qu’un investisseur privé aurait estimé plus avantageux de laisser la filiale aller à la faillite, plutôt que d’injecter 70 millions d’euros supplémentaires.

20      Dans l’article 1er de la décision attaquée, la Commission constate que la première mesure, à savoir la dotation en capital initial et la contribution au fonds de réserve, à hauteur de 105,8 millions d’euros, ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. En revanche, sont qualifiées d’aides d’État illégales et incompatibles avec le marché intérieur les trois autres mesures (ci-après les « mesures litigieuses »), à savoir la réassurance en excédent de sinistre de 74,15 %, qui contiendrait un élément d’aide s’élevant à 156 000 euros (article 2 de la décision attaquée), ainsi que les deux apports en capital s’élevant respectivement à 29 et à 41 millions d’euros (articles 3 et 4 de la décision attaquée).

21      En vertu des articles 5 et 6 de la décision attaquée, les autorités italiennes sont tenues de récupérer immédiatement auprès de Sace BT les aides susmentionnées, majorées d’intérêts de retard composés, de veiller que la décision attaquée soit exécutée dans les quatre mois suivant la date de sa notification et d’informer la Commission dans les deux mois suivant cette notification, notamment, du montant total à récupérer, des montants déjà récupérés et des mesures prises ou envisagées pour se conformer à la décision attaquée.

  Procédure et conclusions des parties

22      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 juin 2013, les requérantes ont introduit le présent recours.

23      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 4 juillet 2013, la République italienne a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions des requérantes. Par ordonnance du 4 septembre 2013, le président de la quatrième chambre du Tribunal a fait droit à cette demande.

24      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

25      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 26 février 2014, les requérantes ont introduit une demande en référé, en vue d’obtenir le sursis à l’exécution de la décision attaquée jusqu’à ce que le Tribunal ait statué sur le recours principal. Par ordonnance du 13 juin 2014, le président du Tribunal a décidé de sursoir à l’exécution de l’article 5 de la décision attaquée dans la mesure où les autorités italiennes étaient obligées de récupérer auprès de Sace BT un montant supérieur à [confidentiel](1) (ordonnance du 13 juin 2014, SACE et Sace BT/Commission, T‑305/13 R, EU:T:2014:595).

26      Les requérantes, soutenues par la République italienne, concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ou, à titre subsidiaire, l’annuler partiellement ;

–        condamner la Commission aux dépens ;

–        ordonner toute autre mesure, y compris d’instruction, qu’il jugera appropriée.

27      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

 En droit

28      À l’appui de leur demande en annulation, les requérantes invoquent trois moyens. Par le premier moyen, les requérantes contestent l’imputabilité des mesures litigieuses au gouvernement italien. Le deuxième moyen est tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’erreurs d’appréciation et d’erreurs de droit dans l’application du critère de l’investisseur  privé en économie de marché, ainsi que de l’insuffisance de motivation, en ce qui concerne la deuxième mesure. Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’erreurs d’appréciation et d’erreurs de droit dans l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché en ce qui concerne les troisième et quatrième mesures.

 Sur le premier moyen, tiré de l’absence d’imputabilité des mesures litigieuses à l’État italien

29      Les requérantes soutiennent que la Commission a fait une application erronée de l’article 107, paragraphe 1, TFUE en estimant que les mesures litigieuses étaient imputables à l’État italien. Les décisions instaurant les mesures litigieuses auraient été adoptées de manière autonome par le conseil d’administration de SACE.

30      Les requérantes allèguent que la décision attaquée ne contient aucun élément suggérant que les mesures litigieuses ont constitué l’instrument d’application d’une politique définie par l’État italien, ou qu’elles ont été prises sous l’influence directe ou indirecte de ce dernier, ou même que les autorités italiennes en auraient eu connaissance ex ante. Les indices généraux et spécifiques invoqués par la Commission, aux points 177 à 179  de la décision attaquée, ne permettraient pas de conclure qu’il était improbable que SACE ait pu adopter les mesures litigieuses sans tenir compte des exigences des pouvoirs publics.

31      La République italienne, intervenant au soutien des requérantes, ajoute que la circonstance, relevée par la Commission, que les mesures litigieuses correspondaient à un objectif d’intérêt général ne suffit pas pour conclure à l’implication des pouvoirs publics. En effet, une entreprise pourrait, tout en poursuivant une finalité de profit, tenir compte également, pour de multiples raisons, de l’intérêt général apprécié de manière autonome par les administrateurs de cette entreprise.

32      Les requérantes et la République italienne font valoir, en outre, que les mesures litigieuses ont été prises par SACE sans tenir compte des exigences des autorités publiques et sans que celles-ci les aient influencées ne serait-ce qu’indirectement. Dans la décision attaquée, la Commission se serait limitée à démontrer la possibilité théorique de l’implication des pouvoirs publics. Elle n’aurait pas établi à suffisance de droit que l’actionnaire public avait exercé en pratique une influence dominante sur l’adoption des mesures litigieuses, contrairement au principe d’autonomie de gestion du conseil d’administration de SACE.

33      Les requérantes et la République italienne estiment que le critère fondamental pour apprécier l’imputabilité d’une mesure à l’État consiste à vérifier le degré d’autonomie de gestion dont bénéficie en pratique le conseil d’administration de l’entreprise publique et l’intensité du contrôle exercé par les pouvoirs publics. En effet, pour établir, conformément à l’arrêt du 16 mai 2002, France/Commission (C‑482/99, Rec, ci-après l’« arrêt Stardust », EU:C:2002:294), l’implication des autorités publiques dans l’adoption d’une mesure, il faudrait démontrer que cette mesure a été déterminée par l’intervention de l’État, et non par des choix autonomes de l’entreprise elle-même.

34      Dès lors, selon la République italienne, une mesure ne serait imputable à l’État que s’il est constaté qu’elle est la conséquence d’un acte juridique contraignant d’une autorité publique, qui, même si les indications qu’il contient ne sont pas précises et spécifiques, a conduit l’entreprise à faire prévaloir un objectif d’intérêt général sur son propre intérêt et à adopter une mesure différente de celle qu’elle aurait prise en l’absence de telles indications.

35      Or, selon les requérantes et la République italienne, en l’espèce, la Commission n’aurait nullement prouvé que les autorités publiques italiennes avaient instauré une pratique consistant à utiliser SACE à des fins d’intérêt général, laquelle serait contraire au principe d’autonomie de gestion conférée aux entreprises publiques par la réglementation italienne, énonçant que le MEF « n’exerce pas de direction et de coordination des sociétés dans lesquelles il détient une participation ». Ainsi, la Commission n’aurait pas satisfait à la charge de la preuve.

36      La République italienne ajoute que la pratique du MEF de ne pas interférer dans les décisions relevant de la compétence du conseil d’administration de SACE est attestée par une note de ce ministère du 12 novembre 2008, par laquelle, en réponse à une demande de SACE, il a rappelé qu’une opération d’acquisition d’une société sud-africaine opérant dans le secteur de l’assurance crédit n’était pas soumise à son approbation. Cette pratique consistant à respecter l’autonomie de gestion de SACE serait confirmée par une seconde note du MEF, indiquant qu’il ne relève pas de son pouvoir d’interférer dans la création d’une nouvelle société de services sous le contrôle de Sace BT.

37      La Commission conteste l’ensemble de cette argumentation. Pour démontrer l’imputabilité d’une mesure à l’État, il ne serait pas nécessaire d’établir qu’elle répond exclusivement à une finalité publique.

38      Selon la jurisprudence, pour que des avantages puissent être qualifiés d’aides au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, ils doivent, d’une part, être accordés directement ou indirectement au moyen de ressources d’État et, d’autre part, être imputables à l’État (voir arrêts Stardust, point 33 supra, EU:C:2002:294, point 24, et du 10 novembre 2011, Elliniki Nafpigokataskevastiki e.a./Commission, T‑384/08, EU:T:2011:650, point 50).

39      En l’espèce, il y a lieu dès lors d’examiner si les mesures litigieuses pouvaient à juste titre être considérées comme le résultat d’un comportement imputable à l’État.

40      Il est constant que, à la suite de sa transformation en société anonyme entièrement détenue par l’État, SACE était, au cours de la période pertinente, une entreprise publique au sens de l’article 2, sous b), de la directive 2006/111/CE de la Commission, du 16 novembre 2006, relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques ainsi qu’à la transparence financière dans certaines entreprises (JO L 318, p. 17), énonçant que la notion d’entreprise publique vise « toute entreprise sur laquelle les pouvoirs publics peuvent exercer directement ou indirectement une influence dominante du fait de la propriété, de la participation ou des règles qui la régissent ».

41      Cependant, au point 52 de l’arrêt Stardust, point 33 supra (EU:C:2002:294), la Cour a jugé que, même si l’État était en mesure de contrôler une entreprise publique et d’exercer une influence dominante sur les opérations de celle-ci, l’exercice effectif de ce contrôle dans un cas concret ne saurait être automatiquement présumé. Une entreprise publique peut agir avec plus ou moins d’indépendance, en fonction du degré d’autonomie qui lui est laissé par l’État. Dès lors, le seul fait qu’une entreprise publique soit sous contrôle étatique ne suffit pas pour imputer des mesures prises par celle-ci, telles que les mesures de soutien financier en cause, à l’État. Il est encore nécessaire d’examiner si les autorités publiques doivent être considérées comme ayant été impliquées, d’une manière ou d’une autre, dans l’adoption de ces mesures.

42      En l’espèce, il s’ensuit que la seule circonstance que l’État italien, en tant qu’actionnaire unique de SACE, était en mesure d’exercer une influence dominante sur les activités de cette société ne permet pas de présumer qu’il a effectivement exercé son contrôle en ce qui concerne l’adoption des mesures litigieuses.

43      Il convient dès lors de rappeler les critères dégagés par la jurisprudence pour apprécier l’imputabilité à l’État d’une mesure d’aide adoptée par une entreprise publique (voir points 44 à 52 ci-après), avant d’examiner les indices invoqués en l’espèce par la Commission (voir points 53 à 88 ci-après).

 Critères jurisprudentiels d’appréciation de l’imputabilité à l’État d’une mesure d’aide accordée par une entreprise publique

44      Aux points 53 et 54 de l’arrêt Stardust, point 33 supra (EU:C:2002:294), la Cour a précisé qu’il ne saurait être exigé qu’il soit démontré, sur le fondement d’une instruction précise, que les autorités publiques ont incité concrètement l’entreprise publique à prendre les mesures d’aide en cause. En effet, eu égard aux relations étroites entre l’État et les entreprises publiques, il existe un risque réel que des aides d’État soient octroyées par l’intermédiaire de celles-ci de façon peu transparente, de sorte qu’il sera très difficile pour un tiers, précisément à cause des relations privilégiées existant entre l’État et une entreprise publique, de démontrer dans un cas concret que des mesures d’aide prises par cette entreprise ont été adoptées sur instruction des autorités publiques.

45      Dès lors, selon une jurisprudence constante, l’imputabilité à l’État d’une mesure d’aide prise par une entreprise publique peut être déduite d’un ensemble d’indices suffisamment précis et concordants, résultant des circonstances de l’espèce et du contexte dans lequel cette mesure est intervenue, et permettant de présumer l’existence d’une implication concrète des autorités publiques dans l’adoption de cette mesure (voir, en ce sens, arrêts Stardust, point 33 supra, EU:C:2002:294, point 55 ; du 26 juin 2008, SIC/Commission, T‑442/03, Rec, EU:T:2008:228, point 98, et Elliniki Nafpigokataskevastiki e.a./Commission, point 38 supra, EU:T:2011:650, point 54).

46      À cet égard, l’arrêt Stardust, point 33 supra (EU:C:2002:294), renferme une liste d’indices, non obligatoires et non exhaustifs, qui ont été pris en considération dans la jurisprudence ou qui sont susceptibles de l’être, tels que le fait que l’entreprise publique ayant accordé les aides ne pouvait pas prendre cette décision sans tenir compte des exigences des pouvoirs publics, que cette entreprise était non seulement liée par des éléments de nature organique à l’État, mais qu’elle devait en outre tenir compte des directives émanant d’un comité interministériel tel que le CIPE, la nature des activités de l’entreprise publique et l’exercice de celles-ci sur le marché dans des conditions normales de concurrence avec des opérateurs privés, le statut juridique de ladite entreprise, celle-ci relevant du droit public ou du droit commun des sociétés ou l’intensité de la tutelle exercée par les autorités sur sa gestion (voir arrêt Stardust, point 33 supra, EU:C:2002:294, points 55 et 56 et jurisprudence citée).

47      En outre, toujours au point 56 de l’arrêt Stardust, point 33 supra (EU:C:2002:294), la Cour a souligné que tout autre indice indiquant, dans le cas concret, une implication des autorités publiques ou l’improbabilité d’une absence d’implication dans l’adoption de la mesure, eu égard également à l’ampleur de celle-ci, à son contenu et aux conditions qu’elle comporte, pourrait, le cas échéant, être pertinent pour conclure à l’imputabilité à l’État d’une mesure prise par une entreprise publique (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2014, Tisza Erőmű/Commission, T‑468/08, EU:T:2014:235, point 170).

48      Premièrement, il découle de cette jurisprudence que, contrairement aux allégations de la République italienne (voir points 33 et 34 ci-dessus), la notion d’implication concrète de l’État doit être comprise dans le sens que la mesure en cause a été adoptée sous l’influence ou le contrôle effectif des autorités publiques ou que l’absence d’une telle influence ou d’un tel contrôle est improbable, sans qu’il soit nécessaire d’examiner l’incidence de cette implication sur le contenu de la mesure. En particulier, il ne saurait être exigé, pour satisfaire à la condition d’imputabilité, de démontrer que le comportement de l’entreprise publique aurait été différent si elle avait agi de manière autonome. Quant aux objectifs poursuivis par la mesure en cause, s’ils peuvent être pris en considération aux fins de l’appréciation de l’imputabilité, ils ne sont pas décisifs.

49      En effet, la circonstance que, dans certains cas, les objectifs d’intérêt général concordent avec l’intérêt de l’entreprise publique ne fournit, à elle seule, aucune indication sur l’implication éventuelle ou l’absence d’implication des pouvoirs publics, d’une manière ou d’une autre, dans l’adoption de la mesure en cause. Partant, le fait que l’intérêt de l’entreprise publique coïncide avec l’intérêt général ne signifie pas nécessairement que cette entreprise aurait pu prendre sa décision sans tenir compte des exigences des pouvoirs publics. La Commission relève ainsi à bon droit que rien ne s’oppose à ce que les pouvoirs publics puissent imposer à une entreprise publique d’effectuer une opération de nature entrepreneuriale, laquelle, tout en pouvant le cas échéant être conforme au critère de l’investisseur privé, sera, en tout état de cause, imputable à l’État.

50      Deuxièmement, il y a lieu de rejeter également l’interprétation de la jurisprudence Stardust effectuée par la République italienne (voir points 34 et 35 ci-dessus), selon laquelle l’implication concrète de l’État dans l’adoption d’une mesure par une entreprise publique, telle que SACE, ne pouvait résulter que d’un acte juridique d’une autorité publique conduisant cette entreprise à faire prévaloir les objectifs d’intérêt général sur ses propres intérêts ou d’une pratique des pouvoirs publics consistant à utiliser cette entreprise à des fins d’intérêt général, en contradiction avec le principe d’autonomie de gestion reconnu par la loi italienne aux entreprises publiques.

51      En effet, il ressort de l’arrêt Stardust, point 33 supra (EU:C:2002:294), que l’autonomie conférée, par sa forme juridique, à une entreprise publique ne fait pas obstacle à la possibilité pour l’État d’exercer une influence dominante pour l’adoption de certaines mesures. L’implication concrète éventuelle de l’État n’étant pas exclue par l’autonomie dont bénéficie en principe l’entreprise publique, la preuve d’une telle implication peut être apportée sur la base de tous les éléments juridiques ou factuels pertinents susceptibles de former un faisceau d’indices suffisamment précis et convergents de l’exercice d’une influence ou d’un contrôle effectifs par l’État.

52      En l’espèce, il appartenait dès lors à la Commission d’établir, sur la base d’un faisceau d’indices suffisamment précis et concordants, que l’implication de l’État italien dans la décision d’accorder les mesures litigieuses était concrète ou que l’absence d’une telle implication était improbable eu égard aux circonstances et au contexte de l’espèce.

 Évaluation des indices invoqués en l’espèce par la Commission 

53      Il convient de vérifier si, dans les circonstances de l’espèce et dans le contexte des mesures litigieuses, les indices invoqués par la Commission aux considérants 177 à 179 de la décision attaquée permettaient, pris dans leur ensemble, de présumer que les autorités publiques italiennes avaient été concrètement impliquées, d’une manière ou d’une autre, dans l’adoption de ces mesures.

54      Pour démontrer une telle implication, la Commission invoque des « indices généraux », relatifs au contexte de l’adoption des mesures litigieuses (considérant 177 de la décision attaquée), et des « indices spécifiques », relatifs aux conditions d’octroi de ces mesures (considérants 178 et 179 de la décision attaquée).

55      S’agissant des indices généraux, la Commission invoque les trois éléments suivants :

–        tous les membres du conseil d’administration de SACE sont nommés sur proposition de l’État italien ;

–        SACE n’exerce pas ses activités « sur le marché dans des conditions normales de concurrence avec les opérateurs privés » ;

–        en vertu de la loi, SACE doit détenir au moins 30 % du capital de Sace BT.

56      Il convient d’examiner de manière précise chacun de ces indices, avant de les apprécier dans leur ensemble.

57      En premier lieu, s’agissant de l’argument relatif à la nomination des membres du conseil d’administration, invoqué au considérant 177, sous a), de la décision attaquée, il convient de relever que l’article 6, paragraphe 2, du décret-loi n° 269, qui attribue les actions de SACE au MEF, dispose que ces nominations sont effectuées en accord avec les différents ministères mentionnés à l’article 4, paragraphe 5, du décret législatif n° 143, lequel vise le ministre du Trésor, du Budget et de la Programmation économique italien (chargé de l’économie et des finances à l’époque pertinente), le ministre des Affaires étrangères italien, le ministre de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat italien et le ministre du Commerce extérieur italien.

58      Cependant, ainsi que l’a relevé la République italienne lors de l’audience, il découle de l’article 6, paragraphe 24, du décret-loi n° 269 que, lors de la création de SACE, l’article 4 du décret législatif n° 143 n’était plus applicable qu’à titre transitoire, jusqu’à l’approbation des statuts de SACE. Or, selon l’article 13 desdits statuts, les membres du conseil d’administration sont nommés, pour une période n’excédant pas trois ans, par l’assemblée générale, et sont rééligibles.

59      Les requérantes et la République italienne en déduisent que les indices organiques énoncés au considérant 177, sous a), de la décision attaquée ne résultent pas de règles spéciales, mais découlent de la structure de la propriété et sont donc négligeables.

60      Lors de l’audience, la Commission a soutenu que l’abrogation des règles de nomination spéciales des membres du conseil d’administration de SACE n’était pas automatique. Elle a fait valoir, sans être contredite par la République italienne, que, lors de l’adoption des mesures litigieuses, les membres composant le conseil d’administration de SACE avaient été nommés selon la procédure spéciale initiale.

61      Certes, les membres du conseil d’administration d’une entreprise entièrement détenue par l’État sont nécessairement nommés par les autorités publiques, l’État étant l’actionnaire unique de la société. Toutefois, en l’espèce, la circonstance que, à tout le moins, la nomination initiale des membres du conseil d’administration de SACE devait, en vertu d’une disposition législative spécifique, être effectuée en accord avec plusieurs ministères importants atteste des liens particuliers entre SACE et les autorités publiques et est susceptible de constituer un indice de l’implication des pouvoirs publics dans l’activité de l’entreprise publique.

62      En outre, cette implication est également attestée par le fait, relevé par la Commission, au considérant 178, sous a), de la décision attaquée, que deux membres du conseil d’administration de SACE exerçaient simultanément des fonctions d’encadrement au sein de ministères, à savoir l’ancien ministère du Commerce extérieur italien, aujourd’hui ministère du Développement économique, et le ministère des Affaires étrangères italien (voir point 85 ci-après).

63      Cependant, ces indices organiques, bien que significatifs dans la mesure où ils montrent une marge d’indépendance limitée de SACE à l’égard de l’État, ne suffisent pas, à eux seuls, pour établir l’implication concrète de l’État dans l’adoption des mesures litigieuses et doivent être appréciés avec les autres indices.

64      En deuxième lieu, s’agissant de l’argument selon lequel SACE n’exerce pas ses activités « sur le marché dans des conditions normales de concurrence avec les opérateurs privés », la décision attaquée se fonde sur les quatre indices suivants :

–        la mission de SACE consiste à maintenir et à promouvoir la compétitivité de l’économie italienne, essentiellement en ce qui concerne les risques non cessibles, conformément à la définition établie par la communication sur l’assurance crédit à l’exportation, en opérant donc dans un secteur qui n’est pas considéré comme soumis à des conditions normales de concurrence sur le marché ;

–        les activités de SACE ont toujours bénéficié d’une garantie de l’État, alors que les règles sur les aides d’État interdisent aux autres entreprises publiques opérant en concurrence avec les opérateurs privés du marché de jouir d’un tel avantage ;

–        les états financiers de SACE sont soumis au contrôle de la Corte dei conti (Cour des comptes italienne) et le MEF est tenu de faire rapport annuellement des activités de SACE au parlement italien ;

–        en ce qui concerne l’influence de l’État sur l’octroi des ressources de SACE, le CIPE adopte, au plus tard le 30 juin de chaque année, un plan prévisionnel des engagements d’assurance et des besoins financiers relatifs à des risques déterminés et définit les limites globales des engagements liés aux risques non cessibles que SACE peut assumer, en établissant une distinction entre les garanties selon que leur durée est inférieure ou supérieure à 24 mois.

65      Il convient d’apprécier la portée en l’espèce de ces quatre indices, qui, selon la Commission, visent en réalité à démontrer que les autorités publiques utilisent le groupe SACE non seulement dans le secteur des risques non cessibles, mais également dans celui des risques cessibles, pour soutenir le système des entreprises en Italie et favoriser ainsi le développement économique du pays.

66      Le premier indice mentionné au point 64 ci-dessus se rapporte à la mission de promotion de la compétitivité de l’économie italienne, confiée à SACE « essentiellement en ce qui concerne les risques non cessibles ». Il est à noter à cet égard que ni les requérantes ni la République italienne ne contestent cette présentation de la mission de SACE par la Commission dans la décision attaquée. Elles semblent ainsi admettre implicitement que la mission de SACE, dans la mesure où elle concerne essentiellement, mais non exclusivement, les risques non cessibles, s’étend également au secteur concurrentiel de l’assurance des risques cessibles. Or, le champ d’application de la mission d’intérêt général de SACE ressort de l’article 4, paragraphes 1 et 2, des statuts de cette société, définissant son objet (voir point 6 ci-dessus). Ainsi, l’article 4, paragraphe 1, de ces statuts se réfère de manière générale à la couverture « des risques de caractère politique, des risques de catastrophe, des risques économiques, commerciaux et de change, ainsi que des risques complémentaires, auxquels sont exposés, directement ou indirectement, les opérateurs [italiens] et les sociétés, y compris étrangères, auxquelles ils sont liés ou qu’ils contrôlent, dans leur activité à l’étranger et [concernant] l’internationalisation de l’économie italienne ». Quant à l’article 4, paragraphe 2, il vise expressément la fourniture, dans les conditions du marché et le respect de la réglementation de l’Union, « de garanties et de couvertures d’assurance à des entreprises étrangères en relation avec des opérations de portée stratégique pour l’économie italienne sous l’angle de l’internationalisation, de la sécurité économique et de l’activation des processus de production et d’emploi en Italie » (voir point 6 ci-dessus).

67      Cette mission d’intérêt général, englobant explicitement la couverture notamment de risques qui sont définis comme des risques cessibles dans la communication sur l’assurance crédit à l’exportation (voir point 3 ci-dessus) et se référant en outre à la fourniture de services d’assurance dans les conditions du marché en ce qui concerne des opérations d’intérêt stratégique pour l’économie italienne, dépasse ainsi la seule mission de couverture des risques non cessibles, laquelle ne relève pas du secteur concurrentiel.

68      Partant, la mission d’intérêt général confiée à SACE par ses statuts inclut également l’assurance des risques cessibles, pour la couverture desquels Sace BT a été créée (voir points 8 et 11 ci-dessus).

69      Certes, au considérant 177, sous b), i), de la décision attaquée, la Commission se réfère à la mission de promotion « de la compétitivité de l’économie italienne, essentiellement en ce qui concerne les risques non cessibles » (voir point 64 ci-dessus). Bien qu’elle mette ainsi plus spécialement l’accent sur la finalité d’intérêt général poursuivie par SACE dans le secteur de l’assurance des risques non cessibles, il n’en demeure pas moins que la Commission invoque la finalité générale de soutien de l’économie italienne assignée à SACE, par l’article 4, paragraphes 1 et 2, de ses statuts, en ce qui concerne l’ensemble de son activité, laquelle peut aussi s’exercer dans le secteur de l’assurance des risques cessibles, ainsi qu’il ressort de l’article 6, paragraphe 12, du décret-loi n° 269 (voir point 8 ci-dessus).

70      Le deuxième indice visé au considérant 177, sous b), de la décision attaquée (voir point 64 ci-dessus) concerne la garantie de l’État dont bénéficie SACE. À la différence du premier indice examiné aux points 66 à 69 ci-dessus, cet indice se rapporte uniquement à l’activité de SACE dans le secteur de l’assurance des risques non cessibles. Il ressort expressément de l’article 5, paragraphe 2, des statuts de SACE que, lors de la période pertinente, « l’activité d’assurance et de garantie des risques définis par la réglementation de l’Union européenne comme étant des risques cessibles ne bénéfici[ait] pas de la garantie de l’État et [était] régie par la réglementation en matière d’assurances privées ».

71      Cet indice relatif à la garantie de l’État confirme cependant que les activités de SACE n’étaient pas celles qu’exerce une compagnie commerciale d’assurance crédit à l’exportation dans les conditions du marché, mais qu’elles étaient celles d’une compagnie d’assurance publique bénéficiant d’un statut dérogatoire et poursuivant des objectifs de soutien à l’économie définis par les pouvoirs publics, en servant d’instrument pour la promotion des exportations, grâce en particulier à la garantie de l’État (voir point 67 ci-dessus).

72      Le troisième indice visé au considérant 177, sous b), de la décision attaquée (voir point 64 ci-dessus) se rapporte au contrôle annuel des comptes de SACE par la Corte dei conti, prévu par l’article 6, paragraphe 16, du décret-loi n° 269, et à l’obligation du MEF de présenter chaque année le rapport d’activité de SACE au parlement italien, en vertu de l’article 6, paragraphe 17, de ce même décret-loi. Comme le relève la Commission, ces contrôles, même s’ils s’appliquent également à d’autres entreprises publiques, ne s’appliquent pas à l’ensemble des entreprises publiques intégralement détenues par l’État, ce qui confirme le cadre général du contrôle public spécifique exercé sur SACE. Lors de l’audience, la République italienne a cependant relevé, sans être contredite par la Commission, que le dernier rapport d’activité de SACE au parlement était celui de 2008.

73      Ce troisième indice n’est pas déterminant en lui-même. En effet, dans la mesure où ces contrôles financier et politique, d’une part, interviennent a posteriori et, d’autre part, portent en principe sur l’ensemble des comptes ou de l’activité de SACE, ils ne permettent pas à eux seuls de présumer que les autorités publiques ont influencé concrètement les prises de décision en amont, telles que celles relatives aux mesures litigieuses. Il n’en demeure pas moins que les possibilités de contrôle attestent de l’intérêt de l’État italien dans les activités de SACE et qu’elles sont donc pertinentes comme éléments du faisceau d’indices sur lequel la Commission s’est fondée.

74      Le quatrième indice visé au considérant 177, sous b), de la décision attaquée (voir point 64 ci-dessus) est relatif à l’approbation par le CIPE d’un plan prévisionnel des engagements d’assurance de SACE et des besoins financiers relatifs à des risques déterminés ainsi qu’à la définition par le CIPE des limites globales des engagements liés aux risques non cessibles que SACE peut assumer, conformément à l’article 6, paragraphe 9, du décret-loi n° 269, lequel renvoie aux dispositions de l’article 2, paragraphe 3, du décret législatif n° 143 (voir point 9 ci-dessus).

75      À cet égard, les requérantes soutiennent que la décision d’approbation du CIPE se limite à transposer et à formaliser le plan prévisionnel préalablement approuvé par le conseil d’administration de SACE. En réalité, la finalité de la procédure d’approbation par le CIPE (voir point 9 ci-dessus) consisterait uniquement à informer l’État de l’étendue de son exposition potentielle maximale au risque résultant de la garantie qu’il accorde en ce qui concerne les couvertures d’assurance offertes par SACE dans le secteur des risques non cessibles. Le plan prévisionnel soumis à une telle approbation ne concernerait d’ailleurs pas les activités de Sace BT.

76      Cette argumentation ne saurait être accueillie. La Commission soutient à bon droit que l’approbation du plan prévisionnel de SACE par le CIPE, qui est l’organe supérieur de coordination et de direction de la politique économique italienne, montre que cette entreprise n’exerce pas ses activités dans des conditions d’autonomie totale de gestion et peut ainsi être considérée comme agissant sous le contrôle des autorités publiques, pour le moins en ce qui concerne l’adoption des décisions importantes.

77      En effet, l’activité principale de SACE, sur le marché des risques non cessibles, s’inscrit dans le cadre du plan prévisionnel qui, bien qu’établi par le conseil d’administration de la société, doit être approuvé par le CIPE. Une telle procédure d’approbation, par l’autorité qui détermine les orientations de la politique économique nationale, ne saurait avoir une portée purement informative. En l’absence de tout indice contraire (voir point 83 ci-après), elle indique que SACE est tenue de prendre en considération les exigences des pouvoirs publics, en contrepartie de la garantie de l’État dont elle bénéficie.

78      En troisième lieu, les requérantes et la République italienne contestent toute valeur probante à l’indice tiré de ce que l’article 5, paragraphe 2, des statuts de Sace BT prévoit que la participation de SACE dans le capital de cette filiale ne peut pas être inférieure à 30 %, conformément à l’article 6, paragraphe 12, du décret-loi n° 269 (voir point 55 ci-dessus).

79      Certes, les requérantes observent à juste titre qu’une participation de 30 % ne permettrait pas à SACE de contrôler l’activité de sa filiale. Cependant, bien qu’une telle disposition ne suffise pas à elle seule pour présumer que les autorités publiques étaient concrètement impliquées dans l’adoption des mesures litigieuses, elle constitue, conformément à la jurisprudence, un indice résultant du contexte de cette adoption, susceptible d’être pris en considération (voir point 45 ci-dessus).

80      En effet, comme le relève la Commission, cette participation peut être considérée comme visant à garantir un certain niveau d’engagement public dans l’activité d’assurance des risques cessibles, par l’intermédiaire de SACE, entièrement détenue par l’État au cours de la période pertinente, et confirme que SACE est assujettie à un régime juridique spécial, y compris dans le secteur susmentionné.

81      Dans ces conditions, pris dans leur ensemble, les indices généraux relatifs au contexte dans lequel les mesures litigieuses ont été adoptées, examinés aux points 55 à 80 ci-dessus, permettent d’établir à suffisance de droit que ces mesures sont imputables à l’État, eu égard à leur importance pour l’économie italienne.

82      En effet, compte tenu de l’ampleur et de l’objet des mesures litigieuses, dont le montant total s’élève à plus de 70 millions d’euros, l’ensemble des indices invoqués par la Commission, relatifs aux liens organiques institués par des dispositions législatives spécifiques entre SACE et les autorités publiques (voir points 57 à 63 ci-dessus), aux objectifs de promotion de la compétitivité de l’économie italienne assignés à SACE par ses statuts (voir points 66 à 69 ci-dessus), au soutien de l’État sous la forme d’une garantie de l’État accordée à SACE dans l’exercice de son activité principale (voir points 70 et 71 ci-dessus), au contrôle préalable (voir points 74 à 78, ci-dessus) et a posteriori (voir points 72 et 73 ci-dessus) exercé par les pouvoirs publics sur l’activité de SACE ainsi qu’à un certain niveau d’engagement public dans le secteur de l’assurance des risques cessibles (voir point 80 ci-dessus) démontre que l’absence d’implication des autorités publiques dans l’adoption des mesures litigieuses est improbable.

83      Cette analyse n’est pas infirmée par l’argument de la République italienne relatif à la pratique du MEF de ne pas intervenir dans les décisions des entreprises publiques, comme en attesteraient deux notes émanant de ce ministère, rappelant que les opérations décidées par le conseil d’administration de SACE n’étaient pas soumises à son approbation (voir point 36 ci-dessus). En effet, d’une part, comme le relève la Commission, ces notes ne sauraient être invoquées en l’espèce, dans la mesure où elles n’ont pas été présentées à la Commission lors de la procédure administrative ( voir arrêt du 25 juin 2008, Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission, T‑268/06, Rec, EU:T:2008:222, point 56 ; voir également, en ce sens, arrêt du 15 avril 2008, Nuova Agricast, C‑390/06, EU:C:2008:224, point 54 et jurisprudence citée). D’autre part, et en tout état de cause, les opérations visées dans ces notes n’avaient pas la même portée, au regard des objectifs de soutien de la compétitivité de l’économie italienne, que celle des mesures litigieuses. Enfin, l’absence d’approbation formelle ne saurait exclure l’existence d’une implication concrète des autorités publiques dans l’adoption d’une mesure. Or, une telle implication ressort, en l’espèce, de l’ensemble des indices rappelés au point 82 ci-dessus.

84      Partant, au vu de l’ensemble des indices généraux mentionnés dans la décision attaquée, la Commission s’est légitimement fondée, au point 180 de la décision attaquée, sur la constatation selon laquelle SACE était étroitement liée aux autorités publiques italiennes, lesquelles l’utilisaient dans le cadre de leur politique de soutien de l’activité de l’économie italienne, pour conclure à l’imputabilité des mesures litigieuses à l’État.

85      La pertinence des trois indices généraux est confirmée par ailleurs par les indices spécifiques invoqués aux considérants 178 et 179 de la décision attaquée. Il s’agit en substance de déclarations de membres du conseil d’administration de SACE faites lors de l’adoption des mesures litigieuses.

86      Certes, les requérantes et la République italienne soutiennent que ces déclarations, citées aux considérants 178 et 179 de la décision attaquée, constituent des éléments circonstanciels traduisant uniquement l’attente de leurs auteurs relative aux retombées positives des mesures examinées sur l’économie.

87      Il convient cependant de relever que les déclarations citées au considérant 178, sous a) et b), et au considérant 179 de la décision attaquée, actées dans les procès-verbaux, d’une part, de la réunion du conseil d’administration de SACE du 1er avril 2009 et, d’autre part, de la réunion de ce conseil d’administration du 26 mai 2009, se réfèrent à des objectifs d’intérêt général. Il en est de même des considérations invoquées au considérant 178, sous c), de la décision attaquée, extraites du procès-verbal de la réunion du conseil d’administration de Sace BT du 27 mai 2009.

88      Même si, envisagées séparément, les déclarations susmentionnées ne présentent qu’une valeur probante relativement faible, de telles déclarations appréciées au regard des indices généraux relatifs au contexte de l’adoption des mesures litigieuses doivent être considérées comme des indices supplémentaires confirmant que l’adoption des mesures litigieuses s’inscrivait dans la poursuite des objectifs de soutien à l’économie italienne assignés à SACE.

89      Pour l’ensemble de ces motifs, le premier moyen doit être rejeté.

 Sur les deuxième et troisième moyens, relatifs en substance à la violation du critère de l’investisseur privé en économie de marché et de l’obligation de motivation

90      Avant d’examiner ces deux moyens, il convient de rappeler à titre liminaire certains principes jurisprudentiels relatifs au critère de l’investisseur privé en économie de marché.

 Observations liminaires sur la jurisprudence relative au critère de l’investisseur privé en économie de marché

91      Selon la jurisprudence, les conditions que doit remplir une mesure pour relever de la notion d’aide, au sens de l’article 107 TFUE, ne sont pas satisfaites si l’entreprise bénéficiaire pouvait obtenir le même avantage que celui qui a été mis à sa disposition au moyen de ressources d’État, dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché, cette appréciation s’effectuant en principe par application du critère de l’investisseur privé en économie de marché (voir, en ce sens, arrêts du 5 juin 2012, Commission/EDF e.a., C‑124/10 P, Rec, EU:C:2012:318, point 78, et du 24 janvier 2013, Frucona Košice/Commission, C‑73/11 P, EU:C:2013:32, point 70).

92      L’application du critère de l’investisseur privé vise ainsi à déterminer si l’avantage accordé à une entreprise, sous quelque forme que ce soit, au moyen de ressources d’État est, en raison de ses effets, de nature à fausser ou à menacer de fausser la concurrence et à affecter les échanges entre les États membres (voir, en ce sens, arrêt Commission/EDF e.a., point 91 supra, EU:C:2012:318, point 89). Il convient de rappeler à cet égard que l’article 107, paragraphe 1, TFUE n’établit pas de distinction selon les causes ou les objectifs de l’intervention d’une entité publique, mais définit celle-ci en fonction de ses effets (arrêts Commission/EDF e.a., point 91 supra, EU:C:2012:318, point 77, et du 19 mars 2013, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a., C‑399/10 P et C‑401/10 P, Rec, EU:C:2013:175, point 102).

93      Pour rechercher si l’État membre ou l’entité publique concernée a adopté le comportement d’un opérateur privé avisé dans une économie de marché, il faut se replacer dans le contexte de l’époque au cours de laquelle les mesures en cause ont été prises, pour évaluer la rationalité économique du comportement de l’État membre ou de l’entité publique et donc s’abstenir de toute appréciation fondée sur une situation postérieure. La comparaison entre les comportements des opérateurs publics et privés doit ainsi être établie par rapport à l’attitude qu’aurait eue dans des circonstances similaires, lors de l’opération en cause, un opérateur privé eu égard aux informations disponibles et aux évolutions prévisibles à ce moment-là (voir, en ce sens, arrêt Stardust, point 33 supra, EU:C:2002:294, points 71 et 72). Partant, le constat rétrospectif de la rentabilité effective de l’opération réalisée par l’État membre ou l’entité publique concernée est privé de pertinence.

94      Cette jurisprudence constante a été confirmée par l’arrêt Commission/EDF e.a., point 91 supra (EU:C:2012:318), soulignant, en son point 105, que sont seuls pertinents, notamment aux fins de l’application du critère de l’investisseur privé, les éléments disponibles et les évolutions prévisibles au moment où la décision de procéder à l’opération en cause a été prise. Il en va ainsi, en particulier, lorsque, comme en l’espèce, la Commission examine l’existence d’une aide d’État par rapport à une mesure qui ne lui a pas été notifiée et qui a déjà été mise en œuvre par l’entité publique concernée au moment où elle effectue son examen.

95      Conformément aux principes relatifs à la charge de la preuve dans le secteur des aides d’État, il appartient à la Commission de rapporter la preuve d’une telle aide. À cet égard, la Commission est tenue de conduire la procédure d’examen des mesures en cause de manière diligente et impartiale, afin qu’elle dispose, lors de l’adoption d’une décision finale établissant l’existence et, le cas échéant, l’incompatibilité ou l’illégalité de l’aide, des éléments les plus complets et fiables possibles (voir, en ce sens, arrêts du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, Rec, EU:C:2010:480, point 90, et du 3 avril 2014, France/Commission, C‑559/12 P, Rec, EU:C:2014:217, point 63). S’agissant du niveau de preuve requis, la nature des éléments de preuve devant être rapportés par la Commission est, dans une large mesure, tributaire de la nature de la mesure étatique envisagée (voir, en ce sens, arrêt France/Commission, précité, EU:C:2014:217, point 66).

96      Par conséquent, lorsqu’il apparaît que le critère de l’investisseur privé pourrait être applicable, il appartient à la Commission de demander à l’État membre concerné de lui fournir toutes les informations pertinentes lui permettant de vérifier si les conditions d’applicabilité et d’application de ce critère sont remplies (arrêts Commission/EDF e.a., point 91 supra, EU:C:2012:318, point 104, et du 3 avril 2014, Commission/Pays-Bas et ING Groep, C‑224/12 P, Rec, EU:C:2014:213, point 33). Si l’État membre lui fait parvenir des éléments de la nature requise, la Commission est tenue d’effectuer une appréciation globale prenant en compte tout élément pertinent en l’espèce lui permettant de déterminer si l’entreprise bénéficiaire n’aurait manifestement pas obtenu des facilités comparables d’un opérateur privé (arrêt Frucona Košice/Commission, point 91 supra, EU:C:2013:32, point 73).

97      Dans ce contexte, il incombe à l’État membre ou à l’entité publique concernée de communiquer à la Commission les éléments objectifs et vérifiables faisant apparaître que sa décision est fondée sur des évaluations économiques préalables comparables à celles que, dans les circonstances de l’espèce, un opérateur privé rationnel se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle de cet État ou de cette entité aurait fait établir, avant d’adopter la mesure en cause, en vue de déterminer la rentabilité future de cette mesure (voir, en ce sens, arrêts Commission/EDF e.a., point 91 supra, EU:C:2012:318, point 84 en relation avec le point 105, et du 3 juillet 2014, Espagne e.a./Commission, T‑319/12 et T‑321/12, EU:T:2014:604, point 49).

98      Cependant, les éléments d’évaluation économique préalable requis de la part de l’État membre ou de l’entité publique concernée doivent être modulés en fonction de la nature et de la complexité de l’opération en cause, de la valeur des actifs, des biens ou des services concernés et des circonstances de l’espèce (voir points 122, 123, 178 et 179 ci-après).

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’erreurs d’appréciation et d’erreurs de droit dans l’application du critère de l’investisseur privé ainsi que de l’insuffisance de motivation, en ce qui concerne la deuxième mesure

99      La deuxième mesure concerne la couverture de réassurance du type excédent de sinistre (ou « réassurance XoL ») pour les risques cessibles, accordée par SACE à Sace BT, en 2009. La réassurance XoL est un type de contrat dans lequel la réassurance intervient jusqu’à un certain seuil et uniquement quand un sinistre particulier ou un groupe de sinistres dépasse un niveau prédéfini.

100    Il est constant entre les parties que, dans le passé, Sace BT avait obtenu sa propre réassurance principalement auprès d’opérateurs privés. Lors de la reconduction des contrats pour 2009, en pleine crise financière et économique mondiale, Sace BT a contacté 21 opérateurs privés et obtenu de cinq d’entre eux une couverture égale à 25,85 % de la réassurance XoL pour la part des sinistres excédant 5 millions d’euros et jusqu’à 40 millions d’euros. Les taux de couverture souscrits par ces cinq réassureurs privés correspondaient respectivement à 10 %, à 7,5 %, à 3 %, à 2,85 % et à 2,5 %. Le 5 juin 2009, la part restante de la couverture, soit 74,15%, a été souscrite par SACE aux mêmes conditions de priorité, de portée et de rémunération que celles stipulées dans le traité annuel de réassurance de Sace BT pour 2009 et déjà acceptées par les cinq réassureurs privés.

101    Dans la décision attaquée (considérants 126 à 131), la Commission a estimé que, compte tenu du niveau de risque plus élevé à assumer, un réassureur privé n’aurait pas souscrit une couverture de réassurance de 74,15 % en faveur de Sace BT, aux conditions accordées par SACE, et que Sace BT avait dès lors obtenu un avantage, en se fondant en substance sur les considérations suivantes :

–        le refus des réassureurs privés contactés par SACE, lors du renouvellement de l’accord de réassurance pour 2009, de couvrir le solde de la réassurance en excédent de sinistre montrerait que cette couverture n’aurait pas pu être obtenue auprès des opérateurs du marché (considérant 127 de la décision attaquée) ;

–        dans le contexte de la crise financière mondiale, ayant conduit à l’instauration de conditions de réassurance plus sévères, certains réassureurs privés auraient diminué leurs activités dans cette branche et les auraient réorientées vers d’autres activités plus rentables (considérant 128) ;

–        compte tenu des pertes importantes subies en 2008 (environ 29,5 millions d’euros), la « position de faiblesse [de Sace BT] induisait des risques majeurs en matière de réassurance » (considérant 128) ;

–        un réassureur privé raisonnable « n’aurait jamais accepté de couvrir une part de réassurance aussi élevée (74,15 %) et aux mêmes conditions que celles imposées par les [autres] réassureurs pour une part de couverture beaucoup plus restreinte ». Il aurait exigé que la commission reflète le niveau supérieur de risque assumé (considérant 128) ;

–        le montant de l’aide correspondrait à la différence entre la commission qu’un réassureur privé aurait appliquée pour une part de réassurance aussi élevée et celle supportée par Sace BT. Conformément à sa pratique décisionnelle, la Commission était d’avis que la commission relative à une part de réassurance et de risque aussi élevée aurait dû être d’au moins 10 % supérieure à celle appliquée par les réassureurs privés pour une part nettement inférieure. Pour la somme de 1,56 million d’euros versée par Sace BT à SACE, le montant de l’aide à récupérer s’élèverait ainsi à 156 000 euros (considérant 128) ;

–        la participation de SACE, supérieure à 25 % des risques cédés, à l’accord de réassurance de Sace BT serait contraire aux principes généraux que s’était fixés cette filiale (considérant 128) ;

–        les mesures litigieuses devraient être analysées en parallèle et la circonstance que SACE soit la société mère de Sace BT ne permettrait nullement de conclure qu’elle a agi comme l’aurait fait une entreprise privée dans une situation analogue (considérants 126 et 129) ; 

–        la couverture de réassurance en cause aurait permis à Sace BT d’augmenter sa capacité d’assurance crédit (considérants 126 et 130).

102    D’une part, les requérantes contestent l’analyse de la Commission selon laquelle un réassureur privé n’aurait pas souscrit à la couverture de réassurance accordée par SACE à Sace BT aux mêmes conditions de rémunération que celles appliquées par les réassureurs privés pour un niveau de risque moindre. D’autre part, elles soutiennent que l’évaluation par la Commission du montant de l’aide à 10 % du montant de la commission versée par Sace BT à SACE est entachée d’une erreur d’appréciation et d’un défaut de motivation.

103    Il convient d’examiner d’abord si la Commission a pu considérer à bon droit que SACE, en accordant aux conditions souscrites la couverture de réassurance litigieuse à Sace BT, ne s’était pas comportée comme l’aurait fait un réassureur privé dans une situation similaire, avant de vérifier si l’évaluation par la Commission du montant de l’aide est suffisamment motivée.

–       Sur la comparaison du comportement de SACE avec celui d’un réassureur privé 

104    Les requérantes contestent les arguments de la Commission visant à montrer que SACE n’a pas agi comme l’aurait fait un réassureur privé. Premièrement, la participation des opérateurs privés, pour une part limitée, à la couverture de réassurance XoL ne s’expliquerait pas par les risques spécifiques du portefeuille de Sace BT, caractérisé par une évolution historique favorable aux réassureurs, mais essentiellement par la réticence des opérateurs réagissant de manière cyclique, notamment en réduisant leur capacité, face à leurs difficultés et à celles du marché. À l’inverse, SACE aurait bénéficié d’un patrimoine solide et d’une évolution économique positive lui permettant de saisir des opportunités de marché. Cela serait confirmé par le bénéfice important obtenu au titre du contrat de réassurance conclu avec Sace BT, SACE n’ayant enregistré aucun sinistre au titre des commissions encaissées d’un montant de 1,56 million d’euros.

105    Deuxièmement, la Commission soutiendrait à tort, dans le mémoire en défense, que le consentement de SACE au contrat de réassurance XoL de Sace BT était un choix non pas « autonome, mais […] déterminé par le refus du marché de couvrir plus de 25,85 % de la réassurance ». Il n’existerait aucune prescription légale ou de solvabilité obligeant Sace BT à disposer d’une couverture de réassurance XoL intégrale. Le contrat de réassurance XoL en cause couvrirait uniquement contre certains sinistres déterminés ayant un caractère exceptionnel. Ce contrat n’aurait dès lors eu pour objet ni d’améliorer le rendement technique courant de Sace BT, ni de permettre à celle-ci de constituer des capacités supplémentaires. La couverture de réassurance aurait été souscrite entre SACE et Sace BT dans une perspective de bénéfice mutuel. L’objectif poursuivi par Sace BT aurait été de réduire les risques extrêmes afin de protéger sa solidité à moyen et à long terme. À l’inverse, SACE aurait été intéressée par la diversification marquée du portefeuille de Sace BT et par une phase du cycle économique où les primes d’assurance étaient élevées.

106    Troisièmement, les requérantes allèguent que, lors de l’adoption de la deuxième mesure, la réassurance était un produit offert par SACE à tous les opérateurs du marché, à des conditions équivalentes à celles accordées à Sace BT. SACE n’aurait pas souscrit de tels contrats avec d’autres opérateurs, du seul fait de l’absence de propositions émanant d’autres opérateurs, parce qu’au sein des groupes d’assurance les opérateurs bénéficient de la couverture préférentielle de leurs sociétés spécialisées dans la réassurance. Rien n’autoriserait dès lors la Commission à considérer que des demandes de couverture d’assurance aux mêmes conditions que celles accordées à Sace BT auraient été rejetées.

107    Quatrièmement, l’affirmation de la Commission, au considérant 128 de la décision attaquée, selon laquelle un réassureur privé n’aurait jamais accepté de couvrir une part de réassurance aussi élevée aux conditions consenties par SACE à Sace BT ne serait étayée par aucun résultat d’instruction. Or, ainsi qu’il est mentionné au considérant 179 de la décision attaquée, la décision de SACE d’assumer cette part de couverture serait fondée sur une analyse risques/rendement du 19 mars 2009, effectuée par le service de gestion des risques de cette société, sur la base de l’évaluation du courtier d’assurance AON Re Global, qui avait qualifié de rentable le contrat de réassurance XoL de Sace BT.

108    Cinquièmement, selon la littérature économique dominante et dans la pratique des plus importants réassureurs internationaux du marché, la tarification dans l’activité de la réassurance ne dépendrait pas seulement du niveau de risque couru. Par ailleurs, la seule décision prise par les réassureurs XoL porterait sur la part de risque à réassurer. Quant à la commission, elle serait négociée préalablement dans le cadre d’un processus de négociation entre le cédant, les courtiers et les réassureurs et ne varierait pas en fonction des réassureurs ou des parts de risques assumés.

109    Sixièmement, les requérantes contestent la constatation de la Commission, au considérant 130 de la décision attaquée, selon laquelle, en substance, la couverture de réassurance fournie par SACE a conféré un avantage à Sace BT, en lui permettant d’augmenter sa capacité d’assurance crédit, sans assumer les risques en question sur ses seuls fonds propres ou proposer une rémunération du solde de sa couverture de réassurance supérieure d’au moins 10 % à celle versée aux autres réassureurs privés. Les requérantes font valoir que le volume et la valeur des contrats signés au cours d’un exercice dépendent d’un ensemble de facteurs essentiellement liés aux objectifs de développement de la compagnie et à leurs sous-variantes opérationnelles.

110    La Commission conteste l’ensemble de cette argumentation.

111    Afin de déterminer si SACE a agi comme l’aurait fait un réassureur privé se trouvant dans une situation similaire, il appartenait à la Commission de vérifier, au vu des éléments pertinents dont elle disposait, si, avant d’adopter la deuxième mesure, SACE avait effectué une appréciation économique appropriée de la rentabilité de cette mesure au regard des risques assumés.

112    À cet égard, il convient de rappeler que, si, dans le cadre du contrôle des aides d’État, l’État membre doit, en vertu du devoir de coopération loyale prévu à l’article 4, paragraphe 3, TUE, fournir à la Commission les éléments lui permettant de se prononcer sur la nature d’aide d’État de la mesure en cause, la Commission est tenue, en vertu de son devoir d’examen diligent et impartial (voir point 95 ci-dessus), d’examiner avec soin les éléments qui lui sont fournis par l’État membre (arrêt du 30 avril 2014, Dunamenti Erőmű/Commission, T‑179/09, EU:T:2014:236, point 176). Conformément à l’esprit de la procédure formelle d’examen, qui attribue aux intéressés le rôle de source d’information de la Commission [voir, en ce sens, arrêt du 31 mai 2006, Kuwait Petroleum (Nederland)/Commission, T‑354/99, Rec, EU:T:2006:137, point 89], une telle obligation s’impose également à la Commission en ce qui concerne les informations qui lui ont été communiquées par les intéressés.

113    Or, dans le cadre de son appréciation de la conformité de la deuxième mesure au critère de l’investisseur privé, la Commission n’a pas explicitement pris position, dans la décision attaquée, sur le contenu de la note, établie le 19 mars 2009 par le service de gestion des risques de SACE dans le but de vérifier si le « taux estimé de rentabilité de l’accord de réassurance était conforme aux risques assumés », et invoquée par les requérantes (voir point 107 ci-dessus). Cette note avait pourtant été communiquée à la Commission par SACE, pendant la procédure administrative, ainsi qu’en atteste le considérant 179 de la décision attaquée, mentionnant ladite note et indiquant que, lors de sa réunion du 1er avril 2009, le conseil d’administration de SACE avait approuvé la participation de SACE au contrat d’assurance en excédent de sinistre de Sace BT pour le montant non couvert par les réassureurs du marché.

114    La note du 19 mars 2009 revêt cependant une importance certaine. En effet, il ressort de l’argumentation des parties et des pièces du dossier que les seules évaluations économiques sur lesquelles SACE se soit fondée pour adopter la deuxième mesure, discutée pour la première fois lors de la réunion du conseil d’administration de SACE du 11 février 2009, selon les requérantes, figuraient dans cette note du 19 mars 2009 et dans le rapport du courtier d’assurance AON Re Global, sur lequel cette note se fondait.

115    En outre, les requérantes n’invoquent aucun autre document qui aurait été soumis au conseil d’administration de SACE en vue de l’examen de la participation de cette société au contrat de réassurance de Sace BT.

116    Toutefois, eu égard tant aux observations de SACE et des autorités italiennes au cours de la procédure administrative qu’au contenu de la note du 19 mars 2009 et du rapport d’AON Re Global susmentionnés, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas s’être explicitement prononcée sur le contenu de ces données, dans la décision attaquée, afin d’apprécier si l’octroi de la deuxième mesure se fondait sur une analyse préalable de sa rentabilité.

117    En effet, d’une part, il ne ressort pas du résumé de leurs observations aux points 68 à 71 de la décision attaquée, et les requérantes ainsi que la République italienne ne soutiennent pas devant le Tribunal, qu’elles avaient fait valoir, lors de la procédure administrative, que SACE avait procédé à une analyse ex ante de la rentabilité de la deuxième mesure et donc de sa rationalité économique, sur la base des documents susmentionnés. Lors de la procédure administrative, elles ont mis l’accent sur le fait que les conditions souscrites par SACE étaient identiques à celles acceptées par les réassureurs privés ayant participé à la couverture d’assurance de Sace BT.

118    D’autre part, la note du 19 mars 2009 émane du service de gestion des risques de SACE, service qui était appelé à vérifier si la rentabilité estimée de l’accord de réassurance de Sace BT était conforme aux risques assumés. Or, ce service avait émis un avis favorable à la participation de SACE à cet accord, en se fondant essentiellement sur le rapport du courtier en assurances AON Re Global du 14 novembre 2008. Ce rapport contenait des estimations, effectuées pour Sace BT en vue du renouvellement de son traité de réassurance, en 2009, et fondées sur l’analyse de l’incidence du traité de réassurance de 2008 sur les résultats et les exigences actuelles et futures de Sace BT en matière de fonds propres. Dans la note du 19 mars 2009, le service de gestion des risques de SACE n’a cependant effectué aucune mise à jour des informations datant de 2008. Ni la note du 19 mars 2009 ni le rapport d’AON Re Global ne tenaient ainsi compte de la crise financière qui avait frappé l’économie européenne à la fin de l’année 2008 et qui avait provoqué une détérioration de la situation économique dans la zone euro en 2009. En outre, cette note ne contenait pas la moindre indication permettant de supposer que l’importance de la participation à l’accord, à hauteur de 74,15 %, envisagée par SACE et, partant, l’importance de son exposition aux risques avaient été prises en considération pour évaluer la rentabilité estimée d’une telle participation.

119    Dès lors, la Commission n’était pas tenue de prendre position, dans la décision attaquée, sur la valeur probante de la note du 19 mars 2009 et du rapport du 14 novembre 2008. Il lui suffisait d’exposer de manière suffisante les raisons pour lesquelles elle avait considéré que des opérateurs privés n’auraient pas accepté de souscrire à la deuxième mesure aux conditions consenties par SACE.

120    Il s’ensuit que la Commission ne disposait d’aucun document écrit pertinent  lorsqu’elle a analysé la question de savoir si SACE avait agi en tant que réassureur privé. Il y a donc lieu de s’interroger sur les conséquences à tirer de l’absence de communication à la Commission d’éléments d’évaluation économique préalable, pertinente et documentée de la rentabilité estimée de la deuxième mesure tenant compte de l’ensemble des facteurs qu’un réassureur privé, agissant dans des conditions de marché, aurait pris en considération.

121    Certes, selon la jurisprudence (voir point 97 ci-dessus), il appartient à l’État membre ou à l’entité publique concernée de faire apparaître que sa décision était fondée sur des évaluations économiques comparables à celles qu’un opérateur privé rationnel se trouvant dans une situation similaire aurait fait établir, avant d’adopter la mesure considérée, pour établir la rentabilité future d’un tel investissement. À cette fin, fournir lors de la procédure administrative des études de sociétés de conseil indépendantes commandées préalablement à l’adoption de la mesure considérée peut contribuer à démontrer que l’État membre ou l’entité publique a mis en œuvre cette mesure en sa qualité d’opérateur sur le marché (voir, en ce sens, arrêt Espagne e.a./Commission, point 97 supra, EU:T:2014:604, point 49).

122    Cependant, les éléments d’évaluation économique requis de la part de l’entité publique dispensatrice de l’aide doivent être appréciés in concreto et varient en fonction de la nature et de l’ampleur des risques économiques encourus (voir point 98 ci-dessus). En l’espèce, l’évaluation de la rentabilité de la deuxième mesure, qui consistait en une transaction commerciale, pouvait être réalisée sur la base d’une analyse relativement circonscrite, d’une part, des risques assumés et, d’autre part, du caractère approprié du montant de la commission de réassurance au regard de l’étendue du risque.

123    Dans ces conditions, eu égard au montant certes non négligeable mais cependant relativement limité de la transaction, la seule circonstance que SACE n’ait pas fourni la preuve qu’elle avait procédé ex ante à une évaluation économique du montant de la prime reflétant le niveau de risque assumé, afin de déterminer la rentabilité de la couverture de réassurance de Sace BT, ne suffit pas pour considérer qu’elle n’a pas agi comme un réassureur privé placé dans une situation comparable.

124    Il convient dès lors d’examiner les indices sur lesquels s’est fondée la Commission, dans la décision attaquée, pour reprocher à SACE d’avoir accordé le solde de la couverture de réassurance aux mêmes conditions de rémunération que celles appliquées par les réassureurs privés pour des risques moindres.

125    En premier lieu, parmi ces indices, la Commission a en particulier insisté sur le fait que, malgré ses nombreuses tentatives, Sace BT n’est pas parvenue à obtenir auprès des réassureurs privés une couverture de réassurance au-delà de 25,85 % (voir point 101, premier tiret, ci-dessus). Les requérantes allèguent à cet égard que le refus des réassureurs privés d’assumer, en 2009, contrairement aux années précédentes, une couverture de réassurance au-delà de 25,85 %, s’explique par la réduction cyclique de leur activité, pour faire face à la situation de crise économique et financière, et non par les risques liés au portefeuille de Sace BT (voir point 104 ci-dessus).

126    En admettant que la situation de crise ait constitué l’un des facteurs de ce refus des réassureurs privés de participer au traité de réassurance de Sace BT au-delà de 25,85 % (voir point 100 ci-dessus), il y a lieu de relever que la crise affectait les conditions du marché et augmentait le risque de sinistres pour l’ensemble des opérateurs concernés, y compris SACE, malgré la solidité de son patrimoine et l’évolution positive de son activité, invoquées par les requérantes. Or, le contexte de crise et la réduction alléguée de l’offre de réassurance, ne pouvaient qu’inciter un opérateur rationnel à évaluer avec la plus grande attention les risques assumés et la rentabilité de l’opération en cause. À cet égard, l’affirmation de la Commission, au considérant 128 de la décision attaquée, selon laquelle la crise financière a conduit à l’instauration de conditions de réassurance plus sévères (voir point 101, deuxième tiret, ci-dessus) n’est d’ailleurs pas contestée par les requérantes.

127    Or, les requérantes n’avancent aucun élément permettant de supposer que l’appréciation par les réassureurs privés de la rentabilité d’une participation plus élevée au traité de réassurance de Sace BT, au regard de l’importance des risques assumés, n’a pas joué un rôle essentiel dans ce refus. Certes, les requérantes allèguent que l’examen des accords de réassurance de Sace BT, de 2009 à 2011, montre que « le taux de crédit payé à différents réassureurs a été le même », bien que les parts réassurées par les différents opérateurs privés aient varié de 2,5 % à 10 % en 2009 (voir point 100 ci-dessus) et de 5 % à 15 % en 2010 et en 2011. De même, il ressort de la réponse des requérantes à une question écrite du Tribunal que, de 2005 à 2008, période au cours de laquelle Sace BT avait obtenu l’intégralité de sa couverture de réassurance sur le marché, le montant de la commission prévue par les traités de réassurance annuels pour la couverture de l’ensemble des risques réassurés de Sace BT était également versé par cette dernière aux différents réassureurs au prorata de leurs taux de participation respective auxdits traités. Toutefois, au cours de cette période, les taux de couverture souscrits par les réassureurs privés s’échelonnaient entre 3 et 28 %. Ces différents taux de participation consentis par des réassureurs privés, aux mêmes conditions de rémunération, sont cependant sans commune mesure avec la participation de 74,15 % de SACE au traité de réassurance de Sace BT de 2009. Les anciens contrats de réassurance de Sace BT, invoqués par les requérantes, ne permettent donc de tirer aucune conclusion en ce qui concerne la corrélation qui aurait été établie par des opérateurs privés se trouvant dans une situation similaire, entre le niveau de la rémunération et la décision d’accorder une couverture de réassurance de plus de 74 %.

128    En deuxième lieu, en ce qui concerne la controverse relative à la question de savoir si la couverture de réassurance litigieuse avait été accordée par SACE à Sace BT afin de pallier « l’absence de capacité de réassurance » sur le marché, ainsi que l’énonce le procès-verbal de la réunion du conseil d’administration de SACE du 26 mai 2009, invoqué par la Commission, ou dans une perspective de bénéfice mutuel, ainsi que le soutiennent les requérantes (voir point 105 ci-dessus), il convient de rappeler, d’abord, qu’il est constant entre les parties que Sace BT n’est pas parvenue à obtenir, sur le marché, le solde de 74,15 % de sa couverture de réassurance aux conditions de rémunération acceptées par SACE (voir point 100 ci-dessus).

129    Il convient de rappeler, ensuite, qu’il ne ressort ni du dossier ni des documents communiqués à la Commission lors de la procédure administrative et produits par les requérantes devant le Tribunal à la demande de ce dernier que la deuxième mesure ait été envisagée sous l’angle de sa rentabilité pour SACE. Il s’agit notamment du procès-verbal de la réunion du conseil d’administration de SACE du 11 février 2009, au cours de laquelle la participation de SACE au traité de réassurance de Sace BT de 2009 a été délibérée pour la première fois, et de celui de la réunion de ce conseil d’administration du 1er avril 2009, au cours de laquelle l’adoption de la deuxième mesure a été approuvée, ainsi que des documents soumis au conseil d’administration lors de ces deux réunions. En effet, il ressort explicitement du procès-verbal du 1er avril 2009, actant l’approbation de la participation de SACE au traité de réassurance de Sace BT pour la part non acceptée par les réassureurs privés et sous les mêmes conditions que celles consenties par ces derniers, que cette participation a été décidée, « eu égard à la conjoncture défavorable [d’alors] », pour permettre à Sace BT de maintenir sa capacité d’assurance, en particulier dans le segment des petites et moyennes entreprises. En outre, ni le procès-verbal de la réunion du conseil d’administration de SACE du 26 mai 2009 – qui rappelle « la participation de SACE au programme de réassurance de Sace BT, conformément aux délibérations du conseil d’administration du 11 février et du 1er avril 2009 » – ni les documents soumis audit conseil d’administration, lors de cette réunion, ne renferment d’éléments relatifs notamment au nombre de sinistres enregistrés par Sace BT depuis le début de l’année 2009 (voir point 134 ci-après), permettant de supposer que la rentabilité pour SACE de la couverture de réassurance litigieuse a été prise en considération avant la souscription de ce contrat en faveur de Sace BT le 5 juin 2009.

130    En troisième lieu, pour démontrer l’inadéquation du montant de la commission versée par Sace BT au niveau de risques assumés par SACE, la Commission soutient, au considérant 128 de la décision attaquée, que les pertes importantes, de l’ordre de 29,5 millions d’euros, subies par Sace BT en 2008 induisaient des risques majeurs en matière de réassurance.

131    À cet égard, les requérantes ne contestent pas le fait, mentionné dans la note en bas de page n° 101 du considérant 128 de la décision attaquée, que – selon le procès-verbal de l’inspection effectuée le 11 octobre 2010 par l’Istituto per la vigilanza sulle assicurazione private (ISVAP, autorité administrative de surveillance des assurances privées italienne), dans les locaux de Sace BT, produit par la Commission à la demande du Tribunal – plusieurs réassureurs privés ayant pris part aux discussions sur le renouvellement de la réassurance de Sace BT avaient exprimé des préoccupations quant à la situation de cette entreprise. L’un des réassureurs aurait ainsi expliqué son refus de participer au traité de réassurance en excès de sinistre de 2009 notamment par le taux élevé de pertes les deux dernières années et par le prix du programme. En outre, lors de l’audience, la Commission a explicité, sans être contredite par les requérantes et par la République italienne, le lien entre, d’une part, l’exposition des réassureurs aux risques et, d’autre part, les difficultés financières subies par Sace BT en 2008 en raison de l’augmentation des sinistres à la suite de la crise.

132    Certes, les requérantes et la République italienne ont indiqué à cet égard, lors de l’audience, que, au moment de la souscription par SACE du solde de la couverture de réassurance de Sace BT, le 5 juin 2009, aucun sinistre ne s’était encore produit. Toutefois, il ne ressort ni du dossier ni des éléments produits par les requérantes que l’absence de sinistres durant le premier trimestre de 2009, puis au cours des deux mois suivants, ait été prise en considération par le conseil d’administration de SACE, lors de l’approbation de la deuxième mesure, le 1er avril 2009, ou lors de la signature du contrat, le 5 juin 2009, ainsi qu’il a été constaté au point 129  ci-dessus.

133    En outre, il n’est pas établi, et les requérantes ainsi que la République italienne ne soutiennent d’ailleurs pas, que l’absence de sinistre, avant la souscription de la couverture de réassurance litigieuse, le 5 juin 2009, avait été portée à la connaissance de la Commission, lors de la procédure administrative, afin de justifier l’adoption de la deuxième mesure. Or, conformément à la jurisprudence (arrêt du 25 juin 2008, Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission, point 83 supra, EU:T:2008:222, point 56 ; voir également, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a., C‑341/06 P et C‑342/06 P, Rec, EU:C:2008:375, point 144 , et Commission/Scott, point 95 supra, EU:C:2010:480, point 91) , la légalité de la décision attaquée doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a adoptée. En conséquence, dans la mesure où les requérantes et la République italienne n’ont pas communiqué ces données à la Commission au cours de la procédure administrative, elles ne sauraient, pour contester la légalité de la décision attaquée, se prévaloir de ce que, au cours des cinq mois précédant la souscription de la couverture de réassurance litigieuse en faveur de Sace BT, aucun sinistre n’avait été enregistré, de sorte que les risques assumés par SACE étaient plus limités (voir, en ce sens, arrêt du 13 juin 2002, Pays-Bas/Commission, C‑382/99, Rec, EU:C:2002:363, point 76). Par ailleurs, et en tout état de cause, la Commission a relevé à bon droit, lors de l’audience, que l’argument nouveau fondé sur l’absence de sinistres pendant les cinq premiers mois de l’année 2009, invoqué pour la première fois au cours de l’audience, était irrecevable en application de l’article 48, paragraphe 2, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. En effet, cet argument ne saurait être considéré comme un développement de l’invocation vague et non circonstanciée, par les requérantes, dans la requête, de l’« évolution historique favorable aux réassureurs » du portefeuille de Sace BT (voir point 104 ci-dessus). 

134    Enfin, conformément à la jurisprudence, le constat rétrospectif, invoqué par SACE lors de la procédure administrative, selon lequel la deuxième mesure a effectivement permis à cette société d’obtenir un bénéfice économique important en 2009, aucun sinistre n’ayant été enregistré en ce qui concerne les primes encaissées d’un montant de 1,56 million d’euros, est dépourvu de pertinence, dans la mesure où il se fonde sur une situation postérieure à l’adoption de la deuxième mesure (voir point 93 ci-dessus).

135    En quatrième lieu, la Commission relève, à la fin du considérant 128 de la décision attaquée, que l’attribution d’une part de réassurance aussi élevée à une seule et unique société pourrait être non conforme aux principes généraux de la réassurance, ainsi que l’ISVAP l’avait relevé dans le procès-verbal de son inspection dans les locaux de Sace BT, le 11 octobre 2010. À cet égard, il ressort des explications des requérantes et de ce procès-verbal que, lors de ses délibérations du 22 avril 2008, le Conseil d’administration de Sace BT avait décidé que le nombre de réassureurs participant à son traité de réassurance devait être de nature à garantir une répartition adéquate des risques entre eux et qu’aucun réassureur ne devait être appelé à couvrir un taux de réassurance supérieur à 25 %. Cela confirme que Sace BT s’est adressée à sa société mère, en 2009, car elle n’avait réussi à obtenir qu’une couverture de réassurance totale de 25,85 % sur le marché, malgré ses nombreuses tentatives.

136    Ces éléments corroborent l’absence de rationalité économique de la décision de SACE d’offrir à sa filiale une couverture correspondant presque au triple du maximum de 25 % relevé par l’ISVAP et défini par Sace BT, et ce d’autant plus que SACE n’avait en pratique jamais offert de contrats de réassurance auparavant, bien que l’article 6, paragraphe 4 de ses statuts l’ait autorisée à offrir de tels contrats à condition que ceux-ci soient stipulés aux conditions du marché (voir point 106 ci-dessus).

137    En cinquième lieu, s’agissant de la question de savoir si la décision des réassureurs privés de participer à un traité de réassurance ainsi que leur taux de participation dépendent notamment du niveau de la rémunération proposée au regard de l’importance des risques assumés (voir point 108 ci-dessus), il convient de rejeter les allégations des requérantes. Tout d’abord, le processus de négociation des conditions de rémunération proposées dans un traité de réassurance ne signifie aucunement que le niveau de la rémunération prévue à l’issue de ces négociations, par le traité de réassurance, n’a pas d’incidence significative sur la décision des réassureurs privés de participer ou non à ce traité et sur la part de risque qu’ils acceptent, le cas échéant, de souscrire. En outre, s’agissant du processus juridique qui aurait pu permettre à un réassureur, tel que SACE, d’obtenir, en contrepartie de la souscription du solde de la couverture de réassurance de Sace BT, une rémunération supérieure à celle prévue par le traité de réassurance de 2009 souscrit par des réassureurs privés à concurrence d’un taux global de 25,85 %, la Commission a indiqué, au cours de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, que le traité de réassurance de Sace BT susmentionné ne concernait que 25 % des risques réassurés par cette société. Dès lors, un autre traité de réassurance, prévoyant une rémunération différente, aurait pu être négocié en ce qui concerne le solde de la couverture de réassurance de Sace BT pour 2009, ce que ni les requérantes ni la République italienne n’ont contesté lors de l’audience.

138    Ensuite, l’argument des requérantes selon lequel, d’après la littérature économique dominante, la tarification d’un contrat de réassurance dépend d’un ensemble de facteurs, tels que les situations contingentes de marché et la propension des opérateurs concernés à privilégier certaines catégories de risques, ne signifie pas que l’importance des risques assumés ne constitue qu’un facteur négligeable dans la fixation du tarif.

139    Enfin, l’argument relatif à la pratique des plus importants réassureurs internationaux, avancé par les requérantes (voir point 108 ci-dessus), ne permet pas d’établir l’existence, dans les circonstances de l’espèce, d’une corrélation négligeable entre le niveau des risques assumés et celui de la rémunération. D’une part, cet argument se fonde sur la lettre du 18 avril 2013 de AON Benfield Italia SpA Insurance & Reinsurance Brokers à Sace BT, énonçant qu’ils « [pouvaient] confirmer sur la base de [leur] expérience de courtier leader dans la réassurance qu’en principe le coût (commission ou taxes) d’un traité proportionnel ou XL est indépendant de la part de participation (et inversement) ». D’autre part, les requérantes font valoir que la deuxième mesure est assimilable aux cas, non rares, de prise en charge de parts importantes de risque, au-delà de 50 %, par les sociétés chefs de groupe.

140    Certes, la lettre susmentionnée, bien que postérieure à l’adoption de la décision attaquée, se fonde sur des informations disponibles lors de l’adoption de la deuxième mesure. Toutefois, ni le contenu de cette lettre ni l’argument relatif aux sociétés chefs de groupe ne se rapportent spécifiquement aux contrats de réassurance en excédent de sinistre. Par leur caractère général, ces éléments ne permettent pas d’infirmer les constatations de la Commission fondées, au vu des éléments dont elle disposait, sur le contexte du présent litige, caractérisé notamment par le refus des réassureurs privés de participer plus largement à l’accord de réassurance de Sace BT, et sur l’absence d’adéquation entre le montant de la commission et le niveau de risque assumé, eu égard à l’importance de la participation de SACE à la couverture de réassurance.

141    En sixième lieu, contrairement aux allégations des requérantes (voir point 109 ci-dessus), la souscription par SACE d’une couverture de réassurance en faveur de Sace BT à des conditions de prix autres que celles résultant des forces du marché constitue en soi un avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Par ailleurs, les requérantes ne contestent pas que SACE a elle-même reconnu, lors de la procédure administrative, que cette couverture de réassurance a permis à Sace BT d’augmenter sa capacité d’assurance crédit. De plus, l’argumentation des requérantes selon laquelle il n’existe pas de relation proportionnelle et quantifiable entre la part d’activité cédée en réassurance et la capacité souscrite n’a aucun rapport avec l’affirmation de la Commission, au considérant 130 de la décision attaquée, énonçant que, en l’absence d’une telle couverture, Sace BT aurait dû soit supporter les risques en question sur ses fonds propres, soit proposer une prime supérieure d’au moins 10 % afin d’obtenir la réassurance. Partant, les requérantes ne sont pas fondées à reprocher à la Commission de ne pas avoir établi quelle aurait été la capacité d’assurance crédit de Sace BT, en l’absence de la couverture de réassurance accordée par SACE, dès lors que l’avantage reçu par Sace BT, qu’elle n’aurait pas obtenu dans les conditions normales de marché, résidait précisément dans les conditions de prix préférentielles accordées par SACE.

142    Au vu de l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de constater que, eu égard aux éléments dont elle disposait lors de l’adoption de la décision attaquée, la Commission a pu conclure à bon droit que la deuxième mesure avait été adoptée en faveur de Sace BT à des conditions de prix préférentielles et que l’avantage ainsi conféré à Sace BT consistait dans la différence entre la commission de réassurance qu’un réassureur privé aurait exigée pour une part de réassurance aussi élevée et celle appliquée par SACE.

143    Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter comme inopérants les arguments des requérantes invoqués au stade de la réplique et visant à contester le constat de la Commission, effectué au considérant 129 de la décision attaquée, selon lequel la conclusion du contrat de réassurance devait être analysée conjointement avec les injections de capital, afin de vérifier si une société mère privée aurait accepté d’accorder à sa filiale une couverture de réassurance à des conditions préférentielles par rapport aux prix du marché, lorsque cette dernière n’obtient pas cette couverture au prix proposé.

–       Sur l’absence alléguée de motivation de l’évaluation du montant de l’aide 

144    En ce qui concerne la méthode retenue par la Commission pour déterminer le montant de l’aide à récupérer, la décision attaquée se limite à énoncer, au considérant 128, que, « [c]onformément à sa pratique décisionnelle, la Commission est d’avis que la commission relative à une part de réassurance et de risque aussi élevée aurait dû être supérieure d’au moins 10 % à celle appliquée par les réassureurs privés pour une part de réassurance et de risque inférieure » et que, « [p]our la somme de 1,56 million d’EUR versée par Sace BT à SACE, le montant de l’aide à récupérer s’élève à 156 000 EUR ». La décision attaquée se réfère à cet égard à la décision 2014/532/UE de la Commission, du 23 novembre 2011, concernant l’aide d’État C 28/10 accordée par le Portugal sous la forme d’un régime d’assurance crédit à l’exportation à court terme (JO 2014, L 244, p. 59), dans laquelle la Commission aurait mis au point une méthode de calcul de la somme à récupérer sur la base d’hypothèses raisonnables et de pratiques de marché courantes (ci-après la « décision du 23 novembre 2011 »).

145    Les requérantes reprochent à la Commission de ne pas avoir exposé les raisons pour lesquelles elle estime que le montant de la commission payée par Sace BT aurait dû être supérieur de 10 % à celui de la commission appliquée par les réassureurs privés.

146    Pour établir le caractère insuffisant de la commission versée à SACE, par rapport à celle versée par Sace BT aux autres participants au contrat de réassurance, la Commission se serait limitée à renvoyer à la décision du 23 novembre 2011. Or, la motivation de cette décision, en ce qui concerne la quantification théorique du prix du marché de la couverture accordée par l’État à 110 % du prix appliqué par l’assureur privé à chaque client, serait incompréhensible. En outre, en l’espèce, la Commission n’aurait pas expliqué pourquoi cette méthode de calcul, qui avait été élaborée en ce qui concerne un régime d’assurance publique proportionnelle, fonctionnant comme un mécanisme de partage des risques (dit « top-up ») avec les assureurs privés, et entièrement distinct de la réassurance en excédent de sinistre, pouvait être appliquée, par analogie, en ce qui concerne la deuxième mesure. De plus, la Commission aurait commis une erreur en estimant que le principe de corrélation positive entre le volume de risque couru et le taux de la commission, établi pour l’assurance proportionnelle, était applicable en ce qui concerne la réassurance.

147    La Commission fait valoir que, eu égard à la difficulté de déterminer le montant de la prime qui aurait été exigée par les opérateurs privés, dans la mesure où la seule donnée connue avec certitude était le refus de ces derniers de couvrir ensemble plus de 25,85 % du risque, elle a adopté une approche prudente. Le calcul effectué pour parvenir au pourcentage de 10 % aurait été établi sur la base du précédent portugais examiné dans la décision du 23 novembre 2011, pour lequel la Commission aurait élaboré une méthode pour calculer l’augmentation de la prime par rapport à une augmentation du risque découlant d’une exposition plus importante sur le plan de l’assurance.

148    La principale et seule différence pertinente entre les deux affaires résiderait dans le fait que SACE a non seulement procédé à une intervention complémentaire (« top-up ») pour couvrir la part de risque non couverte par les opérateurs du marché, mais a également assumé un pourcentage de risque très supérieur à celui accepté par les opérateurs privés, le principal d’entre eux ayant assumé 10 % des risques.

149    Selon la jurisprudence, si la Commission décide d’ordonner la récupération d’un montant déterminé, comme en l’espèce, elle doit, conformément à son obligation d’examen diligent et impartial, déterminer, d’une façon aussi précise que les circonstances de l’affaire le permettent, la valeur de l’aide dont l’entreprise a bénéficié (arrêt Dunamenti Erőmű/Commission, point 112 supra, EU:T:2014:236, point 177).

150    Par ailleurs, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences dudit article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 8 septembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑279/08 P, Rec, EU:C:2011:551, point 125 et jurisprudence citée).

151     En l’espèce, pour déterminer le montant de l’aide, la Commission se borne à renvoyer dans la décision attaquée à sa « pratique décisionnelle », laquelle se limite à la décision du 23 novembre 2011.

152    À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, la notion d’aide revêt un caractère juridique et s’interprète au regard d’éléments objectifs. La qualification d’une mesure d’aide d’État ne saurait donc dépendre d’une appréciation subjective de la Commission et doit être déterminée indépendamment de toute pratique administrative antérieure de cette institution, à la supposer établie (voir arrêt Espagne e.a./Commission, point 97 supra, EU:T:2014:604, point 46 et jurisprudence citée).

153    Dès lors, pour établir l’existence d’une aide, la Commission ne saurait se limiter à renvoyer à sa « pratique décisionnelle ». Elle est tenue de procéder à une analyse diligente et impartiale, au regard de la réglementation applicable, de l’ensemble des éléments objectifs à sa disposition. Il en est de même lorsque la Commission détermine le montant de l’aide dont elle ordonne la récupération. Partant, en l’espèce, la Commission ne pouvait pas se limiter à renvoyer à la décision du 23 novembre 2011, mais était tenue d’effectuer un examen diligent et impartial des éléments objectifs disponibles, pour déterminer, de manière aussi précise que possible, le montant de l’aide.

154     En outre, il convient de relever qu’il incombe en l’espèce au Tribunal de contrôler la légalité de la décision attaquée, et non de statuer sur la question de savoir si la décision du 23 novembre 2011 est correctement motivée ou non, comme le demandent les requérantes (voir point 146 ci-dessus). Il en résulte que la Commission ne saurait s’acquitter de son obligation de motivation dans le cas d’espèce en se référant simplement à une méthodologie développée dans une autre affaire, sans aucune explication relative à la pertinence de cette méthodologie pour apprécier les primes de réassurance payées par Sace BT à SACE dans un contexte factuel différent (voir points 152 et 153 ci-dessus).

155    Dans ces conditions, si la Commission entendait transposer, en l’espèce, la méthode de calcul de la somme à récupérer, élaborée dans la décision du 23 novembre 2011, il lui appartenait d’exposer les raisons pour lesquelles elle estimait que cette méthode était pertinente et de faire ressortir clairement le raisonnement suivi en l’espèce lors de son application, au vu des éléments du dossier.

156    Or, à cet égard, les requérantes font valoir à bon droit que la Commission n’a ni explicité la méthode de calcul appliquée ni motivé, dans la décision attaquée, au regard de la nature et des caractéristiques de la couverture de réassurance en excédent de sinistre, en cause en l’espèce, la transposition d’une méthode de calcul de la commission élaborée en ce qui concerne un régime d’assurance crédit publique proportionnelle.

157    Tout d’abord, il est exact que le régime d’assurance crédit à l’exportation portugais, auquel la Commission se réfère, se distingue du cas d’espèce. Il s’agit d’un régime de coassurance des crédits à l’exportation et non de la réassurance d’un assureur. De plus, le régime portugais, qui était prévu pour la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010 (considérant 23 de la décision du 23 novembre 2011), s’inscrivait dans le contexte de la crise financière de 2009 et ne visait pas la situation financière particulière d’un seul assureur, tel que Sace BT, qui subissait des pertes. Surtout, il ressort des considérants 20 et 21 de la décision du 23 novembre 2011 que le montant couvert par le régime public d’assurance crédit portugais, uniquement en complément de la couverture offerte par un assureur privé, ne pouvait jamais dépasser le montant couvert par l’assureur privé. C’est dans ce contexte que la Commission a dénoncé, au considérant 68 de la décision du 23 novembre 2011, le fait que les commissions versées aux assureurs publics étaient inférieures aux commissions appliquées sur le marché, alors que, selon la Commission, ces commissions auraient dû être supérieures en raison du niveau de risque plus important assumé. En revanche, en l’espèce, la Commission reproche à SACE d’avoir accepté la même rémunération que celle des assureurs privés, pour une part de couverture de réassurance plus élevée que celle acceptée par les réassureurs privés. Les circonstances des deux affaires sont dès lors entièrement distinctes.

158    Certes, la Commission a fait valoir, dans le mémoire en défense, que les différences entre les deux mesures étaient dénuées de pertinence, car, dans les deux cas, l’entité publique qui fournit la couverture complémentaire prend en charge une part plus élevée du risque, ce qui doit normalement se traduire par une prime d’assurance plus élevée (voir point 148 ci-dessus).

159    Toutefois, ni cette affirmation ni les motifs de la décision attaquée ne permettent de comprendre les raisons pour lesquelles, compte tenu du niveau de risque, le prix de marché pour la couverture de réassurance accordée par SACE doit être calculé selon la même méthode que celle pour le prix de marché pour la couverture d’assurance complémentaire accordée au titre du régime d’assurance crédit public portugais. La décision attaquée est ainsi privée de toute motivation en ce qui concerne la possibilité de transposer, en l’espèce, dans un contexte juridique entièrement distinct, la méthode de calcul de la commission mise au point par la Commission dans la décision du 23 novembre 2011. En effet, au considérant 128 de la décision attaquée, la Commission se limite à affirmer qu’un « investisseur raisonnable aurait exigé que la commission reflète le niveau supérieur de risque assumé », et que cette commission « aurait dû être supérieure d’au moins 10 % à celle appliquée par les réassureurs privés pour une part de réassurance et de risque inférieure », en renvoyant sans la moindre explication aux considérants 68 et 93 de la décision du 23 novembre 2011.

160    Ensuite, l’argument de la Commission selon lequel la méthodologie retenue serait favorable aux requérantes ne saurait remédier à ce défaut de motivation. En effet, sans explication claire et pertinente relative au cas d’espèce, il n’est pas possible d’apprécier si la correction de 10 % est favorable ou défavorable aux requérantes. En outre, il appartient à la Commission de définir la mesure corrective appropriée pour mettre un terme à la distorsion de la concurrence qui découle de la mesure contestée. Elle ne saurait s’acquitter de cette tâche par un simple renvoi à une méthodologie qu’elle estime avantageuse pour le bénéficiaire.

161    Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être accueilli, en ce qu’il est tiré de l’insuffisance de motivation de l’évaluation par la Commission du montant de l’aide à 10 % du montant de la commission versée par Sace BT à SACE.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’erreurs d’appréciation et d’erreurs de droit dans l’application du critère de l’investisseur privé, en ce qui concerne les troisième et quatrième mesures

162    Dans la décision attaquée (considérants 132 à 168), la Commission a conclu que les troisième et quatrième mesures constituaient un avantage pour Sace BT, en se fondant sur deux types de considérations. Elle a tout d’abord constaté à titre principal, aux considérants 135 à 144 de la décision attaquée, que SACE n’avait pas agi comme un investisseur privé avisé, dans la mesure où, au moment de l’adoption desdites mesures, cette entreprise n’avait pas procédé à une évaluation visant à déterminer si l’apport de capital supplémentaire représentait une option économiquement plus avantageuse, du point de vue d’un actionnaire, que la liquidation de la filiale. Pour ce seul motif, les deux apports de capital en cause doivent, selon la Commission, être qualifiés d’aides.

163    Ensuite, « dans un souci d’exhaustivité », la Commission a constaté à titre complémentaire, aux considérants 145 à 167 de la décision attaquée, que, en procédant à une comparaison entre l’option de la liquidation de Sace BT et l’option choisie d’un nouvel apport de capital à cette filiale, un investisseur privé avisé aurait préféré laisser Sace BT faire faillite, ou la vendre s’il avait trouvé un acquéreur, plutôt que de procéder à sa recapitalisation. Cette analyse démontrerait, elle aussi, que SACE n’a pas agi comme un investisseur privé l’aurait fait.

164    Les requérantes contestent tant l’absence d’analyse économique préalable invoquée par la Commission que le bien-fondé de son analyse rétrospective de la rentabilité des troisième et quatrième mesures.

165    Il convient d’examiner d’abord l’argumentation des parties relative à la question de savoir si SACE a effectué une analyse de rentabilité appropriée avant d’investir 70 millions d’euros dans le capital de Sace BT.

166    À titre liminaire, les requérantes rappellent qu’il ressort notamment des points 27 et 29 de la communication de la Commission relative à l’application des articles [107 TFUE] et [108 TFUE] et de l’article 5 de la directive 80/723/CEE de la Commission aux entreprises publiques du secteur manufacturier (JO 1993, C 307, p. 3) que, lors de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché, la Commission est tenue de respecter l’importante marge d’appréciation dont dispose l’investisseur public et de ne conclure à l’existence d’une aide que lorsqu’il apparaît en termes objectifs que l’investisseur public n’avait pas de raison de s’attendre raisonnablement à ce qu’un investissement ait une rentabilité acceptable, même à long terme.

167    En l’espèce, les requérantes font grief à la Commission d’avoir considéré que le fait de se trouver en situation de crise ne changeait rien aux conditions du test à appliquer.

168    Premièrement, à cet égard, les requérantes font valoir qu’il incombait à la Commission d’enquêter avec la plus grande objectivité et la plus grande attention, sur la réalité économique du marché et la manière dont les décisions d’investissement d’un hypothétique actionnaire privé étaient influencées par « le niveau élevé d’incertitude et d’urgence » (considérant 166 de la décision attaquée), résultant de la détérioration de la situation économique mondiale à partir du deuxième trimestre de 2007.

169    Deuxièmement, les requérantes allèguent à cet égard que, au cours des années 2008 et 2009, compte tenu des pertes importantes subies par de nombreuses entreprises opérant dans le secteur de l’assurance crédit et du nombre limité d’acquéreurs potentiels, les actionnaires de nombreuses sociétés, y compris en dehors de l’Italie, auraient procédé à des apports en capital. Lors de l’audience, les requérantes ont en particulier reproché à cet égard à la Commission de ne pas avoir effectué d’enquête pour comparer, aux fins de l’application du critère de l’investisseur privé, la situation de Sace BT avec celle des autres assureurs, y compris l’auteur de la plainte, Coface, recapitalisée en juillet 2009 et en mars 2010 pour un montant de 225 millions d’euros, après avoir subi en 2009 des pertes s’élevant à 163 millions d’euros.

170    Troisièmement, les requérantes contestent l’interprétation de l’arrêt Commission/EDF e.a., point 91 supra (EU:C:2012:318), par la Commission. Le point 84 de cet arrêt soulignerait la nécessité de prendre en considération les «  circonstances de l’espèce ». Dès lors, le respect par l’investisseur public de l’exigence d’un plan d’entreprise détaillé, ou du moins de données financières actualisées montrant que l’investissement produira un rendement économique acceptable, devrait être apprécié en tenant compte du contexte de crise économique et de l’impossibilité de procéder à des prévisions fiables.

171    Quatrièmement, les requérantes reprochent à la Commission d’avoir suivi, en l’espèce, une approche dogmatique, consistant à comparer les décisions d’un investisseur public à celles d’un hypothétique investisseur privé, caractérisé par l’aptitude à fournir d’emblée la justification de la logique économique de ses décisions commerciales, au moyen de l’élaboration de projections économiques circonstanciées, d’estimations de rentabilité future ou d’analyses coûts/bénéfices détaillées et complètes, corroborées le cas échéant par des rapports de consultants tiers. En l’absence d’une telle documentation, la Commission conclurait à l’absence de rationalité économique de l’opération.

172    Or, une telle approche théorique dispenserait la Commission d’enquêtes complexes sur l’« économie de marché », telle qu’elle fonctionne concrètement. La Commission transformerait ainsi le critère de l’investisseur privé en règle de procédure, ce qui serait contraire au principe d’égalité de traitement des entreprises publiques et privées, consacré par l’article 345 TFUE.

173    Cinquièmement, les requérantes admettent que, dans la mesure où le contexte ne permettait pas d’effectuer des prévisions fiables, même à court terme, le plan industriel 2010-2011 de Sace BT, sur lequel s’est appuyé la direction de SACE, comportait uniquement des prévisions pour ces deux exercices et prévoyait la réalisation d’un budget en équilibre pour 2011. Cependant, la décision attaquée (considérant 141) serait erronée en ce qu’elle considère que SACE n’a pas communiqué, au cours de la procédure administrative, d’éléments d’information objectifs et vérifiables, fournissant les justifications commerciales de l’adoption des deux mesures considérées.

174    Sixièmement, les requérantes soutiennent que, lors de l’adoption de la troisième et de la quatrième mesure, les dirigeants de SACE se sont fondés sur une évaluation économique précise et rationnelle de la rentabilité future de ces investissements, sur la base des considérations suivantes :

–        après avoir, dans le cadre d’une stratégie industrielle de diversification des risques assurés par le groupe, constitué Sace BT moyennant un investissement initial supérieur à 100 millions d’euros, SACE aurait décidé de protéger la valeur de son apport de capital initial à Sace BT, plutôt que de liquider celle-ci et de perdre la quasi-l’intégralité de cet apport ;

–        Sace BT aurait réalisé son premier bénéfice d’exploitation public de 59 000 euros, en 2007, conformément aux prévisions, et n’aurait commencé à enregistrer des pertes qu’après le début de la crise, dans un contexte économique caractérisé dans le secteur particulier de l’assurance crédit par une augmentation spectaculaire du volume des sinistres et par la réduction corrélative des marges de solvabilité des entreprises présentes dans ce secteur ;

–        dans ce contexte, SACE aurait considéré que l’incapacité de Sace BT à générer des bénéfices avant la crise, alors qu’elle était encore une start-up, ne résultait pas de problèmes structurels ou de la mauvaise gestion de l’entreprise ou de problèmes « systémiques » propres au marché de l’assurance crédit ;

–        SACE aurait dès lors estimé qu’il était raisonnable de ne pas se retirer du projet de diversification des activités à peine entreprises, au seul motif que le cycle économique était négatif et que l’investissement n’était pas encore monté en puissance ;

–        l’apport de capital en cause, qui devait rétablir l’équilibre financier de l’entreprise et en garantir la solvabilité, conformément à la réglementation italienne du secteur, devait permettre à Sace BT de dégager une rentabilité convenable, avec le retour à la normale de la situation macroéconomique et la mise en œuvre de mesures de restructuration en personnel draconiennes dès janvier 2009 – et non, ainsi que l’allègue la Commission dans le mémoire en défense, en décembre 2009 – lors de la révision du plan industriel 2010-2011 ;

–        la liquidation de Sace BT au prix du marché aurait été examinée puis écartée comme moins avantageuse. En effet, les interventions dans le capital de Sace BT auraient correspondu à 17,8 % des bénéfices nets réalisés par SACE en 2009 (et à 1,3 % environ de son capital social). À l’inverse, la liquidation aurait été ruineuse économiquement, car elle aurait été interprétée comme le signal d’une crise occulte de trésorerie interne de l’actionnaire, ce qui aurait entraîné une dégradation de l’image de marque de SACE et l’aurait exposée à un risque de destruction de valeur ou de détérioration de sa notation bien supérieure au montant d’environ 24 millions d’euros auquel s’élevait le capital résiduel de Sace BT estimé à la fin de l’exercice 2009.

175    La Commission conteste l’ensemble de cette argumentation.

176    Les positions des parties divergent en ce qui concerne les exigences relatives aux éléments d’évaluation économique préalable de la rentabilité de l’investissement qu’il appartient à l’investisseur public concerné de fournir. Il convient dès lors, en premier lieu, d’examiner si la décision attaquée est entachée à cet égard d’une erreur de droit (voir points 177 à 189 ci-après), avant, en second lieu, de vérifier si, en l’espèce, la Commission a commis une erreur d’appréciation en considérant que les troisième et quatrième mesures n’étaient pas conformes au critère de l’investisseur privé (voir points 190 à 199 ci-après).

177    En premier lieu, s’agissant des exigences liées au critère de l’investisseur public, les requérantes admettent qu’il incombe à l’investisseur public de prouver qu’il a procédé à une évaluation économique préalablement ou simultanément à l’octroi de l’avantage économique. Elles estiment cependant que, dans un contexte de crise économique grave, un investisseur privé rationnel pourrait procéder à des évaluations économiques préalables, précises et rationnelles, même s’il ne peut pas se fonder sur des analyses de rentabilité future.

178    À cet égard, il convient de rappeler que, aux fins de l’application du critère de l’investisseur privé, les éléments d’évaluation économique préalable à la décision d’effectuer un investissement, requis de la part de l’investisseur public concerné, doivent être appréciés par comparaison avec les évaluations économiques qu’un investisseur privé rationnel, se trouvant dans une situation similaire, aurait fait établir avant de procéder audit investissement, au vu des informations disponibles et des évolutions prévisibles. Le contenu et le degré de précision de telles évaluations peuvent dès lors être tributaires notamment des circonstances de l’espèce, de la situation du marché et de la conjoncture économique (voir point 98 ci-dessus).

179    Ainsi, dans un contexte de crise économique, l’appréciation des éléments d’évaluation préalable requis doit être effectuée en tenant compte, le cas échéant, de l’impossibilité de prévoir de manière fiable et circonstanciée l’évolution de la situation économique et les résultats des différents opérateurs. Dans de telles circonstances, l’absence de plan d’entreprise détaillé de la filiale, contenant des estimations précises et complètes de sa rentabilité future et des analyses détaillées des coûts/bénéfices, ne permet pas, à elle seule, de conclure que l’investisseur public ne s’est pas comporté comme l’aurait fait un investisseur privé.

180    En outre, il ne saurait être exclu que, dans le cadre de la marge d’appréciation dont il dispose lors de son évaluation économique préalable de la rentabilité d’un investissement (voir point 188 ci-après), un investisseur privé rationnel estime, à l’instar de SACE, que les difficultés de sa filiale résultaient non de problèmes structurels ou de mauvaise gestion, mais de difficultés économiques propres au marché concerné (voir point 174 ci-dessus), et se fonde notamment sur la perspective d’un rétablissement progressif de la situation économique. Toutefois, même dans ce cas, un investisseur privé rationnel, se trouvant dans l’impossibilité d’effectuer des prévisions détaillées et complètes, ne déciderait pas d’injecter des capitaux supplémentaires dans une de ses filiales ayant enregistré des pertes importantes sans procéder à des évaluations préalables, même approximatives, permettant de déduire des probabilités raisonnables de profits futurs, et sans avoir analysé divers scénarios et diverses options, y compris le cas échéant la cession ou la liquidation éventuelle de la filiale.

181    Certes, selon la jurisprudence, pour apprécier si l’intervention d’un investisseur public dans le capital d’une entreprise est conforme au critère de l’investisseur privé, le comportement de l’investisseur privé avec lequel doit être comparé celui d’un investisseur public n’est pas nécessairement celui de l’investisseur ordinaire plaçant des capitaux en vue de leur rentabilisation à plus ou moins court terme. Ce comportement doit, au moins, être celui d’un holding privé ou d’un groupe privé d’entreprises poursuivant une politique structurelle, globale ou sectorielle, et être guidé par des perspectives de rentabilité à plus long terme (arrêts du 21 mars 1991, Italie/Commission, C‑305/89, Rec, EU:C:1991:142, point 20, et Espagne e.a./Commission, point 97 supra, EU:T:2014:604, point 41).

182    Il n’en demeure pas moins que l’impossibilité de procéder à des prévisions détaillées et complètes ne saurait dispenser un investisseur public de procéder à une évaluation préalable appropriée de la rentabilité de son investissement, comparable à celle qu’aurait fait établir un investisseur privé se trouvant dans une situation similaire, en fonction des éléments disponibles et prévisibles (voir point 180 ci-dessus). À cet égard, la Commission relève à bon droit que, si l’État membre ne lui fait pas parvenir les éléments d’évaluation préalable requis, elle n’est pas tenue de procéder à des analyses complémentaires (voir point 97 ci-dessus).

183    Dès lors, la circonstance invoquée par les requérantes (voir point 169 ci-dessus) selon laquelle, au cours de la période considérée, un grand nombre de compagnies d’assurance privées auraient été recapitalisées afin de couvrir des pertes importantes subies du fait de la crise économique n’était pas de nature à exonérer un investisseur public tel que SACE de son obligation d’évaluer ex ante la rentabilité future de sa filiale et de communiquer à la Commission des éléments d’évaluation préalable appropriés (voir point 182 ci-dessus). De plus, il ne saurait être exclu que ces recapitalisations donnaient également lieu à des aides au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Partant, la Commission n’était pas tenue de comparer la situation de Sace BT à celle des autres assureurs.

184    En l’espèce, il convient de constater que, dans la décision attaquée, la Commission s’est limitée à appliquer la jurisprudence bien établie selon laquelle, tandis qu’il incombe à la Commission d’appliquer le critère de l’investisseur privé et de demander à l’État membre concerné de lui fournir à cette fin toutes les informations pertinentes, c’est à cet État membre ou, en l’occurrence, à l’entreprise publique concernée qu’il appartient de fournir les éléments faisant apparaître qu’elle a procédé à une évaluation économique préalable de la rentabilité de la mesure en cause, comparable à celle qu’aurait fait établir un investisseur privé dans une situation similaire (voir points 96, 97 et 112 ci-dessus).

185    Contrairement aux allégations des requérantes (voir points 171 et 172 ci-dessus), cette exigence n’instaure aucune règle procédurale ni ne déplace la charge de la preuve de l’existence d’une aide d’État pesant sur la Commission, mais impose uniquement à l’investisseur public concerné de fournir à la Commission les éléments nécessaires pour lui permettre de vérifier si l’attitude de cette entreprise publique était comparable à celle d’un investisseur privé rationnel, lequel aurait procédé à une évaluation économique préalable fondée sur les éléments disponibles et les évolutions prévisibles qui soit appropriée au regard de la nature, de la complexité, de l’importance et du contexte de l’opération en cause (voir points 178 et 179 ci-dessus).

186    Dès lors que l’entreprise publique fait parvenir à la Commission des éléments de la nature requise, il incombe cependant à cette dernière d’effectuer une appréciation globale prenant en compte, outre les éléments fournis par cette entreprise, tout autre élément pertinent permettant de déterminer si la mesure en cause est conforme au critère de l’investisseur privé. L’entreprise publique concernée a ainsi la possibilité, lors de la procédure administrative, de produire des éléments de preuve complémentaires, qui sont constitués après l’adoption de la mesure, mais qui se fondent sur les éléments qui étaient disponibles et sur les évolutions qui étaient prévisibles au moment de cette adoption.

187    Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter les arguments des requérantes fondés, d’une part, sur le principe d’égalité de traitement entre les secteurs public et privé et, d’autre part, sur la marge d’appréciation de l’investisseur privé (voir points 166 et 172 ci-dessus). En effet, d’une part, dans la mesure où l’exigence d’une évaluation économique préalable tend uniquement à comparer le comportement de l’entreprise publique concernée à celui d’un investisseur privé rationnel placé dans une situation similaire, cette exigence est conforme au principe d’égalité de traitement entre les secteurs public et privé, impliquant que les États membres peuvent investir dans des activités économiques et que les capitaux mis à la disposition d’une entreprise, directement ou indirectement, par l’État, dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché, ne sauraient être qualifiés d’aides d’État (arrêt Espagne e.a./Commission, point 97 supra, EU:T:2014:604, point 79).

188    D’autre part, la marge d’appréciation dont dispose l’investisseur public, selon la jurisprudence, ne saurait le dispenser d’effectuer une évaluation économique préalable appropriée. Certes, une distinction peut être effectuée entre l’estimation du rendement probable du projet, dans laquelle une certaine marge d’appréciation existe pour l’investisseur public, et l’examen que cet investisseur fait pour déterminer si le rendement lui semble suffisant pour réaliser l’investissement en cause, pour lequel la marge d’appréciation est moins large, puisqu’il est possible de comparer l’opération en question avec d’autres possibilités de placement du capital à investir (arrêt Espagne e.a./Commission, point 97 supra, EU:T:2014:604, point 71). Cependant, la marge d’appréciation dont dispose l’investisseur public en ce qui concerne l’estimation du rendement probable du projet ne saurait exonérer cet investisseur de l’obligation de procéder à une évaluation économique fondée sur une analyse des éléments disponibles et des évolutions prévisibles qui soit appropriée au regard de la nature, de la complexité, de l’importance et du contexte de l’opération (voir points 98 et 180 ci-dessus).

189    Partant, en l’espèce, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir commis une erreur de droit, lors de l’application en l’espèce du critère de l’investisseur privé.

190    En second lieu, il convient de vérifier si la Commission a commis une erreur d’appréciation en estimant, dans la décision attaquée, que SACE n’avait pas procédé à une évaluation de la rentabilité des apports en capital litigieux comparable à celle que, dans les circonstances de l’espèce, un investisseur privé se trouvant dans une situation similaire aurait fait établir.

191    À cet égard, il y a lieu de constater que le dossier, et notamment les procès-verbaux de la réunion du conseil d’administration de SACE du 1er avril 2009, au cours de laquelle la nécessité d’une recapitalisation de Sace BT à concurrence d’un montant global de 70 millions d’euros avait été envisagée, et de la réunion du 26 mai 2009, au cours de laquelle la troisième mesure, relative à un apport de capital de 29 millions d’euros, a été adoptée, produits par la Commission, ne contient pas le moindre élément permettant de supposer que SACE a effectué une évaluation économique même approximative pour déterminer si l’apport de capital supplémentaire représentait une option économiquement rentable. Ces procès-verbaux se réfèrent uniquement à la nécessité de reconstituer les actifs de Sace BT requis pour couvrir les réserves de la fin de 2009.

192    En outre, il est à noter que les requérantes n’ont produit aucun élément de preuve de la réalisation d’une évaluation économique préalable. De plus, tout en soutenant que les troisième et quatrième mesures se fondent sur une évaluation économique précise et rationnelle de la rentabilité future de ces investissements, elles n’indiquent pas les données sur la base desquelles une telle évaluation aurait été effectuée, mais se limitent à des allégations générales (voir point 173 ci-dessus).

193    Dans ce contexte, la Commission relève à bon droit que le seul élément concret invoqué par les requérantes est le plan d’entreprise 2010-2011, adopté par le conseil d’administration de Sace BT le 4 août 2009. Or, les requérantes ne contestent pas que ce plan n’a été pris en considération que lors de l’adoption par SACE de la quatrième mesure. En outre, ce plan ne couvre qu’une période de deux ans et ne prévoit aucun retour à la rentabilité à moyen ou à long terme.

194    Certes, ce plan, ainsi que le montre le procès-verbal de la réunion du conseil d’administration de Sace BT du 4 août 2009, produit par les requérantes à la demande du Tribunal, prévoyait que Sace BT atteindrait l’équilibre financier en 2011.

195    Cependant, ce plan ne contenait aucun élément d’analyse de la rentabilité des injections de capital. De plus, tout en prévoyant ainsi une amélioration notable des indices relatifs à l’assurance crédit de Sace BT, qui permettrait d’atteindre cet équilibre financier, ce plan ne fournissait qu’un nombre réduit d’indices financiers déterminants et de données chiffrées pour les années 2010 et 2011, permettant d’étayer cette estimation. Il ne contenait pas d’informations précises relatives aux modalités de réduction des coûts et d’évaluation des risques et se référait de manière générale, pour 2010, au maintien d’une politique de sélection des risques et, pour 2011, à la prévision d’une amélioration de la situation économique et du marché.

196    Par ailleurs, il ressort du plan d’entreprise 2010-2011 de Sace BT, ainsi que du procès-verbal de la réunion de son conseil d’administration du 4 août 2009, que les objectifs de Sace BT étaient centrés sur la poursuite d’une politique concurrentielle visant à augmenter la part de marché de cette société, qui était de 8,2 % en 2008, afin d’atteindre une part de marché de 15 % en 2011.

197    Dans ces conditions, en l’absence de toute prévision selon laquelle Sace BT pourrait générer des bénéfices après 2011, au moins à plus long terme, la Commission a pu estimer à bon droit que les éléments d’évaluation préalable contenus dans le plan d’entreprise et le procès-verbal susmentionnés ne répondaient pas aux exigences du critère de l’investisseur privé.

198    En effet, en admettant même qu’un investisseur privé se trouvant dans une situation similaire aurait pu tenir compte de ce que les pertes subies par Sace BT présentaient un caractère conjoncturel et, misant sur une amélioration progressive de la situation économique, privilégier à court terme l’augmentation des parts de marché de sa filiale, il n’en demeure pas moins qu’il aurait fait procéder à une évaluation plus rigoureuse de la rationalité économique des apports en capital litigieux, compte tenu de la nature et de l’importance de ces opérations, afin d’apprécier les perspectives de rentabilité de sa filiale à plus long terme et, en cas d’estimations satisfaisantes, sans même faire établir une estimation des coûts de liquidation de sa filiale (voir point 161 ci-dessus).

199    Au vu de l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de constater que la Commission n’a commis aucune erreur d’appréciation en estimant que, en l’absence d’évaluation économique préalable adéquate de leur rentabilité économique, les deux apports de capital en cause n’étaient pas conformes au critère de l’investisseur privé (voir point 182 ci-dessus).

200    Dans ces conditions, le troisième moyen doit être rejeté, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le bien-fondé de l’appréciation rétrospective complémentaire que la Commission a faite, dans un souci d’exhaustivité, de la rentabilité des apports de capital en cause par rapport à l’option de la liquidation (voir points 163 et 164 ci-dessus).

201    Il s’ensuit que l’article 2, deuxième alinéa, de la décision attaquée doit être annulé (voir point 161 ci-dessus). Le recours est rejeté pour le surplus.

 Sur les dépens

202    Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, de son règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supportera ses propres dépens, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. En vertu de l’article 87, paragraphe 4, du même règlement, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Chacune des parties ayant partiellement succombé en ses moyens, il convient de condamner chaque partie à supporter ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure de référé. 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      L’article 2, deuxième alinéa, de la décision 2014/525/UE de la Commission, du 20 mars 2013, concernant les mesures SA.23425 (11/C) (ex NN 41/10) mises à exécution par l’Italie en 2004 et 2009 en faveur de Sace BT SpA, est annulé.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Servizi assicurativi del commercio estero SpA (SACE) et Sace BT supporteront leurs propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé.

4)      La Commission européenne supportera ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé.

5)      La République italienne supportera ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé.

Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 juin 2015.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Communication sur l’assurance crédit à l’exportation

SACE

Sace BT

Procédure administrative et décision attaquée

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré de l’absence d’imputabilité des mesures litigieuses à l’État italien

Critères jurisprudentiels d’appréciation de l’imputabilité à l’État d’une mesure d’aide accordée par une entreprise publique

Évaluation des indices invoqués en l’espèce par la Commission

Sur les deuxième et troisième moyens, relatifs en substance à la violation du critère de l’investisseur privé en économie de marché et de l’obligation de motivation

Observations liminaires sur la jurisprudence relative au critère de l’investisseur privé en économie de marché

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’erreurs d’appréciation et d’erreurs de droit dans l’application du critère de l’investisseur privé ainsi que de l’insuffisance de motivation, en ce qui concerne la deuxième mesure

– Sur la comparaison du comportement de SACE avec celui d’un réassureur privé

– Sur l’absence alléguée de motivation de l’évaluation du montant de l’aide

Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’erreurs d’appréciation et d’erreurs de droit dans l’application du critère de l’investisseur privé, en ce qui concerne les troisième et quatrième mesures

Sur les dépens


** Langue de procédure : l’italien


1      Données confidentielles occultées.

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