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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Italy v Commission (Judgment) French text [2015] EUECJ T-358/13 (08 October 2015) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2015/T35813.html Cite as: ECLI:EU:T:2015:773, [2015] EUECJ T-358/13, EU:T:2015:773 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
8 octobre 2015 (*)
« Feader – Apurement des comptes des organismes payeurs des États membres en ce qui concerne les dépenses financées par le Feader – Décision déclarant un certain montant non réutilisable dans le cadre du plan de développement rural de la région de Basilicate – Article 30 du règlement (CE) n° 1290/2005 – Obligation de motivation »
Dans l’affaire T‑358/13,
République italienne, représentée par Mmes G. Palmieri et B. Tidore, en qualité d’agents, assistées de M. M. Salvatorelli, avvocato dello Stato,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par Mme J. Aquilina et M. P. Rossi, en qualité d’agents, partie défenderesse,
ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision d’exécution 2013/209/UE de la Commission, du 26 avril 2013, relative à l’apurement de comptes des organismes payeurs des États membres en ce qui concerne les dépenses financées par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) pour l’exercice financier 2012 (JO L 118, p. 23), en ce qu’elle classe comme « montant non réutilisable » le montant de 5 006 487,10 euros relatif au plan de développement rural pour la région de Basilicate (Italie),
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, F. Dehousse et A. M. Collins (rapporteur), juges,
greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 avril 2015,
rend le présent
Arrêt
Cadre juridique
1 À l’époque des faits, le règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 209, p. 1), constituait le règlement de base pour le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) créés dans le cadre de ce règlement.
2 L’article 4 dudit règlement prévoyait que le Feader finançait en gestion partagée entre les États membres et l’Union européenne la contribution financière de l’Union aux programmes de développement rural exécutés conformément à la législation de l’Union relative au soutien au développement rural par le Feader.
3 L’article 22 du règlement n° 1290/2005 disposait que la participation financière du Feader aux dépenses des programmes de développement rural était déterminée pour chaque programme, dans la limite des plafonds établis par la législation de l’Union qui y était afférente, augmentée des montants fixés par la Commission européenne. Selon l’article 23, deuxième alinéa, du même règlement, la décision de la Commission adoptant un programme de développement rural soumis par un État membre constituait, une fois notifiée à celui-ci, un engagement juridique. L’article 24 dudit règlement disposait notamment que les crédits nécessaires pour couvrir les dépenses visées à l’article 4 étaient mis à la disposition des États membres par la Commission, sous la forme d’un préfinancement, de paiements intermédiaires et du paiement d’un solde.
4 L’article 26 du règlement n° 1290/2005, intitulé « Versements des paiements intermédiaires », prévoyait :
« 1. Les paiements intermédiaires sont effectués au niveau de chaque programme de développement rural. Ils sont calculés par l’application du taux de cofinancement de chaque axe prioritaire aux dépenses publiques certifiées au titre de cet axe.
2. La Commission effectue les paiements intermédiaires sous réserve des disponibilités budgétaires, pour rembourser les dépenses payées par les organismes payeurs agréés pour la mise en œuvre des opérations.
3. Chaque paiement intermédiaire est effectué par la Commission sous réserve du respect des obligations suivantes :
a) la transmission à la Commission d’une déclaration des dépenses signée par l’organisme payeur agréé, conformément à l’article 8, paragraphe 1, [sous] c) [dont notamment les comptes annuels des organismes payeurs agrées] ;
b) le respect du montant total de la participation du Feader octroyé à chacun des axes prioritaires pour toute la période couverte par le programme concerné ;
c) la transmission à la Commission du dernier rapport annuel d’exécution relatif à la mise en œuvre du programme de développement rural.
4. Si l’une des exigences prévues au paragraphe 3 n’est pas remplie, la Commission en informe immédiatement l’organisme payeur agréé et l’organisme de coordination, lorsqu’il en a été désigné un. En cas de non-respect d’une des exigences prévues au paragraphe 3, [sous] a) ou c), la déclaration de dépenses n’est pas recevable.
5. La Commission effectue le paiement intermédiaire dans un délai n’excédant pas quarante-cinq jours à compter de l’enregistrement d’une déclaration de dépenses remplissant les conditions visées au paragraphe 3 du présent article, sans préjudice des décisions visées aux articles 30 et 31.
6. Les organismes payeurs agréés établissent et transmettent à la Commission, par l’intermédiaire de l’organisme de coordination ou directement, lorsque celui-ci n’a pas été désigné, les déclarations de dépenses intermédiaires relatives aux programmes de développement rural selon une périodicité fixée par la Commission. Ces déclarations de dépenses couvrent les dépenses effectuées par l’organisme payeur agréé au cours de chacune des périodes concernées.
Les déclarations de dépenses intermédiaires relatives aux dépenses effectuées à partir du 16 octobre sont prises en charge au titre du budget de l’année suivante. »
5 L’article 27 dudit règlement, intitulé « Suspension et réduction des paiements intermédiaires », prévoyait :
« 1. Les paiements intermédiaires sont effectués dans les conditions prévues à l’article 81 du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002, sur la base des déclarations de dépenses et des renseignements financiers fournis par les États membres.
2. Si les déclarations de dépenses ou les renseignements communiqués par un État membre ne permettent pas de constater que la déclaration de dépenses est conforme aux règles communautaires applicables, il est demandé à l’État membre concerné de fournir des renseignements complémentaires dans un délai fixé en fonction de la gravité du problème et qui ne peut, en règle générale, être inférieur à trente jours.
3. En l’absence de réponse de la part de l’État membre à la demande visée au paragraphe 2, ou en cas de réponse jugée insatisfaisante ou permettant de conclure à un non-respect de la réglementation ou à une utilisation abusive de fonds communautaires, la Commission peut réduire ou suspendre temporairement les paiements intermédiaires à l’État membre. Elle en informe l’État membre.
4. La suspension des paiements ou les réductions en déduction des paiements intermédiaires visés à l’article 26 respectent le principe de proportionnalité et sont effectuées sans préjudice des décisions visées aux articles 30 et 31. »
6 L’article 29 du règlement n° 1290/2005, intitulé « Dégagement d’office », prévoyait :
« 1. La part d’un engagement budgétaire pour un programme de développement rural qui n’a pas été utilisée pour le paiement du préfinancement ou pour des paiements intermédiaires ou pour laquelle aucune déclaration de dépenses remplissant les conditions prévues à l’article 26, paragraphe 3, n’a été présentée à la Commission au titre des dépenses effectuées au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de l’engagement budgétaire, est dégagée d’office par la Commission.
2. La partie des engagements budgétaires encore ouverts au 31 décembre 2015 qui n’a pas fait l’objet d’une déclaration de dépenses au plus tard le 30 juin 2016 fait l’objet d’un dégagement d’office […]
4. En cas de procédure judiciaire ou de recours administratif ayant un effet suspensif, le délai visé au paragraphe 1 ou 2, au terme duquel intervient le dégagement d’office, est interrompu, pour le montant correspondant aux opérations concernées, pour la durée de ladite procédure ou dudit recours administratif, sous réserve que la Commission reçoive de l’État membre une information motivée au plus tard le 31 décembre de l’année N + 2.
5. N’entrent pas dans le calcul des montants dégagés d’office :
a) la partie des engagements budgétaires qui a fait l’objet d’une déclaration de dépenses mais dont le remboursement fait l’objet d’une réduction ou d’une suspension par la Commission au 31 décembre de l’année N + 2 ;
b) la partie des engagements budgétaires qui n’a pas pu faire l’objet d’un paiement par un organisme payeur pour cause de force majeure, et qui a des répercussions sérieuses sur la mise en œuvre du programme de développement rural. Les autorités nationales qui invoquent la force majeure doivent démontrer ses conséquences directes sur la mise en œuvre de tout ou partie du programme.
6. La Commission informe en temps utile l’État membre et les autorités concernées lorsqu’il existe un risque que soit appliqué le dégagement d’office. La Commission informe l’État membre et les autorités concernées du montant du dégagement d’office résultant des informations en sa possession. L’État membre dispose d’un délai de deux mois à compter de la réception de cette information pour donner son accord sur le montant en cause ou présenter ses observations. La Commission procède au dégagement d’office au plus tard neuf mois après les dates limites prévues aux paragraphes 1 à 4.
7. En cas de dégagement d’office, la participation du Feader au programme de développement rural concerné est réduite, pour l’année concernée, du montant du dégagement d’office […] »
7 L’article 30 du même règlement, intitulé « Apurement comptable », disposait :
« 1. Avant le 30 avril de l’année suivant l’exercice concerné, la Commission décide de l’apurement des comptes des organismes payeurs agréés conformément à la procédure visée à l’article 41, paragraphe 3, sur la base des informations communiquées conformément à l’article 8, paragraphe 1, [sous] c)[,] iii).
2. La décision d’apurement des comptes couvre l’intégralité, l’exactitude et la véracité des comptes annuels soumis. La décision est prise sans préjudice des décisions prises ultérieurement au titre de l’article 31. »
8 L’article 31 du même règlement, intitulé « Apurement de conformité » disposait :
« 1. La Commission décide des montants à écarter du financement communautaire lorsqu’elle constate que des dépenses visées à l’article 3, paragraphe 1, et à l’article 4 n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires, selon la procédure visée à l’article 41, paragraphe 3.
2. La Commission évalue les montants à écarter au vu, notamment, de l’importance de la non-conformité constatée. La Commission tient compte de la nature et de la gravité de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à la Communauté.
3. Préalablement à toute décision de refus de financement, les résultats des vérifications de la Commission ainsi que les réponses de l’État membre concerné font l’objet de notifications écrites, à l’issue desquelles les deux parties tentent de parvenir à un accord sur les mesures à prendre.
À défaut d’accord, l’État membre peut demander l’ouverture d’une procédure visant à concilier les positions respectives dans un délai de quatre mois, dont les résultats font l’objet d’un rapport communiqué à la Commission et examiné par elle avant qu’elle ne se prononce sur un éventuel refus de financement […] »
9 Le règlement (CE) n° 1698/2005 du Conseil, du 20 septembre 2005, concernant le soutien au développement rural par le Feader (JO L 277, p. 1), en vigueur à l’époque des faits, établissait les règles générales pour le soutien communautaire en faveur du développement rural financé par le Feader institué par le règlement n° 1290/2005. Son article 71, intitulé « Éligibilité des dépenses », disposait :
« 1. [… U]ne dépense est éligible pour la participation du Feader si l’aide y afférente est effectivement payée par l’organisme payeur entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2015.
Une nouvelle dépense introduite lors de la révision d’un programme […] est éligible à partir de la date de réception de la demande de modification du programme par la Commission.
2. Les dépenses ne sont éligibles pour la participation du Feader que si elles sont effectuées pour des opérations décidées par l’autorité de gestion du programme concerné ou sous sa responsabilité, selon les critères de sélection fixés par l’organe compétent […] »
10 L’article 75, paragraphe 1, sous a), du même règlement prévoyait que l’autorité de gestion était responsable de la gestion et de la mise en œuvre efficaces, effectives et correctes de chaque programme et qu’elle était chargée, en particulier, de veiller à ce que les opérations soient sélectionnées pour le financement conformément aux critères applicables au programme de développement rural.
11 Selon le considérant 6 du règlement (CE) n° 1974/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, portant modalités d’application du règlement n° 1698/2005 (JO L 368, p. 15), seules les modifications entraînant d’importants remaniements des programmes, des transferts de financement du Feader entre axes dans le cadre du même programme ou des changements dans les taux de cofinancement par le Feader devaient faire l’objet d’une décision de la Commission et il convenait d’établir une procédure d’approbation à cet égard.
12 L’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 1974/2006 disposait :
« Aux fins de l’article 71, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement […] n° 1698/2005, les États membres assument la responsabilité des dépenses entre, d’une part, la date à laquelle leur demande de révision ou de modification d’un programme, visée à l’article 6, paragraphe 1, du présent règlement, est reçue par la Commission et, d’autre part, la date de la décision de la Commission […], ou la date d’achèvement de l’évaluation de la conformité des modifications […] »
13 Le règlement (CE) n° 883/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement n° 1290/2005, en ce qui concerne la tenue des comptes des organismes payeurs, les déclarations de dépenses et de recettes et les conditions de remboursement des dépenses dans le cadre du FEAGA et du Feader (JO L 171, p. 1), détermine certaines conditions et règles spécifiques applicables à la gestion partagée des dépenses et des recettes du Feader, à la tenue des comptes et aux déclarations de dépenses et de recettes par les organismes payeurs, ainsi qu’au remboursement des dépenses par la Commission, dans le cadre du règlement n° 1290/2005. Son considérant 7 indique que, pour les actions afférentes aux opérations financées par le Feader, des déclarations de dépenses, qui valent également demandes de paiement, doivent être communiquées à la Commission accompagnées des renseignements requis. Selon son considérant 11, la Commission effectue au profit des États membres des paiements mensuels ou périodiques sur la base de ces déclarations de dépenses en tenant compte des recettes perçues par les organismes payeurs pour le compte du budget de l’Union. Le considérant 23 indique que, compte tenu des spécificités des règles comptables appliquées pour le Feader, de l’utilisation d’un préfinancement et du financement des mesures par année civile, il convient de prévoir que ces dépenses soient déclarées selon une périodicité adaptée à ces conditions particulières.
14 L’article 16 du règlement n° 883/2006, intitulé « Déclarations de dépenses », dans sa version applicable à l’époque des faits, prévoyait :
« 1. Les déclarations de dépenses des organismes payeurs sont effectuées au titre de chaque programme de développement rural. Ces déclarations portent, pour chaque mesure de développement rural, sur le montant de la dépense publique éligible pour laquelle l’organisme payeur a effectivement versé la contribution correspondante du Feader pendant la période de référence.
2. Une fois le programme approuvé, les États membres transmettent à la Commission, conformément à l’article 8, paragraphe 1, [sous] c)[,] i), du règlement […] n° 1290/2005, leurs déclarations de dépenses, par voie électronique, dans les conditions définies à l’article 18 du présent règlement, selon la périodicité et les délais suivants : […]
d) au plus tard le 31 janvier pour les dépenses de la période allant du 16 octobre au 31 décembre.
Les dépenses déclarées au titre d’une période peuvent comporter des rectifications des données déclarées au titre des périodes de déclaration précédentes du même exercice budgétaire.
[…]
4. Si des discordances, des divergences d’interprétations ou des incohérences relatives aux déclarations de dépenses d’une période de référence, résultant notamment de l’absence de communication des informations requises au titre du règlement […] n° 1698/2005 et de ses modalités d’application, sont constatées et qu’elles nécessitent des vérifications supplémentaires, il est demandé à l’État membre concerné de fournir des renseignements additionnels […]
Le délai de paiement prévu à l’article 26, paragraphe 5, du règlement […] n° 1290/2005 peut dans ce cas être interrompu, pour tout ou partie du montant faisant l’objet de la demande de paiement, à compter de la date de transmission de la demande de renseignements jusqu’à la réception des informations demandées et au plus tard jusqu’à la déclaration de dépenses de la période suivante. En l’absence de solution dans ce délai, la Commission peut suspendre ou réduire les paiements conformément à l’article 27, paragraphe 3, du règlement [...] n° 1290/2005.
[…] »
15 Le règlement (CE) n° 885/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement n° 1290/2005 en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO L 171, p. 90), indiquait, notamment, à son considérant 9, qu’il convenait d’établir les modalités tant de la procédure d’apurement comptable prévue à l’article 30 du règlement n° 1290/2005 que de la procédure d’apurement de conformité prévue à l’article 31 dudit règlement et, notamment, de prévoir un mécanisme permettant de porter les montants qui en résultaient en déduction ou en supplément, selon le cas, d’un des paiements effectués postérieurement aux États membres.
16 L’article 10 du règlement n° 885/2006, intitulé « Apurement comptable », dispose :
« 1. La décision d’apurement des comptes visée à l’article 30 du règlement […] n° 1290/2005 fixe le montant des dépenses effectuées dans chaque État membre au cours de l’exercice budgétaire considéré qui est reconnu imputable au FEAGA et au Feader, sur la base des comptes visés à l’article 6 du présent règlement et des réductions et suspensions imposées, le cas échéant, en vertu des articles 17 et 27 du règlement [...] n° 1290/2005.
[…]
Dans le cas du Feader, le montant fixé par la décision d’apurement des comptes comprend les fonds réutilisables par l’État membre concerné en vertu de l’article 33, paragraphe 3, [sous] c), du règlement […].] n° 1290/2005.
2. […] En ce qui concerne le Feader, les montants qui, en application de la décision d’apurement des comptes, sont à recouvrer auprès de chaque État membre ou doivent lui être payés sont calculés en déduisant les paiements intermédiaires au titre de l’exercice budgétaire en question des dépenses reconnues pour ce même exercice conformément au paragraphe 1. La Commission porte lesdits montants en déduction ou en supplément du premier paiement pour lequel la déclaration de dépenses est présentée par l’État membre après l’adoption d’une décision en vertu de l’article 30 du règlement [...] n° 1290/2005.
3. La Commission communique à l’État membre concerné, au plus tard le 31 mars suivant la fin de l’exercice budgétaire, les résultats de ses vérifications des informations transmises, accompagnés, le cas échéant, des modifications proposées.
4. Si, pour des motifs imputables à l’État membre concerné, la Commission n’est pas en mesure d’apurer les comptes d’un État membre avant le 30 avril de l’année suivante, la Commission notifie à l’État membre les enquêtes complémentaires qu’elle se propose de mener en vertu de l’article 37 du règlement [...] n° 1290/2005.
[…] »
17 L’article 11 du même règlement, intitulé « Apurement de conformité », établissait des modalités de la procédure prévue à l’article 31 du règlement n° 1290/2005.
Antécédents du litige
18 Par communication du 15 novembre 2011, les autorités italiennes ont transmis à la Commission, conformément à l’article 6 du règlement n° 1974/2006, une proposition motivée de modification du programme de développement rural en place pour la région de Basilicate pour la période allant de 2007 à 2013. Cette demande visait, en particulier, les modalités de la mise en œuvre de la mesure n° 125 de ce programme, tant par l’organisation d’appels d’offres régionaux que dans le cadre d’une procédure de mobilisation nationale.
19 Par lettre du 1er décembre 2011, la Commission a accusé réception de cette communication et a précisé qu’un délai d’approbation de six mois s’appliquerait à l’ensemble des modifications demandées, conformément à l’article 7 du règlement n° 1974/2006.
20 Par communication du 26 janvier 2012, l’organisme payeur italien, l’Agenzia per le erogazioni in agricultura (AGEA, Agence pour l’octroi d’aides dans le secteur agricole), a présenté la déclaration des dépenses encourues par l’autorité de gestion du programme de développement rural pour la région de Basilicate relatives au dernier trimestre de 2011, conformément aux termes de l’article 26, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 1290/2005.
21 À la suite de réunions bilatérales entre les autorités italiennes et la Commission, cette dernière, par courrier électronique du 8 février 2012, a sollicité des précisions quant aux dépenses déclarées à la charge du Feader par la région de Basilicate pour le dernier trimestre de 2011. Elle a notamment demandé si ces dépenses comprenaient les dépenses encourues à la suite des propositions de modification du programme pour cette région actuellement sous examen par les services de la Commission. En outre, elle a demandé une justification détaillée des dépenses associées à la mesure n° 125, également sous examen par ses services.
22 Les autorités italiennes ont répondu par courrier électronique du 9 février 2012 en indiquant que les dépenses déclarées comprenaient celles relatives à cinq projets concernant la mesure n° 125 dont la réalisation avait eu lieu dans le cadre de la procédure de mobilisation nationale. Un tableau annexé à ce courrier indiquait le montant total encouru pour ces cinq projets ainsi que la somme de 5 006 487,10 euros imputée au Feader.
23 Par lettre du 21 mars 2012, la Commission a communiqué ses observations et a demandé des précisions sur les propositions de modification du programme de développement régional aux autorités de la région de Basilicate. Elle a notamment constaté que la proposition d’introduction d’une procédure de mobilisation nationale se heurtait à l’article 71, paragraphe 2, et à l’article 75, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1698/2005. Par conséquent, elle a suspendu la période de six mois pour l’approbation de l’ensemble des mesures et a invité les autorités italiennes à revoir leurs propositions.
24 Par lettre du 28 mars 2012, la Commission a invité l’AGEA à présenter une nouvelle déclaration des dépenses pour la région de Basilicate relative au dernier trimestre de 2011 en déduisant celles effectuées pour les cinq projets relatifs à la mesure n° 125, à savoir 8 703 906,64 euros des dépenses publiques, et 5 006 487,10 euros des dépenses imputées au Feader. Elle a renvoyé à sa lettre du 21 mars 2012 et a constaté que la modification proposée aux modalités de la mise en œuvre de la mesure n° 125 n’était pas conforme à l’article 71, paragraphe 2, et à l’article 75, paragraphe 1, du règlement n° 1698/2005 et, donc, que les cinq projets n’étaient pas éligibles à la participation du Feader. Enfin, elle a rappelé le dispositif de l’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 1974/2006.
25 L’AGEA a répondu par lettre du 3 avril 2012 en refusant d’envoyer une nouvelle déclaration. Selon elle, la déclaration des dépenses soumise, respectant les exigences de l’article 26, paragraphe 3, du règlement n° 1290/2005, devait être considérée comme recevable surtout eu égard au fait que la Commission n’avait pas soulevé d’objections au titre du paragraphe 4 de cette même disposition. Par conséquent, la Commission aurait dû verser le paiement intermédiaire dans les 45 jours à compter de la réception de la déclaration des dépenses, ainsi qu’il est prévu à l’article 16, paragraphe 4, du règlement n° 883/2006, lu en combinaison avec l’article 26, paragraphe 5, du règlement n° 1290/2005. Ainsi, la Commission aurait toujours pu exercer la possibilité de suspendre ou de réduire des paiements conformément à l’article 27 du règlement n° 1290/2005. Enfin, l’AGEA a estimé que, le cas échéant, la Commission devait apporter d’éventuelles rectifications à la déclaration des dépenses relative au trimestre suivant, conformément à l’article 16, paragraphe 2, du règlement n° 883/2006.
26 Par lettre du 15 mai 2012, la Commission a pris acte de ce refus des autorités italiennes. Elle a rappelé les raisons pour lesquelles les dépenses relatives aux cinq projets en question auraient dû être déduites de celles déclarées et a invité ces autorités à lui fournir des renseignements complémentaires dans les 30 jours. La Commission a exposé que, en l’absence de réponse ou en cas de réponse insatisfaisante, elle pourrait procéder à la réduction des dépenses déclarées, conformément à l’article 27 du règlement n° 1290/2005, dont le montant de 5 006 487,10 euros imputé au Feader.
27 Par lettre du 25 mai 2012, la Commission a fait part de ses observations sur une nouvelle version révisée de la proposition de modification du programme de développement régional de Basilicate notifiée, en parallèle, le 9 mai 2012. Par cette version, la République italienne proposait de mettre en œuvre la mesure n° 125 par le biais d’appels d’offres pour lesquels l’autorité de gestion pourrait vérifier les conditions de réalisation prévues par le programme de développement rural. La Commission a également rejeté cette proposition. En particulier, elle a indiqué que la demande de modification des modalités de mise en œuvre de cette mesure introduisait des éléments d’incertitude juridique par rapport aux modalités en vigueur. Enfin, elle a suspendu la période de six mois pour l’approbation de la proposition de modification du programme et a invité les autorités italiennes à soumettre une nouvelle version de celle-ci.
28 Par note du 20 juin 2012, les autorités italiennes ont présenté leurs observations sur l’inadmissibilité des dépenses constatée par la Commission dans sa lettre du 15 mai 2012.
29 La Commission a répondu par lettre du 11 septembre 2012, en estimant que les éléments présentés par les autorités italiennes ne répondaient pas aux difficultés soulevées quant à la conformité de la proposition de modification en question avec l’article 71, paragraphe 2, et l’article 75, paragraphe 1, du règlement n° 1698/2005. Elle a conclu, de nouveau, que le montant de 5 006 487,10 euros ne pouvait être financé par le Feader. De plus, elle a indiqué que, en l’absence de réponse ou en cas de réponse insatisfaisante dans les 30 jours, elle procéderait à la réduction correspondante des dépenses intermédiaires, conformément à l’article 27, paragraphe 3, du règlement n° 1290/2005.
30 Par lettre du 19 octobre 2012, les autorités italiennes ont confirmé qu’elles n’avaient pas d’autres arguments à avancer au sujet de la conformité dudit montant des dépenses déclarées et qu’elles avaient procédé à la récupération des sommes perçues par les bénéficiaires de la mesure n° 125.
31 Par lettre du 26 mars 2013, la Commission a indiqué aux autorités italiennes que l’échange d’informations, au sens de l’article 27, paragraphe 3, du règlement n° 1290/2005, était clos et qu’elle maintenait sa conclusion quant à la non-conformité des modalités de mise en œuvre des cinq projets visés par la mesure n° 125 avec le droit de l’Union. Elle a ajouté qu’elle préparait la suspension du montant de 5 006 487,10 euros et que la question serait également prise en considération dans le cadre de la procédure ultérieure d’apurement des comptes.
32 Par lettre du 17 avril 2013, les autorités italiennes ont pris acte de cette lettre de la Commission en indiquant qu’elles considéraient le montant litigieux comme étant déjà suspendu.
33 Le 26 avril 2013, la Commission a adopté la décision d’exécution 2013/209/UE relative à l’apurement des comptes des organismes payeurs des États membres en ce qui concerne les dépenses financées par le Feader pour l’exercice financier 2012 (JO L 118, p. 23, ci-après la « décision attaquée »), qui a été notifiée à la République italienne le 29 avril 2013. En ce qui concerne la région de Basilicate, la Commission a qualifié le montant de 5 006 487,10 euros de « montant non réutilisable », l’écartant ainsi du financement de l’Union.
34 Par communication du 16 mai 2013, la Commission a, notamment, ouvert la procédure d’apurement de conformité, conformément à l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 885/2006. Dans le cadre des mesures correctives, elle a proposé une correction au montant de 5 006 487,10 euros à la charge de l’AGEA.
Procédure et conclusions des parties
35 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 juillet 2013, la République italienne a introduit le présent recours.
36 Aucun mémoire en réplique n’ayant été déposé dans le délai imparti, à savoir le 26 novembre 2013, la procédure écrite a été close à cette date.
37 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, a posé des questions écrites aux parties qui ont répondu dans les délais impartis.
38 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries ainsi qu’en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal, lors de l’audience du 16 avril 2015.
39 La République italienne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée en tant qu’elle écarte le montant de 5 006 487,10 euros, relatif à la région de Basilicate, des limites des dépenses du Feader pour le programme de développement régional pour cette région ;
– condamner la Commission aux dépens.
40 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la République italienne aux dépens.
En droit
41 À l’appui de son recours, la République italienne invoque un moyen unique, tiré de la violation des articles 26, 27 et 29 du règlement n° 1290/2005, de l’article 10 du règlement n° 1974/2006, de l’article 16, paragraphe 4, du règlement n° 883/2006 et de l’article 11 du règlement n° 885/2006, ainsi que de la violation des formes substantielles, dont l’obligation de motivation, et des principes généraux du droit de l’Union, dont, en particulier, les principes de légalité, de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.
42 Selon la République italienne, la qualification du montant de 5 006 487,10 euros de « montant non réutilisable » dans la décision attaquée implique sa déduction du plafond de dépenses du Feader pour le programme de développement rural de la région de Basilicate et, par conséquent, l’impossibilité de son utilisation dans le cadre dudit plafond. Un tel classement équivaudrait au dégagement de ce montant au sens de l’article 29 du règlement n° 1290/2005. Un tel dégagement violerait l’ensemble des dispositions et des règles de droit énoncées au point 41 ci-dessus, en particulier, parce que la déclaration des dépenses pour le programme de développement rural de la région de Basilicate pour le dernier trimestre de 2011 avait été présentée dans les délais requis et conformément à l’article 26, paragraphe 3, du règlement n° 1290/2005.
43 La Commission conteste les arguments de la République italienne et considère que le recours se fonde sur une prémisse erronée en ce que la décision attaquée n’ordonne aucun dégagement d’office du montant litigieux. De plus, dès lors que la République italienne aurait été étroitement associée au processus d’élaboration de cette décision et compte tenu de ses considérants 1 et 7, la décision attaquée devrait être considérée comme suffisamment motivée.
44 Au préalable, il convient de relever que, comme la République italienne l’a confirmé lors de l’audience, le présent recours vise le fait que le montant de 5 006 487,10 euros aurait été, en substance, dégagé d’office dans la décision attaquée, en violation de l’article 29, paragraphe 5, du règlement n° 1290/2005, et ce sans explication adéquate.
45 Or, premièrement, il y a lieu de relever que, dans ses écritures, la République italienne s’est contentée d’invoquer, sans faire le moindre développement, la violation des articles 26 et 27 du règlement n° 1290/2005, de l’article 10 du règlement n° 1974/2006, de l’article 16, paragraphe 4, du règlement n° 883/2006 et de l’article 11 du règlement n° 885/2006, ainsi que la violation des formes substantielles, de manière générale, et des principes généraux du droit de l’Union, dont, en particulier, les principes de légalité, de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.
46 Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du 2 mai 1991, la requête doit notamment contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. En outre, en vertu d’une jurisprudence constante, indépendamment de toute question de terminologie, cet exposé doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans avoir à solliciter d’autres informations. Il faut, en effet, que, pour qu’un recours soit recevable, les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même, et ce afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice (voir arrêt du 27 septembre 2006, Roquette Frères/Commission, T‑322/01, Rec, EU:T:2006:267, point 208 et jurisprudence citée). Toujours selon une jurisprudence constante, tout moyen qui n’est pas suffisamment articulé dans la requête introductive d’instance doit être considéré comme irrecevable. Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief est invoqué au soutien d’un moyen. S’agissant d’une fin de non-recevoir d’ordre public, cette irrecevabilité peut être soulevée d’office par le Tribunal, au besoin (voir arrêt du 14 décembre 2005, Honeywell/Commission, T‑209/01, Rec, EU:T:2005:455, points 54 et 55 et jurisprudence citée).
47 Au regard de la jurisprudence constante rappelée au point 46 ci-dessus, le Tribunal constate d’office que les griefs énoncés au point 45 ci-dessus ne sont pas étayés sommairement, conformément aux dispositions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du 2 mai 1991. Il convient donc de les écarter comme irrecevables.
48 Deuxièmement, la République italienne fait valoir, aux points 40 et 41 de la requête, que la somme du montant litigieux indiquée dans la décision attaquée est incorrecte. Selon elle, compte tenu du fait que « des paiements ont été effectués au-delà du strict nécessaire pour éviter le dégagement », ce montant devrait s’élever à 4 475 963,58 euros. Elle fournit un tableau qui démontrerait le montant total des engagements financiers pour la région entre 2007 et 2009 et la différence entre les paiements effectués au 31 décembre 2011, d’une part, en admettant les cinq projets dans la mesure n° 125 et, d’autre part, en les excluant.
49 Force est de constater que ce tableau, figurant au point 41 de la requête, ne comporte aucune indication de l’origine des données qu’il contient, ni aucune explication pertinente quant à la méthode utilisée pour l’élaborer, et qu’il est impossible de vérifier les informations qu’il contient. Dès lors, il n’a pas une valeur probante suffisante et ne saurait donc conduire le Tribunal à examiner le calcul du montant litigieux. À cet égard, il doit être rappelé que, pour apprécier la valeur probante d’un document, il faut vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue et tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire, pour se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable (voir arrêt du 27 septembre 2006, Dresdner Bank e.a./Commission, T‑44/02 OP, T‑54/02 OP, T‑56/02 OP, T‑60/02 OP et T‑61/02 OP, Rec, EU:T:2006:271, point 121 et jurisprudence citée).
50 Il s’ensuit que le grief relatif au calcul du montant litigieux n’est pas étayé et doit être écarté.
51 Il en va de même pour le tableau fourni au point 37 de la requête qui démontrerait les montants récupérés par les autorités italiennes auprès des bénéficiaires de la mesure n° 125 et qui représenteraient les parts du Feader. Ce tableau ne comporte aucune indication de l’origine des données qu’il contient ni aucune explication pertinente quant à la méthode utilisée pour l’élaborer. Dès lors, il doit également être écarté comme dépourvu de valeur probante.
52 À titre surabondant, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, s’il appartient à la Commission de prouver l’existence d’une violation des règles de droit de l’Union, une fois cette violation établie, il revient à l’État membre de démontrer, le cas échéant, que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à en tirer (arrêts du 7 octobre 2004, Espagne/Commission, C‑153/01, Rec, EU:C:2004:589, point 67, et du 7 juillet 2005, Grèce/Commission, C‑5/03, Rec, EU:C:2005:426, point 38). À supposer que la violation soit établie en l’espèce, force est de constater que la République italienne n’a présenté aucun argument susceptible de démontrer une erreur de la Commission quant aux conséquences financières à en tirer.
53 Pour le surplus, s’agissant des griefs tirés, en substance, de la violation de l’article 29, paragraphe 5, du règlement n° 1290/2005 et de l’obligation de motivation, il convient de relever ce qui suit.
54 Premièrement, la République italienne soutient que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation relatif au classement du montant litigieux dans la décision d’apurement des comptes du Feader pour 2012, qui ne mentionne pas les actes préparatoires à son adoption.
55 Deuxièmement, la République italienne fait valoir que, dans la mesure où le montant litigieux a été réduit ou suspendu au titre de l’article 27, paragraphe 3, du règlement n° 1290/2005, il est nécessairement exclu du calcul des montants dégagés en vertu de l’article 29, paragraphe 5, du même règlement. De même, l’apurement des comptes ne porterait que sur les conclusions de redditions de comptes présentés par chaque organisme payeur. Selon la République italienne, l’insertion du montant litigieux dans la décision attaquée relative à l’apurement des comptes du Feader pour l’exercice de 2012 est contradictoire à l’ouverture subséquente de la procédure d’apurement de conformité prévue par l’article 11 du règlement n° 885/2006.
Sur le grief tiré d’une insuffisance de motivation de la décision attaquée
56 Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître, d’une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’institution auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et de défendre leurs droits et au juge d’exercer son contrôle. Il ne saurait toutefois être exigé que la motivation spécifie tous les différents éléments de fait et de droit pertinents. En effet, la question de savoir si la motivation d’une décision satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêt du 18 janvier 2000, Mehibas Dordtselaan/Commission, T‑290/97, Rec, EU:T:2000:8, point 92 et jurisprudence citée).
57 Dans le contexte particulier de l’élaboration des décisions relatives à l’apurement des comptes, il est de jurisprudence constante que la motivation d’une décision doit être considérée comme suffisante dès lors que l’État destinataire a été étroitement associé au processus d’élaboration de cette décision et qu’il connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du Feader les sommes litigieuses (voir, par analogie, dans le contexte du FEOGA, arrêts du 6 mars 2001, Pays-Bas/Commission, C‑278/98, Rec, EU:C:2001:124, point 119 ; du 20 septembre 2001, Belgique/Commission, C‑263/98, Rec, EU:C:2001:455, point 98, et du 9 septembre 2004, Grèce/Commission, C‑332/01, Rec, EU:C:2004:496, point 67).
58 Premièrement, en l’espèce, il ressort du déroulement des faits et des pièces du dossier que la Commission a exposé de façon claire et suffisante les raisons pour lesquelles elle estimait que le montant litigieux n’était pas éligible pour la participation du Feader, et ce tout au long de la procédure administrative ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée. En effet, elle a attiré l’attention de la République italienne, à plusieurs reprises, sur le caractère irrégulier de l’inclusion du montant litigieux dans les dépenses déclarées à la charge du Feader pour le dernier trimestre de 2011. De plus, elle lui a itérativement demandé de déduire ces dépenses effectuées pour les cinq projets relatifs à la mesure n° 125 et lui a indiqué qu’elle procéderait à la réduction correspondante des dépenses intermédiaires en raison de la non-conformité de ladite mesure avec l’article 71, paragraphe 2, et l’article 75, paragraphe 1, du règlement n° 1698/2005.
59 Ainsi, dans la lettre du 21 mars 2012 (voir point 23 ci-dessus), la Commission a constaté que la modification de la mesure n° 125 n’était pas compatible avec les exigences de l’article 71, paragraphe 2, et de l’article 75, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1698/2005. Elle y a précisé que seules les dépenses décidées par l’autorité de gestion du programme concerné ou sous sa responsabilité, selon les critères de sélection fixés par l’organe compétent, étaient éligibles pour la participation du Feader. Or, ce n’était pas le cas en l’espèce. Par la suite, dans la lettre du 28 mars 2012 (voir point 24 ci-dessus), la Commission a invité l’AGEA à déduire les dépenses relatives à la mesure n° 125 de la déclaration des dépenses pour la région de Basilicate relative au dernier trimestre de 2011, dès lors qu’elles ne pouvaient pas être imputées au Feader. D’une part, elle y a renvoyé à la lettre précédente du 21 mars 2012 et a réitéré les motifs de cette exclusion ainsi que les mêmes dispositions législatives applicables et, d’autre part, elle a rappelé le dispositif de l’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 1974/2006 pour demander cette déduction. La lettre du 15 mai 2012 (voir point 26 ci-dessus) a repris les motifs des lettres précédentes et a indiqué que, sauf renseignements complémentaires pertinents, la Commission procéderait à l’apurement des comptes, déduction faite des dépenses liées à la mesure n° 125, à savoir le montant de 5 006 487,10 euros. De même, par la lettre du 11 septembre 2012 (voir point 29 ci-dessus), écartant les éléments présentés par les autorités italiennes, la Commission a, de nouveau, conclu à l’inéligibilité du montant litigieux sur la base des mêmes motifs et des mêmes dispositions.
60 Cette procédure a abouti à la lettre du 26 mars 2013 (voir point 31 ci-dessus). La Commission y a, de nouveau, exposé les raisons pour lesquelles elle considérait le montant litigieux comme non éligible pour la participation du Feader. Elle a indiqué que les autorités italiennes n’avaient pas répondu à ses préoccupations quant à la légalité des dépenses encourues dans le cadre de la mesure n° 125, exprimées dans la lettre du 11 septembre 2012. Par conséquent, elle maintenait sa conclusion et indiquait qu’elle procéderait à la suspension du montant de 5 006 487,10 euros et que la question serait prise en considération dans le cadre de la procédure d’apurement des comptes.
61 Force est de constater qu’un tel déroulement des faits, non contesté par la République italienne, démontre que la Commission s’est exprimée de façon claire et non équivoque quant au traitement du montant litigieux.
62 Deuxièmement, il ressort des pièces du dossier que les autorités italiennes avaient compris que le montant litigieux avait été écarté des dépenses éligibles pour le dernier trimestre de 2011 et pour quels motifs. Il convient en particulier de souligner que, à la fin de 2012, en anticipant la suspension du montant litigieux des dépenses éligibles pour la participation du Feader, les autorités italiennes ont procédé à la récupération de la totalité de la somme auprès des bénéficiaires ainsi qu’en témoigne leur lettre du 19 octobre 2012. De plus, les autorités italiennes ont modifié, à deux reprises, leur proposition de modification des modalités de mise en œuvre de la mesure n° 125 afin de répondre aux difficultés soulevées par la Commission, ainsi que le démontrent leurs réponses aux questions écrites posées par le Tribunal.
63 Il convient également de relever que les autorités italiennes se sont exprimées itérativement sur la qualification du montant litigieux et la prise de position de la Commission à cet égard dans leurs lettres des 3 avril, 20 juin et 19 octobre 2012 et du 17 avril 2013 pendant la procédure administrative.
64 En outre, il convient de relever que, dès lors que la République italienne a expressément lancé, par sa communication du 15 novembre 2011 (voir point 18 ci-dessus), la procédure de contrôle de la modification proposée en l’espèce sur la base de l’article 6 du règlement n° 1974/2006, elle ne saurait prétendre qu’elle ignorait les conséquences de la non-approbation de cette modification telles qu’énoncées à l’article 10 du même règlement.
65 Troisièmement, l’argument selon lequel la décision attaquée ne comporte aucune motivation ne saurait prospérer. Il ressort des considérants de cette décision que la Commission s’est fondée notamment sur les articles 27, 30 et 33 du règlement n° 1290/2005. En particulier, au considérant 7 de la décision attaquée, la Commission a précisé que, « [a]fin d’éviter un remboursement prématuré ou temporaire des [paiements intermédiaires réduits ou suspendus conformément à l’article 27, paragraphe 3], il conv[enait] que ceux-ci ne soient pas reconnus par la présente décision et fassent l’objet d’un examen complémentaire dans le cadre de la procédure d’apurement de conformité ». Ainsi, à l’article 1er de la décision attaquée, elle a apuré les comptes des organismes payeurs des États membres, en ce qui concernait les dépenses financées par le Feader pour l’exercice financier 2012 en précisant, à l’annexe I, les montants recouvrables auprès de chaque État membre ou payables à chaque État membre au titre de chaque programme de développement rural. À l’annexe I, pour la région de Basilicate, le montant litigieux a été déduit des dépenses déclarées. Par conséquent, le montant accepté et apuré de l’exercice financier 2012 a été réduit de manière proportionnelle.
66 Contrairement à ce que prétend la République italienne, il est sans importance que la décision attaquée ne se réfère pas aux actes préparatoires à son adoption. En effet, la République italienne a été étroitement associée au processus d’élaboration de cette décision au sens de la jurisprudence citée au point 57 ci-dessus et elle connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre le montant litigieux à la charge du Feader. Par ailleurs, la République italienne n’identifie aucune imprécision qui l’aurait conduite à ne pas comprendre la décision attaquée. Dans la mesure où elle prétend ne pas comprendre l’inclusion du montant litigieux « dans une colonne qui n’a auparavant jamais été utilisée [dans la décision attaquée], mentionnée à titre de ‘montant non réutilisable’ », il convient de relever que cette nomenclature provient directement de l’article 33 du règlement n° 1290/2005. Cet article, intitulé « Dispositions spécifiques au Feader », prévoit en son paragraphe 3, sous c), que les sommes supprimées du financement de l’Union et les sommes récupérées ainsi que les intérêts qui y sont afférents sont réaffectés au programme concerné. Toutefois, ces fonds ne peuvent être « réutilisés » par l’État membre que pour une opération prévue dans le même programme de développement rural, et sous réserve qu’ils ne soient pas réaffectés aux opérations ayant fait l’objet d’un redressement financier. Ainsi qu’il a été constaté au point 65 ci-dessus, la décision attaquée indique expressément l’article 33 en tant que base juridique. De plus, la République italienne a non seulement récupéré le montant litigieux en anticipant l’adoption de la décision attaquée, mais également fait valoir dans le présent recours qu’elle n’était pas en mesure de réutiliser ce montant dans le programme affecté. Ces éléments indiquent qu’elle a bien compris la motivation de la décision attaquée et a pu faire valoir ses droits devant le Tribunal.
67 Par conséquent, le présent grief doit être rejeté comme non fondé.
Sur le grief tiré de la violation de l’article 29, paragraphe 5, du règlement n° 1290/2005
68 Au préalable, il convient de rappeler que la Commission n’est pas en droit d’engager, dans la gestion de la politique agricole commune, des fonds qui ne répondent pas aux règles régissant l’organisation commune des marchés en cause et que cette règle est d’application générale (voir arrêt du 9 juin 2005, Espagne/Commission, C‑287/02, Rec, EU:C:2005:368, point 34 et jurisprudence citée). Ainsi, lorsque la Commission relève que les comptes des organismes payeurs incluent des dépenses effectuées contrairement aux règles de l’Union régissant l’organisation commune du marché en cause, elle a le pouvoir d’en tirer toutes les conséquences et donc d’apporter des corrections financières aux comptes annuels des organismes payeurs dès le stade de sa décision relative à l’apurement des comptes prise en application de l’article 30 du règlement n° 1290/2005 (voir, en ce qui concerne l’apurement comptable dans le cadre de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 1258/1999, arrêt Espagne/Commission, précité, EU:C:2005:368, point 35).
69 Selon une jurisprudence constante, lorsque la Commission refuse de mettre à la charge des fonds certaines dépenses pour cause de violations des dispositions du droit de l’Union imputables à un État membre, elle doit prouver l’existence desdites violations (voir, en ce sens, arrêt du 28 octobre 1999, Italie/Commission, C‑253/97, Rec, EU:C:1999:527, point 6 et jurisprudence citée).
70 Il appartient à la Commission, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, non pas de démontrer de façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du Feader et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, l’inexactitude des affirmations de la Commission (voir, dans le contexte du FEOGA, arrêts Espagne/Commission, point 68 supra, EU:C:2005:368, point 53, et du 6 novembre 2014, Pays-Bas/Commission, C‑610/13 P, EU:C:2014:2349, point 60).
71 Il appartient ensuite à cet État membre de démontrer que les conditions sont réunies pour obtenir le financement refusé par la Commission. L’État membre concerné ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle (voir arrêt du 17 mai 2013, Bulgarie/Commission, T‑335/11, EU:T:2013:262, point 22 et jurisprudence citée).
72 C’est à lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le présent grief.
73 Par ce grief, la requérante allègue que la Commission a dégagé le montant litigieux dans la décision attaquée, tel que prévu par l’article 29 du règlement n° 1290/2005. Selon la République italienne, un montant suspendu conformément à l’article 27, paragraphe 3, du même règlement ne peut faire l’objet d’un dégagement en vertu de l’article 29, paragraphe 5, sous a), dudit règlement.
74 Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que l’article 29 du règlement n° 1290/2005 ne constitue pas l’une des bases juridiques de la décision attaquée. Cette disposition n’est invoquée ni dans les considérants ni dans le dispositif de cette décision, ainsi qu’il ressort de l’examen du grief tiré d’une insuffisance de motivation. Il ressort de l’intitulé de la décision attaquée qu’elle vise l’apurement des comptes des organismes payeurs pour l’exercice financier 2012. Ensuite, il résulte d’une lecture combinée du considérant 7, de l’article 1er et de l’annexe I de la décision attaquée que le montant litigieux avait été déduit du montant apuré pour le programme de développement rural de la région de Basilicate pour cet exercice et qu’il avait ainsi été ordonné à la République italienne de ne pas réutiliser ce montant dans le cadre dudit programme jusqu’à la prise de position de la Commission dans le cadre d’une procédure ultérieure d’apurement de conformité. Enfin, et ainsi qu’il ressort du point 68 ci-dessus, il entre dans les compétences de la Commission d’effectuer de telles corrections dans le cadre d’une décision d’apurement.
75 Lors de l’audience et dans ses réponses aux questions écrites posées par le Tribunal, la République italienne a admis qu’aucune application de l’article 29 du règlement n° 1290/2005 n’avait eu lieu en l’espèce. Cependant, elle prétend que la classification du montant litigieux en tant que « montant non réutilisable » est « strictement assimilable au dégagement » dans le cadre du Feader.
76 Cet argument ne saurait être accueilli.
77 Il ressort du considérant 22 du règlement n° 1290/2005 que la règle du dégagement d’office a été élaborée pour contribuer à l’accélération de la mise en œuvre des programmes et à la bonne gestion financière. Ainsi, la Commission est habilitée, par l’article 29 du même règlement, à dégager d’office la part d’un engagement budgétaire pour un programme de développement rural qui n’a pas été utilisée pour le paiement du préfinancement ou pour des paiements intermédiaires ou pour laquelle aucune déclaration de dépenses correcte n’a été présentée au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de l’engagement budgétaire.
78 En l’espèce, la décision attaquée n’ordonne aucun écartement définitif du montant litigieux. En effet, il en ressort que la Commission n’a pas encore pris de position définitive sur la qualification de ce montant. La Commission précise, au considérant 5 de la décision attaquée, que, pour les comptes annuels et les documents accompagnant qui lui permettaient de statuer sur l’intégralité, l’exactitude et la véracité des comptes transmis, les montants apurés, ventilés par État membre, figuraient à l’annexe I, de même que les montants recouvrables auprès des États membres ou payables à ceux-ci. En revanche, au considérant 7 de la décision attaquée, la Commission a constaté que, afin d’éviter un remboursement prématuré ou temporaire des paiements intermédiaires suspendus ou réduits, il convenait que ceux-ci ne soient pas reconnus par ladite décision et fassent l’objet d’un examen complémentaire dans le cadre de la procédure d’apurement de conformité prévue à l’article 31 du règlement n° 1290/2005. Ainsi qu’il ressort de la communication de la Commission du 16 mai 2013 (voir point 34 ci-dessus), la Commission a ouvert cette procédure d’apurement de conformité. L’annexe 4 de ce document, intitulée « Mesures correctives », portait notamment sur le traitement du montant litigieux. Il est, par ailleurs, constant entre les parties que cette procédure était toujours en cours à la date de l’audience. Par conséquent, la décision attaquée n’équivaut ni de jure ni de facto à un dégagement du montant litigieux. Ainsi, la République italienne n’est pas fondée à invoquer l’exception au dégagement d’office prévue par l’article 29, paragraphe 5, du règlement n° 1290/2005. Le fait qu’elle soit empêchée, en raison de la décision attaquée, d’utiliser le montant litigieux dans le cadre du programme de développement rural pour la région de Basilicate est sans influence sur la qualification juridique de cette décision.
79 Les autres arguments de la requérante, qui reposent en majeure partie sur la prémisse erronée selon laquelle le montant litigieux a été effectivement dégagé, ne sont pas de nature à remettre en cause cette conclusion.
80 Premièrement, c’est à tort que la République italienne prétend que « la présentation formelle d’une déclaration trimestrielle de dépenses dans les délais requis […] ne peut pas entraîner le dégagement des sommes correspondantes, mais peut éventuellement donner lieu uniquement à la suspension ou à la réduction d’un montant remboursé [ ; t]outefois, le montant éventuellement réduit ou suspendu ne saurait être dégagé […] [et] peut être réutilisé dans le cadre de ce [programme de développement rural] ».
81 Ainsi qu’il a été constaté ci-dessus, aucun dégagement n’a eu lieu en l’espèce.
82 Toutefois, il convient de relever que, selon la logique de l’argument de la République italienne, la Commission serait obligée d’accepter une fausse déclaration de dépenses intermédiaires pour un programme de développement rural en raison du simple respect de formalités relatives à sa présentation prévues par l’article 26, paragraphe 3, du règlement n° 1290/2005. Elle serait donc obligée de les apurer et, ensuite, d’assumer la charge administrative de la rectification de cette déclaration dans le cadre de la procédure prévue par l’article 16 du règlement n° 883/2006. Une telle logique se heurte à l’intégrité de la procédure d’apurement comptable prévue par l’article 30 du règlement n° 1290/2005 qui, ainsi qu’il ressort de son libellé, couvre l’intégralité, l’exactitude et la véracité des comptes annuels soumis par les autorités nationales.
83 En effet, la décision d’apurement comptable précise les montants recouvrables de chaque État membre qui sont déterminés en déduisant le montant des avances versées au cours de l’exercice financier en question des dépenses reconnues au titre du même exercice. Lorsque la Commission constate l’existence d’irrégularités dans la déclaration annuelle des dépenses pour un programme quelconque, elle ne peut pas les reconnaître comme étant imputables au Feader dans le cadre de l’apurement comptable et doit donc refuser leur financement dans l’attente d’une éventuelle décision de non-conformité (voir, par analogie, arrêt Espagne/Commission, point 68 supra, EU:C:2005:368, point 32, et conclusions de l’avocat général Jacobs dans cette affaire, Rec, EU:C:2005:35, points 47 et 48).
84 En l’espèce, la République italienne a expressément inclus, dans sa déclaration des dépenses pour le dernier trimestre de 2011, des dépenses qui n’étaient pas recevables aux fins du financement par le Feader en vertu de l’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 1974/2006. Elle ne saurait prétendre que la présentation d’une déclaration des dépenses intermédiaires, respectant les exigences formelles applicables, donne lieu à une participation du Feader à des dépenses qui ne seraient jamais imputables à ce fonds. S’il en allait ainsi, cette disposition serait, en effet, dépourvue de tout effet utile.
85 Il en va de même pour l’argument de la République italienne selon lequel « l’apurement des comptes porte sur les conclusions de redditions de comptes, présentées par chaque organisme payeur […] et […] il n’existe, dans les justificatifs présentés [en l’espèce] aucune remarque spécifique au sujet du problème lié aux paiements litigieux [relatifs à la région de Basilicate] ». Cet argument doit être écarté sur la base des considérations qui précèdent. En tout état de cause, le refus de financement de dépenses qui sont effectuées contrairement à la réglementation de l’Union ne saurait dépendre d’une prise de position intervenue au niveau national, puisque l’approbation de dépenses pour l’exercice d’apurement comptable incombe aux services de la Commission et non aux autorités nationales ou à la société engagée pour préparer les justificatifs.
86 Quant à l’affirmation selon laquelle la République italienne était dans l’impossibilité de modifier la déclaration trimestrielle en l’espèce, parce que les formalités de l’article 26, paragraphes 3 et 4, du règlement n° 1290/2005 avaient été respectées et le délai était expiré, elle est peu crédible dès lors que la Commission l’avait invitée à trois reprises à déduire le montant litigieux de sa déclaration pendant la procédure administrative, à savoir dans ses communications des 28 mars, 15 mai et 25 mai 2012.
87 Deuxièmement, il est certes vrai que la législation pertinente « n’interdit pas [à l’État membre] d’effectuer des dépenses en attendant l’approbation des modifications du [programme de développement rural soumises à la Commission] », ainsi que l’avance la République italienne. Toutefois, il n’en résulte pas, contrairement à ce que prétend cette dernière, que la déclaration de dépenses relative au dernier trimestre de 2011 était valide. Ainsi qu’il découle de l’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 1974/2006, les États membres peuvent effectuer des dépenses pendant cette période, mais ils assument la responsabilité des dépenses encourues entre la date à laquelle leur demande de modification est reçue par la Commission et la date de la décision de cette dernière sur la conformité de cette modification.
88 L’article 16, paragraphe 4, du règlement n° 883/2006 ne saurait davantage appuyer l’argument de la République italienne. Contrairement à ce qu’avance cette dernière, la Commission n’est pas tenue d’effectuer les paiements intermédiaires dans les 45 jours à compter de la simple présentation de la déclaration des dépenses lorsqu’elle constate des irrégularités. De plus, en l’espèce, la Commission avait demandé des informations supplémentaires aux autorités italiennes (voir points 21 et 23 ci-dessus). Selon le deuxième alinéa de cette disposition, en l’absence d’une solution après un tel échange d’informations, la Commission peut suspendre ou réduire les paiements conformément à l’article 27, paragraphe 3, du règlement n° 1290/2005.
89 Troisièmement, pour autant que la République italienne affirme qu’il y a eu une « disjonction des comptes » en l’espèce, dans la mesure où le montant litigieux a été considéré, dans la communication de la Commission du 16 mai 2013, à la fois comme un des « problèmes faisant l’objet de l’apurement des comptes de 2012 » et comme un montant suspendu, cette allégation est non fondée. Selon l’article 27, paragraphe 4, du règlement n° 1290/2005, les décisions de suspendre ou de réduire des paiements au titre du paragraphe 3 sont effectuées sans préjudice des décisions visées aux articles 30 et 31 du même règlement. Selon l’article 30, paragraphe 2, dudit règlement, une décision adoptée sur la base de l’article 30 est prise sans préjudice des décisions prises ultérieurement au titre de l’article 31 et concernant les dépenses à écarter du financement de l’Union lorsque celles-ci n’ont pas été effectuées conformément aux règles de l’Union. Il en résulte que, lors de l’adoption d’une décision d’apurement comptable sur la base de l’article 30, la Commission peut tirer les conséquences des carences décelées dans la qualité des comptes transmis, et ce indépendamment de la décision d’apurement de conformité. En l’espèce, le considérant 10 de la décision attaquée constate que, conformément à l’article 30, paragraphe 2, du règlement n° 1290/2005, cette décision « ne préjuge pas des décisions ultérieures de la Commission écartant du financement de l’Union européenne des dépenses qui n’auraient pas été effectuées conformément aux règles de l’Union européenne ».
90 Par conséquent, la République italienne n’a pas démontré que le traitement du montant litigieux dans la décision attaquée était erroné. En effet, elle a refusé de déduire ce montant, inclus à tort dans sa déclaration de dépenses intermédiaires, en anticipant l’adoption de la décision d’apurement pour l’exercice de 2012 malgré les demandes répétées de la Commission. Cette dernière s’est retrouvée dans l’impossibilité d’apurer ledit montant. En effet, si elle l’avait fait, ce montant aurait été erronément compté dans le plafond des dépenses approuvées pour le programme de développement en cause. La Commission l’a donc écarté de la participation du Feader jusqu’à son examen dans le cadre de la procédure d’apurement de conformité. En outre, il ressort clairement de l’examen du grief tiré de l’insuffisance de motivation que ce traitement était prévisible et a été mis en évidence par la Commission pendant la période administrative ayant précédé l’adoption de la décision attaquée.
91 Quatrièmement, force est de constater que, par son argument selon lequel il existe une contradiction entre « la vérification de ce qu’a fait l’organisme payeur AGEA, en envisageant une éventuelle correction financière, dont la fixation du montant devrait refléter le préjudice [...] pour le [Feader] (préjudice et risque d’ailleurs inexistants en raison tant de l’absence de remboursement que de la récupération effectuée intégralement auprès des bénéficiaires) et l’insertion du montant [litigieux] dans la décision d’apurement des comptes, en le qualifiant de ‘montant non réutilisable’ », la République italienne répète, en substance, l’argument déjà écarté au point 89 ci-dessus. En tout état de cause, cet argument n’est pas fondé, puisque la qualification de ce montant comme non réutilisable dans la décision attaquée (et son exclusion conséquente de la participation du Feader) ne préjuge pas de l’issue de la procédure d’apurement de conformité (voir point 78 ci-dessus).
92 Il résulte de tout ce qui précède que la Commission n’a pas violé l’article 29, paragraphe 5, du règlement n° 1290/2005 en traitant le montant litigieux comme non réutilisable dans la décision attaquée.
93 Il s’ensuit que le présent grief doit être rejeté et, par conséquent, le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
94 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
95 La République italienne ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) La République italienne est condamnée aux dépens.
Frimodt Nielsen | Dehousse | Collins |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 octobre 2015.
Table des matières
Cadre juridique
Antécédents du litige
Procédure et conclusions des parties
En droit
Sur le grief tiré d’une insuffisance de motivation de la décision attaquée
Sur le grief tiré de la violation de l’article 29, paragraphe 5, du règlement n° 1290/2005
Sur les dépens
* Langue de procédure : l’italien.
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