Wahlstrom v FRONTEX (Judgment) French Text [2015] EUECJ T-653/13 (18 September 2015)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2015/T65313.html
Cite as: [2015] EUECJ T-653/13, ECLI:EU:T:2015:652, EU:T:2015:652

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ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

18 septembre 2015 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Agents temporaires – Notation – Rapport d’évolution de carrière – Exercice d’évaluation 2010 – Dialogue annuel avec l’évaluateur – Fixation d’objectifs »

Dans l’affaire T‑653/13 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne du 9 octobre 2013, Wahlström/Frontex (F‑116/12, RecFP, EU:F:2013:143), et tendant à l’annulation de cet arrêt,

Kari Wahlström, ancien agent temporaire de l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne, demeurant à Espoo (Finlande), représenté par Me S. Pappas, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (Frontex), représentée par MM. S. Vuorensola et H. Caniard, en qualité d’agents, assistés de Mes A. Duron et D. Waelbroeck, avocats,

partie défenderesse en première instance,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),

composé de MM. M. Jaeger, président, H. Kanninen (rapporteur) et Mme M. E. Martins Ribeiro, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le requérant, M. Kari Wahlström, demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 9 octobre 2013, Wahlström/Frontex (F‑116/12, RecFP, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:F:2013:143), par lequel celui-ci a rejeté son recours ayant pour objet, d’une part, l’annulation de son rapport d’évaluation pour l’année 2010 (ci-après le « rapport d’évaluation ») et, d’autre part, la condamnation de l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (Frontex) au versement de la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de l’absence de fixation d’objectifs aux fins de l’évaluation de ses performances professionnelles pour cette même année.

 Faits à l’origine du litige

2        Les faits pertinents à l’origine du litige sont énoncés aux points 6 à 13 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

« 6      Le requérant est entré au service de Frontex le 1er août 2006, en qualité d’agent temporaire au sens de l’article 2, sous a), du RAA, pour une période de cinq ans renouvelable. Il a, dans un premier temps, été désigné chef de l’unité des services administratifs de Frontex et classé dans le grade A*12, deuxième échelon.

7      Début 2008, un niveau supplémentaire d’encadrement, constitué de ‘divisions’, avec à leur tête des ‘directeurs de divisions’, a été créé entre les unités et le directeur exécutif de Frontex. À ce jour, Frontex se compose ainsi de trois divisions, elles-mêmes divisées en unités, dont certaines sont sous-divisées en secteurs. La division administrative comprend trois unités, dont l’unité des services administratifs couvrant quatre secteurs, à savoir les ‘services généraux’, les ‘ressources humaines’, la ‘sécurité’ et les ‘technologies de l’information’.

8      Suite à une procédure de sélection interne et conformément à un avenant à son contrat, signé le 22 juin 2010, le requérant a été affecté, avec effet au 1er août 2010, au poste de chef du bureau opérationnel de Frontex au Pirée (Grèce). Ses fonctions de chef de l’unité des services administratifs avaient été transférées dès le mois de juin 2010 à son supérieur hiérarchique, le directeur de la division administrative.

9      En sa qualité de chef du bureau opérationnel de Frontex au Pirée, le requérant avait notamment pour mission de traiter des aspects organisationnels de la préparation, de la planification, de la mise en œuvre, du développement et de l’évaluation du projet pilote du bureau, d’assurer le fonctionnement général de celui-ci et de veiller au respect des procédures internes administratives et financières.

10      S’agissant de l’évaluation des performances professionnelles du requérant, un rapport d’évaluation a été finalisé le 5 novembre 2009, pour l’année 2008. Dans ce rapport, le directeur de la division administrative, en qualité d’évaluateur, et le directeur exécutif adjoint, en qualité de validateur, ont estimé que les performances du requérant relevaient du niveau III, dès lors que, selon eux, il avait ‘partiellement répondu aux attentes en matière d’efficacité, de capacité et de conduite dans le service’. En revanche, dans le rapport d’évaluation, finalisé le 23 juin 2010 pour l’année 2009, les mêmes évaluateur et validateur ont situé au niveau II le degré de performance du requérant, ce dernier ayant, selon eux, ‘pleinement répondu aux attentes en matière d’efficacité, de capacité et de conduite dans le service’. Enfin, le 23 février 2011, le requérant s’est vu communiquer un projet de rapport d’évaluation, couvrant l’année 2010, dans lequel le directeur exécutif adjoint, cette fois comme évaluateur, et le directeur exécutif, en tant que validateur, ont estimé devoir situer le degré de performance du requérant au niveau III.

11      Le requérant a introduit, le 28 avril 2011, devant le comité d’évaluation conjointe institué par l’article 13 de la décision [du directeur exécutif de Frontex] du 27 août 2009 [établissant une procédure d’évaluation du personnel] (ci-après le ‘CEC’), un recours à l’encontre de cette dernière évaluation. Le 13 juin 2012, ledit comité a rendu son avis dans lequel il a conclu que, ‘au regard du manque d’objectifs fixés dans le rapport et l’insuffisance de preuves à l’appui de certaines de ses appréciations’, il était nécessaire d’‘améliorer l’impartialité et l’objectivité’ du rapport, et qu’‘[e]n raison des longues périodes de congé de maladie du requérant en 2011 et des difficultés qui en ont résulté pour réaliser l’ensemble des étapes de la procédure d’évaluation, le CEC [a considéré], d’une part, que la procédure applicable n’a[vait] pas été suivie, mais, d’autre part, que la responsabilité ne p[ouvait] pas en être imputée à l’évaluateur et/ou au validateur’. Plusieurs recommandations ont été formulées à cet effet par le CEC.

12      Par courriel du 11 juillet 2012 adressé notamment au requérant, ce dernier a été informé que le validateur avait décidé de confirmer le rapport d’évaluation pour l’année 2010 […] et de n’y apporter aucun amendement.

13      Entre-temps, le 10 décembre 2010, le directeur exécutif a adopté la décision de ne pas renouveler le contrat du requérant, arrivé à son terme le 31 juillet 2011. Cette décision a été attaquée par le requérant devant le Tribunal qui, par arrêt du 30 janvier 2013, Wahlström/Frontex (F‑87/11), a annulé la décision du 10 décembre 2010 pour violation des formes substantielles. Cette décision a été confirmée par Frontex le 19 février 2013 et notifiée au requérant le 22 février suivant. »

 Procédure en première instance et arrêt attaqué

3        Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 15 octobre 2012, le requérant a introduit un recours, qui a été enregistré sous la référence F‑116/12, tendant, d’une part, à l’annulation de son rapport d’évaluation pour l’année 2010 et, d’autre part, à la condamnation de Frontex au paiement d’une somme de 10 000 euros à titre de réparation du préjudice moral subi du fait de l’absence de fixation d’objectifs aux fins de l’évaluation de ses performances professionnelles pour cette même année.

4        Dans le mémoire en défense, déposé au greffe du Tribunal de la fonction publique le 3 janvier 2013, Frontex a conclu au rejet du recours.

5        Au soutien de ses conclusions en annulation dirigées contre le rapport d’évaluation, le requérant a invoqué deux moyens, tirés, le premier, d’une insuffisance de motivation et, le second, de la violation des règles procédurales du fait de l’absence d’établissement d’un rapport intérimaire, de dialogue annuel avec l’évaluateur et de fixation d’objectifs pour l’année 2010.

6        Par l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le premier moyen au motif qu’il manquait en fait (points 22 à 27 de l’arrêt attaqué). En ce qui concerne le second moyen, le Tribunal de la fonction publique a rejeté la première branche, tirée de l’absence de rapport intérimaire. Il a jugé, en substance, que ni la décision du directeur exécutif de Frontex du 27 août 2009 établissant une procédure d’évaluation du personnel (ci-après la « décision du 27 août 2009 »), ni les lignes directrices pour les évaluateurs et agents concernant les procédures d’évaluation du personnel, communiquées au personnel de Frontex par la note administrative n° 40 du 26 juillet 2010 (ci-après les « lignes directrices »), n’imposaient, en cas de changement d’affectation de l’agent, l’établissement d’un tel rapport (points 31 et 32 de l’arrêt attaqué). S’agissant de la deuxième branche, tirée de l’absence de dialogue annuel entre l’évaluateur et le requérant, le Tribunal de la fonction publique a constaté que le rapport d’évaluation était entaché d’une irrégularité procédurale constituée par l’omission dudit dialogue, laquelle, toutefois, en l’absence de caractère substantiel, ne pouvait entraîner l’annulation du rapport d’évaluation (points 36 à 42 de l’arrêt attaqué).

7        Quant à la troisième branche, tirée de l’absence de fixation d’objectifs dans le cadre de l’évaluation concernant l’année 2010, le Tribunal de la fonction publique l’a rejetée en jugeant, d’abord, que « le fait qu’aucun objectif n’aurait été formellement fixé, pour la première partie de l’année 2010 – c’est-à-dire dans le cadre du dialogue formel qui a eu lieu au début de 2010 entre le requérant et son supérieur hiérarchique de l’époque pour l’établissement du rapport couvrant l’année 2009 –, concernant les prestations du requérant au sein de l’unité des services administratifs […] ne saurait être considéré comme une irrégularité procédurale substantielle de nature à mettre en cause la validité du rapport d’évaluation ». À cet égard, le Tribunal de la fonction publique indique que « les fonctions de chef d’unité des services administratifs, exercées auparavant par le requérant, avaient déjà été formellement transférées, dès le mois de juin 2010, au directeur de la division administrative, compte tenu de la nomination du requérant, avec effet au 1er août suivant, en qualité de chef du bureau opérationnel de Frontex au Pirée, et que, dès les premiers mois de la période de référence, le requérant s’est consacré à la préparation du projet du bureau opérationnel ». Dans ces « circonstances exceptionnelles », le Tribunal de la fonction publique a considéré que, « même si des objectifs avaient été fixés […] lors du dialogue formel au début de 2010, cette fixation n’aurait eu qu’un impact théorique sur l’établissement dudit rapport, le requérant ayant consacré, à tout le moins pour partie, avec l’accord de sa hiérarchie, la période de transition qu’a représenté[e] la première partie de l’année 2010 à la préparation du projet du bureau opérationnel au Pirée » (points 48 à 50 de l’arrêt attaqué).

8        S’agissant de la fixation d’objectifs au requérant en ce qui concerne les fonctions qu’il a exercées, durant la seconde partie de l’année 2010, en tant que chef du bureau opérationnel de Frontex au Pirée, le Tribunal de la fonction publique a jugé ce qui suit :

« 51      […] force est de constater que les décisions internes de Frontex n’imposent pas explicitement, à l’égard d’un agent qui, comme en l’espèce, a été réaffecté en cours d’année et s’est vu confier de nouvelles fonctions, la fixation formelle ‒ c’est-à-dire intervenant lors d’un dialogue avec son supérieur hiérarchique ‒ d’objectifs pour l’année de référence en cours.

52      Toutefois, ainsi que le Tribunal l’a souligné dans son arrêt AQ/Commission, précité, la fixation des objectifs constituant un élément de référence fondamental pour l’évaluation des prestations d’un fonctionnaire et l’établissement du rapport d’évaluation, la suppression de l’obligation de fixer formellement des objectifs au requérant lors d’un changement d’affectation, et ce dans le cadre d’un dialogue avec son évaluateur, aurait pour effet de traiter de manière différente les fonctionnaires, en matière de fixation d’objectifs, selon la date de leur changement d’affectation (arrêt AQ/Commission, précité, points 83 et 84). En outre, le Tribunal a jugé que la fixation d’objectifs s’impose a fortiori s’agissant d’un fonctionnaire à qui de nouvelles tâches sont confiées dans une autre unité, à laquelle il devra s’intégrer dans les meilleurs délais (arrêt AQ/Commission, précité, point 84 ; voir également, en ce sens, arrêt N/Parlement, précité, points 54 et 55).

53      Par conséquent, il y a lieu, en prenant en compte la finalité de la fixation préalable d’objectifs pour le titulaire d’un poste, de vérifier si, en l’espèce, cette obligation a été respectée par Frontex s’agissant des fonctions que le requérant a exercées en qualité de chef du bureau opérationnel au Pirée.

54      […]

55      […] Frontex avance […] que les objectifs ont été précisés par l’évaluateur dans le rapport d’évaluation attaqué, où il s’est référé à l’objectif de “diriger le projet pilote conformément aux dispositions de la décision du conseil d’administration, du 4 février 2010, [portant création de bureaux opérationnels,] ainsi qu’au plan d’action et au ‘Business Model’ approuvé par le directeur exécutif”, dont le requérant aurait eu nécessairement connaissance puisqu’il aurait lui-même fait état de l’avancement du dossier devant l’assemblée des directeurs de Frontex peu avant l’adoption, le 14 mai 2010, du ‘Business Model’ par le directeur exécutif.

56      À cet égard, s’il est vrai que des objectifs assignés au requérant pour la deuxième partie de la période de référence n’ont pas été fixés dans le cadre d’un dialogue formel préalable entre l’évaluateur et le requérant, force est de constater qu’ils devaient nécessairement être connus du requérant dès sa réaffectation dans la mesure où ils se confondaient avec les objectifs assignés au bureau opérationnel au Pirée, tels qu’ils ressortent des conditions relatives à la mise en place dudit bureau, du 10 mars 2010, dont le requérant allait précisément devenir le chef. Il ressort également du dossier que le requérant a activement participé, avant même sa prise de fonctions en tant que chef du bureau opérationnel au Pirée, à l’élaboration du ‘Business Model’, lequel, en énonçant les objectifs du projet expérimental qui devait être mis en œuvre par le bureau opérationnel, constitue un élément de référence important pour l’évaluation des prestations du requérant.

57      Même s’il n’y a pas eu, en l’espèce, de dialogue formel entre l’évaluateur et le requérant, préalablement à son changement d’affectation, aux fins de l’évaluation de ses prestations au titre de la période de référence, il ressort du dossier que le requérant, en prévision de sa réaffectation en tant que chef du bureau opérationnel au Pirée, a effectivement été informé, notamment par le directeur exécutif adjoint de Frontex, qui était également son évaluateur, des objectifs qui lui étaient assignés au cours de la période de référence. La circonstance que cette fixation n’a pas eu lieu selon la procédure organisée à l’article 10, paragraphes 2 et 3, de la décision du 27 août 2009 n’est pas de nature à entacher le rapport d’évaluation d’une irrégularité procédurale, dès lors que, comme indiqué au point 51 ci-dessus, ces dispositions ne régissent pas précisément la situation d’un agent faisant l’objet d’un changement d’affectation au cours de la période de référence. »

9        Enfin, le Tribunal de la fonction publique a rejeté la demande indemnitaire, dans la mesure où elle était étroitement liée au grief tiré du défaut de fixation d’objectifs pour l’exercice d’évaluation de l’année 2010, lequel avait été rejeté comme non fondé.

 Procédure devant le Tribunal et conclusions des parties

10      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 décembre 2013, le requérant a introduit le présent pourvoi.

11      Le 5 mars 2014, Frontex a déposé le mémoire en réponse.

12      Le 24 mars 2014, le président de la chambre des pourvois a, sur le fondement de l’article 143, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, accordé le droit au requérant de déposer un mémoire en réplique limité à la question de la recevabilité de la troisième branche du second moyen de la requête en pourvoi.

13      Le requérant a déposé son mémoire en réplique le 7 mai 2014 et Frontex son mémoire en duplique le 26 juin 2014.

14      La procédure écrite a été clôturée le 26 juin 2014.

15      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois) a constaté qu’aucune demande de fixation d’une audience n’avait été présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et a décidé, en application de l’article 146 du règlement de procédure du 2 mai 1991, de statuer sans phase orale de la procédure.

16      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’arrêt attaqué ;

–        faire droit à ses conclusions présentées en première instance ;

–        condamner Frontex à l’ensemble des dépens.

17      Frontex conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi comme partiellement non fondé et partiellement irrecevable ;

–        lui allouer le bénéfice des conclusions présentées en première instance ;

–        condamner le requérant aux dépens des deux instances.

 Sur le pourvoi

18      À l’appui du pourvoi, le requérant invoque deux moyens. Le premier moyen est tiré d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal de la fonction publique a jugé que l’absence de dialogue entre le requérant et son évaluateur, dans le cadre de la procédure d’évaluation, ne constituait pas une irrégularité procédurale substantielle. Le second moyen est tiré de plusieurs erreurs de droit, en ce que le Tribunal de la fonction publique a jugé, d’abord, que l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010 ne constituait pas une irrégularité procédurale substantielle, ensuite, que, en ce qui concerne la seconde partie de l’année 2010, les règles internes de Frontex n’imposaient pas la tenue d’un dialogue formel en vue de fixer des objectifs en cas de changement d’affectation de l’agent et, enfin, qu’il y avait lieu de considérer que le requérant connaissait les objectifs qui lui avaient été assignés pour la seconde partie de l’année 2010.

 Sur le premier moyen

19      Le requérant conteste, en substance, les points 41 et 42 de l’arrêt attaqué, selon lesquels l’irrégularité procédurale constituée par l’absence de dialogue entre lui et son évaluateur n’était pas, en l’espèce, substantielle. Il soutient, d’abord, que le respect des droits de la défense constitue une formalité substantielle. Il indique, ensuite, que, à la suite dudit dialogue, un rapport d’évaluation différent aurait pu être adopté. Le requérant prétend, en outre, qu’aucune procédure alternative n’a permis, en l’espèce, d’atteindre les objectifs du dialogue annuel avec son évaluateur. À cet égard, le requérant fait valoir, en substance, que la décision du 10 décembre 2010 de ne pas renouveler son contrat, laquelle a été précédée d’un entretien entre lui et le directeur exécutif de Frontex, ne saurait avoir pour effet d’exclure l’obligation d’évaluer ses performances professionnelles pour l’année 2010. En tout état de cause, le requérant rappelle que la décision de non-renouvellement de son contrat a été annulée par le Tribunal de la fonction publique et que, du fait de l’effet rétroactif de cette annulation, le Tribunal de la fonction publique ne pouvait pas fonder son raisonnement sur cet acte. Par ailleurs, compte tenu, d’une part, du fait que la décision de non-renouvellement du contrat du requérant se fondait sur la performance globale de celui-ci au cours de ses quatre années d’activité au sein de Frontex et ne portait pas spécifiquement sur l’année 2010 et, d’autre part, du contenu laconique du rapport servant de fondement à ladite décision de non-renouvellement, cette dernière ne saurait être considérée comme remplissant les objectifs du dialogue formel obligatoire dans le cadre de la procédure d’évaluation. Le requérant ajoute que, préalablement à l’adoption de la décision de non-renouvellement de son contrat, il y a seulement eu une réunion à l’issue de laquelle le directeur exécutif de Frontex l’a informé du non-renouvellement de son contrat, laquelle n’a pas donné lieu à un dialogue. En outre, cette réunion aurait eu lieu avec le directeur exécutif de Frontex et non avec l’évaluateur du requérant. Le requérant prétend, enfin, que, en prenant appui sur une situation contextuelle qui lui était défavorable, à savoir le non-renouvellement de son contrat, pour décider que la violation de ses droits de la défense n’était pas substantielle, le Tribunal de la fonction publique a excédé l’étendue de son pouvoir juridictionnel.

20      Frontex conteste l’argumentation du requérant. Elle estime, d’abord, qu’il est contradictoire d’invoquer à la fois l’absence d’influence de la décision de non-renouvellement du contrat du requérant sur le rapport d’évaluation et la disparition rétroactive de cette décision de l’ordre juridique de l’Union européenne à la suite de son annulation par le Tribunal de la fonction publique. Frontex soutient, ensuite, que, dans la mesure où le rendement, les compétences et la conduite dans le service du requérant avaient déjà fait l’objet d’une évaluation dans le cadre de la décision de non-renouvellement de son contrat, l’argument selon lequel le dialogue avec l’évaluateur aurait pu avoir une influence sur le rapport d’évaluation ne saurait prospérer. Quant au fait que la décision du 27 août 2009 prévoit que la fin des relations professionnelles entre Frontex et un de ses agents n’atténue pas l’obligation d’évaluer ses performances professionnelles, Frontex soutient que cet argument est dénué de pertinence, dans la mesure où le requérant a, de toute évidence, fait l’objet d’une évaluation après que lui a été notifiée la décision de non-renouvellement de son contrat. À titre surabondant, Frontex relève que le requérant n’a fourni aucun indice précis et concordant qui aurait pu laisser accroire que l’appréciation de son rendement, de ses compétences et de sa conduite dans le service aurait été différente si un dialogue avait effectivement eu lieu avec son évaluateur après que la décision de non-renouvellement lui a été notifiée, laquelle aurait elle-même été précédée d’un entretien avec le directeur exécutif de Frontex. Frontex fait valoir, enfin, que le requérant a largement contribué, du fait de ses absences et de son inertie, à ce qu’aucun dialogue n’ait lieu avec son évaluateur.

21      Il est de jurisprudence constante que, pour qu’une irrégularité procédurale puisse aboutir à l’annulation d’un acte, il faut que, en l’absence de cette irrégularité, la procédure ait pu aboutir à un résultat différent (voir, en ce sens, arrêts du 29 octobre 1980, van Landewyck e.a./Commission, 209/78 à 215/78 et 218/78, EU:C:1980:248, point 47 ; du 21 mars 1990, Belgique/Commission, C‑142/87, Rec, EU:C:1990:125, point 48, et du 23 avril 2002, Campolargo/Commission, T‑372/00, RecFP, EU:T:2002:103, point 39).

22      Aux points 36 à 39 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a constaté que l’absence de dialogue entre le requérant et son évaluateur dans le cadre de la procédure d’évaluation portant sur l’année 2010 avait constitué une irrégularité procédurale.

23      Toutefois, après avoir cité la jurisprudence constante énoncée au point 21 ci-dessus, le Tribunal de la fonction publique a jugé, au point 41 de l’arrêt attaqué, que, au regard de la décision du 10 décembre 2010 du directeur exécutif de Frontex de ne pas renouveler le contrat du requérant, justifiée par les insuffisances professionnelles de celui-ci, laquelle avait été adoptée avant même le commencement de l’exercice d’évaluation, « le requérant n’a[vait] fourni aucun indice précis et concordant qui aurait pu laisser accroire que l’appréciation de son rendement, de ses compétences et de sa conduite dans le service aurait été différente si un dialogue avait effectivement eu lieu au début de l’exercice d’évaluation, soit après que la décision de ne pas poursuivre la relation professionnelle avec le requérant a été prise et notifiée à ce dernier le 16 décembre 2010, non sans que l’adoption de cette décision ait elle-même été précédée d’un entretien entre le requérant et le directeur exécutif ». Le Tribunal de la fonction publique en a conclu que, « [d]ans ces conditions, en l’absence de caractère substantiel, l’irrégularité procédurale […] constatée ne saurait entraîner l’annulation du rapport d’évaluation ».

24      Il convient donc de vérifier si le Tribunal de la fonction publique a jugé à bon droit que l’absence de dialogue entre le requérant et son évaluateur, dans le cadre de la procédure d’évaluation pour l’année 2010, ne constituait pas une irrégularité procédurale substantielle susceptible d’aboutir à l’adoption d’un rapport d’évaluation différent.

25      À cet égard, il importe de rappeler, ainsi qu’il ressort du point 37 de l’arrêt attaqué, que, selon la jurisprudence, un dialogue de qualité est impératif au cours de l’exercice d’évaluation, puisqu’il en constitue la clef et suppose un contact direct entre l’évalué et l’évaluateur, qui, seul, est de nature à favoriser un dialogue franc et approfondi, permettant aux intéressés, d’une part, de mesurer avec exactitude la nature, les raisons et la portée de leurs divergences éventuelles et, d’autre part, de parvenir à une meilleure compréhension réciproque (voir, par analogie, arrêts du 30 septembre 2004, Ferrer de Moncada/Commission, T‑16/03, RecFP, EU:T:2004:283, point 40, et du 25 octobre 2007, Lo Giudice/Commission, T‑27/05, RecFP, EU:T:2007:321, points 48 et 49). Sans un échange direct entre l’évaluateur et l’évalué, l’évaluation ne saurait remplir pleinement sa fonction d’outil de gestion des ressources humaines et d’instrument d’accompagnement du développement professionnel de l’intéressé (voir, en ce sens, arrêt Lo Giudice/Commission, précité, EU:T:2007:321, point 49).

26      Compte tenu de la nature du dialogue entre l’évaluateur et l’évalué, qui doit s’inscrire annuellement dans le cadre de la procédure d’évaluation, il y a lieu de considérer que son absence ne pouvait être neutralisée par la circonstance que les prestations du requérant avaient été évaluées dans le cadre de la décision de non-renouvellement de son contrat, laquelle avait été précédée d’un entretien entre le requérant et le directeur exécutif de Frontex. En effet, d’une part, comme l’indique le requérant, la décision de non-renouvellement de son contrat s’est fondée sur l’appréciation de sa performance globale au cours de ses quatre années d’activité au sein de Frontex et non spécifiquement sur son rendement, ses compétences et sa conduite dans le service au cours de l’année 2010, comme cela aurait été le cas pour l’établissement du rapport d’évaluation. Comme l’indique le requérant, sans que Frontex le conteste, le rapport sur le fondement duquel la décision de non-renouvellement du contrat a été adoptée fait état du seul commentaire suivant : « Les performances du titulaire du poste au cours des quatre années depuis le début de son contrat n’ont pas atteint les attentes » (The performances of the jobholder over the four years since the start of his contract did not reach the expectations). D’autre part, le requérant fait valoir, sans être contredit par Frontex, que la réunion qui a précédé l’adoption de la décision de non-renouvellement de son contrat s’est limitée à l’annonce, par le directeur exécutif de Frontex, du non-renouvellement de son contrat, sans qu’il ait pu véritablement exposer son point de vue dans le cadre d’un dialogue franc et approfondi au sens de la jurisprudence citée au point 25 ci-dessus. En outre, comme le fait observer le requérant, la réunion qui a précédé l’adoption de la décision de non-renouvellement de son contrat était organisée par le directeur exécutif de Frontex, qui n’était pas son évaluateur pour l’année 2010, ce que Frontex ne conteste pas davantage.

27      Dans ces conditions, la décision de non-renouvellement du contrat du requérant, prise antérieurement à l’adoption du rapport d’évaluation, bien que précédée d’une réunion entre le directeur exécutif de Frontex et le requérant, ne pouvait avoir pour effet de rendre inutile le dialogue entre le requérant et son évaluateur dans le cadre de la procédure d’évaluation, lequel doit permettre aux intéressés, d’une part, de mesurer avec exactitude la nature, les raisons et la portée de leurs divergences éventuelles et, d’autre part, de parvenir à une meilleure compréhension réciproque. Il importe d’ailleurs d’observer à cet égard, ainsi qu’il ressort du point 3 de l’arrêt attaqué, que, comme le relève le requérant, l’article 4, paragraphe 4, de la décision du 27 août 2009 dispose que, « [l]orsque le contrat d’un agent prend fin, un rapport intérimaire est établi quelle que soit la durée de la période couverte [par l’évaluation] », ce qui montre que la décision de mettre fin au contrat d’un agent ne saurait dispenser de l’évaluation de ses prestations dans le respect de la procédure d’évaluation.

28      Il s’ensuit que, dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en jugeant que l’absence de dialogue annuel entre le requérant et son évaluateur ne constituait pas une irrégularité procédurale substantielle au motif qu’aucun élément ne prouvait, compte tenu de la décision de non-renouvellement du contrat du requérant, que, si le dialogue entre celui-ci et son évaluateur avait eu lieu au début de l’exercice d’évaluation pour l’année 2010, l’appréciation du rendement, des compétences et de la conduite dans le service du requérant aurait été différente. Dès lors qu’un rapport d’évaluation est fondé sur des jugements de valeur subjectifs et donc, par nature, susceptibles d’être modifiés, il y a lieu de considérer que, si le requérant avait été entendu avant l’établissement dudit rapport, dans le cadre d’un dialogue au sens de la jurisprudence citée au point 25 ci-dessus, il aurait pu faire valoir son point de vue et, ainsi, peut-être obtenir une modification des appréciations portées dans ledit rapport.

29      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument de Frontex selon lequel les absences répétées du requérant ainsi que son inertie seraient la cause de l’absence d’un tel dialogue. Comme l’indique le Tribunal de la fonction publique, sans que Frontex le conteste, « un dialogue aux fins de l’évaluation des performances professionnelles du requérant aurait matériellement pu se tenir durant les périodes d’activité effective de ce dernier, le cas échéant par vidéoconférence » (point 38 de l’arrêt attaqué).

30      En tout état de cause, il importe de relever, comme cela est mentionné au point 23 ci-dessus, que le raisonnement du Tribunal de la fonction publique, au terme duquel l’absence de dialogue entre le requérant et son évaluateur ne constitue pas une irrégularité procédurale substantielle, repose sur l’existence de la décision du directeur exécutif de Frontex de ne pas renouveler le contrat du requérant, laquelle a été annulée par l’arrêt du 30 janvier 2013, Wahlström/Frontex (F‑87/11, RecFP, EU:F:2013:10).

31      Or, selon la jurisprudence, un arrêt d’annulation est entaché d’un effet rétroactif, la constatation d’illégalité remontant à la date de prise d’effet de l’acte annulé (voir, en ce sens, arrêts du 26 avril 1988, Asteris e.a./Commission, 97/86, 99/86, 193/86 et 215/86, Rec, EU:C:1988:199, point 30 ; du 12 février 2008, CELF et ministre de la Culture et de la Communication, C‑199/06, Rec, EU:C:2008:79, point 61, et du 5 septembre 2014, Éditions Odile Jacob/Commission, T‑471/11, Rec, EU:T:2014:739, point 102), de sorte que, en l’espèce, l’annulation de la décision du directeur exécutif de Frontex de ne pas renouveler le contrat du requérant rétroagit au 10 décembre 2010. Par conséquent, à la date du prononcé de l’arrêt attaqué, soit le 9 octobre 2013, cette décision avait disparu de l’ordre juridique de l’Union.

32      Force est donc de constater qu’il existe un lien étroit entre l’arrêt attaqué et l’arrêt Wahlström/Frontex, point 30 supra (EU:F:2013:10), dans la mesure où ce dernier prive de son fondement le raisonnement du juge de première instance dans l’arrêt attaqué.

33      Il s’ensuit que le raisonnement du Tribunal de la fonction publique selon lequel l’absence de dialogue entre le requérant et son évaluateur constitue une irrégularité de procédure dépourvue de caractère substantiel est fondé sur la prémisse erronée de l’existence de la décision du directeur exécutif de Frontex de ne pas renouveler son contrat (voir, en ce sens, ordonnance du 24 septembre 2009, Viasat Broadcasting UK/Commission, T‑16/05, EU:T:2009:358, points 34 et 41, et arrêt du 1er septembre 2010, Skareby/Commission, T‑91/09 P, RecFP, EU:T:2010:338, points 55 et 56).

34      Au regard de l’ensemble des considérations exposées aux points 21 à 33 ci-dessus, il y a lieu de considérer que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en jugeant que l’omission du dialogue annuel entre le requérant et son évaluateur, dans le cadre de la procédure d’évaluation, n’avait pas constitué, dans les circonstances de l’espèce, une irrégularité substantielle.

35      En conséquence, le premier moyen doit être accueilli.

 Sur le second moyen

36      Le requérant soutient, à titre liminaire, que le Tribunal de la fonction publique a restreint la portée du point 10 des lignes directrices, en indiquant, au point 5 de l’arrêt attaqué, que, « en cas de changement de fonctions d’un agent au cours d’une année faisant l’objet d’une évaluation, le premier évaluateur fournit au nouvel évaluateur une appréciation des performances de l’intéressé pour les fonctions qu’il exerçait précédemment, laquelle devra être prise en considération lors de l’établissement du rapport d’évaluation final ». Selon le requérant, lorsqu’un agent faisant l’objet d’une évaluation change de fonctions en cours d’année, le point 10 des lignes directrices prévoit trois obligations distinctes, et non une seule obligation, à savoir, d’abord, celle d’évaluer cet agent au regard des deux fonctions qu’il a occupées au cours de cette année, ensuite, celle, pour le nouvel évaluateur, de définir, avec l’agent, de nouveaux objectifs ainsi qu’un plan de développement personnel de l’agent au cours d’un entretien et, enfin, celle, pour l’ancien évaluateur, de fournir au nouvel évaluateur une évaluation des performances de l’agent dans ses anciennes fonctions.

37      Le requérant avance, en outre, trois griefs. Premièrement, il conteste le point 49 de l’arrêt attaqué duquel il ressortirait que l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010 en ce qui concerne ses fonctions de chef d’unité des services administratifs ne constituait pas une irrégularité procédurale substantielle au motif que ces fonctions avaient été formellement transférées, dès le mois de juin 2010, au directeur de la division administrative. À cet égard, le requérant rappelle qu’il a exercé les fonctions de chef d’unité des services administratifs pour une partie de l’année 2010 et que, donc, conformément au point 10 des lignes directrices, l’évaluation devait également porter sur ces fonctions.

38      Deuxièmement, le requérant soutient que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en jugeant, au point 51 de l’arrêt attaqué, que les décisions internes de Frontex n’imposaient pas explicitement, à l’égard d’un agent qui a été réaffecté en cours d’année et qui s’est vu confier de nouvelles fonctions, la fixation formelle d’objectifs pour l’année de référence en cours. À cet égard, le requérant rappelle que le point 10, premier paragraphe, des lignes directrices prévoit expressément que, en cas de changement de fonctions de l’agent pendant la période de référence, le nouvel évaluateur doit définir avec l’agent évalué de nouveaux objectifs ainsi que le plan de développement personnel de l’agent au cours d’un entretien initial.

39      Troisièmement, le requérant critique le point 56 de l’arrêt attaqué duquel il ressort que, si des objectifs n’ont pas été fixés dans le cadre d’un dialogue entre son évaluateur et lui-même pour la seconde partie de l’année 2010, ces objectifs devaient nécessairement être connus de lui dans la mesure où, d’une part, ils se confondaient avec les objectifs du bureau opérationnel de Frontex au Pirée dont le requérant allait devenir chef et où, d’autre part, le requérant avait activement participé à l’élaboration du « Business Model », lequel, en énonçant les objectifs du projet expérimental qui devait être mis en œuvre par le bureau opérationnel, aurait constitué un élément de référence important pour l’évaluation des prestations du requérant. Enfin, le requérant prétend qu’il y a lieu de distinguer les tâches et les objectifs et soutient, à cet égard, que les objectifs du bureau opérationnel de Frontex au Pirée ainsi que le « Business Model » l’ont informé de ses tâches, mais pas des objectifs qui lui étaient assignés.

40      Frontex répond, premièrement, que, au point 5 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique n’a fait que rappeler, dans la partie « Cadre juridique » dudit arrêt, l’une des obligations découlant du point 10 des lignes directrices, sans aucunement restreindre la portée de ce point. Frontex relève, deuxièmement, que, nonobstant l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010, les fonctions de chef d’unité des services administratifs avaient été formellement transférées progressivement, dès le printemps 2010, au directeur de la division administrative et que, dès janvier 2010, le requérant s’était consacré à la préparation du projet du bureau opérationnel au Pirée et n’avait donc exercé les fonctions de chef d’unité des services administratifs que de façon très limitée. Partant, selon Frontex, l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010 ne saurait être considérée comme une irrégularité procédurale substantielle dans la mesure où cette fixation n’aurait eu qu’un impact théorique sur le rapport d’évaluation. Frontex soutient, troisièmement, que, en ce qui concerne la fixation d’objectifs pour la seconde partie de l’année 2010, la décision du 27 août 2009 ne traite pas de la situation d’un agent qui fait l’objet d’un changement de fonctions au cours de la période de référence. Seules les lignes directrices prévoient, en cas de changement de fonctions d’un agent, la fixation d’objectifs au cours d’un entretien initial avec le nouvel évaluateur. Or, la référence à un « entretien initial » ne renverrait pas à la fixation formelle d’objectifs dans le cadre d’un dialogue, mais devrait être comprise comme se référant à une « communication », par l’évaluateur, permettant à l’agent de connaître ses nouveaux objectifs. En toute hypothèse, les objectifs relatifs aux fonctions de chef du bureau opérationnel au Pirée devaient nécessairement être connus du requérant dès sa réaffectation, dans la mesure où ces objectifs se confondaient avec ceux assignés au bureau lui-même, à la définition desquels avait participé le requérant. En outre, l’argument du requérant selon lequel le Tribunal de la fonction publique aurait commis une erreur de droit en constatant l’existence d’objectifs pour la seconde partie de l’année 2010 serait irrecevable, dans la mesure où, par cet argument, le requérant contesterait l’appréciation des faits par le Tribunal de la fonction publique, sans invoquer une quelconque dénaturation d’éléments de preuve. À titre subsidiaire, Frontex soutient, en substance, que le document sur les conditions de mise en place du bureau opérationnel au Pirée, du 10 mars 2010, ainsi que le « Business Model », qui énonce les objectifs du projet expérimental qui devait être mis en œuvre par le bureau opérationnel, à l’élaboration duquel le requérant a participé, définissent les objectifs assignés audit bureau, lesquels se confondaient avec ceux assignés au requérant en tant que chef de ce bureau. Frontex ajoute que le requérant aurait lui-même admis que les objectifs qui lui étaient assignés étaient clairs. Enfin, Frontex indique que, en tant que chef d’une unité administrative, il appartenait au requérant d’informer immédiatement sa hiérarchie des irrégularités éventuelles entachant la procédure d’évaluation.

 Observations liminaires

41      Aux termes du point 5 de l’arrêt attaqué, « le point 10 des lignes directrices […] prévoit que, en cas de changement de fonctions d’un agent au cours d’une année faisant l’objet d’une évaluation, le premier évaluateur fournit au nouvel évaluateur une appréciation des performances de l’intéressé pour les fonctions qu’il exerçait précédemment, laquelle devra être prise en considération lors de l’établissement du rapport d’évaluation final ».

42      Le requérant soutient, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a limité la portée du point 10 des lignes directrices, dans la mesure où l’entièreté du contenu dudit point n’est pas énoncé au point 5 de l’arrêt attaqué.

43      Le point 5 de l’arrêt attaqué, qui s’inscrit dans la partie « Cadre juridique » de celui-ci, reprend les dispositions du point 10 des lignes directrices que le Tribunal a estimé opportun d’énoncer dans cette partie de l’arrêt, sans que le requérant puisse inférer de l’énoncé d’une partie seulement du contenu dudit point le fait que le Tribunal de la fonction publique a limité la portée de ce point à la seule obligation faite au premier évaluateur de l’agent de fournir une évaluation au nouvel évaluateur. D’ailleurs, aucun élément rédactionnel du point 5 de l’arrêt attaqué ne permet d’affirmer que le Tribunal de la fonction publique a voulu limiter le contenu du point 10 des lignes directrices à ce qui est énoncé au point 5 de l’arrêt attaqué.

 Sur le premier grief

44      Aux termes du point 50 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a constaté qu’aucun objectif n’avait été formellement fixé au requérant pour la première partie de l’année 2010 en ce qui concerne ses prestations au sein de l’unité des services administratifs. Ce constat n’est pas contredit par Frontex.

45      Le Tribunal de la fonction publique a toutefois jugé que l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010 ne saurait être considérée comme une irrégularité procédurale substantielle de nature à mettre en cause la validité du rapport d’évaluation, dans la mesure où, dès le mois de juin 2010, les fonctions de chef d’unité des services administratifs avaient été transférées au directeur de la division administrative et où, dès les premiers mois de l’année 2010, le requérant s’était consacré, « à tout le moins pour partie », à la préparation du projet du bureau opérationnel de Frontex au Pirée (points 49 et 50 de l’arrêt attaqué).

46      Il convient donc d’examiner si le Tribunal de la fonction publique a jugé à bon droit que l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010, en ce qui concerne les fonctions de chef de l’unité des services administratifs, ne constituait pas une irrégularité procédurale substantielle.

47      À cet égard, il convient de rappeler, comme il ressort des points 4 et 46 de l’arrêt attaqué, que, selon l’article 10, paragraphes 2 et 3, de la décision du 27 août 2009, dans le cadre du dialogue annuel, l’évaluateur examine les performances de l’agent en rapport notamment avec les objectifs qui lui avaient été fixés pour la période d’évaluation, ainsi que les objectifs à atteindre et la manière dont ils seront atteints dans le cadre de l’exercice d’évaluation suivant.

48      Il y a lieu de relever, en outre, que, selon la jurisprudence, rappelée par le Tribunal de la fonction publique au point 45 de l’arrêt attaqué, la méconnaissance des règles prescrivant la fixation d’objectifs à un fonctionnaire au début de chaque période d’évaluation a un caractère substantiel et justifie la censure du rapport d’évaluation litigieux.

49      En l’espèce, comme il ressort de l’arrêt attaqué (points 49 et 50), le rapport d’évaluation, qui portait sur l’année 2010, visait, certes, à évaluer le rendement, les compétences et la conduite dans le service du requérant en tant que chef du bureau opérationnel de Frontex au Pirée, à partir du 1er août 2010. Toutefois, le rapport d’évaluation couvrait également la période du 1er janvier 2010 au 1er août 2010 au cours de laquelle le requérant exerçait les fonctions de chef d’unité des services administratifs. Il ressort d’ailleurs des points 32 et 48 de l’arrêt attaqué que le chef de la division administrative, lequel était l’évaluateur du requérant lorsque ce dernier exerçait les fonctions de chef d’unité des services administratifs, a transmis au nouvel évaluateur du requérant une appréciation de ses performances relatives auxdites fonctions, afin qu’elle soit prise en compte lors de l’établissement du rapport d’évaluation. Le Tribunal de la fonction publique constate en outre, d’une part, que les fonctions de chef d’unité des services administratifs n’ont été transférées au directeur de la division administrative qu’au mois de juin 2010 (point 49) et, d’autre part, que, pour la période de janvier à juin 2010, le requérant s’est consacré « à tout le moins pour partie » à la préparation du projet du bureau opérationnel au Pirée (point 50). Ainsi, il ressort de l’arrêt attaqué que le requérant a exercé, pour une partie de l’année 2010, les fonctions de chef d’unité des services administratifs, ce qui n’est pas contesté par Frontex, de sorte que, à tout le moins pour cette partie de l’année, des objectifs auraient dû lui être fixés. D’ailleurs, le Tribunal de la fonction publique n’explique pas dans quelle mesure le fait, pour le requérant, d’avoir exercé les fonctions de chef d’unité des services administratifs pour une partie seulement de l’année 2010 justifierait l’absence de fixation d’objectifs.

50      Dans ces conditions, Frontex ne saurait soutenir que l’établissement d’objectifs pour la première partie de l’année 2010, en ce qui concerne les fonctions de chef d’unité des services administratifs, n’aurait eu qu’un « impact théorique » sur le rapport d’évaluation. En effet, en l’absence de fixation d’objectifs en ce qui concerne lesdites fonctions, il y a lieu de considérer que le requérant a été privé, de fait, de la possibilité d’obtenir une meilleure évaluation globale pour l’ensemble de l’année 2010.

51      Il s’ensuit que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en jugeant que l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010, en ce qui concerne les fonctions de chef d’unité des services administratifs, n’a pas constitué une irrégularité procédurale substantielle.

52      Le premier grief doit donc être accueilli.

 Sur le troisième grief

53      À titre liminaire, il y a d’abord lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par Frontex et de considérer, contrairement à ce qu’elle soutient, que le présent grief est recevable. En effet, dans le cadre du présent grief, le requérant ne met pas en cause la constatation factuelle faite par le Tribunal de la fonction publique selon laquelle les conditions relatives à la mise en place du bureau opérationnel au Pirée du 10 mars 2010 ainsi que le « Business Model » fixeraient des objectifs au bureau opérationnel. Contrairement à ce que fait valoir Frontex, le requérant ne conteste pas, dans le cadre du pourvoi, « l’existence d’objectifs » assignés au bureau. Le requérant estime, en revanche, que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en jugeant que la fixation des objectifs du bureau opérationnel au Pirée, par les conditions relatives à la mise en place du bureau opérationnel au Pirée du 10 mars 2010 ainsi que par le « Business Model » pouvait être qualifiée de fixation formelle d’objectifs en ce qui le concerne au sens de la décision du 27 août 2009, des lignes directrices et de la jurisprudence. Or, la qualification juridique des faits est une question de droit qui peut être soulevée dans le cadre d’un pourvoi (voir, en ce sens, arrêt du 13 octobre 2008, Neophytou/Commission, T‑43/07 P, RecFP, EU:T:2008:432, point 71).

54      Quant à l’examen du grief au fond, il convient d’abord de rappeler le raisonnement du Tribunal de la fonction publique, énoncé aux points 56 et 57 de l’arrêt attaqué, aux termes duquel il a été conclu que, en ce qui concerne les fonctions de chef du bureau opérationnel de Frontex au Pirée, des objectifs avaient été fixés au requérant.

55      Au point 56 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique indique ce qui suit :

« [S]’il est vrai que des objectifs assignés au requérant pour la deuxième partie de la période de référence n’ont pas été fixés dans le cadre d’un dialogue formel préalable entre l’évaluateur et le requérant, force est de constater qu’ils devaient nécessairement être connus du requérant dès sa réaffectation dans la mesure où ils se confondaient avec les objectifs assignés au bureau opérationnel au Pirée, tels qu’ils ressortent des conditions relatives à la mise en place dudit bureau, du 10 mars 2010, dont le requérant allait précisément devenir le chef. Il ressort également du dossier que le requérant a activement participé, avant même sa prise de fonctions en tant que chef du bureau opérationnel au Pirée, à l’élaboration du ‘Business Model’, lequel, en énonçant les objectifs du projet expérimental qui devait être mis en œuvre par le bureau opérationnel, constitue un élément de référence important pour l’évaluation des prestations du requérant. »

56      Au point 57 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique ajoute ce qui suit :

« Même s’il n’y a pas eu, en l’espèce, de dialogue formel entre l’évaluateur et le requérant, préalablement à son changement d’affectation, aux fins de l’évaluation de ses prestations au titre de la période de référence, il ressort du dossier que le requérant, en prévision de sa réaffectation en tant que chef du bureau opérationnel au Pirée, a effectivement été informé, notamment par le directeur exécutif adjoint de Frontex, qui était également son évaluateur, des objectifs qui lui étaient assignés au cours de la période de référence. La circonstance que cette fixation n’a pas eu lieu selon la procédure organisée à l’article 10, paragraphes 2 et 3, de la décision du 27 août 2009 n’est pas de nature à entacher le rapport d’évaluation d’une irrégularité procédurale, dès lors que, comme indiqué au point 51 [de l’arrêt attaqué], ces dispositions ne régissent pas précisément la situation d’un agent faisant l’objet d’un changement d’affectation au cours de la période de référence. »

57      Le requérant ne conteste pas que des objectifs aient été assignés au bureau opérationnel de Frontex au Pirée, dont il a été le chef à partir du 1er août 2010. Il prétend, en revanche, que ces objectifs ne sauraient être confondus avec les objectifs qui auraient dû lui être fixés.

58      Il convient donc de vérifier si le Tribunal de la fonction publique a jugé à bon droit que des objectifs avaient été fixés au requérant, s’agissant de ses fonctions de chef du bureau opérationnel de Frontex au Pirée pour la seconde partie de l’année 2010.

59      À cet égard, il y a d’abord lieu de rappeler que, en cas de changement de fonctions d’un agent au cours d’une année de référence, de nouveaux objectifs doivent être formellement fixés à cet agent.

60      En effet, même si la décision du 27 août 2009 ne prévoit pas de dispositions imposant, à l’égard d’un agent qui s’est vu confier de nouvelles fonctions, la fixation formelle d’objectifs pour l’année de référence en cours, il y a lieu de relever, comme le fait valoir le requérant, que le point 10 des lignes directrices prévoit que, en cas de changement de fonctions de l’agent, le nouvel évaluateur doit définir, avec cet agent, les nouveaux objectifs à atteindre ainsi que le plan de développement personnel de l’agent, et ce au cours d’un entretien initial.

61      Or, il ressort de la jurisprudence que, si les lignes directrices ne sauraient être qualifiées de règles de droit que l’administration serait en tout cas tenue d’observer, elles énoncent, toutefois, des règles de conduite indicatives de la pratique à suivre dont l’administration ne peut s’écarter, dans un cas particulier, sans fournir des raisons compatibles avec le principe d’égalité de traitement. En effet, en adoptant de telles règles de conduite et en annonçant, par leur publication, qu’elle les appliquera aux cas concernés, l’institution en question s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionnée, le cas échéant, au titre d’une violation des principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime. Il ne saurait, dès lors, être exclu que, sous certaines conditions et en fonction de leur contenu, de telles règles de conduite ayant une portée générale puissent déployer des effets juridiques (voir, en ce sens, arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec, EU:C:2005:408, points 209 à 211, et du 9 juillet 1997, Monaco/Parlement, T‑92/96, RecFP, EU:T:1997:105, point 46).

62      En tout état de cause, comme il ressort de l’arrêt attaqué (point 52), la fixation des objectifs constituant un élément de référence fondamental pour l’évaluation des prestations d’un agent et l’établissement du rapport d’évaluation, la suppression de l’obligation de fixer formellement des objectifs au requérant lors d’un changement d’affectation, ce dans le cadre d’un dialogue avec son évaluateur, aurait pour effet de traiter de manière différente les agents, en matière de fixation d’objectifs, selon la date de leur changement d’affectation.

63      Il convient en outre de constater que Frontex ne conteste pas, en tant que telle, l’obligation de fixation de nouveaux objectifs à l’agent qui a changé de fonctions. Frontex se limite à soutenir qu’il n’existe pas, à l’égard d’un agent qui a changé de fonctions, d’obligation formelle de fixation d’objectifs en ce sens qu’un dialogue formel doit avoir lieu avec le nouvel évaluateur de l’agent sur cette fixation d’objectifs. Selon Frontex, une « communication » par l’évaluateur permettant à l’agent de connaître ses nouveaux objectifs suffirait.

64      Ainsi, aux fins de répondre à la question de savoir si le Tribunal de la fonction publique a jugé à bon droit que, en l’espèce, les objectifs du requérant avaient été formellement fixés pour la seconde partie de l’année 2010, il convient de déterminer préalablement ce qu’il faut entendre par « fixation formelle » d’objectifs.

65      Comme cela a été exposé au point 60 ci-dessus, le point 10 des lignes directrices prévoit que, en cas de changement de fonctions de l’agent, le nouvel évaluateur doit définir avec cet agent les nouveaux objectifs au cours d’un « entretien initial ». Il résulte également de la jurisprudence, exposée au point 62 ci-dessus, que l’obligation de fixer formellement des objectifs au requérant lors d’un changement d’affectation doit s’inscrire dans le cadre d’un dialogue avec son nouvel évaluateur. Au point 51 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique indique lui-même que la fixation formelle d’objectifs est celle « intervenant lors d’un dialogue [de l’agent] avec son supérieur hiérarchique ».

66      Ainsi, par « fixation formelle d’objectifs », il faut comprendre la fixation d’objectifs dans le cadre d’un dialogue avec l’évaluateur. S’il en était autrement, cela conduirait à traiter de manière différente les agents, en matière de fixation d’objectifs, selon la date de leur changement d’affectation, dans la mesure où l’agent qui change d’affectation en début d’année pourrait se voir assigner de nouveaux objectifs dans le cadre du dialogue annuel avec l’évaluateur, à la différence de l’agent réaffecté au cours de l’année de référence, qui serait privé d’un tel dialogue.

67      À cet égard, il importe de constater que Frontex ne présente aucune argumentation juridique à l’appui de son affirmation selon laquelle la référence à un « entretien initial », au point 10 des lignes directrices, « n’équivaut aucunement à la fixation formelle d’objectifs » intervenant lors d’un dialogue avec le supérieur hiérarchique, mais doit être comprise comme se référant à une simple communication des nouveaux objectifs.

68      En l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a constaté que les objectifs pour la seconde partie de l’année 2010 n’avaient pas été fixés dans le cadre d’un dialogue formel préalable entre l’évaluateur et le requérant (points 56 et 57 de l’arrêt attaqué). Toutefois, il a jugé que « [l]a circonstance que cette fixation n’a pas eu lieu selon la procédure organisée à l’article 10, paragraphes 2 et 3, de la décision du 27 août 2009 n’est pas de nature à entacher le rapport d’évaluation d’une irrégularité procédurale, dès lors que, comme indiqué au point 51 [de l’arrêt attaqué], ces dispositions ne régissent pas précisément la situation d’un agent faisant l’objet d’un changement d’affectation au cours de la période de référence ».

69      Ce raisonnement du Tribunal de la fonction publique est erroné. Il est vrai que la décision du 27 août 2009 ne prévoit pas, en cas de changement de fonctions de l’agent au cours de l’année de référence, la fixation formelle de nouveaux objectifs. Toutefois, comme il ressort des points 65 et 66 ci-dessus, les objectifs du requérant pour la seconde partie de l’année 2010 devaient être fixés, lors de son changement de fonctions, dans le cadre d’un dialogue formel avec son évaluateur.

70      Par conséquent, le Tribunal de la fonction publique ne saurait s’appuyer sur l’absence de disposition expresse, dans la décision du 27 août 2009, relative à la fixation d’objectifs en cas de changement de fonctions pour justifier l’absence de dialogue formel entre le requérant et l’évaluateur en ce qui concerne cette fixation.

71      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en jugeant que l’absence de dialogue formel entre l’évaluateur et le requérant sur la fixation d’objectifs pour la seconde partie de l’année 2010 ne constituait pas une irrégularité procédurale.

72      À cet égard, il y a lieu d’ajouter que le vice de procédure constitué par l’absence de dialogue formel entre l’évaluateur et le requérant ne saurait être neutralisé, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal de la fonction publique aux points 56 et 57 de l’arrêt attaqué, par la circonstance que le requérant avait nécessairement connaissance des objectifs qui lui étaient assignés pour la seconde partie de l’année 2010. En effet, la prise de connaissance des objectifs à atteindre ne saurait se substituer au dialogue formel entre l’évaluateur et le requérant portant précisément sur ces objectifs, dialogue au cours duquel le contenu des objectifs peut être discuté ou des désaccords peuvent apparaître quant aux objectifs à atteindre (voir, par analogie, arrêt du 30 septembre 2009, Skareby/Commission, T‑193/08 P, RecFP, EU:T:2009:377, points 75 à 82).

73      Il s’ensuit que le troisième grief doit être accueilli.

74      Étant donné que, dans le cadre du troisième grief, il a été statué sur le bien-fondé de l’appréciation du Tribunal de la fonction publique en ce qui concerne la fixation des objectifs lors du changement de fonctions du requérant, il n’est pas nécessaire de se prononcer, de manière distincte, sur le deuxième grief.

75      En conséquence, le second moyen doit être accueilli.

76      Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’accueillir le pourvoi et d’annuler l’arrêt attaqué dans la mesure où il est vicié par les erreurs de droit constatées aux points 21 à 34, 44 à 51 et 54 à 72 ci-dessus.

 Sur les conséquences de l’annulation partielle de l’arrêt attaqué

77      Conformément à l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe I du statut de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé, le Tribunal peut, en cas d’annulation de la décision du Tribunal de la fonction publique, statuer lui-même sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé. Tel est le cas en l’espèce.

 Sur les conclusions en annulation

78      Il résulte des points 21 à 34, 44 à 51 et 54 à 72 ci-dessus qu’il y a lieu de faire droit au recours formé en première instance et visant à l’annulation du rapport d’évaluation. En effet, celui-ci est entaché d’illégalité du fait, d’une part, de l’absence de dialogue annuel entre l’évaluateur et le requérant et, d’autre part, de l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010 et de dialogue formel portant sur la fixation d’objectifs pour la seconde partie de l’année 2010.

 Sur les conclusions indemnitaires

79      Devant le Tribunal de la fonction publique, le requérant a demandé le versement d’une somme de 10 000 euros à titre de réparation du préjudice moral qu’il aurait subi du fait de l’absence de fixation d’objectifs pour l’année 2010.

80      Frontex soutenait en substance que, la demande indemnitaire étant étroitement liée au grief d’annulation tiré de l’illégalité du rapport d’évaluation du fait de l’absence de fixation d’objectifs, le rejet de celui-ci devait entraîner celui de la demande indemnitaire. Elle soutenait en outre que, dans l’hypothèse où le Tribunal de la fonction publique déciderait d’annuler le rapport d’évaluation, cette annulation constituerait une réparation suffisante du préjudice prétendument subi.

81      Il résulte des points 44 à 51 et 54 à 72 ci-dessus que le rapport d’évaluation est entaché d’illégalité du fait, d’une part, de l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010 et, d’autre part, de l’absence de dialogue formel entre le requérant et l’évaluateur portant sur la fixation d’objectifs pour la seconde partie de l’année 2010.

82      Selon une jurisprudence constante, lorsque les conclusions indemnitaires trouvent leur fondement dans l’illégalité de l’acte annulé, ce qui est le cas en l’espèce, l’annulation prononcée par le Tribunal constitue, en elle-même, une réparation adéquate et, en principe, suffisante de tout préjudice moral que la partie requérante pourrait avoir subi (voir, en ce sens, arrêts du 28 février 2008, Neirinck/Commission, C‑17/07 P, RecFP, EU:C:2008:134, point 98 ; du 11 septembre 2002, Willeme/Commission, T‑89/01, RecFP, EU:T:2002:212, point 97, et Skareby/Commission, point 72 supra, EU:T:2009:377, point 99).

83      Toutefois, l’annulation d’un acte, lorsqu’elle est privée de tout effet utile, ne peut constituer en elle-même la réparation adéquate et suffisante de tout préjudice moral causé par l’acte annulé.

84      En l’espèce, l’illégalité du rapport d’évaluation tenant à l’absence de fixation d’objectifs pour la première partie de l’année 2010 ainsi qu’à l’absence de dialogue formel portant sur la fixation d’objectifs pour la seconde partie de l’année 2010 ne pourra pas être aisément corrigée. En effet, dans le cadre de l’exécution de l’arrêt, il sera impossible, de manière rétroactive, d’assigner des objectifs à un agent ainsi que d’organiser un dialogue formel sur de tels objectifs. En outre, le requérant ayant cessé son activité au sein de Frontex, ses prestations, pour l’année 2010, ne feront pas l’objet d’une nouvelle évaluation dans le cadre d’un nouveau rapport d’évaluation en tenant compte d’objectifs fixés ab initio. Ainsi, il subsistera un doute quant aux performances dont le requérant aurait pu faire la démonstration si des objectifs avaient été fixés initialement. Or, ce doute est constitutif d’un préjudice.

85      Il s’ensuit que l’annulation du rapport d’évaluation ne saurait, en tant que telle, constituer une réparation adéquate et suffisante.

86      Partant, dans les circonstances de l’espèce, et en l’absence de preuve de la détérioration de l’état de santé du requérant, invoquée devant le juge de première instance, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi en attribuant au requérant, ex æquo et bono, la somme de 2 000 euros.

 Sur les dépens

87      Conformément à l’article 211, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le pourvoi est fondé et que le Tribunal juge lui-même le litige, il statue sur les dépens.

88      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 211, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

89      Frontex ayant succombé et le requérant ayant conclu en ce sens, Frontex supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le requérant dans le cadre de la présente instance et de celle devant le Tribunal de la fonction publique, conformément aux conclusions du requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

déclare et arrête :

1)      L’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 9 octobre 2013, Wahlström/Frontex (F‑116/12, RecFP, EU:F:2013:143), est annulé en tant que le Tribunal de la fonction publique a rejeté les deuxième et troisième branches du second moyen d’annulation invoqué en première instance ainsi que la demande indemnitaire.

2)      Le pourvoi est rejeté pour le surplus.

3)      Le rapport d’évaluation pour l’année 2010 de M. Kari Wahlström est annulé.

4)      L’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (Frontex) est condamnée au paiement d’une indemnité de 2 000 euros à M. Wahlström.

5)      Frontex est condamnée à supporter l’intégralité des dépens afférents à la présente instance et à celle devant le Tribunal de la fonction publique.


Jaeger

Kanninen

Martins Ribeiro

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 septembre 2015.

Signatures


* Langue de procédure : le français.

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