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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> CMT v OHMI - Camomilla (Camomilla) (Judgment) French Text [2015] EUECJ T-98/13 (09 July 2015) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2015/T9813.html Cite as: [2015] EUECJ T-98/13, EU:T:2015:480, ECLI:EU:T:2015:480 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)
9 juillet 2015 (*)
« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marques communautaires figuratives Camomilla – Marque nationale figurative antérieure CAMOMILLA – Motif absolu de refus – Article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Absence de mauvaise foi du titulaire de la marque communautaire – Motif relatif de refus – Absence de similitude des produits – Absence d’atteinte à la renommée – Article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 – Article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 »
Dans les affaires jointes T‑98/13 et T‑99/13,
CMT Compagnia manifatture tessili Srl (CMT Srl), établie à Naples (Italie), représentée par Mes G. Floridia, R. Floridia, M. Franzosi et G. Rubino, avocats,
partie requérante,
contre
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. L. Rampini, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant
Camomilla SpA, établie à Buccinasco (Italie), représentée par Mes A. Tornato et M. Mussi, avocats,
partie intervenante
ayant pour objet des recours formés contre les décisions de la première chambre de recours de l’OHMI du 29 novembre 2012 (affaires R 1615/2011-1 et R 1617/2011‑1), relatives à des procédures de nullité entre CMT – Compagnia manifatture tessili Srl (CMT Srl) et Camomilla SpA,
LE TRIBUNAL (neuvième chambre),
composé de MM. G. Berardis, président, O. Czúcz et A. Popescu (rapporteur), juges,
greffier : Mme C. Heeren, administrateur,
vu les requêtes déposées au greffe du Tribunal le 20 février 2013,
vu les mémoires en réponse de l’OHMI déposés au greffe du Tribunal le 13 juin 2013,
vu les mémoires en réponse de l’intervenante déposés au greffe du Tribunal le 10 juin 2013,
vu la décision du 20 août 2013 refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,
vu l’ordonnance du 20 novembre 2014 portant jonction des affaires T‑98/13 et T‑99/13 aux fins de la phase orale de la procédure et de l’arrêt,
à la suite de l’audience du 28 janvier 2015,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 20 mai 1996, l’intervenante, Camomilla SpA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :
3 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, des classes 16, 18 et 24 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 16 : « Boîtes en carton ou en papier, cartons à dessins, portemines/porte-plumes ; papier, carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes ; produits de l’imprimerie ; articles pour reliures ; photographies ; papeterie, adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage ; matériel pour les artistes ; pinceaux ; machines à écrire et articles de bureau (à l’exception des meubles) ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) ; matières plastiques pour l’emballage (non comprises dans d’autres classes) ; cartes à jouer ; caractères d’imprimerie ; clichés » ;
– classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; peaux d’animaux ; malles et valises ; parapluies et cannes ; fouets et sellerie » ;
– classe 24 : « Tissus et produits textiles non compris dans d’autres classes ; couvertures de lit et de table ».
4 La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 1998/027, du 14 avril 1998.
5 Le 12 novembre 2001, le signe a été enregistré en tant que marque communautaire sous le numéro 269241.
6 Le 2 mai 2003, l’intervenante a présenté une autre demande d’enregistrement de marque communautaire à l’OHMI en vertu du règlement n° 40/94, tel que modifié.
7 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :
8 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, des classes 3, 9, 14, 16, 21, 24 et 28 au sens de l’arrangement de Nice et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 3 : « Savons ; parfumerie, déodorants à usage personnel, articles de toilette, produits hygiéniques de toilette, à l’exception des produits hygiéniques pour le soin des yeux, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices » ;
– classe 9 : « Lunettes, leurs pièces et accessoires tels que chaînettes, porte-lunettes, porte-téléphones cellulaires » ;
– classe 14 : « Articles de joaillerie et de bijouterie composés de matériaux précieux ou non, boutons de manchettes et fixe-cravates, bijoux et leurs imitations, horlogerie, pièces et accessoires » ;
– classe 16 : « Articles de papeterie, carton et produits en ces matières non compris dans d’autres classes, crayons, porte-mines, stylos à bille, stylos à pointe synthétique, rollers, marqueurs, surligneurs, stylos, pastels, pastels à la cire et à l’huile, crayons noirs et de couleur, craies blanches et de couleur, stylos en fibre, gommes, couleurs à l’huile et aquarelles, encres, matériel de bureau, peinture et dessin artistique, étui, cire, plasticine, argile, pâte colorée, tous les articles inoffensifs pour modeler, plaques à encrer pour incisions, clichés, tableaux, tables de dessin, papier et article en papier, telles que serviettes, nappes » ;
– classe 21 : « Ustensiles et récipients en céramique et/ou en porcelaine pour le ménage ou la cuisine, verrerie, porcelaine et faïence non comprises dans d’autres classes, en particulier plats et verres, poêles et objets similaires, machines à café, autres que celles en métaux précieux et électriques, casseroles, casseroles en fer, articles de table, autres que ceux en métaux précieux, seaux à glace, aplatisseurs à viande, broches à poisson, conteneurs portables pour glace, filtres, moulins à poivre, sucriers, salières, autres que celles en métaux précieux, porte-serviettes et ronds de serviettes, autres que ceux en métaux précieux, plateaux, autres que ceux en métaux précieux, supports pour cure-dents, autres que ceux en métaux précieux, corbeilles en bambou, batteurs, plateaux à riz, moulins à café et moulins à poivre, entonnoirs, bouteilles en verre pour la conservation d’aliments, pilons en bois, objets en terre cuite, ouvre-bouteilles, dessous de plats, louches, tamis, planches à hacher, bouteilles isolantes, rouleaux à pâtisserie, grils, cure-dents, presse-agrumes, moules à gaufres, autres qu’électriques, équipement pour nettoyer et lessiver, porte-savons, peignes, éponges, brosses ; articles en carton tels que plats et gobelets » ;
– classe 24 : « Tissus, tissus en maille, produits textiles, accessoires pour produits textiles, couvertures et couvre-lits, draps, rideaux, essuie-mains, nappes, napperons, mouchoirs, feutres » ;
– classe 28 : « Jouets, poupées, harnais pour le sport et la gymnastique, équipements de sport, sacs pour équipements de sport ; cartes à jouer ».
9 La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 2004/010, du 8 mars 2004.
10 Le 3 septembre 2004, le signe a été enregistré en tant que marque communautaire sous le numéro 3185196.
11 Le 17 décembre 2009, la requérante, CMT Compagnia manifatture tessili Srl (CMT Srl), a présenté deux demandes en nullité des marques communautaires figuratives de l’intervenante, pour l’ensemble des produits pour lesquels elles avaient été enregistrées.
12 Les motifs de nullité invoqués à l’appui desdites demandes étaient fondés sur les causes de nullité absolue visées à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et sur les causes de nullité relative visées à l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009 et l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.
13 Les demandes en nullité étaient fondées, quant aux causes de nullité relative, sur la marque figurative italienne reproduite ci-après :
14 Cette marque a été déposée en Italie le 17 avril 1978 et enregistrée le 24 février 1986, sous le numéro 407266, pour désigner des produits relevant de la classe 25 et correspondant à la description suivante : « Vêtements et accessoires du vêtement sous toutes ses formes ».
15 Par décisions du 25 juillet 2011, la division d’annulation a rejeté les demandes en nullité, estimant que la requérante n’avait pas apporté la preuve de l’usage, qu’il n’existait aucun risque de confusion, que ni la renommée de la marque nationale antérieure, ni même la mauvaise foi de l’intervenante au moment du dépôt n’avaient été prouvées.
16 Le 5 août 2011, la requérante a formé deux recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre les décisions de la division d’annulation.
17 Par décisions du 29 novembre 2012, respectivement, dans l’affaire R 1615/2011-1 (affaire T-98/13) et dans l’affaire R 1617/2011-1 (affaire T-99/13) (ci-après, prises ensemble, les « décisions attaquées »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté les recours de la requérante.
18 En premier lieu, s’agissant de la cause de nullité fondée sur la mauvaise foi du demandeur [article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009], la chambre de recours a estimé que les motifs exposés par la requérante étaient insuffisants et fondés sur des circonstances inexistantes. En substance, selon la chambre de recours, la requérante s’est bornée à prétendre, sans fournir aucune justification, que l’intervenante avait agi de mauvaise foi, laissant à cette dernière la charge de prouver sa bonne foi. La chambre de recours a indiqué que la charge de la preuve pèse, au contraire, sur la personne qui agit en nullité, laquelle doit donc exposer une argumentation et produire des preuves à l’appui de son action, tandis qu’il appartient à la partie adverse de réfuter cette argumentation et ces preuves. La chambre de recours a conclu que la requérante n’avait pas prouvé de manière convaincante que l’intervenante était de mauvaise foi lors du dépôt de la marque, quand bien même celle-ci aurait eu connaissance de l’usage par des tiers d’une marque comportant le même mot à cette période en Italie, pour désigner des produits relevant de la classe 25.
19 En deuxième lieu, s’agissant du moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, la chambre de recours l’a écarté en relevant que les marques de l’intervenante n’étaient pas identiques à la marque antérieure du point de vue visuel et conceptuel et que les marques de l’intervenante avaient été enregistrées pour des produits appartenant respectivement aux classes 16, 18 et 24 (affaire T‑98/13) et aux classes 3, 9, 14, 16, 21, 24 et 28 (affaire T‑99/13) alors que la marque antérieure avait été enregistrée pour des produits relevant de la classe 25.
20 En troisième lieu, s’agissant de la cause de nullité fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la chambre de recours a estimé qu’il convenait de rejeter cette cause de nullité pour absence de fondement. En effet, selon la chambre de recours, la requérante n’a pas motivé l’allégation selon laquelle les marques et les produits étaient identiques ou susceptibles d’être confondus. Cela étant et « aux fins du respect scrupuleux de l’instruction », la chambre de recours a procédé à une analyse comparative des produits en cause avec ceux pour lesquels la marque antérieure était enregistrée et a conclu que l’absence de similitude entre les produits suffisait pour exclure l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. En effet, selon une jurisprudence constante, « la condition de la similitude sur le plan commercial » et celle de la similitude des signes seraient cumulatives.
21 En outre, la chambre de recours a considéré, pour des raisons d’économie de procédure, qu’il était inutile de vérifier si la demande en nullité présentée sur la base de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 devait également être rejetée pour insuffisance de la preuve de l’usage.
22 En quatrième lieu, s’agissant de la cause de nullité fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, la chambre de recours a, tout d’abord, relevé que, parmi les produits pour lesquels la requérante avait fait valoir que sa marque antérieure avait acquis une renommée, figuraient des produits non couverts par l’enregistrement de celle-ci. À cet égard, la chambre de recours a rappelé que la renommée de la marque était, en ce qui les concernait, dénuée d’intérêt.
23 En outre, la chambre de recours a considéré que les arguments de la requérante consistaient uniquement à faire valoir un préjudice au caractère distinctif et à la réputation de la marque antérieure. Par conséquent, selon la chambre de recours, en plus d’être irrecevables au motif qu’ils n’avaient été présentés que devant elle, ils ne suffisaient aucunement à étayer une demande en nullité. La chambre de recours a indiqué qu’il ne suffisait pas, aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, d’invoquer un préjudice porté à sa propre marque, mais qu’il convenait d’exposer un raisonnement expliquant de manière convaincante comment « cette conséquence délétère » peut survenir.
24 À la lumière de ces circonstances, la chambre de recours a conclu que la cause de nullité fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 devait être rejetée en ce qu’elle était dénuée de fondement, sans qu’il soit nécessaire de vérifier, sur la base des preuves produites par la requérante, s’il était satisfait au critère de la renommée.
25 Enfin, s’agissant de la forclusion par tolérance (article 54 du règlement n° 207/2009), dans la décision attaquée dans l’affaire T‑99/13, la chambre de recours a estimé que, étant donné que la forclusion n’opère que si les causes de nullité relative sont jugées théoriquement applicables et que l’application de telles causes de nullité avaient été, concrètement, exclue en l’espèce, il était superflu de vérifier si la requérante avait toléré l’usage de la marque postérieure.
Conclusions des parties
26 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler les décisions attaquées ;
– à titre subsidiaire, et dans la seule hypothèse où le Tribunal devrait qualifier d’irrecevables les documents produits dans le cadre des recours formés devant la chambre de recours et les considérer comme étant essentiels pour faire droit au recours, annuler les décisions attaquées pour non-respect du principe du contradictoire et des droits de la défense et renvoyer les affaires devant la division d’annulation afin qu’elle statue au fond ;
– en tout état de cause, inviter l’OHMI à prendre les mesures nécessaires afin de se conformer à l’arrêt du Tribunal ;
– condamner l’OHMI à supporter les dépens encourus au cours des présentes procédures et l’intervenante à supporter les dépens encourus dans le cadre des procédures devant la division d’annulation et la chambre de recours.
27 L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter les recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
28 L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter les recours et confirmer les décisions attaquées ;
– condamner la requérante à l’ensemble des dépens en ce compris ceux supportés par l’intervenante.
En droit
Sur la recevabilité du troisième chef de conclusions de la requérante
29 Il résulte d’une jurisprudence constante que, dans le cadre d’un recours introduit devant le juge de l’Union européenne contre la décision d’une chambre de recours de l’OHMI, ce dernier est tenu, conformément à l’article 65, paragraphe 6, du règlement n° 207/2009, de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge de l’Union. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’OHMI, auquel il incombe de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du juge de l’Union [arrêts du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec, EU:T:2007:219, point 20, et du 27 juin 2013, Repsol YPF/OHMI – Ajuntament de Roses (R), T‑89/12, Rec, EU:T:2013:335, point 15].
30 Partant, ce chef de conclusions de la requérante est irrecevable.
Sur le fond
31 Au soutien de ses demandes en annulation des décisions attaquées, la requérante invoque, en substance, quatre moyens, tirés, en premier lieu, de la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en deuxième lieu, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009, lus en combinaison avec l’article 53, paragraphe 1, sous a), du même règlement, en troisième lieu, de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec l’article 53, paragraphe 1, sous a), dudit règlement et, en quatrième lieu, de la violation de l’article 54, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.
Sur la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009
32 La requérante fait valoir que l’erreur commise à la fois par la division d’annulation et par la chambre de recours est de ne pas avoir tenu compte des particularités de l’affaire en cause et d’avoir, par voie de conséquence, appliqué le principe traditionnel selon lequel la simple connaissance de la marque antérieure ne suffit pas à établir la mauvaise foi du demandeur.
33 Dans le cas d’espèce, selon la requérante, aux fins de la constatation de la mauvaise foi lors du dépôt postérieur de la même marque en tant que marque communautaire, il y avait lieu de prendre en considération des circonstances qui font abstraction, et qui sont en tout cas distinctes, de la connaissance pure et simple de la marque antérieure par le titulaire.
34 Les circonstances pertinentes, dans le cas d’espèce, seraient celles qui découlent du contentieux excessivement long ayant opposé pendant des années la requérante et l’intervenante, tant sur le plan national que sur le plan de l’Union, concernant la propriété de la marque Camomilla en tant que signe distinctif pour les vêtements et les accessoires du vêtement. Ce contentieux aurait dû amener la chambre de recours à conclure que l’intervenante, par le dépôt de ses marques communautaires, n’avait pas pour objectif d’obtenir un droit légitime, mais celui de s’approprier la marque Camomilla déjà enregistrée et utilisée par la requérante.
35 L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments invoqués par la requérante.
36 À cet égard, il convient de rappeler, tout d’abord, que le régime d’enregistrement d’une marque communautaire repose sur le principe du « premier déposant », inscrit à l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 207/2009. En vertu de ce principe, un signe ne peut être enregistré en tant que marque communautaire que pour autant qu’une marque antérieure n’y fasse pas obstacle, qu’il s’agisse d’une marque communautaire, d’une marque enregistrée dans un État membre ou par l’Office Benelux de la propriété intellectuelle, d’une marque ayant fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans un État membre ou encore d’une marque ayant fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans l’Union. En revanche, sans préjudice d’une éventuelle application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, la seule utilisation par un tiers d’une marque non enregistrée ne fait pas obstacle à ce qu’une marque identique ou similaire soit enregistrée en tant que marque communautaire, pour des produits ou des services identiques ou similaires [arrêt du 14 février 2012, Peeters Landbouwmachines/OHMI – Fors MW (BIGAB), T‑33/11, Rec, EU:T:2012:77, point 16 ; voir, également, arrêt du 11 juillet 2013, SA.PAR./OHMI – Salini Costruttori (GRUPPO SALINI), T‑321/10, Rec, EU:T:2013:372, point 17 et jurisprudence citée].
37 L’application de ce principe est nuancée, notamment, par l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, en vertu duquel la nullité de la marque communautaire est déclarée, sur demande présentée auprès de l’OHMI ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, lorsque le demandeur était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande de marque. Il incombe au demandeur en nullité qui entend se fonder sur ce motif d’établir les circonstances qui permettent de conclure que le titulaire d’une marque communautaire était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande d’enregistrement de cette dernière (arrêt BIGAB, point 36 supra, EU:T:2012:77, point 17 ; voir, également, arrêt GRUPPO SALINI, point 36 supra, EU:T:2013:372, point 18 et jurisprudence citée).
38 La notion de « mauvaise foi » visée à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 n’est ni définie, ni délimitée, ni même décrite d’une quelconque manière dans la législation [arrêt du 1er février 2012, Carrols/OHMI – Gambettola (Pollo Tropical CHICKEN ON THE GRILL), T‑291/09, Rec, EU:T:2012:39, point 44].
39 Il convient d’observer que, dans l’arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (C‑529/07, Rec, EU:C:2009:361, point 53, ci-après l’« arrêt Lindt Goldhase »), la Cour a apporté plusieurs précisions sur la manière dont il convenait d’interpréter la notion de mauvaise foi, telle qu’elle était visée à l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.
40 Selon la Cour, aux fins de l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi du demandeur, au sens de cette disposition, il convient de prendre en considération tous les facteurs pertinents propres au cas d’espèce et existant au moment du dépôt de la demande d’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire et, notamment, premièrement, le fait que le demandeur sait ou doit savoir qu’un tiers utilise, dans au moins un État membre, un signe identique ou similaire pour un produit ou service identique ou similaire prêtant à confusion avec le signe dont l’enregistrement est demandé, deuxièmement, l’intention du demandeur d’empêcher ce tiers de continuer à utiliser un tel signe ainsi que, troisièmement, le degré de protection juridique dont jouissent le signe du tiers et le signe dont l’enregistrement est demandé (arrêt Lindt Goldhase, point 39 supra, EU:C:2009:361, point 53).
41 Cela étant, il ressort de la formulation retenue par la Cour dans ledit arrêt que les facteurs qui y sont énumérés ne sont que des illustrations parmi un ensemble d’éléments susceptibles d’être pris en compte à l’effet de se prononcer sur l’éventuelle mauvaise foi d’un demandeur d’enregistrement au moment du dépôt de la demande de marque (arrêts BIGAB, point 36 supra, EU:T:2012:77, point 20 ; du 13 décembre 2012, pelicantravel.com/OHMI – Pelikan (Pelikan), T‑136/11, EU:T:2012:689, point 26, et GRUPPO SALINI, point 36 supra, EU:T:2013:372, point 22).
42 Il y a donc lieu de considérer que, dans le cadre de l’analyse globale opérée au titre de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il peut également être tenu compte de la logique commerciale dans laquelle s’est inscrit le dépôt de la demande d’enregistrement du signe en tant que marque communautaire, ainsi que de la chronologie des événements ayant caractérisé ledit dépôt (voir, en ce sens, arrêts BIGAB, point 36 supra, EU:T:2012:77, point 21, et GRUPPO SALINI, point 36 supra, EU:T:2013:372, point 30).
43 C’est notamment à la lumière des considérations qui précèdent et pour autant qu’elles s’appliquent aux présentes affaires qu’il y a lieu de contrôler la légalité des décisions attaquées, en ce que la chambre de recours a rejeté le motif de nullité fondé sur la prétendue mauvaise foi de l’intervenante au moment du dépôt des demandes des marques contestées.
44 En l’espèce, il y a lieu de relever, tout d’abord, que, s’agissant de la décision attaquée dans l’affaire T‑98/13, il ne résulte pas du dossier que l’intervenante avait connaissance de l’existence de la marque antérieure au moment de la demande d’enregistrement de sa propre marque en tant que marque communautaire.
45 En effet, cette demande est datée du 20 mai 1996 alors que la requérante a fait opposition à l’enregistrement de cette marque le 10 juillet 1998 et a introduit une action en contrefaçon devant le juge italien le 13 janvier 1999.
46 Indépendamment de cette circonstance, comme la chambre de recours l’a relevé à juste titre au point 43, respectivement, de la décision attaquée dans l’affaire T‑98/13 et de la décision attaquée dans l’affaire T‑99/13, la simple connaissance du titre d’autrui ne caractérise pas la mauvaise foi. L’appréciation de l’existence de la mauvaise foi requiert la prise en considération de l’intention de la personne au moment du dépôt de la marque (arrêt Lindt Goldhase, point 39 supra, EU:C:2009:361, points 40 et 41).
47 À cet égard, la requérante se limite à affirmer, en substance, que les litiges entre l’intervenante et elle-même prouvent de manière évidente l’existence de l’intention consciente et fautive de l’intervenante de s’approprier la marque Camomilla déjà enregistrée et utilisée par la requérante. Ces différends prouveraient que le dépôt des marques communautaires a été effectué dans la seule intention de renforcer les marques nationales parallèles, en étendant la protection à des produits incompatibles avec ceux de la requérante.
48 La requérante soutient que l’intervenante a tenté de « neutraliser la marque italienne antérieure » et de s’approprier, au niveau de l’Union et donc également en Italie, une marque qui ne lui appartenait pas et d’entraver l’accès de la requérante au marché, en bloquant ainsi son activité commerciale.
49 Or, il y a lieu de relever, à l’instar de l’OHMI, qu’un litige entre différents titulaires de marques au niveau national ne constitue pas en soi une preuve objective de la mauvaise foi de l’une des parties qui a voulu enregistrer sa marque également au niveau de l’Union.
50 De même, aucun élément susceptible de prouver que la requérante entendait commercialiser sa marque au niveau de l’Union dans les secteurs commerciaux en question, ni que l’intervenante était au courant de cette intention de la part de la requérante au moment du dépôt des marques communautaires contestées, n’a été relevé.
51 Il convient de rappeler, en outre, que la bonne foi est présumée jusqu’à preuve du contraire (arrêt Pelikan, point 41 supra, EU:T:2012:689, point 57) et, partant, il ne peut être conclu que le titulaire d’une marque communautaire était de mauvaise foi sur la base de simples présomptions, mais la personne qui invoque une telle circonstance doit la prouver sur la base d’éléments objectifs sur lesquels il est possible de fonder une appréciation certaine des intentions de l’autre partie.
52 Il s’ensuit que les affirmations de la requérante, non corroborées par des éléments de preuve objectifs des intentions frauduleuses de l’intervenante, ne sont pas suffisantes pour établir la mauvaise foi de cette dernière.
53 Les autres arguments de la requérante ne sauraient non plus remettre en cause cette conclusion.
54 En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel l’enregistrement contesté aurait pour effet de « neutraliser » la marque italienne antérieure, il y a lieu de relever que la chambre de recours a, à juste titre, dans les décisions attaquées, exclu toute possibilité que l’enregistrement des marques communautaires ait pour effet de « paralyser » ou de préjudicier autrement le droit d’exclusivité attaché à la marque antérieure. L’enregistrement communautaire postérieur ne saurait en effet prévaloir sur le droit national antérieur, celui-ci pouvant, au contraire, être déclaré nul dans l’hypothèse d’un risque de confusion ou de toute autre violation dudit droit antérieur constituant une cause de nullité.
55 Enfin, en ce qui concerne l’argument de la requérante tiré du fait que la chambre de recours n’aurait pas examiné le risque de confusion entre les marques en cause dans le cadre de la mauvaise foi, d’une part, il suffit de relever que le risque de confusion en raison de la similitude ou même de l’identité des signes et des produits avec une marque antérieure ne constitue pas en soi la preuve décisive de la mauvaise foi du demandeur, en l’absence de tout autre élément pertinent (voir, en ce sens, arrêt Pollo Tropical CHICKEN ON THE GRILL, point 38 supra, EU:T:2012:39, point 90). D’autre part, il y a lieu de constater que, contrairement à ce que prétend la requérante, la chambre de recours a relevé, au point 33 de la décision attaquée dans l’affaire T‑98/13, que la marque contestée était enregistrée pour plusieurs classes de produits, mais pas pour la classe 25 pour laquelle est enregistrée la marque antérieure, et, au point 39 de la décision attaquée dans l’affaire T‑99/13, que la marque antérieure n’était enregistrée que pour la classe 25 et la marque postérieure que pour les classes 3, 9, 14, 16, 21, 24 et 28.
56 À la lumière de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen.
Sur la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009
57 La requérante soutient que la chambre de recours a refusé d’examiner la similitude des marques et des produits en alléguant, sur la base d’une interprétation trop extensive de l’article 76 du règlement n° 207/2009, qu’elle était tenue de se limiter aux seuls arguments invoqués et aux preuves produites par les parties. La requérante estime que la chambre de recours a manqué à son devoir de procéder à un nouvel examen complet du fond de l’opposition, tant en fait qu’en droit.
58 La requérante fait valoir que sa marque nationale a été enregistrée pour les produits relevant de la classe 25, correspondant à la description suivante : « Vêtements et accessoires du vêtement sous toutes leurs formes ». Elle considère que les produits tels que les objets en carton et en papier, cuir et imitations du cuir, produits en ces matières destinés à être utilisés comme accessoires de vêtements, malles et valises, parapluies et cannes, tissus et produits textiles, lunettes, étuis à lunettes, porte téléphones cellulaires, articles de joaillerie et de bijouterie, composés de matériaux précieux ou non, manchettes et fixe-cravates, bijoux et leurs imitations, horlogerie, tissus, tissus en maille, sacs pour équipements de sport doivent être réputés analogues aux vêtements.
59 À l’appui de cette affirmation, la requérante indique que ces produits sont régulièrement vendus par les mêmes canaux de distribution, qu’ils servent à compléter le « look » de celui qui achète les vêtements ou qu’ils sont, à tout le moins, la matière première de ces vêtements.
60 En l’espèce, il y a lieu de relever que la chambre de recours a constaté, aux points 58 à 68 des décisions attaquées, que la requérante n’avait pas motivé, pendant la procédure devant les instances de l’OHMI, l’allégation selon laquelle les marques et les produits étaient identiques ou susceptibles d’être confondus. En effet, selon la chambre de recours les demandes en nullité ainsi que les mémoires déposés postérieurement devant la division d’annulation et les recours introduits devant la chambre de recours par la requérante ne contenaient en substance aucune analyse comparative des signes et des produits. La chambre de recours a considéré cette lacune suffisante pour justifier le rejet de la demande de nullité fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.
61 Toutefois, il y a lieu de relever que la chambre de recours, « aux fins du respect scrupuleux de l’instruction », a aussi effectué une analyse comparative des produits litigieux afin d’apprécier leurs éventuelles similitudes.
62 Partant, il ne saurait être valablement soutenu que la chambre de recours a manqué à son devoir de procéder à un nouvel examen complet du fond de l’opposition.
63 De plus, selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].
64 En particulier, s’agissant de la décision attaquée dans l’affaire T‑98/13, la chambre de recours a, aux points 68 à 70 de ladite décision, indiqué ce qui suit :
« 68 Les produits litigieux relevant de la classe 16 consistent en des articles de papeterie, couleurs, nécessaires d'écriture. Ils n’ont aucun point commun avec les vêtements et leurs accessoires du point de vue de la nature des produits, de leur mode d’utilisation, de leur destination ou de leurs voies de commercialisation.
69 Les produits litigieux relevant de la classe 18 consistent en des articles en cuir tels que sacs, peaux d’animaux, articles de sellerie et cannes. Ces derniers servent à transporter des objets, fabriquer des marchandises, seller des chevaux et à se protéger de la pluie. Ils ne présentent aucune similitude avec les vêtements. […]
70 Les produits litigieux relevant de la classe 24 consistent en des produits en textiles de divers types mais aucun ne correspond à un vêtement. Il s’agit d’articles pour le lit, la table ou la décoration de la maison, n’étant pas destinés à servir de vêtement. »
65 S’agissant de la décision attaquée dans l’affaire T‑99/13, la chambre de recours a, aux points 70 à 76 de ladite décision, indiqué ce qui suit :
« 70 Les produits litigieux relevant de la classe 3 sont essentiellement des produits destinés au soin du corps. Leur nature, leur mode d’utilisation, leur destination et leurs canaux de distribution sont différents de ceux des vêtements.
71 Les produits litigieux de la classe 9 consistent en des lunettes et leurs accessoires. Leur nature, leur mode d’utilisation, leur destination et leurs canaux de distribution sont différents de ceux des vêtements.
72 Les produits litigieux de la classe 14 consistent dans des articles de joaillerie, de bijouterie, bijoux de fantaisie et imitations de bijoux, montres et horloges. Leur nature, leur mode d’utilisation, leur destination et leurs canaux de distribution sont différents de ceux des vêtements.
73 Les produits litigieux relevant de la classe 16 consistent dans des articles de papeterie, couleurs, nécessaires d’écriture. Ils n’ont aucun point commun avec les vêtements et leurs accessoires du point de vue de la nature des produits, de leur mode d'utilisation, de leur destination ou de leurs voies de commercialisation.
74 Les produits litigieux relevant de la classe 21 consistent en de la vaisselle et des articles de cuisine. Ils ne présentent aucune similitude avec les vêtements.
75 Les produits litigieux relevant de la classe 24 consistent dans des produits en textiles de divers types mais aucun ne correspond à un vêtement. Il s’agit d'articles pour le lit, la table ou la décoration de la maison, n’étant pas destinés à servir de vêtement.
76 Les produits litigieux de la classe 28 sont des articles de jeux ou pour le sport. Ils diffèrent des vêtements de par leur nature, leurs modalités d’utilisation, leur destination et leur usage. »
66 En l’espèce, force est de constater que les arguments invoqués par la requérante et exposés aux points 58 et 59 ci-dessus ne sont pas de nature à remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours s’agissant de la similitude des produits en cause.
67 En effet, il y a lieu de relever que la requérante se limite à des affirmations de principe, mais n’avance, en substance, aucun argument permettant d’établir que la chambre de recours a considéré à tort que les produits litigieux étaient par leur nature, leur mode d’utilisation, leur destination ou leurs voies de commercialisation différents des vêtements. La requérante ne soutient pas non plus que les produits visés par les marques en cause sont concurrents.
68 En particulier, il convient de relever que le fait que des produits tels que les portes téléphones cellulaires, les lunettes, les valises, les sacs pour équipements de sport et les parapluies, d’une part, et les vêtements, d’autre part, puissent être vendus dans les mêmes établissements commerciaux, tels que des grands magasins ou des supermarchés, n’est pas particulièrement significatif à cet égard, dès lors que des produits de nature très diverse peuvent être trouvés dans ces points de vente, sans que les consommateurs leur attribuent automatiquement une même origine [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2004, El Corte Inglés/OHMI – Pucci (EMILIO PUCCI), T‑8/03, Rec, EU:T:2004:358, point 43].
69 De la même manière, le cuir et les imitations du cuir et les tissus et produits textiles, d’une part, et les vêtements, d’autre part, diffèrent par de multiples aspects, tels que leur nature, leur destination, leur origine et leurs canaux de distribution. Ainsi c’est seulement dans des cas particuliers, à savoir lorsqu’un fabricant de cuir ou de tissus exploite la notoriété de sa propre marque et décide d’étendre son activité à la production de vêtements, que la même marque est utilisée pour désigner des produits finis (vêtements) et des produits semi‑finis (cuir et tissus pour vêtements). Il ne ressort pas du dossier produit par la requérante que tel serait le cas en l’espèce (voir, en ce sens, arrêt EMILIO PUCCI, point 68 supra, EU:T:2004:358, point 44).
70 S’agissant de l’argument de la requérante tiré du caractère complémentaire des produits en cause fondé sur la circonstance que des produits tels que les lunettes, les lunettes de soleil, les articles de joaillerie et de bijouterie, les boutons de manchettes et les fixe-cravates, les bijoux et leurs imitations, ainsi que l’horlogerie servent à compléter le « look » de celui qui les achète, il ne saurait non plus prospérer.
71 En effet, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, les produits ou les services sont complémentaires lorsqu’il existe entre eux un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec, EU:T:2009:14, points 57 et 58 et jurisprudence citée].
72 Il est certes vrai qu’une complémentarité d’ordre esthétique entre des produits peut faire naître un degré de similitude au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Une telle complémentarité doit alors consister en un véritable besoin esthétique, en ce sens qu’un produit est indispensable ou important pour l’utilisation de l’autre et que les consommateurs jugent habituel et normal d’utiliser les produits ensemble [arrêts du 1er mars 2005, Sergio Rossi/OHMI – Sissi Rossi (SISSI ROSSI), T‑169/03, Rec, EU:T:2005:72, points 60 et 62, et du 11 juillet 2007, Mülhens/OHMI – Minoronzoni (TOSCA BLU), T‑150/04, Rec, EU:T:2007:214, point 36].
73 Néanmoins, il convient de souligner que la recherche d’une certaine harmonie esthétique dans l’habillement constitue un trait commun dans l’ensemble du secteur de la mode et de l’habillement et se révèle être un facteur trop général pour pouvoir justifier, à lui seul, la conclusion que tous les produits concernés sont complémentaires et, de ce fait, similaires [arrêts SISSI ROSSI, point 72 supra, EU:T:2005:72, point 62, et du 24 septembre 2008, Oakley/OHMI – Venticinque (O STORE), T‑116/06, Rec, EU:T:2008:399, point 86].
74 En effet, pour conclure à une similitude entre les produits, il faut encore que les consommateurs considèrent comme courant que ces produits soient commercialisés sous la même marque, ce qui implique, normalement, qu’une grande partie des fabricants ou des distributeurs respectifs soient les mêmes (arrêts SISSI ROSSI, point 72 supra, EU:T:2005:72, point 63, et TOSCA BLU, point 72 supra, EU:T:2007:214, point 37).
75 En l’espèce, s’il peut être admis que le choix des consommateurs, lors de l’achat d’un des produits mentionnés au point 70 ci-dessus, peut être influencé par la volonté d’orner ou de compléter une tenue vestimentaire, il ne peut néanmoins être considéré qu’il existe un véritable besoin esthétique de créer cette harmonie, rendant l’utilisation d’un de ces produits indispensable ou important pour le port des vêtements [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 30 avril 2014, Beyond Retro/OHMI – S&K Garments (BEYOND VINTAGE), T‑170/12, EU:T:2014:238, point 36].
76 De plus, il a déjà été jugé que des produits tels que les articles de joaillerie et de bijouterie et les montres ne présentaient pas de lien de complémentarité avec les articles d’habillement au motif que la relation entre ces produits était trop indirecte pour être considérée comme déterminante (voir, en ce sens, arrêt BEYOND VINTAGE, point 75 supra, EU:T:2014:238, point 37 et jurisprudence citée).
77 Dans ces conditions, la chambre de recours a conclu, à juste titre, que les produits en cause n’étaient pas similaires et, par conséquent, elle a considéré, conformément à la jurisprudence selon laquelle un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent (arrêt easyHotel, point 71 supra, EU:T:2009:14, point 42) que le motif d’annulation fondé sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009 devait être écarté.
78 S’agissant des arguments soulevés par la requérante en ce qui concerne la preuve de l’usage de la marque antérieure, il suffit de relever que la chambre de recours, en raison du fait que l’absence de similitude entre les produits suffit pour exclure l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, a, à juste titre, considéré, pour des raisons d’économie de procédure, qu’il était inutile de vérifier si la demande en nullité devait également être rejetée pour insuffisance de la preuve de l’usage.
79 Il s’ensuit que lesdits arguments sont inopérants aux fins de vérifier la légalité des décisions attaquées.
80 Partant, il convient de rejeter le présent moyen.
Sur la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009
81 La requérante fait valoir que sa marque antérieure est renommée et jouit donc d’une protection allant au-delà des produits pour lesquels elle est enregistrée. Elle considère que sa marque antérieure jouit d’une notoriété en Italie en raison de l’usage très intense dont elle aurait fait l’objet pour désigner de nombreux produits de différentes natures appartenant à la classe 25, celle des vêtements, des produits similaires et des accessoires.
82 Selon l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est également refusée à l’enregistrement si elle est identique ou a des similitudes avec la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui n’ont pas de similitudes avec ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’Union européenne et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice.
83 La protection élargie accordée à la marque antérieure par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 présuppose donc la réunion de plusieurs conditions. Premièrement, la marque antérieure prétendument renommée doit être enregistrée. Deuxièmement, cette dernière et celle dont l’enregistrement est demandé doivent être identiques ou similaires. Troisièmement, elle doit jouir d’une renommée dans l’Union, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, ou dans l’État membre concerné, dans le cas d’une marque nationale antérieure. Quatrièmement, l’usage sans juste motif de la marque demandée doit conduire au risque qu’un profit puisse être indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’un préjudice puisse être porté au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure. Ces conditions étant cumulatives, l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [arrêts du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, Rec, EU:T:2007:93, points 34 et 35, et du 11 juillet 2007, Mülhens/OHMI – Minoronzoni (TOSCA BLU), T‑150/04, Rec, EU:T:2007:214, points 54 et 55].
84 En l’espèce, il ressort des dossiers que, dans les procédures devant la chambre de recours, la requérante s’est, en substance, limitée à affirmer que si l’enregistrement des marques communautaires était accordé, l’intervenante en tirerait un avantage indu ou que cela lui créerait un préjudice. En particulier, elle indique que l’usage des marques contestées impliquerait « une perte de la capacité distinctive de la marque antérieure, de sorte que la force de la marque est diluée en raison de la présence indue de la marque de la titulaire, causant ainsi un préjudice évident à la capacité distinctive de la marque antérieure ; l’usage de la marque de la titulaire affecte également la réputation de la marque nationale de la demanderesse en nullité et bénéficie de son goodwill incontestable dans le secteur de la mode ».
85 Or, il ressort de la jurisprudence qu’une des conditions cumulatives pour l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 est l’existence d’un risque que l’usage sans juste motif de la marque postérieure tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porte préjudice.
86 Ainsi que l’a relevé, à juste titre, la chambre de recours au point 84 de la décision attaquée dans l’affaire T‑98/13 et au point 90 de la décision attaquée dans l’affaire T‑99/13, il ne suffit pas, aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, d’invoquer un préjudice à l’encontre de sa propre marque pour remplir cette condition. Il convient d’exposer un raisonnement expliquant de manière convaincante comment l’usage sans juste motif de la marque postérieure tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porterait préjudice. Pour ce faire, il importe d’analyser la perception par le public pertinent – qui d’ailleurs peut varier en fonction du préjudice invoqué – et d’examiner les secteurs commerciaux en question à la lumière des liens que le public peut instaurer entre eux.
87 La requérante n’a pas fourni, pendant la procédure devant l’OHMI, d’élément de preuve pour démontrer l’existence d’un risque que l’usage sans juste motif de la marque postérieure lui porte préjudice.
88 Partant, ce moyen de la requérante ne peut non plus être accueilli.
89 S’agissant des arguments soulevés par la requérante en ce qui concerne la preuve de la renommée de la marque antérieure, il suffit de relever que la chambre de recours, en raison du fait que la requérante n’a pas démontré l’existence d’un risque de préjudice à l’encontre de sa propre marque au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, a, à juste titre, considéré, pour des raisons d’économie de procédure, qu’il était inutile de vérifier si la satisfaction du critère de la renommée avait été démontrée.
90 Il s’ensuit que lesdits arguments sont inopérants aux fins de vérifier la légalité des décisions attaquées.
Sur la forclusion par tolérance (article 54 du règlement n° 207/2009)
91 La requérante rappelle que la division d’annulation a exclu qu’il existait une forclusion par tolérance, au sens de l’article 54 du règlement n° 207/2009, qui l’aurait empêchée de demander la nullité des marques en cause, puisqu’elle avait elle-même toléré leur usage pendant plus de cinq ans. La requérante fait valoir que le contentieux avec l’intervenante, qui est né en 1999, est toujours en cours et atteste incontestablement qu’elle n’a jamais fait preuve d’inaction ni de tolérance, et ce ni au niveau national, ni au niveau de l’Union.
92 À cet égard, il suffit de relever, d’une part, que, dans l’affaire T‑98/13, la question de la forclusion par tolérance n’a pas fait l’objet d’un moyen de recours de la requérante devant la chambre de recours et, par conséquent, n’a pas été traitée dans la décision attaquée. D’autre part, s’agissant de l’affaire T‑99/13, il y a lieu de relever que la chambre de recours a, à juste titre, estimé que, étant donné que la forclusion n’opère que si les causes de nullité relative sont jugées théoriquement applicables et que leur application a été, concrètement, exclue en l’espèce, il était superflu de vérifier si la requérante avait toléré l’usage de la marque postérieure.
93 Il s’ensuit que les arguments soulevés par la requérante concernant la forclusion par tolérance avancée par l’intervenante sont inopérants.
94 Aucun des moyens invoqués par la requérante n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.
Sur les dépens
95 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
96 La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (neuvième chambre)
déclare et arrête :
1) Les recours sont rejetés.
2) CMT Compagnia manifatture tessili Srl (CMT Srl) est condamnée aux dépens.
Berardis | Czúcz | Popescu |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 juillet 2015.
Signatures
** Langue de procédure : l’italien.
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