BAILII is celebrating 24 years of free online access to the law! Would you consider making a contribution?
No donation is too small. If every visitor before 31 December gives just £1, it will have a significant impact on BAILII's ability to continue providing free access to the law.
Thank you very much for your support!
[Home] [Databases] [World Law] [Multidatabase Search] [Help] [Feedback] | ||
Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
||
You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> GV v EEAS (Judgment) French Text [2016] EUECJ F-137/14 (05 February 2016) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2016/F13714.html Cite as: [2016] EUECJ F-137/14, EU:F:2016:14, ECLI:EU:F:2016:14 |
[New search] [Help]
DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)
5 février 2016 (*)
« Fonction publique – Personnel du SEAE – Agent contractuel – Contrat à durée indéterminée – Article 47, sous c), du RAA – Motifs de licenciement – Rupture du lien de confiance – Droit d’être entendu – Article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Principe de bonne administration – Préjudice matériel – Préjudice moral »
Dans l’affaire F‑137/14,
ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,
GV, ancien agent contractuel du Service européen pour l’action extérieure, demeurant à Berlin (Allemagne), représenté par Me H. Tettenborn, avocat,
partie requérante,
contre
Service européen pour l’action extérieure (SEAE), représenté par M. S. Marquardt et Mme M. Silva, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre),
composé de MM. R. Barents, président, E. Perillo et J. Svenningsen (rapporteur), juges,
greffier : Mme X. Lopez Bancalari, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 27 octobre 2015,
rend le présent
Arrêt
1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 8 décembre 2014, GV demande, en substance, l’annulation de la décision du 29 janvier 2014 par laquelle le directeur de la direction « Ressources humaines » du Service européen pour l’action extérieure (SEAE), agissant en qualité d’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC »), a décidé de résilier le contrat d’engagement du requérant avec effet au 31 août 2014.
Cadre juridique
La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne
2 Sous l’intitulé « Droit à une bonne administration », l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dispose :
« 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l’Union.
2. Ce droit comporte notamment :
a) le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ;
[...] »
Le statut des fonctionnaires de l’Union européenne
3 L’article 20 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») dispose :
« Le fonctionnaire est tenu de résider au lieu de son affectation ou à une distance telle de celui-ci qu’il ne soit pas gêné dans l’exercice de ses fonctions. Il informe l’autorité investie du pouvoir de nomination de son adresse et l’avise immédiatement de tout changement de celle-ci. »
4 L’article 59 du statut dispose :
« 1. Le fonctionnaire qui justifie être empêché d’exercer ses fonctions par suite de maladie ou d’accident bénéficie de plein droit d’un congé de maladie.
L’intéressé doit aviser, dans les délais les plus brefs, son institution de son indisponibilité en précisant le lieu où il se trouve. Il est tenu de produire, à partir du quatrième jour de son absence, un certificat médical. Ce certificat doit être envoyé au plus tard le cinquième jour de l’absence, le cachet de la poste faisant foi. [...]
Le fonctionnaire en congé de maladie peut, à tout moment, être soumis à un contrôle médical organisé par l’institution. Si ce contrôle ne peut avoir lieu pour des raisons imputables à l’intéressé, son absence est considérée comme injustifiée à compter du jour où le contrôle était prévu.
Si le contrôle médical révèle que le fonctionnaire est en mesure d’exercer ses fonctions, son absence, sous réserve de l’alinéa ci-après, est considérée comme injustifiée à compter du jour du contrôle.
Si le fonctionnaire estime que les conclusions du contrôle médical organisé par l’autorité investie du pouvoir de nomination sont médicalement injustifiées, le fonctionnaire ou un médecin agissant en son nom peut, dans les deux jours, saisir l’institution d’une demande d’arbitrage par un médecin indépendant.
[...]
3. Sans préjudice de l’application des dispositions relatives aux procédures disciplinaires, le cas échéant, toute absence considérée comme injustifiée au titre des paragraphes 1 et 2 est imputée sur la durée du congé annuel de l’intéressé. [...]
[...] »
5 L’article 60 du statut prévoit :
« Sauf en cas de maladie ou d’accident, le fonctionnaire ne peut s’absenter sans y avoir été préalablement autorisé par son supérieur hiérarchique. Sans préjudice de l’application éventuelle des dispositions prévues en matière disciplinaire, toute absence irrégulière dûment constatée est imputée sur la durée du congé annuel de l’intéressé. En cas d’épuisement de ce congé, le fonctionnaire perd le bénéfice de sa rémunération pour la période correspondante.
Lorsqu’un fonctionnaire désire aller passer son congé de maladie dans un lieu autre que celui de son affectation, il est tenu d’obtenir préalablement l’autorisation de l’autorité investie du pouvoir de nomination. »
Le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne
6 L’article 11, premier alinéa, première phrase, du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA ») prévoit, s’agissant des agents temporaires, que « [l]es dispositions des articles 11 à 26 bis du statut concernant les droits et obligations des fonctionnaires sont applicables par analogie ».
7 L’article 81 du RAA, qui concerne les agents contractuels, prévoit pour sa part que l’article 11 du RAA s’applique également par analogie auxdits agents. De même, l’article 91 du RAA prévoit que les articles 16 à 18 du RAA, s’agissant des agents temporaires, s’appliquent par analogie aux agents contractuels. À cet égard, en vertu de l’article 16 du RAA, les articles 55 à 61 du statut, concernant les conditions de travail des fonctionnaires, s’appliquent par analogie aux agents temporaires.
8 Sous le chapitre relatif à la « [f]in de l’engagement » des agents temporaires, l’article 47, sous c), i), du RAA prévoit que, indépendamment du cas de décès de l’agent temporaire, l’engagement de ce dernier prend fin, pour les contrats à durée indéterminée, « à l’issue du préavis fixé dans le contrat, le préavis ne pouvant être inférieur à un mois par année de service accompli, avec un minimum de trois mois et un maximum de dix mois[ ; t]outefois, le préavis ne peut commencer à courir pendant [...] un congé de maladie, pour autant que ce dernier ne dépasse pas une période de trois mois[ ; c]e préavis est suspendu pendant [...] le congé de maladie, dans les limites visées ci-dessus ».
9 Sous le chapitre relatif à la « [f]in de l’engagement » des agents contractuels, l’article 119 du RAA prévoit que les articles 47 à 50 bis du RAA s’appliquent par analogie à ces agents.
Faits à l’origine du litige
Sur la période comprise entre le 1er octobre 2006, date de prise de fonctions du requérant, et le 20 mars 2012, date à laquelle il a bénéficié d’une mesure d’évacuation sanitaire
10 En vertu d’un contrat d’une durée initiale de trois ans, le requérant a été engagé par la Commission européenne en tant qu’agent contractuel du groupe de fonctions III, conformément à l’article 3 bis, sous a), du RAA, et ce pour la période allant du 1er octobre 2006 au 30 septembre 2009. Le requérant a été affecté à la direction générale (DG) « Relations extérieures », sur un poste d’informaticien principal régional chargé du support informatique et de l’administration des serveurs pour plusieurs pays d’Afrique du Nord à la délégation de la Commission à Alger (Algérie).
11 Le 11 décembre 2007, une bombe a explosé à Alger, tuant plusieurs membres du bureau de l’Organisation des Nations unies (ONU) à Alger (ci-après l’« attentat à la bombe »). Les bâtiments dans lesquels le requérant exerçait ses fonctions auraient été endommagés lors de cet attentat.
12 Au cours du printemps 2008, il aurait été décidé d’installer un film de protection sur les fenêtres de la délégation de la Commission à Alger, mais l’installation n’aurait finalement eu lieu qu’en février 2010. Le requérant aurait constaté de graves insuffisances quant au niveau de la sécurité des locaux de la délégation, et ce dès sa prise de fonctions auprès de celle-ci.
13 Au moyen d’un avenant au contrat du requérant, signé par la Commission et l’intéressé le 17 février 2010, ce dernier a été réaffecté auprès de la délégation de la Commission à Kiev (Ukraine, ci-après la « délégation à Kiev »), et ce avec effet au 16 mars suivant. Dans le cadre de cette nouvelle affectation, le requérant était censé occuper l’un des deux postes d’informaticien principal régional responsable pour plusieurs pays d’Europe orientale.
14 Depuis l’attentat à la bombe et jusqu’à sa réaffectation à la délégation à Kiev, le requérant a dû, selon ses dires, habiter à Alger dans un logement qui ne respectait pas les normes de sécurité applicables pour les logements de fonction du personnel de délégation. Selon lui, cet épisode a occasionné chez lui un sentiment d’insécurité qui a contribué à la survenance de sa maladie psychique, diagnostiquée par la suite.
15 Le 29 juin 2010, le requérant a accepté l’offre de l’AHCC d’être engagé en vertu d’un contrat à durée indéterminée, dont l’article 6 se lit désormais comme suit : « En application de l’article 119 [du RAA], il peut être mis fin au contrat par l’[i]nstitution ou l’employé pour les motifs visés aux [a]rticles 47 à 50 bis du RAA, dans les conditions fixées dans ces [a]rticles. [...] »
16 Conformément à la décision 2010/427 du Conseil, du 26 juillet 2010, fixant l’organisation et le fonctionnement du [SEAE] (JO L 201, p. 30), le requérant a été transféré, le 1er janvier 2011, de la Commission au SEAE.
17 Le 21 janvier 2011, alors en poste à la délégation à Kiev, le requérant a pris contact avec le service médical de la Commission à Bruxelles (Belgique), responsable pour le personnel du SEAE, au sujet du fait qu’il tombait souvent malade. Le 14 avril 2011, le requérant a été examiné par le docteur De., médecin-conseil dudit service, lequel a conclu que le requérant était en bonne santé.
18 Par la suite, l’état de santé du requérant s’est dégradé et il a été absent, pour cause de maladie, respectivement, du 5 au 10 octobre 2011, du 22 novembre 2011 au 14 février 2012 et, de manière permanente, à partir du 12 mars 2012. Pendant ces périodes d’absences pour cause de maladie, le requérant a été en contact avec différents services de la Commission et du SEAE, en particulier avec la direction « Ressources humaines » du SEAE et avec le service médical de la Commission à Bruxelles. Dans le cadre de ces contacts, le requérant aurait sollicité, d’une part, des informations concernant un éventuel traitement médical et une aide à cet égard et, d’autre part, son évacuation sanitaire vers l’Allemagne, au motif que, selon lui, il existait un lien entre son état de santé actuel et les incidents survenus pendant son affectation à la délégation de la Commission à Alger, en particulier l’attentat à la bombe.
19 À cet égard, il ressort, par exemple, d’un rapport médical établi le 9 octobre 2012, à la demande du requérant, par trois praticiens de la clinique Helios à Diez (Allemagne) que, notamment, « dans un contexte de conditions de travail difficiles (harcèlement moral) et d’un attentat à la bombe[, le requérant] a développé un syndrome post-traumatique[ ; l]a tension psychique importante du [requérant] s’est, dans un premier temps, manifestée par des troubles physiques ».
20 Par décision du 15 mars 2012, le docteur Do., médecin-conseil du service médical de la Commission qui était responsable du personnel du SEAE, a autorisé l’« évacuation sanitaire de niveau deux » du requérant de Kiev à Berlin (Allemagne), à compter du 20 mars 2012, sans prévoir de date de retour. Depuis lors, le requérant n’a plus jamais repris son travail à la délégation à Kiev.
Sur les faits intervenus après l’évacuation sanitaire
21 Du 20 au 25 mars 2012, le requérant aurait séjourné à l’hôtel NH, sis Heinrich-Heine-Platz, Berlin.
22 Par un courriel du 23 avril 2012, le service du contrôle médical de la Commission (ci-après le « service du contrôle médical ») a, « sur demande de [la délégation à Kiev] », invité le requérant à rencontrer le docteur A.-G. au siège du service médical à Bruxelles. Interrogé par le requérant sur ce point, le service du contrôle médical a précisé, le 24 avril suivant, que, « [c]omme [le] médecin [du requérant avait] indiqu[é] dans [le] certificat médical [établi le 12 avril 2012] que [le] congé de maladie [était] en rapport avec [son] travail et au regard de [son] long congé de maladie, le docteur [A.-G.] demand[ait] à [le] rencontrer ». Sur cette base, le requérant a conclu que les services de la délégation à Kiev avaient informé le service médical de la Commission du contenu du certificat médical de son médecin du 12 avril 2012 et avaient ainsi divulgué à ce service médical le diagnostic de sa maladie psychique. Par la suite, sur ce dernier point, toujours le 24 avril 2012, le requérant a fait savoir au service du contrôle médical qu’il ne s’agissait pas là d’une manière correcte de traiter ses données médicales et que sa confiance dans le service médical, déjà ébranlée, ne s’en trouvait précisément pas renforcée. Le requérant ayant également fait savoir au service du contrôle médical qu’il devait se faire hospitaliser à la clinique de la Charité à Berlin le 8 mai 2012, ce service a demandé au requérant, par courriel du 24 avril 2012, de prendre contact avec le docteur A.-G. après son hospitalisation. Selon le SEAE, le requérant n’était pas joignable par téléphone le 24 avril en cause.
23 Par courriel du 24 mai 2012, le docteur Do. a rappelé au requérant, alors toujours hospitalisé à Berlin, que son évacuation sanitaire avait été autorisée pour « la raison spécifique d’un examen médical d’urgence afin de confirmer ou exclure une pathologie physique majeure qui pourrait appeler une intervention chirurgicale d’urgence ». Sur ce point, le docteur Do. a écrit au requérant ce qui suit :
« Jusqu’à présent, je n’ai pas reçu de retour sur cette question.
J’ai uniquement remarqué que vous attendez la fin de votre hospitalisation afin d’être au clair sur la durée de votre congé de maladie, lequel pourrait s’étendre jusqu’à la fin de l’année [2012].
Cela ne peut pas être lié à la pathologie pour laquelle vous avez été évacué. Cela ne peut qu’être lié à l’autre pathologie, pour laquelle vous avez demandé une évacuation sanitaire pendant des semaines sans obtenir mon autorisation.
Il est [urgent] pour moi de savoir ce qu’il en est de tout cela. »
24 Dans un courriel du 25 mai 2012 adressé à des personnes en charge de son dossier au sein de la délégation à Kiev et du service du contrôle médical, le requérant a contesté le bien-fondé de la demande du docteur Do.
25 Le 30 mai 2012, date à laquelle son hospitalisation à la clinique de la Charité aurait pris fin, le requérant a demandé au service médical de la Commission la permission de suivre un traitement ambulatoire jusqu’à la consolidation de son état, si possible à proximité de sa famille vivant en Forêt-Noire à Schönau (Allemagne). Cette demande a été réitérée le 1er juin suivant. Ces demandes n’auraient pas reçu de réponse de la part de l’administration.
26 Pendant la période allant du 30 mai au 7 juin 2012, le requérant aurait séjourné à l’hôtel NH, sis Frankfurter Allee, Berlin.
27 Par courriel du 5 juillet 2012, les services de la délégation à Kiev ont demandé au requérant de les informer de toute urgence du statut de son congé de maladie, étant donné qu’aucune absence pour maladie n’était renseignée dans son dossier dans le système informatique de gestion du personnel appelé « SysPer 2 ». Par courriel du 12 juillet suivant, le requérant a répondu qu’il était toujours en congé de maladie et qu’il serait de nouveau hospitalisé à partir de la fin du mois de juillet pour environ six semaines. Dans ce dernier courriel, le requérant n’aurait pas indiqué à l’administration son adresse à l’époque ni celle de l’hôpital où il allait séjourner incessamment.
28 Un rapport médical établi le 24 juillet 2012 par un médecin établi à Fribourg-en-Brisgau (Allemagne) mentionne une adresse du requérant à Schönau.
29 Du 25 juillet au 19 septembre 2012, le requérant a été traité à la clinique Helios à Diez. Il ressort du rapport de sortie de cette clinique, daté du 9 octobre 2012, qu’un trouble post-traumatique a pu être confirmé en lien avec l’attentat à la bombe et des conditions de travail pénibles ainsi qu’un harcèlement moral ressenti par le requérant en 2009 sur son lieu de travail.
30 Par courriel du 21 septembre 2012, le service du contrôle médical a convoqué le requérant pour un rendez-vous avec le docteur A.-G. fixé au 28 septembre suivant. Par courriel du même jour, le requérant a demandé au service du contrôle médical de l’informer plus en détail de l’objet de ce rendez-vous. Par courriel du 26 septembre 2012, le service du contrôle médical a communiqué au requérant la décision de la Commission, du 28 avril 2004, portant création des dispositions d’application en matière de congés, et a maintenu le rendez-vous prévu pour le 28 septembre suivant. Par courriel du même 26 septembre 2012 adressé au service du contrôle médical, le requérant a fait état des raisons pour lesquelles il refusait de se faire examiner par le service du contrôle médical. Le 23 octobre 2012, le médecin-conseil chargé du contrôle des absences pour cause de maladie a fait savoir au requérant que, depuis le 28 septembre 2012, après qu’il avait refusé de rencontrer le docteur A.-G., son absence était injustifiée au sens des dispositions statutaires. À cette occasion, le requérant a été invité à rencontrer le docteur A.-G. le 26 octobre 2012. Ce rendez-vous n’a finalement pas eu lieu.
31 Dans une note datée du 4 octobre 2012, que le requérant aurait adressée à la délégation à Kiev, il aurait mentionné vivre à Schönau, mais sans fournir d’adresse plus précise.
32 Le 22 octobre 2012, le requérant a demandé que son état de santé soit reconnu comme une maladie professionnelle par l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission, tout en demandant également l’ouverture d’une enquête de l’Office d’investigation et de discipline de la Commission (IDOC) sur de prétendus incidents en lien avec son affectation auprès de la délégation à Kiev.
33 Le 8 novembre 2012, le requérant a rencontré le docteur A.-G. du service médical de la Commission. Celui-ci a certifié que l’absence pour maladie du requérant était à considérer comme justifiée jusqu’au 30 novembre 2012 et qu’il y aurait lieu de le revoir trois mois plus tard.
34 Le 1er janvier 2013, le requérant a déménagé à Berlin, ce dont il aurait informé le PMO.
35 Par courriel du 8 février 2013, le docteur De. a pris contact avec le requérant pour étudier l’opportunité d’ouvrir une procédure d’invalidité le concernant. Par courriel du 11 février suivant, le requérant lui a communiqué le numéro de téléphone auquel il pouvait être joint. Le 14 février 2013, le SEAE a engagé une procédure d’invalidité à l’égard du requérant. Par courriel du 19 février 2013, le docteur De. a fait savoir au requérant qu’il n’avait pas réussi à le contacter par téléphone. Par courriel du 20 février suivant, soulignant que, par principe, il ne répondait à aucun appel téléphonique dont le numéro était masqué, le requérant a informé le docteur De. de son adresse à Berlin et lui a fourni un numéro de téléphone fixe.
36 Le 2 mars 2013, dans une première demande, introduite au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, le requérant a demandé au SEAE de :
« – [m]ener une enquête approfondie sur la situation ayant conduit à la révélation d’informations médicales sensibles [le] concernant par M. [H. du SEAE] ;
– [m]ener une enquête approfondie sur la situation au sein du service médical […] en 2011/2012, qui ne [lui] a laissé d’autre possibilité que de [s]’adresser à du personnel non médical du SEAE concernant [s]a situation psychologique difficile ;
– [e]ffacer et supprimer de tout ordinateur, fichier, serveur ou système de sauvegarde des membres du personnel non médical du SEAE toute information médicale [le] concernant ;
– [a]dopter des mesures disciplinaires suffisantes à l’égard de M. [H.] pour avoir divulgué des informations médicales sensibles [le] concernant ;
– [a]dopter des mesures disciplinaires suffisantes à l’égard des membres du personnel responsables de la situation au sein du service médical […] en 2011/2012, qui ne [lui] a laissé d’autre possibilité que de [s’]adresser à du personnel non médical du SEAE concernant [s]a situation psychologique difficile ;
[...] »
37 Le 3 mars 2013, dans une deuxième demande, présentée au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, le requérant a demandé au SEAE de :
« – [m]ener une enquête approfondie sur la situation ayant conduit à l’utilisation abusive des coordonnées de la personne à contacter en cas d’urgence qu[’il] avai[t] fournies et à l’intrusion dans [s]a vie privée de M. [H. du SEAE] ;
– [a]dopter des mesures disciplinaires suffisantes à l’égard de M. [H.] pour avoir utilisé de façon abusive les coordonnées de la personne à contacter en cas d’urgence qu[’il] avai[t] fournies et pour avoir fait intrusion dans [s]a vie privée ;
[...] »
38 Toujours le 3 mars 2013, le requérant a introduit une troisième demande, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, portant de nouveau sur l’organisation d’une enquête et l’adoption de mesures disciplinaires visant M. H. du SEAE.
39 Le 10 mars 2013, le requérant a demandé au PMO de prendre note de sa nouvelle adresse postale à Berlin, ce que le PMO a fait le lendemain.
40 Le 20 mars 2013, le requérant a présenté une quatrième demande, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, préconisant à l’AHCC d’entreprendre les actions suivantes :
« – [m]ener une enquête approfondie sur les incidents survenus à la [d]élégation de la Commission [...] en Algérie [entre] 2006 [et] 2010 ;
– [a]dopter des mesures disciplinaires sévères à l’égard des membres du personnel responsables des incidents susvisés ;
[...] »
41 Enfin, le 24 mars 2013, le requérant a présenté une cinquième demande, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, invitant l’AHCC à :
« – [m]ener une enquête approfondie sur la non-assistance à personne en danger [et/ou sur la] mise en danger de [s]a santé et de [s]a vie par le service médical du SEAE et de la C[ommission] en 2011/2012 alors qu[ʼil] travaillai[t] à la [d]élégation [à Kiev] ;
– [a]dopter des mesures disciplinaires sévères à l’égard des membres du personnel responsables ;
[...] »
42 Par la suite, le requérant a, en lien avec chacune des cinq demandes exposées précédemment, introduit, respectivement les 16 et 18 août 2013, cinq réclamations contre les décisions implicites de rejet de ces demandes intervenues à l’expiration, pour chacune d’elles, du délai de quatre mois visé à l’article 90, paragraphe 1, troisième phrase, du statut.
43 Le 29 mai 2013, le requérant a notamment informé le docteur K., médecin du service médical nouvellement en charge de son dossier, de son adresse à Berlin.
44 Le 29 juillet 2013, la Commission a informé le requérant que les événements déclarés dans sa demande du 22 octobre 2012 pourraient être reconnus comme ayant été la cause d’une maladie professionnelle au sens de l’article 73 du statut.
45 Le 14 novembre 2013, le SEAE a, en se basant sur une note analytique de l’IDOC du 14 octobre précédent, informé le requérant que rien ne justifiait l’ouverture des enquêtes qu’il avait demandées. En conséquence, le 25 novembre suivant, le SEAE a informé le requérant que les cinq réclamations qu’il avait présentées les 16 et 18 août 2013 étaient devenues sans objet. Le requérant n’a pas introduit de réclamation à l’encontre de cette dernière communication ni de recours devant le Tribunal en vertu de l’article 270 TFUE.
46 Par lettre du 29 janvier 2014, le directeur de la direction « Ressources humaines » du SEAE, agissant en qualité d’AHCC, a décidé de résilier le contrat d’engagement du requérant conformément à l’article 47, sous c), i), et à l’article 119 du RAA (ci-après la « décision attaquée »). Dans cette décision, l’AHCC justifiait cette mesure en invoquant les motifs suivants :
« La raison de la résiliation de votre contrat est une perte sérieuse de confiance résultant de votre attitude. Je me réfère au fait que vous avez refusé de vous soumettre aux obligations résultant du statut [...] et du RAA :
– article 20 du [statut] et, par analogie, pour les [agents contractuels,] articles 11 et 81 du RAA ;
‘[Le fonctionnaire] informe l’autorité investie du pouvoir de nomination de son adresse et l’avise immédiatement de tout changement de celle-ci.’
– Article 59 du [statut] et, par analogie, pour les [agents contractuels,] articles 16 et 91 du RAA :
‘L’intéressé doit aviser [...] son institution [du] lieu où il se trouve.’
En raison de [votre] manque de coopération, le SEAE et le service médical de la Commission [...] ont rencontré beaucoup de difficultés pour vous contacter.
Nous nous référons également à votre manque de coopération dans le cadre de la procédure d’invalidité [...]
Votre licenciement doit aussi être compris dans le contexte difficile de recrutement et du support informatique de la [d]élégation [à Kiev]. En conséquence, votre licenciement a également été décidé dans l’intérêt du service. »
47 Du 6 janvier au 28 février 2014, le requérant a suivi un traitement stationnaire dans un hôpital à Berlin.
48 Le 27 février 2014, la commission d’invalidité chargée du cas du requérant a conclu que ce dernier était en état de travailler et pouvait s’acquitter de ses tâches.
49 Le 29 avril 2014, le requérant a, sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut, introduit une réclamation à l’encontre de la décision attaquée. À l’appui de cette réclamation, il invoquait, dans une première partie, le non-respect de l’obligation de motivation par l’AHCC ; la violation du principe de proportionnalité en ce que l’AHCC aurait dû donner la priorité à une procédure disciplinaire ; la violation du devoir de sollicitude ; l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation et d’un détournement de pouvoir ainsi que l’absence de prise en compte, par la décision attaquée, des droits du requérant au titre des articles 30 et 41 de la Charte. Dans une seconde partie, le requérant contestait, en premier lieu, avoir manqué aux obligations lui imposant de communiquer son adresse. Il expliquait que le service médical connaissait son adresse à Berlin depuis le 31 janvier 2013 et la commission d’invalidité depuis le 20 février 2013. De plus, son adresse à Berlin avait été utilisée par lui-même dans le cadre de différentes réclamations introduites en mars 2013. Il précisait que, s’agissant de son absence de réaction aux différentes lettres du SEAE, « [c]ela [tenait] plutôt au fait qu[’il] a[vait] dû réduire quelque peu [sa] communication avec le SEAE en partie en raison de [sa] maladie et aussi sur le conseil de [son] médecin, afin de ne pas mettre inutilement en danger l’avancement progressif de [sa] guérison ». Il observait qu’il « a[vait] été joignable à tout moment par le SEAE, par le service médical et pendant la procédure d’invalidité ». Enfin, il critiquait le SEAE pour ne pas avoir établi qu’il y avait eu des tentatives de contact qui avaient échoué. En deuxième lieu, il critiquait la généralité des motifs relatifs à l’intérêt du service invoqués au soutien du licenciement dans la décision attaquée. En troisième lieu, il faisait valoir que le SEAE aurait dû envisager une mesure moins sévère qu’un licenciement afin de respecter le principe de proportionnalité et son devoir de sollicitude.
50 Par décision du 27 août 2014, notifiée au requérant le 1er septembre suivant, le directeur exécutif de la direction « Administration et finances » du SEAE, agissant en qualité d’AHCC, a rejeté la réclamation (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »). S’agissant plus particulièrement du motif relatif à la perte de confiance liée au comportement du requérant et à la situation factuelle sur laquelle était fondée ce motif, l’AHCC observait, en énumérant plusieurs éléments factuels concrets, qu’il était constant que, au regard de ses obligations statutaires, le requérant avait omis de tenir l’administration informée, notamment le service des ressources humaines de la délégation à Kiev, en ne lui fournissant pas en temps utile chacune des adresses auxquelles il avait successivement séjourné au cours des années 2012 et 2013.
Conclusions des parties et procédure
51 Dans la requête, le requérant demandait initialement, en substance, au Tribunal :
– d’annuler la décision attaquée ;
– par voie de conséquence :
– à titre principal, d’enjoindre au SEAE de le réintégrer et de condamner le SEAE à réparer son préjudice matériel, correspondant aux arriérés de salaires et aux frais supportés par lui du fait du comportement illégal du SEAE ;
– de l’indemniser du préjudice moral subi en lui octroyant un montant devant être fixé ex æquo et bono ;
– à titre subsidiaire, et pour le cas où sa réintégration ne serait pas possible, de condamner le SEAE au versement d’un montant correspondant à la différence entre les salaires qu’il aurait perçus si son contrat n’avait pas été résilié et les salaires et prestations qu’il a effectivement perçus ;
– de condamner le SEAE aux dépens.
52 Dans son mémoire en défense, le SEAE demandait initialement, en substance, au Tribunal :
– de rejeter le recours comme non fondé ;
– de condamner le requérant aux dépens.
53 Par décision du 14 juillet 2015, le Tribunal (première chambre) a chargé le juge rapporteur d’explorer les possibilités de régler le litige par la voie d’un règlement amiable, conformément à l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 90, paragraphes 1 et 2, du règlement de procédure.
54 En l’absence d’accord des deux parties dans le cadre du règlement amiable, le juge rapporteur a décidé de suspendre, à ce stade, la poursuite des discussions informelles et de reprendre la procédure judiciaire.
55 Le 9 septembre 2015, le requérant a soumis de nouvelles offres de preuves à l’égard desquelles le SEAE a présenté ses observations le 23 septembre suivant.
56 En vue de la tenue de l’audience, les parties ont été invitées, au titre de l’article 69 du règlement de procédure, à répondre par écrit à des questions du Tribunal, portant notamment sur le caractère d’ordre public du moyen tiré de la violation du droit d’être entendu et sur les raisons pour lesquelles le requérant n’avait pas formellement soulevé un tel moyen dans sa requête. Les parties ont dûment déféré à ces mesures d’organisation de la procédure le 19 octobre 2015 et ont pu prendre position sur leurs réponses respectives lors de l’audience. Par ailleurs, au regard du caractère confus de sa requête, le requérant a été prié par le Tribunal d’exposer de manière claire les différents moyens qu’il entendait faire valoir en l’espèce.
57 À l’issue de l’audience, le Tribunal a constaté l’échec de la tentative de règlement amiable et le président de la première chambre du Tribunal a clôturé la procédure orale.
En droit
Sur l’objet du recours
58 Il convient d’observer que le requérant n’a pas formellement présenté de conclusions en annulation de la décision de rejet de la réclamation.
59 Cependant, en l’espèce, par la décision de rejet de la réclamation, l’AHCC a été amenée à compléter la motivation de la décision attaquée, notamment en répondant aux griefs que le requérant avait avancés dans sa réclamation. Ainsi, compte tenu du caractère évolutif de la procédure précontentieuse, la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation doit également être prise en considération pour l’examen de la légalité de l’acte initial faisant grief, à savoir la décision attaquée, cette motivation étant censée coïncider avec ce dernier acte (arrêts du 13 juin 2012, Mocová/Commission, F‑41/11, EU:F:2012:82, point 21, et du 15 octobre 2014, De Bruin/Parlement, F‑15/14, EU:F:2014:236, point 35).
60 Partant, le présent recours doit être considéré comme étant dirigé contre la décision attaquée, telle que complétée, en dernier lieu, par la décision de rejet de la réclamation.
Sur les conclusions tendant à la réintégration du requérant au sein du SEAE
61 Selon une jurisprudence constante, il n’incombe pas au Tribunal, dans le cadre d’un recours introduit au titre de l’article 91 du statut, d’adresser des injonctions aux institutions de l’Union (arrêts du 14 septembre 2010, Da Silva Pinto Branco/Cour de justice, F‑52/09, EU:F:2010:98, point 31, et du 6 novembre 2014, DH/Parlement, F‑4/14, EU:F:2014:241, point 41, et la jurisprudence citée).
62 Par conséquent, pour autant qu’elles visent la réintégration du requérant au sein du SEAE, les conclusions du requérant doivent être d’emblée rejetées comme irrecevables.
Sur les conclusions en annulation
Sur l’identification des moyens
63 Selon une jurisprudence constante concernant l’article 21 du statut de la Cour, disposition applicable devant le Tribunal en vertu de l’article 7 de l’annexe I du statut de la Cour, la seule énonciation abstraite des moyens dans la requête ne répond pas aux exigences de ladite disposition. En effet, les termes « exposé sommaire des moyens », employés dans le texte de l’article 21 du statut de la Cour, signifient que la requête doit expliciter en quoi consistent les moyens sur lesquels le recours est fondé (arrêts du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI, T‑618/11 P, EU:T:2013:479, point 57 ; du 15 octobre 2014, De Bruin/Parlement, F‑15/14, EU:F:2014:236, point 39, ainsi que ordonnance du 9 juillet 2015, De Almeida Pereira/Eurojust, F‑142/14, EU:F:2015:83, point 20).
64 En l’espèce, le Tribunal a pu être en mesure d’identifier, aux fins de l’audience, deux moyens explicitement invoqués dans la requête. Le premier est tiré d’erreurs manifestes d’appréciation en ce qui concerne le reproche formulé par l’AHCC, dans la décision attaquée, relatif à un manque de coopération du requérant et à une communication insuffisante au SEAE de ses différents lieux de séjour successifs et de ses coordonnées téléphoniques ou postales permettant d’entrer en contact avec lui. Le second moyen est tiré d’une violation par le SEAE de son devoir de sollicitude ainsi que des principes de bonne administration et de proportionnalité.
65 Par ailleurs, dans sa réponse du 19 octobre 2015 aux questions posées par le Tribunal à titre de mesures d’organisation de la procédure, le requérant a indiqué que, « [à] titre préventif, [il] se permet[tait] encore une fois d’invoquer expressément la violation de son droit à être entendu résultant de [l’article 41, paragraphe 1, lu en combinaison avec] l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, au motif qu’il n’a[vait] pas été entendu avant la résiliation de son contrat de travail ».
66 Lors de l’audience, le requérant a concédé, d’une part, qu’il avait uniquement évoqué la violation de son droit d’être entendu de manière abstraite au point 96 de sa requête, en l’occurrence en faisant référence à une violation du droit à une bonne administration qu’il avait déjà soulevée dans sa réclamation, et, d’autre part, qu’il n’avait développé aucun argument concret à cet égard, ce qui ne respectait pas la jurisprudence mentionnée au point 63 du présent arrêt concernant l’article 21 du statut de la Cour. Cependant, le requérant a réitéré qu’il entendait soulever le moyen tiré de la violation de son droit d’être entendu, en soulignant que ce droit est une composante du « [d]roit à une bonne administration » faisant l’objet de l’article 41 de la Charte et que, précisément, il avait expressément fait référence, tant dans sa réclamation que dans sa requête, à la violation dudit droit à une bonne administration.
67 À cet égard, même s’il devait être considéré que, dans sa réponse du 19 octobre 2015 aux mesures d’organisation de la procédure, le requérant a soulevé un moyen nouveau par rapport à ceux initialement mentionnés dans sa requête et tiré de la violation du droit d’être entendu prévu par l’article 41 de la Charte, pareil moyen serait recevable, même s’il a finalement été inspiré au requérant par la teneur des questions pour réponses écrites posées par le Tribunal à titre de mesures d’organisation de la procédure. En effet, ainsi que l’a déjà jugé le Tribunal, le respect des droits de la défense en matière statutaire et, plus spécifiquement, le droit d’être entendu au sujet d’éléments susceptibles d’être retenus à la charge de l’agent contractuel pour fonder une décision lui faisant grief constituent une formalité substantielle dont la violation peut être soulevée d’office (arrêt du 25 juin 2015, EE/Commission, F‑55/14, EU:F:2015:66, point 35), de sorte que le requérant pouvait invoquer ce principe à ce stade de la procédure (voir arrêt du 12 décembre 2012, Cerafogli/BCE, F‑43/10, EU:F:2012:184, point 89, non annulé sur ce point par l’arrêt du 23 septembre 2015, Cerafogli/BCE, T‑114/13 P, EU:T:2015:678).
68 Étant donné de surcroît que, d’une part, le SEAE a dûment été mis en mesure de prendre position à l’égard du moyen tiré de la violation du droit d’être entendu, tant dans sa réponse du 19 octobre 2015 aux mesures d’organisation de la procédure que lors de l’audience, et que, d’autre part, le SEAE n’a pas mis en cause la recevabilité de celui-ci, le Tribunal considère que ce moyen, autonome par rapport aux différentes violations énumérées pêle-mêle dans le second moyen figurant dans la requête, est recevable et doit être examiné en premier lieu comme étant le troisième moyen invoqué par le requérant.
Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du droit d’être entendu visé à l’article 41 de la Charte
– Arguments des parties
69 Le requérant a fait explicitement valoir, dans sa réponse du 19 octobre 2015 aux mesures d’organisation de la procédure et lors de l’audience, qu’il n’a en aucune manière eu la possibilité de prendre position sur les éléments qui ont été retenus à son égard par l’AHCC pour justifier sa décision de le licencier. Même si, dans sa réclamation, il a pu faire valoir ses arguments au sujet des griefs invoqués à l’appui de la décision attaquée, il estime qu’il n’a pas été en mesure d’influencer le processus décisionnel de l’AHCC et, en substance, que la mise en œuvre de l’article 41 de la Charte dans le contexte de la phase précontentieuse implique que l’intéressé puisse prendre position de manière complète, exigeant qu’il puisse faire valoir, avant l’adoption de la décision initiale, ses arguments à l’encontre des griefs initiaux de l’administration et, ultérieurement, dans le cadre de la réclamation, à l’égard de ceux retenus par l’AHCC dans la décision initiale.
70 Le SEAE ne conteste pas que l’AHCC n’a pas entendu le requérant avant l’adoption de la décision attaquée et, interrogé lors de l’audience sur le fait que l’AHCC n’a pas eu de difficulté logistique pour communiquer la décision attaquée au requérant, le SEAE a concédé qu’elle aurait pu aisément entrer en contact avec lui pour l’entendre avant de le licencier. Cependant, il a fait valoir que, au regard des circonstances de l’espèce, une audition préalable du requérant n’aurait pas produit d’éléments qui auraient pu conduire le SEAE à adopter une décision différente. Ainsi, dans l’hypothèse où le Tribunal devrait annuler la décision attaquée, le SEAE a souligné que l’AHCC prendrait, selon toute vraisemblance, une nouvelle décision de licenciement dans les mêmes termes après avoir entendu le requérant.
– Appréciation du Tribunal
71 À titre liminaire, il convient de rappeler que les droits de la défense, tels que désormais consacrés par l’article 41 de la Charte, lequel, selon le juge de l’Union, est d’application générale (arrêt du 11 septembre 2013, L/Parlement, T‑317/10 P, EU:T:2013:413, point 81), recouvrent, tout en étant plus étendus, le droit procédural, prévu au paragraphe 2, sous a), dudit article, de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son égard (arrêt du 25 juin 2015, EE/Commission, F‑55/14, EU:F:2015:66, point 37, et la jurisprudence citée).
72 En l’espèce, il est incontestable que la décision attaquée a fait grief au requérant, d’autant plus qu’il s’agit d’une décision de licenciement, à savoir l’une des mesures administratives qui est susceptible d’affecter le plus sévèrement un agent (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2014, Tzikas/AFE, F‑120/13, EU:F:2014:197, point 61, et la jurisprudence citée), et qu’une telle décision ne pouvait être prise qu’après que le requérant avait été mis en mesure de faire utilement connaître son point de vue au sujet du projet de décision de licenciement, dans le cadre d’un échange oral et/ou écrit initié par l’AHCC et dont la preuve incombe à celle-ci (arrêt du 3 juin 2015, BP/FRA, T‑658/13 P, EU:T:2015:356, point 56).
73 Certes, le Tribunal ne saurait procéder à l’annulation d’une décision de licenciement pour violation du droit d’être entendu lorsque l’absence d’audition est imputable à l’intéressé lui-même. En effet, l’AHCC n’est pas tenue de repousser indéfiniment l’adoption d’une décision de licenciement lorsqu’elle se trouve dans une situation d’impossibilité d’entrer en contact avec l’intéressé (voir, s’agissant d’une sanction disciplinaire, arrêt du 18 juin 2015, CX/Commission, F‑5/14, EU:F:2015:61, point 64, faisant l’objet d’un pourvoi devant le Tribunal de l’Union européenne, affaire T‑493/15 P).
74 Cependant, en l’espèce, ainsi que l’a concédé le SEAE lors de l’audience, l’AHCC n’a eu aucune difficulté à notifier la décision attaquée au requérant, de sorte que, même si celui-ci était en congé de maladie et que, par le passé, l’AHCC n’avait pas nécessairement eu connaissance de ses différents lieux de résidence et avait ainsi eu des difficultés à communiquer par écrit ou téléphoniquement avec l’intéressé, il lui était relativement aisé de s’acquitter de ses obligations résultant du principe de bonne administration en informant le requérant par écrit des motifs pour lesquels elle avait l’intention de le licencier et en lui donnant la possibilité de prendre position à cet égard, dans un délai raisonnable, par écrit et/ou oralement.
75 Or, dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal ne peut que constater que, en violation manifeste de l’article 41 de la Charte et alors même que la mise en œuvre du droit d’être entendu ne présente aucune difficulté particulière pour une administration normalement diligente et soucieuse de faire accepter par leurs destinataires les décisions qu’elle adopte, l’AHCC n’a nullement pris la peine d’entendre le requérant avant de le licencier et ne semble même pas avoir envisagé de le faire.
76 Interrogé par le Tribunal, lors de l’audience, sur le fait que la présente affaire n’était pas la première affaire portée devant le Tribunal mettant en cause le non-respect patent de l’article 41 de la Charte de sa part, le SEAE a expliqué que cela tenait au fait que, en tant que structure administrative nouvelle, il n’avait pas encore nécessairement formalisé, à l’époque, les processus décisionnels internes au regard de la jurisprudence récente, parfois divergente, du juge de l’Union portant sur cette disposition.
77 Cependant, étant donné que, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte, les dispositions de la Charte s’adressent directement aux institutions, organes ou organismes de l’Union, aucune de ces entités ne saurait exciper de situations internes propres à son administration, telles que des difficultés dans son processus décisionnel, y compris celles liées à la résistance de certains de ses services, pour justifier le non-respect d’obligations résultant de normes du droit primaire de l’Union (voir, par analogie, arrêt du 4 mars 2010, Commission/Italie, C‑297/08, EU:C:2010:115, point 83, et la jurisprudence citée), d’autant plus que les exigences résultant de l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte ne présentent aucune difficulté particulière de mise en œuvre pour une administration diligente et que, de surcroît, l’audition de l’intéressé est une garantie minimale lorsque l’administration agit, comme en l’espèce, dans un domaine où elle dispose d’un large pouvoir d’appréciation.
78 Quant à l’argument du SEAE, présenté dans sa réponse du 19 octobre 2015 aux mesures d’organisation de la procédure, selon lequel l’AHCC aurait adopté une décision identique, même après avoir entendu le requérant, il suffit de constater que, dans les circonstances de l’espèce, d’une part, ainsi que l’a finalement concédé le SEAE lors de l’audience, s’il avait été entendu, le requérant aurait pu s’expliquer sur les difficultés de communication de ses lieux de résidence ainsi que sur son état de santé, ce qui aurait pu avoir une influence sur le contenu de la décision attaquée. En d’autres termes, il ne saurait être exclu que la conclusion de l’AHCC de licencier le requérant aurait pu être différente si ce dernier avait été mis en mesure de faire utilement connaître son point de vue (voir arrêt du 25 juin 2015, EE/Commission, F‑55/14, EU:F:2015:66, point 40).
79 D’autre part, même s’il n’est certes pas exclu que, comme le soutient le SEAE, l’AHCC adopte finalement, après avoir entendu le requérant en exécution du présent arrêt, une décision identique à la décision attaquée, admettre un tel argument de la part du SEAE, consistant à spéculer sur son comportement administratif à venir, ne reviendrait à rien d’autre, à ce stade de la procédure, qu’à vider de sa substance le droit fondamental d’être entendu consacré à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, dès lors que le contenu même de ce droit implique que l’intéressé ait eu la possibilité d’influencer le processus décisionnel en cause (voir arrêts du 14 septembre 2011, Marcuccio/Commission, T‑236/02, EU:T:2011:465, point 115, et du 14 mai 2014, Delcroix/SEAE, F‑11/13, EU:F:2014:91, point 44), en l’occurrence déjà au stade de l’adoption de la décision initiale, à savoir la décision attaquée, et non uniquement lors de l’introduction d’une réclamation en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut (voir, en ce sens, arrêt du 8 octobre 2015, DD/FRA, F‑106/13 et F‑25/14, EU:F:2015:118, points 97 et 98, faisant l’objet d’un pourvoi devant le Tribunal de l’Union européenne, affaire T‑742/15 P).
80 Partant, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur les deux autres moyens d’annulation soulevés, il convient d’annuler la décision attaquée pour violation du droit d’être entendu visé à l’article 41 de la Charte comme l’une des composantes du droit à une bonne administration, étant rappelé que, en tout état de cause, aux termes de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, « [t]oute limitation de l’exercice des droits et libertés reconnus par [celle-ci] doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel desdits droits et libertés [et que, d]ans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées [au droit d’être entendu] que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui ».
Sur les conclusions indemnitaires
Arguments des parties
81 Le requérant demande en substance que le SEAE soit condamné à réparer le préjudice moral qu’il aurait subi du fait que sa santé physique et psychique a été affectée par le comportement illégal du SEAE, ce qui serait confirmé par les certificats médicaux qu’il a produits. Un montant minimal de 5 000 euros serait, selon lui, approprié à cet égard.
82 Tout en indiquant qu’il est disposé à reprendre ses fonctions, le requérant revendique également un préjudice matériel dont le calcul devrait, à titre principal, être fait en comparant sa situation financière résultant de la rupture de facto de la relation de travail à la date du 31 août 2014 et la situation financière qui aurait été la sienne si le SEAE n’avait pas illégalement mis fin à la relation de travail, mais l’avait employé jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de départ à la retraite.
83 Invité par le Tribunal à chiffrer ses prétentions indemnitaires, le requérant a, dans sa réponse du 19 octobre 2015 aux mesures d’organisation de la procédure, renvoyé aux conclusions indemnitaires initiales de sa requête, énoncées au point 51 du présent arrêt, en précisant que sa demande indemnitaire devait se comprendre comme impliquant que, à la suite du prononcé de l’arrêt d’annulation, le requérant déclarerait annuellement le montant des prestations ou salaires dont il bénéficierait et que le SEAE devrait, pendant une durée indéterminée, lui verser la différence par rapport à son traitement d’agent contractuel. À titre subsidiaire, il a toutefois revendiqué un montant forfaitaire correspondant à 20 années de traitement d’agent contractuel, soit 680 880 euros, tout en concédant que la demande indemnitaire principale ne pouvait pas être chiffrée. À titre encore plus subsidiaire, il estime que le SEAE devrait être condamné à lui verser une somme correspondant à 48 mois de traitement d’agent contractuel, soit 136 176 euros, dans le cas où une procédure de pourvoi contre l’arrêt à intervenir le conduirait jusqu’à la fin de l’année 2018.
84 Cependant, toujours dans sa réponse du 19 octobre 2015 aux mesures d’organisation de la procédure, le requérant a ajouté qu’il conviendrait, en cas d’annulation de la décision attaquée, de considérer que son contrat de travail aurait continué à courir du 1er septembre 2014 à la date à laquelle le SEAE adopterait une nouvelle décision concernant la résiliation ou non de son contrat de travail. Ainsi, le SEAE serait tenu de lui payer rétroactivement ses traitements d’agent contractuel durant cette période ou, à tout le moins, jusqu’à la date de prononcé de l’arrêt à intervenir.
85 Initialement, le SEAE concluait au rejet des conclusions indemnitaires en ce que, selon lui, les conclusions en annulation qui leur sont étroitement liées devaient également être rejetées. Cependant, à l’instar du requérant, le SEAE a ultérieurement développé sa position dans sa réponse du 19 octobre 2015 aux mesures d’organisation de la procédure à l’aune de la teneur des questions posées par le Tribunal. Ainsi, il conclut désormais au caractère irrecevable des conclusions indemnitaires au motif que le requérant n’a pas, dans sa requête, chiffré ou quantifié le préjudice matériel ou moral qu’il prétend avoir subi.
86 Par ailleurs, le requérant aurait certes fourni des certificats médicaux. Cependant, il ressortirait des éléments factuels du dossier que le requérant lie son état de santé aux évènements survenus durant son activité auprès de la délégation de la Commission à Alger. Or, le comportement prétendument fautif du SEAE qui justifierait, selon le requérant, la réparation de son préjudice ne tiendrait pas à ces évènements, lesquels ne sont pas l’objet du recours, mais à la décision de licenciement, intervenue postérieurement. Ceci justifierait, en tout état de cause, un rejet desdites conclusions comme étant non fondées. En réalité, les arguments du requérant se fonderaient essentiellement sur une supposition hypothétique et erronée selon laquelle le SEAE aurait continué de l’employer jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de départ à la retraite.
Appréciation du Tribunal
– Sur le préjudice matériel
87 Selon une jurisprudence constante, lorsqu’elle présente des conclusions indemnitaires, la partie requérante doit, en principe, préciser dans la requête l’étendue exacte du préjudice et chiffrer, autant que possible, le montant de la réparation demandée. Ainsi, ce n’est que dans certains cas particuliers, notamment lorsqu’il est difficile de chiffrer le préjudice allégué, que des conclusions non chiffrées peuvent être recevables (voir arrêt du 23 septembre 2004, Hectors/Parlement, C‑150/03 P, EU:C:2004:555, point 62, et la jurisprudence citée).
88 En l’espèce, bien que le requérant n’a pas établi, ni même allégué, l’existence de circonstances particulières justifiant l’omission de chiffrer, dans la requête, le chef de préjudice matériel, le Tribunal considère que, au regard des précisions finalement obtenues de lui dans sa réponse du 19 octobre 2015 aux mesures d’organisation de la procédure, elles peuvent être considérées comme recevables.
89 Cela étant, force est de constater que la décision attaquée doit être annulée parce que l’AHCC n’a pas entendu le requérant avant de décider de le licencier. Or, selon une jurisprudence constante, pour se conformer à l’obligation que fait peser sur elle l’article 266 TFUE, il appartient à l’institution dont émane un acte annulé par le juge de l’Union de déterminer quelles sont les mesures requises pour exécuter l’arrêt d’annulation en exerçant le pouvoir d’appréciation dont elle dispose à cet effet dans le respect aussi bien du dispositif et des motifs de l’arrêt qu’elle est tenue d’exécuter que des dispositions du droit de l’Union applicables (voir arrêts du 9 août 1994, Parlement/Meskens, C‑412/92 P, EU:C:1994:308, points 28 et 30 ; du 8 octobre 1992, Meskens/Parlement, T‑84/91, EU:T:1992:103, point 80, et du 6 octobre 2015, CH/Parlement, F‑132/14, EU:F:2015:115, point 82).
90 Il convient également de rappeler que l’annulation d’un acte par le juge de l’Union a pour effet d’éliminer rétroactivement cet acte de l’ordre juridique et que, lorsque l’acte annulé a déjà été exécuté, l’anéantissement de ses effets impose de rétablir la situation juridique dans laquelle la partie requérante se trouvait antérieurement à l’adoption de cet acte. À cette fin, le SEAE sera ainsi tenu, en application de l’article 266 TFUE, de prendre les mesures que comporte l’exécution du présent arrêt en se plaçant à la date à laquelle la décision attaquée, annulée par ledit arrêt, a été prise (arrêt du 6 octobre 2015, CH/Parlement, F‑132/14, EU:F:2015:115, points 60 et 61).
91 Concrètement, le SEAE pourrait être amené, premièrement, à renoncer à licencier le requérant et à procéder à sa réintégration à la date du 1er septembre 2014. Cependant, ainsi que l’a lui-même admis le requérant, même si le SEAE devait décider de lui payer rétroactivement des traitements en qualité d’agent contractuel entre cette date du 1er septembre 2014 et la date d’adoption de la nouvelle décision de l’AHCC procédant à sa réintégration, le SEAE pourrait décider de faire application de l’article 59, paragraphe 3, et de l’article 60, premier alinéa, troisième phrase, du statut. Deuxièmement, il ne saurait être exclu, sauf à méconnaître le large pouvoir d’appréciation que détient l’AHCC en la matière, que le SEAE estime, après avoir entendu le requérant et après un réexamen complet et circonstancié du dossier, pouvoir adopter à nouveau une décision procédant à son licenciement dans les mêmes termes que ceux de la décision attaquée annulée (voir arrêt du 26 juin 2013, BU/EMA, F‑135/11, F‑51/12 et F‑110/12, EU:F:2013:93, points 64 et 65).
92 À cet égard, il doit être souligné que le Tribunal ne saurait anticiper les suites que chacune des parties pourrait réserver au présent arrêt, notamment quant à la manière dont le SEAE remplira l’obligation, découlant de l’article 266 TFUE, de prendre les mesures requises pour exécuter l’arrêt, et que, en tout état de cause, le Tribunal ne peut pas exercer en l’espèce sa compétence de pleine juridiction en matière pécuniaire puisque l’intérêt du service ou des tiers ne faisait pas obstacle à l’annulation de la décision attaquée et que le requérant n’a pas déclaré ne pas pouvoir tirer avantage de l’exécution des obligations découlant de cette annulation (voir arrêt du 16 septembre 2015, EMA/Drakeford, T‑231/14 P, EU:T:2015:639, point 52).
93 Par ailleurs, il ne saurait être également exclu, troisièmement, que, à la suite de l’annulation de la décision attaquée, l’AHCC décide d’établir un dialogue avec le requérant en vue de chercher à parvenir à un accord global tendant à mettre fin à son engagement tout en lui fournissant une compensation équitable de l’illégalité dont il a été victime, éventuellement en s’inspirant des pourparlers et concessions déjà faites dans le cadre de la tentative de règlement amiable initiée par le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2015, CH/Parlement, F‑132/14, EU:F:2015:115, point 82, et la jurisprudence citée).
94 Eu égard aux considérations qui précèdent, le Tribunal ne saurait, à ce stade et dans le cadre du présent recours, condamner le SEAE à indemniser le requérant d’une perte de rémunération consécutive à la résiliation illégale et prétendument prématurée de son contrat d’agent contractuel (voir arrêt du 26 juin 2013, BU/EMA, F‑135/11, F‑51/12 et F‑110/12, EU:F:2013:93, point 66).
95 Il s’ensuit que les conclusions indemnitaires, en ce qu’elles visent un préjudice matériel, doivent être rejetées.
– Sur le préjudice moral
96 Selon une jurisprudence constante, si l’annulation d’un acte entaché d’illégalité, tel que la décision attaquée, peut constituer en elle-même la réparation adéquate et, en principe, suffisante de tout préjudice moral que cet acte peut avoir causé, tel ne saurait être le cas lorsque le requérant démontre avoir subi un préjudice moral détachable de l’illégalité fondant l’annulation et n’étant pas susceptible d’être intégralement réparé par cette annulation (voir, en ce sens, arrêts du 6 juin 2006, Girardot/Commission, T‑10/02, EU:T:2006:148, point 131 ; du 19 novembre 2009, Michail/Commission, T‑49/08 P, EU:T:2009:456, point 88, et du 19 mai 2015, Brune/Commission, F‑59/14, EU:F:2015:50, point 80).
97 En l’espèce, même si le requérant tend à lier son état de santé physique et psychique aux évènements, antérieurs à la décision attaquée, qui sont survenus lorsqu’il était en poste à la délégation de la Commission à Alger, le Tribunal considère que, compte tenu des absences du requérant pour raison médicale et de la connaissance certaine par le SEAE de la fragilité psychologique de l’intéressé, la communication abrupte de la décision de licenciement, qui n’a pas été précédée d’un dialogue écrit et/ou oral avec l’intéressé, et ce en méconnaissance flagrante de l’article 41 de la Charte, a pu créer un préjudice moral détachable de l’illégalité intrinsèque de la décision attaquée.
98 Dans ces conditions, le Tribunal considère qu’il y a lieu de faire droit aux conclusions indemnitaires en condamnant le SEAE à indemniser le requérant du préjudice moral subi d’un montant de 5 000 euros évalué ex æquo et bono.
99 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que :
– la décision attaquée doit être annulée pour violation du droit d’être entendu visé à l’article 41 de la Charte ;
– le SEAE doit être condamné à verser au requérant, en réparation du préjudice moral subi par ce dernier, un montant de 5 000 euros ;
– les conclusions indemnitaires doivent être rejetées pour le surplus ;
– les conclusions tendant à la réintégration du requérant au sein du SEAE doivent être rejetées comme manifestement irrecevables.
Sur les dépens
100 Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe supporte ses propres dépens, mais n’est condamnée que partiellement aux dépens exposés par l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.
101 Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que le SEAE doit être considéré comme la partie qui succombe. En outre, le requérant a, dans ses conclusions, expressément demandé que le SEAE soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, le SEAE doit supporter ses propres dépens et être condamné à supporter les dépens exposés par le requérant.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre)
déclare et arrête :
1) La décision du 29 janvier 2014 par laquelle le directeur de la direction « Ressources humaines » du Service européen pour l’action extérieure, agissant en qualité d’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement, a décidé de résilier le contrat d’engagement de GV avec effet au 31 août 2014 est annulée.
2) Le Service européen pour l’action extérieure est condamné à verser à GV, en réparation du préjudice moral subi par ce dernier, un montant de 5 000 euros.
3) Le recours est rejeté pour le surplus.
4) Le Service européen pour l’action extérieure supporte ses propres dépens et est condamné à supporter les dépens exposés par GV.
Barents | Perillo | Svenningsen |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 février 2016.
Le greffier | Le président |
W. Hakenberg | R. Barents |
* Langue de procédure : l’allemand.
© European Union
The source of this judgment is the Europa web site. The information on this site is subject to a information found here: Important legal notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.
BAILII: Copyright Policy | Disclaimers | Privacy Policy | Feedback | Donate to BAILII
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2016/F13714.html