Czech Republic v Commission (Judgment) French Text [2016] EUECJ T-141/15 (20 October 2016)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2016/T14115.html
Cite as: ECLI:EU:T:2016:621, [2016] EUECJ T-141/15, EU:T:2016:621

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

20 octobre 2016 (*)

« FEAGA et Feader – Dépenses exclues du financement – Protection des vignobles – Dépenses effectuées par la République tchèque – Sécurité juridique – Confiance légitime »

Dans l’affaire T‑141/15,

République tchèque, représentée par M. M. Smolek, Mme J. Očková, M. J. Vláčil et Mme L. Březinová, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme B. Eggers et M. P. Ondrůšek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision d’exécution (UE) 2015/103 de la Commission, du 16 janvier 2015, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2015, L 16, p. 33), dans sa partie qui écarte les dépenses envisagées par la République tchèque au titre du FEAGA en faveur d’une certaine mesure de protection des vignobles pour les années 2010 à 2012 et aboutissant à un montant total de 2 123 199,04 euros,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich (rapporteur), président, J. Schwarcz et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : M. L. Grzegorczyk, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 2 juin 2016,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 juillet 2008, la République tchèque a soumis à la Commission des Communautés européennes un projet de programme d’aide pour les exercices 2009 à 2014, en application de l’article 5, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 479/2008 du Conseil, du 29 avril 2008, portant organisation commune du marché vitivinicole, modifiant les règlements (CE) n° 1493/1999, (CE) n° 1782/2003, (CE) n° 1290/2005 et (CE) n° 3/2008, et abrogeant les règlements (CEE) n° 2392/86 et (CE) n° 1493/1999 (JO 2008, L 148, p. 1).

2        Parmi les mesures du projet de programme figurait une mesure relative à la protection contre les dommages causés à des vignes par les animaux et les oiseaux, qui était censée être mise en œuvre soit par des moyens mécaniques, à savoir la clôture des vignobles ou divers systèmes d’éloignement, soit par des moyens actifs impliquant la présence d’hommes émettant des sons (ci-après la « mesure de protection litigieuse »).

3        Dans une lettre du 8 octobre 2008, la Commission a formulé des griefs contre le projet susmentionné, en vertu de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008. Toutefois, les griefs de la Commission ne visaient pas la mesure de protection litigieuse.

4        La République tchèque a révisé le projet de programme en tenant compte des griefs de la Commission et lui a transmis un nouveau projet le 12 février 2009. Le second projet contenait à nouveau, dans sa forme non modifiée par rapport au projet initial, la mesure de protection litigieuse. La Commission n’a plus soulevé de griefs contre le second projet.

5        À l’occasion d’une enquête d’audit menée sous la référence VT/VI/2009/101/CZ, visant à vérifier la compatibilité des mesures adoptées par la République tchèque dans le cadre de la restructuration et de la reconversion des vignobles avec les conditions d’octroi des aides en la matière et portant sur la campagne viticole 2007/2008, la Commission a, en date du 20 février 2009, adressé à la République tchèque une communication au titre de l’article 11, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 885/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO 2006, L 171, p. 90). Cette communication se lit en partie comme suit :

« Ce résultat met néanmoins en lumière le fait que les travaux de restructuration se sont essentiellement limités à une protection du vignoble existant contre les animaux sans aucune autre intervention. Cette approche soulève un problème de conformité au regard de l’article 11, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1493/1999, lequel stipule que le régime a pour objectif d’adapter la production à la demande du marché. Si la restructuration en République tchèque s’est limitée à la seule protection contre les animaux du vignoble existant, prima facie, la dépense n’est pas éligible car elle est sans rapport avec les exigences réglementaires requises ». Dans la même lettre, la Commission indiquait que les autorités tchèques devaient « mettre en œuvre toutes les mesures nécessaires de façon à remédier aux carences et aux non-conformités ».

6        Par lettre du 22 septembre 2009, la Commission a notifié son intention de mener une autre enquête d’audit sous la référence VT/VI/2009/004/CZ. Cette enquête devait porter sur les mesures relatives à la restructuration et à la reconversion des vignobles en République tchèque au cours de la campagne viticole 2008/2009.

7        Du 26 au 29 janvier 2010, la Commission a mené cette dernière enquête en République tchèque.

8        Dans une communication du 22 mars 2010 effectuée en vertu de l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 885/2006 (ci-après la « communication du 22 mars 2010 »), la Commission a, dans le cadre de l’enquête portant la référence VT/VI/2009/004/CZ, notamment relevé ce qui suit :

« Lors du contrôle sur place, l’équipe d’audit a eu des doutes quant à la question de savoir si la protection active et passive contre les oiseaux et les animaux sauvages constitu[ait] une activité admissible dans le cadre de la restructuration et de la reconversion. »

9        Par ailleurs, la Commission a, dans le même document, indiqué à l’adresse de la République tchèque que « [l]a protection active et passive contre les oiseaux et les animaux sauvages ne saurait être considérée comme une nouvelle mesure grâce à laquelle la gestion des vignobles s’améliorait de façon que la production s’adapte à la demande du marché ». Finalement, la communication rappelle que « [l]e règlement (CE) n° 1493/99 indique clairement que l’objectif [des opérations de restructuration] est “d’adapter la production à la demande du marché”. »

10      En date du 31 janvier 2011, la Commission a transmis à la République tchèque le procès-verbal d’une réunion bilatérale qui s’était tenue au titre de l’article 11, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 885/2006 et qui avait eu lieu entre des représentants de la République tchèque et de ses propres services  le 13 décembre 2010 au sujet des deux enquêtes susmentionnées. À partir du 31 janvier 2011, la référence aux deux enquêtes figurait au début de toute la correspondance de la Commission dans la présente affaire.

11      Dans le procès-verbal, la Commission a considéré que les dépenses effectuées en République tchèque au titre de la mesure de protection litigieuse constituaient des opérations non admissibles et a demandé à la République tchèque le montant exact des dépenses déclarées pour les exercices 2008 à 2010.

12      Le 3 décembre 2012, la Commission a adressé à la République tchèque une communication au titre de l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, et de l’article 16, paragraphe 1, du règlement n° 885/2006. Dans cette communication, la Commission a réitéré et précisé son opinion selon laquelle les modes de protection active et passive des vignobles prévus par la République tchèque n’étaient pas couverts par la notion de restructuration et de reconversion visée à l’article 11 du règlement (CE) n° 1493/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, portant organisation commune du marché vitivinicole (JO 1999, L 179, p. 1), ainsi qu’à l’article 11 du règlement n° 479/2008. À cet égard, la Commission a proposé une correction financière de 52 347 157,43 couronnes tchèques (CZK) et de 11 984 289,94 euros pour les exercices 2007 à 2010, en soumettant les exercices 2007 et 2008 à l’application du règlement n° 1493/1999 et les autres exercices à l’application du règlement n° 479/2008.

13      À la suite d’une demande du 17 janvier 2013 présentée par la République tchèque, l’organe de conciliation a organisé une réunion le 19 juin 2013 et rendu le 2 juillet 2013 un rapport final relatif à la procédure de conciliation portant la référence 13/CZ/552. Dans ce rapport, l’organe de conciliation a invité la Commission à ne pas proposer de correction financière pour les dépenses effectuées au titre du programme d’aide dans son ensemble pour la période 2009 à 2014 et à reconsidérer sa décision d’imposer la correction financière proposée de 52 347 157,43 CZK et de 11 984 289,94 euros.

14      Par lettre du 22 avril 2014, la Commission a transmis à la République tchèque un avis final après la présentation du rapport de l’organe de conciliation. Dans cet avis, la Commission a répété que, selon elle, la mesure de protection litigieuse ne saurait être considérée comme admissible dans le cadre du programme de restructuration et de reconversion des vignobles.

15      S’agissant des exercices 2007 à 2009, la Commission a relevé que l’absence de griefs de sa part contre le projet de programme d’aide à l’égard de la mesure de protection litigieuse avait permis à la République tchèque de croire légitimement que les aides en faveur de cette mesure étaient des opérations admissibles. Selon la Commission, la République tchèque ne pouvait cependant nourrir aucune confiance légitime à cet égard après avoir reçu sa lettre du 22 mars 2010. Pour cette raison, la Commission a estimé qu’une correction financière était justifiée pour toutes les dépenses à l’égard desquelles un engagement avait été pris après le 22 mars 2010. Ensuite, elle a proposé une correction financière pour les exercices 2010 à 2012 pour un montant total de 2 123 199,04 euros.

16      Finalement, la Commission a adopté la décision d’exécution (UE) 2015/103, du 16 janvier 2015, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2015, L 16, p. 33, ci-après la « décision attaquée »), sur la base de l’article 52 du règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) n° 352/78, (CE) n° 165/94, (CE) n° 2799/98, (CE) n° 814/2000, (CE) n° 1290/2005 et (CE) n° 485/2008 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 549 ; rectifié par JO 2016 L 130, p. 13).

17      Dans la décision attaquée, la Commission a écarté les dépenses effectuées par la République tchèque au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) en faveur de la mesure de protection litigieuse dans le cadre du programme de restructuration et de reconversion des vignobles pour 2010 à 2012, pour un montant total de 2 123 199,04 euros.

 Procédure et conclusions des parties

18      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 25 mars 2015, la République tchèque a introduit le présent recours.

19      Le 15 juin 2015, la Commission a déposé au greffe du Tribunal le mémoire en défense.

20      La réplique et la duplique ont été déposées au greffe du Tribunal respectivement le 20 août et le 2 octobre 2015.

21      La République tchèque conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce qu’elle écarte les dépenses qu’elle a effectuées pour un montant total de 2 123 199,04 euros ;

–        condamner la Commission aux dépens.

22      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la République tchèque aux dépens.

 En droit

23      Au soutien du recours, la République tchèque soulève deux moyens.

24      Par son premier moyen, elle fait valoir en substance que, en écartant du financement de l’Union européenne les dépenses liées à la mesure de protection litigieuse pour les années 2010 à 2012, alors même que ces dépenses faisaient partie d’un programme d’aide à l’encontre duquel la Commission n’avait formulé aucun grief au stade du contrôle du projet de programme d’aide au titre de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, cette institution a violé cette disposition et le principe de sécurité juridique, voire le principe de protection de la confiance légitime.

25      Le second moyen est tiré d’une violation de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), lu conjointement avec les articles 11 et 16 du règlement n° 885/2006 et l’article 31 du règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 2005, L 209, p. 1).

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 5 du règlement n° 479/2008 et des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime

26      Selon la République tchèque, le fait que la Commission a écarté du financement de l’Union certaines dépenses qu’elle avait effectuées au titre du FEAGA pour une certaine mesure de protection des vignobles pour les années 2010 à 2012, en raison du caractère non admissible de l’opération que cette mesure constituait, alors même qu’elle n’avait jamais formulé de griefs à l’encontre de cette opération au stade du contrôle du projet de programme d’aide, en vertu de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, constitue une violation de cette disposition ainsi que des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.

27      Il convient d’examiner successivement les deux branches de ce premier moyen, à savoir la prétendue violation de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, d’une part, et la prétendue violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, d’autre part.

 Sur la première branche du premier moyen, tirée d’une violation de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008

28      Au soutien de la première branche de son premier moyen, la République tchèque invoque, en substance, que l’enjeu du mécanisme de contrôle tel que prévu à l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 réside dans le fait que la Commission peut contrôler le contenu d’un programme d’aide lors de l’approbation de ce dernier. La circonstance que, selon ladite disposition, la possibilité d’intervention de la Commission est soumise à une limite temporelle de trois ou, dans le cas de la présentation d’une version révisée du programme, de deux mois signifierait que le programme, devenu ainsi applicable, devrait être considéré comme « approuvé ». L’expiration du délai pour la présentation d’objections par la Commission au titre de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 aurait un effet analogue à celui de l’expiration du délai pour le dépôt d’une requête en annulation d’un acte d’un organe de l’Union au titre de l’article 263 TFUE. À l’égard d’un programme à l’encontre duquel la Commission n’a pas soulevé de griefs dans les délais fixés audit article 5, paragraphe 2, il conviendrait donc de présumer que ledit programme est conforme aux dispositions du droit de l’Union. Cette dernière présomption étant irréfragable, la conformité du programme ne pourrait plus être contestée par la suite par celui qui aurait pu le faire dans le délai prévu, mais n’a pas fait usage de cette faculté. En l’occurrence, le programme d’aide de la République tchèque serait conforme au règlement n° 479/2008 ainsi qu’au droit de l’Union dans son ensemble.

29      Une telle interprétation de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 ne saurait toutefois être retenue.

30      À titre liminaire, il convient de rappeler que, ainsi qu’il résulte de son préambule, la décision attaquée a été adoptée dans le contexte d’une procédure d’apurement de conformité sur la base de l’article 52 du règlement n° 1306/2013, cette disposition étant d’application selon l’article 121, paragraphe 2, sous c), du même règlement à compter du 1er janvier 2015. Sur le fondement de ce premier article, la Commission adopte des actes d’exécution déterminant les montants à exclure du financement de l’Union lorsqu’elle considère que des dépenses relevant du champ d’application de l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1306/2013, à savoir des dépenses du FEAGA, n’ont pas été effectuées conformément au droit de l’Union.

31      Ni le libellé, ni le contexte, ni la finalité de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 ne permettent de déduire que les programmes d’aide bénéficient, après un contrôle de la Commission, d’une présomption irréfragable de compatibilité avec le droit de l’Union ou que lesdits programmes deviennent définitifs ou non modifiables avec pour effet que la Commission serait forclose à poursuivre une procédure d’apurement de conformité selon ledit article 52, paragraphe 1, du règlement n° 1306/2013.

32      S’agissant du libellé de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, il convient de relever ce qui suit.

33      En application de cette disposition, les programmes d’aide deviennent applicables trois mois après la date de leur soumission à la Commission. Si toutefois le programme d’aide soumis ne répond pas aux conditions établies au chapitre I du titre II du règlement n° 479/2008, la Commission en informe l’État membre concerné. Dans ce cas, l’État membre soumet à la Commission une version révisée de son programme d’aide. Ce programme d’aide révisé devient applicable deux mois après la date de sa notification, sauf s’il subsiste une incompatibilité, auquel cas le second alinéa du même paragraphe s’applique.

34      S’agissant dudit chapitre I, il convient de mentionner notamment l’article 4, paragraphe 1, du même règlement, selon lequel les programmes d’aide doivent être compatibles avec la législation de l’Union et cohérents par rapport aux activités, politiques et priorités de l’Union.

35      Le libellé de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 n’indique cependant pas expressément que, à la fin du contrôle effectué par la Commission en vertu de cette disposition, un programme d’aide est présumé conforme aux conditions spécifiques du chapitre I du titre II de ce règlement et, notamment, en vertu de son article 4, paragraphe 1, au regard de la totalité des dispositions du droit de l’Union.

36      De plus, rien dans le libellé de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 ne permet de déduire des effets juridiques tendant à établir, ne serait-ce que de manière implicite, une présomption telle que celle préconisée par la République tchèque.

37      En effet, de tels effets juridiques ne sauraient être déduits du fait que, ainsi que l’allègue la République tchèque, sur la base de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, la Commission procède à une « approbation » du contenu d’un programme d’aide.

38      L’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 n’habilite pas expressément la Commission à approuver un projet de programme d’aide ou à prendre des décisions portant sur la conformité du contenu d’un tel projet avec les conditions du chapitre I du titre II du règlement n° 479/2008, conditions qui renvoient, par le biais de l’article 4, paragraphe 1, du même règlement, à la totalité des dispositions du droit de l’Union.

39      Au contraire, dans le cas où la Commission est d’avis que le projet de programme d’aide ne répond pas aux exigences du droit de l’Union, cette institution est seulement appelée à informer l’État membre de son point de vue dans les délais spécifiquement prévus à l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008.

40      De même, la circonstance que la Commission n’a pas formulé d’observations quant à une éventuelle non-conformité du projet de programme avec les dispositions dudit chapitre I dans le délai de deux mois tel que fixé au paragraphe 2 dudit article 5 n’est pas davantage susceptible de constituer une décision d’approbation telle que prônée par la République tchèque.

41      À cet égard, il y a lieu de rappeler que le seul silence d’une institution ne peut produire des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, sauf lorsque cette conséquence est expressément prévue par une disposition du droit de l’Union. Le droit de l’Union prévoit, dans certains cas spécifiques, que le silence d’une institution a valeur de décision lorsque cette institution a été invitée à prendre position et qu’elle ne s’est pas prononcée à l’expiration d’un certain délai. En l’absence de telles dispositions expresses, fixant un délai à l’expiration duquel une décision implicite est réputée intervenir et définissant le contenu de cette décision, l’inaction d’une institution ne saurait être assimilée à une décision, sauf à mettre en cause le système des voies de recours institué par le traité (voir arrêt du 9 septembre 2009, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T‑30/01 à T‑32/01 et T‑86/02 à T‑88/02, EU:T:2009:314, point 148 et jurisprudence citée).

42      Or, l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 ne prévoit pas expressément que l’absence d’observations de la part de la Commission pendant le délai de deux mois qui y est mentionné vaut décision implicite de conformité du projet de programme avec le droit de l’Union.

43      À la différence de ce qu’allègue la République tchèque, l’expiration du délai pour la présentation d’objections par la Commission au titre de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 n’a, par ailleurs, pas un effet analogue à celui de l’expiration du délai pour le dépôt d’une requête en annulation d’un acte d’un organe de l’Union au titre de l’article 263 TFUE.

44      En effet, le délai de recours au titre de l’article 263, sixième alinéa, TFUE est d’ordre public et constitue un délai de forclusion (voir arrêt du 6 décembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑167/10, non publié, EU:T:2012:651, points 37 et 38 et jurisprudence citée). L’expression « [l]es recours prévus au présent article doivent être formés dans un délai deux mois », telle qu’elle figure dans cette disposition du traité FUE, indique de manière implicite également la conséquence du dépassement de ce délai, à savoir le fait que l’acte en question devient inattaquable.

45      Tel n’est toutefois pas le cas du texte de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, lequel manque de précision en ce qui concerne les conséquences du dépassement du délai de deux mois qu’il mentionne.

46      Partant, le libellé de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 ne saurait servir de base pour déduire une présomption telle que celle préconisée par la République tchèque.

47      Cette interprétation est confirmée tant par le contexte du règlement n° 479/2008 lui-même que par le contexte plus large des dispositions portant sur le financement de la politique agricole commune.

48      En effet, s’agissant du contexte du règlement n° 479/2008 lui-même, il convient de relever que la règle contenue à son article 4, paragraphe 1, selon laquelle les programmes d’aide sont compatibles avec la législation de l’Union, est formulée en des termes objectifs.

49      En revanche, rien dans l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 479/2008 ne permet d’inférer qu’il pourrait être dérogé à cette règle du simple fait que, lors du contrôle effectué sur la base de l’article 5, paragraphe 2, de ce règlement, la Commission n’a pas pris position à l’égard d’une éventuelle non-conformité d’un projet de programme d’aide avec les conditions du chapitre I du titre II du même règlement dans les délais qui y sont mentionnés spécifiquement.

50      Pour ce qui est du contexte plus large des dispositions portant sur le financement de la politique agricole commune, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 54, paragraphe 1, du règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1), l’exécution des crédits inscrits au budget pour toute action de l’Union requiert l’adoption préalable d’un acte de base.

51      Ainsi que l’a relevé à juste titre la Commission, le règlement n° 479/2008 constitue un acte de base au sens de l’article 54 du règlement n° 966/2012.

52      Dans ce contexte, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les fonds agricoles européens ne financent que les interventions effectuées conformément aux dispositions de l’Union dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (voir arrêt du 28 janvier 2016, Slovénie/Commission, T‑667/14, EU:T:2016:34, point 21 et jurisprudence citée), ces dispositions incluant également les actes de base au titre de l’article 54 du règlement n° 966/2012.

53      Or, une présomption irréfragable, telle que celle préconisée par la République tchèque, aurait pour conséquence qu’une mesure prévue dans un programme d’aide qui, dans un premier temps, contreviendrait à une disposition d’un acte de base deviendrait, dans un second temps, compatible avec ce dernier du simple fait que la Commission se serait abstenue de formuler des observations à l’égard de cette mesure dans les délais prévus à l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008.

54      Dans cette optique, la présomption irréfragable envisagée par la République tchèque aboutirait en fin de compte à un résultat contraire à l’article 54, paragraphe 1, du règlement n° 966/2012.

55      Sauf à adopter une approche incompatible avec le principe de cohérence des actions de l’Union, tel que mentionné à l’article 7 TFUE, et compte tenu du fait qu’un tel résultat est susceptible de remettre en question également le mécanisme d’apurement de conformité et de correction financière même, tel qu’il résulte de l’article 52 du règlement n° 1306/2013, une telle conséquence ne saurait constituer un fondement valable pour l’interprétation de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008.

56      Quant à la finalité de cette dernière disposition, il convient de rappeler que celle-ci vise à assurer le respect, dans les programmes d’aide nationaux, des conditions établies au chapitre I du titre II du règlement n° 479/2008 et, notamment, à l’article 4, paragraphe 1, de ce règlement.

57      Or, une présomption telle que celle préconisée par la République tchèque aurait pour effet de maintenir l’incompatibilité d’une opération prévue dans un projet de programme d’aide avec les dispositions de l’ensemble du droit de l’Union à chaque fois que la Commission s’est abstenue, qu’elle qu’en soit la raison, de prendre position sur l’opération concernée.

58      Partant, il y a lieu de rejeter l’argument tiré d’une violation de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 du fait d’une prétendue présomption irréfragable de conformité de la mesure de protection litigieuse avec le droit de l’Union.

59      À l’appui de la première branche du premier moyen, la République tchèque fait valoir également que le programme devenu « applicable » devrait être considéré comme « définitif » et, en principe, « non modifiable ». Même si l’article 22, sous b), du règlement n° 479/2008 habilite la Commission à adopter des mesures d’application, susceptibles d’inclure les conditions de modification des programmes d’aide une fois qu’ils sont devenus applicables, cette disposition n’affecterait en rien le fait que les modifications des programmes d’aide « approuvés » ne peuvent être initiées que par les États membres.

60      De plus, selon la République tchèque, la circonstance que le règlement n° 479/2008 ne prévoit pas la possibilité de modifier le programme d’aide à l’initiative de la Commission traduit le pouvoir d’un État membre de choisir des mesures d’aide appropriées. Cette démarche serait différente de celle résultant, par exemple, de l’article 19 du règlement (CE) n° 1698/2005 du Conseil, du 20 septembre 2005, concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2005, L 277, p. 1). De ce fait, l’interprétation de la Commission reviendrait à modifier de facto la répartition des compétences entre la Commission et les États membres ou à les rapprocher du modèle de soutien au développement rural, ce qui toutefois ne trouverait aucun appui dans le règlement n° 479/2008.

61      À cet égard, s’agissant du terme « applicable », il y a lieu de rappeler l’article 8, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, selon lequel une aide communautaire porte exclusivement sur les dépenses admissibles, et ce seulement dans la mesure où ces dépenses ont été encourues après la soumission du programme d’aide prévue à l’article 5, paragraphe 1, du même règlement. Il en découle que le terme « applicable » doit être compris en ce sens que, une fois que les délais prévus à l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 sont écoulés, l’État membre concerné peut procéder à la mise en œuvre du programme dans la mesure où il s’agit de dépenses admissibles encourues après la date de la soumission.

62      Toutefois, la circonstance que, après expiration des délais prévus à l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, les programmes d’aide deviennent « applicables » ne signifie pas que les programmes deviennent « non modifiables » ou « définitifs ».

63      À cet égard, il y a lieu de relever que ce règlement ne contient aucune indication permettant de déterminer en quoi un programme d’aide peut devenir « définitif ». En tout état de cause, ce terme ne saurait être interprété en ce sens qu’un tel programme ne serait pas modifiable après l’écoulement des délais prévus à l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008.

64      Au contraire, ainsi qu’il ressort de l’article 22, sous b), du règlement n° 479/2008, la Commission peut adopter des mesures d’application susceptibles d’inclure les conditions de modification des programmes d’aide une fois qu’ils sont devenus applicables. Il en découle que les programmes d’aide restent en principe « modifiables », même s’ils sont devenus « applicables ». Ce constat vaut indépendamment de la circonstance que, ainsi que l’a relevé la République tchèque, les modifications des programmes d’aide ne peuvent être initiées que par les États membres.

65      Finalement, quant à la question de savoir si la Commission a « modifié » le programme en cause, il suffit de relever qu’une décision de la Commission prise en application de la procédure d’apurement de conformité selon l’article 52, paragraphe 1, du règlement n° 1306/2013 ne constitue pas une modification de programme. Partant, il n’y a pas lieu de se pencher sur la question d’une éventuelle modification de facto de la répartition des compétences entre la Commission et les États membres ou d’un éventuel rapprochement des modèles de soutien, adoptés sur la base du règlement n° 479/2008, à la législation portant sur le développement rural.

66      En conséquence, une violation de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 ne saurait être déduite de l’argument lié à une prétendue modification du programme d’aide devenu « définitif » ou « non modifiable ».

67      Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter dans leur totalité les arguments tendant à soutenir une violation de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008.

 Sur la seconde branche du premier moyen, tirée d’une violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime

68      Par la seconde branche de son premier moyen, la République tchèque fait valoir que, en déterminant une correction financière en raison du caractère non admissible d’une opération contenue dans un programme d’aide, alors même que la Commission n’avait jamais formulé de griefs à l’encontre de cette opération au stade de l’examen du projet de programme d’aide litigieux au titre de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, la Commission a violé les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.

69      Il convient de considérer que, en invoquant une violation de ces deux principes, la République tchèque soulève deux griefs distincts.

70      En premier lieu, à l’appui du premier grief tiré d’une violation du principe de sécurité juridique, la République tchèque relève que, à supposer que l’auteur de la communication du 22 mars 2010, laquelle ne ferait état que d’un « simple doute » des auditeurs quant au caractère non admissible des dépenses liées à la mesure de protection litigieuse, puisse s’immiscer dans un programme « approuvé », cela aboutirait à compromettre la sécurité juridique et à créer une situation « confinant au chaos ». Avant le 12 mars 2013, le droit de l’Union était, de l’avis de la République tchèque, à tout le moins opaque. Cette opacité n’aurait été éliminée que par la modification de l’article 6 du règlement (CE) n° 555/2008 de la Commission, du 27 juin 2008, fixant les modalités d’application du règlement n° 479/2008 (JO 2008, L 170, p. 1), par le règlement d’exécution (UE) n° 202/2013 de la Commission, du 8 mars 2013, modifiant le règlement n° 555/2008 en ce qui concerne la soumission des programmes d’aide dans le secteur vitivinicole et les échanges avec les pays tiers (JO 2013, L 67, p. 10), le règlement d’exécution n° 202/2013 étant entré en vigueur le 12 mars 2013. En effet, selon le paragraphe 2 de la nouvelle version dudit article 6, la protection contre les dommages causés par le gibier, les oiseaux ou la grêle ne relèverait pas d’une opération admissible. L’opacité en question serait la raison pour laquelle il aurait été nécessaire d’adopter la modification de cet article 6, cette dernière disposition n’étant toutefois pas d’application avant le 12 mars 2013. Les dépenses pour la mesure de protection litigieuse auraient été admissibles à tout le moins jusqu’au jour de l’entrée en vigueur du règlement d’exécution n° 202/2013, à savoir jusqu’au 12 mars 2013.

71      En l’espèce, force est toutefois de constater que la Commission n’a pas violé le principe de sécurité juridique.

72      Ce principe exige que le droit de l’Union soit clair et son application prévisible pour ceux qui sont concernés. Cet impératif requiert que tout acte visant à créer des effets juridiques emprunte sa force obligatoire à une disposition du droit de l’Union qui doit expressément être indiquée comme base juridique et qui prescrit la forme juridique dont l’acte doit être revêtu (voir arrêt du 19 juin 2015, Italie/Commission, T‑358/11, EU:T:2015:394, point 123 et jurisprudence citée).

73      Or, la décision attaquée énonce non seulement la base juridique, mais également tous les paramètres nécessaires pour identifier la mesure de protection en cause et les dépenses qui lui sont afférentes, et ce d’une façon claire et précise permettant ainsi à la République tchèque d’en connaître sans ambiguïté la portée.

74      Une violation du principe de sécurité juridique ne saurait être déduite du fait que, ainsi que l’invoque la République tchèque, la communication du 22 mars 2010 ne faisait état que d’un « simple doute » des auditeurs quant au caractère non admissible des dépenses liées à la mesure de protection litigieuse. Il en va de même pour l’argument selon lequel, à supposer que l’auteur de la communication du 22 mars 2010 puisse « s’immiscer » dans un programme « approuvé », cela aboutirait à compromettre la sécurité juridique et à créer une situation « confinant au chaos ».

75      À cet égard, il y a lieu de relever d’emblée que toute communication de la Commission prévue à l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 885/2006 doit informer l’État membre concerné des résultats de l’enquête des auditeurs, y compris des doutes de ceux-ci.

76      Quant à la communication du 22 mars 2010, elle ne se borne pas à exprimer des « doutes » des auditeurs. En effet, dans ce document, la Commission a indiqué que « [l]a protection active et passive contre les oiseaux et les animaux sauvages ne saurait être considérée comme une nouvelle mesure grâce à laquelle la gestion des vignobles s’améliorait de façon que la production s’adapte à la demande du marché ». Dans ce contexte, la communication rappelle que « [l]e règlement (CE) n° 1493/99 indique clairement que l’objectif [des opérations de restructuration] est “d’adapter la production à la demande du marché” ».

77      De surcroît, la communication du 22 mars 2010 fait expressément référence à une lettre de la Commission du 20 février 2009.

78      Or, déjà dans cette dernière lettre, la Commission avait identifié « un problème de conformité au regard de l’article 11, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1493/1999 ». De l’avis de la Commission, tel que celui-ci a été exprimé dans le document du 20 février 2009, « [s]i la restructuration en République tchèque s’est limitée à la seule protection contre les animaux du vignoble existant, prima facie, la dépense [en question] n’est pas éligible car elle est sans rapport avec les exigences réglementaires requises ».

79      Eu égard à leurs termes clairs, les lettres de la Commission du 20 février 2009 et du 22 mars 2010 ne laissent aucun doute quant à l’avis de cette institution au regard de la non-compatibilité de la mesure de protection litigieuse avec l’article 11, paragraphe 2, du règlement n° 1493/1999, celui-ci étant, selon l’article 129, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, d’application jusqu’au 31 juillet 2008, date à laquelle l’article 11, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008 est entré en vigueur.

80      Pour ce qui est de la prétendue immixtion dans un programme « approuvé » susceptible de compromettre la sécurité juridique et de créer une situation « confinant au chaos », il convient de rappeler que, ainsi que cela a été relevé au point 38 ci-dessus, la Commission n’approuve pas le projet de programme d’aide soumis à son attention sur la base de l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008. De plus, dès lors qu’elle est prévue par le législateur même, la possibilité pour la Commission de formuler des observations au titre de l’article 11 du règlement n° 885/2006 ne saurait être assimilée à une immixtion dans un programme susceptible de compromettre la sécurité juridique.

81      S’agissant de l’argument de la République tchèque tenant à une prétendue opacité du droit de l’Union quant à l’admissibilité d’une opération telle que la protection contre les dommages causés par le gibier, les oiseaux ou la grêle, jusqu’à l’entrée en vigueur de la modification de l’article 6 du règlement n° 555/2008 par le règlement d’exécution n° 202/2013, il convient de relever ce qui suit.

82      Même au vu du considérant 6 du règlement d’exécution n° 202/2013, aux termes duquel, « à la lumière de l’expérience acquise au cours de la mise en œuvre de [la restructuration et de la reconversion des vignobles], il est nécessaire de spécifier certaines opérations qui sont considérées comme non admissibles », le seul fait que le législateur a, par le biais d’une modification de l’article 6 du règlement n° 555/2008, spécifié le caractère non admissible des mesures de protection des vignobles contre les animaux ne signifie pas pour autant que les règles contenues à l’article 11, paragraphe 3, du règlement n° 1493/1999 et à l’article 11, paragraphe 3, du règlement n° 479/2008 étaient opaques.

83      Le libellé de l’article 11, paragraphe 3, du règlement n° 1493/1999 et de l’article 11, paragraphe 3, du règlement n° 479/2008 ne couvre, à l’évidence, pas les mesures tendant à la protection des vignobles contre les dommages causés par les animaux ou par les oiseaux, telles que la mesure de protection litigieuse.

84      Selon ces dernières dispositions, seules les mesures tendant à la reconversion variétale, y compris par surgreffage, à la réimplantation de vignobles ainsi qu’à l’amélioration des techniques de gestion des vignobles constituent des opérations admissibles en matière de restructuration et de reconversion des vignobles. Selon la dernière phrase de l’article 11, paragraphe 3, du règlement n° 1493/1999 ainsi que de l’article 11, paragraphe 3, du règlement n° 479/2008, le remplacement normal des vignobles parvenus au terme de leur cycle de vie naturel est également exclu de l’aide.

85      L’article 6 du règlement n° 555/2008, dans sa version en vigueur avant le 12 mars 2013, énonçait, quant à lui, ce qui devait être entendu par « remplacement normal des vignobles parvenus au terme de leur cycle de vie naturel », à savoir la replantation de la même variété sur la même parcelle et selon le même mode de viticulture. De plus, selon cette disposition, il était loisible aux États membres de prévoir des spécifications complémentaires portant, particulièrement, sur l’âge des vignobles remplacés. En revanche, à l’instar de l’article 11, paragraphe 3, du règlement n° 1493/1999 et de l’article  11, paragraphe 3, du règlement n° 479/2008, l’article 6 du règlement n° 555/2008 ne portait à l’évidence pas sur des mesures telles que celle en cause en l’espèce.

86      L’argument de la République tchèque, lié à une prétendue opacité du droit de l’Union quant à l’admissibilité d’une mesure telle que celle en cause, ne saurait prospérer, d’autant plus que la Commission a, avant l’adoption de la décision attaquée et à plusieurs reprises, indiqué à l’adresse de cet État membre que, selon elle, si la restructuration des vignobles dans le programme d’aide se limitait à la mesure de protection litigieuse, les dépenses qui y étaient afférentes n’étaient pas éligibles car elles étaient sans rapport avec les exigences réglementaires requises.

87      En effet, ce constat de la Commission, lequel a par ailleurs été formulé avec la même clarté que la nouvelle version de l’article 6, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 555/2008, a été exprimé non seulement dans les lettres du 20 février 2009 et du 22 mars 2010, mais également pendant la réunion bilatérale du 13 décembre 2010, dans le procès-verbal du 31 janvier 2011 faisant suite à cette réunion ainsi que dans la communication du 3 décembre 2012.

88      Finalement, il convient de relever que les objectifs des régimes de restructuration et de reconversion des vignobles prévus à l’article 11 du règlement n° 1493/1999 ainsi qu’à l’article 11 du règlement n° 479/2008 n’étaient pas davantage opaques. Aux termes de l’article 11, paragraphe 2, du règlement n° 1493/1999, la finalité du régime de restructuration et de reconversion des vignobles au sens du règlement n° 1493/1999 consistait à assurer l’adaptation de la production à la demande du marché. Selon l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 479/2008, l’objectif des mesures en matière de restructuration et de reconversion des vignobles tel qu’il est défini dans ce règlement vise à accroître la compétitivité des viticulteurs.

89      Or, en l’espèce, il n’apparaît pas clairement en quoi la mesure litigieuse pourrait servir effectivement à adapter la production à la demande du marché, voire, le cas échéant, à assurer un accroissement de la compétitivité des viticulteurs.

90      Compte tenu de ces circonstances, l’argument de la République tchèque lié à une prétendue opacité du droit de l’Union quant à l’admissibilité d’une opération telle que la mesure de protection litigieuse ne saurait prospérer, cette conséquence valant également pour l’argument selon lequel les dépenses pour la mesure de protection litigieuse auraient été admissibles à tout le moins jusqu’au jour de l’entrée en vigueur du règlement d’exécution n° 202/2013, à savoir jusqu’au 12 mars 2013.

91      Partant, il convient de rejeter l’argument tiré d’une violation du principe de sécurité juridique.

92      En second lieu, à l’appui du second grief tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime, la République tchèque fait valoir en substance que, au vu de l’absence de griefs de la part de la Commission dans le délai de deux mois suivant la date de notification du programme révisé, selon la procédure prévue à l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 479/2008, elle a pu légitimement croire que ce programme respectait les conditions fixées par le droit de l’Union et que la mesure de protection litigieuse constituait une opération admissible. Pourtant, par la décision attaquée, la Commission lui aurait imposé une correction du fait du caractère non admissible de la mesure de protection litigieuse dans son ensemble, et ce pour la période postérieure à l’envoi de la lettre du 22 mars 2010. Sa confiance légitime aurait été renforcée, s’agissant de la mesure de protection litigieuse, par le fait que, pour les exercices 2007 et 2008, à savoir avant la mise en œuvre du programme, la République tchèque aurait appliqué, en matière de restructuration et de reconversion des vignobles, des mesures identiques à la mesure de protection litigieuse, sans que ces mesures n’aient été contestées par la Commission.

93      En ce qui concerne le principe de protection de la confiance légitime, il résulte d’une jurisprudence constante que le droit de se prévaloir de ce principe s’étend à tout justiciable dans le chef duquel une institution de l’Union a fait naître des espérances fondées et que nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies l’administration (voir ordonnance du 4 juillet 2013, Menidzherski biznes reshenia, C‑572/11, non publiée, EU:C:2013:456, point 30 et jurisprudence citée).

94      Constituent des assurances susceptibles de faire naître de telles espérances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels, concordants et émanant de sources autorisées et fiables (voir arrêt du 14 mars 2013, Agrargenossenschaft Neuzelle, C‑545/11, EU:C:2013:169, point 25 et jurisprudence citée).

95      Il est constant que ce principe peut être invoqué également par un État membre (voir, en ce sens, arrêt du 22 avril 2015, Pologne/Commission, T‑290/12, EU:T:2015:221, point 57 et jurisprudence citée).

96      En l’espèce, la République tchèque n’a pas démontré que la Commission lui avait fourni des assurances précises.

97      Par ailleurs, de telles assurances ne seraient en l’espèce pas envisageables d’autant plus que, ainsi que cela a été relevé au point 40 ci-dessus, l’absence de griefs, dans le délai de deux mois, quant à la non-conformité du projet de programme en cause avec les dispositions du chapitre I du titre II du règlement n° 479/2008 n’équivaut pas à une décision de la Commission.

98      En tout état de cause, la République tchèque ne pouvait valablement justifier qu’elle continuait à placer sa confiance légitime dans la conformité du programme en cause avec le droit de l’Union à compter des dates de notification des lettres de la Commission du 20 février 2009 et du 22 mars 2010. En effet, à compter de ces dates, la Commission a rompu le silence sur lequel aurait été fondée une éventuelle confiance de cet État membre.

99      L’argument selon lequel la confiance de la République tchèque aurait été renforcée par la circonstance que, pour les exercices 2007 et 2008, et donc avant la mise en œuvre du programme en cause, elle avait appliqué, en matière de restructuration et de reconversion des vignobles, des mesures identiques à la mesure de protection litigieuse, sans que ces mesures n’aient été contestées par la Commission, ne saurait davantage être accueilli.

100    En effet, à compter des lettres de la Commission du 20 février 2009 et du 22 mars 2010, il n’y avait plus lieu d’estimer que l’absence de griefs de la part de la Commission à l’égard du programme en cause signifierait sa conformité avec le droit de l’Union.

101    Eu égard à ce qui précède, il convient de rejeter le premier moyen dans sa totalité comme non fondé.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 41 de la Charte, lu conjointement avec les articles 11 et 16 du règlement n° 885/2006 et l’article 31 du règlement n° 1290/2005

102    Dans le cadre de ce moyen, invoqué à titre subsidiaire, dans le cas où le Tribunal devrait constater que la Commission était habilitée, même après l’expiration du délai de deux mois, tel que fixé à l’article 5 du règlement n° 479/2008, à contester ou à modifier le programme d’aide litigieux, la République tchèque indique que, en premier lieu, elle n’a pas eu la possibilité de prendre position sur la détermination de la correction financière pour les années 2010 à 2012 en conformité avec les étapes détaillées de la procédure prévue aux articles 11 et 16 du règlement n° 885/2006. En second lieu, la décision attaquée ne serait pas conforme à l’article 11, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement n° 885/2006, dès lors que, en l’espèce, aucune infraction n’aurait été constatée dans le respect de la procédure de cet article pour ce qui est des exercices 2010 à 2012.

103    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 121, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 1306/2013, l’article 31 du règlement n° 1290/2005 n’était plus d’application à la date de l’adoption de la décision attaquée. Sa base juridique étant, ainsi que cela a d’ores et déjà été relevé au point 30 ci-dessus, l’article 52 du règlement n° 1306/2013, cette décision ne pouvait être examinée à la lumière dudit article 31.

104    Il ne fait aucun doute que les droits de la défense doivent être respectés également dans une procédure ayant pour but l’adoption d’une décision à l’encontre d’un État membre en vertu de l’article 52, paragraphe 1, du règlement n° 1306/2013. Selon une jurisprudence constante, les droits de la défense, tels que contenus à l’article 41 de la Charte, s’imposent comme principe général dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte lui faisant grief (arrêt du 9 novembre 2006, Commission/De Bry, C‑344/05 P, EU:C:2006:710, point 37).

105    Il résulte de la jurisprudence que la décision finale et définitive relative à l’apurement des comptes doit être prise à l’issue d’une procédure contradictoire spécifique au cours de laquelle les États membres concernés doivent disposer de toutes les garanties requises pour présenter leur point de vue (voir arrêt du 30 avril 2015, France/Commission, T‑259/13, non publié, EU:T:2015:250, point 98 et jurisprudence citée).

106    S’agissant de la procédure d’apurement de conformité, ces considérations se concrétisent dans les articles 11 et 16 du règlement n° 885/2006.

107    L’article 11 du règlement n° 885/2006 définit les différentes étapes à respecter lors d’une procédure d’apurement de conformité en matière de FEAGA et de Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader). En particulier, l’article 11, paragraphe 1, premier alinéa, de ce règlement précise le contenu de la première communication écrite par laquelle la Commission transmet le résultat de ses vérifications aux États membres, avant l’organisation de la discussion bilatérale (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2015, France/Commission, T‑259/13, non publié, EU:T:2015:250, point 101 et jurisprudence citée). L’État membre répond dans un délai de deux mois à compter de la réception de la communication. À l’expiration du délai de réponse, la Commission convoque une réunion bilatérale et les deux parties s’efforcent de parvenir à un accord sur les mesures à prendre ainsi que sur l’évaluation de la gravité de l’infraction et du préjudice financier causé à l’Union.

108    Quant à l’article 16 du règlement n° 885/2006, il prévoit en substance les dispositions en vue d’une procédure de conciliation qui peut être engagée par l’État membre concerné dans les trente jours suivant la réception de la communication de la Commission visée à l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement n° 885/2006.

109    Toutefois, il est de jurisprudence constante que, lorsque des irrégularités justifiant l’application d’une correction financière persistent après la date de la communication écrite des résultats des vérifications, la Commission est en droit et a même l’obligation de tenir compte de cette situation lorsqu’elle détermine la période sur laquelle doit porter la correction financière en cause (arrêts du 9 janvier 2003, Grèce/Commission, C‑157/00, EU:C:2003:5, point 45, et du 7 juin 2013, Portugal/Commission, T‑2/11, EU:T:2013:307, point 63).

110    La Cour a ainsi considéré aux points 43, 44 et 46 de son arrêt du 9 janvier 2003, Grèce/Commission (C‑157/00, EU:C:2003:5), que, s’il était vrai que ni l’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1663/95 de la Commission, du 7 juillet 1995, établissant les modalités d’application du règlement (CEE) n° 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section « garantie » (JO 1995, L 158, p. 6), ni l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement (CEE) n° 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 1970, L 94, p. 13), ne s’opposaient à ce que la période sur laquelle porte une correction financière s’étende au-delà de la date de la communication écrite des résultats des vérifications aux États membres, il n’en restait pas moins que ces dispositions n’autorisaient pas explicitement la Commission à retenir une période allant au-delà de la date de la communication écrite des résultats des vérifications aux États membres et ne fournissaient donc pas une base juridique suffisante pour opérer une telle correction. La Cour a, cependant, estimé que cette base juridique était fournie par l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 ainsi que par les articles 2 et 3 de ce même règlement, lesquels obligeaient la Commission à refuser le financement de dépenses irrégulièrement engagées, dès lors que ces dispositions ne permettaient à la Commission de mettre à la charge du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) que les interventions effectuées conformément aux dispositions communautaires, en sorte que la Commission avait pu valablement faire porter la correction financière sur une période allant au-delà de la communication écrite (arrêt du 7 juin 2013, Portugal/Commission, T‑2/11, EU:T:2013:307, point 64).

111    Ces considérations, en vertu desquelles la Commission pouvait, sur le fondement de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 ainsi que sur celui des articles 2 et 3 de ce même règlement, dans leur version telle que modifiée par le règlement (CE) n° 1287/95 du Conseil, du 22 mai 1995, modifiant le règlement n° 729/70 (JO 1995, L 125, p. 1), étendre une correction financière au-delà de la date de la communication écrite des résultats des vérifications, lorsque des irrégularités justifiant l’application de cette correction financière persistaient après la date d’une telle communication écrite, valent également pour ce qui est de la procédure prévue aux articles 11 et 16 du règlement n° 885/2006 en vue de l’adoption d’une décision selon l’article 52, paragraphe 1, du règlement n° 1306/2013, ces trois dernières dispositions constituant le cadre juridique pertinent ratione temporis pour la procédure d’apurement de conformité en l’espèce.

112    En effet, le règlement n° 729/70 a été remplacé par le règlement (CE) n° 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 1999, L 160, p. 103), ce dernier ayant été abrogé par le règlement n° 1290/2005, qui a lui-même été remplacé par le règlement n° 1306/2013.

113    En l’occurrence, tant la lettre du 20 février 2009 que celle du 22 mars 2010, lesquelles constituent des communications au titre de l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 885/2006 dans le cadre des enquêtes menées sous les références VT/VI/2009/004/CZ et VT/VI/2009/101/CE, faisaient expressément état du point de vue de la Commission quant à l’incompatibilité de la mesure de protection litigieuse avec les dispositions du droit de l’Union en ce qui concernait les exercices 2007 à 2009.

114    Cette mesure n’ayant pas fait l’objet d’une modification ou d’une suppression après l’exercice 2009, la Commission a pu à bon droit, conformément à la jurisprudence citée au point 109 ci-dessus, étendre la période de correction financière aux exercices 2010 à 2012 par l’intermédiaire de ses lettres, respectivement, du 31 janvier 2011 et du 22 avril 2014.

115    S’agissant du dernier argument de la République tchèque, selon lequel la décision attaquée n’est pas conforme à l’article 11, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement n° 885/2006 du fait que, en l’espèce, aucune infraction n’aurait été constatée en ce qui concerne les exercices 2010 à 2012 dans le respect de la procédure contenue audit article, il suffit de souligner que, ainsi que cela a été relevé au point 111 ci-dessus, la Commission était habilitée à étendre la période de correction financière aux exercices 2010 à 2012 sans qu’il lui incombe de réitérer, à l’égard de ces exercices, les étapes procédurales prévues aux articles 11 et 16 du règlement n° 885/2006.

116    Partant, il convient de rejeter l’argument tiré d’une violation des articles 11 et 16 du règlement n° 885/2006 et de l’article 52, paragraphe 1, du règlement n° 1306/2013 ainsi que du droit d’être entendu et des droits de la défense, tels que contenus à l’article 41 de la Charte.

117    Au vu des considérations qui précèdent, il convient de conclure que le second moyen doit être rejeté également.

118    Au vu de tout ce qui précède, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

119    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La République tchèque ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La République tchèque est condamnée aux dépens.

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 octobre 2016.

Signatures


* Langue de procédure : le tchèque.

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