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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Polskie Zdroje v EUIPO (perlage) (Judgment) French Text [2017] EUECJ T-239/16 (28 November 2017) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2017/T23916.html Cite as: [2017] EUECJ T-239/16, EU:T:2017:844, ECLI:EU:T:2017:844 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
28 novembre 2017 (*)
« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne verbale perlage – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001] – Absence de caractère distinctif acquis par l’usage – Article 7, paragraphe 3, du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 3, du règlement (UE) 2017/1001] »
Dans l’affaire T‑239/16,
Polskie Zdroje sp. z o.o. sp.k., établie à Varsovie (Pologne), représentée par Me T. Gawrylczyk, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 16 mars 2016 (affaire R 1129/2015-5), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal perlage comme marque de l’Union européenne,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre),
composé de MM. H. Kanninen, président, J. Schwarcz et C. Iliopoulos (rapporteur), juges,
greffier : M. E. Coulon,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 12 mai 2016,
vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 1er août 2016,
vu la modification de la composition des chambres du Tribunal et la réattribution de l’affaire à la quatrième chambre,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 19 novembre 2014, la requérante, Polskie Zdroje sp. z o.o. sp.k., a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal perlage.
3 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Eaux minérales ».
4 Par décision du 14 avril 2015, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001], lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement (devenu article 7, paragraphe 2, du règlement 2017/1001).
5 Le 12 juin 2015, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de l’examinateur.
6 Par décision du 16 mars 2016 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, ainsi que de l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement (devenu article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001).
7 En premier lieu, s’agissant de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, la chambre de recours a, tout d’abord, considéré que, les produits en cause étant des produits d’usage quotidien, ils étaient destinés à des consommateurs moyens dont le niveau d’attention « n’est pas élevé ». Ensuite, elle a constaté que, étant donné que la marque demandée était constituée d’un vocable ayant une signification en langue française, l’appréciation du caractère descriptif de celle-ci devait se faire du point de vue des consommateurs francophones de l’Union européenne. Se référant au sens du terme français « perlage » donné par le dictionnaire Le Grand Robert (dans sa version électronique), à savoir le « fait de perler, de se former en fines gouttelettes, pour un liquide », la chambre de recours a estimé que ce terme serait compris par les consommateurs francophones comme se rapportant aux bulles qui se forment dans la boisson et donc, en l’espèce, s’agissant d’« eaux minérales », comme une indication que l’eau est gazeuse. La chambre de recours a, dès lors, conclu que la marque demandée présentait un caractère descriptif en français, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, en ce qui concerne les produits en cause.En outre, la chambre de recours a retenu qu’il n’y avait pas lieu d’examiner si le signe demandé était descriptif au Portugal ou en Italie, car, aux termes de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, le paragraphe 1 du même article est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union. Enfin, la chambre de recours a constaté qu’elle ne saurait être liée, d’une part, par le fait que des marques nationales comportant le mot « perlage » avaient été enregistrées en France, en Italie et au Portugal, notamment pour des produits compris dans la classe 32, ou, d’autre part, par des décisions antérieures de l’EUIPO se rapportant à des marques comportant le terme « perlage ».
8 En second lieu, s’agissant de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009, la chambre de recours a estimé qu’il n’était pas possible de conclure, sur la base des éléments soumis par la requérante pour prouver l’existence d’une capacité distinctive acquise par l’usage de la marque, que la marque demandée avait acquis un tel caractère distinctif en Belgique, en France et au Luxembourg lors du dépôt de la demande d’enregistrement.
Conclusions des parties
9 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner l’EUIPO aux dépens.
10 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
11 À l’appui de son recours, la requérante soulève trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, le deuxième, de la violation de l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement et, le troisième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement.
12 Il convient d’examiner d’abord le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009.
Sur le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009
13 La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a procédé à une appréciation erronée du caractère descriptif de la marque demandée, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009. En particulier, elle fait valoir que le terme « perlage » ne saurait être considéré comme descriptif des produits en cause.
14 L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.
15 Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. En outre, l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 énonce que le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.
16 Selon la jurisprudence, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 empêche que les signes ou indications visés par lui soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Cette disposition poursuit ainsi un but d’intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous [arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 31 ; du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, EU:T:2002:44, point 27, et du 18 mai 2017, Sabre GLBL/EUIPO (INSTASITE), T‑375/16, non publié, EU:T:2017:348, point 29].
17 En outre, des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement est demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative (arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 30, et du 18 mai 2017, INSTASITE, T‑375/16, non publié, EU:T:2017:348, point 30).
18 Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques (voir arrêt du 18 mai 2017, INSTASITE, T‑375/16, non publié, EU:T:2017:348, point 31 et jurisprudence citée).
19 Il convient également de rappeler que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la perception qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services visés [arrêts du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, EU:T:2002:41, point 38, et du 18 mai 2017, INSTASITE, T‑375/16, non publié, EU:T:2017:348, point 34].
20 C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le premier moyen soulevé dans le cadre du présent recours.
21 En l’espèce, en premier lieu, s’agissant du public pertinent, il y a lieu d’entériner le constat de la chambre de recours, déjà formulé par l’examinateur, selon lequel les produits en cause, étant d’usage courant, sont destinés à l’ensemble des consommateurs, constat au demeurant non contesté par la requérante.
22 Deuxièmement, il y a lieu de constater, ainsi que l’a, à bon droit, relevé la chambre de recours au point 14 de la décision attaquée, que l’appréciation du caractère descriptif de la marque demandée doit se faire du point de vue des consommateurs moyens francophones de l’Union, dès lors que ladite marque est essentiellement constituée d’un vocable ayant une signification en français.
23 Troisièmement, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé, au point 13 de la décision attaquée, que le degré d’attention du consommateur moyen, eu égard à la nature des produits, « n’[était] pas élevé ». Cette dernière constatation ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante, présenté dans le cadre du moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, selon lequel qualifier le niveau d’attention de « pas élevé », pour des produits d’usage quotidien, pourrait « laisser entendre » que le niveau d’attention devrait être assimilé au niveau d’attention « faible ». À cet égard, force est de constater que, d’une part, la décision attaquée ne contient aucune référence, explicite ou implicite, à un prétendu niveau d’attention faible et, d’autre part, le fait que les produits visés par la marque demandée soient des produits d’usage quotidien ne permet aucunement de déduire, ni de « suggérer », que le niveau d’attention du public est faible.
24 Par conséquent, en application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, le public pertinent par rapport auquel il convient d’apprécier le motif absolu de refus est le consommateur moyen francophone, le signe verbal en cause consistant en un mot français.
25 En second lieu, s’agissant du caractère descriptif de la marque demandée, il convient, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, d’examiner, sur la base d’une signification donnée de ladite marque, si le signe verbal perlage présente avec les produits en cause un rapport suffisamment direct et concret, de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description desdits produits ou d’une de leurs caractéristiques [voir, en ce sens, arrêts du 26 novembre 2003, HERON Robotunits/OHMI (ROBOTUNITS), T‑222/02, EU:T:2003:315, point 38, et du 18 mai 2017, INSTASITE, T‑375/16, non publié, EU:T:2017:348, point 38 et jurisprudence citée].
26 S’agissant de la signification du signe en cause, la chambre de recours a considéré, au point 19 de la décision attaquée, que le consommateur moyen francophone, confronté à l’inscription « perlage » sur un produit comme l’eau minérale, déduirait de manière immédiate et sans autre réflexion que cette inscription se rapporte à la présence de bulles dans cette eau.
27 La requérante conteste que le terme « perlage » puisse être considéré comme descriptif des produits en cause. Tout d’abord, elle fait valoir que le terme « perlage », présent dans des marques enregistrées dans différents pays uniquement pour des boissons alcoolisées, ne présente aucun lien direct et réel avec le produit en cause, à savoir l’eau minérale, et ne saurait donc être considéré comme descriptif de ce produit. Ensuite, la requérante soutient que ce terme, employé à l’égard d’une eau minérale, est fantaisiste ou, tout du moins, allusif et mérite dès lors d’être protégé. [RQ, point 15] Enfin, la chambre de recours ne saurait affirmer que le terme « perlage » est descriptif en France, alors qu’elle n’a présenté aucune preuve ayant trait au terme « perlage » ou à la connotation de ce terme en lien avec le produit en cause. [RQ, points 15-16]
28 À cet égard, l’appréciation de la chambre de recours doit être approuvée. En effet, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le fait qu’une expression peut revêtir plusieurs significations n’exclut pas l’existence d’un caractère descriptif. Ainsi, pour se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, il suffit que, en au moins une de ses significations potentielles, la marque demandée puisse être utilisée à des fins descriptives des produits en cause (arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 32).
29 En l’espèce, premièrement, il résulte de la définition du dictionnaire Le Grand Robert que le terme « perlage » se réfère, d’une part, au « fait de perler, de se former en fines gouttelettes, pour un liquide » et, d’autre part, à la « formation de gouttelettes d’huile aux électrodes des bougies d’un moteur à explosion, par suite d’une combustion incomplète ». Le terme « perlage » indique donc, dans sa première acception, que le produit concerné, à savoir l’eau minérale, contient des bulles et qu’il s’agit d’une boisson gazeuse. Contrairement à ce que soutient la requérante, il existe un lien évident entre le terme « perlage » et les produits visés par la marque demandée, à savoir le fait que le signe se rapporte à la présence de bulles dans l’eau minérale.
30 Deuxièmement, même à supposer que le mot « perlage » soit, comme l’affirme la requérante, utilisé en rapport avec des champagnes ou d’autres boissons alcoolisées, la signification du terme n’en est pas moins celle de l’apparition de gouttelettes dans n’importe quel liquide. Le public pertinent percevra immédiatement, et sans autre réflexion, que le signe demandé évoque la présence de bulles, dans le produit en cause, à savoir l’eau minérale.
31 Troisièmement, quant à la prétendue absence d’éléments probants se rapportant à la signification du terme « perlage », il suffit de noter que la chambre de recours a appuyé sa décision sur la définition tirée de l’un des dictionnaires les plus utilisés de la langue française, Le Grand Robert. Partant, l’allégation de la requérante est non fondée.
32 Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 doit être écarté comme non fondé, la chambre de recours ayant conclu, à bon droit, que le signe demandé était descriptif des produits en cause.
Sur le moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009
33 La requérante conteste, en substance, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la marque demandée n’a pas acquis un caractère distinctif par l’usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009.
34 À cet égard, d’une part, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas accordé une valeur probante suffisante au Superior Taste Award 2010, prix décerné par l’Institut international du goût et de la qualité (iTQi), établi à Bruxelles (Belgique), alors que cette organisation réunit un nombre important de goûteurs professionnels de différentes nationalités et de renommée mondiale, dont une partie significative de culture française (Belgique et France). D’autre part, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas apprécié correctement ni l’importance ni la valeur des prix Superbrands pour les années 2010-2014, car, bien que ces prix concernent le marché polonais, ils ont été décernés par l’organisation mondiale indépendante Superbrands à la suite d’une enquête effectuée, en substance, auprès d’un large cercle de consommateurs. Dès lors, le concours lui-même et ses résultats auraient bénéficié d’une diffusion mondiale et seraient donc d’une importance essentielle pour les titulaires des marques au-delà des frontières nationales.
35 L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.
36 En vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009, les motifs absolus de refus, visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), de ce même règlement [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du règlement 2017/1001], ne s’opposent pas à l’enregistrement d’une marque, si celle-ci a acquis, pour les produits ou les services pour lesquels l’enregistrement est demandé, un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait. En effet, dans l’hypothèse visée à l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009, le fait que le signe constituant la marque en question est effectivement perçu, par le public pertinent, comme une indication de l’origine commerciale d’un produit ou d’un service, est le résultat d’un effort économique du demandeur de la marque. Cette circonstance justifie que soient écartées les considérations d’intérêt général sous-jacentes à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du même règlement, lesquelles exigent que les marques visées par ces dispositions puissent être librement utilisées afin d’éviter de créer un avantage concurrentiel illégitime en faveur d’un seul opérateur économique [voir arrêts du 21 avril 2010, Schunk/OHMI (Représentation d’une partie d’un mandrin), T‑7/09, non publié, EU:T:2010:153, point 38 et jurisprudence citée, et du 24 février 2016, Coca-Cola/OHMI (Forme d’une bouteille à contours sans cannelures), T‑411/14, EU:T:2016:94, point 66].
37 Il ressort de la jurisprudence que, pour que soit admis l’enregistrement d’une marque en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009, le caractère distinctif acquis par l’usage d’une marque doit être démontré dans la partie de l’Union où existait un motif absolu de refus au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), dudit règlement [voir arrêts du 21 avril 2010, Représentation d’une partie d’un mandrin, T‑7/09, non publié, EU:T:2010:153, point 40 et jurisprudence citée, et du 23 février 2016, Consolidated Artists/OHMI – Body Cosmetics International (MANGO), T‑761/14, non publié, EU:T:2016:91, point 16 et jurisprudence citée]. Toutefois, la Cour a jugé qu’il serait excessif d’exiger que la preuve d’une telle acquisition soit apportée pour chaque État membre pris individuellement (arrêt du 24 mai 2012, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli/OHMI, C‑98/11 P, EU:C:2012:307, point 62).
38 Il ressort également de la jurisprudence que l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage de la marque exige qu’au moins une fraction significative du public pertinent identifie grâce à la marque les produits ou les services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée. Toutefois, s’agissant des circonstances dans lesquelles une telle condition peut être regardée comme satisfaite, elles ne sauraient être établies seulement sur la base de données générales et abstraites [voir arrêts du 21 avril 2010, Représentation d’une partie d’un mandrin, T‑7/09, non publié, EU:T:2010:153, point 39 et jurisprudence citée, et du 16 mars 2016, Työhönvalmennus Valma/OHMI (Forme d’une boîte de jeu contenant des blocs en bois), T‑363/15, non publié, EU:T:2016:149, point 38 et jurisprudence citée].
39 En outre, il y a lieu de relever qu’il ressort de la jurisprudence que le caractère distinctif d’une marque, y compris celui acquis par l’usage, doit être apprécié par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et en tenant compte de la perception présumée d’un consommateur moyen de la catégorie des produits ou des services en cause normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir arrêts du 21 avril 2010, Représentation d’une partie d’un mandrin, T‑7/09, non publié, EU:T:2010:153, point 42 et jurisprudence citée, et du 24 février 2016, Forme d’une bouteille à contours sans cannelures, T‑411/14, EU:T:2016:94, point 71 et jurisprudence citée).
40 Enfin, les éléments susceptibles de démontrer que la marque est devenue apte à identifier le produit ou le service concerné comme provenant d’une entreprise déterminée doivent être appréciés globalement. Dans le cadre de cette appréciation, peuvent être pris en considération, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque, l’importance des investissements faits par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit ou le service comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque, les déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles ainsi que les sondages d’opinions [voir arrêt du 21 avril 2015, Louis Vuitton Malletier/OHMI – Nanu-Nana (Représentation d’un motif à damier marron et beige), T‑359/12, EU:T:2015:215, point 90 et jurisprudence citée]. Si, sur la base de tels éléments, les milieux intéressés ou, à tout le moins, une fraction significative de ceux-ci identifient grâce à la marque le produit ou le service comme provenant d’une entreprise déterminée, il doit en être conclu que la condition posée par l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009 est remplie [voir arrêts du 21 avril 2010, Représentation d’une partie d’un mandrin, T‑7/09, non publié, EU:T:2010:153, point 41 et jurisprudence citée, et du 26 mars 2015, Bateaux mouches/OHMI (BATEAUX MOUCHES), T‑72/14, non publié, EU:T:2015:194, point 66].
41 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si, en l’espèce, la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en considérant que la marque demandée n’avait pas acquis de caractère distinctif après l’usage qui en avait été fait, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009.
42 En l’espèce, il ressort du dossier de l’EUIPO que la requérante a présenté, lors de la procédure administrative, comme éléments de preuve tendant à établir le caractère distinctif acquis par l’usage de la marque demandée, trois types de documents :
– des prix et des distinctions décernés au produit en cause au niveau national (en grande majorité obtenus en Pologne) et international (notamment, le Superior Taste Award 2010 décerné par l’iTQi) ;
– des publications sur l’Internet effectuées entre le 4 janvier 2011 et le 7 janvier 2015 et un article de presse concernant le produit en cause (tous en polonais) ; et
– des factures relatives à la vente du produit en cause à l’étranger pour les années 2014 et 2015, notamment, deux factures de vente à des entreprises établies en France ainsi qu’une facture de vente en Estonie, en Espagne, en Hongrie, en Roumanie, en Corée du Sud,aux États-Unis et en Russie.
43 À titre liminaire, ainsi qu’il a été indiqué au point 37 ci-dessus, une marque ne peut être enregistrée en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009 que si la preuve est rapportée qu’elle a acquis un caractère distinctif par l’usage qui en a été fait dans la partie de l’Union concernée par le motif de refus d’enregistrement.
44 En l’espèce, comme il a été conclu au point 24 ci-dessus, le critère de refus à l’enregistrement au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 se rapporte aux États membres francophones. Cette constatation n’est d’ailleurs pas contestée par les parties. Il s’ensuit que les preuves produites par la requérante doivent être appréciées par rapport à leur capacité à prouver que, lors du dépôt de la demande de marque de l’Union européenne, la marque demandée possédait un caractère distinctif dans les États membres francophones, à savoir la Belgique, la France, et le Luxembourg, ou, à tout le moins, pour une fraction significative du public pertinent de ceux-ci.
45 À cet égard, en premier lieu, il convient de constater que, comme l’a relevé la chambre de recours à bon droit au point 29 de la décision attaquée, la grande majorité des éléments de preuve soumis par la requérante, à savoir les publications sur l’Internet effectuées entre le 4 janvier 2011 et le 7 janvier 2015 et l’article de presse concernant le produit en cause, est en polonais et concerne l’utilisation et la promotion de la marque demandée en Pologne. Or, ces éléments de preuve ne sont pas pertinents pour l’appréciation du caractère distinctif acquis par l’usage sur le territoire des États membres francophones.
46 En deuxième lieu, il ressort du dossier que les seuls éléments de preuve tendant à établir le caractère distinctif acquis par l’usage sur le territoire pertinent sont, d’une part, les deux factures de vente du produit en cause en France (voir point 42 ci-dessus) et, d’autre part, le Superior Taste Award 2010 attribué par l’iTQi et les prix Superbrands pour les années 2010-2014 attribués par l’organisation mondiale Superbrands, dans la mesure où ces dernières distinctions nationales pourraient permettre d’extrapoler des conclusions plus larges concernant d’autres États membres.
47 Premièrement, s’agissant des deux factures de vente en France, force est de constater que celles-ci se révèlent insuffisantes pour satisfaire aux exigences de la jurisprudence rappelée aux points 37 à 40 ci-dessus. En effet, les factures de vente, en tant que telles, ne démontrent pas que le public visé par les produits en cause perçoit le signe comme une indication d’origine commerciale [voir, par analogie, arrêt du 12 septembre 2007, Glaverbel/OHMI (Texture d’une surface de verre), T‑141/06, non publié, EU:T:2007:273, point 41]. En l’espèce, ces deux factures ne prouvent aucunement qu’au moins une fraction significative du public pertinent francophone identifie, grâce à la marque demandée, les produits désignés par celle-ci comme provenant de la requérante (voir point 38 ci-dessus). En l’absence d’autres indications dans le dossier qui auraient permis d’évaluer la réalité et l’intensité de l’usage de la marque demandée dans les États membres francophones (voir point 40 ci-dessus), ces factures ne sauraient non plus être considérées comme des preuves secondaires pouvant corroborer, le cas échéant, des preuves directes du caractère distinctif acquis par l’usage (voir, en ce sens, arrêt du 24 février 2016, Forme d’une bouteille à contours sans cannelures, T‑411/14, EU:T:2016:94, point 83).
48 Deuxièmement, s’agissant du Superior Taste Award 2010 attribué par l’iTQi, contrairement à ce que semble soutenir la requérante, le fait qu’une partie des membres de l’iTQi soient de culture française n’est pas susceptible de démontrer que, à la date de la demande de marque de l’Union européenne, la marque demandée avait acquis un caractère distinctif pour les consommateurs francophones. D’une part, le caractère distinctif acquis par l’usage doit être apprécié en tenant compte de la perception présumée d’un consommateur moyen de la catégorie des produits en cause normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir point 39 ci-dessus) et donc non pas en tenant compte de celle d’un public spécialisé composé de goûteurs professionnels. À cet égard, il y a lieu de rappeler que la définition du public pertinent est liée à l’examen des destinataires des produits concernés, car c’est par rapport à ceux-ci que la marque doit développer sa fonction essentielle [voir arrêt du 29 septembre 2010, CNH Global/OHMI (Combinaison des couleurs rouge, noire et grise pour un tracteur), T‑378/07, EU:T:2010:413, point 38 et jurisprudence citée]. D’autre part et en tout état de cause, la requérante n’établit l’existence d’aucun lien entre le prix international qu’est le Superior Taste Award 2010 et le public pertinent, étant donné qu’elle ne démontre pas que ce prix international reflète, d’une manière ou d’une autre, la perception d’un consommateur moyen francophone à l’égard de la marque demandée.
49 Troisièmement, s’agissant des distinctions nationales Superbrands pour les années 2010-2014 que la requérante invoque, il y a lieu de constater, tout d’abord, que celles-ci concernent des marques polonaises et n’ont, dès lors, aucune incidence sur l’appréciation de la connaissance de la marque demandée par le public francophone. En outre, le fait que les résultats des distinctions nationales aient bénéficié d’une diffusion mondiale, comme le prétend la requérante, n’établit aucunement le caractère distinctif acquis par l’usage pour les consommateurs francophones. Enfin, le seul fait que le signe en cause ait été utilisé sur le territoire de l’Union pour une période d’au moins quatre ans ne suffit pas non plus pour démontrer que le public visé par les produits en cause le perçoit comme une indication d’origine commerciale (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2007, Texture d’une surface de verre, T‑141/06, non publié, EU:T:2007:273, point 42).
50 En dernier lieu, dans un souci d’exhaustivité, il y a lieu de constater que le reste des éléments de preuve soumis par la requérante, notamment les factures de vente dans des États tiers (Corée du Sud, États-Unis et Russie), sont dénués de pertinence, dans la mesure où ils ne peuvent permettre de tirer des conclusions sur l’usage de la marque demandée au sein de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 24 juin 2014, Unister/OHMI (Ab in den Urlaub), T‑273/12, non publié, EU:T:2014:568, point 45].
51 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que les preuves apportées par la requérante ne sont pas suffisantes pour démontrer que, lors du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque demandée, les consommateurs moyens d’eau minérale dans les États membres francophones ou, à tout le moins, dans une fraction significative de ceux-ci identifiaient, grâce à la marque demandée, le produit en cause comme provenant de la requérante.
52 C’est donc sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a estimé que les preuves soumises de l’utilisation de la marque demandée ne permettaient pas de conclure que celle-ci avait acquis un caractère distinctif par l’usage.
53 Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009, comme non fondé.
Sur le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009
54 La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir procédé à une appréciation erronée du caractère distinctif de la marque demandée et d’avoir ainsi violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. En substance, elle soutient que la décision attaquée, décrivant le niveau d’attention du public pertinent comme « n’étant pas élevé », peut suggérer l’idée que ce niveau d’attention est « faible » du fait qu’elle désigne les produits en cause comme des « produits d’usage quotidien ».
55 Premièrement, il y a lieu de constater que la chambre de recours a rejeté le recours sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, ainsi que de l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement, et non pas, comme l’avait fait l’examinateur (voir point 4 ci-dessus), sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. Partant, le grief invoqué par la requérante, tiré d’une prétendue violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, doit être rejeté comme étant inopérant.
56 Deuxièmement et en tout état de cause, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort clairement du libellé de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, il suffit que l’un des motifs absolus de refus énumérés dans cette disposition s’applique pour que le signe en cause ne puisse être enregistré comme marque de l’Union européenne (arrêts du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, EU:C:2002:506, point 29, et du 18 mai 2017, INSTASITE, T‑375/16, non publié, EU:T:2017:348, point 70).
57 En l’espèce, dès lors qu’il a été constaté que la chambre de recours a conclu à bon droit que la marque demandée était descriptive des produits en cause, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, il y a lieu de rejeter le moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, comme inopérant.
58 Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté.
Sur les dépens
59 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
60 La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Polskie Zdroje sp. z o.o. sp.k. est condamnée aux dépens.
Kanninen | Schwarcz | Iliopoulos |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 novembre 2017.
Signatures
* Langue de procédure : le polonais.
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