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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Wanrgue v Comittee of the Regions (Judgment) French Text [2017] EUECJ T-682/15 (22 September 2017) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2017/T68215.html Cite as: ECLI:EU:T:2017:644, [2017] EUECJ T-682/15, EU:T:2017:644 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)
22 septembre 2017 (*)
« Pourvoi - Fonction publique - Fonctionnaires - Conditions de travail - Heures supplémentaires - Chauffeur de grade AST 6 - Suppression du droit à l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires - Égalité des armes - Obligation de motivation - Erreurs de droit - Dénaturation des faits »
Dans l’affaire T-682/15 P,
ayant pour objet un pourvoi formé contre l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 15 septembre 2015, Wanègue/Comité des régions (F-21/15, EU:F:2015:102), et tendant à l’annulation de cette ordonnance,
Patrick Wanègue, fonctionnaire du Comité des régions, demeurant à Dilbeek (Belgique), représenté par Me M.-A. Lucas, avocat,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant
Comité des régions, représenté par M. J. C. Cañoto Argüelles et Mme S. Bachotet, en qualité d’agents, assistés de Me B. Wägenbaur, avocat,
partie défenderesse en première instance,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),
composé de MM. M. Jaeger (rapporteur), président, MM. M. van der Woude et H. Kanninen, juges,
greffier : M. E. Coulon,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le requérant, M. Patrick Wanègue, demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 15 septembre 2015, Wanègue/Comité des régions (F-21/15, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:F:2015:102), par laquelle ledit Tribunal a rejeté sa demande visant l’annulation de la décision du directeur de l’administration et des finances du Comité des régions faisant fonction (ci-après le « directeur de l’administration et des finances »), agissant en tant qu’autorité investie du pouvoir de nomination, lui supprimant le bénéfice de l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires avec effet au 1er juillet 2014, ainsi que la condamnation du Comité des régions à lui verser à nouveau cette indemnité depuis cette date, augmentée d’intérêts de retard, et l’indemnisation par le Comité des régions des préjudices matériel et moral que la décision susmentionnée lui avait causés.
Faits à l’origine du litige, procédure en première instance et ordonnance attaquée
2 Les faits à l’origine du litige sont énoncés aux points 16 à 30 de l’ordonnance attaquée dans les termes suivants :
« 16 Le requérant a été nommé fonctionnaire de catégorie D au sein du Comité économique et social européen (CESE) le 1er octobre 1994. Il a ensuite été transféré au Comité des régions le 1er décembre 1996, où il a occupé un poste de chauffeur au sein des services conjoints du Comité des régions et du CESE.
17 Par décision du secrétaire général du Comité des régions, adoptée le 26 novembre 1999, le requérant a été mis à la disposition du secrétaire général du Comité des régions. La décision susmentionnée prévoyait que “[l]’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires des chauffeurs affectés [était] attribuée [au requérant]”. Par la suite, le requérant a principalement assuré, avec un collègue, les déplacements du président du Comité des régions, tout en restant formellement mis à disposition du secrétaire général.
18 Le 1er novembre 2004, après avoir réussi un concours interne de passage de catégorie, le requérant est passé du grade D*4 au grade C*4, l’une des catégories existant pendant la période transitoire instaurée du 1er mai 2004 au 30 avril 2006 par l’article 1er de l’annexe XIII du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le “statut”)], dans sa version en vigueur au 1er mai 2004.
19 Le 1er mai 2006, à l’issue de la période transitoire de deux ans mentionnée au point précédent, la catégorie C* a été remplacée par le groupe de fonctions AST, dont le requérant relève depuis lors.
20 Par décision du 15 octobre 2009, le requérant, alors fonctionnaire de grade AST 4, a été promu au grade AST 5 avec effet rétroactif au 1er janvier 2009.
21 Le requérant a ensuite été promu au grade AST 6 à compter du 1er janvier 2013.
22 Après l’entrée en vigueur du règlement no 1023/2013, le requérant a été classé au sein du groupe de fonctions AST dans l’emploi type “assistant en transition”, en application de la disposition transitoire contenue à l’article 31, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut. Cette décision a pris effet le 1er janvier 2014.
23 Par note du 28 mai 2014, le directeur de l’administration et des finances a informé le requérant que, depuis la date de la décision de sa promotion au grade AST 5, il n’avait plus droit à l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires prévue par l’article 3 de l’annexe VI du statut (ci-après l’“indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires”). La note précisait cependant que le Comité des régions ne procéderait à aucun recouvrement des sommes indûment versées, en application de l’article 85 du statut, et que, par souci de sollicitude, l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires ne serait supprimée qu’à compter du 1er juillet 2014 (ci-après la “note du 28 mai 2014”).
24 Le 3 juin 2014, le directeur de l’administration et des finances a adopté la décision no 0112/2014 portant suppression, à compter du 1er juillet 2014, de l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires versée au requérant (ci-après la “décision litigieuse”).
25 Par courriel du 29 juillet 2014, le chef de l’unité “Services intérieurs” de la direction “Services aux membres et greffe” du secrétariat général du Comité des régions, dont le requérant faisait partie, a indiqué à celui-ci que, de son point de vue, il était inacceptable qu’il continue à effectuer des heures supplémentaires régulières sans rémunération et qu’il étudierait la possibilité de le réaffecter sur un autre poste que celui de chauffeur. Le requérant a répondu le jour même qu’il refuserait une telle réaffectation.
26 Le 25 août 2014, le requérant a introduit une réclamation contre la décision litigieuse.
27 Par décision du 27 octobre 2014, le secrétaire général du Comité des régions, en qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination, a rejeté la réclamation du requérant (ci-après la “décision de rejet de la réclamation”).
28 Depuis le 1er décembre 2014, date à laquelle le requérant est rentré d’un congé de maladie, celui-ci est affecté au pool des chauffeurs conformément au plan de rotation annuel pour l’année 2015 et aux plannings hebdomadaires arrêtés par son chef de secteur, mais n’assure plus les déplacements du secrétaire général ni du président du Comité des régions.
29 Le 3 février 2015, le requérant s’est vu proposer un poste au sein de l’unité « Infrastructures » de la direction de la logistique des services conjoints du CESE et du Comité des régions, en tant que responsable de l’inventaire du mobilier et des déménagements.
30 Depuis le 1er juillet 2014, le requérant n’a plus effectué d’heures supplémentaires, à l’exception d’une heure au mois d’août 2014. »
3 Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 5 février 2015, le requérant a demandé l’annulation de la décision n° 0112/2014 portant suppression, à compter du 1er juillet 2014, de son droit à l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires (ci-après la « décision attaquée »), la condamnation du Comité des régions à lui payer de nouveau l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires à compter du 1er juillet 2014 ainsi que des intérêts de retard jusqu’à complet paiement, la condamnation du Comité des régions à lui verser une somme provisoirement évaluée à 1 000 euros en réparation du préjudice matériel susceptible de lui avoir été causé par la décision attaquée ainsi qu’une somme dont le Tribunal apprécierait le montant en réparation de son préjudice moral et la condamnation du Comité des régions aux dépens.
4 Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a rejeté la demande du requérant comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondée.
Sur le pourvoi
Procédure devant le Tribunal et conclusions des parties
5 Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 26 novembre 2015, le requérant a formé le présent pourvoi, sur le fondement de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne.
6 Le 8 avril 2016, le Comité des régions a déposé son mémoire en réponse.
7 Le 19 avril 2016, le requérant a demandé un deuxième tour de mémoires. Le président de la chambre des pourvois a fait droit à cette demande.
8 Le 29 juin 2016, le requérant a déposé la réplique.
9 Le 18 août 2016, le Comité des régions a déposé la duplique.
10 Par lettre du 22 septembre 2016, le requérant a formulé une demande motivée, au titre de l’article 207, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, aux fins d’être entendu dans le cadre de la phase orale de la procédure. Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier de l’affaire, a décidé de statuer sans phase orale de la procédure.
11 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
- annuler l’ordonnance attaquée ;
- statuer sur le recours et lui allouer le bénéfice des conclusions de la requête en première instance ;
- condamner le Comité des régions aux dépens des deux instances.
12 Le Comité des régions conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
- rejeter le pourvoi ;
- condamner le requérant aux dépens.
En droit
13 À l’appui du pourvoi, le requérant invoque cinq moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 51, paragraphe 1, et de l’article 53, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique et du principe d’égalité des parties devant le juge de l’Union européenne, le deuxième, de plusieurs erreurs de droit dans l’interprétation des dispositions du droit de l’Union et d’une violation de l’obligation de motivation, le troisième, d’une erreur dans l’interprétation de l’article 31 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et de l’article 6 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (JO 2003, L 299, p. 9), et d’une violation de l’obligation de motivation, le quatrième, d’une dénaturation de la requête en première instance, de plusieurs erreurs de droit commises par le Tribunal de la fonction publique et d’une violation de l’obligation de motivation et, le cinquième, d’une application erronée de l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique.
Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 51, paragraphe 1, et de l’article 53, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique et du principe d’égalité des parties devant le juge de l’Union
14 Le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir calculé le délai de deux mois et dix jours pour le dépôt du mémoire en défense en première instance à partir de la réception de la signification de la régularisation de la requête en première instance et non de celle de la signification de ladite requête, de sorte que ledit mémoire en défense a été versé au dossier alors que, selon lui, il a été déposé hors délai, le privant de la possibilité de demander le bénéfice d’un arrêt par défaut.
15 À cet égard, le requérant, en substance, fait valoir qu’il ressort de la fiche n° 52411 du greffe du Tribunal de la fonction publique relative à la signification de la requête en première instance non régularisée au Comité des régions que ladite requête a été signifiée au Comité des régions le 19 février 2015 via l’application e-Curia et que, dès lors, cette requête doit être présumée reçue par le Comité des régions au plus tard à l’expiration du septième jour suivant le 19 février 2015, à savoir le 27 février 2015. Il ajoute que la régularisation de la même, consistant en la production d’une version lisible des pages 50 à 55 des annexes et enregistrée par le greffe du Tribunal de la fonction publique sous la fiche n° 52464, a été déposée le 23 février 2015 et, normalement, a été signifiée le 25 février 2015 via l’application e-Curia. Partant, ladite régularisation devrait être présumée reçue par le Comité des régions au plus tard à l’expiration du septième jour suivant le 25 février 2015, à savoir le 5 mars 2015. En outre, le requérant soutient que les services du greffe du Tribunal de la fonction publique lui auraient confirmé par téléphone que la requête non régularisée en question avait été signifiée via l’application e-Curia au Comité des régions.
16 À la lumière de ces considérations, le requérant soutient que l’expiration du délai pour le dépôt du mémoire en défense en première instance du Comité des régions aurait dû être fixé au 7 mai 2015 et non au 15 mai 2015, comme établi par le greffe du Tribunal de la fonction publique. Par conséquent, dans la mesure où le Comité des régions a déposé ledit mémoire en défense le 13 mai 2015, donc hors délai, le requérant fait valoir que le Tribunal de la fonction publique aurait dû, d’une part, considérer ce mémoire en défense comme irrecevable et, d’autre part, rendre un arrêt par défaut en lui adjugeant ses conclusions.
17 Dans la réplique, afin de démontrer que la requête en première instance a été signifiée via l’application e-Curia le 19 février 2015, le requérant avance d’autres arguments. Premièrement, il fait valoir que la fiche n° 52411 fait état de la notification de la requête en première instance non régularisée au Comité des régions le 19 février 2015 et que d’autres fiches, notamment les fiches nos 52412, 52413 et 52414, font état d’une notification à la Commission européenne, au Conseil de l’Union européenne et au Parlement européen le même jour, ce qui implique, forcément, la notification préalable de ladite requête au Comité des régions.
18 Deuxièmement, le requérant soutient que des indices démontrent que la requête en première instance non régularisée a été signifiée au Comité des régions via l’application e-Curia. En premier lieu, le destinataire indiqué sur l’étiquette apposée dans le cadre relatif au dépôt de l’envoi postal recommandé de l’accusé de réception de la signification de ladite requête ne serait pas, comme dans la fiche n° 52411, le Comité des régions, mais son président, comme dans les fiches nos 52412, 52413 et 52414, notifiées au président de la Commission, au président du Conseil et au jurisconsulte du Parlement via l’application e-Curia par le biais de leurs assistants. Cela impliquerait que l’indication du destinataire de l’envoi du 4 mars 2015 par recommandé avec accusé de réception a été reprise d’une signification au président du Comité des régions de cette requête non régularisée via l’application e-Curia par le biais d’un assistant. En second lieu, le cadre relatif à la remise dudit envoi recommandé ne serait pas complété, mais serait revêtu d’un post-it de couleur rouge apposé par un employé du greffe du Tribunal de la fonction publique, sur lequel figurerait une mention manuscrite indiquant « [prénom illisible] a téléphoné avec date de réception. 5/03/2015→15/5/2015 ». Ce document serait suivi d’un courriel en langue allemande adressé par Mme Y, assistante du service juridique du Comité des régions, à Mme Z, assistante du greffe du Tribunal de la fonction publique, dont il ressortirait, en substance, que, à une date antérieure à l’envoi dudit courriel, le greffe du Tribunal de la fonction publique s’était adressé à Mme Y pour obtenir la date de réception de la signification de la même requête. Cela démontrerait que Mme Y était considérée par le greffe du Tribunal de la fonction publique comme la personne chargée de la réception des significations.
19 Troisièmement, le requérant fait valoir que, au point 10 du mémoire en défense en première instance, le Comité des régions lui-même ne conteste pas le fait que la requête en première instance a été notifiée via l’application e-Curia.
20 Quatrièmement, le requérant soutient que, en indiquant au point 11 du mémoire en défense en première instance qu’à la date de la signification de la requête en première instance le Comité des régions n’avait pas encore consenti à la signification des actes de procédure via l’application e-Curia, ledit Comité reconnaît implicitement qu’une notification de ladite requête est intervenue avant qu’il n’accepte ce mode de signification et que cette signification n’était pas valable, de sorte que cette requête a dû, en définitive, lui être signifiée par envoi recommandé.
21 Enfin, le requérant demande au Tribunal l’adoption de plusieurs mesures d’organisation de la procédure visant, d’une part, à démontrer que le Comité des régions n’a pas introduit dans le délai le mémoire en défense en première instance et, d’autre part, à lui faire communiquer la demande d’intervention du Parlement du 10 avril 2015 dans l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance attaquée.
22 Le Comité des régions fait valoir que l’affirmation du requérant est fondée sur une prémisse erronée. Selon lui, contrairement à ce que le requérant soutient, en appuyant son affirmation sur une prétendue indication reçue par téléphone de la part du greffe du Tribunal de la fonction publique, il n’avait pas encore consenti à la signification des actes de procédure via l’application e-Curia à la date de la notification de la requête en première instance.
23 Dans la duplique, le Comité des régions soutient que, bien que la fiche n° 52411 soit datée du 19 février 2015, la requête en première instance à laquelle se référait a été envoyée le 4 mars 2015 par le greffe du Tribunal de la fonction publique et reçue le 6 mars 2015 par le Comité des régions, comme cela ressort d’un document annexé qui lui a été fourni par le service clients de la poste belge. En outre, il fait valoir que, d’une part, Mme Y n’a demandé son inscription à l’application e-Curia que le 2 mars 2016, comme le démontre le courriel automatique envoyé par l’application et joint en annexe, et que, d’autre part, en réponse à l’affirmation du requérant selon laquelle le président du Comité des régions aurait pu accepter la signification des actes de procédure via l’application e-Curia par le biais d’un assistant, aucun membre du cabinet du président du Comité des régions n’y avait accès. À cet égard, il a déposé une attestation signée par le chef de cabinet de son président qui confirme cette affirmation.
24 Enfin, le Comité des régions annexe à la duplique un courriel envoyé par le greffe du Tribunal de la fonction publique, daté du 3 mars 2015, dans lequel ce dernier lui a communiqué la requête en première instance et les annexes. Il explique que cet envoi faisait suite à une discussion entre le greffe du Tribunal de la fonction publique et Mme Y, qui avait reçu par voie postale la notification de la régularisation de la requête en première instance, consistant en une version lisible des pages 50 à 55 des annexes, enregistrée par le greffe du Tribunal de la fonction publique sous la fiche n° 52464, mais qui, en revanche, n’avait jamais reçu ladite requête en tant que telle, enregistrée sous la fiche n° 52411. Selon lui, ledit courriel démontre, d’une part, qu’il n’a pas réceptionné cette requête avant cette date et, d’autre part, que, même en admettant que le délai pour déposer le mémoire en défense en première instance avait commencé à courir depuis ce jour, à savoir le 3 mars 2015, le dépôt dudit mémoire en défense le 13 mai 2015 n’aurait pas été tardif.
25 Il y a lieu de constater que l’argument du requérant selon lequel le service du greffe du Tribunal de la fonction publique lui a confirmé par téléphone que la requête en première instance avait été notifiée au Comité des régions via l’application e-Curia ne peut pas prospérer, dans la mesure où le requérant n’apporte aucune preuve à l’appui de son affirmation susceptible de démontrer que ledit service lui aurait donné ce genre d’information. Par ailleurs, il y a également lieu de constater qu’il ressort du dossier en première instance que la signification de ladite requête a été faite par le biais d’une lettre recommandée avec accusé de réception datée du 4 mars 2015, et non via l’application e-Curia. En effet, dans l’espace de la fiche n° 52411 consacré à la modalité de signification de cette requête, il est indiqué « [R]ecommandé A/R », alors que, dans le même espace des fiches nos 52412, 52413 et 52414 relatives à la signification de la même requête aux présidents de la Commission et du Conseil et au jurisconsulte du Parlement, il est indiqué « e-Curia ». Partant, il résulte de ces fiches que la notification s’est faite selon des modalités différentes entre le Comité des régions, qui ne disposait pas de l’application e-Curia, et la Commission, le Conseil et le Parlement, qui disposaient de cette application.
26 Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments soulevés par le requérant dans la réplique. À cet égard, il convient de relever que le Comité des régions a apporté, dans la duplique, la preuve du fait que Mme Y, considérée par le requérant, à la lumière des échanges entre elle et le greffe du Tribunal de la fonction publique, comme étant l’assistante qui assurait la gestion des significations des requêtes au sein du Comité des régions, n’a demandé l’inscription à l’application e-Curia qu’en date du 2 mars 2016 et qu’elle ne disposait donc pas de cette inscription à la date du dépôt de la requête en première instance.
27 Il en va de même pour l’argument du requérant selon lequel le président du Comité des régions avait reçu la requête en première instance non régularisée via l’application e-Curia par le biais d’un assistant. En effet, cette affirmation n’est fondée sur aucune preuve, mais sur une simple présomption, développée par le requérant, selon laquelle l’indication du destinataire de l’envoi de ladite requête par recommandé avec accusé de réception aurait été reprise d’une signification au président du Comité des régions de cette requête non régularisée via l’application e-Curia par le biais d’un assistant. Par ailleurs, et en tout état de cause, dans la duplique, le Comité des régions a déposé une attestation signée par le chef de cabinet de son président confirmant qu’aucun membre du cabinet du président du Comité des régions n’avait accès à l’application e-Curia à l’époque du dépôt de la requête en question.
28 À la lumière de ces considérations, il y a lieu de constater que le requérant n’a pas prouvé que la requête en première instance a été notifiée via l’application e-Curia au Comité des régions.
29 Enfin, et en tout état de cause, il y a lieu de relever que le Comité des régions a admis avoir reçu la requête en première instance et ses annexes par un courriel du greffe du Tribunal de la fonction publique du 3 mars 2015, donc avant que ladite requête ne soit arrivée par voie postale. Cette circonstance, justifiée par le fait que le Comité des régions avait reçu la régularisation de cette requête, consistant en une version lisible des pages 50 à 55 des annexes, mais non la requête en question elle-même, démontre que ledit Comité a eu connaissance de la même requête au plus tôt le 3 mars 2015. Partant, le Comité des régions ayant déposé le mémoire en défense en première instance le 13 mai 2015, à savoir dans le délai de deux mois et dix jours prévu par le règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, il y a lieu de constater que ledit mémoire en défense n’a pas été déposé hors délai.
30 À la lumière de toutes ces considérations, il n’est pas besoin de prendre les mesures d’organisation de la procédure demandées par le requérant. En effet, en ce qui concerne les mesures d’organisation de la procédure visant à démontrer que le Comité des régions n’aurait pas introduit dans le délai le mémoire en défense en première instance, il ressort de l’examen développé ci-dessus que ce mémoire en défense a été introduit dans le délai imparti. En ce qui concerne la mesure d’organisation de la procédure visant à obtenir l’intervention du Parlement en première instance, il suffit de constater que cette mesure est dénuée de toute pertinence aux fins de l’examen et de la solution du présent moyen.
31 Partant, le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le deuxième moyen, tiré de plusieurs erreurs de droit dans l’interprétation des dispositions du droit de l’Union et d’une violation de l’obligation de motivation
32 Le requérant reproche, en substance, au Tribunal de la fonction publique d’avoir, d’une part, méconnu les principes en matière d’interprétation en ayant fondé son raisonnement uniquement sur l’interprétation littérale et non sur le contexte et, d’autre part, omis de se prononcer sur l’interprétation proposée par le requérant qui se fondait sur une lecture combinée des articles 55 et 56 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »).
33 Le requérant estime que le Tribunal de la fonction publique s’est borné à examiner son argument uniquement à la lumière de l’article 56 du statut. À cet égard, il soutient que le Tribunal de la fonction publique a conféré audit article une portée trop large, en réduisant corrélativement celle de l’article 55 du statut. Selon lui, le Tribunal de la fonction publique a jugé que l’article 56 du statut offrait des garanties générales à tous les fonctionnaires quant à la limitation de leur horaire de travail.
34 Le requérant soutient que l’article 55, paragraphe 3, du statut, selon lequel, « en raison des nécessités du service ou des exigences des normes en matière de sécurité du travail, le fonctionnaire peut, en dehors de la durée normale de travail, être astreint à se tenir à la disposition de l’institution sur le lieu de travail ou à son domicile », implique, au contraire, la possibilité pour l’institution d’imposer aux fonctionnaires la prestation d’heures supplémentaires dans des cas autres que les cas d’urgence et de surcroît exceptionnel de travail visés par l’article 56, premier alinéa, du statut. Partant, selon lui, le premier alinéa de ce dernier article, dans la mesure où il limite les cas auxquels les fonctionnaires peuvent être tenus d’accomplir des heures supplémentaires et où il prévoit un total qu’elles ne peuvent dépasser, constitue une dérogation à l’article 55, paragraphe 1, du statut, de sorte que l’article 56 du statut devait être interprété de manière restrictive et, dès lors, comme ne fixant les conditions et les limites de prestation des heures supplémentaires que sous réserve des régimes d’astreinte prévus par l’article 55, paragraphe 3, du statut sur la base du paragraphe 1 de ce dernier article. Dès lors et pour les mêmes raisons, les deuxième et troisième alinéas de l’article 56 du statut devant être interprétés en fonction de son premier alinéa, ils devraient l’être comme n’excluant la rémunération et la compensation des heures supplémentaires des fonctionnaires de grade AST 5 à AST 11 et comme ne les réservant aux fonctionnaires de grade SC 1 à SC 6 et AST 1 à AST 4 que dans les cas visés par l’article 56, premier alinéa, du statut, et non dans les cas relevant de l’article 55, paragraphes 1 et 3, du statut.
35 Le Comité des régions conteste les arguments du requérant.
36 À titre liminaire, il y a lieu de relever que, selon une jurisprudence constante, l’obligation, pour le juge de l’Union, de motiver sa décision n’implique pas que celui-ci réponde dans le détail à tous les arguments invoqués par les parties, la motivation de ladite décision pouvant donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de prendre connaissance des motifs de cette décision et au juge du pourvoi de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (voir arrêt du 15 juin 2011, V/Commission, T-510/09 P, EU:T:2011:272, point 83 et jurisprudence citée).
37 En l’espèce, il y a lieu de constater que le Tribunal de la fonction publique a, tout d’abord, rappelé, au point 63 de l’ordonnance attaquée, que, selon une jurisprudence constante, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, il y avait lieu de tenir compte des termes de celle-ci et de son contexte ainsi que des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle faisait partie. Par la suite, au point 64 de ladite ordonnance, il a jugé qu’il ressortait du libellé de l’article 56, premier alinéa, du statut qu’un fonctionnaire ne pouvait être tenu d’accomplir des heures supplémentaires que dans certaines conditions, le total de ces heures supplémentaires ne pouvant excéder 150 heures par période de six mois, et que cette disposition offrait ainsi des garanties générales aux fonctionnaires quant à la limitation de leur horaire de travail.
38 Le Tribunal de la fonction publique a ajouté que l’article 56, deuxième alinéa, du statut excluait explicitement les fonctionnaires du groupe de fonctions AD et ceux du groupe de fonctions AST des grades AST 5 à AST 11 de tout droit à compensation ou à rémunération pour les heures supplémentaires éventuellement prestées et ne prévoyait aucune exception relative à la nature des fonctions exercées ou au caractère habituel des heures supplémentaires accomplies, et que le troisième alinéa dudit article prévoyait que, dans les conditions fixées à l’annexe VI du statut, les heures supplémentaires effectuées par les fonctionnaires du groupe de fonctions AST/SC des grades SC 1 à SC 6 et du groupe de fonctions AST des grades AST 1 à AST 4 donnaient droit à l’octroi d’un repos compensateur ou, si les nécessités du service ne permettaient pas la compensation dans les deux mois qui suivaient celui au cours duquel les heures supplémentaires avaient été effectuées, à l’octroi d’une rémunération.
39 Au point 67 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a conclu qu’il ressortait d’une lecture conjointe des premier, deuxième et troisième alinéas de l’article 56 du statut que le législateur avait entendu protéger les fonctionnaires contre toute obligation d’effectuer un nombre d’heures de travail excessif, tout en réservant le bénéfice d’une compensation ou d’une rémunération pour les heures supplémentaires prestées aux seuls fonctionnaires qui étaient classés aux premiers niveaux de l’échelle des grades et qui percevaient, de ce fait, une rémunération moins élevée que celle d’autres collègues ayant, notamment en raison de leur ancienneté, un grade et une rémunération plus élevés. À cet égard, le Tribunal de la fonction publique a relevé que l’annexe VI du statut, relative aux modalités de compensation et de rémunération des heures supplémentaires, mettait en œuvre l’article 56 du statut et précisait, dans les limites posées par cet article, la forme et le montant de l’indemnisation pouvant être octroyée aux fonctionnaires du groupe de fonctions AST/SC des grades SC 1 à SC 6 et du groupe de fonctions AST des grades AST 1 à AST 4, et qu’il ne saurait donc être déduit de l’annexe VI du statut, ni, a fortiori, de l’article 3 de ladite annexe, une quelconque dérogation au principe posé par l’article 56 du statut en faveur des fonctionnaires du groupe de fonctions AST des grades AST 5 à AST 11.
40 À la lumière de ces considérations, le Tribunal de la fonction publique a jugé que le requérant n’était pas fondé à prétendre que la limite prévue à l’article 56, deuxième et troisième alinéas, du statut ne s’appliquait pas aux fonctionnaires appelés à effectuer des heures supplémentaires de manière habituelle, tels les chauffeurs, de sorte que ceux-ci seraient en droit de conserver le bénéfice de l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires durant toute leur carrière, indépendamment de leur classement en grade.
41 Il ressort de l’ordonnance attaquée que le Tribunal de la fonction publique s’est limité à examiner les arguments du requérant sous l’angle de l’article 56 du statut. Toutefois, en tenant compte de la jurisprudence constante citée au point 36 ci-dessus, il ne peut lui être véritablement reproché d’avoir omis de se prononcer sur les allégations du requérant et, donc, d’avoir violé l’obligation de motivation.
42 En effet, contrairement à ce que le requérant fait valoir, le Tribunal de la fonction publique a implicitement écarté son interprétation selon laquelle une lecture conjointe des articles 55 et 56 du statut permettrait de conclure à l’existence d’une catégorie de fonctionnaires, visés par l’article 55, paragraphe 3, du statut, qui, étant astreints à se tenir à la disposition de leur institution, garderaient le droit à une rémunération même s’ils n’appartiennent pas à la catégorie des fonctionnaires de grade AST 1 à AST 4, à laquelle l’article 56, troisième alinéa, du statut reconnaît le droit à une rémunération pour heures supplémentaires aux conditions prévues par l’annexe VI. En fait, par son raisonnement, le Tribunal de la fonction publique a précisément rejeté cette interprétation, en jugeant que l’article 56 est la seule disposition du statut pertinente pour déterminer le régime de récupération des heures supplémentaires.
43 Par ailleurs, ce faisant, le Tribunal de la fonction publique n’a pas commis d’erreur de droit, dans la mesure où l’interprétation proposée par le requérant se fonde sur la prémisse erronée d’une possible interprétation conjointe des articles 55 et 56 du statut.
44 En effet, les articles 55 et 56 du statut, contenus dans le chapitre relatif à la durée du travail, visent des situations différentes. L’article 55 du statut concerne la durée normale du travail et, dans ce contexte, prévoit, en son paragraphe 3, que, en raison des nécessités de service ou des exigences des normes de sécurité du travail, le fonctionnaire peut, en dehors de la durée normale de travail, être astreint à se tenir à la disposition de l’institution sur le lieu du travail ou à son domicile. En revanche, l’article 56 du statut concerne les heures supplémentaires effectivement accomplies par les fonctionnaires et établit certains principes relatifs aux modalités selon lesquelles ces heures peuvent être compensées ou rémunérées, en précisant que toute compensation ou rémunération est exclue pour le groupe de fonctions AD et les grades AST 5 à AST 11 et que, pour les grades SC 1 à SC 6 et AST 1 à AST 5, dans les conditions fixées à l’annexe VI, les heures supplémentaires donnent droit à une compensation ou à une rémunération. Ainsi, le régime des astreintes à se tenir à la disposition d’une institution, tel que prévu à l’article 55, paragraphe 3, du statut, ne peut pas être assimilé au régime des heures supplémentaires effectuées par les fonctionnaires établi à l’article 56 du statut.
45 En outre, c’est à bon droit que le Tribunal de la fonction publique a jugé que, si, par le biais de l’article 56 du statut, le législateur avait entendu protéger les fonctionnaires contre toute obligation d’effectuer un nombre d’heures de travail excessif, il avait réservé le bénéfice d’une compensation ou d’une rémunération pour les heures supplémentaires prestées aux seuls fonctionnaires qui étaient classés aux premiers niveaux de l’échelle des grades et qui percevaient, de ce fait, une rémunération moins élevée que celle d’autres collègues ayant, notamment en raison de leur ancienneté, un grade et une rémunération plus élevés. Ainsi, un fonctionnaire, comme le requérant, classé à un grade supérieur, même s’il exerce des fonctions qui sont habituellement réservées à des fonctionnaires classés aux premiers niveaux de l’échelle des grades, n’a pas droit à une rémunération pour les heures supplémentaires prestées en raison, d’une part, de l’absence de la condition relative au classement du fonctionnaire aux premiers niveaux de l’échelle des grades et, d’autre part, du fait qu’il reçoit un traitement mensuel supérieur qui, en substance, compense et justifie la non-rémunération des heures supplémentaires.
46 Il en va de même pour l’argument du requérant tiré du fait que le Tribunal de la fonction publique a fondé sa décision sur une interprétation uniquement littérale, sans tenir compte du contexte. En effet, même si, de manière implicite, le raisonnement développé par le Tribunal de la fonction publique démontre que ce dernier a tenu compte du contexte, dans la mesure où, en ayant jugé que la seule disposition régissant le régime relatif aux heures supplémentaires est l’article 56 du statut, il a forcément tenu compte du fait que l’article 55 du statut, comme il a été relevé au point 44 ci-dessus, ne concerne que l’astreinte à se tenir à la disposition d’une institution et que, donc, cette disposition ne devait pas faire l’objet d’une interprétation conjointe avec l’article 56 du statut.
47 À la lumière de ces considérations, le deuxième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur dans l’interprétation de l’article 31 de la Charte et de l’article 6 de la directive 2003/88 et d’une violation de l’obligation de motivation
48 Le requérant fait valoir, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a omis de répondre à une partie de son argument tiré de la violation de l’article 31, paragraphe 2, de la Charte et de l’article 6 de la directive 2003/88. Selon lui, dans la requête en première instance, il ne s’est pas limité à affirmer qu’une interprétation de l’article 56 du statut et de l’article 3 de l’annexe VI du statut conforme à l’article 31, paragraphe 2, de la Charte et à l’article 6 de la directive 2003/88 aurait imposé une obligation de compenser les heures supplémentaires effectuées par une rémunération, mais aurait aussi affirmé qu’elle aurait engendré le droit à un repos compensatoire. Ainsi, le Tribunal de la fonction publique aurait interprété de manière erronée l’article 31, paragraphe 2, de la Charte et l’article 6 de la directive 2003/88.
49 Le Comité des régions conteste les arguments du requérant.
50 En l’espèce, au point 72 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a, tout d’abord, jugé que l’article 31, paragraphe 2, de la Charte et l’article 6 de la directive 2003/88 ne concernaient pas la rémunération des travailleurs ni, a fortiori, la rémunération des heures supplémentaires par l’octroi d’une indemnité forfaitaire, en ajoutant, au point 73, que cette interprétation était corroborée par l’ordonnance du 4 mars 2011, Grigore (C-258/10, non publiée, EU:C:2011:122, point 83 et jurisprudence citée).
51 Par la suite, au point 74 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a jugé comme étant dépourvu de pertinence l’argument du requérant selon lequel une interprétation conforme à l’article 31, paragraphe 2, de la Charte et à l’article 6 de la directive 2003/88 aurait imposé à l’administration d’accorder au fonctionnaire un repos compensatoire. En effet, il a constaté que le recours du requérant tendait à obtenir que le bénéfice de l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires lui soit restitué et non que le droit à un repos compensatoire lui soit accordé. Au demeurant, il a jugé que le requérant n’avait nullement démontré que, à la suite de la suppression de l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires à compter du 1er juillet 2014, celui-ci se serait trouvé dans une situation telle qu’il aurait été contraint d’accomplir un nombre d’heures supplémentaires excédant la limite hebdomadaire autorisée.
52 Partant, le requérant ne saurait valablement reprocher au Tribunal de la fonction publique d’avoir omis de se prononcer sur une partie de ses arguments, dans la mesure où, au point 74 de l’ordonnance attaquée, son argument selon lequel une interprétation conforme à l’article 31, paragraphe 2, de la Charte et à l’article 6 de la directive 2003/88 aurait imposé à l’administration d’accorder au fonctionnaire un repos compensatoire a été rejeté comme inopérant.
53 À la lumière de ces considérations, l’argument du requérant tiré d’une interprétation erronée de l’article 31, paragraphe 2, de la Charte et de l’article 6 de la directive 2003/88 doit être également rejeté, dans la mesure où, en ce qui concerne la demande du requérant visant à obtenir que le bénéfice de l’indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires lui soit restitué, le Tribunal de la fonction publique a pu, à bon droit, juger que lesdits articles ne concernaient pas la rémunération des travailleurs ni, a fortiori, la rémunération des heures supplémentaires par l’octroi d’une indemnité forfaitaire.
54 Ainsi, le troisième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le quatrième moyen, tiré d’une dénaturation de la requête en première instance, de plusieurs erreurs de droit commises par le Tribunal de la fonction publique et d’une violation de l’obligation de motivation
55 Le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique une dénaturation de la requête en première instance et une violation de l’obligation de motivation.
56 En premier lieu, selon le requérant, s’il est vrai que, devant le juge de première instance, il a invoqué la violation du principe d’égalité de traitement, le Tribunal de la fonction publique a dénaturé la requête en première instance en ayant jugé, au point 77 de l’ordonnance attaquée, qu’ « [il soutenait] que la décision [attaquée avait] eu pour effet de le traiter de la même manière que les fonctionnaires de même grade que lui qui [n’étaient] qu’exceptionnellement tenus d’effectuer des heures supplémentaires et qui se trouveraient donc dans une situation différente de la sienne ».
57 À cet égard, le requérant relève, dans le présent pourvoi, que, « les premiers juges ayant déduit de la défense du Comité des régions, incontestablement tirée des conséquences de la décision [attaquée], qu[’il] ne se trouvait pas dans une situation différente des autres fonctionnaires de grade AST 6, ils ont implicitement considéré qu’il se fondait, lui aussi, sur les conséquences de cette décision, en indiquant qu’il soutenait que la décision [attaquée] avait eu pour effet de le traiter de la même manière que les fonctionnaires qui n’étaient qu’exceptionnellement tenus d’effectuer des heures supplémentaires, dans la mesure où ce dernier a examiné ladite violation prenant comme termes de comparaison la situation dans laquelle la décision attaquée l’a mis, alors qu’il aurait fait valoir que, pour apprécier la violation dudit principe, le Tribunal de la fonction publique aurait dû prendre comme terme de comparaison la situation dans laquelle il se trouvait avant l’adoption de la décision attaquée et la comparer avec les fonctionnaires du grade dans lequel il s’est trouvé après l’adoption de la décision attaquée ».
58 Au contraire, selon le requérant, il ressort des points 136 à 138 de la requête en première instance qu’il ne s’est pas fondé sur la situation de fait et de droit qui résultait pour lui de la décision attaquée pour soutenir qu’il ne se trouvait pas dans la même situation, tout en ayant été traité de la même manière que les fonctionnaires de même grade exceptionnellement tenus d’effectuer des heures supplémentaires, mais bien sur celle qui était la sienne lors de son adoption, à savoir que les horaires et régimes de travail auxquels il était soumis l’amenaient à prester régulièrement des heures supplémentaires, ainsi que sur les motifs de la décision, selon lesquels il n’était plus éligible à la compensation ou rémunération de ses heures supplémentaires que l’article 56, deuxième et troisième alinéas, du statut et l’article 3 de son annexe VI réservaient aux fonctionnaires des grades SC 1 à SC 6 et AST 1 à AST 4, l’article 31, paragraphe 5, de l’annexe XIII n’y faisant exception que pour les assistants administratifs en transition.
59 Par ailleurs, le requérant fait valoir que, en considérant, au point 77 de l’ordonnance attaquée, que la décision attaquée avait eu pour effet de le soumettre au régime général de l’horaire flexible, le Tribunal de la fonction publique s’est appuyé sur les conséquences de ladite décision pour en apprécier sa légalité, alors que, selon lui, il ressort des arrêts du 15 avril 2010, Gualtieri/Commission (C-485/08 P, EU:C:2010:188, point 26), et du 15 mars 2012, Ellinika Nafpigeia/Commission (T-391/08, non publié, EU:T:2012:126, point 175), que le bien-fondé d’un recours en annulation doit s’apprécier en fonction des éléments de fait et de droit existant au jour de l’adoption de la décision attaquée.
60 En deuxième lieu, le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique une autre dénaturation de la requête en première instance, dans la mesure où il n’aurait pas prétendu être dans une situation comparable à celle d’un collègue de grade AST 5 non attesté qui avait gardé le bénéfice de l’indemnité forfaitaire, ayant lui-même reconnu la différence existant entre eux, mais demandé audit Tribunal de juger si ladite différence était objectivement justifiée.
61 En troisième lieu, le requérant ajoute que, à cause de la dénaturation de la requête en première instance, le Tribunal de la fonction publique a commis une violation de l’obligation de motivation en n’ayant pas vraiment répondu aux arguments soulevés.
62 Le Comité des régions conteste les arguments du requérant.
63 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, une dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (voir arrêt du 24 novembre 2015, Commission/D’Agostino, T-670/13 P, EU:T:2015:877, point 73 et jurisprudence citée).
64 Il y a également lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement interdit que des situations comparables soient traitées de manière différente ou que des situations différentes soient traitées de manière égale, à moins que de tels traitements, différents ou égaux selon le cas, ne soient objectivement justifiés (voir ordonnance du 17 décembre 2015, Garcia Minguez/Commission, T-357/15 P, EU:T:2015:1022, point 30 et jurisprudence citée).
65 En substance, le requérant reproche deux dénaturations de la requête en première instance au Tribunal de la fonction publique. La première est liée au fait que le Tribunal de la fonction publique l’aurait comparé aux fonctionnaires de même grade en prenant comme terme de comparaison sa situation après l’adoption de la décision attaquée et non lors de l’adoption de ladite décision. Par ailleurs, dans le cadre de cette dénaturation, le requérant reproche aussi au Tribunal de la fonction publique d’avoir commis plusieurs erreurs de droit. La seconde est liée au fait qu’il n’aurait pas prétendu se trouver dans la même situation qu’un collègue de grade AST 5 non attesté qui avait gardé le bénéfice de l’indemnité forfaitaire, mais que, malgré la différence de situations, il y avait une justification à ce qu’ils soient traités de la même manière. Ces arguments ne peuvent pas prospérer.
66 En ce qui concerne la première dénaturation de la requête en première instance invoquée par le requérant, il suffit de constater que, contrairement à ce qu’il soutient, il ressort du point 138 de la requête en première instance que, dans le cadre de l’argument tiré de la violation du principe d’égalité de traitement, le requérant a fait valoir le fait qu’il avait été traité comme les fonctionnaires de même grade qui ne sont qu’exceptionnellement tenus à des heures supplémentaires. Ainsi, c’est sans avoir commis aucune dénaturation de ladite requête que le Tribunal de la fonction publique a répondu au requérant, en prenant comme terme de comparaison afin d’évaluer la prétendue violation du principe d’égalité de traitement les fonctionnaires de même grade.
67 En outre, l’argument du requérant selon lequel il aurait dû être comparé aux autres non en fonction de la situation dans laquelle la décision attaquée l’a placé, mais en fonction de sa situation au moment de son adoption, est dénué de toute pertinence. En effet, par ladite décision, le Comité des régions s’est limité à tirer les conséquences du fait que, après sa promotion au grade AST 5, adoptée par une décision antérieure, le requérant n’avait plus droit à une indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires. Ainsi, au moment de l’adoption de cette décision, la prétendue violation de l’égalité de traitement devait être forcément examinée par le Tribunal de la fonction publique en comparant la situation du requérant à celle des fonctionnaires du même grade.
68 Enfin, il y a également lieu de rejeter l’argument du requérant tiré du fait que, selon une jurisprudence constante, le bien-fondé d’un recours en annulation doit s’apprécier en fonction des éléments de fait et de droit existant au jour de l’adoption de la décision attaquée. En effet, ces références jurisprudentielles concernent deux hypothèses différentes qui sont, en l’espèce, dénuées de pertinence, dans la mesure où, d’une part, le Tribunal a jugé, dans l’arrêt du 15 mars 2012, Ellinika Nafpigeia/Commission (T-391/08, non publié, EU:T:2012:126, point 175), que la légalité d’une décision en matière d’aides devait être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée, et donc qu’un requérant ne saurait se prévaloir devant le juge de l’Union d’éléments de fait qui n’ont pas été avancés au cours de la procédure précontentieuse prévue à l’article 108 TFUE, et, d’autre part, la Cour a jugé, dans l’arrêt du 15 avril 2010, Gualtieri/Commission (C-485/08 P, EU:C:2010:188, point 26), qu’était inopérant un moyen tiré de l’adoption d’une décision intervenue pendant la procédure devant le juge, la légalité d’un acte de droit de l’Union devant être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte avait été adopté.
69 En ce qui concerne la seconde dénaturation de la requête en première instance reprochée au Tribunal de la fonction publique par le requérant, il y a lieu de constater ce qui suit.
70 Au point 138 de la requête en première instance, le requérant a soutenu avoir été traité « différemment d’un fonctionnaire de grade inférieur au sien effectuant le même travail », puis, au point 139 de ladite requête, il a fait valoir qu’il fallait vérifier si ce traitement différent pouvait être objectivement justifié et, enfin, aux points 140 à 146 de cette requête, il a essayé de démontrer les raisons pour lesquelles le traitement différent n’aurait pas été justifié. En tenant compte de ces arguments, c’est sans avoir dénaturé de manière manifeste la requête en question que, aux points 78 et 79 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a pu juger que la différence de traitement entre le requérant et son collègue était justifiée par le fait qu’ils appartenaient à deux catégories différentes de fonctionnaires. Certes, le point 80 de ladite ordonnance n’est pas dépourvu d’ambiguïté, dans la mesure où le Tribunal de la fonction publique a conclu que « le requérant ne se [trouvait] pas, comme il s’en prévaut, dans une situation comparable à celle de son collègue », mais, à la lumière des points 78 et 79 de cette ordonnance qui le précèdent, ce point doit être interprété comme établissant que le requérant n’avait pas apporté d’éléments suffisants pour conclure que, malgré l’encadrement différent, des justifications objectives permettaient de considérer sa situation comme étant semblable à celle de son collègue et, donc, que le requérant se trouvait dans une situation comparable.
71 L’argument tiré du défaut de motivation doit également être rejeté. En effet, dans la mesure où le requérant soutient que le Tribunal de la fonction publique a omis de répondre à certains arguments en raison de la dénaturation de la requête en première instance et où ladite dénaturation n’a pas été démontrée, l’argument tiré du défaut de motivation ne peut pas prospérer.
72 À la lumière de ces considérations, le quatrième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le cinquième moyen, tiré d’une application erronée de l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique
73 Le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir violé l’article 50, paragraphe 1, sous e), de son règlement de procédure. Selon lui, contrairement à ce que ledit Tribunal a jugé au point 82 de l’ordonnance attaquée, à savoir que son argument tiré de l’illégalité de l’article 3 de l’annexe VI du statut et de l’article 31, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut n’était étayé par aucune argumentation telle qu’exigée par l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, ladite illégalité pouvait être implicitement déduite du deuxième moyen de la requête en première instance. Partant, le Tribunal de la fonction publique aurait appliqué de manière erronée l’article 50, paragraphe 1, sous e), de son règlement de procédure.
74 Le Comité des régions conteste le moyen du requérant.
75 À cet égard, il suffit de constater qu’il ressort du point 60 de la requête en première instance que le requérant s’est borné à invoquer la prétendue illégalité de l’article 3 de l’annexe VI du statut et de l’article 31, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut, sans aucunement étayer cette affirmation. Or, contrairement à ce que le requérant fait valoir, il n’appartient pas au juge de déduire ce qui serait implicitement le contenu des moyens soulevés par un requérant, mais à ce dernier d’exposer les moyens et les arguments de fait et de droit invoqués, ces éléments devant être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au juge de statuer sur le recours (ordonnance du 9 septembre 2009, Nijs/Cour des comptes, T-375/08 P, EU:T:2009:321, point 34). Ainsi, c’est à bon droit que le Tribunal de la fonction publique a rejeté le moyen comme étant irrecevable.
76 Partant, le présent moyen et le pourvoi dans son ensemble doivent être rejetés comme non fondés.
Sur les dépens
77 Conformément à l’article 211, paragraphe 2, de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, le Tribunal statue sur les dépens.
78 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 211, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
79 Le requérant ayant succombé en ses conclusions dans le cadre du pourvoi et le Comité des régions ayant conclu à ce qu’il soit condamné aux dépens, le requérant supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Comité des régions dans le cadre de la présente instance.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)
déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) M. Patrick Wanègue supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Comité des régions dans le cadre de la présente instance.
Jaeger | Van der Woude | Kanninen |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 septembre 2017.
Signatures
* Langue de procédure : le français.
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