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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Chambre de commerce and d'industrie metropolitaine Bretagne-Ouest (port de Brest) v Commission (Judgment) French Text [2018] EUECJ T-39/17 (19 September 2018) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2018/T3917.html Cite as: [2018] EUECJ T-39/17 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)
19 septembre 2018 (*)
« Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Documents afférents à des enquêtes préliminaires visant des régimes d’aides d’État dans le secteur portuaire de tous les États membres – Refus d’accès – Exception relative à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu – Règlement (CE) no 45/2001 – Notion de vie privée – Exception relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête ou d’audit – Application d’une présomption générale – Intérêt public supérieur »
Dans l’affaire T‑39/17,
Chambre de commerce et d’industrie métropolitaine Bretagne-Ouest (port de Brest), établie à Brest (France), représentée par Mes J. Vanden Eynde et E. Wauters, avocats,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par MM. A. Buchet, B. Stromsky, et Mme C. Georgieva-Kecsmar, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision C(2016) 7755 final de la Commission, du 23 novembre 2016, refusant d’accorder à la requérante, d’une part, l’accès intégral au questionnaire adressé à tous les États membres et, d’autre part, l’accès aux réponses des États membres à ce questionnaire, mentionnés dans une lettre adressée le 8 juillet 2016 à la République française dans le cadre de la procédure d’aides d’État SA.38398 (2016/C) (ex 2015/E) – Fiscalité des ports en France,
LE TRIBUNAL (huitième chambre),
composé de M. A. M. Collins, président, Mme M. Kancheva et M. G. De Baere (rapporteur), juges,
greffier : Mme M. Marescaux, administrateur,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 1er mars 2018,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 3 juillet 2013, la Commission européenne a transmis aux représentations permanentes de tous les États membres un questionnaire portant la référence HT.3989 (ci-après le « questionnaire ») sur le fonctionnement et la fiscalité de leurs ports afin d’obtenir une vue d’ensemble en la matière et de clarifier la situation des ports au regard des règles de l’Union européenne sur les aides d’État.
2 Les autorités françaises ont répondu au questionnaire par courrier du 25 octobre 2013. Par lettre du 3 février 2014, la Commission a demandé des renseignements complémentaires en ce qui concerne les règles relatives à l’impôt sur les sociétés français applicables aux ports. Les autorités françaises ont fourni une réponse par lettre du 1er avril 2014.
3 Par lettre du 9 juillet 2014, la Commission a informé les autorités françaises de son évaluation préliminaire des règles françaises relatives à la fiscalité des ports. Cette lettre indiquait que la Commission qualifiait ces règles d’aides d’État existantes et précisait les raisons pour lesquelles elle les considérait comme étant incompatibles avec le marché intérieur. Les autorités françaises ont présenté leurs observations à cet égard par lettre du 7 novembre 2014. Une réunion a eu lieu le 12 décembre 2014 entre la Commission et les autorités françaises. Le 15 janvier 2015, ces dernières ont présenté des observations complémentaires à la Commission. Par lettre du 1er juin 2015, la Commission a informé les autorités françaises qu’elle maintenait le point de vue préliminaire exprimé dans sa lettre du 9 juillet 2014.
4 Le 21 janvier 2016, la Commission a confirmé sa position et a proposé aux autorités françaises l’abolition, au titre de mesures utiles, de l’exonération d’impôt sur les sociétés bénéficiant aux ports à concurrence des revenus de leurs activités économiques à partir du début de l’année fiscale 2017et a invité les autorités françaises à se prononcer dans les deux mois, inconditionnellement et sans équivoque, sur cette proposition.
5 La réponse des autorités françaises ne constituant pas une acceptation inconditionnelle et sans équivoque de la proposition de mesures utiles, la Commission a décidé, par lettre du 8 juillet 2016, d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE. Par un avis publié au Journal Officiel de l’Union européenne le 19 août 2016 et intitulé « Aide d’État SA.38398 (2016/C) (ex 2015/E) – Fiscalité des ports en France » (JO 2016, C 302, p. 23, ci-après l’« avis »), qui reproduit ladite décision, la Commission a invité les parties intéressées à lui transmettre leurs observations dans un délai d’un mois à compter de sa date de publication.
6 L’avis contient la lettre du 8 juillet 2016, qui fait référence, en son premier point, au questionnaire ainsi qu’au fait que les autorités françaises y ont répondu par courrier du 25 octobre 2016.
7 La requérante, la Chambre de commerce et d’industrie métropolitaine Bretagne-Ouest (port de Brest), est un établissement public administratif responsable, notamment, de la gestion du port de Brest (France).
8 Par courrier du 15 septembre 2016, la requérante a présenté à la direction générale de la concurrence de la Commission ses observations sur l’avis en tant que partie intéressée. Par ce même courrier, la requérante a sollicité, sur le fondement du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), l’accès à « la copie complète du questionnaire et de ses réponses auxquelles la Commission fait référence dans son avis 2016/C 302/03 publié au Journal Officiel de l’Union européenne, le 19 août 2016 ».
9 Par courrier du 30 septembre 2016, le directeur général de la direction générale de la concurrence a, au nom de la Commission, accusé réception de la demande d’accès de la requérante et l’a informée de ce que cette demande avait été enregistrée sous la référence GESTDEM 2016/5300. Par ce même courrier, la Commission a informé la requérante qu’elle refusait de divulguer l’intégralité des documents demandés sur le fondement des exceptions visées à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, au titre de la protection des objectifs des activités d’enquête, et à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, au titre de la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée ainsi qu’à l’article 4, paragraphe 3, au titre du risque d’atteinte grave au processus décisionnel en cours, du règlement no 1049/2001. D’après la Commission, ces documents étaient couverts par une présomption générale selon laquelle leur divulgation porterait, en principe, atteinte à la protection des objectifs d’enquête en matière d’aides d’État et aux intérêts commerciaux des entreprises concernées. La Commission a ajouté qu’un accès partiel n’était pas possible. Enfin, elle a indiqué qu’il n’existait aucun intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents concernés.
10 Le 12 octobre 2016, la requérante a présenté au secrétariat général de la Commission une demande confirmative conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001. Tout en reconnaissant, dans cette demande, que les documents auxquels elle avait demandé l’accès étaient à l’origine de l’enquête SA.38398, la requérante estimait que les réponses des États membres constituaient une synthèse de données officielles en matière de fiscalité des États membres et n’étaient dès lors pas couvertes par une quelconque confidentialité. En tant que partie intéressée, la requérante aurait en outre un intérêt à être informée du déroulement de la procédure et des éléments qui permettraient de présumer l’éventuelle existence d’une aide d’État dont elle serait bénéficiaire. Selon elle, la Commission se serait limitée à formuler des motifs d’ordre général qui ne lui permettaient pas de se défendre au regard de la raison pour laquelle la divulgation des documents demandés porterait atteinte aux objectifs poursuivis par l’enquête en cause. En l’absence de l’existence, dans le règlement no 1049/2001, d’une exception de principe pour les enquêtes menées dans le cadre des aides d’État, le principe général de transparence primerait. À plus forte raison, la présomption générale selon laquelle la divulgation des documents du dossier administratif afférent à une enquête en matière d’aides d’État porterait, en principe, atteinte à la protection des objectifs d’une telle enquête, ne suffirait pas à renverser la volonté du législateur d’exiger la plus grande transparence administrative possible. Enfin, la requérante a fait valoir que le refus de divulgation des documents demandés affectait ses droits patrimoniaux ainsi que ses droits de la défense en tant que partie intéressée qui devait subir les conséquences économiques d’une décision de la Commission constatant l’existence d’une aide d’État illégale.
11 Par sa décision C(2016) 7755 final, du 23 novembre 2016 (ci-après « la décision attaquée »), la Commission a, d’une part, accordé un accès partiel au questionnaire et, d’autre part, refusé l’accès aux réponses des États membres au questionnaire.
12 En premier lieu, la Commission a fondé sa décision d’accorder un accès partiel au questionnaire sur le fondement de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, au titre de la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu, dans la mesure où le questionnaire contiendrait les noms, signatures, fonctions, numéros de téléphone et initiales des membres du personnel de la Commission.
13 La Commission a fait valoir que, en vertu de la jurisprudence issue de l’arrêt du 29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager (C‑28/08 P, EU:C:2010:378), des demandes visant à obtenir l’accès à des documents comprenant des données à caractère personnel tombaient sous le champ d’application du règlement (CE) no 45/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2000, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données (JO 2001, L 8, p. 1).
14 En l’espèce, les données susmentionnées constitueraient des données à caractère personnel qui, nonobstant le fait qu’elles concerneraient, en partie, les activités professionnelles des personnes concernées, relèveraient du domaine de la « vie privée », ce qui aurait été confirmé par la Cour dans l’arrêt du 20 mai 2003, Österreichischer Rundfunk e.a. (C‑465/00, C‑138/01 et C‑139/01, EU:C:2003:294).
15 La requérante n’ayant pas démontré la nécessité du transfert de ces données, conformément à l’article 8 du règlement no 1049/2001, la Commission a conclu que ces données devaient être occultées du questionnaire.
16 S’agissant, en second lieu, du refus d’accorder l’accès aux réponses des États membres au questionnaire, la Commission s’est fondée sur les motifs visés à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, au titre de la protection des objectifs des activités d’enquête, et à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, au titre de la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, du règlement no 1049/2001.
17 D’une part, en ce qui concerne l’atteinte alléguée à la protection des objectifs des activités d’enquête, la Commission a relevé que le but de cette exception au droit d’accès est de protéger son rôle dans ses activités d’enquête, dont, notamment, sa mission de détection et de contrôle des aides d’État.
18 Se référant de façon extensive à l’arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau (C‑139/07 P, EU:C:2010:376), la Commission a fondé son refus d’accès aux réponses des États membres, en substance, sur les motifs suivants :
– les documents demandés ont trait à un cas transversal (HT.3989) d’investigation d’éventuelles aides d’État relatif au fonctionnement et à la fiscalité des ports ;
– plusieurs enquêtes individuelles sous-jacentes et intrinsèquement liées à ce cas transversal sont en cours, à savoir les affaires SA.38398, SA.25338, SA.38393, SA.38874 et SA.38875, relatives, respectivement, au financement de certains ports français, néerlandais, belges et allemands ;
– c’est sur le fondement des réponses au questionnaire que ces enquêtes individuelles ont été ouvertes en priorité et il ne serait pas exclu que de nouvelles investigations soient lancées ou relancées à l’égard du système de fonctionnement et de fiscalité des ports dans d’autres États membres ;
– la divulgation de ces documents, qui contiennent des indications concernant la stratégie d’investigation de la Commission, mettrait gravement en péril l’intégrité de ces procédures d’enquête individuelles ainsi que de celles potentiellement à venir ;
– ces documents ayant été communiqués par les États membres dans le cadre du climat de confiance bilatérale inhérent à la procédure de contrôle d’aides d’État, leur divulgation pourrait sérieusement compromettre la volonté des États membres de coopérer avec la Commission.
19 D’autre part, en ce qui concerne la prétendue atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, la Commission a indiqué que cette exception à l’accès aux documents visait à protéger les intérêts des personnes physiques ou morales de voir divulguer les informations confidentielles relatives à leurs activités économiques et à leurs secrets d’affaires. Elle a relevé que, contrairement à ce que prétend la requérante, les réponses des États membres ne consisteraient pas uniquement en une synthèse générale de données officielles en matière de législation fiscale, mais contiendraient également des informations commerciales sensibles dont la divulgation publique serait susceptible de causer un préjudice grave aux entités concernées.
20 La Commission en a conclu que les réponses des États membres au questionnaire étaient couvertes par une présomption générale selon laquelle leur divulgation portait en principe atteinte à la protection des objectifs d’activités d’enquête et des intérêts commerciaux protégés respectivement par le troisième et le premier tiret de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001.
21 Enfin, la Commission a estimé qu’il n’existait pas d’intérêt public supérieur permettant de renverser l’application des exceptions visées à l’article 4, paragraphe 2, troisième et premier tirets, du règlement no 1049/2001. Selon elle, les arguments invoqués par la requérante seraient sans conteste de nature privée. L’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 étant de nature impérative, la Commission n’a pas examiné l’existence d’un éventuel intérêt public supérieur à la divulgation des données à caractère personnel contenues dans le questionnaire.
22 Le 27 juillet 2017, la Commission a adopté la décision (UE) 2017/2116 concernant le régime d’aides SA.38398 (2016/C) (ex 2015/E) mis à exécution par la France – Fiscalité des ports en France (JO 2017, L 332, p. 24). Par cette décision, la Commission a considéré que l’exonération de l’impôt sur les sociétés en faveur des ports autonomes, des chambres de commerce maritimes, des chambres de commerce et d’industrie exploitant des installations portuaires, des municipalités concessionnaires d’outillage public propriété de l'État dans les ports maritimes ainsi que des entreprises qui ont pu se substituer pour l'exploitation de cet outillage, constituait un régime d’aides d’État existant incompatible avec le marché intérieur.
23 Le 15 novembre 2017, la requérante a introduit un recours en annulation à l’encontre de la décision 2017/2116, enregistré sous le numéro T‑754/17.
Procédure et conclusions des parties
24 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 janvier 2017, la requérante a introduit le présent recours.
25 La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure du Tribunal, la présente affaire a été réattribuée à la huitième chambre et à un nouveau juge rapporteur.
26 Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et a posé, au titre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, des questions écrites aux parties. Les parties ont déféré à cette demande dans le délai imparti.
27 Sur proposition du juge rapporteur, dans le cadre des mesures d’instruction prévues à l’article 91, sous c), du règlement de procédure, le Tribunal a ordonné à la Commission la production d’une copie intégrale des documents dont l’accès avait été refusé. La Commission ayant déféré à cette demande, ces documents n’ont, conformément à l’article 104 du règlement de procédure, pas été communiqués à la requérante.
28 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée afin de faire droit à sa demande initiale ;
– condamner la Commission aux dépens.
29 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
30 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience. À cette occasion, la requérante a indiqué que son premier chef de conclusions visait uniquement à l’annulation de la décision attaquée, ce dont il a été pris acte.
En droit
31 À l’appui de son recours, la requérante soulève, en substance, trois moyens, tirés, premièrement, de la violation de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, deuxièmement, de ce que la présomption générale doit être renversée et, troisièmement, de la violation de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001.
32 Le Tribunal examinera tout d’abord le troisième moyen, par lequel la requérante fait valoir, en substance, que la Commission aurait dû lui accorder un accès intégral au questionnaire.
Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001
33 Dans le cadre de son troisième moyen, la requérante fait grief à la Commission d’avoir uniquement accordé un accès partiel au questionnaire au motif que certaines données y figurant constituaient des données à caractère personnel.
34 Ainsi, la requérante fait valoir que les données qui ont fait l’objet d’une expurgation ne relevaient pas de la protection de la vie privée dans la mesure où elles concernaient des fonctionnaires attachés au service public et étaient donc de nature exclusivement professionnelle. Le transfert de ces données purement professionnelles ne porterait donc en rien atteinte à ces fonctionnaires, qui, dans le cadre de leurs fonctions professionnelles, devraient pouvoir être interpellés par chaque citoyen.
35 À cet égard, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, sur lequel la Commission a fondé son refus partiel d’accès au questionnaire, est une disposition indivisible qui exige que l’atteinte éventuelle à la vie privée et à l’intégrité de l’individu soit toujours examinée et appréciée en conformité avec la législation de l’Union relative à la protection des données à caractère personnel, et ce notamment avec le règlement no 45/2001. Cette disposition établit ainsi un régime spécifique et renforcé de protection d’une personne dont les données à caractère personnel pourraient, le cas échéant, être communiquées au public (arrêts du 29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager, C‑28/08 P, EU:C:2010:378, points 59 et 60, et du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 43).
36 Il s’ensuit que, lorsqu’une demande fondée sur le règlement no 1049/2001 vise à obtenir l’accès à des documents comprenant des données à caractère personnel, les dispositions du règlement no 45/2001 deviennent intégralement applicables (arrêts du 29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager, C‑28/08 P, EU:C:2010:378, point 63, et du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 44).
37 L’article 2, sous a), du règlement no 45/2001 définit la notion de « données à caractère personnel », aux fins de ce règlement, comme « toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable ».
38 La circonstance que ladite information s’inscrit dans le contexte d’une activité professionnelle n’est pas une raison de principe permettant de l’exclure de la notion de « vie privée », qui ne doit pas être interprétée de façon restrictive (arrêts du 20 mai 2003, Österreichischer Rundfunk e.a., C‑465/00, C‑138/01 et C‑139/01, EU:C:2003:294, point 73 ; du 9 novembre 2010, Volker und Markus Schecke et Eifert, C‑92/09 et C‑93/09, EU:C:2010:662, point 59, et du 21 septembre 2016, Secolux/Commission, T‑363/14, EU:T:2016:521, point 30).
39 Il a également été jugé que la communication de données à caractère personnel par la divulgation d’un document dont l’accès a été demandé sur le fondement du règlement no 1049/2001 entre dans la définition de « traitement de données à caractère personnel », telle qu’établie par l’article 2, sous b), du règlement no 45/2001 (voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager, C‑28/08 P, EU:C:2010:378, point 69).
40 Il ressort des termes mêmes de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001 que cette disposition subordonne le transfert de données à caractère personnel à la réunion de deux conditions cumulatives, à savoir, en premier lieu, que le destinataire démontre la nécessité de leur transfert et, en second lieu, qu’il n’existe aucune raison de penser que ce transfert pourrait porter atteinte aux intérêts légitimes de la personne concernée.
41 À cet égard, il ressort de la jurisprudence qu’il incombe d’abord à celui qui sollicite un tel transfert de démontrer la nécessité de celui-ci. Si cette démonstration est apportée, il appartient alors à l’institution concernée de vérifier s’il n’existe aucune raison de penser que le transfert en cause pourrait porter atteinte aux intérêts légitimes de la personne concernée. En l’absence de raison de cette nature, il y a lieu de procéder au transfert sollicité, tandis que, dans le cas contraire, l’institution concernée doit mettre en balance les différents intérêts en présence aux fins de se prononcer sur la demande d’accès (arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth et PAN Europe/EFSA, C‑615/13 P, EU:C:2015:489, point 47 ; voir également, en ce sens, arrêts du 29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager, C‑28/08 P, EU:C:2010:378, points 77 et 78, et du 2 octobre 2014, Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:2250, points 107 et 108).
42 En outre, il convient de relever que pour remplir la condition de nécessité, il y a lieu de démontrer que le transfert des données à caractère personnel est la mesure la plus appropriée parmi les autres mesures envisageables pour atteindre l’objectif poursuivi par le demandeur et qu’elle est proportionnée à cet objectif, ce qui oblige le demandeur à présenter des justifications expresses et légitimes (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2015, Dennekamp/Parlement, T‑115/13, EU:T:2015:497, point 59).
43 En l’espèce, le Tribunal a pu constater, à la suite de la production de la version intégrale du questionnaire conformément à l’article 91, sous c), du règlement de procédure, que sur le questionnaire figuraient des noms, des signatures, des fonctions, des numéros de téléphone et des initiales de membres du personnel de la Commission. Au vu de la jurisprudence mentionnée au point 38 ci-dessus, il convient dès lors de rejeter l’argument de la requérante selon lequel ces données ne relèveraient pas de la protection de la vie privée en raison de leur nature exclusivement professionnelle.
44 Cette conclusion est confortée par le considérant 7 du règlement no 45/2001, qui indique que les personnes susceptibles d’être protégées sont celles dont les données à caractère personnel sont traitées par les institutions ou organes de l’Union dans quelque contexte que ce soit, par exemple parce que ces personnes sont employées par ces institutions ou organes (arrêt du 21 septembre 2016, Secolux/Commission, T‑363/14, EU:T:2016:521, point 29).
45 Ensuite, il convient d’examiner si la demande d’accès auxdites données, dont la divulgation constituerait un « traitement » de données à caractère personnel, remplit les conditions cumulatives de l’article 8 du règlement no 45/2001, rappelées au point 40 ci-dessus.
46 La requérante semble considérer avoir démontré la nécessité d’un transfert desdites données en se prévalant d’un droit d’interpellation du fonctionnaire public. Or, un tel droit d’interpellation, à le supposer établi, ne saurait trouver à s’exercer spécifiquement par le recours aux mécanismes d’accès aux documents que prévoit le règlement no 1049/2001. Il s’ensuit que la méconnaissance éventuelle d’un tel droit ne saurait résulter d’une décision de refus d’accès adoptée au titre dudit règlement ni, dès lors, donner lieu à censure juridictionnelle, à la faveur d’un recours en annulation dirigé contre une telle décision (voir, par analogie, en ce qui concerne le recours impropre aux mécanismes d’accès aux documents, arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, EU:C:2007:75, point 52).
47 L’une au moins des conditions cumulatives prévues à l’article 8 du règlement no 45/2001 faisant défaut, la requérante ne saurait se prévaloir d’une violation de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001. Partant, le troisième moyen doit être rejeté comme non fondé.
Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001
48 Le premier moyen se divise en deux branches. Dans le cadre de la première branche, la requérante soutient que la présomption générale d’atteinte aux objectifs des activités d’enquête en matière d’aides d’État est une création jurisprudentielle qui manque de base légale tangible. Par la seconde branche, elle allègue que la présomption générale ne s’appliquerait pas au cas d’espèce étant donné que les enquêtes en cause seraient de nature transversale.
Sur la première branche du premier moyen, tirée de ce que la présomption générale manque de base légale
49 La requérante fait valoir que la présomption générale étant d’origine jurisprudentielle, elle ne repose sur aucun fondement légal. En l’absence d’un tel fondement, cette présomption n’aurait pas dû être appliquée en l’espèce et la Commission aurait dû procéder à un examen concret et individuel de la demande d’accès.
50 La Commission conteste les arguments de la requérante.
51 Si, certes, la constatation de la requérante selon laquelle le règlement no 1049/2001 ne fait aucune mention explicite d’une exception de principe pour les enquêtes menées dans le cadre des aides d’État ni de l’existence d’une présomption générale pour ce type d’enquêtes est correcte, cette constatation n’est pas pertinente.
52 En effet, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 19, paragraphe 1, TUE, la Cour de justice de l’Union européenne, comprenant la Cour et le Tribunal, est investie de la mission « d’assurer le respect du droit dans l’interprétation et l’application des traités ».
53 La présomption générale résulte précisément d’une interprétation de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 faite par les juridictions de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, points 58 et 61) auxquelles le droit primaire confère la tâche d’interpréter le droit de l’Union.
54 En outre, comme le fait remarquer à juste titre la Commission, la jurisprudence ayant consacré l’existence des présomptions générales de non divulgation repose sur des considérations circonstanciées.
55 En effet, cette jurisprudence est fondée sur le fait que les exceptions au droit d’accès aux documents visées à l’article 4 du règlement no 1049/2001 ne sauraient, lorsque les documents visés par une demande d’accès relèvent d’un domaine particulier du droit de l’Union, être interprétées sans tenir compte des règles spécifiques régissant l’accès à ces documents (arrêt du 12 mai 2015, Unión de Almacenistas de Hierros de España/Commission, T‑623/13, EU:T:2015:268, point 55). Ces présomptions générales permettent ainsi d’assurer une application cohérente des régimes juridiques qui poursuivent des objectifs différents et qui ne prévoient pas expressément la primauté de l’un sur l’autre.
56 À cet égard, dans le contexte des procédures de contrôle des aides d’État, la présomption générale reconnue par la Cour résulte de la nécessité de permettre une articulation harmonieuse entre le règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1) [remplacé par le règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 [TFUE] (JO 2015, L 248, p. 9)] et le règlement no 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, points 58 et 61).
57 Si le règlement no 1049/2001 vise à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible, tout en étant soumis, comme cela ressort notamment du régime d’exceptions prévu à son article 4, à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé, le règlement no 2015/1589, en tant qu’il concerne une procédure bilatérale entre la Commission et un État membre, vise, notamment par le biais de règles spécifiques gouvernant l’accès aux documents du dossier administratif, à préserver le climat de confiance réciproque indispensable au bon déroulement de ces procédures (voir, en ce sens, arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, points 59 et 61, et du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 56).
58 En effet, le règlement no 2015/1589, et en particulier son article 24, intitulé « Droit des parties intéressées », ne prévoit aucun accès aux documents du dossier administratif de la Commission pour les parties intéressées autres que l’État membre concerné dans le cadre de la procédure de contrôle ouverte conformément à l’article 108, paragraphe 2, TFUE. En revanche, son article 6, paragraphe 2, prévoit que les observations reçues dans le cadre de la procédure formelle d’examen sont uniquement communiquées à l’État membre concerné (voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, points 56 et 57).
59 Le rôle des parties intéressées autres que l’État membre concerné est ainsi essentiellement limité à celui de source d’information (voir, en ce sens, arrêts du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, EU:C:2002:524, points 81 à 83, et du 12 mai 2011, Région Nord-Pas-de-Calais et Communauté d’agglomération du Douaisis/Commission, T‑267/08 et T‑279/08, EU:T:2011:209, points 74 et 88).
60 Il a dès lors été jugé que, sous peine de mettre en cause le régime de contrôle des aides d’État, il n’y avait pas lieu pour ces intéressés d’obtenir l’accès aux documents du dossier administratif de la Commission sur le fondement du règlement no 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 58, et du 25 mars 2015, Sea Handling/Commission, T‑456/13, non publié, EU:T:2015:185, point 61).
61 En effet, si ces parties intéressées pouvaient bénéficier de l’accès aux documents afférents aux procédures d’aides d’État, ces procédures seraient exposées aux ingérences de tiers de sorte que leur nature bilatérale s’en trouverait compromise (voir, en ce sens, arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 59, et du 26 mai 2016, International Management Group/Commission, T‑110/15, EU:T:2016:322, point 32).
62 Pour ces raisons, il a été jugé que le seul fait que les documents dont la divulgation était demandée relevaient du dossier administratif afférent à une procédure de contrôle d’aides d’État suffisait pour justifier l’application d’une présomption générale de confidentialité à leur égard (arrêt du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, non publié, EU:C:2016:557, point 41).
63 Ce faisant, la Cour, à l’instar du législateur de l’Union, n’a instauré aucune hiérarchie entre les normes en question, mais a encadré l’application des dispositions générales du règlement no 1049/2001, au motif que l’accès aux documents du dossier administratif reviendrait à porter atteinte à l’objectif spécifique des règles qui visent à garantir l’efficacité même des procédures de contrôle des aides d’État (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Wathelet dans les affaires jointes LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:528, point 64).
64 Au vu de ce qui précède, il n’y a pas lieu de remettre en cause l’existence de la présomption générale au seul motif que celle-ci est d’origine prétorienne. Partant, il convient de rejeter la première branche du premier moyen comme non fondée.
Sur la seconde branche du premier moyen, tirée de ce que la présomption générale ne s’applique pas aux enquêtes transversales
65 La requérante fait valoir, en substance, que la présomption générale s’applique uniquement à des enquêtes « individuelles » étant donné que la jurisprudence ayant établi l’existence de cette présomption aurait été développée dans le contexte d’enquêtes individuelles, c’est-à-dire d’enquêtes visant une entreprise ou une mesure d’aide précise. Or, l’enquête annoncée par la Commission ne viserait pas une mesure ou une entreprise déterminée, mais les dispositions fiscales générales de tous les États membres. En ce que cette enquête serait donc de nature transversale, il n’y aurait pas lieu de lui appliquer la présomption générale.
66 La circonstance, invoquée par la Commission, que des enquêtes individuelles ont été ouvertes sur la base des réponses des États membres au questionnaire ne changerait, selon la requérante, rien à la nature et à l’objet de l’enquête, qui devraient être appréciés au moment où les documents demandés ont été produits.
67 Les enquêtes individuelles et les enquêtes transversales ne visant pas les mêmes objectifs, une demande d’accès aux documents devrait faire l’objet d’un traitement différent selon qu’elle vise des documents relevant du premier ou du deuxième type d’enquêtes. Alors que les enquêtes individuelles viseraient une aide spécifique octroyée par un État membre, une enquête transversale aurait pour objectif d’instruire des infractions à la réglementation des aides d’État à travers l’Union européenne et présenterait dès lors un « caractère d’objectivité ». Il s’ensuivrait que les informations récoltées dans le cadre d’une enquête transversale devraient faire l’objet d’un accès accru. En outre, la protection de la confidentialité des documents reçus dans le cadre d’une enquête en matière d’aide d’État, tant par le règlement no 2015/1589 que par le règlement no 1049/2001, viserait les entreprises et non les États membres.
68 La Commission conteste la totalité des arguments de la requérante.
69 S’il est vrai qu’il est de jurisprudence constante que les exceptions à l’accès aux documents doivent être interprétées et appliquées de manière stricte, de façon à ne pas tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions (arrêt du 19 mars 2013, In 't Veld/Commission, T‑301/10, EU:T:2013:135, point 107 ; voir également, en ce sens, arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, EU:C:2007:75, point 63), ce principe d’interprétation stricte ne va pas de pair avec une interprétation restrictive de la notion d’« enquête ».
70 Ainsi, d’une part, il ne ressort pas de la jurisprudence concernant l’application de la présomption générale visant à la protection des objectifs des activités d’enquête à une demande d’accès aux documents faisant partie du dossier administratif afférent à une procédure d’aides d’État qu’elle viserait uniquement à protéger les objectifs des activités d’enquêtes visant certaines entreprises ou des instruments d’aide spécifiques (voir, en ce sens, arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376 ; du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, non publié, EU:C:2016:557, et du 10 décembre 2010, Ryanair/Commission, T‑494/08 à T‑500/08 et T‑509/08, EU:T:2010:511).
71 D’autre part, ainsi que la Cour l’a constaté dans l’arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter (C‑331/15 P, EU:C:2017:639, point 45), la notion d’« enquête » visée à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, est une notion autonome du droit de l’Union, qui doit être interprétée en tenant compte, notamment, de son sens habituel ainsi que du contexte dans lequel elle s’insère.
72 Ainsi, la Cour a jugé que, sans qu’il soit besoin de dégager une définition exhaustive des « activités d’enquête », une procédure structurée et formalisée de la Commission dont l’objectif était la collecte et l’analyse d’informations afin que cette institution puisse adopter une position dans le cadre de l’exercice de ses fonctions prévues par les traités UE et FUE constituait une telle activité (arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter, C‑331/15 P, EU:C:2017:639, point 46).
73 La Cour a ajouté que cette procédure ne devait pas nécessairement viser à détecter ou à poursuivre une infraction ou une irrégularité, la notion d’« enquête » étant susceptible de couvrir également l’activité de la Commission visant à constater des faits afin d’évaluer une situation donnée (arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter, C‑331/15 P, EU:C:2017:639, point 47).
74 Enfin, la Cour a également précisé qu’il n’était pas indispensable, pour qu’une procédure soit qualifiée d’« enquête », que la position adoptée par la Commission pour accomplir ses fonctions soit revêtue de la forme d’une décision au sens de l’article 288, quatrième alinéa, TFUE (arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter, C‑331/15 P, EU:C:2017:639, point 48).
75 En l’espèce, compte tenu des réponses des parties à une question du Tribunal, il y a lieu de confirmer que les activités menées par la Commission dans le cadre de l’enquête transversale HT.3989 ainsi que dans le cadre des sous-enquêtes ouvertes à l’égard de chaque État membre constituent des activités d’enquêtes au sens du point 45 de l’arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter (C‑331/15 P, EU:C:2017:639).
76 À cet égard, il y a lieu de rappeler que la Commission est investie, en vertu de l’article 108, paragraphe 1, TFUE, de la mission de procéder à l’examen permanent des régimes d’aides existant dans les États membres. Aux fins de cet examen permanent, le chapitre VI du règlement no 2015/1589, intitulé « Procédure relative aux régimes d’aides existants », prévoit que la Commission peut demander les renseignements nécessaires aux États membres qui, en vertu d’un devoir de coopération, sont obligés d’y répondre (ci-après la « procédure de coopération »).
77 Cette procédure de coopération, relative aux régimes d’aides existants, prévoit un enchaînement procédural relatif, premièrement, au déclenchement de la procédure relative aux régimes d’aides existant, deuxièmement, aux négociations entre la Commission et l’État membre concerné et, troisièmement, à l’adoption de diverses positions par la Commission. Il convient d’en conclure que le chapitre VI du règlement no 2015/1589 prévoit une « procédure structurée et formalisée » au sens du point 46 de l’arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter (C‑331/15 P, EU:C:2017:639).
78 En outre, cette procédure vise à « la collecte et [à] l’analyse d’informations ». En particulier, l’article 21 du règlement no 2015/1589 prévoit, d’une part, que les États membres fournissent les renseignements nécessaires aux fins de l’examen des régimes d’aides existants et, d’autre part, que les États membres puissent présenter leurs observations lorsque la Commission considère que le régime d’aide concerné n’est pas compatible avec le marché intérieur. La préparation d’un tel avis implique, de toute évidence, l’existence d’une analyse préalable des informations transmises.
79 Enfin, la conclusion préliminaire prévue à l’article 21, paragraphe 2, du règlement no 2015/1589 ainsi que la proposition d’adoption de mesures utiles prévue à l’article 22, paragraphe 1, dudit règlement et la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen visée à l’article 23 du même règlement constituent des mesures officielles qui précisent la position juridique de la Commission s’agissant de la compatibilité avec le marché intérieur du régime d’aide existant en cause.
80 Il convient donc de considérer que la procédure prévue au chapitre VI du règlement no 2015/1589 a pour finalité de permettre à la Commission « d’adopter une position dans le cadre de l’exercice de ses fonctions prévues par les traités UE et FUE », au sens du point 46 de l’arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter (C‑331/15 P, EU:C:2017:639).
81 Au vu de tout ce qui précède, il convient de considérer que ladite procédure donne lieu à des activités d’enquête au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001.
82 En l’espèce, les activités qualifiées par la requérante d’« enquêtes transversales » relèvent bien de cette même procédure.
83 En effet, il ressort de la lettre accompagnant le questionnaire et il est constant entre les parties que celui-ci a tout d’abord été envoyé à tous les États membres dans le but de collecter auprès de chacun d’eux des informations susceptibles de contribuer à l’application des règles en matière d’aides d’État dans le secteur portuaire. Ce faisant, la Commission n’a rien fait d’autre que d’accomplir sa mission consistant à veiller au respect des règles de concurrence, tel que cela est prévu par l’article 108, paragraphe 1, TFUE.
84 Ensuite, les réponses des États membres au questionnaire ont été communiquées à la Commission dans le cadre de la procédure de coopération.
85 Enfin, les informations ainsi collectées ont permis à la Commission d’analyser la situation du secteur portuaire dans chaque État membre au regard des règles en matière d’aide d’État, afin de lui permettre d’adopter une position quant à la compatibilité de ces situations avec le marché intérieur. Elle a en effet constaté qu’il existait, en fonction des pays, des différences substantielles en ce qui concerne la propriété des ports, les structures d’organisation et le mode de financement. Sur cette base, la Commission a entrepris des démarches formelles à l’égard de certains États membres et a continué à examiner la situation des autres États membres.
86 Dans la mesure où les réponses des États membres ont été réunies par la Commission dans le cadre des activités d’enquête qu’elle a menées et, par ce simple fait, ont contribué à l’adoption de plusieurs décisions d’ouverture de la procédure formelle d’examen, ces documents font partie du dossier administratif de la Commission afférent à plusieurs procédures de contrôle d’aides d’État.
87 Ainsi, s’agissant de la procédure SA.38398 – Fiscalité des ports français, la requérante reconnaît explicitement dans sa demande confirmative que « [les réponses des États membres au questionnaire], semble[nt], à tout le moins partiellement, [avoir] fondé l’enquête connue sous le numéro SA.38398. ».
88 Dès lors qu’il a été établi que les documents demandés font partie de dossiers administratifs afférents à des procédures de contrôle d’aides d’État, ce qui, au demeurant, n’est pas contesté par les parties, il convient de leur appliquer la présomption générale de confidentialité (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, non publié, EU:C:2016:557, point 41).
89 Les arguments de la requérante ne sont pas de nature à remettre en cause cette conclusion.
90 Premièrement, l’argumentation selon laquelle, à la différence d’enquêtes individuelles qui cibleraient des aides spécifiques octroyées par les États membres, l’enquête en cause aurait eu pour objectif d’instruire des infractions à la réglementation des aides d’État à travers l’Union européenne et présenterait donc un « caractère d’objectivité », de sorte que les documents récoltés dans le cadre de cette enquête devraient faire l’objet d’un accès accru, doit être rejetée.
91 En effet, cet argument repose sur une compréhension erronée de la nature de l’examen d’un régime d’aides. Ainsi qu’il a été rappelé au point 76 ci-dessus, la Commission est investie, en vertu de l’article 108, paragraphe 1, TFUE, d’une mission d’examen permanent des régimes d’aide existant dans les États membres. Par l’envoi du questionnaire, la Commission a entamé la procédure de coopération, de façon parallèle, à l’égard de chaque État membre. Ces procédures bilatérales ne présentent en rien un « caractère d’objectivité » qui justifierait un accès accru aux documents qui en font partie, mais constituent, ainsi que la Commission le soulève à juste titre, des enquêtes préliminaires classiques.
92 Deuxièmement, l’argument de la requérante selon lequel, en substance, les enquêtes auraient uniquement visé à récolter les dispositions fiscales générales applicables dans les États membres et ne seraient dès lors pas des enquêtes dont les objectifs doivent être protégés ne saurait non plus prospérer.
93 Ainsi qu’il a été constaté au point 73 ci-dessus, la Cour a explicitement jugé qu’une enquête, au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, ne devait pas nécessairement viser à détecter ou à poursuivre une infraction, mais pouvait également consister en la constatation de faits afin d’évaluer une situation donnée. Il en résulte que, même s’il était établi que les documents demandés ne contenaient qu’une compilation des dispositions légales applicables à la fiscalité des ports à travers l’Union européenne, ce qui, ainsi que le Tribunal a pu le constater, n’est pas le cas en l’espèce, ces documents, en ce qu’ils ont permis à la Commission d’adopter une position dans le cadre de l’exercice de ses fonctions prévues par les traités UE et FUE et relèvent dès lors d’une activité d’enquête en matière d’aides d’État, seraient couverts par la présomption générale de confidentialité.
94 Troisièmement, l’argument selon lequel la divulgation des réponses des États membres au questionnaire ne porterait pas préjudice au climat de confiance bilatérale, dans la mesure où ces réponses ont été fournies en vertu d’une obligation légale, doit également être rejeté.
95 En effet, le fait que les États membres agissent au titre d’un devoir de coopération n’enlève en rien la nécessité de préserver le fait que cette coopération se déroule de façon à ne pas en compromettre les objectifs en cause. À l’instar de la phase précontentieuse d’une procédure en manquement, la procédure de coopération prévue dans le cadre de l’examen des régimes d’aides existants a pour but de donner à l’État membre concerné l’occasion, d’une part, de se conformer à ses obligations découlant du droit de l’Union et, d’autre part, de faire utilement valoir ses moyens de défense à l’encontre des griefs formulés par la Commission (voir, par analogie, arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, points 56 et 57, et conclusions de l’avocat général Wathelet dans les affaires jointes LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:528, points 70 et 71). Ainsi qu’il a été rappelé au point 57 ci-dessus, cette procédure requiert un climat de confiance mutuelle afin de permettre à l’État membre concerné et à la Commission d’entamer un processus de négociation dans le but d’éviter l’ouverture d’une procédure formelle d’examen. Si ces échanges étaient diffusés, ces enquêtes seraient exposées aux ingérences de tiers susceptibles de compromettre le déroulement de la procédure de coopération dans un climat de confiance mutuelle et, partant, de porter atteinte à la protection des objectifs poursuivis par les activités d’enquête de la Commission.
96 Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter la deuxième branche du premier moyen et, par conséquent, le deuxième moyen dans son intégralité, comme étant non fondé.
Sur le deuxième moyen, tiré de ce que la présomption générale doit être renversée
97 La requérante fait valoir que, dans l’hypothèse où il faudrait conclure à l’applicabilité de la présomption générale à la demande d’accès en l’espèce, cette présomption devrait être renversée. Elle se réfère, à cet égard, au point 39 de l’arrêt du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission (C‑271/15 P, non publié, EU:C:2016:557), selon lequel la présomption générale n’exclut pas le droit, pour les intéressés, de démontrer qu’un document donné, dont la divulgation est demandée, n’est pas couvert par ladite présomption ou qu’il existe un intérêt public supérieur justifiant la divulgation du document demandé.
98 La requérante estime, premièrement, que les documents demandés ne sont pas couverts par la présomption générale. D’une part, les informations contenues dans les réponses au questionnaire ne seraient pas de nature confidentielle étant donné qu’il s’agirait de dispositions légales et, d’autre part, les États membres n’auraient pas demandé à la Commission, conformément à l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001, de ne pas divulguer les documents en cause.
99 Deuxièmement, la requérante soutient que c’est à tort que la Commission a omis de reconnaître l’existence d’un intérêt public supérieur justifiant un accès complet aux documents demandés.
100 Dans ce contexte, d’une part, elle se réfère, aux prétendus droits des parties intéressées de connaître des éléments sur lesquels se fondent les enquêtes de la Commission en matière d’aides d’État, afin de pouvoir utilement émettre leur avis à cet égard. Ainsi, la requérante se prévaut, en tant que partie intéressée, d’un intérêt à être informée du déroulement de la procédure et des éléments qui permettraient de présumer l’éventuelle existence d’une aide d’État. Étant donné que les parties intéressées seraient les premières à subir les conséquences économiques d’une constatation par la Commission de l’existence d’une aide illégale, ces parties devraient, au titre du principe d’égalité des parties consacré à l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, bénéficier des mêmes droits que les États membres. La Commission aurait ainsi, dans la décision attaquée, méconnu les droits patrimoniaux et les droits de la défense de la requérante.
101 D’autre part, l’intérêt public supérieur en cause coïnciderait avec les principes généraux de transparence et d’ouverture, consacrés par les traités UE et FUE ainsi que par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), dont la primauté par rapport aux exceptions prévues par le règlement no 1049/2001 justifierait, en soi, le renversement de la présomption générale.
102 La Commission conteste les arguments de la requérante.
103 Il convient de rappeler, comme le soulève à juste titre la requérante, que la présomption générale n’exclut pas la possibilité de démontrer qu’un document donné, dont la divulgation est demandée, n’est pas couvert par cette présomption ou qu’il existe un intérêt public supérieur justifiant la divulgation de ce document en vertu de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 (arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 62 ; du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 66, et du 11 mai 2017, Suède/Commission, C‑562/14 P, EU:C:2017:356, point 46).
104 Or, il incombe à celui qui fait valoir l’existence d’un intérêt public supérieur d’invoquer de manière concrète les circonstances justifiant la divulgation des documents concernés. Ces circonstances doivent, en outre, être de nature à établir que l’intérêt supérieur présente une acuité particulière qui prime sur les raisons justifiant le refus d’accès (voir, en ce sens, arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, points 93 et 94 ; du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 93, et du 23 janvier 2017, Justice & Environment/Commission, T‑727/15, non publié, EU:T:2017:18, point 53).
105 En l’espèce, il convient de constater qu’aucun élément présenté par la requérante n’est de nature à pouvoir renverser la présomption générale.
106 Premièrement, l’argument de la requérante selon lequel les documents demandés ne sont pas couverts par la présomption générale en raison du fait qu’ils ne sont pas de nature confidentielle ne saurait prospérer. En effet, cette simple affirmation ne saurait suffire à renverser la présomption générale, sous peine de priver celle-ci de son effet utile.
107 Deuxièmement, l’argument selon lequel les documents demandés ne sont pas couverts par la présomption générale compte tenu du fait que les États membres n’ont pas demandé à ce que ces documents ne soient pas divulgués, conformément à l’article 4, paragraphes 4 et 5, du règlement no 1049/2001, repose, comme le relève à juste titre la Commission, sur une interprétation erronée de ces dispositions et doit dès lors être écarté.
108 En effet, l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001 prévoit que, dans le cas de documents émanant de tiers, l’institution saisie d’une demande d’accès à un document consulte le tiers concerné afin de déterminer si une exception prévue aux paragraphes 1 et 2 du même article est d’application, à moins qu’il ne soit évident que le document doit ou ne doit pas être divulgué. Aux fins de l’application du règlement no 1049/2001 et conformément à son article 3, sous b), les États membres sont considérés comme étant des tiers.
109 Ainsi, si l’institution concernée considère qu’il est clair qu’un refus d’accès à un document émanant d’un État membre doit être opposé sur le fondement des exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 1 ou 2, du règlement no 1049/2001, elle refuse l’accès au demandeur sans même devoir consulter l’État membre dont émane le document, et ce que cet État membre ait ou non antérieurement formulé une demande sur le fondement de l’article 4, paragraphe 5, dudit règlement (arrêts du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, EU:C:2007:802, point 68, et du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑669/11, EU:T:2014:814, point 60).
110 En l’occurrence, les réponses des États membres avaient été transmises à la Commission dans le cadre d’enquêtes préliminaires mises en œuvre lors d’une procédure de contrôle des aides d’État et il était dès lors manifeste que l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 était susceptible d’être invoquée par les États membres. Partant, la Commission n’était pas dans l’obligation de consulter les États membres au préalable.
111 Troisièmement, l’argument selon lequel, en substance, les principes de transparence et d’ouverture, tels qu’ils sont consacrés par les traités UE et FUE et la Charte, primeraient en l’espèce sur le règlement no 1049/2001 et constitueraient l’intérêt public supérieur en cause, doit également être rejeté.
112 En effet, d’une part, il y a lieu de relever que l’article 15, paragraphe 3, deuxième alinéa, TFUE prévoit que les principes généraux et les limites qui, pour des raisons d’intérêt public ou privé, régissent l’exercice du droit d’accès aux documents des citoyens sont fixés par voie de règlement par le Parlement et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire. Ainsi, le règlement no 1049/2001, adopté sur le fondement de l’article 255 CE, dont le contenu a été repris à l’article 15, paragraphe 3, TFUE, précise ces principes généraux et ces limites en ce qui concerne le droit d’accès aux documents détenus par la Commission. Parmi ces limites figure l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, de ce règlement, tirée de la protection des objectifs des activités d’enquête des institutions. De plus, selon l’article 52, paragraphe 2, de la Charte, les droits reconnus par celle-ci qui font l’objet de dispositions dans les traités s’exercent dans les conditions et les limites définies par ceux-ci (arrêt du 28 mars 2017, Deutsche Telekom/Commission, T‑210/15, EU:T:2017:224, point 113).
113 D’autre part, il y a lieu de rappeler que l’intérêt public supérieur susceptible de justifier la divulgation d’un document ne doit pas nécessairement être distinct des principes qui sous-tendent le règlement no 1049/2001 (arrêt du 23 janvier 2017, Justice & Environment/Commission, T‑727/15, non publié, EU:T:2017:18, point 50 ; voir également, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, EU:C:2008:374, points 74 et 75, et du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, non publié, EU:C:2016:557, point 95).
114 Toutefois, les considérations invoquées par la requérante manquent de clarté et de précision et ne satisfont ainsi pas au standard retenu par la jurisprudence citée au point 104 ci-dessus. Ces considérations ne sauraient, dès lors, établir que les principes de transparence et d’ouverture présenteraient, en l’espèce, une acuité particulière qui primerait les raisons justifiant le refus de divulgation des documents en question (voir, en ce sens, arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, points 92 et 93, et du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, non publié, EU:C:2016:557, point 95).
115 En outre, l’affirmation de la requérante selon laquelle le principe de transparence constitue « la pierre angulaire des enquêtes en matière d’aide d’État » ne saurait être retenue. En effet, ainsi qu’il ressort des points 57 à 61 ci-dessus, c’est précisément la considération selon laquelle le règlement no 2015/1589 gouverne une procédure essentiellement bilatérale qui ne prévoit pas l’accès aux documents pour les parties intéressées autres que les États membres qui est à la base de l’application d’une présomption générale aux demandes d’accès aux documents afférents à de telles enquêtes.
116 Par ailleurs, s’agissant du droit d’accès au dossier prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte, qui est distinct du droit d’accès aux documents garanti par le règlement no 1049/2001, la requérante a indiqué lors de l’audience que sa demande d’accès visait uniquement l’accès aux documents, constitués en l’espèce par le questionnaire et les réponses des États membres à ce questionnaire, et non un accès au dossier. Par conséquent, la légalité de la décision attaquée ne saurait être examinée au regard du prétendu rejet d’une demande qui n’a, en réalité, jamais été faite. En tout état de cause, une telle demande, qui trouve son fondement dans le principe du respect des droits de la défense (voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, points 98 et 99, et du 8 novembre 2017, Klymenko/Conseil, T‑245/15, non publié, EU:T:2017:792, point 176), aurait dû être rejetée au motif, tel que cela est rappelé au point 60 ci-dessus, que la requérante ne bénéficie pas de droits de la défense et donc d’un droit d’accès au dossier dans une procédure de contrôle des aides d’État.
117 Pour ce qui est, quatrièmement, de l’argument de la requérante selon lequel, en tant que partie intéressée, elle aurait le droit d’avoir connaissance des éléments qui fondent les enquêtes de la Commission en matière d’aides d’État, afin de pouvoir utilement émettre son avis à cet égard, sous peine d’une violation de ses droits patrimoniaux et de ses droits de la défense, il suffit de relever que l’intérêt ainsi invoqué consiste à faciliter l’exercice de ses droits de la défense en tant que partie intéressée.
118 Or, ainsi qu’il a été rappelé aux points 60 et 116 ci-dessus, une procédure administrative en matière d’aides d’État étant seulement ouverte à l’encontre de l’État membre concerné, le bénéficiaire de l’aide ne saurait se prévaloir de droits de la défense pendant la procédure d’examen.
119 Il s’ensuit que l’argument de la requérante, tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement doit également être écarté, étant donné que les parties intéressées et les États membres ne se trouvent pas dans des situations comparables et que rien ne s’oppose donc à l’application de règles différentes concernant le droit d’accès à certains documents dans le cadre des procédures relatives aux aides d’État.
120 S’agissant, cinquièmement, du grief de la requérante selon lequel la Commission n’a pas procédé à un examen concret et individuel des documents demandés, il suffit de rappeler que l’exigence imposant de vérifier si la présomption générale en question s’applique réellement ne saurait être interprétée en ce sens que la Commission devrait examiner individuellement tous les documents demandés en l’espèce. Une telle exigence priverait cette présomption générale de son effet utile, à savoir permettre à la Commission de répondre à une demande d’accès globale d’une manière également globale (arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 68 ; du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 101, et du 28 mars 2017, Deutsche Telekom/Commission, T‑210/15, EU:T:2017:224, point 105).
121 Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen comme étant non fondé.
122 Il convient, dès lors, de rejeter le recours dans son intégralité, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur le bien-fondé des griefs, tirés, d’une part, de la violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 et, d’autre part, de la violation de l’article 4, paragraphe 3, du même règlement. En effet, la décision attaquée étant déjà légalement fondée par les motifs qu’elle comporte et qui sont relatifs à l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, ces griefs, même à les supposer fondés, doivent être écartés comme étant en toute hypothèse inopérants.
Sur les dépens
123 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (huitième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) La Chambre de commerce et d’industrie métropolitaine Bretagne-Ouest (port de Brest) est condamnée aux dépens.
Collins | Kancheva | De Baere |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 septembre 2018.
Le greffier | Le président |
E. Coulon | A. M. Collins |
* Langue de procédure : le français.
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