BSCA v Commission (Competition - Judgment) French Text [2018] EUECJ T-818/14 (25 January 2018)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2018/T81814.html
Cite as: ECLI:EU:T:2018:33, [2018] EUECJ T-818/14, EU:T:2018:33

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ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

25 janvier 2018 (*)

« Aides d’État – Aides accordées par la Belgique en faveur de BSCA – Décision déclarant les aides pour partie compatibles et pour partie incompatibles avec le marché intérieur – Acte juridiquement contraignant – Délai de prescription – Nature économique de l’ILS – Proportion d’utilisation économique des installations – Données chiffrées erronées – Demande d’adaptation – Détermination des valeurs actualisées – Obligation de motivation – Distorsions de concurrence – Confiance légitime »

Dans l’affaire T‑818/14,

Brussels South Charleroi Airport (BSCA), établie à Charleroi (Belgique), représentée par Mes P. Frühling, S. Golinvaux, H. Tacheny et J. Delarue, avocats,

partie requérante,

soutenue par

Société wallonne des aéroports SA (Sowaer), représentée par Mes A. Lepièce et H. Baeyens, avocats,

partie intervenante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. S. Noë, R. Sauer et B. Stromsky, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Brussels Airport Company SA, représentée par Mes T. Janssens, F. Hoseinian et T. Oeyen, avocats,

et par

Brussels Airlines SA/NV, représentée initialement par Mes J. Derenne, J. Blockx, D. Vallindas et D. Dauchez, puis par Mes Derenne et Vallindas, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation des articles 3 à 6 de la décision C(2014) 6849 final de la Commission, du 1er octobre 2014, concernant les mesures SA. 14093 (C76/2002) mises à exécution par la Belgique en faveur de BSCA et Ryanair,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie),

composé de Mmes I. Labucka, faisant fonction de président, M. Kancheva, MM. L. Madise, R. Barents (rapporteur) et J. Passer, juges,

greffier : Mme G. Predonzani, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 6 juillet 2017,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        En 1991, la Région wallonne (Belgique) a créé Brussels South Charleroi Airport (BSCA) (ci-après la « requérante » ou « BSCA »), afin de gérer l’aéroport de Charleroi Bruxelles-Sud (Belgique) (ci-après l’« aéroport de Charleroi »).

2        Par convention en date du 9 juillet 1991 (ci-après la « convention Région/BSCA »), la Région wallonne a accordé à BSCA, pour une durée de 50 ans, une concession de service pour la gestion commerciale du domaine public de l’aéroport de Charleroi ainsi qu’une concession domaniale portant sur l’utilisation permanente et exclusive de la zone aéroportuaire.

3        La convention Région/BSCA fixe le partage des charges entre la Région wallonne et BSCA, y inclus le cahier des charges annexé à la convention Région/BSCA.

4        Le 20 juillet 2000, la Région wallonne a approuvé les orientations d’un accord-cadre portant sur un programme d’investissement pluriannuel sur l’aéroport de Charleroi, mentionnant en particulier le concept d’une nouvelle aérogare pour passagers, pour un budget global de 113,74 millions d’euros.

5        Le 8 novembre 2000, la Région wallonne a adopté une décision en exécution de sa décision du 20 juillet 2000, modifiant les hypothèses du programme d’investissement et portant le coût global à 121 millions d’euros.

6        Par décision du 23 mai 2001, la Région wallonne a approuvé les statuts et le plan financier de la Société wallonne des aéroports SA (Sowaer) pour les années 2001 à 2004, et, notamment, un montant d’investissements total sur l’aéroport de Charleroi d’environ 93 millions d’euros, dont 28 millions pour la nouvelle aérogare.

7        Le 1er juillet 2001, la Région wallonne a constitué la Sowaer, et ce afin de développer ses infrastructures aéroportuaires, de mettre ces infrastructures à la disposition des sociétés gestionnaires des aéroports concernés et de les maintenir dans un état opérationnel en prenant en charge les gros entretiens et les réparations.

8        Par avenant no 3 du 29 mars 2002, modifiant la convention Région/BSCA et conclu entre BSCA et la Région wallonne, cette dernière s’est engagée à verser à BSCA une subvention lui permettant d’assumer les coûts supportés pour la mise à disposition, par la Sowaer, des terrains, des constructions et des infrastructures aéroportuaires ainsi qu’une subvention remboursant les dépenses engagées par BSCA pour les services d’entretien et d’incendie (ci-après la « mesure de 2002 »).

9        Le 15 avril 2002, la Sowaer, qui avait repris, le 29 mars 2002, la concession domaniale accordée à BSCA en 1991, a conclu une convention de sous-concession domaniale permanente et exclusive de la zone aéroportuaire avec BSCA (ci-après la « convention de 2002 »), en vertu de laquelle cette dernière pouvait utiliser jusqu’en 2040 de façon exclusive la zone aéroportuaire aux fins de son exploitation. La Sowaer, quant à elle, s’engageait à réaliser un programme d’investissements ainsi qu’à effectuer les grosses réparations et les gros entretiens relatifs aux terrains, constructions et infrastructures. En contrepartie de cette sous-concession, BSCA s’est engagée à verser à la Sowaer une partie variable annuelle hors taxe sur la valeur ajoutée (TVA) égale à 35 % des redevances aéronautiques perçues durant l’année en cours, ce montant étant plafonné à partir de l’exercice 2002, et une redevance forfaitaire annuelle hors TVA de 9 371 000 euros, également destinée à évoluer au cours du temps.

10      Le 3 avril 2003, le gouvernement wallon a pris acte d’une révision du programme d’investissement, prévoyant un montant d’investissement supplémentaire de 33 millions d’euros, destiné à financer la construction d’un terminal d’une capacité de trois millions de passagers, et non plus de deux millions, et d’un parking pour voitures plus grand que celui qui était prévu à l’origine (ci-après la « mesure de 2003 »).

11      Le 4 avril 2006, une nouvelle convention a remplacé la convention de 2002, en reprenant l’essentiel de ses dispositions et en en modifiant d’autres, notamment les modalités de calcul du montant des redevances de concession que BSCA devait verser à la Sowaer.

12      La convention Région/BSCA a été parallèlement modifiée par l’avenant no 5 du 10 mars 2006, qui prévoit que les coûts engagés par BSCA pour les services liés à la protection contre l’incendie et à la sécurité du trafic au sol et du site aéroportuaire font désormais l’objet d’une compensation de la Région wallonne, étant observé que cette compensation, qui est indexée annuellement, est plafonnée.

13      La convention Région/BSCA a été de nouveau modifiée par l’avenant no 6 du 15 janvier 2008, qui a confié à BSCA, outre l’exécution des services liés à la protection contre l’incendie et à la sécurité du trafic au sol et du site aéroportuaire, l’exécution des services liés au suivi et à l’enregistrement des vols, à la planification des vols prévisionnels, au marshaling, qui consiste dans les opérations visant, en substance, à guider les avions vers leurs zones de stationnement, et à la sûreté, auparavant assurés par la Région wallonne. La subvention couvre désormais l’ensemble des frais liés à ces derniers services avec maintien du plafonnement pour les services mentionnés au point 12 ci-dessus.

14      À partir du 1er mai 1997, l’aéroport de Charleroi a accueilli la compagnie aérienne Ryanair Ltd. De 2000 à 2013, le trafic de l’aéroport de Charleroi est passé d’environ 200 000 passagers à près de 7 millions, la part de Ryanair s’élevant à plus de 70-80 % du total des passagers transportés.

15      La Commission des Communautés européennes a adopté le 12 février 2004 la décision 2004/393/CE concernant les avantages consentis par la Région wallonne et BSCA à la compagnie aérienne Ryanair lors de son installation à Charleroi (JO 2004, L 137, p. 1).

16      Par arrêt du 17 décembre 2008, Ryanair/Commission (T‑196/04, EU:T:2008:585), le Tribunal a annulé la décision 2004/393.

 Décision attaquée

17      Le 1er octobre 2014, la Commission a adopté la décision C(2014) 6849 final, concernant les mesures SA. 14093 (C76/2002) mises à exécution par la Belgique en faveur de BSCA et Ryanair (ci-après la « décision attaquée »).

18      Dans la décision attaquée, la Commission a rappelé que la décision 2004/393 avait été annulée par le Tribunal, en sorte que cette annulation avait eu pour effet la réouverture de la procédure formelle d’examen qui avait été close par ladite décision.

19      La Commission a souligné aussi que, par lettre du 23 juillet 2010, elle avait donné au Royaume de Belgique ainsi qu’aux parties ayant présenté des observations dans le cadre de la procédure formelle d’examen ouverte le 11 décembre 2002 la possibilité de présenter de nouvelles observations dans le cadre de la procédure formelle d’examen rouverte à la suite de l’arrêt du 17 décembre 2008, Ryanair/Commission (T‑196/04, EU:T:2008:585).

20      Enfin, la Commission a indiqué que, par lettre du 21 mars 2012, elle avait notifié au Royaume de Belgique sa décision d’étendre la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et invité les parties intéressées à présenter leurs observations sur les mesures en cause.

21      En outre, à titre liminaire, la Commission a rappelé que la Cour avait, de façon constante, défini les entreprises comme des entités exerçant une activité économique, indépendamment de leur statut juridique et de leur mode de financement, et que constituait une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné. Par ailleurs, la Commission a relevé que, dans l’arrêt du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290), le Tribunal avait conclu que l’exploitation d’un aéroport qui consistait à fournir des services aéroportuaires aux compagnies aériennes était une activité économique.

22      La Commission a considéré que les mesures en cause avaient été octroyées à la requérante en faveur de l’exploitation et de la construction d’infrastructures après le 12 décembre 2000, date de l’arrêt Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290). La Commission a rappelé que, jusqu’à cette date, sa pratique constante avait été de considérer que l’activité de développement et de gestion des infrastructures aéroportuaires ne constituait pas une activité économique susceptible d’entrer dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. À la suite de cet arrêt, la Commission a constaté que, en raison de la libéralisation progressive du marché, cette activité était devenue une activité économique, à l’exclusion des activités qui n’étaient pas de nature économique et qui tombaient normalement sous la responsabilité de l’État dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique (considérants 346 à 348).

23      La Commission a estimé que l’accord du 20 juillet 2000 (voir point 4 ci-dessus) et la décision du 8 novembre 2000 (voir point 5 ci-dessus) n’impliquaient pas pour la Région wallonne un engagement à l’égard d’un tiers et n’avaient pas un caractère irrévocable, ferme et définitif. Elle a rappelé que le critère pertinent aux fins de la détermination de la date à laquelle une aide éventuelle était réputée avoir été octroyée était la date de l’acte juridiquement contraignant par lequel les autorités publiques s’engageaient à accorder la mesure en question à son bénéficiaire. La Commission a considéré que la convention de 2002 constituait cet acte contraignant (considérants 353 et 354).

24      À cet égard, la Commission a, d’une part, relevé que la convention de 2002 avait consisté à mettre à disposition de la requérante des infrastructures et, d’autre part, indiqué que le programme d’investissement intégré à la convention de 2002 avait été sensiblement modifié par la mesure de 2003. Ces révisions du programme constituaient ainsi, selon la Commission, une modification substantielle et donc une nouvelle aide d’État en faveur de la requérante (considérants 362 et 363).

25      La Commission a rappelé qu’il était nécessaire, conformément à la jurisprudence de la Cour, d’exclure les activités qui tombaient normalement sous la responsabilité de l’État dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique, en raison du fait qu’elles n’étaient pas de nature économique, ces activités comprenant, en particulier, la sûreté, le contrôle du trafic aérien, la police et la douane (considérant 364).

26      La Commission a, d’abord, procédé à une distinction entre les investissements et les services effectués par la Sowaer qui devaient être considérés comme étant de nature économique et ceux qui devaient être considérés comme étant de nature non économique (considérants 364 à 374) et, ensuite, examiné, in concreto, cette distinction au regard des différents investissements et services financés en l’occurrence (considérants 375 à 400).

27      La Commission a considéré qu’échappaient à la qualification d’aide d’État la totalité des subventions liées aux services de protection contre l’incendie ainsi qu’aux services de sûreté (considérants 377 à 385).

28      Elle a, en revanche, estimé que les services d’entretien ainsi que ceux liés à la sécurité du trafic au sol (entretien courant du site aéroportuaire, entretien des bâtiments, des pistes, des abords, du charriot, petits travaux d’asphaltage, entretien courant et réparation de la piste et des accès, entretien et maintenance opérationnelle de l’éclairage et du balisage de la piste, travaux de fauchage, dégommage de la piste et son marquage, déneigement et tout autre service garantissant la sécurité du trafic au sol, du site aéroportuaire et des infrastructures) étaient des services de nature économique (considérants 390 à 400) et qu’il en était de même en ce qui concernait le suivi et l’enregistrement des vols ainsi que la planification des vols et le marshaling (considérants 401 à 404).

29      La Commission a constaté que, dans des circonstances similaires, un opérateur privé se fondant sur les possibilités de rentabilité prévisibles n’aurait pas pris part à de telles opérations. Selon la Commission, il s’agissait, dans ce cas, de déterminer si, dans des circonstances similaires, un opérateur privé se fondant sur les possibilités de rentabilité prévisibles, abstraction faite de toute considération de caractère social ou de politique régionale ou sectorielle, aurait pris part aux mêmes opérations que l’entité qui avait octroyé la mesure. La Commission a donc appliqué le critère de l’opérateur privé en économie de marché aux divers investissements et mesures pris (considérants 406 à 472).

30      La Commission a explicité les raisons pour lesquelles ces mesures étaient imputables aux pouvoirs publics (considérants 473 à 483).

31      La Commission a, premièrement, examiné la compatibilité des aides en faveur de Ryanair et a conclu de son analyse que les mesures en faveur de cette compagnie aérienne ne constituaient pas des aides d’État (considérants 488 à 581).

32      La Commission a, deuxièmement, examiné la compatibilité avec le marché intérieur des aides en faveur de la requérante. Elle a considéré que les aides en faveur de l’aéroport de Charleroi avaient été octroyées afin de favoriser le développement régional et qu’elles avaient eu un impact positif sur l’économie et sur l’emploi à Charleroi et dans la région. Si ces aides avaient contribué à un objectif d’intérêt général, à savoir le développement économique de Charleroi et de la région, la Commission a néanmoins considéré qu’elle devait examiner si, en application du paragraphe 114 de la communication de la Commission concernant les lignes directrices sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes (JO 2014, C 99, p. 3, ci-après les « lignes directrices »), lesdites aides ne favorisaient pas la multiplication d’aéroports non rentables. Elle a considéré que les perspectives d’utilisation de l’aéroport de Charleroi étaient suffisantes pour justifier les investissements et a relevé que BSCA avait, à la fin de l’année 2013, un bénéfice courant avant impôt de 14,86 millions d’euros, soit plus que le montant de l’aide reçue. Toutefois, il a été constaté que ces aides avaient provoqué des distorsions de concurrence significatives en affectant la croissance du nombre de passagers de l’aéroport de Bruxelles-National (Belgique). La Commission a relevé que, selon le paragraphe 119 des lignes directrices, pour être admissible au bénéfice d’une aide au fonctionnement, un aéroport ne devait pas accueillir plus de 3 millions de passagers. Dans la mesure où l’aéroport de Charleroi était dans cette situation, la Commission a considéré que cette disposition n’était pas applicable en ce qui concernait les aides octroyées avant le 4 avril 2014, date à partir de laquelle les lignes directrices s’appliquaient (point 171 desdites lignes). La Commission a donc conclu que les mesures mises à exécution par le Royaume de Belgique en faveur de la requérante au titre de la convention de 2002 et des mesures de 2002 et de 2003 constituaient, sur le fondement de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, des aides d’État compatibles avec le marché intérieur jusqu’au 3 avril 2014 et des aides d’État incompatibles avec le marché intérieur à partir du 4 avril 2014 (considérants 582 à 649).

33      La Commission a rejeté l’applicabilité du délai de prescription aux aides consenties en faveur de la requérante, au motif, notamment, que la mesure de 2002 comportait des modifications substantielles de l’aide initialement octroyée par la convention Région/BSCA (considérants 650 à 666).

34      De même, la Commission a rejeté l’applicabilité du principe de protection de la confiance légitime à la subvention versée par la Région wallonne et a indiqué les raisons pour lesquelles la requérante ne pouvait pas se prévaloir d’un tel principe (considérants 667 à 678).

35      En dernier lieu, la Commission a constaté que, en adoptant la convention de 2002 et les mesures de 2002 et de 2003, le Royaume de Belgique avait mis à exécution des aides au bénéfice de la requérante en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE. La Commission a considéré que ces aides étaient constituées par la différence entre la redevance qu’aurait exigée un opérateur privé en économie de marché et les redevances effectivement versées par la requérante à la Région wallonne-Sowaer (considérant 679).

36      Le dispositif de la décision attaquée est ainsi libellé :

« Article premier

1.      Les mesures en faveur de Ryanair […], à savoir l’engagement du gouvernement wallon auprès de Ryanair du 6 novembre 2001, le contrat entre BSCA et Ryanair du 2 décembre 2001, la convention Promocy du 12 décembre 2001, le contrat entre Promocy et Leading Verge du 31 janvier 2002, l’arrêté ministériel du 11 juin 2004, la lettre de BSCA à Ryanair du 24 juin 2004, l’accord commercial entre BSCA et Ryanair du 9 décembre 2005, l’avenant du 6 décembre 2010 au contrat entre BSCA et Ryanair et la cession des parts de BSCA dans Promocy le 31 mars 2010, ne constituent pas une aide d’État en faveur de Ryanair Ltd aux termes de l’article 107, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

2.      Les mesures en faveur de [BSCA] constituées par la convention entre la [Sowaer] et BSCA du 4 avril 2006, l’avenant no 5 à la convention entre la Région wallonne et BSCA du 10 mars 2006 et l’avenant no 6 à la convention entre la Région wallonne et BSCA du 15 janvier 2008 ne constituent pas une aide d’État en faveur de BSCA aux termes de l’article 107, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Article 2

1.      Les mesures illégalement mises à exécution par [le Royaume de] Belgique, en violation de l’article 108, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en faveur de BSCA au titre de la convention de sous-concession du 15 avril 2002 entre la Sowaer et BSCA et de l’avenant no 3 du 29 mars 2002 à [la] convention entre la Région wallonne et BSCA, ainsi qu’au titre de la décision d’investissement de la Région wallonne du 3 avril 2003, constituent, jusqu’au 3 avril 2014, des aides d’État compatibles avec le marché intérieur sur le fondement de l’article 107, paragraphe 3, [sous] c), du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

2.      À supposer qu’elle constitue une aide d’État aux termes de l’article 107, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’augmentation de capital de BSCA souscrite le 3 décembre 2002 par la Sowaer est une aide d’État compatible avec le marché intérieur sur le fondement de l’article 107, paragraphe 3, [sous] c), du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Article 3

Les mesures illégalement mises à exécution par [le Royaume de] Belgique, en violation de l’article 108, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en faveur de BSCA au titre de la convention de sous-concession du 15 avril 2002 entre la Sowaer et BSCA et de l’avenant no 3 du 29 mars 2002 à la convention entre la Région wallonne et BSCA, ainsi qu’au titre de la décision d’investissement de la Région wallonne du 3 avril 2003, constituent, depuis le 4 avril 2014, des aides d’État incompatibles avec le marché intérieur aux termes de l’article 107, paragraphe 1, dudit traité.

Article 4

1.      [Le Royaume de] Belgique est tenu de mettre fin aux aides visées à l’article 3 en portant la redevance de concession due par BSCA au minimum au niveau de la redevance de concession conforme au prix de marché et en récupérant auprès du bénéficiaire les montants d’aide perçus au titre des mesures visées à l’article 3, à compter du 4 avril 2014.

2.      Les sommes à récupérer produisent des intérêts à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition du bénéficiaire, jusqu’à leur récupération effective.

3.      Les intérêts sont calculés sur une base composée conformément au chapitre V du règlement (CE) no 794/2004.

4.      [Le Royaume de] Belgique annule tous les paiements en suspens relevant des aides visées à l’article 3 à compter de la date d’adoption de la présente décision.

Article 5

1.      La récupération des aides visées à l’article 3 est immédiate et effective.

2.      [Le Royaume de] Belgique veille à ce que la présente décision soit mise en œuvre dans les quatre mois suivant la date de sa notification.

Article 6

1.      Dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, [le Royaume de] Belgique communique les informations suivantes à la Commission :

a)      les dates auxquelles BSCA a versé les redevances de concession au titre de l’année 2014 et le calcul des intérêts de récupération ;

b)      une description détaillée des mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision ;

c)      les documents démontrant que le bénéficiaire a été mis en demeure de rembourser l’aide.

2.      [Le Royaume de] Belgique tient la Commission informée de l’avancement des mesures nationales prises pour mettre en œuvre la présente décision jusqu’à la récupération complète des aides visées à l’article 3. [Il] transmet immédiatement, sur simple demande de la Commission, toute information sur les mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision. [Il] fournit aussi des informations détaillées concernant les montants d’aide et les intérêts déjà récupérés auprès du bénéficiaire.

Article 7

Le Royaume de Belgique est destinataire de la présente décision. »

 Procédure et conclusions des parties

37      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 décembre 2014, la requérante a introduit le présent recours.

38      La Commission a déposé le mémoire en défense au greffe du Tribunal le 8 avril 2015.

39      Par actes déposés respectivement au greffe du Tribunal les 3 et 15 avril 2015, Brussels Airlines SA/NV (ci-après « Brussels Airlines ») et Brussels Airport Company SA (ci-après « Brussels Airport ») ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la Commission.

40      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 1er juin 2015, la requérante a demandé le traitement confidentiel, à l’égard de Brussels Airport et de Brussels Airlines, de certaines données et informations contenues dans la requête et ses annexes ainsi que dans le mémoire en défense et ses annexes.

41      La requérante a déposé une réplique au greffe du Tribunal le 15 juin 2015 et le 16 juin 2015 une version non confidentielle de ladite réplique.

42      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 16 juin 2015, la requérante a demandé le traitement confidentiel, à l’égard de Brussels Airport et de Brussels Airlines, de certaines données et informations contenues dans la réplique et ses annexes.

43      La Commission a déposé une duplique au greffe du Tribunal le 31 juillet 2015.

44      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 24 août 2015, la requérante a demandé le traitement confidentiel, à l’égard de Brussels Airport et de Brussels Airlines, de certaines données et informations contenues dans la duplique et ses annexes.

45      Par les ordonnances du 7 septembre 2015, BSCA/Commission (T‑818/14, non publiée, EU:T:2015:724), et du 7 septembre 2015, BSCA/Commission (T‑818/14, non publiée, EU:T:2015:729), le président de la neuvième chambre du Tribunal a admis, respectivement, Brussels Airport et Brussels Airlines à intervenir au soutien des conclusions de la Commission dans la présente affaire et a réservé la décision sur le bien-fondé de la demande de traitement confidentiel.

46      Par ordonnance du 28 janvier 2016, BSCA/Commission (T‑818/14, non publiée, EU:T:2016:75), le président de la neuvième chambre du Tribunal a accueilli la demande de confidentialité à l’égard de certaines informations contenues dans la requête et dans le mémoire en défense ainsi que de certaines données contenues dans plusieurs annexes et a rejeté la demande de confidentialité pour le surplus. Par ailleurs, un délai a été imparti à la requérante par les soins du greffier en vue de communiquer une version non confidentielle des pièces mentionnées aux points 1 et 2 du dispositif de ladite ordonnance, signifiée aux intervenantes. Enfin, les dépens ont été réservés.

47      Par lettre du 2 mars 2016, la requérante a introduit une demande de rectification de l’ordonnance mentionnée au point 46 ci-dessus.

48      Le 5 avril 2016, la Commission a notifié au Royaume de Belgique un corrigendum de la décision attaquée en spécifiant que les erreurs qui avaient été décelées dans cette dernière n’affectaient nullement les conclusions qui y étaient formulées.

49      Par ordonnance du 11 avril 2016, BSCA/Commission (T‑818/14 REC, non publiée, EU:T:2016:302), le président de la neuvième chambre du Tribunal a procédé à la rectification de l’ordonnance du 28 janvier 2016 mentionnée au point 46 ci-dessus.

50      Par ordonnance du 13 avril 2016, BSCA/Commission (T‑818/14, non publiée, EU:T:2016:712), le président de la neuvième chambre du Tribunal a rapporté l’ordonnance du 28 janvier 2016, BSCA/Commission (T‑818/14, non publiée, EU:T:2016:75), et étendu la demande de confidentialité à d’autres informations et données.

51      Le 23 juin 2016, la requérante a déposé un mémoire en adaptation en raison des corrections apportées par la Commission à la décision attaquée par le corrigendum du 5 avril 2016.

52      Les 5 et 6 juillet 2016, Brussels Airlines et Brussels Airport ont, respectivement, déposé leur mémoire en intervention au greffe du Tribunal.

53      Le 15 septembre 2016, la requérante a déposé au greffe du Tribunal ses observations sur le mémoire en intervention, d’une part, de Brussels Airlines et, d’autre part, de Brussels Airport ainsi que des annexes.

54      Le 22 septembre 2016, la Commission a déposé ses observations sur le mémoire en adaptation de la requérante.

55      Par décision du 6 octobre 2016, la présente affaire a été réattribuée à un autre juge rapporteur dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice.

56      Par décision du 11 octobre 2016, le président de la huitième chambre a décidé de ne pas procéder à la jonction de la présente affaire avec l’affaire T‑474/16, Société wallonne des aéroports/Commission.

57      Le 24 novembre 2016, Brussels Airport et Brussels Airlines ont, chacune, déposé leurs observations sur le mémoire en adaptation de la requérante.

58      Le 12 janvier 2017, la Sowaer a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la requérante lors de la phase orale de la procédure.

59      Par ordonnance du 9 mars 2017, la Sowaer a été admise à intervenir au soutien des conclusions de la requérante lors de l’éventuelle phase orale de la procédure.

60      Le 5 avril 2017, le Tribunal a décidé de renvoyer cette affaire devant la huitième chambre élargie.

61      La requérante et, lors de l’audience, la Sowaer concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les articles 3 à 6 de la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

62      La Commission, Brussels Airport et Brussels Airlines concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité des tableaux déposés par la requérante

63      Lors de l’audience, la requérante a souhaité déposer devant le Tribunal deux tableaux censés reprendre les données chiffrées contenues dans la décision attaquée.

64      Le Tribunal décide, en vertu de l’article 85, paragraphe 3, de son règlement de procédure, de regarder lesdits tableaux comme irrecevables, au motif que la requérante n’a pas justifié du retard dans la présentation de ceux-ci.

 Sur le fond

65      À l’appui de son recours, la requérante invoque neuf moyens. Le premier moyen est tiré de l’erreur de droit et de l’erreur manifeste d’appréciation commises par la Commission dans la fixation de la date de la décision d’octroi des financements par la Région wallonne. Le deuxième moyen est tiré de la prescription de l’action de la Commission. Le troisième moyen est tiré de l’erreur de droit, de l’erreur de fait et de l’erreur manifeste d’appréciation commises par la Commission dans la qualification de l’« Instrument Landing System » (système d’atterrissage aux instruments, ci-après l’« ILS ») d’investissement de nature économique ainsi que du défaut de motivation dans la qualification de l’ILS d’investissement de nature économique. Le quatrième moyen est tiré de l’erreur de fait et de l’erreur manifeste d’appréciation commises par la Commission dans la prise en compte du pourcentage de 7 % correspondant à l’utilisation non économique du coût des investissements réalisés pour la nouvelle aérogare ainsi que du défaut de motivation dans la prise en compte de ce pourcentage. Le cinquième moyen est tiré de l’erreur de droit, des erreurs de fait, des erreurs manifestes d’appréciation et du défaut de motivation commis par la Commission dans la détermination des valeurs actualisées nettes des mesures de 2002 et de 2003 entraînant une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Le sixième moyen est tiré de l’erreur de droit, des erreurs de fait et des erreurs manifestes d’appréciation commises par la Commission dans la détermination des valeurs actualisées nettes des mesures de 2002 et de 2003 et, partant, dans le calcul de la redevance additionnelle payée par la requérante à partir du 4 avril 2014. Le septième moyen est tiré du défaut de motivation et de l’erreur de droit commis par la Commission dans la détermination du montant de la redevance additionnelle à payer à partir du 1er janvier 2016. Le huitième moyen est tiré de l’erreur de droit, de l’erreur de fait, de l’erreur manifeste d’appréciation et du défaut de motivation commis par la Commission dans l’examen du marché en cause et des prétendues distorsions de concurrence entre l’aéroport de Charleroi et l’aéroport de Bruxelles-National induites par l’aide. Le neuvième moyen est tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime.

 Sur le premier moyen, tiré de l’erreur de droit et de l’erreur manifeste d’appréciation commises par la Commission dans la fixation de la date de la décision d’octroi des financements par la Région wallonne

66      Selon la requérante, les mesures de 2002 et 2003 consistaient, en réalité, en des mesures prises dans la décision du 20 juillet 2000, telle que confirmée par celle du 8 novembre 2000, en sorte que ces mesures étaient antérieures à l’arrêt du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290). À cet égard, elle observe que le programme d’investissement prévu pour l’aéroport de Charleroi, annexé à la convention de 2002, est identique au programme d’investissement décidé par la Région wallonne le 20 juillet 2000 et qui a été confirmé le 8 novembre 2000. La requérante souligne, par ailleurs, que sa stratégie commerciale, prévue au mois de juillet 2000, faisait déjà état, notamment, de la nouvelle aérogare, du parking pour voitures et de l’allongement de la piste.

67      La requérante fait également valoir que c’est à la date des 20 juillet et 8 novembre 2000 que la Région wallonne s’est engagée à accorder les aides. Les décisions prises à ces dates étaient contraignantes, dans la mesure où elles étaient assez précises compte tenu du projet concerné. La requérante ajoute que lesdites décisions allaient bien au-delà d’un accord de principe, par définition abstrait, et prévoyaient concrètement l’imputation des investissements. En effet, lesdites décisions ne sauraient être considérées comme de simples déclarations d’intention, en ce qu’elles prévoyaient un engagement de principe du gouvernement wallon, la détermination du montant global du financement sur la base des informations disponibles à l’époque et le plan financier y afférent. La requérante ajoute que les actes en cause contenaient, en effet, toutes les informations suffisantes pour caractériser des engagements irrévocables de financement. La convention de 2002 n’aurait fait qu’entériner ces décisions. À cet égard, la requérante observe que la référence aux décisions des 20 juillet et 8 novembre 2000, dans le cadre du plan financier de la Sowaer, soulignait leur caractère contraignant.

68      Enfin, la requérante observe que l’octroi des mesures décidées par les décisions des 20 juillet et 8 novembre 2000 lui a été notifié bien avant le 12 décembre 2000.

69      La Commission conclut au rejet de ce moyen.

70      À cet égard, il convient, d’abord, de rappeler que, dans l’arrêt du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290), le Tribunal a conclu que l’exploitation d’un aéroport qui consiste à fournir des services aéroportuaires aux compagnies aériennes est une activité économique (voir, notamment, points 107 et 120 dudit arrêt).

71      Par ailleurs, aux considérants 346 et 347 de la décision attaquée, la Commission a fait les constatations suivantes :

« (346)      Ainsi, jusqu’à l’arrêt [du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290)], la pratique constante de la Commission avait été de considérer que l’activité de développement et de gestion des infrastructures aéroportuaires ne constituait pas une activité économique susceptible d’entrer dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE. [À la s]uite [de] l’arrêt [du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290)], la Commission a constaté que, en raison de la libéralisation progressive du marché, cette activité était devenue une activité économique. Aussi, ainsi que le précisent les lignes directrices sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes […] dans leurs points 28 et 29, “à compter de la date de l’arrêt [du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290)], l’exploitation et la construction d’infrastructures aéroportuaires doivent être considérées comme relevant du champ d’application du contrôle des aides d’État. Inversement, du fait de l’incertitude qui existait avant l’arrêt [du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290)], les pouvoirs publics pouvaient légitimement considérer que le financement des infrastructures aéroportuaires ne constituait pas une aide d’État et que, partant, une telle mesure ne devait pas être notifiée à la Commission. Il s’ensuit que la Commission ne peut à présent contester, sur la base des règles en matière d’aides d’État, les mesures de financement accordées avant l’arrêt [du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290)]”.

(347)      Il convient dès lors de déterminer si les mesures octroyées à BSCA en faveur de l’exploitation et de la construction d’infrastructures aéroportuaires l’ont été avant ou après le 12 décembre 2000, date de l’arrêt [Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290)]. »

72      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le critère pour déterminer le moment de l’octroi d’une aide est celui de l’acte juridiquement contraignant par lequel l’autorité nationale compétente s’engage à accorder l’aide à son bénéficiaire (arrêt du 19 mai 2015, Diputación Foral de Bizkaia/Commission, T‑397/12, non publié, EU:T:2015:291, point 33 ; voir également, en ce sens, arrêts du 14 janvier 2004, Fleuren Compost/Commission, T‑109/01, EU:T:2004:4, points 73 et 74, et du 30 novembre 2009, France et France Télécom/Commission, T‑427/04 et T‑17/05, EU:T:2009:474, point 321) par une promesse inconditionnelle et légalement contraignante (voir, en ce sens, arrêt du 15 février 2001, Autriche/Commission, C‑99/98, EU:C:2001:94, point 38, et ordonnance du 5 octobre 2016, Diputación Foral de Bizkaia/Commission, C‑426/15 P, non publiée, EU:C:2016:757, point 30). Ce critère implique nécessairement que, à la date de l’octroi de l’aide, le bénéficiaire de celle-ci puisse être identifié.

73      Le point B 12 IV de la décision du 20 juillet 2000, intitulé « Conditions du développement des aéroports régionaux et mesures environnementales y relatives. Accord-cadre », est libellé comme suit :

« Le gouvernement approuve les orientations du programme d’investissements de l’aéroport de [Charleroi] et charge le Ministre qui a la gestion aéroportuaire dans ses attributions de lui présenter le programme physique pluriannuel y relatif. »

74      Il ressort ainsi clairement de cette décision que le gouvernement wallon ne s’est pas engagé à l’égard de la requérante à lui accorder une aide, mais, au contraire, que le ministre compétent s’est uniquement engagé à présenter audit gouvernement les mesures d’exécution du programme d’investissement. Par ailleurs, il convient de constater que la requérante n’est pas identifiée en tant que bénéficiaire potentiel d’une aide.

75      Le point B 15, paragraphe 2, de la décision du 8 novembre 2000, intitulé « Exécution de l’accord-cadre du 20 juillet 2000 relatif aux aéroports régionaux. Programme pluriannuel d’investissement de l’aéroport de [Charleroi] », précise que le « programme physique pluriannuel d’investissement 2000-2004 » a été approuvé par le gouvernement wallon. Ce programme d’investissement dispose, notamment, en ses neuvième et dixième alinéas, ce qui suit :

« [… D]es aménagements doivent être apportés au cadre conventionnel initial régissant les rapports entre la Région wallonne et BSCA, son concessionnaire exploitant l’aéroport de [Charleroi] ; ceci afin d’accroître l’efficacité de l’opérateur présent sur le site.

Il conviendra donc d’adapter les textes existants (convention de concession, cahier des charges et protocoles annexes) en fonction de la formule nouvelle qui aura été retenue pour le financement des investissements. »

76      Cette disposition ne laisse subsister aucun doute quant au fait que les engagements concrets entre la Région wallonne et la requérante dépendaient de l’adaptation des textes susmentionnés.

77      Il s’ensuit que, contrairement à ce que prétend la requérante, les décisions des 20 juillet et 8 novembre 2000 ne contenaient pas d’engagements juridiques contraignants et précis de la part du gouvernement wallon envers la requérante. Ainsi d’ailleurs que le reconnaît elle-même la requérante dans la réplique, ces décisions constituaient un engagement du gouvernement wallon au regard de ses objectifs politiques et étaient le fruit d’un consensus ministériel au sein de ce gouvernement. En revanche, la simple lecture de la convention de 2002 met en exergue le fait que ce n’est que dans ce document que les détails concernant les infrastructures et les services ont été fixés sous forme d’obligations juridiques. En effet, cette convention de 2002 se caractérise par un programme d’investissement ainsi que par des dépenses auxquelles s’engageait la Région wallonne-Sowaer et par la redevance de concession qu’acceptait de verser la requérante en contrepartie.

78      Il s’ensuit également que, en l’absence d’obligations contraignantes et précises dans les décisions des 20 juillet et 8 novembre 2000, les arguments de la requérante concernant la prétendue correspondance entre le tableau annexé à la convention de 2002 conclue entre la requérante et la Sowaer et celui des décisions des 20 juillet et 8 novembre 2000, la prétendue notification de la décision du 20 juillet 2000 avant la date de l’arrêt du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290), et les négociations menées, dès le mois de septembre 2000, entre elle et Ryanair sont dépourvus de pertinence et ne peuvent qu’être écartés.

79      Enfin, il n’est pas contesté que les infrastructures ont été mises à la disposition de la requérante par la Sowaer. Or, cette dernière n’a été constituée que le 1er juillet 2001.

80      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la prescription de l’action de la Commission

81      Par son deuxième moyen, la requérante fait valoir que les aides octroyées en 2000 bénéficient de la prescription décennale prévue à l’article 15, paragraphe 1, du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), dès lors que plus de dix ans se sont écoulés entre le moment de leur octroi et le 20 avril 2011, date de la première demande d’informations par la Commission au Royaume de Belgique au sujet des aides qui font l’objet de la décision attaquée.

82      La Commission conclut au rejet de ce moyen.

83      À cet égard, il convient de relever que ce moyen est uniquement fondé sur la prémisse selon laquelle les aides litigieuses auraient été accordées par les décisions des 20 juillet et 8 novembre 2000.

84      Or, il a précisément été constaté dans le cadre de l’examen du premier moyen que les aides litigieuses n’avaient pas été accordées par les décisions des 20 juillet et 8 novembre 2000, mais par la convention de 2002, soit moins de dix ans entre l’octroi des aides et l’envoi de la première demande d’information de la Commission au Royaume de Belgique, le 20 avril 2011, en sorte que cette prémisse est erronée.

85      Il s’ensuit que le deuxième moyen doit également être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré de l’erreur de droit, de l’erreur de fait et de l’erreur manifeste d’appréciation commises par la Commission dans la qualification de l’ILS d’investissement de nature économique ainsi que du défaut de motivation dans la qualification de l’ILS d’investissement de nature économique

86      Par son troisième moyen, la requérante fait, en substance, grief à la Commission, dans le cadre d’une première branche, d’avoir commis une erreur de droit et une erreur manifeste d’appréciation dans la qualification de l’ILS d’investissement de nature économique ainsi qu’un défaut de motivation dans la qualification de l’ILS d’investissement de nature économique.

87      Selon la requérante, l’ILS est un système permettant aux avions l’approche de la piste d’atterrissage par mauvaise visibilité. L’ensemble de ce système se compose essentiellement de trois parties : la première partie, à savoir le « localizer », assure le guidage latéral de l’avion, la deuxième partie, à savoir le « glide slope », assure le guidage vertical de l’avion et la troisième partie, à savoir les « marqueurs de distance », signale l’approche de la piste. Ainsi, l’ILS devrait être considéré comme un équipement indispensable à la navigation aérienne et à la sécurité, la sûreté et la mise en conformité des pistes et des installations. À cet égard, la requérante se réfère à la qualification donnée à ce système par Belgocontrol (organisme belge du contrôle aérien) ainsi que par Eurocontrol. Par ailleurs, elle renvoie aux références concernant l’ILS dans le règlement (CE) no 2096/2005 de la Commission, du 20 décembre 2005, établissant les exigences communes pour la fourniture de services de navigation aérienne (JO 2005, L 335, p. 13), le règlement (CE) no 859/2008 de la Commission, du 20 août 2008, modifiant le règlement (CEE) no 3922/91 du Conseil en ce qui concerne les règles techniques et procédures administratives communes applicables au transport commercial par avion (JO 2008, L 254, p. 1), le règlement (UE) no 965/2012 de la Commission, du 5 octobre 2012, déterminant les exigences techniques et les procédures administratives applicables aux opérations aériennes conformément au règlement (CE) no 216/2008 du Parlement européen et du Conseil (JO 2012, L 296, p. 1), et le règlement (UE) no 139/2014 de la Commission, du 12 février 2014, établissant des exigences et des procédures administratives relatives aux aérodromes conformément au règlement (CE) no 216/2008 du Parlement européen et du Conseil (JO 2014, L 44, p. 1). La requérante précise que, dès lors que la fourniture de services de navigation aérienne est qualifiée de service non économique dans le règlement (CE) no 550/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 10 mars 2004, relatif à la fourniture de services de navigation aérienne dans le ciel unique européen (JO 2004, L 96, p. 10), ainsi que dans les lignes directrices, l’ILS en tant qu’instrument nécessaire à la navigation aérienne ne présenterait pas un caractère économique. Le fait que l’installation de l’ILS ne serait pas légalement requise n’y changerait rien.

88      De plus, la requérante fait grief à la Commission ne pas avoir motivé les raisons pour lesquelles l’ILS de catégorie III ne ferait pas partie des équipements nécessaires à la navigation aérienne ne présentant pas de caractère économique.

89      Dans le cadre d’une seconde branche de ce moyen, la requérante fait valoir que le balisage des pistes était également une activité de nature non économique.

90      La Commission conclut au rejet de ce moyen.

91      Il convient de rappeler que la Commission a considéré, au considérant 367 de la décision attaquée, ce qui suit :

« En revanche, la Commission considère comme économiques les investissements et grosses réparations relatifs au système ILS de catégorie III et au balisage des pistes. En effet, ces coûts ne se rattachent pas à une prérogative de puissance publique, mais sont inhérents à l’exploitation commerciale des infrastructures, cette dernière consistant à mettre celles-ci à disposition des compagnies aériennes dans des conditions de sécurité satisfaisantes. En particulier, assurer la sécurité du trafic au sol (y compris lors des atterrissages et décollages) fait partie intégrante de l’exploitation commerciale de l’aéroport et est donc de nature économique. Dans la récente décision de la Commission concernant l’aéroport de Marseille, la sécurité d’exploitation a d’ailleurs été exclue du champ des activités “non économiques” ».

92      À titre liminaire, il convient de relever que la requérante n’a pas contesté la constatation effectuée par la Commission selon laquelle l’ILS et le balisage des pistes étaient des équipements séparés.

93      Or, s’agissant du balisage des pistes, la requérante n’a, ainsi que l’a souligné, à juste titre, la Commission, qui soulève l’irrecevabilité de cette branche, présenté aucun argument selon lequel il s’agissait d’une activité de nature non économique.

94      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, toute requête doit indiquer l’objet du litige, les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens.

95      Selon une jurisprudence constante, cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (ordonnance du 7 novembre 2013, Arbos/Commission, C‑615/12 P, non publiée, EU:C:2013:742, point 33 ; voir, également, arrêt du 25 octobre 2012, Arbos/Commission, T‑161/06, non publié, EU:T:2012:573, point 23 et jurisprudence citée).

96      Or, force est de constater que la requête n’est, sur ce point, pas conforme à l’article 76, sous d), du règlement de procédure, dans la mesure où la requérante s’est contentée d’invoquer le caractère non économique de l’opération de balisage des pistes, mais n’a invoqué aucun argument en ce sens. Il s’ensuit que la seconde branche du troisième moyen doit être déclarée irrecevable.

97      S’agissant de l’examen des arguments de la requérante au soutien du caractère non économique de l’ILS de catégorie III, il y a lieu de rappeler que constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné (arrêt du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris/Commission, C‑82/01 P, EU:C:2002:617, point 79), cette dernière s’opposant à celles qui relèvent de l’exercice de prérogatives de puissance publique.

98      Il convient donc, en l’espèce, de déterminer si l’activité en cause se rattache, par sa nature, par son objet et par les règles auxquelles elle est soumise, à l’exercice de prérogatives qui sont typiques de prérogatives de puissance publique (voir, en ce sens, arrêt du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, C‑364/92, EU:C:1994:7, point 30).

99      À cet égard, constituent typiquement des activités relevant de la puissance publique les activités de contrôle et de police de l’espace aérien (voir, en ce sens, arrêts du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, C‑364/92, EU:C:1994:7, point 30, et du 26 mars 2009, SELEX Sistemi Integrati/Commission, C‑113/07 P, EU:C:2009:191, point 71).

100    Il convient de rappeler que l’ILS de catégorie III est, ainsi que l’a défini la Commission sans être contredite par la requérante, un instrument d’approche au sol qui utilise le signal radio pour accroître la précision de l’atterrissage d’un avion approchant d’une piste d’atterrissage, permettant ainsi un atterrissage sans risque dans des conditions météorologiques défavorables.

101    Ainsi qu’il ressort des réponses de la requérante et de la Sowaer, en soutien à la requérante à l’audience, en réponse à une question du Tribunal ainsi que des éléments du dossier, il s’agit d’un instrument utile à la navigation aérienne dans la phase d’atterrissage, voire nécessaire ou indispensable pour certains aéroports compte tenu de la nature de leur trafic, bien qu’il ne soit pas obligatoire au titre des normes belges ou internationales de sécurité applicables dans le secteur de la navigation aérienne. Un aéroport non équipé d’un tel équipement peut voir les compagnies aériennes réticentes à le desservir régulièrement en raison des difficultés d’atterrissage qui peuvent survenir en cas de conditions météorologiques défavorables.

102    Néanmoins, cet instrument, même s’il était obligatoire et même s’il n’est pas contestable qu’il contribue, comme d’autres systèmes, à la sécurité des atterrissages, ne contribue ni au contrôle et à la police de l’espace aérien, comme l’ont admis à l’audience la requérante et l’intervenante à son soutien, ni à aucune autre prérogative de puissance publique susceptible d’être exercée dans un aéroport. Il contribue à la délivrance des prestations qu’un aéroport civil offre, dans un contexte concurrentiel, aux compagnies aériennes dans le cadre de son activité générale qui est une activité de nature économique (voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris/Commission, C‑82/01 P, EU:C:2002:617, point 78).

103    Ensuite, il convient d’observer que la requérante n’a pas contesté l’argument de la Commission selon lequel l’absence d’un tel équipement a uniquement pour effet que, dans certaines conditions météorologiques, les compagnies aériennes fréquentant un aéroport annulent leurs vols ou les redirigent vers d’autres aéroports possédant un tel équipement. Ainsi, un aéroport n’étant pas équipé d’un ILS de catégorie III se trouve dans une situation concurrentielle moins favorable par rapport à un aéroport ayant installé un tel équipement, sans que cette constatation permette de faire échapper ledit équipement à sa qualification d’activité de nature économique.

104    L’argument de la requérante selon lequel le Royaume de Belgique a, dans le cadre de la procédure administrative précédant la décision attaquée, déclaré qu’il considérait le système ILS de catégorie III comme un « élément indispensable afin de pouvoir accueillir des compagnies aériennes avec des avions basés et des lignes régulières » ne saurait modifier cette appréciation.

105    En effet, une activité relative à l’accueil de compagnies aériennes avec « des avions basés et des lignes régulières » ne saurait impliquer qu’une telle activité relève de l’exercice de prérogatives de puissance publique.

106    Il s’ensuit que la requérante ne saurait, à bon droit, invoquer une prétendue exigence relative à la navigation aérienne nécessitant l’ILS de catégorie III pour que cet équipement relève de l’exercice de prérogatives de puissance publique et, partant, échappe à la qualification de système de nature économique.

107    Cette conclusion n’est nullement remise en question par les autres arguments invoqués par la requérante.

108    Le fait que, selon la requérante, Belgocontrol considère l’ILS de catégorie III comme étant un équipement d’aide à la navigation et qu’Eurocontrol le définit comme étant l’un des trois systèmes d’atterrissage permettant une capacité d’approche précise en termes de navigation n’implique pas que cet équipement participe de prérogatives de puissance publique, eu égard aux constatations effectuées au point 102 ci-dessus.

109    La référence au point 14 de l’annexe I du règlement no 965/2012, selon lequel une « opération d’approche de catégorie III est exécutée à l’aide d’un ILS » ne concerne qu’une définition aux fins des exigences techniques prescrites dans ledit règlement. Il en est de même en ce qui concerne la référence contenue dans la sous-partie E de l’annexe du règlement no 859/2008, qui remplace l’annexe III du règlement (CEE) no 3922/91 du Conseil, du 16 décembre 1991, relatif à l’harmonisation de règles techniques et de procédures administratives dans le domaine de l’aviation civile (JO 1991, L 373, p. 4).

110    Enfin, s’il est vrai que l’exploitant d’un aéroport doit veiller à ce que des moyens et des procédures soient établis et mis en œuvre en vue de garantir des conditions de sécurité pour l’« exploitation de l’aérodrome par faible visibilité » [annexe IV du règlement no 139/2014, partie ADR.OPS.B.045, « Exploitation par faible visibilité », sous a)], il n’en ressort pas pour autant que l’installation d’un ILS de catégorie III contribue à l’exercice de prérogatives de puissance publique, eu égard aux constatations effectuées au point 102 ci-dessus.

111    La requérante fait encore valoir que, en tant qu’équipement pour la navigation aérienne, l’ILS de catégorie III ne présente pas de caractère économique, étant donné que, selon le considérant 5 du règlement no 550/2004, « [l]a fourniture de services de navigation aérienne, envisagée dans le […] règlement, se rattache à l’exercice de prérogatives de puissance publique, qui ne présentent pas un caractère économique justifiant l’application des règles de concurrence du traité ».

112    À cet égard, il y a lieu de relever que le règlement no 550/2004 s’inscrit dans le contexte des dispositions du règlement (CE) no 549/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 10 mars 2004, fixant le cadre pour la réalisation du ciel unique européen (JO 2004, L 96, p. 1), dont l’article 2 définit différentes notions. Il ressort de l’article 2, point 4, du règlement no 549/2004 que les « services de navigation aérienne » comprennent « les services de la circulation aérienne, les services de communication, de navigation et de surveillance, les services météorologiques destinés à la navigation aérienne et les services d’information aéronautique ». L’article 2, point 30, du règlement no 549/2004 définit les « services de navigation » comme « les installations et les services qui fournissent aux aéronefs des informations relatives au positionnement et au temps ». Ces services de navigation se distinguent ainsi des « services de la circulation aérienne », définis à l’article 2, point 11, du règlement no 549/2004, qui comprennent, notamment, le « service du contrôle de la navigation aérienne », défini lui-même à l’article 2, point 1, de ce même règlement comme visant à empêcher les collisions entre aéronefs ainsi qu’à accélérer et à régulariser la circulation aérienne. Tant les « services de navigation » que les « services de circulation aérienne » sont, ainsi que précédemment indiqué, inclus dans les « services de navigation aérienne ». Un équipement comme l’ILS de catégorie III, qui donne aux aéronefs des informations de positionnement par rapport à la piste pour leur atterrissage, relève clairement des services de navigation, au sens susvisé.

113    Or, si le considérant 5 du règlement no 550/2004, invoqué par la requérante, semble indiquer que les « services de navigation aérienne » relèvent de l’exercice de la puissance publique, le considérant 13 du même règlement, plus spécifique, indique explicitement que les « services de navigation », comme certains autres services de navigation aérienne, doivent être organisés aux conditions du marché, tout en tenant compte des caractéristiques particulières de ces services et en maintenant un niveau élevé de sécurité. Il ressort en effet de différentes dispositions dudit règlement que la désignation des prestataires de services de la circulation aérienne ou des prestataires de services météorologiques peut s’opérer en dehors des principes du marché, mais aucune disposition de même nature ne s’applique aux services de navigation. Par conséquent, en dépit de son caractère généralisant, le considérant invoqué par la requérante ne débouche sur aucune disposition concrète qui pourrait conduire à estimer que l’ILS de catégorie III, équipement des services de navigation, relève de l’exercice de la puissance publique et non d’une activité économique s’exerçant aux conditions du marché.

114    Au demeurant, il est de jurisprudence constante que les considérants d’un acte de l’Union n’ont pas de valeur juridique contraignante et ne sauraient être utilement invoqués pour déroger aux dispositions mêmes de l’acte concerné (voir arrêt du 2 avril 2009, Tyson Parketthandel, C‑134/08, EU:C:2009:229, point 16 et jurisprudence citée) ou, a fortiori, aux règles fixées dans le traité FUE, comme aux articles 107 et 108 TFUE concernant les aides accordées par les États, notamment en limitant leur champ d’application par rapport à ce qui résulte de l’interprétation par le juge de l’Union de leur libellé et de leur finalité.

115    Enfin, la requérante se réfère au paragraphe 35 des lignes directrices, duquel il ressort que, « [d]ans un aéroport, des activités telles que le contrôle aérien, la police, les douanes, la lutte contre les incendies, les mesures destinées à protéger l’aviation civile contre les actes d’intervention illicite et les investissements dans les infrastructures et les équipements nécessaires à ses activités sont considérées, en règle générale, comme ne présentant pas un caractère économique ».

116    Toutefois, outre que le paragraphe 35 des lignes directrices ne se réfère pas aux équipements ou installations d’approche au sol, la requérante n’a pas contredit l’observation de la Commission selon laquelle ce n’est pas parce qu’un équipement renforce la sécurité qu’il doit nécessairement être qualifié de non économique.

117    Il s’ensuit que la Commission, en qualifiant l’ILS de catégorie III de système de nature économique, n’a pas commis l’erreur d’appréciation invoquée par la requérante.

118    Enfin, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Commission n’aurait pas suffisamment motivé les raisons pour lesquelles le système ILS de catégorie III serait de nature économique, il doit être également rejeté.

119    En effet, force est de constater que, outre que le considérant 367 de la décision attaquée fait clairement apparaître que, selon la Commission, « assurer la sécurité du trafic au sol (y compris les atterrissages et décollages) fait partie intégrante de l’exploitation commerciale de l’aéroport et est donc de nature économique », l’exposé même du troisième moyen par la requérante confirme, à suffisance, que celle-ci a parfaitement compris les raisons pour lesquelles la Commission avait considéré que l’ILS de catégorie III devait être considéré comme étant de nature économique. Le considérant 367 de la décision attaquée a donc permis à la requérante de connaître les justifications de la décision attaquée et au Tribunal d’exercer son contrôle sur celles-ci (voir, en ce sens, arrêt du 13 janvier 2004, Thermenhotel Stoiser Franz e.a./Commission, T‑158/99, EU:T:2004:2, point 94).

120    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté.

 Sur le quatrième moyen, tiré de l’erreur de fait et de l’erreur manifeste d’appréciation commises par la Commission dans la prise en compte du pourcentage de 7 % correspondant à l’utilisation non économique du coût des investissements réalisés pour la nouvelle aérogare ainsi que du défaut de motivation dans la prise en compte de ce pourcentage

121    Par le quatrième moyen, la requérante fait grief à la Commission, d’une part, d’avoir commis une erreur de fait et une erreur manifeste d’appréciation dans la prise en compte du pourcentage correspondant à l’utilisation non économique du coût des investissements réalisés pour la nouvelle aérogare et, d’autre part, d’un défaut de motivation dans la prise en compte de ce pourcentage.

122    La requérante reproche, en substance, à la Commission, s’agissant du nouveau terminal de l’aéroport, d’avoir utilisé une mauvaise clef de répartition pour distinguer les activités non économiques des activités économiques. Elle fait ainsi valoir qu’il ressort de sa note communiquée à la Commission le 8 avril 2014 que la répartition est de 14,9 % pour les locaux dont l’utilisation a une nature non économique et de 85,1 % pour les locaux dont l’utilisation revêt une nature économique.

123    La Commission conclut au rejet de ce moyen.

124    Il y a lieu de rappeler que la Commission a considéré, au considérant 366 de la décision attaquée, ce qui suit :

« La Commission considère également comme non économiques les coûts liés aux investissements et à l’entretien des bâtiments et équipements utilisés à la fois pour des activités économiques et non économiques dans une proportion correspondant à leur utilisation pour une activité non économique. En particulier, 7 % du coût des investissements réalisés pour la nouvelle aérogare peuvent être considérés comme de nature non économique, car 7 % de la surface de l’aérogare est occupée par les services de police, de douane, des agents en charge de la fouille des passagers et bagages, ainsi que des agents du Service Public de la Wallonie en charge de la sécurité du site. »

125    À titre liminaire, il convient de rappeler que, s’agissant du domaine des aides d’État, si la Commission jouit d’un large pouvoir d’appréciation dont l’exercice implique des évaluations d’ordre économique qui doivent être effectuées dans le contexte de l’Union européenne, cela n’implique pas que le juge de l’Union doit s’abstenir de contrôler l’interprétation effectuée par la Commission de données de nature économique (arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 64).

126    En effet, selon la jurisprudence de la Cour, le juge de l’Union doit notamment vérifier non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 65 ; voir également, par analogie, arrêt du 15 février 2005, Commission/Tetra Laval, C‑12/03 P, EU:C:2005:87, point 39).

127    Toutefois, il n’appartient pas au juge de l’Union, dans le cadre de ce contrôle, de substituer son appréciation économique à celle de la Commission. En effet, le contrôle que les juridictions de l’Union exercent sur les appréciations économiques complexes faites par la Commission est un contrôle restreint qui se limite nécessairement à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 66 et jurisprudence citée). À cet égard, lorsqu’il y a lieu, pour la Commission, afin de vérifier si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’appliquer le critère de l’investisseur privé, l’usage de ce critère implique, en général, de la part de la Commission une appréciation économique complexe (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 68).

128    C’est au regard de ces critères relatifs à l’étendue du niveau de contrôle reconnu au juge de l’Union par la jurisprudence qu’il convient d’examiner les quatrième à septième moyens du recours.

129    Il convient, d’ores et déjà, de constater que la requérante n’a pas contredit la déclaration formulée par la Commission dans le mémoire en défense selon laquelle le Royaume de Belgique l’avait, à trois reprises (par lettres des 24 février, 21 mars et 4 avril 2014), informée que le coût des investissements non économiques du nouveau terminal s’élevait à 7 % du coût total de l’investissement réalisé.

130    Dans sa note du 8 avril 2014 communiquée à la Commission, expliquant que 14,9 % des surfaces du nouveau terminal avaient une vocation non économique, la requérante a ajouté aux locaux occupés exclusivement par la police fédérale et d’autres services exerçant des missions d’autorité publique ou de sécurité, qu’elle a qualifiés de locaux à vocation de « mission de service public » et qui représentaient 7 % des surfaces du terminal, 7 % des surfaces occupées par les installations techniques, comme celles consacrées au chauffage, 7 % des surfaces de circulation courantes, comme celles correspondant à des escaliers et à des couloirs, qu’elle a qualifiées de locaux « communs aéroport », et 100 % des surfaces dans lesquelles s’exerçaient à l’égard du public ou des marchandises les missions d’autorité publique ou de sécurité mentionnées précédemment, comme celles consacrées au contrôle des passeports, qu’elle a qualifiées de locaux « communs publics ».

131    À cet égard, il convient de constater que, si, ainsi que l’a indiqué la requérante en réponse à une question du Tribunal lors de l’audience, les passagers empruntent les couloirs aux fins de l’exercice de contrôles douaniers, notamment, en revanche, l’exercice de la puissance publique ne s’exerce nullement dans ces couloirs, mais seulement dans les locaux spécialement affectés à ces contrôles. En outre, des lieux de passage ainsi que des cafétérias ne sauraient, ainsi que l’a indiqué à juste titre la Commission lors de l’audience, être considérés comme des locaux dans lesquels s’exercent des prérogatives de puissance publique.

132    Ainsi, la raison pour laquelle la méthodologie que la requérante a suivie pour déterminer une clef de répartition serait plus appropriée que celle qui a été donnée à trois reprises (par lettres des 24 février, 21 mars et 4 avril 2014) par le Royaume de Belgique et qui a été acceptée par la Commission ne ressort pas de l’examen des circonstances de l’espèce.

133    Il convient, sur ce point, de relever que, contrairement à ce qu’a soutenu la requérante lors de l’audience, la répartition de 7 % pour les locaux dont l’utilisation a une nature non économique n’est pas une estimation vague ou fantaisiste du gouvernement belge, puisque, ainsi qu’il résulte de la réponse du gouvernement belge aux questions de la Commission du 11 mars 2014, « les plans […] ont servi de base à ce calcul ».

134    Lors de l’audience, la requérante a encore soutenu que l’aéroport de Charleroi était un aéroport en constante évolution, contrairement aux grands aéroports tels que Paris-Charles-de-Gaulle (France) ou Londres-Heathrow (Royaume-Uni), dont le nombre de passagers aurait été constant depuis 20 ans, en sorte que la proportion des locaux à usage non économique évoluait à l’aéroport de Charleroi.

135    Toutefois, à supposer même que cette affirmation soit avérée, force est de constater que la requérante n’a pas été en mesure de faire état d’une évolution de l’aéroport de Charleroi entre les trois lettres du gouvernement belge des 24 février, 21 mars et 4 avril 2014 et sa propre note du 8 avril 2014, soit quatre jours après la dernière lettre dudit gouvernement.

136    Dans ces circonstances, il y a lieu de constater que la Commission ne peut être regardée comme ayant commis une erreur de fait ou une erreur manifeste d’appréciation en estimant, sur la base des propres données qui lui ont été fournies par le Royaume de Belgique, que 7 % de la surface totale de l’aéroport était consacrée aux activités de nature non économique et en ne se référant pas à la note du 8 avril 2014 dans la décision attaquée.

137    Enfin, s’agissant du prétendu défaut de motivation de la décision attaquée sur ce point, il convient de relever que le considérant 366 de la décision attaquée fait clairement apparaître la clef de répartition utilisée par la Commission, qui, ainsi qu’il a été constaté précédemment, a été fournie à trois reprises par le gouvernement belge. Par ailleurs, même si, au considérant 366 de la décision attaquée, la Commission n’a pas mentionné la note de la requérante du 8 avril 2014, il convient de constater, d’une part, qu’il résulte du considérant 22 de la décision attaquée que cette dernière vise expressément la note des autorités belges du 5 mai 2014, qui précise que « le pourcentage des surfaces affectées aux services publics non économiques par rapport aux locaux affectés à des activités économiques s’élève à 14,9 % », et, d’autre part, que la Commission a clairement motivé les raisons pour lesquelles les données fournies par le Royaume de Belgique à trois reprises (par lettres des 24 février, 21 mars et 4 avril 2014) devaient être entérinées, ce qui a nécessairement permis à la requérante de comprendre les raisons pour lesquelles ses propres données ne pouvaient être entérinées et au Tribunal d’exercer son contrôle. En effet, en indiquant que « 7 % du coût des investissements réalisés pour la nouvelle aérogare peuvent être considérés comme de nature non économique, car 7 % de la surface de l’aérogare est occupée par les services de police, de douane, des agents en charge de la fouille des passagers et bagages, ainsi que des agents du Service Public de la Wallonie en charge de la sécurité du site », la Commission a, en substance, précisé que seuls les coûts intrinsèquement et nécessairement liés à de tels services étaient de nature non économique, ce que la requérante a, au demeurant, parfaitement compris, ainsi qu’il résulte des arguments qu’elle a avancés au soutien de ce moyen.

138    Partant, il convient de rejeter le quatrième moyen.

 Sur le cinquième moyen, tiré de l’erreur de droit, des erreurs de fait, des erreurs manifestes d’appréciation et du défaut de motivation commis par la Commission dans la détermination des valeurs actualisées nettes des mesures de 2002 et de 2003 entraînant une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE

139    Par son cinquième moyen, la requérante conteste, en substance, l’appréciation du critère de l’investisseur privé en économie de marché faite par la Commission. Selon elle, tant la méthode que certains facteurs de calcul utilisés par la Commission sont erronés. Ce moyen se décompose en sept branches.

140    Avant d’examiner les différentes branches du cinquième moyen, il y a lieu de répondre, à titre liminaire, au grief de la requérante selon lequel l’étude de 2001, intitulée « Risk Premiums for Other Markets » (Primes de risque pour d’autres marchés), n’était pas accessible à l’adresse Internet mentionnée par la Commission.

141    À cet égard, il suffit de constater que, outre que cette étude était mentionnée dans la note en bas de page insérée sous le considérant 437 de la décision attaquée, en tout état de cause, la circonstance selon laquelle l’adresse Internet correspondante mentionnée par la Commission n’était pas accessible n’est pas de nature à faire regarder, en l’espèce, la décision attaquée comme insuffisamment motivée sur ce point.

–       Sur la première branche, portant sur le calcul des coûts des investissements restant à effectuer le 15 avril 2002

142    Au considérant 431 de la décision attaquée, figure le tableau 13, intitulé « Coût des investissements à effectuer au 15 avril 2012 (millions d’euros) ». Ce tableau contient les lignes suivantes :


2002

2003

2004

2002-2004

Rénovation locaux techniques et administratifs

1,55

0,00

0,00

1,78

Extension station kérosène

0,27

0,00

0,00

0,62

Parking cimetière

0,030

0,00

0,00

0,05


143    La requérante soutient que la dernière colonne du tableau mentionné au point 142 ci-dessus contient des erreurs.

144    Dans le mémoire en défense, la Commission a reconnu que certaines données chiffrées contenues dans ce tableau étaient erronées. Elle affirme, cependant, que, à l’exception des erreurs mentionnées par la requérante, les montants reportés année par année ainsi que les totaux du tableau 13 sont corrects. La valeur actualisée nette de la mesure de 2002 a été calculée sur le fondement du tableau 14, intitulé « Coût des investissements pour des activités de nature économique pris en compte par la Commission pour le calcul de la valeur actualisée nette de la mesure de 2002 », dans lequel figurent les données chiffrées correctes. Dès lors, selon la Commission, les inexactitudes relevées dans le tableau 13 n’ont eu aucun effet sur le total des investissements repris au tableau 13 et, donc, sur le calcul de la valeur actualisée.

145    Dans son corrigendum, la Commission a procédé à la rectification des données chiffrées concernées (1,78 > 1,55, 0,62 > 0,27 et 0,05 > 0,03).

146    Bien que de telles erreurs soient regrettables, force est de constater que la requérante ne conteste pas que les erreurs concernées n’ont eu aucun effet sur le calcul de la valeur actualisée nette de la mesure de 2002, selon la méthode et les valeurs utilisées par la Commission. Interrogée sur ce point lors de l’audience par le Tribunal, la requérante n’a pas été en mesure d’indiquer l’influence que ces erreurs auraient eu sur le calcul de la valeur actualisée nette de la mesure de 2002.

147    Il s’ensuit que la première branche du cinquième moyen est inopérante et doit en conséquence être écartée.

–       Sur la deuxième branche, relative à la méthode de calcul des valeurs actualisées nettes

148    Selon la requérante, la Commission a commis des erreurs dans le calcul de la valeur actualisée nette des flux de trésorerie au taux d’actualisation de 9 % et de la valeur actualisée nette de la mesure de 2002.

149    Alors que, pour la mesure de 2002, la Commission, au considérant 438 de la décision attaquée, est parvenue à une valeur actualisée nette des flux de trésorerie au taux d’actualisation de 9 % de – 76,48 millions d’euros et à une valeur actualisée nette de la mesure de 2002 de – 75 millions d’euros, les experts mandatés par la requérante sont parvenus à une valeur actualisée nette des flux de trésorerie au même taux d’actualisation de [confidentiel] (1) millions d’euros et à une valeur actualisée nette de ladite mesure de [confidentiel] millions d’euros.

150    Dans le mémoire en défense, la Commission a reconnu que le montant de – 83,70 millions d’euros était correct et que la valeur actualisée nette s’élevait à la somme de [confidentiel] millions d’euros. La différence entre les montants de [confidentiel] millions d’euros et de [confidentiel] millions d’euros était le résultat de deux erreurs factuelles que la requérante n’avait pas contestées.

151    Il convient de rappeler que, aux considérants 437 à 439 de la décision attaquée, la Commission a fait les constatations suivantes :

« (437) Ainsi qu’expliqué au considérant 424, afin de déterminer le taux d’actualisation, la Commission a estimé le coût pondéré moyen du capital pour la Sowaer au moment de l’octroi de la mesure. Cette estimation a été faite à partir des données et hypothèses suivantes :

–        un ratio dette/fonds propres de 30 % de la Sowaer et donc une part de la dette dans le financement (rD) de 23 % ;

–        un coût avant impôts de la dette (kD) égal au coût avant impôt pondéré moyen de la dette de la Sowaer en 2002, soit entre 4,9 % et 5,5 % ;

–        une prime de risque (Δk) de 5,51 % ;

–        un beta entre 0,91 et 1,23 ;

–        pour ce qui concerne le coût des fonds propres, un coût avant impôt du capital placé sans risque (rf) entre 5,16 % et 5,37 % ;

–        un taux d’imposition de (t) de 40,2 %.

Sur le fondement de ces données et hypothèses, la Commission est capable de calculer le coût moyen pondéré du capital (C), selon la formule classique suivante :

C = (1 – rD) * kE + rD * kD

Où le coût du capital (kE) est donné par le modèle d’évaluation des actifs financiers (MEDAF) selon la formule :

kE = rf + β * Δk

Sur la base de cette formule et des hypothèses précédentes, la Commission estime qu’un taux d’actualisation de 9 % constitue un taux raisonnable.

[…]

(438)            Les flux de trésorerie nets indiqués dans le tableau 19 actualisés au taux de 9 % représentent une valeur actualisée nette de – 83,7 millions d’EUR.

(439)            Pour le calcul de la valeur actualisée nette sur la durée totale de la concession, il convient d’attribuer une valeur terminale au projet en 2015. Cela est fait en supposant à partir de 2015 un flux de trésorerie égal à celui de la moyenne 2013-2015 augmentant de 2 % par an. Dans la mesure où il est supposé que le plafonnement pour la part variable de la redevance de concession est supprimé à partir de 2016, les valeurs à considérer sont les flux de trésorerie en l’absence de plafonnement en 2013-2015. Sur le fondement de ces hypothèses, la Commission a calculé que la valeur terminale du projet en 2015 pouvait être estimée à 8,07 millions d’EUR. »

152    Il est constant que, par son corrigendum, la Commission a remplacé, au considérant 438 de la décision attaquée, « – 76,48 » par « – 83,7 », au considérant 439 de ladite décision, « 1,48 » par « 8,07 » et, au considérant 440 de cette décision, « 75 » par « 75,63 ».

153    Nonobstant les erreurs commises, force est de constater que la requérante ne conteste pas l’affirmation de la Commission selon laquelle les données chiffrées corrigées étaient moins favorables à la requérante que celles qui figuraient dans la décision attaquée et que la requérante n’avait pas non plus contesté l’observation de la Commission selon laquelle les flux de trésorerie nets positifs prévus pour les années 2007 à 2009 étaient manifestement insuffisants pour contrecarrer les flux négatifs des autres années, et en particulier les investissements des années 2002 et 2003, ce qui avait conduit la Commission à conclure qu’aucun investisseur privé n’aurait procédé aux investissements en cause.

154    Ensuite, la requérante fait valoir que ses propres consultants avaient obtenu des valeurs significativement différentes de celles de la Commission en tentant de reproduire la même formule et avaient proposé des formules de remplacement généralement utilisées par le secteur financier, ce qui démontrerait que l’analyse de la Commission était critiquable.

155    À cet égard, le simple fait que le consultant de la requérante soit parvenu à des résultats différents avec la même formule ou avec une formule différente ne suffit pas pour considérer que la formule utilisée pour calculer le coût moyen pondéré du capital pour la Sowaer au moment de l’octroi de la mesure choisie par la Commission soit manifestement erronée (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 72).

156    L’argument de la requérante selon lequel les données fournies par la Commission concernant la formule manqueraient de précision est inopérant, dès lors que la Commission a reconnu que les calculs du consultant de la requérante étaient corrects.

157    La requérante reproche également à la Commission de n’avoir pas ou de manière très insuffisante motivé le choix de la formule pour calculer le coût moyen pondéré du capital pour la Sowaer au moment de l’octroi de la mesure, des facteurs et des valeurs utilisées et de ne pas avoir étayé les données en cause par des rapports de consultants ou d’experts indépendants.

158    À cet égard, il convient d’observer qu’il ne ressort ni du règlement de base, à savoir le règlement no 659/1999, ni de la jurisprudence citée par la requérante que la Commission aurait l’obligation de consulter des experts indépendants pour déterminer la méthode à suivre ou pour contrôler ses calculs et les faire valider (voir, en ce sens, arrêts du 25 juin 1998, British Airways e.a./Commission, T‑371/94 et T‑394/94, EU:T:1998:140, point 72 ; du 16 mars 2000, Astilleros Zamacona/Commission, T‑72/98, EU:T:2000:79, point 55, et du 16 mars 2016, Frucona Košice/Commission, T‑103/14, EU:T:2016:152, point 177).

159    S’agissant du grief selon lequel la décision attaquée serait insuffisamment motivée, il convient de relever que la formule pour le calcul de la valeur actualisée nette de la mesure de 2002 et les données utilisées ont été reprises au considérant 437 de la décision attaquée et que, sur la base de cette information, le consultant de la requérante a été en mesure de constater les erreurs commises par la Commission dans l’application de cette formule, lesquelles ont par la suite été corrigées dans le sens indiqué par la requérante. Il s’ensuit que cette dernière ne saurait se plaindre d’un défaut de motivation de la décision attaquée.

160    Bien que les erreurs commises par la Commission aux considérants 438 à 440 de la décision attaquée soient regrettables et aient compliqué la préparation de la défense de la requérante et le contrôle par le Tribunal de la décision attaquée, force est néanmoins de constater qu’il n’apparaît pas que les données chiffrées corrigées seraient de nature à invalider la conclusion de la Commission selon laquelle, en l’espèce, le critère de l’opérateur privé n’avait pas été respecté.

161    Par ailleurs, dans la mesure où la requérante indique qu’elle a également procédé à l’application de la même formule que la Commission, mais avec différentes valeurs de paramètres, cet élément sera examiné concrètement dans le cadre de l’examen des branches suivantes du présent moyen, qui mettent précisément en cause les valeurs de ces paramètres retenues par la Commission.

162    Partant, la deuxième branche du cinquième moyen doit être rejetée.

–       Sur la troisième branche, relative au facteur beta

163    La requérante fait grief à la Commission d’avoir commis une erreur de fait et une erreur manifeste d’appréciation, en ce que la définition du facteur beta serait erronée. Selon elle, le facteur beta mesure non pas la « rentabilité relative d’un actif par rapport au marché », mais la « volatilité relative d’un actif par rapport au marché ». Elle ajoute que les valeurs de beta ne correspondent pas aux valeurs identifiées par son propre consultant. Selon la requérante, ces approximations et ces inexactitudes ont eu un impact sur le calcul de la valeur actualisée nette des mesures de 2002 et de 2003, le facteur beta étant intégré au calcul du coût du capital.

164    À cet égard, il suffit de relever que, à supposer même que la définition du facteur beta par la Commission ne soit pas exacte, il n’apparaît pas que cette erreur ait impacté les calculs du coût du capital et, partant, ait pu influer sur la conclusion de la Commission selon laquelle un investisseur privé en économie de marché n’aurait pas procédé aux investissements en cause. En outre, le simple fait que le consultant de la requérante ait identifié d’autres valeurs pour le facteur beta ne suffit pas pour établir une erreur manifeste d’appréciation par la Commission dans le choix dudit facteur.

165    L’argument de la requérante selon lequel elle n’aurait pas été en mesure de vérifier l’exactitude des données et la définition du facteur beta reprise par la Commission doit être rejeté, dès lors qu’il est constant qu’il ressort de pièces du dossier que la requérante a été en mesure de procéder à leur vérification et d’invoquer une erreur qui aurait été commise sur le fondement des tableaux communiqués dans le cadre de la procédure administrative.

166    Il résulte de ce qui précède que la troisième branche du cinquième moyen doit être rejetée.

–       Sur la quatrième branche, portant sur le taux d’imposition utilisé pour le calcul de la valeur actualisée nette de la mesure de 2003

167    Selon la requérante, la Commission a commis, d’une part, une erreur de fait en prenant pour référence un taux d’imposition de 40,2 % afin d’apprécier la valeur actualisée nette de la mesure de 2003, alors même que ce taux a été abaissé à 33,99 % à compter du 1er janvier 2003, et, d’autre part, une erreur manifeste d’appréciation en fondant son calcul sur cette valeur erronée.

168    Au stade du mémoire en défense, la Commission a reconnu que le taux d’imposition de 40,2 % pour l’année 2003 était erroné, en sorte que la fourchette du facteur beta pour cette année se situait entre 0,91 et 1,25 au lieu de 0,91 et 1,23.

169    Force est de constater que cette branche ne peut être que rejetée, dès lors que, en l’espèce, il n’apparaît pas que l’erreur sur le taux d’imposition pour l’année 2003 ait pu influer sur la conclusion de la Commission selon laquelle un investisseur privé en économie de marché n’aurait pas procédé aux investissements en cause.

–       Sur la cinquième branche, portant sur l’estimation du coût avant impôt du capital sans risque utilisée pour le calcul de la valeur actualisée nette

170    Selon la requérante, pour déterminer la valeur actualisée nette de 2002, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en se référant au taux d’intérêt sur les obligations belges à dix ans pour estimer le coût avant impôt du capital placé sans risque. En effet, selon elle, la Sowaer aurait tout aussi pu se référer au taux d’intérêt sur les obligations allemandes à dix ans lors de la conclusion de 2002. En outre, dans le cadre de la mesure de 2003, la Commission n’aurait pas pris en compte le taux pertinent d’avril 2003, mais un taux correspondant à avril 2002.

171    À cet égard, il convient de constater que la requérante n’indique pas dans quelle mesure la référence au taux d’intérêt des obligations allemandes à dix ans aurait pu changer la conclusion de la Commission selon laquelle un investisseur privé en économie de marché n’aurait pas procédé aux investissements en cause, c’est-à-dire dans quelle mesure le changement de référence aurait pu aboutir à une valeur actualisée nette positive. En effet, elle n’a pas indiqué quel aurait été le niveau de la valeur actualisée nette dans cette hypothèse par rapport aux chiffres de – 83,7 millions d’euros figurant au considérant 438 de la décision attaquée ou de – 75,63 millions d’euros après calcul sur la durée totale de la concession (jusqu’en 2040) figurant au considérant 440 de ladite décision.

172    Enfin, contrairement à ce que prétend la requérante, la Commission a estimé le coût avant impôt du capital placé sans risque sur la base du taux d’intérêt pour les obligations belges à dix ans en avril 2003.

173    Dans la réplique, la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir pris en compte la déductibilité des amortissements des investissements et des intérêts, alors que l’impact de ces avantages fiscaux sur le bénéfice des entreprises et la rentabilité des investissements est essentiel.

174    À cet égard, il suffit de relever que, par ce raisonnement, la requérante invoque en réalité un moyen nouveau qui n’est ni explicitement ni même implicitement soulevé dans la requête, en sorte qu’il doit être déclaré comme étant irrecevable.

175    À titre surabondant, force est de constater que la requérante n’a pas contesté les arguments de la Commission selon lesquels la méthode de remplacement proposée afin de tenir compte des aspects fiscaux n’était pas appropriée dans un contexte de pertes nettes structurelles et celle-ci ne lui serait pas plus favorable que la méthode utilisée par la Commission.

176    Il résulte de ce qui précède que la cinquième branche du cinquième moyen doit être rejetée.

–       Sur la sixième branche, portant sur l’estimation du ratio dettes sur fonds propres et de la part de la dette dans le financement utilisée pour le calcul de valeur actualisée nette

177    Selon la requérante, la Commission a commis des erreurs en évaluant le ratio dettes sur fonds propres de la Sowaer à 30 %, sur la base d’une analyse ex post fondée sur le bilan de 2002. En effectuant une analyse ex post, la Commission n’aurait pas respecté le principe selon lequel l’appréciation du respect du critère de l’investisseur privé en économie de marché doit s’effectuer ex ante. Ensuite, le consultant de la requérante serait parvenu à des données chiffrées différentes. Enfin, la requérante souligne que la Sowaer n’est ni une compagnie aérienne ni un aéroport et que la Commission a procédé à tort à une comparaison avec le ratio dettes sur fonds propres des compagnies aériennes.

178    S’agissant de la critique selon laquelle elle aurait procédé à une analyse ex post, la Commission a expliqué, sans être contredite par la requérante, que le bilan de l’année 2001 aurait, s’il avait existé, été trop ancien pour donner une bonne indication du ratio cible tel que déterminé au 15 avril 2002, c’est-à-dire dans une perspective ex ante, et que, la Sowaer ayant été constituée le 28 juin 2001, son premier exercice social s’était étalé sur une période de 18 mois correspondant au bilan pour l’année 2002. Il s’ensuit que la requérante ne saurait reprocher à la Commission d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation en effectuant l’analyse sur la base du bilan pour l’année 2002.

179    Le simple fait que le consultant de la requérante soit parvenu à un ratio dettes sur fonds propres différent ne suffit pas pour établir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation. Par ailleurs, dans la duplique, la Commission, sans être contredite par la requérante, a spécifié les différences entre ses propres données chiffrées et celles du consultant de la requérante, lesquelles s’expliquent par le fait que la Commission a exclu de son calcul les dettes non financières, ce qui se justifie pour un investissement de ce type.

180    Enfin, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Sowaer n’appartiendrait pas au secteur de l’aviation, il est inopérant, dans la mesure où la Commission n’a pas utilisé le ratio moyen dettes sur fonds propres des compagnies aériennes pour calculer la valeur actualisée nette des investissements en cause, mais a utilisé le ratio réel dettes sur fonds propres de la Sowaer. L’indication, dans la note en bas de page n° 163 de la décision attaquée, du ratio moyen dettes sur fonds propres des compagnies aériennes n’apparaît que comme un élément de comparaison n’affectant pas le calcul en question.

181    Dans la réplique, la requérante critique la Commission pour avoir choisi la période 2002-2010 pour définir un ratio de dettes sur fonds propres. Selon elle, cette période serait beaucoup trop courte.

182    À cet égard, il suffit de constater que la requérante n’a pas contredit utilement l’argument de la Commission selon lequel ladite période était la seule pour laquelle les données chiffrées étaient disponibles.

183    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la sixième branche du cinquième moyen doit être rejetée.

–       Sur la septième branche, relative à l’estimation de la prime de risque utilisée pour le calcul de la valeur actualisée nette

184    Selon la requérante, l’évaluation de la prime de risque à 5,51 % est erronée. La Commission aurait en effet pris en compte une seule valeur observée sur le marché américain, alors qu’une étude détaillée et publiquement disponible existe pour le marché belge. Partant, les calculs effectués en prenant en considération cette donnée chiffrée ne seraient pas fiables.

185    Ce grief ne saurait prospérer.

186    En effet, sans être contredite par la requérante, la Commission a fait valoir que, malgré des demandes de sa part, la requérante n’a soumis aucune autre estimation au cours de la procédure administrative.

187    Par ailleurs, en ce que la requérante fait grief à la Commission de ne pas avoir motivé la décision attaquée sur ce point, force est de constater que la Commission a indiqué, au considérant 437 de la décision attaquée, le fondement de la prime de risque de 5,51 %, à savoir l’étude mentionnée au point 140 ci-dessus (voir note en bas de page n° 164 de la décision attaquée).

188    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la septième branche du cinquième moyen doit être rejetée ainsi que le cinquième moyen dans sa totalité.

 Sur le sixième moyen, tiré de l’erreur de droit, des erreurs de fait et des erreurs manifestes d’appréciation commises par la Commission dans la détermination des valeurs actualisées nettes des mesures de 2002 et de 2003 et, partant, dans le calcul de la redevance additionnelle payée par la requérante à partir du 4 avril 2014

189    Par son sixième moyen, la requérante critique les conséquences des erreurs de fait, de l’erreur de droit et des erreurs manifestes d’appréciation commises par la Commission dans la détermination des valeurs actualisées nettes des mesures de 2002 et de 2003 pour le calcul de la redevance additionnelle à payer par elle à la Sowaer à partir du 4 avril 2014. Étant donné que, selon la décision attaquée, la différence entre la redevance conforme aux prix de marché et la redevance à payer par la requérante constitue une aide à récupérer, les erreurs constatées ont une influence significative sur le montant de l’aide à récupérer.

190    À cet égard, il suffit de constater que ce moyen est uniquement fondé sur la prémisse selon laquelle le cinquième moyen serait fondé.

191    Étant donné que le cinquième moyen a été rejeté, il en est de même du sixième moyen.

 Sur le septième moyen, tiré du défaut de motivation et de l’erreur de droit commis par la Commission dans la détermination du montant de la redevance additionnelle à payer à partir du 1er janvier 2016

192    Par son septième moyen, la requérante fait grief à la Commission de ne pas avoir fourni de réponse à sa demande d’éclaircissements en date du 17 novembre 2014 concernant le calcul du montant de la redevance additionnelle qu’elle devait verser de façon à respecter les prix du marché à partir du 1er janvier 2016. Selon elle, il est primordial et légitime de connaître avec précision le montant des aides réclamées, ce qui se traduirait par la détermination exacte de la redevance de concession additionnelle. A fortiori, le Royaume de Belgique, destinataire de la décision attaquée, ne pourrait pas non plus être investi du pouvoir de déterminer, de manière discrétionnaire, le montant d’une aide qui a été déclarée incompatible.

193    À cet égard, il convient de constater que, si, par ce moyen, la requérante entend critiquer l’absence, dans la décision attaquée, du montant exact de l’aide à récupérer, il suffit de rappeler qu’aucune disposition du droit de l’Union n’exige que la Commission, lorsqu’elle ordonne la restitution d’une aide déclarée incompatible avec le marché intérieur, fixe le montant exact de l’aide à restituer. Il suffit que la décision de la Commission comporte des indications permettant à son destinataire de déterminer lui-même, sans difficultés excessives, ce montant. La Commission peut donc valablement se limiter à constater l’obligation de restitution des aides en question et laisser aux autorités nationales le soin de calculer le montant précis des aides à restituer (voir, en ce sens, arrêts du 12 octobre 2000, Espagne/Commission, C‑480/98, EU:C:2000:559, points 25 et 26, et du 28 juillet 2011, Mediaset/Commission, C‑403/10 P, non publié, EU:C:2011:533, points 126 et 127).

194    Par ailleurs, pour autant que la requérante s’interroge sur le niveau du montant de redevance dont elle devrait s’acquitter, force est de constater que la Commission a, au considérant 686 de la décision attaquée, défini la méthode à suivre pour déterminer le montant de l’aide à récupérer.

195    Dès lors, le septième moyen doit être rejeté.

 Sur le huitième moyen, tiré de l’erreur de droit, de l’erreur de fait, de l’erreur manifeste d’appréciation et du défaut de motivation commis par la Commission dans l’examen du marché en cause et des prétendues distorsions de concurrence entre l’aéroport de Charleroi et l’aéroport de Bruxelles-National induites par l’aide

196    Par son huitième moyen, la requérante critique la constatation, figurant au considérant 605 de la décision attaquée, selon laquelle les aides ont provoqué des distorsions de concurrence significatives en affectant la croissance du nombre de passagers de l’aéroport de Bruxelles-National sur le segment des vols « point à point » court et moyen-courrier. En concluant ainsi, la Commission aurait commis une erreur de droit, une erreur manifeste d’appréciation et un défaut de motivation.

197    Ce moyen se décompose en deux branches.

198    Par la première branche, la requérante fait grief à la Commission de n’avoir pas correctement analysé le marché en cause. Tout d’abord, s’agissant de la substituabilité partielle des offres des aéroports de Bruxelles-National et de Charleroi, la requérante reproche à la Commission de ne s’être référée qu’aux informations fournies par Brussels Airport, qui n’est autre que l’autorité gestionnaire de l’aéroport de Bruxelles-National, et non à celles fournies par la Région wallonne, notamment dans le cadre de sa réponse à la demande d’informations de la Commission du 14 janvier 2014. La requérante fait également grief à la Commission de n’avoir pris en compte que des informations postérieures à l’année 2004, ignorant ainsi « la période désastreuse correspondant à la faillite de la Société anonyme belge d’exploitation de la navigation aérienne (Sabena), survenue le 7 novembre 2001 ».

199    Par ailleurs, la requérante fait également valoir que la Commission n’a envisagé la substituabilité des offres qu’en fonction de la situation géographique des deux aéroports concernés et n’a pas procédé à une analyse relative aux lieux de destination des vols. Elle rappelle la jurisprudence selon laquelle, en matière aérienne, le caractère substituable des offres doit être vérifié par une analyse de « point à point ». En outre, la Commission n’aurait pas examiné les caractéristiques des clients potentiels de chacun des aéroports afin de déterminer si les offres étaient substituables. Selon la requérante, il s’ensuit que la Commission n’a pu légalement conclure que les offres des deux aéroports étaient substituables et donc communes.

200    Par la seconde branche, la requérante fait grief à la Commission d’avoir erronément conclu que l’aide avait créé des distorsions de concurrence entre l’aéroport de Bruxelles-National et celui de Charleroi, notamment sur la croissance, par hypothèse moins élevée, du nombre de passagers à l’aéroport de Bruxelles-National. Par ailleurs, tout en reconnaissant qu’il existait une concurrence entre au moins cinq aéroports, la Commission se serait contentée de tenir compte de la concurrence avec l’aéroport de Bruxelles-National. Or, la Commission aurait dû examiner la situation pour chacun des cinq aéroports, et ce afin de vérifier si les prétendus effets sur l’aéroport de Bruxelles-National étaient isolés ou si ces effets étaient également supportés par les autres aéroports de la zone de chalandise, en sorte que l’évolution de la courbe du nombre de passagers de l’aéroport de Bruxelles-National ne serait pas due à une concurrence imposée par l’un des autres aéroports dans la même zone. En effet, l’évolution de la courbe de croissance du nombre de passagers à l’aéroport de Bruxelles-National s’expliquerait principalement par la « faillite de la Sabena » et le « business plan » (plan de développement) non adéquat de l’aéroport de Bruxelles-National.

201    La requérante ajoute, dans la réplique, que la Commission n’a pas démontré qu’il existait un lien de causalité entre les mesures litigieuses et, premièrement, la progression du trafic à l’aéroport de Charleroi, deuxièmement, la baisse du trafic à l’aéroport de Bruxelles-National et, troisièmement, la progression du trafic à l’aéroport de Charleroi et par la baisse du trafic à l’aéroport de Bruxelles-National. En effet, selon la requérante, la progression rencontrée par l’aéroport de Charleroi ne découle pas, ou à tout le moins pas uniquement, des mesures en cause, mais du choix qu’elle a effectué d’un plan d’affaires pertinent et prometteur, alors même que la stagnation du trafic court-courrier à l’aéroport de Bruxelles-National s’explique par le choix d’un plan d’affaires conservateur ainsi que par la faillite de la Sabena en 2001.

202    La Commission conclut au rejet de ce moyen.

203    Il convient d’examiner ensemble les deux branches du moyen de la requérante.

204    S’agissant de l’origine des informations sur la base desquelles la Commission a conclu à la substituabilité partielle des offres, il y a lieu de constater qu’il ressort du considérant 624 de la décision attaquée que les détails donnés par la Commission aux considérants 625 et 626 de cette dernière ont été fournis par le Royaume de Belgique. Certes, la Commission a indiqué que les données chiffrées contenues dans la réponse du 7 février 2014 correspondaient à celles transmises par Brussels Airport. Toutefois, il n’apparaît pas que, en tenant compte des informations fournies par Brussels Airport, la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation.

205    En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel la Commission s’est contentée de prendre en considération les seules informations relatives à l’état du marché après 2004, ignorant ainsi les effets de la faillite de la Sabena en 2001, il suffit de constater que la requérante n’a pas contesté l’argumentation de la Commission selon laquelle c’était précisément pour éviter de présenter des évolutions de trafic affectées par la faillite de la Sabena qu’elle avait présenté des évolutions à partir de 2004.

206    S’agissant de l’argument selon lequel la faillite de la Sabena aurait contribué à réduire le trafic de l’aéroport de Bruxelles-National, il suffit de relever qu’il est inopérant.

207    En effet, le simple fait d’avoir bénéficié d’un avantage dont les concurrents de la requérante étaient exclus suffit pour conclure que sa position concurrentielle a été renforcée et qu’ainsi la concurrence a été faussée. Pour les mêmes raisons, la prétention de la requérante selon laquelle la différence entre la croissance de l’aéroport de Bruxelles-National et la croissance de celui de Charleroi s’expliquerait par le choix du plan de développement effectué par ce dernier ne saurait prospérer.

208    En ce qui concerne, d’une part, la substituabilité des offres de l’aéroport de Bruxelles-National et de celui de Charleroi et, d’autre part, les distorsions de concurrence dues aux aides perçues par la requérante, il y a lieu de rappeler d’abord qu’il ressort d’une jurisprudence constante que, aux fins de la qualification d’une mesure d’aide d’État, la Commission est tenue non pas d’établir l’existence d’une incidence réelle de l’aide sur les échanges entre États membres et celle d’une distorsion effective de la concurrence, mais seulement d’examiner si l’aide est susceptible d’affecter ces échanges et de fausser la concurrence (voir arrêt du 12 décembre 2014, Banco Privado Português et Massa Insolvente do Banco Privado Português/Commission, T‑487/11, EU:T:2014:1077, point 62 et jurisprudence citée).

209    Partant, dans le cas de l’espèce, la Commission n’était pas tenue de démontrer qu’il y avait une relation de causalité entre la progression et la régression du trafic des deux aéroports concernés et les aides litigieuses. La circonstance que la situation concurrentielle de ces aéroports aurait pu être également influencée par d’autres facteurs que les aides en cause ne fait pas obstacle à la conclusion selon laquelle celles-ci étaient susceptibles d’affecter les échanges et de fausser la concurrence au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

210    Il ressort également d’une jurisprudence bien établie que, dans le cadre de cet examen, la Commission n’est pas tenue de procéder à une analyse économique de la situation réelle des marchés concernés, de la part de marché des entreprises bénéficiaires des aides, de la position des entreprises concurrentes et des courants d’échanges entre États membres. En outre, dans le cas d’aides accordées illégalement, ce que la requérante a, au demeurant, reconnu lors de l’audience, la Commission n’est pas tenue de faire la démonstration de l’effet réel que ces aides ont eu sur la concurrence et sur les échanges entre États membres. Si tel était le cas, en effet, cette exigence aboutirait à favoriser les États membres qui versent des aides illégales au détriment de ceux qui notifient les aides à l’état de projet [voir arrêt du 28 octobre 2015, Hammar Nordic Plugg/Commission, T‑253/12, EU:T:2015:811, point 130 (non publié) et jurisprudence citée].

211    Il s’ensuit que, dans le cas de l’espèce, la requérante ne saurait prétendre que, aux fins de conclure à une distorsion de la concurrence par les aides litigieuses, la Commission aurait été tenue de délimiter le marché des services et le marché géographique en cause ainsi que d’établir l’existence d’un lien de causalité entre les aides perçues par la requérante et les effets réels de celles-ci sur le trafic dans les aéroports concernés. À cet égard, il y a lieu de rappeler que la constatation de l’existence d’un avantage économique sélectif en faveur de la requérante, ce qui n’est, en l’espèce, pas contesté, est suffisante aux fins d’établir un risque de distorsion de la concurrence au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2013, British Telecommunications et BT Pension Scheme Trustees/Commission, T‑226/09 et T‑230/09, non publié, EU:T:2013:466, point 168). En outre, la capacité d’une aide à renforcer la position concurrentielle de l’entreprise bénéficiaire est appréciée en fonction de l’avantage qui lui a été consenti, sans qu’il soit question d’examiner les résultats d’exploitation enregistrés par ses concurrents (voir, en ce sens, arrêt du 28 janvier 1999, BAI/Commission, T‑14/96, EU:T:1999:12, point 78).

212    Enfin, à supposer même que la Commission aurait dû analyser les effets des aides litigieuses sur tous les aéroports dans la zone de chalandise de la requérante, il n’apparaît pas qu’une telle analyse aurait pu aboutir à un résultat plus favorable que celui auquel la Commission est parvenue dans la décision attaquée.

213    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le huitième moyen doit être rejeté.

 Sur le neuvième moyen, tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime

214    Selon la requérante, la Commission a commis une erreur de droit en ne vérifiant pas l’ensemble des critères d’appréciation du principe de protection de la confiance légitime. Tout d’abord, elle observe que la Commission, par ses déclarations formulées dans la décision 2004/393, son inaction de plus de dix ans et sa pratique antérieure, a fait naître chez elle une espérance légitime quant à la légalité des aides litigieuses ou, à tout le moins, quant à l’impossibilité d’en ordonner la récupération. Ensuite, la requérante fait valoir qu’elle ne pouvait raisonnablement anticiper le changement de ligne de conduite de la Commission tant l’objet de la procédure de réexamen des mesures en faveur de Ryanair était différent de la présente espèce et alors même que le Tribunal n’avait aucunement fait référence à la potentielle illégalité des mesures consenties en sa faveur, ajoutant que la Commission avait ouvert la procédure d’examen à son égard presque trois ans et demi plus tôt. Enfin, la requérante observe que, dans le cas d’espèce, l’intérêt général de l’Union ne s’oppose pas à l’absence de récupération des aides litigieuses, car la Commission n’a pas démontré que cet intérêt général était suffisamment impérieux pour primer l’intérêt de la requérante elle-même.

215    La Commission conclut au rejet de ce moyen.

216    Il ressort d’une jurisprudence constante que, d’une part, les entreprises bénéficiaires d’une aide ne sauraient avoir, en principe, une confiance légitime dans la régularité de l’aide que si celle-ci a été accordée dans le respect de la procédure prévue à l’article 108 TFUE et, d’autre part, un opérateur économique diligent doit normalement être en mesure de s’assurer que cette procédure a été respectée. En particulier, lorsqu’une aide est mise à exécution sans notification préalable à la Commission, de sorte qu’elle est illégale en vertu de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, le bénéficiaire de l’aide ne peut avoir, à ce moment, une confiance légitime dans la régularité de l’octroi de celle-ci (voir arrêt du 19 mars 2015, OTP Bank, C‑672/13, EU:C:2015:185, point 77 et jurisprudence citée).

217    En outre, s’il convient de rappeler que l’on ne saurait exclure la possibilité, pour le bénéficiaire d’une aide illégale, d’invoquer des circonstances exceptionnelles ayant légitimement pu fonder sa confiance dans le caractère régulier de cette aide, la reconnaissance d’une confiance légitime à son égard dans un tel cas présuppose toutefois que l’aide ait été accordée dans le respect de la procédure prévue par l’article 108 TFUE (arrêt du 27 janvier 1998, Ladbroke Racing/Commission, T‑67/94, EU:T:1998:7, point 182).

218    Or, en l’espèce, il est constant que les aides litigieuses n’ont pas été notifiées à la Commission conformément à l’article 108, paragraphe 3, TFUE et que les aides dont le remboursement est demandé ont été octroyées postérieurement à l’intervention de l’arrêt du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission (T‑128/98, EU:T:2000:290), dans lequel il a été jugé que la gestion d’un aéroport constituait en principe une activité économique.

219    Partant, la requérante ne saurait invoquer le fait que, en ordonnant la récupération des aides litigieuses, la Commission aurait violé le principe de protection de la confiance légitime.

220    Il convient dès lors de rejeter le neuvième moyen ainsi que le recours dans son ensemble.

 Sur le mémoire en adaptation

221    Il convient de rappeler que, le 5 avril 2016, la Commission a notifié au Royaume de Belgique un corrigendum de la décision attaquée en spécifiant que les erreurs qui avaient été décelées dans cette dernière n’affectaient nullement les conclusions de la décision attaquée qui y étaient formulées.

222    Le 23 juin 2016, la requérante a déposé un mémoire en adaptation en raison des corrections apportées par la Commission à la décision attaquée par le corrigendum du 5 avril 2016.

223    La Commission soulève l’irrecevabilité du mémoire en adaptation.

224    Force est de constater que le mémoire en adaptation ne comporte aucun élément nouveau et se limite à reprendre les arguments contenus dans la requête et dans la réplique, de manière plus directe, en reprochant à la Commission de multiples erreurs graves et substantielles, alors même que, en réalité, le corrigendum ne concerne que des modifications de style et de nature grammaticale ainsi que de certains calculs.

225    Par ailleurs, même si les données chiffrées erronées figurant dans la décision attaquée ont pu compliquer la bonne compréhension de cette dernière, notamment par la requérante, ces erreurs ne sauraient toutefois permettre de remettre en cause la légalité de la décision attaquée.

226    Il s’ensuit que, dans la mesure où l’examen de la décision attaquée n’a pas permis de remettre en cause la légalité de cette dernière et conduit au rejet du recours, la question de la recevabilité du mémoire en adaptation est nécessairement devenue sans objet.

 Sur les dépens

227    Aux termes de l’article 135, paragraphe 1, du règlement de procédure, lorsque l’équité l’exige, le Tribunal peut décider qu’une partie qui succombe supporte, outre ses propres dépens, uniquement une fraction des dépens de l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre. En outre, aux termes de l’article 135, paragraphe 2, du même règlement, le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, partiellement ou totalement aux dépens, si cela apparaît justifié en raison de son attitude, y compris avant l’introduction de l’instance, en particulier si elle a fait exposer à l’autre partie des frais que le Tribunal reconnaît comme frustratoires ou vexatoires.

228    Dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal estime que, ainsi qu’il résulte des développements ci-dessus, la Commission a commis de nombreuses erreurs matérielles qui ont pu laisser croire à la requérante qu’elle était fondée à contester la validité de la décision attaquée et qui ont rendu plus difficile le contrôle par le Tribunal de la décision attaquée.

229    Dans ces conditions, la présente procédure peut être considérée comme ayant en partie été occasionnée par le comportement de la Commission en ce que celle-ci a pu, par les erreurs commises, susciter chez la requérante des interrogations compréhensibles sur la légalité de la décision attaquée.

230    De telles circonstances constituent un motif justifiant un partage entre la Commission et la requérante des frais exposés aux fins de l’instance.

231    Le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en mettant à la charge de la Commission, outre ses propres dépens, la moitié des dépens exposés par la requérante.

232    Par ailleurs, conformément à l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, les parties intervenantes supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La Commission européenne supportera ses propres dépens et la moitié des dépens exposés par Brussels South Charleroi Airport (BSCA).

3)      La Société wallonne des aéroports SA (Sowaer), Brussels Airport Company SA et Brussels Airlines SA/NV supporteront leurs propres dépens.

LabuckaKanchevaMadise

BarentsPasser

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 janvier 2018.

Le greffier

 

Le juge

E. Coulon

 

R. Barents



*      Langue de procédure : le français.


1      Données confidentielles occultées.

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