dm-drogerie markt v EUIPO - Digital Print Group O. Schimek (Foto Paradies) (Intellectual, industrial and commercial property - Judgment) French Text [2018] EUECJ T-843/16 (28 February 2018)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2018/T84316.html
Cite as: EU:T:2018:102, [2018] EUECJ T-843/16, ECLI:EU:T:2018:102

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

28 février 2018 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne verbale Foto Paradies – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑843/16,

dm-drogerie markt GmbH & Co. KG, établie à Karlsruhe (Allemagne), représentée par Mes T. Strack et O. Bludovsky, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. M. Fischer, Mmes R. Manea et D. Walicka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Digital Print Group O. Schimek GmbH, établie à Nuremberg (Allemagne), représentée par Mes L. Petri et M. Gilch, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 15 septembre 2016 (R 1194/2015‑1), relative à une procédure de nullité entre Digital Print Group O. Schimek et dm-drogerie markt,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, V. Kreuschitz et Mme N. Półtorak (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Plingers, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 29 novembre 2016,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 16 mars 2017,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 16 mars 2017,

à la suite de l’audience du 6 décembre 2017,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 8 mars 2012, la requérante, dm-drogerie markt GmbH & Co. KG, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Foto Paradies.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment,des classes 1, 9, 16, 20, 38, 40 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 1 : « Produits chimiques à usage photographique, en particulier films photographiques exposés et non exposés ; papier pour la photographie »

–        classe 9 : « Appareils et instruments photographiques, cinématographiques, d’optique et d’enseignement ; pellicules impressionnées, appareils photographiques, appareils de prises de vue, supports d’enregistrement magnétiques et optiques, en particulier CD ; mémoires pour installations de traitement de données, supports de stockage électriques, graveurs de CD, appareils d’enregistrement, de transmission et de reproduction de sons, données et image ; imprimantes, scanners ; cellules photovoltaïques ; étuis spéciaux pour appareils et instruments photographiques ; caméras cinématographiques ; appareils à couper les pellicules ;cadres pour photographies numériques ; fichiers vidéo téléchargeables ; publications électroniques enregistrées sur support informatique ; publications sous format exploitable électroniquement ; publications téléchargeables sous format électronique »

–        classe 16 : « Papier, carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes ; produits de l’imprimerie ; articles pour reliures ; photographies ; papeterie ; adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage ; matériel pour les artistes ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) ; coins pour photos, albums de photographies, adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage, photogravures ; appareils pour le collage des photographies ; images ; livres ; albums de photos ; chromos ; cartes de souhait ; représentations graphiques ; reproductions graphiques ;papeterie (articles de -) ; cartes postales »

–        classe 38 : « Télécommunications ; fourniture d’accès à des programmes informatiques sur des réseaux de données ; fourniture d’accès à des bases de données ; transmission électronique d’images et/ou données numériques ; mise à disposition d’un accès à des informations sur l’internet ; transmission d’images numériques et/ou de données »

–        classe 40 : « Traitement de matériaux ; développement de films, en particulier de films photographiques ; services d’impression photographique ; travaux photographiques ; impression photographique ; services d’imprimerie ; services de photogravure ; travaux photographiques ; traitement des films cinématographiques ; impression sur textile ; reliure ; imprimerie lithographique ; impression offset ; travaux d’impression en taille douce ; impression (photographique) de films ; duplication de films ; reproduction de photographies »

–        classe 42 : « Services scientifiques et technologiques et conceptions y relatives ; conception et développement d’ordinateurs et de logiciels ; conversion de programmes informatiques et de données (autre que modification physique) ; installation de logiciels informatiques ; mise à disposition ou location d’espaces de stockage électronique (espace web) sur l’internet ; traitement numérique d’images (services graphiques) »

4        La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 80/2012, du 27 avril 2012. La marque contestée a été enregistrée le 7 août 2012, sous le numéro 010707933.

5         Le 9 janvier 2014, l’intervenante, Digital Print Group O. Schimek GmbH, a introduit une demande en nullité, au titre de l’article 52, paragraphe 1, sous a) [devenu article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001], lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001], à l’encontre de la marque Foto Paradies pour tous les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

6        Le 30 avril 2015, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité.

7        Le 24 juin 2015, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 15 septembre 2016 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’annulation et a annulé la marque contestée, en ce qui concernait les produits et les services litigieux.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

10      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

12      La requérante fait valoir, en substance, que la marque Foto Paradies présente un caractère distinctif suffisant pour être reconnue en tant que marque par le public. Elle reproche à la chambre de recours d’avoir commis une erreur en considérant qu’il était indifférent que les termes « Foto » et « Paradies » soient écrits séparément et non en un seul mot. Elle estime également que le terme « Paradies » remplit en soi, isolément, l’exigence du caractère distinctif propre à une marque pour les produits et les services en cause.

13      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

14      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. En outre, l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement (devenu article 7, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), énonce que le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union européenne.

15      L’idée sous-jacente à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 est liée à la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque [arrêts du 21 janvier 2011, BSH/OHMI (executive edition), T‑310/08, non publié, EU:T:2011:16, point 22, et du 12 mai 2016, GRE/EUIPO (Mark1), T‑32/15, EU:T:2016:287, point 25].

16      Le motif absolu de refus d’enregistrement prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 vise ainsi à assurer que ce consommateur ou cet utilisateur final puisse distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance. Dès lors, est pourvue d’un caractère distinctif, au sens de cet article, la marque qui permet d’identifier le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises (arrêt du 21 janvier 2011, executive edition, T‑310/08, non publié, EU:T:2011:16, point 22).

17      Il n’est pas nécessaire que la marque transmette une information précise quant à l’identité du fabricant du produit ou du prestataire de services. Il suffit que la marque permette au public concerné de distinguer le produit ou le service qu’elle désigne de ceux qui ont une autre origine commerciale (arrêt du 21 janvier 2011, executive edition, T‑310/08, non publié, EU:T:2011:16, point 22).

18      Le caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [arrêts du 20 octobre 2011, Freixenet/OHMI, C‑344/10 P et C‑345/10 P, EU:C:2011:680, point 43 ; du 31 mars 2004, Fieldturf/OHMI (LOOKS LIKE GRASS… FEELS LIKE GRASS… PLAYS LIKE GRASS), T‑216/02, EU:T:2004:96, point 26, et du 12 mai 2016, Mark1, T‑32/15, EU:T:2016:287, point 29].

19      S’agissant de marques composées d’éléments qui sont, par ailleurs, utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou les services visés par ces marques, leur enregistrement n’est pas exclu en raison d’une telle utilisation. Quant à l’appréciation du caractère distinctif de telles marques, il n’y a pas lieu d’appliquer à celles-ci des critères plus stricts que ceux applicables à d’autres signes (voir arrêts du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, points 35 et 36 et jurisprudence citée, et du 12 mai 2016, Mark1, T‑32/15, EU:T:2016:287, point 30 et jurisprudence citée).

20      Une marque constituée d’un slogan publicitaire doit être considérée comme dépourvue de caractère distinctif si elle n’est susceptible d’être perçue par le public pertinent que comme une simple formule promotionnelle. En revanche, une telle marque doit se voir reconnaître un caractère distinctif si, au-delà de sa fonction promotionnelle, elle peut être perçue d’emblée par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits et des services visés [ordonnance du 12 juin 2014, Delphi Technologies/OHMI, C‑448/13 P, non publiée, EU:C:2014:1746, point 36, et arrêt du 24 novembre 2015, Intervog/OHMI (meet me), T‑190/15, non publié, EU:T:2015:874, point 20].

21      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le cas d’espèce.

22      À titre liminaire, il y a lieu d’entériner les appréciations de la chambre de recours figurant au point 16 de la décision attaquée, au demeurant non contestées par la requérante, selon lesquelles le public pertinent est, en l’espèce, composé de consommateurs moyens, normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés, qui s’intéressent à la photographie, en tant qu’amateurs ou à titre professionnel.

23      La marque contestée étant composée de deux termes ayant une signification, l’un « Foto » internationalement compréhensible et l’autre « Paradies » compréhensible, ne fût-ce que par le public germanophone, c’est également à bon droit que la chambre de recours a considéré, au point 17 de la décision attaquée, qu’il convenait d’apprécier son caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 au regard du public germanophone de l’Union.

24      En effet, compte tenu du fait que, en vertu de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, le paragraphe 1 de ce même article est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union, l’existence de tels motifs à l’encontre de la marque contestée devait s’apprécier en l’espèce par rapport au consommateur germanophone.

25      Ensuite, il y a lieu de déterminer si la chambre de recours a correctement analysé la marque contestée pour conclure qu’elle était dépourvue de caractère distinctif à l’égard des produits et des services visés.

26      À cet égard, il convient de rappeler que, afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y ait pas lieu de procéder, dans un premier temps, à un examen successif des différents éléments de présentation utilisés pour cette marque. En effet, il peut être utile, au cours de l’appréciation globale, d’examiner chacun des éléments constitutifs de la marque concernée (voir arrêt du 25 octobre 2007, Develey/OHMI, C‑238/06 P, EU:C:2007:635, point 82 et jurisprudence citée). En l’espèce, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, pour les motifs exposés aux points 18 à 33 de la décision attaquée, que la marque contestée était dépourvue de caractère distinctif.

27      En effet, le terme « Foto » est une abréviation commune du terme allemand « Fotografie » (signifiant photographie) et renvoie au procédé, connu de tous, permettant, à l’aide de la lumière et de produits chimiques, d’enregistrer une image. Le terme « Paradies » précédé d’un substantif signifie, quant à lui, en allemand, qu’il est question d’un lieu qui est l’idéal de quelque chose, offre des conditions parfaites de bien-être ou pour une activité quelconque, ou du moins représente une déclaration positive portant sur le substantif qui précède. À cet égard, ainsi que le souligne la chambre de recours au point 18 de la décision attaquée, les termes « Kinderparadies » (paradis des enfants), « Spielparadies » (paradis du jeu) ou « Steuerparadies » (paradis fiscal) sont des éléments stables de l’allemand, compris par les consommateurs comme des lieux idéaux, respectivement, pour des enfants, pour jouer, ou pour leur attractivité fiscale. En associant le terme « Foto » qui renvoie, pour le consommateur germanophone, à la photographie en général, au terme « Paradies », la marque contestée a donc pour sens un lieu idéal pour l’univers de la photographie ou encore une offre particulièrement bon marché, bonne ou vaste dans le domaine de la photographie, or cette signification est comprise comme un éloge purement publicitaire. La chambre de recours a donc considéré à bon droit que cette signification de la marque contestée était immédiatement compréhensible pour le public germanophone.

28      Il y a lieu d’analyser si, en l’espèce, la marque contestée n’est susceptible d’être perçue par le public pertinent que comme une simple formule promotionnelle ou si, au-delà de sa fonction promotionnelle, elle peut être perçue d’emblée par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits et des services visés.

29      Les produits visés par la marque contestée, compris dans les classes 1, 9 et 16 de la classification de Nice, peuvent être vendus dans le cadre d’une offre large et multiple d’un magasin dans le domaine de la photographie et les services en cause, compris dans les classes 38, 40 et 42 de la classification de Nice, peuvent tous avoir la photographie pour objet. Ainsi, du fait de sa signification et au regard des produits et des services visés, la marque contestée sera perçue comme un message purement promotionnel, visant à souligner que ceux-ci font partie d’une offre complète en matière de photographie et ne sera pas reconnue comme une marque. La chambre de recours a considéré à bon droit que le terme sera reconnu comme un slogan publicitaire qui n’est pas propre à indiquer l’origine commerciale des produits et des services concernés.

30      La chambre de recours n’a donc pas commis d’erreur en concluant que le signe en cause était dépourvu de caractère distinctif. Les arguments présentés à titre principal, d’une part, et à titre subsidiaire, d’autre part, par la requérante ne sauraient infirmer cette conclusion.

31      En effet, en premier lieu, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel le signe Foto Paradies serait compris par le public pertinent, en raison de son orthographe particulière, comme ayant une signification différente du terme « Fotoparadies ».

32      À titre liminaire, il y a lieu de souligner que la chambre de recours n’a pas seulement exposé la signification du terme « Fotoparadies », écrit en un seul mot, comme le prétend la requérante, mais a fondé son raisonnement sur l’analyse de la signification des deux termes séparément, puis sur une analyse d’ensemble de l’expression« Foto Paradies », écrit en deux mots. C’est seulement après avoir exposé la signification de l’expression « Foto Paradies », qu’elle a considéré que le fait qu’il s’agissait de deux substantifs distincts ne modifierait pas sa conclusion selon laquelle le consommateur percevrait la marque comme un éloge publicitaire. Il ne saurait donc être reproché à la chambre de recours d’avoir fondé son raisonnement sur la signification du terme « Fotoparadies », écrit en un seul mot.

33      De même, il y a lieu de relever que la marque contestée est une marque verbale constituée exclusivement de lettres, de mots ou d’associations de mots, écrits en caractères d’imprimerie dans une police normale, sans élément graphique spécifique. En tout état de cause, la protection qui découle de l’enregistrement d’une marque verbale porte sur le mot indiqué dans la demande d’enregistrement et non sur les aspects graphiques ou stylistiques particuliers que cette marque pourrait éventuellement revêtir [voir, en ce sens, arrêt du 22 mai 2008, Radio Regenbogen Hörfunk in Baden/OHMI (RadioCom), T‑254/06, non publié, EU:T:2008:165, point 43]. Par conséquent, la requérante ne saurait se prévaloir d’éléments tenant à la composition graphique de la marque contestée.

34      En outre, aucun des arguments de la requérante tendant à établir que le terme « Fotoparadies » aurait une signification différente de l’expression écrite en deux mots « Foto Paradies » ne saurait être retenu.

35      En effet, premièrement, la requérante fait valoir que l’allemand a la particularité de permettre la création, par la jonction de deux substantifs, d’un nouveau substantif revêtu d’une signification propre. La marque contestée aurait donc un sens différent du terme « Fotoparadies », écrit en seul mot. Invitée à préciser, lors de l’audience, le sens précis qu’aurait la marque contestée dans son ensemble, du fait de son écriture en deux mots, la requérante a fait valoir que celle-ci n’avait pas de signification évidente, qu’elle évoquait à la fois quelque chose de positif et la photographie, mais qu’un effort de réflexion et d’interprétation de la part du public pertinent serait nécessaire pour établir un lien entre les deux termes qui la composent. Or, force est de constater que l’ordre des mots « Foto » et « Paradies » est en pleine conformité avec les règles de la grammaire allemande et correspond à l’emploi usuel en allemand de substantifs composés, dans la mesure où le premier mot précise la signification du second mot. Cette argumentation ne saurait donc suffire à contredire l’analyse figurant au point 21 de la décision attaquée, selon laquelle le fait qu’il s’agisse de deux substantifs distincts ne modifiera pas la perception de la marque contestée par le consommateur. En effet, à l’exemple de ce que relève l’EUIPO, l’espace entre les mots peut être perçu par le public pertinent comme une faute d’orthographe ou un moyen stylistique non susceptible de modifier la signification des substantifs composés de la marque contestée. En outre, ainsi qu’il a été exposé au point 32 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas fondé son analyse sur le terme en un seul mot.

36      Deuxièmement, la requérante soutient que l’expression « Foto Paradies », en deux mots, présenterait un degré d’originalité qui lui conférerait un caractère distinctif du fait même de son écriture en deux mots, qui serait inhabituelle sur le plan linguistique et incorrecte sur le plan grammatical. Pour ce qui est de l’orthographe particulière du signe litigieux, tenant, d’une part, à ce que les deux mots qui la composent ne soient pas juxtaposés et, d’autre part, à ce qu’ils commencent chacun par une lettre majuscule, force est de constater qu’elle ne constitue pas un élément d’ordre créatif susceptible de rendre le signe dans son ensemble apte à distinguer les produits d’une entreprise de ceux d’autres entreprises [voir, en ce sens, arrêt du 9 février 2010, PromoCell bioscience alive/OHMI (SupplementPack), T‑113/09, non publié, EU:T:2010:34, point 35]. En effet, la perception par le public pertinent de la signification des termes « Foto » et « Paradies » associés ne variant pas selon qu’ils soient séparés d’un espace ou non, le signe en cause ne présente, contrairement à ce que fait valoir la requérante, aucune originalité, ni ne nécessite d’effort de réflexion ou d’interprétation.

37      Troisièmement, la requérante souligne que les deux substantifs sont écrits chacun avec une majuscule lorsqu’ils sont écrits séparément, ce qui créerait une différence sur le plan graphique. Or, comme il a été rappelé au point 33 ci-dessus, la protection qui découle de l’enregistrement d’une marque verbale ne porte pas sur les aspects graphiques ou stylistiques particuliers que cette marque pourrait éventuellement revêtir. En l’espèce, l’écriture avec ou sans majuscule des termes composant la marque contestée n’influe donc passur la signification de celle-ci, au regard de son caractère distinctif.

38      Quatrièmement, sur le plan phonétique, la requérante fait valoir que la prononciation de deux mots juxtaposés entraînera une pause dans la parole et l’absence de liaison entre les deux termes, ce qui ne serait pas le cas lorsque les deux substantifs sont joints pour en former un nouveau. Cependant, contrairement à ce que prétend la requérante, il n’est pas prouvé que cette différence sera perceptible à l’oral dans la mesure où l’écriture combinée ou séparée des deux termes n’a pas de conséquence sur le nombre de syllabes prononcées, la prosodie ou l’accentuation.

39      Pris dans sa globalité, le signe en cause ne crée dès lors pas, auprès du public pertinent, une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple juxtaposition des mots qui le composent pour en modifier le sens ou la portée. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que le fait qu’il s’agissait de deux substantifs distincts ne modifierait pas la perception de la marque en cause par le consommateur et que l’expression « Foto Paradies » et le terme « Fotoparadies » ne seront pas compris différemment.

40      En second lieu, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel le terme « Paradies » remplirait à lui seul l’exigence du caractère distinctif propre à une marque pour les produits et les services en cause.

41      En effet, selon la requérante, ce terme serait synonyme de lieu ou de domaine qui, par ses caractéristiques, sa beauté, ses bonnes conditions de vie ou autres qualités de cet ordre, remplirait toutes les conditions pour une existence belle, heureuse et paisible et cette signification ne saurait être considérée comme descriptive. Cependant, ainsi que le soutient l’EUIPO à juste titre, c’est l’absence de caractère distinctif de la marque contestée dans son ensemble qui a été examinée dans la mesure où la question de savoir si le terme « Paradies » était distinctif en soi ne faisait pas l’objet de la procédure en nullité. Il y a lieu de rappeler que, s’agissant d’une marque composée de plusieurs éléments verbaux, un éventuel caractère distinctif peut être examiné, en partie, pour chacun de ses éléments, pris séparément, mais doit, en tout état de cause, dépendre d’un examen de l’ensemble qu’ils composent. Ainsi, même si le terme « Paradies » devait être considéré comme distinctif au regard des produits et des services en cause, cela ne suffirait pas à établir le caractère distinctif de la marque verbale Foto Paradies.

42      À titre subsidiaire, la requérante fait valoir que le terme « Fotoparadies » ne renverrait pas à un lieu idéal pour des produits ou des accessoires de photographie mais à un lieu idéal qui réunirait des motifs de photographies « paradisiaques ».À cet égard, il y a lieu de rappeler, à l’exemple de l’EUIPO, que pour que la nullité d’un signe verbal soit prononcée, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, il suffit que, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [arrêt du 23 janvier 2014, Novartis/OHMI (CARE TO CARE), T‑68/13, non publié, EU:T:2014:29, point 41]. Dans la mesure où il a été établi que le signe Foto Paradies renvoyait à une offre particulièrement bon marché, bonne ou vaste dans le domaine de la photographie, le fait que le signe puisse avoir une autre signification ne suffit pas à lui conférer un caractère distinctif. Cet argument doit donc être écarté.

43      Enfin, à titre encore plus subsidiaire, la requérante observe que même si l’expression « Foto Paradies » était comprise par le public de la même manière que le terme « Fotoparadies » et que le public comprenait ce terme comme une référence à un lieu de vente « paradisiaque » pour les photographies, une telle perception ne serait pertinente que pour l’exploitation commerciale concernée et non pour les produits fabriqués ou commercialisés ou les services qui ne sont pas propres à la distribution. Or, il ressort du point 29 ci-dessus que la chambre de recours a analysé toutes les catégories de produits et de services en cause pour conclure que le signe en cause n’était pas distinctif à leur égard, dans la mesure où tous ces produits et services pouvaient être liés au domaine de la photographie. Il y a donc lieu d’écarter également cet argument de la requérante.

44      Par conséquent, il convient de rejeter le moyen unique de la requérante ainsi que le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

45      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      dm-drogerie markt GmbH & Co. KG est condamnée aux dépens.

Frimodt Nielsen

Kreuschitz

Półtorak

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 février 2018.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.

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