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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Commission v Italy (Ressources propres) (Financial provisions - Judgment) French Text [2019] EUECJ C-304/18 (11 July 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/C30418.html Cite as: ECLI:EU:C:2019:601, EU:C:2019:601, [2019] EUECJ C-304/18 |
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ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)
11 juillet 2019 (*)
« Manquement d’État – Ressources propres – Droits de douane – Constatation d’une dette douanière – Inscription dans une comptabilité séparée – Obligation de mise à la disposition de l’Union européenne – Procédure de recouvrement engagée tardivement – Intérêts de retard »
Dans l’affaire C‑304/18,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 4 mai 2018,
Commission européenne, représentée initialement par Mmes Z. Malůšková, M. Owsiany-Hornung et F. Tomat, puis par Mmes Z. Malůšková et F. Tomat, en qualité d’agents,
partie requérante,
contre
République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. G. Albenzio, avvocato dello Stato,
partie défenderesse,
LA COUR (septième chambre),
composée de M. T. von Danwitz, président de chambre, MM. C. Vajda et A. Kumin (rapporteur), juges,
avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en refusant de mettre à disposition des ressources propres traditionnelles d’un montant de 2 120 309,50 euros, indiquées dans la communication de mise en non-valeur IT(07)08‑917, la République italienne a manqué aux obligations lui incombant en vertu de l’article 8 de la décision 94/728/CE, Euratom du Conseil, du 31 octobre 1994, relative au système des ressources propres des Communautés européennes (JO 1994, L 293, p. 9), de l’article 8 de la décision 2000/597/CE, Euratom du Conseil, du 29 septembre 2000, relative au système des ressources propres des Communautés européennes (JO 2000, L 253, p. 42), de l’article 8 de la décision 2007/436/CE, Euratom du Conseil, du 7 juin 2007, relative au système des ressources propres des Communautés européennes (JO 2007, L 163, p. 17), et de l’article 8 de la décision 2014/335/UE, Euratom du Conseil, du 26 mai 2014, relative au système des ressources propres de l’Union européenne (JO 2014, L 168, p. 105), ainsi que des articles 6, 10, 11 et 17 du règlement (CEE, Euratom) no 1552/89 du Conseil, du 29 mai 1989, portant application de la décision 88/376/CEE, Euratom relative au système des ressources propres des Communautés (JO 1989, L 155, p. 1), des articles 6, 10, 11 et 17 du règlement (CE, Euratom) no 1150/2000 du Conseil, du 22 mai 2000, portant application de la décision 94/728 (JO 2000, L 130, p. 1), et des articles 6, 10, 12 et 13 du règlement (UE, Euratom) no 609/2014 du Conseil, du 26 mai 2014, relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres traditionnelles, de la ressource propre fondée sur la TVA et de la ressource propre fondée sur le RNB et aux mesures visant à faire face aux besoins de trésorerie (JO 2014, L 168, p. 39).
Le cadre juridique
Les décisions sur les ressources propres
2 S’agissant de la période concernée par les faits du présent litige, quatre décisions relatives au système des ressources propres de l’Union européenne se sont appliquées successivement, à savoir la décision 94/728, puis, à compter du 1er janvier 2002, la décision 2000/597, à compter du 1er janvier 2007, la décision 2007/436 et, depuis le 1er janvier 2014, la décision 2014/335.
3 Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, sous b), des décisions 94/728 et 2000/597, dont le contenu a été repris, en substance, à l’article 2, paragraphe 1, sous a), des décisions 2007/436 et 2014/335, constituent des ressources propres inscrites au budget de l’Union européenne les recettes provenant, notamment, « des droits du tarif douanier commun et des autres droits établis ou à établir par les institutions des Communautés sur les échanges avec les pays non membres ».
4 L’article 8, paragraphe 1, desdites décisions prévoit, notamment, d’une part, que les droits du tarif douanier commun, en tant que ressources propres de l’Union, sont perçus par les États membres conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, qui sont, le cas échéant, adaptées aux exigences de la réglementation de l’Union, et, d’autre part, que les États membres mettent lesdites ressources à la disposition de la Commission.
Les règlements de mise à disposition des ressources propres
5 Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1552/89, dont le contenu correspond, en substance, à celui de l’article 2, paragraphe 1, des règlements nos 1150/2000 et 609/2014 :
« Aux fins de l’application du présent règlement, un droit des Communautés sur les ressources propres [...] est constaté dès que le montant dû est communiqué par le service compétent de l’État membre au redevable. Cette communication est effectuée dès que le redevable est connu et que le montant du droit peut être calculé par les autorités administratives compétentes, dans le respect de toutes les dispositions communautaires applicables en la matière. »
6 L’article 6, paragraphe 1, et l’article 6, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement no 1552/89, dont le libellé correspond à celui, respectivement, de l’article 6, paragraphe 1, et de l’article 6, paragraphe 3, sous a) et b), du règlement no 1150/2000, ainsi qu’à celui, respectivement, de l’article 6, paragraphe 1, et de l’article 6, paragraphe 3, premier et deuxième alinéas, du règlement no 609/2014, disposait :
« 1. Une comptabilité des ressources propres est tenue auprès du trésor de chaque État membre ou de l’organisme désigné par chaque État membre et ventilée par nature de ressources.
2. a) Les droits constatés conformément à l’article 2 sont, sous réserve du point b) du présent paragraphe, repris dans la comptabilité au plus tard le premier jour ouvrable après le 19 du deuxième mois suivant celui au cours duquel le droit a été constaté.
b) Les droits constatés et non repris dans la comptabilité visée au point a) parce qu’ils n’ont pas encore été recouvrés et qu’aucune caution n’a été fournie sont inscrits, dans le délai prévu au point a), dans une comptabilité séparée. Les États membres peuvent procéder de la même manière lorsque les droits constatés et couverts par des garanties font l’objet de contestations et sont susceptibles de subir des variations à la suite des différends survenus. »
7 En vertu de l’article 8, premier alinéa, du règlement no 1552/89, dont le contenu correspond, en substance, à celui de l’article 8, premier alinéa, du règlement no 1150/2000 et de l’article 8 du règlement no 609/2014 :
« Les rectifications effectuées en application de l’article 2 paragraphe 2 sont portées en augmentation ou en diminution du montant total des droits constatés. Elles sont reprises dans les comptabilités prévues à l’article 6 paragraphe 2 points a) et b) ainsi que dans les relevés, prévus à l’article 6 paragraphe 3, correspondant à la date de ces rectifications. »
8 L’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1552/89, dont le contenu correspond, en substance, à celui de l’article 10, paragraphe 1, des règlements nos 1150/2000 et 609/2014, était libellé comme suit :
« Après déduction de 10 % au titre des frais de perception en application de l’article 2 paragraphe 3 de la décision 88/376/CEE, Euratom [du Conseil, du 24 juin 1988, relative au système des ressources propres des Communautés (JO 1988, L 185, p. 24)], l’inscription des ressources propres visées à l’article 2 paragraphe 1 points a) et b) de cette décision, intervient au plus tard le premier jour ouvrable après le 19 du deuxième mois suivant celui au cours duquel le droit a été constaté conformément à l’article 2.
Toutefois, pour les droits repris dans la comptabilité séparée conformément à l’article 6 paragraphe 2 point b), l’inscription doit intervenir au plus tard le premier jour ouvrable après le 19 du deuxième mois suivant celui du recouvrement des droits. »
9 L’article 11 des règlements nos 1552/89 et 1150/2000 disposait :
« Tout retard dans les inscriptions au compte visé à l’article 9 paragraphe 1 donne lieu au paiement, par l’État membre concerné, d’un intérêt dont le taux est égal au taux d’intérêt appliqué au jour de l’échéance sur le marché monétaire de l’État membre concerné pour les financements à court terme, majoré de deux points. Ce taux est augmenté de 0,25 point par mois de retard. Le taux ainsi augmenté est applicable à toute la période du retard. »
10 Aux termes de l’article 12, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 609/2014, dont le libellé est identique à celui de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 2028/2004 du Conseil, du 16 novembre 2004 (JO 2014, L 352, p. 1) :
« Tout retard dans les inscriptions au compte visé à l’article 9, paragraphe 1, donne lieu au paiement, par l’État membre concerné, d’intérêts de retard. »
11 L’article 17 des règlements nos 1552/89 et 1150/2000 prévoyait ce qui suit :
« 1. Les États membres sont tenus de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits constatés conformément à l’article 2 soient mis à la disposition de la Commission dans les conditions prévues par le présent règlement.
2. Les États membres ne sont dispensés de mettre à la disposition de la Commission les montants correspondant aux droits constatés que si le recouvrement n’a pu être effectué pour des raisons de force majeure. En outre, dans des cas d’espèce, les États membres peuvent ne pas mettre ces montants à la disposition de la Commission lorsqu’il s’avère, après examen approfondi de toutes les données pertinentes du cas en question, qu’il est définitivement impossible de procéder au recouvrement pour des raisons qui ne sauraient leur être imputables. [...]
[...] »
12 L’article 13, paragraphes 1 et 2, du règlement no 609/2014, qui est rédigé en des termes analogues à ceux de l’article 17, paragraphes 1 et 2, du règlement no 1150/2000, tel que modifié par le règlement no 2028/2004, énonce :
1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits constatés en vertu de l’article 2 soient mis à la disposition de la Commission dans les conditions prévues par le présent règlement.
2. Les États membres sont dispensés de mettre à la disposition de la Commission les montants correspondant aux droits constatés en vertu de l’article 2 qui s’avèrent irrécouvrables pour l’une des raisons suivantes :
a) soit pour des raisons de force majeure ;
b) soit pour d’autres raisons qui ne leur sont pas imputables.
Les montants de droits constatés sont déclarés irrécouvrables par décision de l’autorité administrative compétente constatant l’impossibilité du recouvrement.
Les montants de droits constatés sont réputés irrécouvrables au plus tard après une période de cinq ans à compter de la date à laquelle le montant a été constaté conformément à l’article 2 ou, en cas de recours administratif ou judiciaire, à compter de la date de la notification ou de la publication de la décision définitive.
[...] »
Le code des douanes
13 L’article 7 du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1, ci-après le « code des douanes »), disposait :
« À l’exception des cas visés à l’article 244 deuxième alinéa, les décisions prises sont immédiatement exécutoires par les autorités douanières. »
14 L’article 202 du code des douanes était libellé comme suit :
« 1. Fait naître une dette douanière à l’importation :
a) l’introduction irrégulière dans le territoire douanier de la Communauté d’une marchandise passible de droits à l’importation
[...]
2. La dette douanière naît au moment de l’introduction irrégulière.
3. Les débiteurs sont :
– la personne qui a procédé à cette introduction irrégulière,
– les personnes qui ont participé à cette introduction en sachant ou en devant raisonnablement savoir qu’elle était irrégulière,
– ainsi que celles qui ont acquis ou détenu la marchandise en cause et qui savaient ou devaient raisonnablement savoir au moment où elles ont acquis ou reçu cette marchandise qu’il s’agissait d’une marchandise introduite irrégulièrement. »
15 Aux termes de l’article 213 du code des douanes :
« Lorsqu’il y a plusieurs débiteurs pour une même dette douanière, ils sont tenus au paiement de cette dette à titre solidaire. »
16 L’article 217 du code des douanes prévoyait :
« 1. Tout montant de droits à l’importation ou de droits à l’exportation qui résulte d’une dette douanière, ci-après dénommé “montant de droits”, doit être calculé par les autorités douanières dès qu’elles disposent des éléments nécessaires et faire l’objet d’une inscription par lesdites autorités dans les registres comptables ou sur tout autre support qui en tient lieu (prise en compte).
[...]
2. Les modalités pratiques de prise en compte des montants de droits sont déterminées par les États membres. Ces modalités peuvent être différentes selon que les autorités douanières, compte tenu des conditions dans lesquelles la dette douanière est née, sont assurées ou non du paiement desdits montants. »
17 L’article 221, paragraphe 1, du code des douanes énonçait :
« Le montant des droits doit être communiqué au débiteur selon des modalités appropriées dès qu’il a été pris en compte. »
18 Aux termes de l’article 221, paragraphes 3 et 4, du code de douanes, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2700/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 novembre 2000 (JO L 311, p. 17) :
« 3. La communication au débiteur ne peut plus être effectuée après l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la date de la naissance de la dette douanière. Ce délai est suspendu à partir du moment où est introduit un recours au sens de l’article 243 et pendant la durée de la procédure de recours.
4. Lorsque la dette douanière résulte d’un acte qui était, au moment où il a été commis, passible de poursuites judiciaires répressives, la communication au débiteur peut, dans les conditions prévues par les dispositions en vigueur, être effectuée après l’expiration du délai de trois ans prévu au paragraphe 3. »
19 L’article 222, paragraphe 1, du code des douanes disposait :
« Tout montant de droits qui a fait l’objet de la communication visée à l’article 221 doit être acquitté par le débiteur dans les délais suivants :
a) si cette personne ne bénéficie d’aucune des facilités de paiement prévues aux articles 224 à 229, le paiement doit être effectué dans le délai qui lui est imparti.
Sans préjudice de l’article 244 deuxième alinéa, ce délai ne peut excéder dix jours à compter de la communication au débiteur du montant des droits dus et, en cas de globalisation des prises en compte dans les conditions prévues à l’article 218 paragraphe 1 deuxième alinéa, il doit être fixé de façon à ne pas permettre au débiteur d’obtenir un délai de paiement plus long que s’il avait bénéficié d’un report de paiement.
[...] »
20 L’article 232, paragraphe 1, du code des douanes prévoyait :
« Lorsque le montant de droits n’a pas été payé dans le délai fixé :
a) les autorités douanières font usage de toutes les possibilités que leur accordent les dispositions en vigueur, y inclus l’exécution forcée, pour assurer le paiement de ce montant.
Des dispositions particulières peuvent être arrêtées selon la procédure du comité dans le cadre du régime de transit à l’égard des cautions ;
b) un intérêt de retard est perçu en sus du montant des droits. Le taux de l’intérêt de retard peut être supérieur au taux de l’intérêt de crédit. Il ne peut être inférieur à ce dernier taux. »
21 Aux termes de l’article 244 du code des douanes :
« L’introduction d’un recours n’est pas suspensive de l’exécution de la décision contestée.
Toutefois, les autorités douanières sursoient en tout ou en partie à l’exécution de ladite décision lorsqu’elles ont des raisons fondées de douter de la conformité de la décision contestée à la réglementation douanière ou qu’un dommage irréparable est à craindre pour l’intéressé.
[...] »
Les faits et la procédure précontentieuse
22 Dans le cadre d’une opération de lutte contre le trafic illégal de tabacs étrangers manufacturés, la police financière italienne a, au cours des premiers mois de l’année 1997, procédé à la saisie de nombreux conteneurs à proximité du port de Palerme (Italie), dont certains, quoique vides, dégageaient une odeur de tabac. Compte tenu de la capacité des conteneurs inspectés, les autorités douanières ont supposé que 114 380 kg de tabacs avaient été importés irrégulièrement, ainsi qu’il ressort du procès-verbal du 18 juin 1997 établi par le receveur en chef du bureau des douanes de Palerme. Par la suite, une procédure pénale a été ouverte pour délit de contrebande à l’encontre de certaines personnes identifiées comme présumées responsables de ce délit.
23 En outre, les autorités italiennes ont procédé, le 30 juin 1997, à l’inscription de la dette douanière correspondante en comptabilité séparée pour les ressources propres traditionnelles, au sens de l’article 6, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1552/89. Aucune procédure de recouvrement n’a toutefois été lancée à ce stade.
24 Par jugement du Tribunale di Palermo (tribunal de Palerme, Italie) du 3 mai 1999, l’une des personnes impliquées dans l’affaire a été reconnue coupable, entre autres, de délit de contrebande. Selon le constat de cette juridiction, la personne en question avait introduit en contrebande, avec la complicité d’autres personnes, à plusieurs reprises et en exécution d’un même dessein délictueux, une quantité de tabacs étrangers manufacturés indéterminée, mais en tout état de cause supérieure à 15 kg. Ce jugement a acquis force de chose jugée le 6 avril 2002. Par la suite, un titre exécutoire a été émis à l’encontre de ladite personne le 25 août 2003 et lui a été notifié le 11 novembre suivant.
25 Le 13 février 2008, les autorités italiennes ont informé la Commission que le montant de 2 120 309,50 euros, correspondant à la dette douanière inscrite à l’origine en comptabilité séparée, devait être considéré comme irrécouvrable, conformément à l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 [communication de mise en non-valeur IT(07)08‑917]. Il ressort de cette communication que la dette douanière est née le 11 avril 1997 et a été notifiée au débiteur le 14 juillet 1997.
26 Les autorités de la République italienne ayant persisté à ne pas mettre à la disposition de la Commission le montant en question malgré des invitations répétées de cette dernière, cette institution a, le 21 novembre 2013, adressé à cet État membre une lettre de mise en demeure ainsi que, le 27 février 2015, une lettre de mise en demeure complémentaire.
27 Les autorités italiennes ont répondu à cette dernière lettre par lettre du 16 avril 2015, par laquelle elles contestaient de nouveau leur obligation de s’acquitter du montant réclamé par la Commission.
28 Le 29 avril 2016, la Commission a notifié un avis motivé à la République italienne.
29 Par lettre du 24 juin 2016, les autorités italiennes ont maintenu leur position.
30 N’étant pas satisfaite de la réponse apportée à son avis motivé, la Commission a introduit le présent recours.
Sur le recours
Argumentation des parties
31 La Commission soutient que, en l’occurrence, une importation illégale de tabacs étrangers manufacturés a effectivement eu lieu, celle-ci ayant fait naître une dette douanière, conformément à l’article 202 du code des douanes. Les autorités italiennes auraient calculé le montant de cette dette, identifié au moins un débiteur, auquel le montant des droits dus a été notifié sans être contesté, et inscrit ladite dette en comptabilité séparée. Ainsi, ces autorités auraient dû procéder sans délai à son recouvrement.
32 Toutefois, ayant attendu l’issue de la procédure pénale ouverte à l’encontre du débiteur, laquelle n’a pris fin qu’environ six ans après la constatation de la dette, c’est avec un retard extrême leur étant entièrement imputable que les autorités italiennes auraient entrepris les actions nécessaires au recouvrement de cette dette, celles-ci prenant alors le risque qu’il soit impossible de la recouvrer. En outre, ces autorités auraient constamment refusé tant de mettre à la disposition de la Commission le montant constaté que de verser des intérêts de retard. Dans ces conditions, la République italienne aurait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 8 des décisions 94/728, 2000/597, 2007/436 et 2014/335 ainsi que des articles 6, 10, 11 et 17 des règlements nos 1552/89 et 1150/2000, devenus articles 6, 10, 12 et 13 du règlement no 609/2014.
33 S’agissant, plus précisément, de la détermination du montant de la dette douanière, la Commission souligne que celle-ci incombe, en vertu de l’article 217 du code des douanes, aux autorités douanières nationales. En l’occurrence, les autorités italiennes auraient choisi d’appliquer une méthode inductive pour le calcul, en prenant comme base la capacité maximale des conteneurs inspectés. Cette méthode semblerait, en soi, valable et adéquate, compte tenu du fait que la Cour aurait accepté, dans l’arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160), une méthode de calcul de la dette douanière fondée sur l’extrapolation. En outre, la méthode de calcul n’aurait pas été contestée par le débiteur auquel ladite dette avait été notifiée.
34 De surcroît, la Commission fait observer que les autorités italiennes n’ont jamais rectifié le montant des droits constatés. Après avoir finalement lancé la procédure de recouvrement, ces autorités n’auraient pas modifié le montant de la dette et auraient demandé au débiteur le paiement de la somme qui avait été fixée dès le début de la procédure.
35 En ce qui concerne l’identification des débiteurs, la Commission fait valoir que, conformément à l’article 213 du code des douanes, il suffisait qu’un seul débiteur soit reconnu comme tel pour que celui-ci puisse être poursuivi pour le montant total de la dette. Il n’était donc pas nécessaire d’attendre que tous les débiteurs potentiels soient identifiés pour entamer la procédure de recouvrement.
36 S’agissant du délai à respecter pour engager la procédure de recouvrement, la Commission soutient que, conformément à l’article 7 et à l’article 232, paragraphe 1, sous a), du code des douanes, la prise en compte de la dette douanière et sa notification comportent l’obligation juridique de procéder immédiatement à son recouvrement. Or, en l’occurrence, il semblerait qu’aucun recours contre la décision des autorités douanières ni aucune demande de sursis à l’exécution de cette décision n’aient été présentés.
37 En tout état de cause, il conviendrait de faire la distinction entre l’obligation de procéder au recouvrement des montants dus au titre des ressources propres et une éventuelle procédure pénale, étant donné que cette dernière aurait une fonction punitive et dissuasive, et poursuivrait ainsi un but différent de celui de la procédure administrative douanière. Par ailleurs, les éléments constitutifs d’une infraction pénale ne correspondraient pas nécessairement aux éléments constitutifs de la dette douanière.
38 La République italienne conclut, à titre principal, au rejet du recours de la Commission, à titre subsidiaire, à ce que soit examinée la faisabilité d’une résolution à l’amiable du litige en établissant un montant approprié et équitable dû par elle à la Commission, et à titre encore plus subsidiaire, à ce que soit ordonné que, lors du calcul des intérêts dus sur le montant total de la dette, il soit également tenu compte des retards imputables à la Commission au stade précontentieux.
39 Cet État membre fait observer que trois éléments sont nécessaires pour la notification correcte d’une dette douanière, à savoir la constatation de l’introduction irrégulière de la marchandise, l’identification du débiteur ainsi que la détermination de la quantité et de la qualité de cette marchandise. Or, en l’occurrence, les deux premiers éléments n’auraient été identifiés que postérieurement à la décision pénale. Avant ce moment, il ne se serait agi que d’une simple présomption fondée sur un procès-verbal de constat et sur une information d’infraction. En outre, il n’aurait jamais été possible de déterminer avec exactitude la quantité et la qualité des marchandises permettant de calculer la dette fiscale.
40 Ainsi, le fait que le bureau de douane a enregistré dans la comptabilité séparée le montant des droits théoriquement détournés constituerait une erreur manifeste imputable à un excès de zèle administratif. Or, il découlerait, à cet égard, de l’arrêt du 19 mars 2009, Commission/Italie (C‑275/07, EU:C:2009:169), un principe selon lequel, en l’absence d’une dette susceptible de récupération, un État membre ne saurait être tenu financièrement responsable si, n’ayant causé aucun préjudice au budget de l’Union, il a commis des erreurs ou des manquements procéduraux. Par ailleurs, dans la mesure où l’article 8 du règlement no 1150/2000 établirait le droit pour les États membres à la récupération des droits indûment mis à la disposition de l’Union, cela impliquerait également le principe de l’inexigibilité des droits non dus et encore non versés.
41 S’agissant du calcul des droits, celui-ci aurait été effectué dans le seul but de se conformer à des exigences purement procédurales, visant à permettre l’ouverture de la procédure pénale. En revanche, il ne pourrait être pertinent aux fins de l’activité de recouvrement. De surcroît, contrairement aux faits en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160), dans le cas d’espèce, les marchandises seraient toujours restées une donnée inconnue, en termes tant qualitatifs que quantitatifs.
42 Par ailleurs, la République italienne déduit des arrêts du 18 décembre 2007, ZF Zefeser (C‑62/06, EU:C:2007:811), et du 17 juin 2010, Agra (C‑75/09, EU:C:2010:352), qu’un système dit « du préalable pénal » s’impose. En effet, si, dans le cadre d’une procédure pénale, il n’existe aucune information immédiatement disponible sur l’existence de l’obligation, de la dette et du débiteur, l’administration est tenue d’attendre le verdict du juge.
43 S’il est vrai, ainsi qu’il ressort de l’arrêt du 17 juin 2010, Commission/Italie (C‑423/08, EU:C:2010:347), que les exigences prévues à l’article 2 du règlement no 1150/2000 peuvent, dans de nombreux cas, être déduites du procès-verbal de constat de l’irrégularité, la République italienne fait valoir que tel n’était pas le cas en l’espèce, dès lors que le procès-verbal rédigé à la suite de l’enquête menée au cours de l’année 1997 ne contenait aucune information certaine relativement à l’existence de la fraude déterminant la naissance de la dette, son montant et l’identité du débiteur qui aurait pu être utilisée à des fins de constatation et de recouvrement.
44 À cet égard, la République italienne fait également référence à des dispositions du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union (JO 2013, L 269, p. 1), ainsi qu’à l’article 13 du règlement no 609/2014, dans lesquels les orientations quant à la constatation et au recouvrement d’une dette douanière auraient été traduites.
45 En ce qui concerne l’absence de rectification du montant de la dette, la République italienne soutient, tout en reconnaissant que l’administration nationale aurait très bien pu annuler cette dette de la comptabilité séparée, que la Commission a, jusqu’à présent, adopté une approche « tout sauf univoque » en la matière et n’a fourni qu’au mois de juillet 2012 une indication quant aux modalités opérationnelles à utiliser en cas d’enregistrement erroné de montants.
46 S’agissant du délai pour le recouvrement des ressources propres, la République italienne fait valoir qu’il n’existait aucune instruction administrative européenne concernant l’exigence réglementaire indéterminée d’« immédiateté », visée à l’article 7 du code des douanes. Selon la note ARES(2011)128448 de la Commission, du 4 février 2011, émise plusieurs années après le jugement pénal dans l’affaire en cause, afin de pouvoir être considérée comme entamée dans les délais, l’action de recouvrement devrait être engagée au plus tard dans les six mois à compter de l’échéance du délai accordé au contribuable pour le paiement spontané de la dette.
47 Enfin, pour ce qui est des intérêts de retard, la République italienne reproche à la Commission un manque de diligence administrative et de célérité nécessaires, qui devrait être pris en considération. En outre, elle se serait toujours montrée prête à régler le litige à l’amiable, au moyen d’un accord destiné à définir un montant jugé approprié à mettre à la disposition du budget de l’Union.
Appréciation de la Cour
48 À titre principal, la République italienne conteste l’existence même d’un droit de l’Union sur les ressources propres, dès lors que les conditions pour la constatation de la dette douanière en question n’ont jamais toutes été réunies.
49 Il convient de rappeler, à cet égard, qu’il résulte d’une lecture combinée de l’article 2, paragraphe 1, sous b), et de l’article 8, paragraphe 1, de la décision 94/728 ainsi que des dispositions correspondantes des décisions 2000/597, 2007/436 et 2014/335 que les recettes provenant des droits du tarif douanier commun constituent des ressources propres de l’Union qui sont perçues par les États membres et que ceux-ci ont l’obligation de mettre ces ressources à la disposition de la Commission.
50 Dès lors qu’un lien direct existe entre la perception des recettes provenant de ces droits et la mise à la disposition du budget de l’Union des ressources correspondantes, il incombe aux États membres de prendre les mesures nécessaires en vue de garantir le prélèvement effectif et intégral des droits de douane (voir, en ce sens, arrêt du 5 juin 2018, Kolev e.a., C‑612/15, EU:C:2018:392, points 51 et 52).
51 Dans ce contexte, l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1552/89, en vigueur à l’époque des faits, précise qu’un droit sur les ressources propres, tel qu’un droit du tarif douanier commun, est constaté dès que le montant dû est communiqué par le service compétent de l’État membre au redevable, cette communication étant effectuée dès que le redevable est connu et que le montant du droit peut être calculé par les autorités administratives compétentes.
52 Ainsi, les États membres sont tenus de constater un droit de l’Union sur les ressources propres dès que leurs autorités sont en mesure de calculer le montant des droits qui résulte d’une dette douanière et de déterminer le redevable. Lesdits États membres sont, par conséquent, obligés de reprendre lesdits droits dans la comptabilité dans les conditions prévues à l’article 6 du règlement no 1552/89 (arrêt du 1er juillet 2010, Commission/Allemagne, C‑442/08, EU:C:2010:390, point 76 et jurisprudence citée). Selon l’article 6, paragraphe 2, sous b), de ce règlement, un droit constaté qui n’a pas encore été recouvré et pour lequel aucune caution n’a été fournie est inscrit dans une comptabilité séparée.
53 En l’occurrence, il est constant que les autorités douanières italiennes ont procédé, le 30 juin 1997, à l’inscription de la dette douanière en cause en comptabilité séparée, ce qui implique que, à cette date, ces autorités avaient constaté cette dette après avoir décelé l’introduction irrégulière dans le territoire douanier de l’Union d’une marchandise passible de droits à l’importation, identifié le redevable et calculé le montant dû.
54 Les pièces de procédure viennent confirmer ces faits.
55 En effet, il doit être considéré que la prise en compte du montant de droits, au sens de l’article 217, paragraphe 1, premier alinéa, du code des douanes, a été réalisée par l’inscription du montant des droits dus dans le procès-verbal du 18 juin 1997, établi par le receveur en chef du bureau des douanes de Palerme. L’affirmation de la République italienne selon laquelle il s’agissait là d’une simple estimation hypothétique n’est pas étayée par le contenu de ce document, dont il ressort qu’il a été procédé à la liquidation des droits de douane, sans aucune indication que celle-ci aurait revêtu un caractère provisoire ou présomptif.
56 En outre, ainsi qu’il ressort de la communication de mise en non-valeur du 13 février 2008, les autorités italiennes ont été en mesure d’identifier au moins un débiteur, auquel la dette douanière a été notifiée le 14 juillet 1997. Dans la mesure où la République italienne fait valoir que, en réalité, ladite notification consistait elle aussi dans la communication d’une estimation hypothétique, elle n’a présenté, à l’appui de cette affirmation, aucun document susceptible d’infirmer ce qui ressort de la communication de mise en non-valeur.
57 Est dénuée de pertinence, dans ce contexte, la circonstance que, selon la République italienne, en réalité, il n’a jamais été possible de déterminer avec exactitude la quantité et la qualité des marchandises importées. En effet, sans qu’il soit nécessaire de vérifier, dans le cadre de la présente procédure, la détermination de la valeur en douane, force est de constater que la notification de la dette douanière au redevable identifié n’a fait l’objet d’aucun recours de sa part. Les autorités italiennes elles-mêmes n’ont d’ailleurs, à aucun moment, douté du montant de la dette constatée, étant donné que, au terme de la procédure pénale engagée, c’est précisément ce montant qu’elles ont cherché à recouvrer. De surcroît, ces autorités n’ont pas jugé utile de rectifier la dette inscrite en comptabilité séparée.
58 Dans ces conditions, ainsi qu’il résulte de l’article 17, paragraphe 1, des règlements nos 1552/89 et 1150/2000 ainsi que de l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 609/2014, la République italienne était tenue de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits constatés soient mis à la disposition de la Commission.
59 En vertu de l’article 17, paragraphe 2, des règlements nos 1552/89 et 1150/2000 ainsi que de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 609/2014, les États membres ne sont dispensés de mettre à la disposition de la Commission les montants correspondant aux droits constatés que si le recouvrement n’a pu être effectué pour des raisons de force majeure ou lorsqu’il s’avère qu’il est définitivement impossible de procéder à ce recouvrement pour des raisons qui ne peuvent leur être imputées (arrêt du 17 juillet 2014, Commission/Portugal, C‑335/12, EU:C:2014:2084, point 79 et jurisprudence citée).
60 Ainsi, un État membre qui s’abstient, après avoir constaté un droit de l’Union sur les ressources propres, de mettre le montant correspondant à la disposition de la Commission, sans que l’une des conditions prévues à l’article 17, paragraphe 2, des règlements nos 1552/89 et 1150/2000 ainsi qu’à l’article 13, paragraphe 1, du règlement no 609/2014 soit remplie, manque à ses obligations en vertu du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 3 avril 2014, Commission/Royaume-Uni, C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219, point 50, ainsi que du 17 mars 2011, Commission/Portugal, C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 61 et jurisprudence citée).
61 Par ailleurs, si une erreur commise par les autorités douanières d’un État membre a pour effet que les ressources propres de l’Union n’ont pas été recouvrées, une telle erreur ne saurait remettre en cause l’obligation de l’État membre concerné de payer les droits qui ont été constatés ainsi que les intérêts de retard (arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Italie, C‑334/08, EU:C:2010:414, point 50 et jurisprudence citée).
62 À cet égard, la Commission reproche aux autorités italiennes, en ayant attendu l’issue de la procédure pénale engagée, d’avoir entrepris les actions nécessaires au recouvrement de la dette en cause avec un retard extrême, prenant ainsi le risque qu’il soit impossible de la recouvrer.
63 Il convient de relever, dans ce contexte, que l’article 7 du code des douanes dispose que les décisions prises sont immédiatement exécutoires par les autorités douanières et que, selon l’article 244, premier alinéa, de ce code, l’introduction d’un recours n’est pas suspensive de l’exécution d’une telle décision. S’il est vrai que les autorités douanières sursoient, dans les conditions prévues à l’article 244, deuxième alinéa, en tout ou en partie à l’exécution de la décision contestée, cette dernière disposition n’est toutefois pas pertinente en l’occurrence, dès lors que la République italienne ne fait état ni de l’introduction d’un recours contre la décision douanière ni d’un sursis à l’exécution accordé par les autorités douanières. En outre, il ressort de l’article 222, paragraphe 1, sous a), du code des douanes que, en l’absence de facilité de paiement accordée au débiteur, le montant des droits communiqué à ce dernier doit être acquitté dans le délai qui lui est imparti, lequel ne peut excéder dix jours à compter de la communication au débiteur. De surcroît, l’article 232, paragraphe 1, sous a), du code des douanes prévoit que, lorsque le montant de droits n’a pas été payé dans le délai fixé, les autorités douanières font usage de toutes les possibilités que leur accordent les dispositions en vigueur, y inclus l’exécution forcée, pour assurer le paiement de ce montant.
64 Il s’ensuit que les autorités italiennes auraient dû prendre les mesures d’exécution nécessaires.
65 En revanche, la thèse défendue par la République italienne, selon laquelle ses autorités étaient autorisées à attendre la résolution de la procédure pénale engagée dès lors qu’un « préalable pénal » s’impose avant que l’action en recouvrement ne soit lancée, ne trouve de fondement ni dans l’arrêt du 18 décembre 2007, ZF Zefeser (C‑62/06, EU:C:2007:811), ni dans celui du 17 juin 2010, Agra (C‑75/09, EU:C:2010:352), auxquels cet État membre renvoie à cet égard.
66 D’une part, l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 18 décembre 2007, ZF Zefeser (C‑62/06, EU:C:2007:811), concernait l’interprétation de la notion d’« acte passible de poursuites judiciaires répressives », visée à l’article 3, premier alinéa, du règlement (CEE) no 1697/79 du Conseil, du 24 juillet 1979, concernant le recouvrement « a posteriori » des droits à l’importation ou des droits à l’exportation qui n’ont pas été exigés du redevable pour des marchandises déclarées pour un régime douanier comportant l’obligation de payer de tels droits (JO 1979, L 197, p. 1). À cet égard, la Cour a jugé que la qualification d’un acte d’« acte passible de poursuites judiciaires répressives » relève de la compétence des autorités douanières appelées à déterminer le montant exact des droits à l’importation ou à l’exportation en cause (arrêt du 18 décembre 2007, ZF Zefeser, C‑62/06, EU:C:2007:811, point 26). Or, outre le fait que le règlement no 1697/79 n’est pas pertinent en l’occurrence dans la mesure où la présente affaire ne concerne pas des marchandises déclarées, il peut précisément être déduit de cet arrêt que la procédure douanière n’est pas subordonnée au résultat d’une éventuelle procédure pénale, contrairement à ce que cherche à démontrer la République italienne (voir, en ce sens, arrêt du 18 décembre 2007, ZF Zefeser, C‑62/06, EU:C:2007:811, points 28 et 29).
67 D’autre part, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 17 juin 2010, Agra (C‑75/09, EU:C:2010:352), la Cour était appelée à interpréter l’article 221, paragraphes 3 et 4, du code des douanes, tel que modifié par le règlement n° 2700/2000, dont il résulte une règle de prescription selon laquelle la communication du montant des droits à payer doit, en principe, être effectuée dans un délai de trois ans à compter de la date de la naissance de la dette douanière, ou, à titre d’exception, peut être effectuée après l’expiration de ce délai lorsque c’est par suite d’un acte passible de poursuites judiciaires répressives que les autorités compétentes n’ont pas été en mesure de déterminer le montant exact des droits légalement dus (voir, en ce sens, arrêt du 17 juin 2010, Agra, C‑75/09, EU:C:2010:352, points 30 et 32 ainsi que jurisprudence citée). Or, étant donné que, en l’occurrence, il a été possible de déterminer le montant des droits dus et que ce montant a été notifié au débiteur, cet arrêt n’est pas non plus pertinent.
68 Par conséquent, dans la mesure où les autorités italiennes ont attendu l’issue de la procédure pénale engagée, laquelle ne s’est terminée qu’au terme d’une période de six ans après que la dette douanière a été inscrite en comptabilité séparée, le fait que le recouvrement s’est avéré impossible est imputable à la République italienne, de sorte que celle-ci n’était pas dispensée de mettre à la disposition de la Commission les droits constatés.
69 En omettant de procéder de la sorte, la République italienne s’est également rendue redevable des intérêts de retard.
70 En effet, selon une jurisprudence constante de la Cour, il existe un lien indissociable entre l’obligation de constater les ressources propres de l’Union, celle de les inscrire au compte de la Commission dans les délais impartis et, enfin, celle de verser des intérêts de retard (arrêt du 3 avril 2014, Commission/Royaume-Uni, C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219, point 58 et jurisprudence citée).
71 En vertu de l’article 11 des règlements nos 1552/89 et 1150/2000 ainsi que de l’article 12 du règlement no 609/2014, tout retard dans les inscriptions au compte visé à l’article 9, paragraphe 1, des mêmes règlements donne lieu au paiement par l’État membre concerné d’intérêts applicables à toute la période du retard, indépendamment de la raison du retard et d’un délai fixé par la Commission pour la mise à disposition des ressources propres (voir, en ce sens, arrêts du 17 mars 2011, Commission/Portugal, C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 62 et jurisprudence citée, ainsi que du 3 avril 2014, Commission/Royaume-Uni, C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219, point 59).
72 S’agissant des conséquences financières préjudiciables, la République italienne aurait pu les éviter en mettant à la disposition de la Commission les montants réclamés, tout en formulant des réserves quant au bien-fondé de la thèse défendue par cette institution (arrêt du 12 septembre 2000, Commission/Royaume-Uni, C‑359/97, EU:C:2000:426, point 31 et jurisprudence citée).
73 Il s’ensuit que l’argument de la République italienne selon lequel, aux fins de déterminer les intérêts de retard à payer, il conviendrait de tenir compte des retards causés par un prétendu défaut de diligence administrative et de célérité de la part de la Commission ne saurait prospérer, sans qu’il soit nécessaire de déterminer si de tels retards peuvent être établis en l’espèce.
74 S’agissant, enfin, de la demande de la République italienne visant à examiner la faisabilité d’une résolution à l’amiable du litige en établissant un montant approprié et équitable dont elle serait redevable à la Commission, il convient de rappeler que la procédure précontentieuse a pour but de donner à l’État membre concerné l’occasion, d’une part, de se conformer à ses obligations découlant du droit de l’Union et, d’autre part, de faire utilement valoir ses moyens de défense à l’encontre des griefs formulés par la Commission et, ainsi, d’entamer un processus de négociation et de parvenir à une résolution à l’amiable entre la Commission et l’État membre concerné mettant fin au manquement reproché, afin de permettre que le droit de l’Union soit respecté et d’éviter un recours juridictionnel (voir, en ce sens, arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, points 62 et 63, ainsi que du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 72 et jurisprudence citée).
75 Toutefois, le recours introduit au titre de l’article 258 TFUE a pour objet de constater le manquement par un État membre à ses obligations communautaires. La constatation d’un tel manquement oblige, selon les termes mêmes de l’article 260 TFUE, l’État membre en cause à prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour. En revanche, celle-ci ne peut pas ordonner des mesures déterminées. Par conséquent, la Cour ne saurait, dans le cadre d’un recours en manquement, se prononcer sur un moyen en défense visant, comme en l’espèce, à ce qu’elle facilite la résolution à l’amiable du litige (voir, par analogie, arrêt du 14 avril 2005, Commission/Allemagne, C‑104/02, EU:C:2005:219, points 49 et 50).
76 Ainsi, eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que, en refusant de mettre à disposition des ressources propres traditionnelles d’un montant de 2 120 309,50 euros, indiquées dans la communication de mise en non-valeur IT(07)08‑917, la République italienne a manqué aux obligations lui incombant en vertu de l’article 8 de la décision 94/728, de l’article 8 de la décision 2000/597, de l’article 8 de la décision 2007/436 et de l’article 8 de la décision 2014/335, ainsi que des articles 10, 11 et 17 du règlement no 1552/89, des articles 10, 11 et 17 du règlement no 1150/2000, et des articles 10, 12 et 13 du règlement no 609/2014.
77 En revanche, ne saurait être constaté un manquement à l’article 6 du règlement no 1552/89 (devenu article 6 du règlement no 1150/2000, puis article 6 du règlement no 609/2014), dès lors que les autorités italiennes ont, en l’occurrence, inscrit les droits constatés en comptabilité séparée, tel que prévu par cette disposition.
Sur les dépens
78 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 138, paragraphe 3, de ce règlement, lorsque les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens, à moins que, au vu des circonstances de l’espèce, la Cour estime qu’il est justifié qu’une partie supporte, outre ses propres dépens, une fraction des dépens de l’autre partie.
79 En l’occurrence, la Commission a conclu à la condamnation de la République italienne aux dépens. Par ailleurs, la République italienne a succombé dans le cadre des premier, troisième, quatrième et cinquième griefs invoqués par la Commission, et celle-ci dans le cadre de son deuxième grief.
80 Eu égard à ce qui précède, il convient de condamner la République italienne aux quatre cinquièmes des dépens exposés par la Commission et de décider que, pour le surplus, chaque partie supporte ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête :
1) En refusant de mettre à disposition des ressources propres traditionnelles d’un montant de 2 120 309,50 euros, indiquées dans la communication de mise en non-valeur IT(07)08‑917, la République italienne a manqué aux obligations lui incombant en vertu de l’article 8 de la décision 94/728/CE, Euratom du Conseil, du 31 octobre 1994, relative au système des ressources propres des Communautés européennes, de l’article 8 de la décision 2000/597/CE, Euratom du Conseil, du 29 septembre 2000, relative au système des ressources propres des Communautés européennes, de l’article 8 de la décision 2007/436/CE, Euratom du Conseil, du 7 juin 2007, relative au système des ressources propres des Communautés européennes, et de l’article 8 de la décision 2014/335/UE, Euratom du Conseil, du 26 mai 2014, relative au système des ressources propres de l’Union européenne, ainsi que des articles 10, 11 et 17 du règlement (CEE, Euratom) no 1552/89 du Conseil, du 29 mai 1989, portant application de la décision 88/376/CEE, Euratom, relative au système des ressources propres des Communautés, des articles 10, 11 et 17 du règlement (CE, Euratom) no 1150/2000 du Conseil, du 22 mai 2000, portant application de la décision 94/728, et des articles 10, 12 et 13 du règlement (UE, Euratom) no 609/2014 du Conseil, du 26 mai 2014, relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres traditionnelles, de la ressource propre fondée sur la TVA et de la ressource propre fondée sur le RNB et aux mesures visant à faire face aux besoins de trésorerie.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) La République italienne est condamnée aux quatre cinquièmes des dépens exposés par la Commission européenne et supporte ses propres dépens.
4) La Commission européenne supporte le cinquième de ses propres dépens.
Signatures
* Langue de procédure : l’italien.
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