BAILII is celebrating 24 years of free online access to the law! Would you consider making a contribution?
No donation is too small. If every visitor before 31 December gives just £1, it will have a significant impact on BAILII's ability to continue providing free access to the law.
Thank you very much for your support!
[Home] [Databases] [World Law] [Multidatabase Search] [Help] [Feedback] | ||
Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
||
You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> ISS Facility Services (Social policy - Opinion) French Text [2019] EUECJ C-344/18_O (26 November 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/C34418_O.html Cite as: [2019] EUECJ C-344/18_O, ECLI:EU:C:2019:1009, EU:C:2019:1009 |
[New search] [Contents list] [Help]
Édition provisoire
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. MACIEJ SZPUNAR
présentées le 26 novembre 2019 (1)
Affaire C‑344/18
ISS Facility Services NV
contre
Sonia Govaerts,
Atalian NV, anciennement Euroclean NV
[demande de décision préjudicielle formée par l’arbeidshof te Gent (cour du travail de Gand, Belgique)]
« Renvoi préjudiciel – Directive 2001/23/CE – Article 3, paragraphe 1 – Transferts d’entreprises – Maintien des droits des travailleurs – Marché public concernant les services de nettoyage – Attribution des lots du marché à deux nouveaux adjudicataires – Reprise d’un travailleur de l’ancien adjudicataire unique affecté à tous les lots du marché – Conséquences du transfert d’une entité économique à deux cessionnaires »
I. Introduction
1. Dans la présente affaire, l’arbeidshof te Gent (cour du travail de Gand, Belgique) a déféré à la Cour une question préjudicielle relative à l’interprétation de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/23/CE (2).
2. Cette question a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Sonia Govaerts à, d’une part, ISS Facility Services NV, auprès de laquelle elle était employée, et, d’autre part, Atalian NV, au sujet de son licenciement et de ses conséquences à la suite de la réadjudication à celle-ci du marché public initialement détenu par celle-là.
3. L’examen de cette question conduira la Cour à se pencher pour la première fois sur les conséquences du transfert d’une entité économique à deux cessionnaires sur le maintien des droits et des obligations des travailleurs conférés à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/23.
II. Le cadre juridique
A. Le droit de l’Union
4. Le considérant 3 de la directive 2001/23 énonce :
« Des dispositions sont nécessaires pour protéger les travailleurs en cas de changement de chef d’entreprise en particulier pour assurer le maintien de leurs droits. »
5. L’article 1er, paragraphe 1, sous a) et b), de cette directive prévoit :
« a) La présente directive est applicable à tout transfert d’entreprise, d’établissement ou de partie d’entreprise ou d’établissement à un autre employeur résultant d’une cession conventionnelle ou d’une fusion.
b) Sous réserve du point a) et des dispositions suivantes du présent article, est considéré comme transfert, au sens de la présente directive, celui d’une entité économique maintenant son identité, entendue comme un ensemble organisé de moyens, en vue de la poursuite d’une activité économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire. »
6. L’article 2, paragraphe 2, de ladite directive est rédigé comme suit :
« La présente directive ne porte pas atteinte au droit national en ce qui concerne la définition du contrat ou de la relation de travail.
Cependant, les États membres ne sauraient exclure du champ d’application de la présente directive les contrats ou relations de travail uniquement du fait :
a) du nombre d’heures de travail effectué ou à effectuer ;
[...] »
7. Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de cette même directive :
« Les droits et les obligations qui résultent pour le cédant d’un contrat de travail ou d’une relation de travail existant à la date du transfert sont, du fait de ce transfert, transférés au cessionnaire. »
8. En vertu de l’article 4 de la directive 2001/23 :
« 1. Le transfert d’une entreprise, d’un établissement ou d’une partie d’entreprise ou d’établissement ne constitue pas en lui-même un motif de licenciement pour le cédant ou le cessionnaire. Cette disposition ne fait pas obstacle à des licenciements pouvant intervenir pour des raisons économiques, techniques ou d’organisation impliquant des changements sur le plan de l’emploi.
[...]
2. Si le contrat de travail ou la relation de travail est résilié du fait que le transfert entraîne une modification substantielle des conditions de travail au détriment du travailleur, la résiliation du contrat de travail ou de la relation de travail est considérée comme intervenue du fait de l’employeur. »
B. Le droit belge
9. La convention collective de travail nº 32 bis, du 7 juin 1985, concernant le maintien des droits des travailleurs en cas de changement d’employeur du fait d’un transfert conventionnel d’entreprise et réglant les droits des travailleurs repris en cas de reprise de l’actif après faillite ou concordat judiciaire par abandon d’actif, rendue obligatoire par arrêté royal du 25 juillet 1985 (3), telle que modifiée par la convention collective de travail nº 32 quinquies du 13 mars 2002, rendue obligatoire par arrêté royal du 14 mars 2002 (4) (ci-après la « convention collective nº 32 bis »), transpose en droit belge la directive 2001/23.
10. Aux termes de l’article 1er de la convention collective nº 32 bis :
« La présente convention collective de travail a pour objet en premier lieu de garantir :
1° d’une part, le maintien des droits des travailleurs dans tous les cas de changement d’employeur du fait du transfert conventionnel d’une entreprise ou d’une partie d’entreprise ; le transfert réalisé dans le cadre d’un concordat judiciaire est un transfert conventionnel auquel s’applique le principe du maintien des droits des travailleurs sous réserve des exceptions fixées à l’article 8 bis de la présente convention collective de travail ;
2° d’autre part, certains droits aux travailleurs repris en cas de reprise d’actif après faillite.
En outre, la présente convention règle l’information des travailleurs concernés par un transfert lorsqu’il n’y a pas de représentants des travailleurs dans l’entreprise. »
11. Aux termes de l’article 2 de la convention collective nº 32 bis :
« Pour l’application de la présente convention collective de travail, il faut entendre par :
1° travailleurs : les personnes qui, en vertu d’un contrat de travail ou d’apprentissage, fournissent des prestations de travail ;
2° employeurs : les personnes physiques ou morales qui occupent les personnes visées au 1° ;
3° cédant : la personne physique ou morale qui, du fait d’un transfert au sens de l’article 1er, perd la qualité d’employeur à l’égard des travailleurs de l’entreprise transférée ou de la partie d’entreprise transférée ;
4° cessionnaire : la personne physique ou morale qui, du fait d’un transfert au sens de l’article 1er, acquiert la qualité d’employeur à l’égard des travailleurs de l’entreprise transférée ou de la partie d’entreprise transférée ;
[...] »
12. L’article 6 de la convention collective nº 32 bis prévoit :
« Le présent chapitre est applicable à tout changement d’employeur résultant d’un transfert conventionnel d’une entreprise ou d’une partie d’entreprise, à l’exclusion des cas visés au chapitre III de cette convention collective de travail.
Sous réserve des dispositions de l’alinéa 1er, est considéré dans la présente convention collective de travail comme transfert, le transfert d’une entité économique maintenant son identité, entendue comme un ensemble organisé de moyens, en vue de la poursuite d’une activité économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire. »
13. L’article 7 de la convention collective nº 32 bis est libellé comme suit :
« Les droits et obligations qui résultent pour le cédant de contrats de travail existant à la date du transfert au sens de l’article 1er, 1°, sont, du fait de ce transfert, transférés au cessionnaire. »
14. L’article 10 de la convention collective nº 32 bis dispose :
« Si le contrat de travail est résilié parce que le transfert, au sens de l’article 1er, 1°, entraîne une modification substantielle des conditions de travail au désavantage du travailleur, la résiliation du contrat de travail est considérée comme intervenue du fait de l’employeur. »
III. Les faits à l’origine du litige au principal, la question préjudicielle et la procédure devant la Cour
15. Mme Govaerts était employée en tant que femme de ménage depuis le 16 novembre 1992 par la société Multiple Immo Services NV, puis par ses successeurs en droit, d’abord la société CCA NV puis la société ISS Facility Services. Elle était liée à son employeur par trois contrats de travail à temps partiel distincts.
16. Le 1er septembre 2004, Mme Govaerts a conclu un nouveau contrat de travail à durée indéterminée avec ISS Facility Services, tout en conservant son ancienneté acquise depuis le 16 novembre 1992. ISS Facility Services était chargée du nettoyage et de l’entretien de divers bâtiments de la ville de Gand répartis en trois lots. Le premier comprenait les musées et bâtiments historiques, le deuxième, les bibliothèques et les centres communautaires et, le troisième, les bâtiments administratifs. Le 1er avril 2013, Mme Govaerts est devenue gestionnaire d’antenne des trois chantiers correspondant à ces lots. Elle a été en incapacité de travail du 23 avril au 26 juillet 2013.
17. La ville de Gand a lancé un appel d’offres relatif à l’ensemble des lots susmentionnés, pour la période comprise entre le 1er septembre 2013 et le 31 août 2016. À l’issue de cette procédure, le 13 juin 2013, ISS Facility Services n’a pas été retenue. Le premier et le troisième lot ont été attribués à Atalian, tandis que le deuxième lot a été attribué à Cleaning Masters.
18. Le 1er juillet 2013, ISS Facility Services a informé Atalian que, étant donné que Mme Govaerts travaillait à temps plein sur ces chantiers, qui avaient été repris par Atalian à hauteur d’environ 85 %, la convention collective nº 32 bis devait lui être appliquée. Atalian a contesté cette analyse dès le 3 juillet 2013.
19. Par lettre recommandée du 30 août 2013, ISS Facility Services a informé Mme Govaerts que, en raison du transfert d’entreprise et de son affectation sur les chantiers correspondant aux lots 1 et 3, elle entrerait au service d’Atalian à compter du 1er septembre 2013, date à partir de laquelle elle ne ferait plus partie du personnel d’ISS Facility Services. En conséquence, ISS Facility Services a délivré à Mme Govaerts une attestation de chômage mentionnant la date du 31 août 2013 comme dernier jour d’emploi.
20. Par lettre recommandée du 30 août 2013, ISS Facility Services a indiqué à Atalian que le contrat de travail de Mme Govaerts lui serait transféré de plein droit à compter du 1er septembre 2013 et que, à partir du lundi 2 septembre 2013, Mme Govaerts ne pourrait s’adresser qu’à Atalian.
21. Le 3 septembre 2013, Atalian a fait savoir à ISS Facility Services qu’elle ne considérait pas qu’il y avait eu transfert d’entreprise au sens de la convention collective nº 32 bis et que, dès lors, aucune relation contractuelle ne la liait à Mme Govaerts.
22. Le 18 novembre 2013, Mme Govaerts a formé un recours à l’encontre tant d’ISS Facility Services que d’Atalian devant l’arbeidsrechtbank te Gent (tribunal du travail de Gand, Belgique) aux fins d’obtenir le versement d’indemnités de préavis, d’une prime de fin d’année pro rata temporis, ainsi que d’un pécule de vacances pour les périodes de référence annuelles 2012 et 2013.
23. Par jugement du 15 octobre 2015, cette juridiction a estimé que le licenciement de Mme Govaerts était irrégulier et a condamné ISS Facility Services au versement d’une indemnité de préavis de 81 561,07 euros, d’une prime de fin d’année de 1 841,92 euros et d’un pécule de vacances de 4 343,28 euros, ces trois montants étant majorés des intérêts. Le recours dirigé contre Atalian a quant à lui été jugé irrecevable.
24. Cette juridiction a notamment jugé que la convention collective nº 32 bis n’était pas applicable à Mme Govaerts dans la mesure où celle‑ci s’occupait, en tant que gestionnaire d’antenne, de la planification des travaux de nettoyage et de leur exécution, c’est-à-dire qu’elle était chargée des tâches administratives et organisationnelles et ne participait pas, sur les chantiers de la ville de Gand, aux travaux de nettoyage qui faisaient l’objet du transfert. En conséquence, Mme Govaerts n’était pas automatiquement entrée au service d’Atalian le 1er septembre 2013.
25. ISS Facility Services a interjeté appel de ce jugement devant l’arbeidshof te Gent (cour du travail de Gand). Elle soutient que, en application de la convention collective nº 32 bis, le contrat de travail de Mme Govaerts a été transféré, à compter du 1er septembre 2013, à hauteur de 85 % à Atalian et à hauteur de 15 % à Cleaning Masters.
26. Contrairement à l’arbeidsrechtbank te Gent (tribunal du travail de Gand), la juridiction de renvoi considère que, dans la présente affaire, l’identité de l’entité économique a été maintenue au sens de l’article 1er de la directive 2001/23 et qu’il y a donc eu transfert d’entreprise au sens de cette disposition. Elle en déduit que, conformément à l’article 7 de la convention collective nº 32 bis, qui reprend l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/23, les droits et les obligations résultant pour le cédant des contrats de travail existant à la date du transfert, soit le 1er septembre 2013, ont été, du fait de ce transfert, transférés de plein droit à Atalian et à Cleaning Masters en leur qualité de cessionnaires.
27. Dans la mesure où les tâches de Mme Govaerts concernent exclusivement les chantiers de la ville de Gand, la juridiction de renvoi estime que celle-ci faisait partie, au 1er septembre 2013, de l’entreprise transférée. Elle s’interroge dès lors sur les conséquences, au regard de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/23, de ce transfert d’entreprise quant au contrat de travail de Mme Govaerts.
28. C’est dans ces conditions que l’arbeidshof te Gent (cour du travail de Gand) a, par décision du 14 mai 2018, parvenue au greffe de la Cour le 25 mai 2018, décidé de surseoir à statuer afin de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« Convient-il d’interpréter l’article 3, paragraphe 1, de la directive [2001/23] en ce sens que, en cas de transfert simultané de plusieurs parties d’une entreprise au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de [cette directive], [...] à plusieurs cessionnaires, les droits et obligations qui résultent du contrat de travail, existant à la date du transfert, d’un travailleur qui était employé dans chacune des parties transférées, sont transférés à chacun des cessionnaires, proportionnellement toutefois à l’étendue de l’emploi du travailleur en question dans la partie de l’entreprise acquise par chacun des cessionnaires,
ou bien [en ce sens] que les droits et obligations susmentionnés sont transférés en totalité au cessionnaire ayant acquis la partie de l’entreprise dans laquelle le travailleur en question était employé à titre principal,
ou encore [en ce sens] que, si les dispositions de [ladite] directive ne sauraient être interprétées d’aucune des manières susmentionnées, il n’y a transfert des droits et obligations résultant du contrat de travail du travailleur en question à aucun des cessionnaires, ce qui est également le cas lorsqu’il n’est pas possible de déterminer séparément l’étendue de l’emploi du travailleur dans chacune des parties transférées de l’entreprise ? »
29. Des observations écrites ont été déposées par Mme Govaerts, ISS Facility Services, Atalian ainsi que par la Commission européenne. Toutes les parties ont comparu pour présenter leurs observations orales lors de l’audience qui s’est tenue le 8 mai 2019.
IV. Analyse
A. Remarques liminaires
30. Le premier et le deuxième considérant de la directive 77/187/CEE (5) énonçaient que « l’évolution économique entraîne sur le plan national et communautaire des modifications des structures des entreprises qui s’effectuent, entre autres, par des transferts d’entreprises, d’établissements ou de parties d’établissements à d’autres chefs d’entreprise, résultant de cessions ou de fusions » et que, dans ce contexte, « des dispositions sont nécessaires pour protéger les travailleurs [...] en particulier pour assurer le maintien de leurs droits ».
31. Ces considérants ont été repris dans la directive 2001/23, qui a abrogé et remplacé la directive 77/187 (6).
32. Il convient de rappeler brièvement, ainsi que la Cour l’a souligné dans sa jurisprudence, que la directive 77/187 ne vise qu’à une harmonisation partielle du droit national du travail, en étendant, pour l’essentiel, la protection garantie aux travailleurs de façon autonome par le droit des différents États membres également à l’hypothèse d’un transfert de l’entreprise (7). La Cour a itérativement jugé que la directive 2001/23 tend à assurer le maintien des droits des travailleurs en cas de changement de chef d’entreprise en leur permettant de rester au service du nouvel employeur dans les mêmes conditions que celles convenues avec le cédant (8). Selon la Cour, l’objet de la directive 2001/23 est donc d’assurer, autant que possible, la continuation du contrat de travail ou de la relation de travail, sans modification, avec le cessionnaire, afin d’empêcher que les travailleurs concernés par le transfert de l’entreprise ne soient placés dans une position moins favorable du seul fait de ce transfert (9). La directive 2001/23 n’a cependant pas pour but d’éviter les restructurations des entreprises visant à les rendre plus compétitives et efficaces. En effet, cette directive n’aborde que les conséquences sociales de telles restructurations en en atténuant les effets. Si, conformément à l’objectif de ladite directive, il y a lieu de protéger les intérêts des travailleurs concernés par le transfert, il ne saurait cependant être fait abstraction de ceux du cessionnaire, qui doit être en mesure de procéder aux ajustements et aux adaptations nécessaires à la continuation de son activité (10). Ainsi que l’a également rappelé la Cour dans sa jurisprudence, la directive 2001/23 ne vise pas uniquement à sauvegarder, lors d’un transfert d’entreprise, les intérêts des travailleurs, mais entend assurer un juste équilibre entre les intérêts de ces derniers, d’une part, et ceux du cessionnaire, d’autre part (11).
33. La directive 77/187 a tout d’abord été modifiée sur le fond par la directive 98/50/CE (12) afin de tenir compte de la jurisprudence de la Cour et a ensuite été codifiée, sans modifications sur le fond, par la directive 2001/23. Notamment, la notion de « transfert d’entreprise » a été introduite par la directive 98/50 et figure à l’article 1er, paragraphe 1, sous b), de la directive 2001/23. Dès lors, la jurisprudence de la Cour sur la directive 77/187 se révèle très utile pour l’interprétation des dispositions de la directive 2001/23. Cette jurisprudence, dans la mesure où elle est essentiellement fondée sur une appréciation au cas par cas, est également utile pour comprendre la notion de « transfert d’entreprise » au sens de la directive 2001/23 et les conséquences, pour un travailleur, d’un tel transfert en vertu de l’article 3, paragraphe 1, de cette directive.
B. Sur la question préjudicielle
34. Il ressort du cadre factuel et juridique de l’affaire en cause au principal que Mme Govaerts était employée par ISS Facility Services en tant que responsable pour les services de nettoyage et d’entretien prestés par cette entreprise pour la ville de Gand. Ce marché, qui concernait des bâtiments municipaux répartis en trois lots, a fait l’objet d’un nouvel appel d’offres, à l’issue duquel ces lots ont été attribués à deux nouvelles entreprises de nettoyage, la société Atalian, d’une part, qui a obtenu deux lots, et la société Cleaning Masters, d’autre part, qui a obtenu un lot.
35. Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi interroge la Cour, en substance, sur le point de savoir si l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/23 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale en vertu de laquelle, en cas de transfert simultané à plusieurs cessionnaires de plusieurs parties d’une entreprise au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de cette directive, les droits et les obligations résultant d’un contrat de travail existant à la date du transfert, pour chacune des parties de l’entreprise transférée, sont transférés auprès de chacun des cessionnaires au prorata des fonctions exercées par le travailleur.
36. Pour répondre à cette question, il convient de déterminer au préalable si la directive 2001/23 est applicable au cas d’espèce. En effet, la directive 2001/23 n’a vocation à s’appliquer à l’affaire au principal que si nous sommes en présence d’un « transfert d’entreprise » au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de cette directive.
37. Je rappelle, tout d’abord, que les appréciations de fait nécessaires en vue d’établir l’existence ou non d’un transfert d’entreprise relèvent de la compétence de la juridiction nationale, compte tenu des éléments d’interprétation spécifiés dans la jurisprudence de la Cour (13).
38. Il convient de constater que, si la juridiction de renvoi, dans sa décision, n’exprime pas de doutes quant à l’applicabilité de la directive 2001/23 au litige au principal, les parties ayant présenté des observations devant la Cour ont en revanche défendu une position différente sur le point de savoir s’il s’agit ou non d’un « transfert d’entreprise » au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de cette directive.
39. ISS Facility Services et la Commission soutiennent que l’entité économique a été transférée au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 2001/23. En revanche, Mme Govaerts et Atalian font valoir qu’il ne peut y avoir transfert d’entreprise au sens de cette disposition lorsqu’une entité économique est transférée à plusieurs cessionnaires.
40. Il s’ensuit que j’examinerai, en premier lieu, l’applicabilité de la directive 2001/23, avant de clarifier, en second lieu, l’étendue de la protection des droits et des obligations des travailleurs conférée à l’article 3, paragraphe 1, de cette directive.
1. La question de l’applicabilité de la directive 2001/23
41. Il convient de rappeler, tout d’abord, qu’en vertu de l’article 1er, paragraphe 1, sous c), de la directive 2001/23, celle-ci s’applique aux entreprises publiques et privées exerçant une activité économique, qu’elles poursuivent ou non un but lucratif. Par ailleurs, le transfert d’une activité économique d’une personne morale de droit public vers une personne morale de droit privé (14) ou, à l’inverse, d’une entreprise privée vers le secteur public (15) n’est pas exclu du champ d’application de ladite directive. En effet, seule la réorganisation de structures de l’administration publique, ou le transfert d’attributions administratives entre les administrations publiques, en est exclue (16). Il s’ensuit que le fait que l’une des parties intéressées soit, comme dans le litige au principal, une municipalité, à savoir, en l’espèce, la ville de Gand, ne s’oppose pas, en soi, à ce que la directive 2001/23 soit applicable (17).
42. Ensuite, il ressort des termes mêmes de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), de la directive 2001/23 que l’application de celle-ci est soumise à trois conditions : le transfert doit opérer un changement d’employeur, il doit porter sur une entreprise, un établissement ou une partie d’établissement, et il doit résulter d’une convention. Ces trois conditions ont déjà été examinées par la Cour dans une jurisprudence abondante. Par souci de clarté, je souhaite néanmoins revenir brièvement sur chacune d’entre elles, en me limitant aux aspects liés aux particularités de la présente affaire.
a) Le transfert doit être lié au changement d’employeur et résulter d’une convention
43. S’agissant des deux conditions selon lesquelles le transfert doit être lié au changement d’employeur et résulter d’une convention, il y a lieu de rappeler que la Cour, dans sa jurisprudence, a considéré que la notion de « cession conventionnelle » au sens de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), de la directive 2001/23 doit être interprétée de manière « suffisamment souple pour répondre à l’objectif de la directive qui est de protéger les salariés en cas de transfert de leur entreprise » (18). Ainsi, la Cour a jugé à maintes reprises que le champ d’application de la directive 2001/23 s’étend à « toutes les hypothèses de changement, dans le cadre de relations contractuelles, de la personne physique ou morale responsable de l’exploitation de l’entreprise, qui contracte les obligations d’employeurs vis-à-vis des employés de l’entreprise » (19), sans qu’il importe de savoir si la propriété de l’entreprise est transférée ou s’il existe des relations contractuelles directes entre le cédant et le cessionnaire (20). Par conséquent, la Cour, en se fondant toujours sur l’objectif poursuivi par la directive 2001/23, a jugé que celle-ci est susceptible de s’appliquer indépendamment de la nature de l’opération juridique par laquelle une entreprise succède à une autre entreprise et de l’absence de liens contractuels directs entre les employeurs successifs (21). Il découle clairement de cette jurisprudence que les modalités du transfert sont dénuées de pertinence.
44. En outre, la Cour a confirmé dans sa jurisprudence l’application de la directive 2001/23 aux marchés de services (22), y compris les marchés publics (23). Ainsi, lorsqu’un marché public concernant les services de nettoyage des bâtiments municipaux, comme c’est le cas en l’espèce, fait l’objet d’un nouvel appel d’offres, à l’issue duquel il est attribué à un ou plusieurs nouveaux adjudicataires, l’applicabilité de cette directive n’est, en principe, pas exclue.
45. Je tiens également à rappeler que la Cour a déjà estimé que la circonstance que les dispositions d’une convention collective imposent à la nouvelle entreprise une subrogation dans les contrats de travail est, en tout état de cause, sans incidence sur le fait que le transfert porte sur une entité économique (24). Il résulte de cette jurisprudence que le champ d’application de la directive 2001/23 ne se limite pas aux seuls transferts opérés par des conventions conclues de manière volontaire entre les parties concernées et comprend également les transferts qui sont fondés sur une obligation prévue par une convention collective.
46. Dès lors, le fait que le transfert de l’ensemble du personnel effectuant des travaux de nettoyage n’est pas fondé sur une volonté autonome des parties concernées, mais sur une obligation prévue par une convention collective sectorielle, n’exclut pas la présente affaire du champ d’application de cette directive (25).
b) Le transfert doit porter sur une entreprise, un établissement ou une partie d’établissement
47. En ce qui concerne la condition selon laquelle le transfert doit porter sur une entreprise, un établissement ou une partie d’établissement, Mme Govaerts fait valoir, contrairement à ce qu’a jugé la juridiction de renvoi, qu’il ne peut y avoir transfert d’entreprise au sens de l’article 1er de la directive 2001/23 lorsqu’une entité économique est transférée à plusieurs cessionnaires. Mme Govaerts soutient, en se fondant sur les points 36 et 41 de l’arrêt CLECE (26) relatif au transfert d’entreprise dans le cadre d’une adjudication des services de nettoyage, ainsi que sur l’arrêt Botzen e.a. (27), qu’un transfert d’entreprise n’englobe pas les travailleurs qui, étant affectés à un service administratif de l’entreprise qui n’a pas été lui-même transféré, effectuaient certaines tâches au profit de la partie transférée de l’entreprise. Mme Govaerts en déduit (28) que, n’ayant pas été durablement et spécialement affectée à un ou à plusieurs des services transférés, elle ne relevait pas de l’entité économique ayant fait l’objet d’un transfert d’entreprise. Elle précise avoir « à peine » travaillé sur les chantiers de nettoyage en cause, compte tenu de la date à laquelle ces derniers lui ont été confiés et de son incapacité de travail durant la période comprise entre le 23 avril et le 26 juillet 2013.
48. Je ne suis pas convaincu par cette argumentation qui, à mon avis, est fondée sur une lecture erronée de ces arrêts.
49. Premièrement, je tiens à rappeler que la notion de « travailleur » au sens de la directive 2001/23 est définie à l’article 2, paragraphe 1, sous d), de celle-ci comme « toute personne qui, dans l’État membre concerné, est protégée en tant que travailleur dans le cadre de la législation nationale sur l’emploi » (29). Une telle personne, dès lors qu’elle est protégée par la réglementation nationale en tant que salariée et qu’elle est titulaire d’un contrat de travail à la date du transfert, peut être considérée comme un « travailleur » et bénéficier ainsi de la protection de la directive 2001/23 (30). Il ressort de la décision de renvoi que la convention collective applicable en l’espèce concerne l’ensemble des travailleurs effectuant des travaux de nettoyage sur les chantiers relevant de l’un des trois lots de la ville de Gand (31). En revanche, il ne ressort ni de la décision de renvoi ni du dossier dont dispose la Cour que Mme Govaerts n’est pas protégée en tant que « travailleur » par le droit national et, partant, considérée comme un « travailleur ».
50. Deuxièmement, selon une jurisprudence constante de la Cour, pour déterminer s’il y a « transfert » de l’entreprise, au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 2001/23, le critère décisif est celui de savoir si l’entité en question garde son identité, ce qui résulte notamment de la poursuite effective de l’exploitation ou de sa reprise (32). Cette formulation a été introduite par la directive 98/50 dans le texte de la directive 77/187 et figure à l’article 1er, paragraphe 1, sous b), de la directive 2001/23.
51. Ainsi, pour déterminer si une telle entité maintient son identité, il y a lieu de prendre en considération l’ensemble des circonstances de fait qui caractérisent l’opération en cause, au nombre desquelles figurent notamment le type d’entreprise ou d’établissement dont il s’agit, le transfert ou non d’éléments corporels, tels que les bâtiments et les biens mobiliers, la valeur des éléments incorporels au moment du transfert, la reprise ou non de l’essentiel des effectifs par le nouveau chef d’entreprise, le transfert ou non de la clientèle, ainsi que le degré de similarité des activités exercées avant et après le transfert, et la durée d’une éventuelle suspension de ces activités. Selon la Cour, ces éléments ne constituent toutefois que des aspects partiels de l’évaluation d’ensemble qui s’impose et ne sauraient, de ce fait, être appréciés isolément (33).
52. La Cour a également relevé qu’une entité économique peut, dans certains secteurs, fonctionner sans éléments d’actifs, corporels ou incorporels, significatifs, de sorte que le maintien de l’identité d’une telle entité par-delà l’opération dont elle est l’objet ne saurait, par hypothèse, dépendre de la cession de tels éléments (34). Depuis l’arrêt Süzen (35), elle a considéré que, dans la mesure où, dans certains secteurs dans lesquels l’activité repose essentiellement sur la main‑d’œuvre, comme c’est le cas notamment des services de nettoyage, une collectivité de travailleurs que réunit durablement une activité commune peut correspondre à une entité économique, « une telle entité est susceptible de maintenir son identité par-delà son transfert quand le nouveau chef d’entreprise ne se contente pas de poursuivre l’activité en cause, mais reprend également une partie essentielle, en termes de nombre et de compétences, des effectifs que son prédécesseur affectait spécialement à cette tâche ». Dans cette hypothèse, la Cour a jugé que « le nouveau chef d’entreprise acquiert [...] l’ensemble organisé d’éléments qui lui permettra la poursuite des activités ou de certaines activités de l’entreprise cédante de manière stable » (36).
53. Troisièmement, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, « [c]onstitue une [entité économique] tout ensemble organisé de personnes et d’éléments permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit un objectif propre et qui est suffisamment structurée et autonome » (37). Ainsi, aux fins de l’application de la directive 2001/23, l’entité économique concernée doit, antérieurement au transfert, notamment, jouir d’une autonomie fonctionnelle suffisante, la notion d’« autonomie » se référant aux pouvoirs, accordés aux responsables du groupe de travailleurs concerné, d’organiser, de manière relativement libre et indépendante, le travail au sein dudit groupe et, plus particulièrement, de donner des instructions et de distribuer des tâches aux travailleurs subordonnés appartenant à ce groupe, cela sans intervention directe de la part d’autres structures d’organisation de l’employeur (38).
54. Par conséquent, à mon avis, dans la mesure où, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, Mme Govaerts, en tant que gestionnaire d’antenne, faisait partie du groupe autonome des travailleurs transférés pour lequel elle devait prévoir un encadrement spécial, tant sur le chantier qu’au siège de l’entreprise, il est évident, ainsi que l’a relevé à juste titre la Commission, que celle-ci était affectée à l’entité économique transférée. La situation aurait été différente si Mme Govaerts n’avait pas effectué la majeure partie de ses activités dans le cadre de l’entité économique concernée, mais « qu’[ayant été affectée] à un service administratif de l’entreprise qui [n’avait pas] été lui-même transféré, [elle avait effectué] certaines tâches au profit de la partie transférée » (39). Toutefois, tel n’est pas le cas en l’espèce puisque Mme Govaerts s’occupait, au sein de l’entité économique transférée, de la planification et de l’organisation des travaux à effectuer sur les chantiers relevant des trois lots de la ville de Gand et faisait donc partie intégrante des travailleurs concernés par le transfert de l’entreprise. L’élément déterminant afin d’établir l’appartenance de Mme Govaerts à une entité économique n’est donc pas la durée de la période pendant laquelle elle a été liée à cette entité économique antérieurement au transfert, mais le fait qu’elle était gestionnaire d’antenne pour les trois lots transférés et que, en conséquence, elle assurait la coordination et la direction du personnel de nettoyage au sein de cette entité économique, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.
55. Enfin, je tiens également à rappeler que la Cour a déjà jugé que la circonstance qu’une entité économique soit dissoute et ses activités transférées à deux autres entités ne constitue pas, en soi, un obstacle à l’applicabilité de la directive 2001/23 (40). De plus, dans le cas contraire, il serait aisé de contourner l’application de cette directive.
56. Il résulte de ce qui précède qu’un transfert tel que celui en cause dans l’affaire au principal relève du champ d’application matériel de la directive 2001/23. Dans ce cas, il appartient à la juridiction de renvoi d’établir, à la lumière de l’ensemble des éléments d’interprétation qui précèdent, si l’identité de l’entité transférée a été maintenue.
2. La question des conséquences du transfert d’une entité économique à deux cessionnaires sur le maintien des droits et des obligations des travailleurs, conférés à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/23
57. Il ressort de ce qui précède que la circonstance que les activités de l’entité économique à laquelle appartenait Mme Govaerts ont été transférées à deux autres entités, à savoir Atalian et Cleaning Masters, n’empêche pas de considérer qu’il y a eu transfert d’entreprise au sens de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), de la directive 2001/23.
58. Toutefois, il convient encore d’examiner la question essentielle de savoir quelles sont les conséquences d’un transfert simultané à deux cessionnaires au regard du maintien des droits et des obligations des travailleurs garantis à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2001/23. Plus précisément, il y a lieu de déterminer si les droits et les obligations résultant pour ISS Facility Services du contrat de travail de Mme Govaerts existant à la date du transfert ont été transférés à Atalian ou à Cleaning Masters ou aux deux.
59. L’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2001/23 prévoit que les droits et les obligations qui résultent pour le cédant d’un contrat de travail ou d’une relation de travail existant à la date du transfert sont, du fait de ce transfert, transférés au cessionnaire. Cette disposition ne précise cependant pas comment doit être réparti le personnel transféré entre ces nouvelles entités économiques.
60. Dans la présente affaire, la juridiction de renvoi soumet quatre hypothèses d’interprétation de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2001/23. Quant aux parties intervenant au litige, leurs positions divergent en ce qui concerne l’interprétation de cette disposition.
61. ISS Facility Services soutient que les droits et les obligations résultant du contrat en cause sont transférés en totalité au cessionnaire ayant acquis la partie de l’entreprise dans laquelle le travailleur concerné était employé à titre principal et à laquelle celui-ci doit être considéré comme ayant été affecté. Ce n’est qu’à titre subsidiaire qu’ISS Facility Services évoque la possibilité de diviser les prestations réalisées par Mme Govaerts pour chacun des lots concernés, de façon à considérer que celle-ci est liée par un contrat de travail à temps partiel auprès de chacun des cessionnaires (41). En fait, la solution proposée à titre principal par ISS Facility Services coïncide avec la deuxième hypothèse émise par la juridiction de renvoi dans sa question, tandis que la solution qu’elle propose à titre subsidiaire correspond à la première hypothèse évoquée dans la question préjudicielle (42).
62. Mme Govaerts considère que, à supposer qu’il y ait effectivement transfert d’entreprise (43), les droits et les obligations sont transférés en totalité au cessionnaire ayant acquis la partie de l’entreprise dans laquelle elle était employée durablement. Dans le cas de plusieurs transferts simultanés d’entreprise, la possibilité de transférer un travailleur à temps partiel à plusieurs entreprises serait non seulement incompatible avec la notion de « transfert d’une entité économique maintenant son identité », mais porterait en outre atteinte à l’objectif de la directive 2001/23 de protéger les travailleurs en cas de changement d’entreprise.
63. Atalian rejoint, en substance, Mme Govaerts sur ce dernier point et ajoute que, selon la législation belge, la durée hebdomadaire de travail à temps partiel ne peut être inférieure à un tiers de la durée hebdomadaire de travail à temps plein. Partant, une répartition au prorata des droits et des obligations résultant d’un contrat de travail entre plusieurs entités cessionnaires pourrait conduire à une violation du droit national.
64. Enfin, la Commission considère, ainsi qu’il ressort de ses observations écrites, que la question posée par la juridiction de renvoi peut trouver une réponse dans l’arrêt Botzen e.a. (44). Ainsi, elle estime qu’il suffit de scinder le contrat de travail à temps plein en cause au principal en deux contrats à temps partiel au prorata de l’activité exercée auprès de chacun des cessionnaires.
65. Je suis d’avis que, si la réponse à la question posée par la juridiction de renvoi proposée par la Commission doit certes être nuancée, cet arrêt de la Cour constitue toutefois le point de départ de l’examen de cette question.
a) Le transfert des droits et des obligations résultant pour le cédant d’un contrat de travail ou d’une relation de travail du fait d’un transfert d’entreprise : les enseignements de l’arrêt Botzen e.a.
66. Afin de bien saisir la portée de l’arrêt Botzen e.a. (45), je vais en rappeler brièvement les faits. Cette affaire concernait le transfert d’anciens travailleurs d’une société déclarée en faillite vers une nouvelle société. Cette dernière avait été constituée, notamment, en vue de sauvegarder une fraction des postes de travail. Un accord entre ces deux sociétés prévoyant, notamment, la reprise du personnel de certaines divisions de la société en faillite avait été conclu. Toutefois, les services généraux et administratifs en étaient exclus. Dans ce contexte, la Cour a examiné si la directive 77/187 englobait également les droits et les obligations qui résultaient pour le cédant d’un contrat de travail existant à la date du transfert et conclu avec des travailleurs qui, bien que n’appartenant pas à la partie transférée de l’entreprise, exerçaient certaines activités comportant l’utilisation de moyens d’exploitation affectés à cette partie ou qui, étant affectés à un service administratif de l’entreprise qui n’avait pas lui‑même été transféré, effectuaient certaines tâches au profit de la partie transférée. En se fondant sur le critère selon lequel « la relation de travail est essentiellement caractérisée par le lien qui existe entre le travailleur et la partie de l’entreprise ou de l’établissement à laquelle il est affecté pour exercer sa tâche », la Cour a déclaré que, pour apprécier si ces droits et obligations sont transférés en vertu de la directive 77/187, « il suffit d’établir à quelle partie de l’entreprise ou de l’établissement le travailleur en cause se trouvait affecté » (46). Dans son arrêt, la Cour a répondu que, dans le cadre du transfert en cause, les droits et les obligations qui résultaient pour le cédant n’étaient pas transférés au cessionnaire.
67. Certes, l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Botzen e.a. (47) concernait un transfert d’entreprise à un seul cessionnaire et l’on pourrait considérer qu’elle ne se prête pas à un raisonnement par analogie. Cet arrêt me semble toutefois pertinent pour apprécier si les droits et les obligations résultant pour le cédant de cette relation de travail ont été transférés (ou non) au cessionnaire du fait de ce transfert. Dès lors, il est essentiel de savoir auprès de quelle partie de l’entreprise, celle faisant l’objet du transfert ou non, le travailleur exerçait ses fonctions : si le travailleur exerçait ses fonctions auprès de la partie de l’entreprise ou de l’entité économique qui a été transférée, les droits et les obligations résultant pour le cédant du contrat de travail de ce travailleur ont donc également dû être transférés.
68. Il ressort de la décision de renvoi que Mme Govaerts était affectée à l’entité économique transférée et que, conformément à l’article 7 de la convention collective nº 32 bis, les droits et les obligations qui résultaient pour ISS Facility Services des contrats de travail des travailleurs existant à la date du transfert ont, du fait de ce transfert, été transférés de plein droit à Atalian et à Cleaning Masters.
69. Se pose alors la question de savoir si le fait que, dans le litige au principal, l’entité économique a été transférée non pas vers un mais vers deux cessionnaires exclut l’application du critère du lien qui existe entre le travailleur et la partie de l’entreprise transférée pour apprécier si les droits et les obligations résultant pour le cédant d’un contrat de travail sont transférés auxdits cessionnaires.
70. Je ne le pense pas. En effet, dès lors que l’entité économique à laquelle un travailleur était attaché a été transférée, les droits et les obligations résultant pour le cédant du contrat de travail sont transférés au cessionnaire. Le fait qu’il y ait eu transfert à un cessionnaire ou à plusieurs cessionnaires simultanément est, à mon avis, sans incidence sur le transfert des droits et obligations. Ainsi que le relève la juridiction de renvoi, si les trois lots de la ville de Gand avaient été attribués uniquement à Atalian, il serait évident que les droits et les obligations qui résultaient pour ISS Facility Services du contrat de travail de Mme Govaerts auraient été transférés à Atalian.
71. Cela étant dit, il me semble que la Commission va encore plus loin en considérant que le critère du lien qui existe entre le travailleur et la partie de l’entreprise transférée peut également être transposé dans le cas d’une éventuelle division du contrat de travail d’un travailleur affecté aux différentes parties de l’entreprise simultanément transférées à deux cessionnaires. À cet égard, la Commission affirme qu’il suffit de scinder le contrat de travail à temps plein en cause au principal en deux contrats à temps partiel au prorata de l’activité exercée auprès de chacun des cessionnaires.
b) Le transfert des droits et obligations résultant pour le cédant d’un contrat de travail ou d’une relation de travail du fait d’un transfert d’entreprise au cessionnaire : application du critère du « cessionnaire principal » ou du critère du transfert à deux cessionnaires au prorata des fonctions exercées par le travailleur
72. Il convient de rappeler, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 32 des présentes conclusions, que l’objet de la directive 2001/23 est d’assurer que les travailleurs affectés par un transfert d’entreprise soient protégés dans leurs relations de travail avec le cessionnaire de la même manière qu’ils l’étaient dans leurs relations de travail avec le cédant, et cela sans toutefois faire abstraction des intérêts du cessionnaire (48). En effet, cette directive ne vise pas uniquement à sauvegarder ou maintenir, lors d’un transfert d’entreprise, les intérêts des travailleurs, mais entend assurer un juste équilibre entre les intérêts de ces derniers, d’une part, et ceux du cessionnaire, d’autre part (49). En revanche, ladite directive ne saurait utilement être invoquée pour obtenir une amélioration des conditions de rémunération ou d’autres conditions de travail à l’occasion d’un transfert d’entreprise (50).
73. Il s’ensuit que, à la lumière des objectifs de la directive 2001/23, l’argument d’ISS Facility Services selon lequel les droits et les obligations qui résultent du contrat du travail en question sont transférés en totalité au cessionnaire ayant acquis la partie de l’entreprise dans laquelle le travailleur concerné était employé à titre principal doit être écarté, dans la mesure où celui-ci implique une amélioration des conditions de travail du travailleur affecté par le transfert (51).
74. En l’espèce, Mme Govaerts était gestionnaire d’antenne des trois chantiers correspondant aux trois lots adjugés, deux lots ayant été attribués à Atalian et un à Cleaning Masters. Ainsi, l’application du critère de « l’entreprise ou la partie de l’entreprise dans laquelle le travailleur concerné était employé à titre principal » ou du « cessionnaire principal », défendue par ISS Facility Services, conduirait à une situation dans laquelle Mme Govaerts bénéficierait d’un contrat de travail à temps plein avec Atalian alors que, avant le transfert, celle-ci travaillait à 66 % sur les chantiers correspondant aux deux lots attribués à cette société. Ainsi, ce cessionnaire serait obligé de reprendre à 100 % un travailleur qui ne travaillait pour le cédant qu’à 66 % au titre de ces deux lots. De plus, ainsi que l’a relevé à juste titre la Commission, l’application de ce critère serait encore plus difficile dans l’hypothèse où une entreprise serait transférée notamment à trois ou quatre cessionnaires.
75. En revanche, le fait de scinder un contrat de travail à temps plein, à la suite du transfert d’une entreprise, en plusieurs contrats de travail à temps partiel et, partant, de répartir les droits et les obligations des travailleurs concernés découlant dudit contrat avec le cédant au prorata des fonctions exercées par le travailleur me semble conforme à l’objectif de la directive 2001/23.
76. Une telle solution est corroborée par le libellé de l’article 2, paragraphe 2, sous a), de la directive 2001/23, qui prévoit que « les États membres ne sauraient exclure du champ d’application de la présente directive les contrats ou relations de travail uniquement du fait [...] du nombre d’heures de travail effectué ou à effectuer ». Il s’ensuit que les relations de travail à temps partiel relèvent du champ d’application matériel de cette directive.
77. Cela étant, il convient de tenir compte des implications d’une telle solution au regard de l’objectif de la protection des travailleurs de la directive 2001/23. Ainsi, il y a lieu de rappeler que cette directive, de la même manière qu’elle ne saurait être invoquée pour améliorer les conditions de travail du travailleur affecté par le transfert de l’entreprise, ne saurait l’être pour les détériorer.
78. Il convient de rappeler qu’il résulte de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 2001/23 que, « [s]i le contrat de travail ou la relation de travail est résilié du fait que le transfert entraîne une modification substantielle des conditions de travail au détriment du travailleur, la résiliation du contrat de travail ou de la relation de travail est considérée comme intervenue du fait de l’employeur » (52).
79. Ainsi, dans l’hypothèse où la scission du contrat de travail en cause se révèle impossible entre les deux cessionnaires ou porte atteinte au maintien des droits des travailleurs garantis par ladite directive, ou si le travailleur refuse, après le transfert de l’entreprise, la scission de son contrat, le contrat de travail ou la relation de travail en cause peut être résilié et cette résiliation doit être considérée comme intervenue du fait du ou des cessionnaires en vertu de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 2001/23 (53). En effet, il me semble que la possibilité pour le travailleur de refuser une telle scission de son contrat de travail et de se prévaloir de l’article 4, paragraphe 2, de ladite directive est justifiée par le fait que ladite scission, par sa nature, peut comporter des inconvénients importants pour le travailleur, notamment en ce qui concerne l’accomplissement de sa tâche (54).
V. Conclusion
80. Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle posée par l’arbeidshof te Gent (cour du travail de Gand, Belgique) de la manière suivante :
1) L’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/23/CE du Conseil, du 12 mars 2001, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises, d’établissements ou de parties d’entreprises ou d’établissements doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une législation nationale en vertu de laquelle, en cas de transfert simultané de plusieurs parties d’une entreprise au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de cette directive à plusieurs cessionnaires, les droits et les obligations résultant d’un contrat de travail existant à la date du transfert, pour chacune des parties de l’entreprise transférée, sont transférés à chacun des cessionnaires au prorata des fonctions exercées par le travailleur.
2) Toutefois, dans l’hypothèse où la scission du contrat de travail en cause se révèle impossible entre les deux cessionnaires ou porte atteinte au maintien des droits des travailleurs garantis par la directive 2001/23, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, ou si le travailleur refuse, après le transfert de l’entreprise, la scission de son contrat de travail, le contrat de travail ou la relation de travail en cause peut être résilié et cette résiliation doit être considérée comme intervenue du fait du ou des cessionnaires en vertu de l’article 4, paragraphe 2, de cette directive.
1 Langue originale : le français.
2 Directive du Conseil du 12 mars 2001 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises, d’établissements ou de parties d’entreprises ou d’établissements (JO 2001, L 82, p. 16).
3 Moniteur belge du 9 août 1985, p. 11527.
4 Moniteur belge du 29 mars 2002, p. 13328.
5 Directive du Conseil du 14 février 1977 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d’entreprises, d’établissements ou de parties d’établissements (JO 1977, L 61, p. 26).
6 Voir considérants 2 et 3 de la directive 2001/23.
7 Voir, notamment, arrêt du 11 juillet 1985, Foreningen af Arbejdsledere i Danmark (105/84, EU:C:1985:331, point 26). En ce qui concerne la directive 2001/23, voir arrêt du 6 mars 2014, Amatori e.a. (C‑458/12, EU:C:2014:124, point 41 et jurisprudence citée). Le législateur de l’Union a considéré que les différences de niveau qui subsistaient entre les États membres concernant la portée de la protection des travailleurs en cas de restructurations des entreprises pouvaient avoir une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur et qu’il convenait de réduire ces différences. Voir deuxième et troisième considérants de la directive 77/187. Voir, à cet égard, considérant 4 de la directive 2001/23.
8 Arrêt du 7 août 2018, Colino Sigüenza (C‑472/16, EU:C:2018:646, point 48 et jurisprudence citée).
9 Voir, notamment, arrêts du 11 juillet 1985, Foreningen af Arbejdsledere i Danmark (105/84, EU:C:1985:331, point 26) ; du 18 mars 1986, Spijkers (24/85, EU:C:1986:127, point 11) ; du 12 novembre 1998, Europièces (C‑399/96, EU:C:1998:532, point 37) ; du 15 décembre 2005, Güney-Görres et Demir (C‑232/04 et C‑233/04, EU:C:2005:778, point 31) ; du 29 juillet 2010, UGT-FSP (C‑151/09, EU:C:2010:452, point 40), ainsi que du 16 mai 2019, Plessers (C‑509/17, EU:C:2019:424, point 52).
10 Voir arrêt du 9 mars 2006, Werhof (C‑499/04, EU:C:2006:168, point 31).
11 Voir arrêt du 18 juillet 2013, Alemo-Herron e.a. (C‑426/11, EU:C:2013:521, point 25).
12 Directive du Conseil du 29 juin 1998 modifiant la directive 77/187 (JO 1998, L 201, p. 88). Au sujet de cette modification, le considérant 4 de la directive 98/50, dont le contenu est repris dans le considérant 8 de la directive 2001/23, précisait que la sécurité et la transparence rendaient nécessaire une « clarification de la notion de transfert à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice » et que cette clarification ne modifiait pas le champ d’application de la directive 77/187, tel qu’interprété par la Cour.
13 Voir, en ce sens, arrêt du 18 mars 1986, Spijkers (24/85, EU:C:1986:127, point 14).
14 Voir, notamment, arrêt du 18 juillet 2013, Alemo-Herron e.a. (C‑426/11, EU:C:2013:521, points 9 et 26).
15 Voir, notamment, arrêt du 20 janvier 2011, CLECE (C‑463/09, EU:C:2011:24, point 26).
16 Voir arrêts du 15 octobre 1996, Henke (C‑298/94, EU:C:1996:382, point 14) ; du 26 septembre 2000, Mayeur (C‑175/99, EU:C:2000:505, point 33), et du 11 novembre 2004, Delahaye (C‑425/02, EU:C:2004:706, point 30).
17 Voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2011, CLECE (C‑463/09, EU:C:2011:24, point 27).
18 Voir arrêts du 19 mai 1992, Redmond Stichting (C‑29/91, EU:C:1992:220, point 11) ; du 7 mars 1996, Merckx et Neuhuys (C‑171/94 et C‑172/94, EU:C:1996:87, point 28) ; du 13 septembre 2007, Jouini e.a. (C‑458/05, EU:C:2007:512, point 24), ainsi que du 20 janvier 2011, CLECE (C‑463/09, EU:C:2011:24, point 29).
19 Voir, notamment, arrêts du 17 décembre 1987, Ny Mølle Kro (287/86, EU:C:1987:573, point 12) ; du 15 juin 1988, Bork International e.a. (101/87, EU:C:1988:308, point 13) ; du 19 mai 1992, Redmond Stichting (C‑29/91, EU:C:1992:220, point 11) ; du 20 novembre 2003, Abler e.a. (C‑340/01, EU:C:2003:629, point 41) ; du 15 décembre 2005, Güney-Görres et Demir (C‑232/04 et C‑233/04, EU:C:2005:778, point 37) ; du 20 janvier 2011, CLECE (C‑463/09, EU:C:2011:24, point 30), ainsi que du 7 août 2018, Colino Sigüenza (C‑472/16, EU:C:2018:646, point 28).
20 Voir, notamment, arrêt du 7 mars 1996, Merckx et Neuhuys (C‑171/94 et C‑172/94, EU:C:1996:87, points 28 et 30).
21 Voir, notamment, arrêt du 10 février 1988, Foreningen af Arbejdsledere i Danmark (324/86, EU:C:1988:72, point 11), dans lequel la Cour a considéré que la directive 77/187 s’appliquait en l’absence de contrat entre les deux employeurs se succédant à la tête de l’entreprise : « [L]a directive s’applique dans une situation où, au terme d’un contrat de location‑gérance non transférable, le propriétaire de l’entreprise loue celle‑ci à un nouveau locataire‑gérant qui en poursuit l’exploitation sans interruption avec le même personnel antérieurement licencié à l’expiration du premier contrat de location‑gérance. »
22 Voir, notamment, arrêts du 12 novembre 1992, Watson Rask et Christensen (C‑209/91, EU:C:1992:436, point 17) ; du 14 avril 1994, Schmidt (C-392/92, EU:C:1994:134, points 12 à 14), ainsi que du 11 mars 1997, Süzen (C‑13/95, EU:C:1997:141, point 11). La Cour a considéré dans ces arrêts que peuvent entrer dans le champ d’application de la directive 77/187 des situations où un entrepreneur confie, par voie contractuelle, à un autre entrepreneur la responsabilité d’exploiter un service de cantine destiné aux salariés, géré auparavant de manière directe, moyennant une rémunération et divers avantages dont les modalités sont déterminées par l’accord conclu entre eux et la responsabilité d’exécuter les travaux de nettoyage qu’elle assurait auparavant de manière directe ; ainsi qu’une situation dans laquelle un donneur d’ouvrage, qui avait confié le nettoyage de ses locaux à un premier entrepreneur, résilie le contrat qui le liait à celui-ci et conclut, en vue de l’exécution de travaux similaires, un nouveau contrat avec un second entrepreneur. S’agissant de successions de marchés de services, voir, également, arrêts du 10 décembre 1998, Hernández Vidal e.a. (C‑127/96, C‑229/96 et C‑74/97, EU:C:1998:594, point 35), ainsi que du 20 novembre 2003, Abler e.a. (C‑340/01, EU:C:2003:629, point 43).
23 S’agissant, notamment, du service public d’aide à domicile de personnes défavorisées d’une commune, voir arrêt du 10 décembre 1998, Hidalgo e.a. (C‑173/96 et C‑247/96, EU:C:1998:595, point 34). S’agissant du marché de services du transport public régulier par bus, voir arrêt du 25 janvier 2001, Liikenne (C‑172/99, EU:C:2001:59, point 44). S’agissant de la succession d’un prestataire à l’autre pour un marché public de services concernant le contrôle des passagers et de leurs bagages dans un aéroport, voir arrêt du 15 décembre 2005, Güney-Görres et Demir (C‑232/04 et C‑233/04, EU:C:2005:778, point 37). S’agissant, enfin, de la cessation de l’activité du premier adjudicataire avant la fin de l’année scolaire en cours et la désignation d’un nouvel adjudicataire au début de l’année scolaire suivante pour un marché de services portant sur la gestion d’une académie de musique communale, voir arrêt du 7 août 2018, Colino Sigüenza (C‑472/16, EU:C:2018:646, point 46).
24 Au sujet de la reprise du personnel d’une entreprise de surveillance imposée par une convention collective, voir arrêt du 11 juillet 2018, Somoza Hermo et Ilunión Seguridad (C‑60/17, EU:C:2018:559, point 38). S’agissant de la reprise d’une partie du personnel d’une entreprise sous-traitante de nettoyage imposée par une convention collective, voir arrêt du 24 janvier 2002, Temco (C‑51/00, EU:C:2002:48, point 27).
25 Selon la juridiction de renvoi, le transfert d’entreprise par convention collective a entraîné, en l’espèce, le changement automatique de la personne qui exercerait l’autorité de l’employeur sur les travailleurs en service. Cette juridiction indique que tous les travailleurs effectuant des travaux de nettoyage dans les chantiers correspondant aux trois lots de la ville de Gand étaient entrés de plein droit au service des deux adjudicataires sur la base de l’article 3 de la convention collective de travail, conclue au sein de la commission paritaire pour les entreprises de nettoyage et de désinfection concernant la reprise de personnel à la suite d’un transfert d’un contrat d’entretien rendue obligatoire par l’arrêté royal du 19 juillet 2006. En outre, elle relève que, conformément à l’article 7 de la convention collective nº 32 bis, les droits et les obligations qui résultaient pour ISS Facility Services des contrats de travail pour les travailleurs, existant à la date du transfert, le 1er septembre 2013, ont été, du fait de ce transfert, transférés à Atalian et à Cleaning Masters.
26 Arrêt du 20 janvier 2011 (C‑463/09, EU:C:2011:24).
27 Arrêt du 7 février 1985 (186/83, EU:C:1985:58).
28 Arrêt du 10 décembre 1998 (C‑127/96, C‑229/96 et C‑74/97, EU:C:1998:594).
29 S’agissant du champ d’application au personnel de la directive 77/187, la Cour a jugé à maintes reprises que seuls les travailleurs au sens du droit national pouvaient se prévaloir de la protection prévue offerte par cette directive. Voir, notamment, arrêt du 14 septembre 2000, Collino et Chiappero (C‑343/98, EU:C:2000:441, point 36 et jurisprudence citée). Ce renvoi au droit national a été codifié par la directive 98/50, puis par la directive 2001/23.
30 Voir, notamment, arrêt du 6 septembre 2011, Scattolon (C‑108/10, EU:C:2011:542, point 39 et jurisprudence citée).
31 Voir note en bas de page 25.
32 Voir, notamment, arrêts du 18 mars 1986, Spijkers (24/85, EU:C:1986:127, point 11) ; du 11 mars 1997, Süzen (C‑13/95, EU:C:1997:141, point 10), ainsi que du 20 novembre 2003, Abler e.a. (C‑340/01, EU:C:2003:629, point 29). Voir, également, arrêts du 6 septembre 2011, Scattolon (C‑108/10, EU:C:2011:542, point 60), ainsi que du 6 mars 2014, Amatori e.a. (C‑458/12, EU:C:2014:124, point 30).
33 Voir, notamment, arrêts du 18 mars 1986, Spijkers (24/85, EU:C:1986:127, point 13) ; du 11 mars 1997, Süzen (C‑13/95, EU:C:1997:141, point 14) ; du 20 novembre 2003, Abler e.a. (C‑340/01, EU:C:2003:629, point 33), ainsi que du 20 janvier 2011, CLECE (C‑463/09, EU:C:2011:24, point 34).
34 Voir arrêts du 11 mars 1997, Süzen (C‑13/95, EU:C:1997:141, point 18) ; du 10 décembre 1998, Hernández Vidal e.a. (C‑127/96, C‑229/96 et C‑74/97, EU:C:1998:594, point 31) ; du 29 juillet 2010, UGT-FSP (C‑151/09, EU:C:2010:452, point 28), ainsi que du 20 janvier 2011, CLECE (C‑463/09, EU:C:2011:24, point 35).
35 Arrêt du 11 mars 1997 (C‑13/95, EU:C:1997:141, point 18). Le critère de la reprise de l’essentiel du personnel a fait l’objet de discussions au sein de la doctrine. Selon certains auteurs, le transfert des relations de travail serait la conséquence juridique du transfert et ne serait pas en même temps une condition matérielle. Voir, notamment, Davies, P., « Taken to the cleaners ? Contracting Out of Services Yet Again », Industrial Law Journal, 1997, n° 26, p. 193 ; Laulom, S., « Les dialogues entre juge communautaire et juges nationaux en matière de transferts d’entreprise », Droit social, 1999, n° 9-10, p. 821, ainsi que Viala, Y., « Le maintien des contrats de travail en cas de transfert d’entreprise en droit allemand », Droit social, 2005, n° 2, p. 203. Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Cosmas dans les affaires jointes Hernández Vidal e.a. (C‑127/96, C‑229/96 et C‑74/97, EU:C:1998:426, points 78 à 85, et en particulier point 80) ; conclusions de l’avocat général Poiares Maduro dans les affaires jointes Güney-Görres et Demir (C‑232/04 et C‑233/04, EU:C:2005:395, point 52), ainsi que conclusions de l’avocate générale Trstenjak dans l’affaire CLECE (C‑463/09, EU:C:2010:636, points 62 à 66).
36 Voir arrêts du 11 mars 1997, Süzen (C‑13/95, EU:C:1997:141, point 21) ; du 10 décembre 1998, Hernández Vidal e.a. (C‑127/96, C‑229/96 et C‑74/97, EU:C:1998:594, point 32) ; du 29 juillet 2010, UGT-FSP (C‑151/09, EU:C:2010:452, point 29), ainsi que du 20 janvier 2011, CLECE (C‑463/09, EU:C:2011:24, point 36). Voir, également, arrêt du 24 janvier 2002, Temco (C‑51/00, EU:C:2002:48, point 26).
37 Arrêt du 6 mars 2014, Amatori e.a. (C‑458/12, EU:C:2014:124, point 31 et jurisprudence citée).
38 Arrêt du 6 mars 2014, Amatori e.a. (C‑458/12, EU:C:2014:124, point 32 et jurisprudence citée).
39 Voir, à cet égard, arrêt du 7 février 1985, Botzen e.a. (186/83, EU:C:1985:58, point 16).
40 Voir, arrêt du 20 juillet 2017, Piscarreta Ricardo (C‑416/16, EU:C:2017:574, point 44).
41 Selon ISS Facility Services, un contrat à temps partiel à concurrence de 66 % pourrait être conclu avec Atalian et un autre contrat à temps partiel à concurrence de 34 % pourrait être conclu avec Cleaning Masters. Une telle répartition serait basée sur la valeur économique des lots adjugés aux cessionnaires par la ville de Gand, dont ISS Facility Services avait précédemment la charge.
42 La troisième hypothèse avancée par la juridiction de renvoi, pour le cas où les deux premières ne seraient pas retenues, consiste à interpréter l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/23 en ce sens qu’il ne peut y avoir maintien des droits et des obligations résultant du contrat de travail pour des cessionnaires, tandis que la quatrième revient à interpréter cette disposition en ce sens qu’il ne peut y avoir maintien de ces droits et obligations lorsqu’il s’avère impossible de scinder l’activité exercée par le travailleur entre les deux cessionnaires. Voir, à cet égard, point 28 des présentes conclusions.
43 Mme Govaerts a indiqué lors de l’audience que sa position initiale était de considérer que, même s’il y avait eu un transfert du personnel de nettoyage travaillant sur les chantiers correspondant aux différents lots, le fait qu’elle était chargée des tâches administratives et organisationnelles et ne participait pas, sur les chantiers de la ville de Gand, aux travaux de nettoyage qui faisaient l’objet du transfert devait avoir comme conséquence qu’elle ne relevait pas de l’entité économique ayant fait l’objet du transfert. Elle a toutefois ajouté que, à la suite de ce transfert de personnel, elle était tenue, en vertu du droit belge, d’invoquer la résiliation de son contrat et, dès lors, ne pouvait plus retourner en tant que travailleur auprès d’ISS Facility Services.
44 Arrêt du 7 février 1985, Botzen e.a. (186/83, EU:C:1985:58).
45 Arrêt du 7 février 1985 (186/83, EU:C:1985:58).
46 Arrêt du 7 février 1985, Botzen e.a. (186/83, EU:C:1985:58, points 14 et 15).
47 Arrêt du 7 février 1985 (186/83, EU:C:1985:58).
48 Voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2006, Werhof (C‑499/04, EU:C:2006:168, point 31).
49 Voir arrêt du 18 juillet 2013, Alemo-Herron e.a. (C‑426/11, EU:C:2013:521, point 25).
50 Arrêt du 6 septembre 2011, Scattolon (C‑108/10, EU:C:2011:542, point 77).
51 Voir, en ce sens, jurisprudence citée à la note en bas de page 52 des présentes conclusions.
52 Notamment, la Cour a déjà jugé qu’« un changement du niveau de la rémunération accordée au travailleur figure au nombre des modifications substantielles des conditions de travail au sens de cette disposition [...]. Lorsque le contrat, ou la relation de travail, est résilié du fait que le transfert comporte un tel changement, la résiliation doit être considérée comme intervenue du fait de l’employeur ». Arrêt du 7 mars 1996, Merckx et Neuhuys (C‑171/94 et C‑172/94, EU:C:1996:87, point 38). Voir, également, arrêts du 11 novembre 2004, Delahaye (C‑425/02, EU:C:2004:706, point 33), ainsi que du 6 septembre 2011, Scattolon (C‑108/10, EU:C:2011:542, points 81 et 82).
53 Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 8 de cette directive, celle-ci « ne porte pas atteinte aux droits des États membres d’appliquer ou d’introduire des dispositions législatives, réglementaires et administratives plus favorables aux travailleurs ou de favoriser ou de permettre des conventions collectives ou des accords conclus entre partenaires sociaux plus favorables aux travailleurs ».
54 Notamment, en ce qui concerne la distance entre les sièges des deux cessionnaires ou la synchronisation des congés annuels du travailleur.
© European Union
The source of this judgment is the Europa web site. The information on this site is subject to a information found here: Important legal notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.
BAILII: Copyright Policy | Disclaimers | Privacy Policy | Feedback | Donate to BAILII
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/C34418_O.html