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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Commission v Italy (Bacterie Xylella fastidiosa) (Judgment) French Text [2019] EUECJ C-443/18 (05 September 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/C44318.html Cite as: ECLI:EU:C:2019:676, EU:C:2019:676, [2019] EUECJ C-443/18 |
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ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
5 septembre 2019 (*)
« Manquement d’État – Protection sanitaire des végétaux – Directive 2000/29/CE – Protection contre l’introduction et la propagation dans l’Union européenne d’organismes nuisibles aux végétaux ou aux produits végétaux – Article 16, paragraphes 1 et 3 – Décision d’exécution (UE) 2015/789 – Mesures visant à éviter l’introduction et la propagation dans l’Union de Xylella fastidiosa (Wells et al.) – Article 7, paragraphe 2, sous c) – Mesures d’enrayement – Obligation de procéder à l’enlèvement immédiat des végétaux infectés dans une bande de 20 kilomètres dans la zone infectée – Article 7, paragraphe 7 – Obligation de surveillance – Enquêtes annuelles – Article 6, paragraphes 2, 7 et 9 – Mesures d’éradication – Manquement persistant et général – Article 4, paragraphe 3, TUE – Obligation de coopération loyale »
Dans l’affaire C‑443/18,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 4 juillet 2018,
Commission européenne, représentée par Mme B. Eggers et M. D. Bianchi, en qualité d’agents,
partie requérante,
contre
République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée par MM. S. Fiorentino et G. Caselli, avvocati dello Stato,
partie défenderesse,
LA COUR (cinquième chambre),
composée de M. E. Regan (rapporteur), président de chambre, MM. C. Lycourgos, E. Juhász, M. Ilešič et I. Jarukaitis, juges,
avocat général : M. Y. Bot,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise par le président de la Cour, à la demande de la Commission européenne, de faire juger l’affaire par priorité, conformément à l’article 53, paragraphe 3, du règlement de procédure de la Cour,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que la République italienne,
– en omettant de veiller, dans la zone d’enrayement, à ce qu’il soit procédé immédiatement à l’enlèvement d’au moins tous les végétaux dont l’infection par Xylella fastidiosa (ci-après « Xf ») a été constatée s’ils sont situés dans la zone infectée, à une distance maximale de 20 kilomètres de la démarcation entre cette zone infectée et le reste du territoire de l’Union européenne, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution (UE) 2015/789 de la Commission, du 18 mai 2015, relative à des mesures visant à éviter l’introduction et la propagation dans l’Union de Xylella fastidiosa (Wells et al.) (JO 2015, L 125, p. 36), telle que modifiée par la décision d’exécution (UE) 2016/764 de la Commission, du 12 mai 2016 (JO 2016, L 126, p. 77) (ci-après la « décision d’exécution 2015/789 modifiée ») ;
– en omettant de garantir, dans la zone d’enrayement, la surveillance de la présence de Xf en menant des enquêtes annuelles à des moments opportuns de l’année, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 7, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, et
– en outre, en omettant constamment de prendre des mesures immédiates pour éviter la propagation de Xf et, ce faisant, en contrevenant de manière répétée aux obligations spécifiques visées à la décision d’exécution 2015/789 modifiée concernant les zones infectées respectives, de sorte que la bactérie a pu ainsi se propager, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphes 2, 7 et 9, et de l’article 7, paragraphe 2, sous c), et paragraphe 7, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, ainsi qu’aux obligations fondamentales visées à l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2000/29/CE du Conseil, du 8 mai 2000, concernant les mesures de protection contre l’introduction dans la Communauté d’organismes nuisibles aux végétaux ou aux produits végétaux et contre leur propagation à l’intérieur de la Communauté (JO 2000, L 169, p. 1), telle que modifiée par la directive d’exécution (UE) 2017/1279 de la Commission, du 14 juillet 2017 (ci-après la « directive 2000/29 »), et à l’obligation de coopération loyale énoncée à l’article 4, paragraphe 3, TUE.
Le cadre juridique
La directive 2000/29
2 Aux termes de l’article 16 de la directive 2000/29 :
« 1. Chaque État membre notifie immédiatement par écrit à la Commission et aux autres États membres toute présence, sur son territoire, d’organismes nuisibles énumérés à l’annexe I, partie A, chapitre I [...]
Il prend toutes les mesures nécessaires en vue de l’éradication ou, si celle-ci n’est pas possible, de l’endiguement des organismes nuisibles concernés. Il informe la Commission et les autres États membres de mesures prises.
[...]
3. Dans les cas visés aux paragraphes 1 et 2, la Commission examine la situation dès que possible avec le comité phytosanitaire permanent. Des enquêtes sur place peuvent être effectuées sous l’autorité de la Commission et en conformité avec les dispositions appropriées de l’article 21. Les mesures requises, y compris celles par lesquelles il peut être décidé si les mesures prises par les États membres doivent être révoquées ou amendées, peuvent être arrêtées sur la base d’une analyse du risque phytosanitaire ou d’une analyse préliminaire du risque phytosanitaire dans les cas visés au paragraphe 2 selon la procédure prévue à l’article 18, paragraphe 2. La Commission suit l’évolution de la situation et, selon cette même procédure, modifie ou rapporte lesdites mesures en fonction de l’évolution de la situation. [...]
[...] »
3 L’annexe I, partie A, de la directive 2000/29 énumère les « [o]rganismes nuisibles dont l’introduction et la dissémination doivent être interdites dans tous les États membres ». Sous le titre « Organismes nuisibles présents dans la Communauté et importants pour toute la Communauté », le chapitre II de cette partie, à son point b), intitulé « Bactéries », contient un point 3 ainsi libellé : « Xylella fastidiosa (Wells et al.) ».
Les décisions d’exécution 2014/87/UE et 2014/497/UE
4 La décision d’exécution 2014/87/UE de la Commission, du 13 février 2014, concernant des mesures visant à empêcher la propagation dans l’Union de Xylella fastidiosa (Wells et Raju.) (JO 2014, L 45, p. 29), laquelle a été adoptée sur le fondement de la directive 2000/29, et, notamment, de l’article 16, paragraphe 3, quatrième phrase, de celle-ci, expose à ses considérants 2 à 4 ainsi que 7 et 8 :
« (2) Le 21 octobre 2013, l’Italie a informé les autres États membres et la Commission de la présence de [Xf (ci-après l’“organisme spécifié”)] sur son territoire, dans deux zones distinctes de la province de Lecce, dans la région des Pouilles. Par la suite, deux autres foyers distincts ont été identifiés dans la même province. La présence de l’organisme spécifié a été confirmée sur plusieurs espèces végétales, dont Olea europaea L., [...], qui ont présenté un dessèchement des feuilles et des symptômes de déclin rapide. [...]
(3) Le 29 octobre 2013, la Région des Pouilles a pris des mesures d’urgence destinées à la prévention et à l’éradication de l’organisme spécifié [...], conformément à l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2000/29 [...]
(4) L’Italie a signalé que les inspections qu’elle avait effectuées n’avaient pas révélé la présence de l’organisme spécifié dans les provinces avoisinantes de Brindisi et Tarente.
[...]
(7) Eu égard à la nature de l’organisme spécifié, celui-ci est susceptible de se propager rapidement et largement. Afin de garantir qu’il ne se propage pas dans le reste de l’Union, des mesures immédiates s’imposent. En attendant que des informations plus spécifiques concernant l’éventail des hôtes, les vecteurs, les voies d’entrée et les possibilités de réduction des risques soient disponibles, il convient d’interdire la circulation [des végétaux destinés à la plantation] en dehors des zones suspectées de contenir des végétaux infectés.
(8) Compte tenu des lieux où l’organisme spécifié est présent, de la situation géographique particulière de la province administrative de Lecce et des incertitudes concernant les critères de délimitation, l’ensemble de la province devrait faire l’objet de l’interdiction, afin que celle-ci s’applique de manière rapide et efficace. »
5 Aux termes de cette première décision d’exécution, la Commission a dès lors interdit, à l’article 1er, « la circulation hors de la province de Lecce, dans la région des Pouilles, en Italie, de végétaux destinés à la plantation », a prescrit, à l’article 2, la réalisation d’enquêtes annuelles officielles visant à déceler la présence de la bactérie Xf et a enjoint aux États membres, à l’article 3, de veiller à ce que, dans le cas où une personne aurait connaissance de la présence de cette bactérie ou aurait des raisons de suspecter cette présence, cette personne le notifie à l’autorité compétente dans un délai de dix jours.
6 Ladite décision d’exécution a été abrogée par la décision d’exécution 2014/497/UE de la Commission, du 23 juillet 2014, concernant des mesures visant à empêcher l’introduction et la propagation dans l’Union de Xylella fastidiosa (Wells et Raju.) (JO 2014, L 219, p. 56).
7 Aux termes de cette deuxième décision d’exécution, laquelle a la même base juridique que la première, la Commission a restreint la circulation des végétaux qui constituent des plantes hôtes de la bactérie Xf et a subordonné à diverses conditions leur introduction dans l’Union lorsqu’ils sont originaires de pays tiers où cette bactérie est notoirement présente (articles 2 et 3). En outre, afin d’éradiquer la bactérie Xf et d’empêcher sa propagation, la Commission a imposé aux États membres, lorsque cela est nécessaire, des « zones délimitées » se composant d’une « zone infectée » et d’une « zone tampon », dans lesquelles les États membres devaient, notamment, arracher tous les végétaux infectés par la bactérie Xf, de même que tous les végétaux présentant des symptômes d’une éventuelle infection par cette bactérie et tous les végétaux susceptibles d’être infectés [article 7 et annexe III, section 2, sous a)].
La décision d’exécution 2015/789
8 La décision d’exécution 2014/497 a été abrogée par la décision d’exécution 2015/789, laquelle, adoptée sur le fondement de la même base juridique que les deux premières, contient les considérants suivants :
« (1) Compte tenu des audits effectués par la Commission et des notifications, par les autorités italiennes, de l’apparition de nouveaux foyers, il y a lieu de renforcer les mesures prévues par la décision d’exécution [2014/87].
[...]
(4) Pour éradiquer l’organisme spécifié et éviter sa propagation au reste de l’Union, les États membres devraient établir des zones délimitées consistant en une zone infectée et une zone tampon, et appliquer des mesures d’éradication. [...]
[...]
(7) L’organisme spécifié est déjà largement établi dans la province de Lecce. Comme il ressort d’éléments probants que l’organisme spécifié est présent dans certaines parties de cette zone depuis plus de deux ans et que l’éradication de cet organisme n’y est plus possible, l’organisme officiel responsable devrait avoir la possibilité d’appliquer des mesures d’enrayement, et non des mesures d’éradication, afin de protéger au moins les sites de production, les végétaux présentant une valeur culturelle, sociale ou scientifique particulière ainsi que la frontière avec le reste du territoire de l’Union. Les mesures d’enrayement devraient viser à réduire au minimum la quantité d’inoculum bactérien dans cette zone et à maintenir la population de vecteurs au niveau le plus bas possible.
(8) Pour assurer une protection efficace du reste du territoire de l’Union contre l’organisme spécifié et compte tenu de la possibilité que l’organisme spécifié se propage par des voies naturelles ou anthropiques autres que les mouvements des végétaux spécifiés destinés à la plantation, il convient d’établir une zone de surveillance immédiatement à l’extérieur de la zone tampon entourant la zone infectée de la province de Lecce.
[...] »
9 La décision d’exécution 2015/789 a été modifiée par la décision d’exécution (UE) 2015/2417 de la Commission, du 17 décembre 2015 (JO 2015, L 333, p. 43), puis par la décision d’exécution 2016/764, dont les considérants 1 à 4 sont ainsi libellés :
« (1) Depuis l’adoption de la décision d’exécution [2015/789], et jusqu’en février 2016, plusieurs foyers de [Xf] (ci-après “l’organisme spécifié”) dans différentes parties de la zone située autour de la province de Lecce ont été notifiés à la Commission par l’Italie. Ces foyers se sont déclarés dans de nombreuses municipalités situées dans les provinces de Tarente et de Brindisi. En outre, le dernier audit effectué par la Commission en novembre 2015 a confirmé que les activités de surveillance requises par la décision d’exécution [2015/789] n’ont été menées que dans une mesure très limitée dans la zone située autour de la province de Lecce (région des Pouilles, en Italie). Cet audit a également confirmé que l’actuel programme d’enquêtes ne permettait toujours pas d’assurer la détection précoce de nouveaux foyers ou de déterminer de façon précise l’ampleur réelle de la propagation de l’organisme spécifié dans la zone.
(2) Le dernier audit a confirmé le risque d’une propagation rapide de l’organisme spécifié dans le reste de la zone concernée. Pour cette raison, et compte tenu de la taille de cette zone, il est approprié d’étendre la zone infectée où des mesures d’enrayement peuvent s’appliquer au-delà des limites de la province de Lecce et de ne permettre le déplacement des végétaux spécifiés en dehors de cette zone que dans des conditions très strictes. Cette extension doit avoir lieu sans délai en tenant compte du fait que le risque de propagation de l’organisme spécifié dans le reste du territoire de l’Union augmente avec le début de la période de vol des insectes vecteurs au début du printemps. La zone infectée devrait par conséquent être étendue de façon à couvrir les municipalités ou parties de certaines municipalités des provinces de Brindisi et Tarente où des foyers de l’organisme spécifié se sont déclarés ou dans lesquelles il est probable que cet organisme est déjà répandu et établi. Cette zone infectée ne devrait toutefois pas inclure la superficie qui a été déclarée par l’Italie comme indemne de l’organisme spécifié avant l’adoption de la présente décision.
(3) Pour des raisons de sécurité juridique, la formulation de l’article 7, paragraphe 2, [sous] c), devrait être modifiée pour préciser clairement que les mesures qui seront prises conformément à cet article s’appliquent dans la zone infectée et non en dehors de celle-ci.
(4) Pour assurer une protection efficace du reste du territoire de l’Union contre l’organisme spécifié, et dans la perspective de l’élargissement de la zone d’enrayement, il convient de remplacer la zone de surveillance par de nouvelles prescriptions concernant la surveillance dans cette zone d’enrayement. Ces prescriptions devraient s’appliquer à une zone d’une largeur de 20 kilomètres depuis les limites de la zone tampon et s’étendre à cette zone d’enrayement, et à la zone tampon avoisinante de 10 kilomètres. »
10 L’article 1er de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, intitulé « Définitions », prévoit :
« Aux fins de la présente décision, on entend par :
a) “organisme spécifié”, toute sous-espèce de [Xf] ;
b) “végétaux hôtes”, tous les végétaux destinés à la plantation, à l’exception des semences, appartenant aux genres ou espèces énumérés dans la base de données de la Commission répertoriant les végétaux hôtes sensibles à [Xf] sur le territoire de l’Union, qui se sont révélés sensibles à l’organisme spécifié sur le territoire de l’Union ou qui se sont révélés sensibles à une ou à plusieurs sous–espèces de l’organisme spécifié lorsqu’un État membre a délimité une zone en fonction uniquement d’une ou de plusieurs sous-espèces de l’organisme spécifié, conformément l’article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa ;
c) “végétaux spécifiés”, les végétaux hôtes et tous les végétaux destinés à la plantation [...] ;
[...] »
11 L’article 4 de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, intitulé « Établissement de zones délimitées », dispose :
« 1. Lorsque la présence de l’organisme spécifié est confirmée, l’État membre concerné délimite sans délai une zone conformément au paragraphe 2 (ci-après la “zone délimitée”).
[...]
2. La zone délimitée se compose d’une zone infectée et d’une zone tampon.
La zone infectée englobe tous les végétaux dont l’infection par l’organisme spécifié est connue, tous les végétaux présentant des symptômes d’une éventuelle infection par ledit organisme et tous les autres végétaux susceptibles d’être infectés par cet organisme en raison de leur proximité immédiate avec des végétaux infectés ou, si elle est connue, d’une source de production qu’ils ont en commun avec des végétaux infectés ou des végétaux qui en sont issus.
En ce qui concerne la présence de l’organisme spécifié dans la province de Lecce et dans les municipalités énumérées à l’annexe II, la zone infectée comprend au moins cette province et ces municipalités ou, selon le cas, des parcelles cadastrales (“fogli”) de ces municipalités.
La zone tampon s’étend sur au moins 10 kilomètres autour de la zone infectée.
[...] »
12 L’article 6 de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, intitulé « Mesures d’éradication », est ainsi libellé :
« 1. L’État membre ayant établi la zone délimitée visée à l’article 4 prend dans cette zone les mesures énoncées aux paragraphes 2 à 11.
2. L’État membre concerné procède, dans un rayon de 100 mètres autour des végétaux qui ont fait l’objet d’analyses ayant révélé une infection par l’organisme spécifié, à l’enlèvement immédiat :
a) des végétaux hôtes, quel que soit leur statut sanitaire ;
b) des végétaux dont l’infection par l’organisme spécifié est connue ;
c) des végétaux qui présentent des symptômes d’une éventuelle infection par ledit organisme ou qui sont soupçonnés d’être infectés par ledit organisme.
[...]
7. L’État membre concerné surveille la situation relative à la présence de l’organisme spécifié en menant des enquêtes annuelles à des moments opportuns. Il procède à des inspections visuelles des végétaux spécifiés et réalise des prélèvements d’échantillons et des analyses sur des végétaux symptomatiques, ainsi que sur des végétaux asymptomatiques se trouvant à proximité de ceux-ci.
Dans les zones tampons, la superficie qui fait l’objet d’une enquête est quadrillée en carrés de 100 mètres de côté. Des inspections visuelles sont réalisées dans chacun de ces carrés.
[...]
9. L’État membre concerné prend, si nécessaire, des mesures axées sur toute particularité ou complication raisonnablement envisageable et susceptible d’empêcher, d’entraver ou de retarder l’éradication de l’organisme spécifié, notamment en ce qui concerne l’accessibilité à tous les végétaux infectés ou soupçonnés de l’être, indépendamment de leur localisation, de la nature de la propriété (publique ou privée) ou de la personne ou entité qui en a la responsabilité, ainsi que leur destruction appropriée.
[...] »
13 Aux termes de l’article 7 de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, intitulé « Mesures d’enrayement » :
« 1. Par dérogation à l’article 6, et uniquement dans la zone infectée visée à l’article 4, paragraphe 2, troisième alinéa, l’organisme officiel responsable de l’État membre concerné peut décider d’appliquer des mesures d’enrayement telles qu’elles sont exposées aux paragraphes 2 à 7 [...]
2. L’État membre concerné procède immédiatement à l’enlèvement d’au moins tous les végétaux dont l’infection par l’organisme spécifié a été constatée s’ils sont situés dans un des lieux suivants :
[...]
c) à un endroit de la zone infectée visée à l’article 4, paragraphe 2, troisième alinéa, situé à une distance maximale de 20 kilomètres de la démarcation entre cette zone infectée et le reste du territoire de l’Union.
[...]
7. L’État membre concerné surveille la situation relative à la présence de l’organisme spécifié en menant des enquêtes annuelles à des moments appropriés de l’année dans les zones situées à la distance de 20 kilomètres visée au paragraphe 2, [sous] c).
[...] »
14 L’annexe II de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, qui contient la liste des municipalités visées à l’article 4, paragraphe 2, de celle-ci, inclut des municipalités situées dans les provinces de Brindisi et de Tarente.
La procédure précontentieuse
15 Le 11 décembre 2015, compte tenu de la propagation de la bactérie Xf dans la région des Pouilles et de la détérioration constante de la situation depuis le mois d’octobre 2013, la Commission a adressé aux autorités italiennes une lettre de mise en demeure, leur reprochant, d’une part, d’avoir omis de procéder à l’enlèvement des végétaux infectés et de ceux soumis à des obligations précises, conformément à l’article 6, paragraphe 2, et à l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution 2015/789, et, d’autre part, de ne pas avoir satisfait à l’obligation d’effectuer des enquêtes, conformément à l’article 6, paragraphe 7, et à l’article 8, paragraphe 2, de cette décision d’exécution.
16 Le 10 février 2016, les autorités italiennes ont répondu à cette lettre de mise en demeure en soulignant, notamment, que le Tribunale amministrativo regionale del Lazio (tribunal administratif régional du Latium, Italie) avait adopté des mesures suspensives et, le 22 janvier 2016, avait saisi la Cour d’une demande de décision préjudicielle, au titre de l’article 267 TFUE, concernant la validité de l’article 6, paragraphe 2, sous a), de la décision d’exécution 2015/789 ayant pour objet l’obligation d’abattage dans un rayon de 100 mètres autour des végétaux infectés. Les autorités italiennes ont fait savoir que, du fait de ces évolutions judiciaires, l’abattage des arbres a accusé un retard considérable et que la mise à exécution d’une partie de la décision d’exécution 2015/789 était devenue juridiquement impossible.
17 Le 25 juillet 2016, la décision d’exécution 2016/764 ayant modifié la portée géographique des griefs invoqués dans la lettre de mise en demeure du 11 décembre 2015, la Commission a adressé aux autorités italiennes une lettre de mise en demeure complémentaire, dans laquelle elle a fait état du manquement continu et persistant, par la République italienne, aux obligations spécifiques lui incombant en vertu de la décision d’exécution 2015/789 modifiée et de l’obligation générale visée à l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2000/29. La Commission a fait valoir, en outre, que la République italienne enfreignait le principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE. Par ailleurs, cette lettre de mise en demeure faisait état, notamment, du défaut d’enlèvement immédiat des végétaux infectés et de défaillances en matière d’enquêtes.
18 Le 26 août 2016, les autorités italiennes, répondant à la lettre de mise en demeure complémentaire, ont mis en exergue que les obstacles judiciaires à la mise à exécution de la surveillance et des mesures d’enlèvement prévues par la décision d’exécution 2015/789 modifiée avaient été levés et que ces activités avaient été reprises ou étaient sur le point de l’être, tout en fournissant des renseignements supplémentaires concernant la mise à exécution des mesures d’enrayement ainsi que les activités de surveillance menées au cours des années 2015 et 2016.
19 Le 14 juillet 2017, la Commission a émis un avis motivé, dans lequel elle reprochait à la République italienne plusieurs manquements au droit de l’Union. Premièrement, elle faisait grief à cette dernière de ne pas avoir procédé, en violation de l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, à l’abattage immédiat des végétaux infectés dans la zone d’enrayement. Deuxièmement, la Commission lui reprochait d’avoir violé l’article 6, paragraphes 3, 7 et 9, ainsi que l’article 7, paragraphes 2, 3 et 7, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, au motif que cet État membre avait manqué à son obligation de veiller à ce qu’il soit procédé, tant dans la zone d’enrayement que dans la zone tampon, au prélèvement d’échantillons dans un rayon de 100 mètres autour des végétaux infectés ainsi qu’à la surveillance de la situation relative à la présence de Xf au moyen d’enquêtes annuelles réalisées à des moments opportuns. Troisièmement, la Commission faisait valoir que la République italienne avait commis un manquement constant et général à l’obligation d’adopter les mesures nécessaires pour empêcher la propagation de Xf, en violation de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2000/29, ainsi que de l’article 6, paragraphe 2, et de l’article 7, paragraphe 2, de ladite décision d’exécution 2015/789 modifiée. Quatrièmement, elle faisait grief à cet État membre d’avoir enfreint l’obligation de coopération loyale, prévue à l’article 4, paragraphe 3, TUE, du fait de diverses omissions en raison desquelles ledit État membre n’avait pas été en mesure d’empêcher la propagation de la maladie sur plus de 40 kilomètres dès l’année 2015.
20 Le 14 septembre 2017, les autorités italiennes ont répondu à cet avis motivé. Tout en reconnaissant la gravité de la situation et leur obligation de procéder à l’enlèvement immédiat des végétaux, ces autorités ont mis en exergue, notamment, que l’abattage a été considérablement amélioré grâce aux nouvelles procédures adoptées au niveau régional.
21 Estimant que, au mois de mai 2018, la République italienne ne s’était pas conformée à la demande d’intervention immédiate formulée dans l’avis motivé en vue d’empêcher la propagation de Xf et que, du fait de la persistance des manquements énumérés, l’organisme nuisible s’était fortement propagé dans la zone d’enrayement et dans la zone tampon, la Commission a introduit le présent recours.
Sur le recours
Sur le premier grief, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution 2015/789 modifiée
Argumentation des parties
22 Par son premier grief, la Commission reproche à la République italienne de ne pas avoir respecté l’obligation d’enlèvement immédiat des végétaux infectés, prévue à l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, en laissant de nombreux végétaux sur place durant plusieurs mois, voire parfois plus d’une année, après que l’infection eut été détectée et pendant la période de vol des insectes vecteurs. Or, le délai qui s’écoule entre le moment où la maladie est détectée et celui où il est procédé à l’abattage effectif des végétaux infectés devrait se limiter à quelques jours et, en tout état de cause, ne pas excéder dix jours ouvrables, en fonction des circonstances.
23 En l’occurrence, la proportion des végétaux infectés abattus par les autorités italiennes à l’expiration du délai fixé par l’avis motivé, à savoir le 14 septembre 2017, aurait atteint seulement 78 % des végétaux infectés recensés lors de l’exercice de surveillance relatif à l’année 2016 et il aurait encore subsisté, à cette date, 191 arbres à enlever. En outre, l’analyse des informations fournies par ces autorités mettrait en exergue des délais considérables entre le moment où les végétaux infectés sont recensés et celui où une injonction d’abattage est délivrée et notifiée, à savoir environ huit semaines. La nécessité d’identifier les propriétaires et de leur notifier la mesure d’abattage serait l’une des principales raisons du retard. Lorsque cette identification se révèle impossible, la mesure d’abattage ne serait pas notifiée et les autorités ne pourraient donc pas procéder à l’abattage. De plus, si le propriétaire s’oppose à la mesure, les autorités italiennes ne pourraient pas garantir l’enlèvement immédiat des végétaux infectés.
24 L’obligation de procéder immédiatement à un tel enlèvement impliquerait cependant que les autorités compétentes agissent sans tarder. À cet égard, l’expérience acquise en Italie et dans d’autres États membres dans lesquels la présence de la bactérie Xf a été décelée démontrerait qu’il est possible d’enlever un arbre infecté en moins d’une semaine. En revanche, lorsque le temps écoulé entre la détection de la bactérie et l’abattage des végétaux infectés a été très supérieur à ce délai, la bactérie continuerait à se propager. Dès lors que la majeure partie des insectes vecteurs peuvent se déplacer sur une distance allant jusqu’à 100 mètres en l’espace de 12 jours, il serait crucial d’intervenir immédiatement. Cela serait d’autant plus le cas s’agissant des mesures d’enrayement dans la partie de la zone infectée visée à l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, dans laquelle l’obligation d’enlèvement porte uniquement sur les végétaux infectés.
25 Réduire au minimum le laps de temps entre la détection des végétaux infectés et leur enlèvement constituerait donc l’unique moyen d’empêcher la propagation de l’organisme nuisible dans le reste de l’Union. Les États membres auraient à cet égard une obligation de résultat. En effet, étant d’application directe, la décision d’exécution 2015/789 modifiée ne laisserait aucune marge d’appréciation à l’État membre quant à sa mise en œuvre. L’obligation d’enlever les végétaux infectés ne saurait donc être interprétée en ce sens qu’elle se limite à prévoir les mesures d’enlèvement des végétaux, et non l’exécution desdites mesures.
26 Dans l’arrêt du 9 juin 2016, Pesce e.a. (C‑78/16 et C‑79/16, EU:C:2016:428), la Cour aurait confirmé que la Commission a pu légitimement considérer que l’obligation d’enlèvement immédiat des végétaux infectés était une mesure appropriée et nécessaire pour prévenir la propagation de la bactérie Xf. Elle aurait également reconnu que la Commission avait mis en balance les différents intérêts en cause. Cela vaudrait à plus forte raison pour la mesure visée à l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, en vertu de laquelle seuls les arbres infectés doivent être enlevés. En outre, l’importance de procéder rapidement à l’enlèvement des végétaux infectés avant le début de la période de vol des insectes vecteurs serait plus cruciale encore au regard du retard constant et permanent qui est enregistré en matière d’enquêtes annuelles.
27 Les problèmes juridiques et pratiques allégués par la République italienne, dus à l’identification des propriétaires des terrains et aux recours formés par certains d’entre eux, ne sauraient justifier que l’enlèvement des arbres infectés n’ait eu lieu que plusieurs mois après la détection de l’infection. Cet État membre pourrait encore moins faire valoir des dispositions nationales à caractère général, quand bien même celles-ci auraient été prises en vertu d’autres dispositions du droit de l’Union. La Commission n’entendrait pas s’opposer à la participation adéquate des propriétaires et à l’exercice de leurs droits et de leurs moyens de recours. Toutefois, conformément à l’article 6, paragraphe 9, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, l’obligation de résultat relative à l’abattage des arbres imposerait à la République italienne d’adopter toutes les mesures nécessaires pour pouvoir agir immédiatement dès la détection d’un arbre infecté. Ainsi, au cours de l’année 2015, les autorités italiennes auraient eu recours à des mesures nationales d’urgence pour faire face au premier foyer.
28 La République italienne soutient que l’expression « immédiatement », prévue à l’article 7, paragraphe 2, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, doit être comprise en tenant compte du contenu de l’obligation elle-même et des conditions juridiques qui la régissent.
29 En effet, l’adoption d’une mesure telle que l’enlèvement des végétaux infectés ayant des conséquences significatives sur le droit de propriété individuel, il serait indispensable d’identifier au préalable le propriétaire et de notifier la mesure à celui-ci. Or, en l’espèce, compte tenu du régime particulier de propriété et de gestion des terrains agricoles de la région des Pouilles, il aurait été très difficile d’identifier les propriétaires, dès lors que, dans un nombre significatif de cas, ceux-ci seraient décédés ou résideraient en dehors de la région des Pouilles, ce qui aurait retardé les notifications. En outre, un nombre considérable d’oliviers de très large dimension serait visé.
30 En outre, l’ordonnance du 18 décembre 2015 de la Procura della Repubblica di Lecce (procureur de la République de Lecce, Italie), ayant décrété la saisie conservatoire d’urgence de tous les oliviers qui auraient dû être abattus, aurait entraîné l’impossibilité juridique de mettre en œuvre les mesures, entre le 28 décembre 2015, date de la confirmation de cette ordonnance par le Giudice delle indagini preliminari presso il Tribunale di Lecce (juge des enquêtes préliminaires près du tribunal de Lecce, Italie), et le 25 juillet 2016, date de la levée de la saisie.
31 L’adoption des mesures d’enlèvement en cause aurait aussi fait l’objet de fortes contestations corroborées par l’absence de certitude suffisante, pendant la période d’application de ces mesures, quant au lien entre le phénomène du dessèchement des oliviers et la bactérie Xf. Cette incertitude n’aurait été levée que par l’avis scientifique de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) du 31 mars 2016. Il existerait cependant toujours, au niveau national, une campagne de désinformation suggérant que les végétaux infectés doivent non pas être abattus, mais traités.
32 Par ailleurs, il serait inexact de considérer que la décision d’exécution 2015/789 modifiée prévoit une obligation de résultat à la charge des États membres, consistant à veiller à ce que les arbres infectés soient abattus dans un délai très restreint après l’établissement de l’état d’infection. En effet, le libellé de l’article 7, paragraphe 2, de cette décision d’exécution 2015/789 modifiée se référerait à un comportement, à savoir « enlever », et non au résultat de ce comportement. En l’absence d’une telle obligation de résultat, l’existence d’un manquement exigerait, ainsi qu’il ressort des points 107 et 108 de l’arrêt du 5 avril 2017, Commission/Bulgarie (C‑488/15, EU:C:2017:267), une analyse au cas par cas du caractère approprié de l’effort diligent de l’État membre, indépendamment de la réalisation de la finalité de la réglementation. Or, en l’occurrence, l’activité complexe de réglementation, d’organisation et de gestion des moyens réalisée par la République italienne en ce qui concerne l’adoption et la mise en œuvre des mesures en question démontrerait le respect par celle-ci des obligations qui lui incombent en vertu de ladite décision d’exécution 2015/789 modifiée.
Appréciation de la Cour
33 En vertu de l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, l’État membre concerné était tenu, dans la zone dite « d’enrayement », correspondant à la partie de la zone infectée incluant la province de Lecce et les municipalités énumérées à l’annexe II de celle-ci, toutes situées dans les provinces de Brindisi et de Tarente, de procéder « immédiatement » à l’enlèvement, en tant que mesure d’enrayement, d’au moins tous les végétaux dont l’infection par l’organisme spécifié, à savoir la bactérie Xf, a été constatée s’ils sont situés dans un endroit de cette zone situé à une distance maximale de 20 kilomètres de la démarcation entre ladite zone et le reste du territoire de l’Union (ci-après la « bande des 20 kilomètres de la zone d’enrayement »).
34 Selon la jurisprudence constante de la Cour, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé, de sorte que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêt du 21 mars 2019, Commission/Italie, C‑498/17, EU:C:2019:243, point 29 et jurisprudence citée).
35 En l’occurrence, le délai fixé dans l’avis motivé expirait le 14 septembre 2017.
36 Or, la République italienne ne conteste pas que, à cette date, sur un total de 886 végétaux infectés recensés lors de l’enquête réalisée au titre de l’exercice de surveillance relatif à l’année 2016, une proportion significative d’entre eux, à savoir 191, représentant près de 22 % du total des végétaux infectés, n’avaient pas encore été enlevés dans la bande des 20 kilomètres de la zone d’enrayement.
37 En outre, cet État membre ne conteste pas non plus que l’enlèvement des végétaux infectés dans cette bande de 20 kilomètres, lorsqu’il a eu lieu, n’a été effectué qu’après l’écoulement d’un délai de plusieurs mois à la suite du constat de l’infection de ces végétaux.
38 Or, le libellé de l’article 7, paragraphe 2, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée est rédigé, à cet égard, dans des termes qui ne laissent place à aucun doute raisonnable. En effet, le terme « immédiatement », employé dans cette disposition, ne saurait, eu égard à son sens habituel dans le langage courant, se concilier avec un délai de plusieurs semaines, voire, comme en l’occurrence, de plusieurs mois.
39 Cette interprétation s’impose d’autant plus que, selon les avis de l’EFSA, du 6 janvier 2015 et du 17 mars 2016, dont les constatations n’ont pas été contestées sur ce point, seul un enlèvement rapide des végétaux infectés est de nature à éviter la propagation de la bactérie Xf. En effet, ainsi qu’il ressort des données scientifiques fournies par la Commission à l’appui de son recours, lesquelles n’ont pas davantage été remises en cause par la République italienne, l’insecte vecteur, en l’occurrence, la cicadelle, se déplace de près de 100 mètres en l’espace de seulement 12 jours.
40 Ainsi, le rapport d’audit établi par la Commission pour l’année 2018 [Final report of an audit carried out in Italy from 28 May 2018 to 1 June 2018 in order to evaluate the situation and official controls for [Xylella fastidiosa] (rapport final d’audit réalisé en Italie entre le 28 mai 2018 et le 1er juin 2018 afin d’évaluer la situation et les contrôles officiels de Xylella fastidiosa), DG (SANTE) 2018-6485, p. 23-24] (ci-après le « rapport d’audit de 2018 ») souligne explicitement que plus de 90 % des cas positifs d’infection identifiés au cours de l’exercice de surveillance relatif à l’année 2016, clôturé au mois de mai 2017, ont été découverts à proximité de végétaux recensés comme infectés au cours de l’année 2015 et dont l’arrachage a été effectué avec d’importants retards.
41 Contrairement à ce que fait valoir la République italienne, l’exigence d’immédiateté imposée à l’article 7, paragraphe 2, de la décision 2015/789 modifiée ne saurait être interprétée comme concernant uniquement l’adoption des mesures par les autorités nationales en vue de faire procéder à cet enlèvement.
42 En effet, il découle tant du libellé de cette disposition, qui exige sans ambiguïté l’« enlèvement » des végétaux infectés, que de l’effet utile de celle-ci que cette exigence ne peut se rapporter qu’à l’enlèvement lui-même, dès lors que seul l’enlèvement effectif des végétaux infectés, et non l’adoption des mesures imposant celui-ci, est de nature à éviter la propagation de la bactérie Xf, qui, ainsi qu’il ressort, notamment, des considérants 4, 7 et 8 de la décision d’exécution 2015/789, ainsi que des considérants 1, 2 et 4 de la décision d’exécution 2015/2417, constitue l’objectif poursuivi par la décision d’exécution 2015/789 modifiée et, notamment, par les mesures d’enrayement (voir, par analogie, arrêt du 9 juin 2016, Pesce e.a., C‑78/16 et C‑79/16, EU:C:2016:428, point 54).
43 Un tel enlèvement est ainsi de nature à réaliser la finalité visée par la directive 2000/29, sur le fondement de laquelle la décision d’exécution 2015/789 modifiée a été adoptée, qui est de garantir un haut niveau de protection phytosanitaire contre l’introduction dans l’Union d’organismes nuisibles dans les produits importés de pays tiers (voir, en ce sens, arrêt du 30 septembre 2003, Anastasiou e.a., C‑140/02, EU:C:2003:520, point 45).
44 Il en résulte que l’article 7, paragraphe 2, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée impose aux États membres une obligation de résultat précise concernant l’enlèvement des végétaux infectés par la bactérie Xf et que le constat objectif d’une violation de cette obligation suffit, à lui seul, à démontrer l’existence d’un manquement. La situation en cause dans la présente affaire n’est donc pas comparable à celle examinée par la Cour aux points 107 et 108 de l’arrêt du 5 avril 2017, Commission/Bulgarie (C‑488/15, EU:C:2017:267), invoqué par la République italienne.
45 S’agissant des différents obstacles matériels, administratifs et juridiques avancés par la République italienne afin de justifier le retard pris pour enlever les végétaux infectés situés dans la bande des 20 kilomètres de la zone d’enrayement, tirés du nombre élevé d’oliviers de très large dimension, de l’obligation, selon le droit national, d’identifier les propriétaires des parcelles concernées ainsi que de leur notifier les mesures d’enlèvement et des recours juridictionnels introduits en vue de faire obstacle à l’abattage, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, un État membre ne peut exciper de situations de son ordre interne pour justifier le non-respect des obligations et des délais résultant du droit de l’Union (voir, notamment, arrêt du 21 mars 2019, Commission/Italie, C‑498/17, EU:C:2019:243, point 35 et jurisprudence citée).
46 Au demeurant, la République italienne n’a pas contesté qu’il lui aurait été loisible, ainsi que la Commission l’a fait valoir, d’adopter des mesures nationales d’urgence prévoyant, à l’instar de celles prises au cours de l’année 2015, des procédures plus rapides afin de surmonter de tels obstacles administratifs et juridiques.
47 Par ailleurs, s’il est vrai que la saisie conservatoire ordonnée, dans le cadre d’une procédure pénale, par le Procura della Repubblica di Lecce (procureur de la République de Lecce) et validée par le Giudice delle indagini preliminari presso il Tribunale di Lecce (juge des enquêtes préliminaires près le Tribunal de Lecce), a été de nature à empêcher, au cours de la première partie de l’année 2016, l’enlèvement des oliviers infectés dans toute la zone concernée, il y a lieu, toutefois, de constater, ainsi que l’a fait valoir la Commission sans être valablement remise en cause par le gouvernement italien, que les autorités italiennes, à la suite de la levée de cette saisie conservatoire, n’ont pas adopté les mesures immédiates exigées à l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution 2015/789 modifiée.
48 Il convient, en conséquence, d’accueillir le premier grief.
Sur le deuxième grief, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 7, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée
Argumentation des parties
49 Par son deuxième grief, la Commission reproche à la République italienne de ne pas avoir respecté l’obligation de surveiller la présence de la bactérie Xf dans la bande des 20 kilomètres de la zone d’enrayement, conformément à l’article 7, paragraphe 7, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée.
50 En l’occurrence, pour l’année 2016, l’enquête visant à déceler la présence de la bactérie Xf aurait débuté au mois d’août 2016 et se serait terminée au mois de mai 2017. Quant à l’enquête réalisée au titre de l’exercice de surveillance relatif à l’année 2017, elle aurait commencé au mois de juillet 2017 et se serait achevée au mois d’avril 2018. Ces enquêtes auraient ainsi en partie été effectuées à des moments de l’année non propices à la détection des symptômes d’une infection sur les végétaux et les arbres à feuilles caduques, à savoir durant les mois d’hiver, lorsque les arbres et les plantes herbacées à feuilles caduques n’avaient plus de feuilles. Par conséquent, l’efficacité des inspections visuelles, en tant que moyen de détection de cas suspects d’infection, s’en serait trouvée compromise.
51 Or, l’obligation de réaliser une enquête annuelle « à des moments appropriés de l’année », au sens de l’article 7, paragraphe 7, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, exigerait, conformément à la finalité de celle-ci et de la directive 2000/29, qui est d’empêcher la propagation de la maladie, que cette enquête soit réalisée au cours d’une période de l’année où cette maladie peut être détectée, à savoir, s’agissant des oliviers, au cours de la période estivale. En outre, eu égard à l’obligation de fournir un rapport au plus tard le 31 décembre et afin de permettre l’élimination des végétaux infectés avant l’arrivée du printemps, époque à laquelle l’insecte vecteur de la bactérie Xf commence à se propager, l’enquête devrait être clôturée avant la fin de l’année.
52 La décision d’exécution 2015/789 modifiée obligerait donc les États membres à achever leur campagne de surveillance annuelle de manière à pouvoir présenter un rapport et un nouveau plan d’action pour l’année suivante avant la fin du mois de décembre. Cette décision d’exécution indiquerait ainsi clairement que la surveillance doit être effectuée au moment non seulement le plus approprié sur le plan scientifique pour déterminer les arbres infectés, mais aussi à celui qui garantit que les arbres puissent être abattus immédiatement et de manière certaine avant que ne débute la saison de vol suivante.
53 La République italienne fait valoir que le démarrage de la surveillance au mois d’août 2016 coïncide avec la période considérée comme optimale pour la majeure partie des hôtes de Xf, à savoir la période où les symptômes typiques du dessèchement des feuilles se manifestent sur les feuilles parvenues à maturité.
54 Par ailleurs, les infections causées par Xf différeraient par leurs symptômes et leur gravité en fonction des hôtes et de la sous-espèce de la bactérie. Ainsi, dans le cas de l’olivier, les lésions causées par l’infection se présenteraient non pas sous la forme des symptômes typiques du dessèchement des feuilles parvenues à maturité à la fin de la saison estivale, mais principalement sous celle d’un dessèchement typique des branches qui toucherait un nombre plus ou moins élevé de branches.
55 Or, les preuves recueillies sur le terrain indiqueraient que les symptômes peuvent se manifester toute l’année. Cela ressortirait également des lignes directrices relatives à l’enquête sur la présence de Xf sur le territoire de l’Union, du 16 décembre 2015, de la direction générale de la santé et de la sécurité alimentaire de la Commission, publiées sur le site Internet de celle-ci. De plus, les infections causées pendant la saison estivale pourraient être détectées sur l’olivier dès le troisième mois après l’éventuelle transmission. Il serait donc possible de relever de manière précoce, pendant la période hivernale, les infections qui étaient au stade initial et avaient eu lieu pendant la saison estivale précédente.
Appréciation de la Cour
56 En vertu de l’article 7, paragraphe 7, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, l’État membre concerné avait l’obligation de surveiller la situation relative à la présence de l’organisme spécifié en menant des enquêtes annuelles « à des moments appropriés de l’année » dans la bande des 20 kilomètres de la zone d’enrayement.
57 Si cette disposition n’impose pas, selon son libellé, que les enquêtes annuelles en question se déroulent à un moment défini de l’année, laissant ainsi aux autorités nationales compétentes une marge d’appréciation à cet égard, il demeure que, selon ce même libellé, ces enquêtes annuelles doivent être effectuées à un moment « approprié ».
58 Or, compte tenu de l’objectif poursuivi par la décision d’exécution 2015/789 modifiée, et, notamment, par les mesures d’enrayement visées à l’article 7, paragraphe 2, sous c), de celle-ci, qui, ainsi qu’il ressort du point 42 du présent arrêt, est de prévenir la propagation de la bactérie Xf, il convient de considérer que lesdites enquêtes doivent être réalisées à une période de l’année qui permet tout à la fois la détection de l’infection des végétaux et la mise en œuvre des mesures d’enrayement de cette infection, consistant, en vertu de cette disposition, à procéder à l’enlèvement immédiat des végétaux infectés.
59 En l’occurrence, il n’est pas contesté que l’enquête réalisée au titre de l’exercice de surveillance relatif à l’année 2016 afin de recenser la présence de la bactérie Xf dans la bande des 20 kilomètres de la zone d’enrayement a été initiée au mois d’août 2016 pour se terminer au mois de mai 2017.
60 Or, force est de constater que, comme la Commission le fait valoir à bon droit, une telle enquête, clôturée au cours du printemps, qui correspond à la saison de vol de l’insecte vecteur et, ce qui n’est pas contesté, à la période de reprise de la phase de propagation de la bactérie Xf, place, en pratique, les autorités nationales compétentes dans l’impossibilité de procéder à la mise en œuvre utile des mesures d’enrayement dans la bande des 20 kilomètres de la zone d’enrayement en enlevant les végétaux infectés avant le début de cette période de propagation.
61 Dès lors, même à supposer, comme le fait valoir la République italienne, que la bactérie Xf puisse être détectée pendant toute l’année, ce que conteste la Commission, il demeure que l’enquête annuelle prévue à l’article 7, paragraphe 7, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée devrait être terminée à un moment suffisamment précoce de l’année avant le début du printemps afin de permettre, conformément à l’exigence prévue au paragraphe 2, sous c), de cet article, l’enlèvement en temps utile des végétaux infectés.
62 Il convient, en conséquence, d’accueillir le deuxième grief.
Sur le troisième grief, tiré d’un manquement persistant et général à l’obligation d’adopter les mesures nécessaires pour éviter la propagation de la bactérie Xf
Argumentation des parties
63 Par son troisième grief, la Commission reproche à la République italienne un manquement persistant et général à l’obligation d’éviter la propagation de Xf, lequel se concrétiserait par des violations répétées et distinctes des mesures établies par la décision d’exécution 2015/789 modifiée. Ce manquement contreviendrait non seulement aux obligations découlant de l’article 6, paragraphes 2, 7 et 9, ainsi que de l’article 7, paragraphe 2, sous c), et paragraphe 7, de cette décision d’exécution, mais aussi à l’obligation fondamentale énoncée à l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2000/29 ainsi qu’à l’obligation de coopération loyale visée à l’article 4, paragraphe 3, TUE.
64 Un manquement général et persistant pourrait être constaté non seulement lorsqu’un État membre ne respecte pas les obligations lui incombant au titre du droit de l’Union relatives à des situations spécifiques auxquelles il a été remédié avant que la procédure d’infraction soit suffisamment avancée, mais également, et à plus forte raison, lorsque, comme en l’espèce, l’État membre concerné n’ayant pas remédié à des manquements antérieurs, ceux-ci ont entraîné la propagation d’une bactérie et ont, dès lors, imposé une modification des mesures adoptées par la Commission en ce qui concerne les zones spécifiques soumises aux obligations d’éradication et d’enrayement.
65 Ainsi, en l’occurrence, limiter la constatation de manquement aux obligations spécifiques découlant de la décision d’exécution applicable aux zones concernées à un moment déterminé reviendrait, pour la Commission, à tenter d’atteindre une cible mobile. Or, le but poursuivi par cette institution consisterait à éradiquer la bactérie Xf ou, tout au moins, à en empêcher la propagation en dehors de la zone actuellement infectée. Par conséquent, l’obligation fondamentale d’enlèvement des végétaux infectés resterait inchangée au fil du temps, même si elle devait s’appliquer à des zones différentes en vertu des décisions d’exécution successives. En outre, l’adoption d’une telle décision ne dispenserait pas les États membres de leur obligation fondamentale, découlant de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2000/29, d’adopter toutes les mesures nécessaires pour éviter la propagation de la bactérie Xf.
66 Le fait que les autorités italiennes ont omis, de manière persistante, d’enlever immédiatement les végétaux infectés dès la notification, au mois d’octobre 2013, du premier foyer détecté dans l’extrême sud de la région des Pouilles aurait permis, peu à peu, à la bactérie Xf de se propager tout le long du « talon de la botte italienne ». Cette propagation aurait été exacerbée par le manquement des autorités italiennes à leur obligation d’effectuer, en temps opportun, des enquêtes annuelles avant le début de la saison de vol de l’insecte vecteur.
67 Ainsi, les données transmises au cours de l’année 2018 par les autorités italiennes concernant les résultats de l’enquête effectuée, avec retard, au titre de l’année 2017 dans la zone d’enrayement, révéleraient la présence de plusieurs milliers d’arbres infectés et démontreraient, une nouvelle fois, les retards considérables pris pour l’abattage des arbres infectés durant la période de vol de l’insecte vecteur. En particulier, ces données, telles qu’elles figurent dans le rapport d’audit de 2018, montreraient la persistance, durant la saison de vol de l’insecte vecteur au cours de l’année 2018, d’un nombre élevé d’arbres infectés non abattus, ce qui aurait contribué à la propagation de la bactérie Xf. Étant donné que la zone d’enrayement et la zone tampon prévues aux termes de la décision d’exécution 2015/789 modifiée ne remplissaient plus, en pareil contexte, leurs fonctions, ces zones auraient été déplacées à deux reprises vers le nord. Ce déplacement démontrerait que la bactérie Xf s’est propagée de la province de Lecce à tout le territoire des provinces de Brindisi et de Tarente.
68 Le simple fait que les autorités d’un État membre n’aient pas été à même de prendre les mesures nécessaires pour empêcher la survenance d’une situation déterminée, telle que la dégradation de l’environnement, serait, à lui seul, la preuve du manquement. Ainsi, la propagation de la bactérie Xf dans toute la région des Pouilles et en direction du reste du continent entre les années 2013 et 2018, sans que les autorités italiennes aient été en mesure de l’empêcher, suffirait à démontrer que ces dernières ont constamment omis d’adopter les mesures nécessaires pour éviter la propagation de Xf, en violation des règles visées par le troisième grief.
69 La République italienne soutient que la propagation progressive de l’infection sur le territoire de la région des Pouilles, manifestement indésirable dans l’optique de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, ne lui est pas exclusivement imputable et n’est pas en elle-même susceptible de démontrer un manquement général et persistant commis par cet État membre.
70 Cette propagation serait, en effet, un phénomène naturel qui, en tant que tel, n’est pas automatiquement évitable grâce à l’action humaine, mais qui peut seulement être contrôlé et ralenti. Si l’activité de réglementation, d’organisation et de gestion des mesures exercée par les autorités publiques constitue l’un des éléments qui doivent être mis en œuvre afin de limiter la propagation de la bactérie, il ne serait pas raisonnable d’affirmer que cette activité doit en elle-même empêcher la propagation indésirable de l’infection. En effet, celle-ci dépendrait précisément de facteurs qui sont également exogènes à l’action de l’administration et, en tout état de cause, intrinsèques à la nature même du phénomène infectieux phytosanitaire.
Appréciation de la Cour
71 Par le présent grief, la Commission fait valoir, en substance, que le fait même que la bactérie Xf n’a cessé de se propager depuis l’année 2013 dans la région des Pouilles et que, partant, la République italienne n’a pas atteint le résultat visé par la décision d’exécution 2015/789 modifiée démontre que cet État membre a commis un manquement général et persistant à l’obligation d’adopter les mesures nécessaires pour empêcher la propagation de cette bactérie.
72 La Commission en déduit la violation répétée par la République italienne tant des obligations spécifiques prévues à l’article 7, paragraphe 2, sous c), et paragraphe 7, de cette décision d’exécution, qui ont fait l’objet des deux premiers griefs, que de celles prévues à l’article 6, paragraphes 2, 7 et 9, de ladite décision d’exécution. De ce fait, cet État membre enfreindrait également l’obligation fondamentale énoncée à l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2000/29 ainsi que l’obligation de coopération loyale visée à l’article 4, paragraphe 3, TUE.
73 À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que la Commission peut poursuivre concomitamment le constat de manquements à des dispositions précises du droit de l’Union en raison de l’attitude adoptée par les autorités d’un État membre à l’égard de situations concrètes, qui sont identifiées de manière spécifique, et celui de manquements auxdites dispositions du fait qu’une pratique générale contraire à celles-ci aurait été adoptée par ces autorités, dont lesdites situations spécifiques seraient, le cas échéant, l’illustration (voir, notamment, arrêts du 26 avril 2005, Commission/Irlande, C‑494/01, EU:C:2005:250, point 27, et du 2 décembre 2014, Commission/Italie, C‑196/13, EU:C:2014:2407, point 33).
74 En effet, une pratique administrative peut faire l’objet d’un recours en manquement lorsqu’elle présente un certain degré de constance et de généralité (voir, notamment, arrêts du 29 avril 2004, Commission/Allemagne, C‑387/99, EU:C:2004:235, point 28 ; du 26 avril 2005, Commission/Irlande, C‑494/01, EU:C:2005:250, point 28, ainsi que du 26 avril 2007, Commission/Italie, C‑135/05, EU:C:2007:250, point 21).
75 Selon la jurisprudence de la Cour, dans la mesure où le recours vise à faire constater un manquement d’ordre général dans le chef des autorités nationales compétentes, la circonstance qu’il a été remédié aux déficiences relevées dans tel ou tel cas particulier n’a pas nécessairement pour conséquence que l’attitude générale et continue de ces autorités, dont attesteraient, le cas échéant, de telles déficiences spécifiques, a cessé. Dans un tel cas, la production d’éléments complémentaires visant, au stade de la procédure devant la Cour, à étayer la généralité et la constance du manquement ainsi allégué ne saurait donc être exclue en principe (voir, notamment, arrêts du 26 avril 2005, Commission/Irlande, C‑494/01, EU:C:2005:250, points 32 et 37 ; du 5 avril 2017, Commission/Bulgarie, C‑488/15, EU:C:2017:267, point 42, ainsi que du 22 février 2018, Commission/Pologne, C‑336/16, EU:C:2018:94, points 47 et 48).
76 En particulier, l’objet d’un recours en manquement supposé persistant peut s’étendre à des faits postérieurs à l’avis motivé pour autant que ceux-ci sont de même nature et constitutifs d’un même comportement que les faits visés par cet avis (arrêts du 5 avril 2017, Commission/Bulgarie, C‑488/15, EU:C:2017:267, point 43, ainsi que du 22 février 2018, Commission/Pologne, C‑336/16, EU:C:2018:94, point 49).
77 Par ailleurs, il convient également de rappeler que la Commission, ainsi qu’elle le fait valoir à l’appui du présent grief, peut demander à la Cour de constater un manquement qui consisterait à ne pas avoir atteint le résultat visé par un acte du droit de l’Union (voir, en ce sens, notamment, arrêt du 27 avril 2006, Commission/Allemagne, C‑441/02, EU:C:2006:253, point 45 et jurisprudence citée).
78 Cela étant précisé, il demeure que, selon une jurisprudence constante relative à la charge de la preuve dans le cadre d’une procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué. C’est elle qui doit apporter à la Cour les éléments nécessaires à la vérification par celle-ci de l’existence de ce manquement, sans pouvoir se fonder sur une présomption quelconque [voir, notamment, arrêts du 27 avril 2006, Commission/Allemagne, C‑441/02, EU:C:2006:253, point 48, et du 2 mai 2019, Commission/Croatie (Décharge de Biljane Donje), C‑250/18, non publié, EU:C:2019:343, point 33].
79 Ainsi, certes, comme la Commission l’a à juste titre relevé, la Cour a déjà jugé que la persistance d’une situation de fait qui entraîne une dégradation significative de l’environnement pendant une période prolongée sans intervention des autorités compétentes peut révéler que les États membres ont outrepassé la marge d’appréciation qui leur est conférée par une disposition spécifique d’une directive pour atteindre l’objectif prescrit par cette disposition. Toutefois, la Cour a également précisé qu’il n’est, en principe, pas possible de déduire directement de la non-conformité d’une situation de fait avec cet objectif que l’État membre concerné a nécessairement manqué aux obligations imposées par ladite disposition (voir, en ce sens, arrêts du 26 avril 2007, Commission/Italie, C‑135/05, EU:C:2007:250, point 37, et du 16 juillet 2015, Commission/Slovénie, C‑140/14, non publié, EU:C:2015:501, point 69 ainsi que jurisprudence citée).
80 En particulier, eu égard à l’obligation lui incombant, rappelée au point 78 du présent arrêt, de prouver le manquement allégué, la Commission ne saurait, sous couvert de reprocher à l’État membre concerné un manquement général et persistant aux obligations auxquelles ce dernier est tenu en vertu du droit de l’Union au motif que le résultat assigné par celui-ci n’est pas atteint, se dispenser de respecter cette obligation de rapporter la preuve du manquement reproché sur la base d’éléments concrets caractérisant la violation des dispositions spécifiques qu’elle invoque et se fonder sur de simples présomptions ou des causalités schématiques (voir, en ce sens, arrêt du 22 février 2018, Commission/Pologne, C‑336/16, EU:C:2018:94, point 78).
81 Partant, en l’occurrence, le seul fait que le résultat visé par la décision d’exécution 2015/789 modifiée n’a pas été atteint ne permet pas à la Commission d’en déduire la violation par la République italienne des obligations spécifiques imposées par cette décision d’exécution afin de parvenir à ce résultat, sauf à démontrer, par ailleurs, en se fondant sur des preuves concrètes, que cet État membre a effectivement commis une telle violation.
82 Or, s’il ressort de l’examen des deux premiers griefs que la Commission a établi la violation par la République italienne des obligations spécifiques prévues à l’article 7, paragraphe 2, sous c), et paragraphe 7, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée et si les éléments de preuve avancés par celle-ci à l’appui du troisième grief, en particulier le rapport d’audit de 2018, font ressortir que cette violation s’est poursuivie après la date d’expiration du délai fixé dans l’avis motivé, cette institution n’apporte pas le moindre élément de preuve concret susceptible de démontrer la violation par cet État membre des obligations spécifiques prévues à l’article 6, paragraphes 2, 7 et 9, de cette décision d’exécution.
83 Cependant, la violation de ces dernières dispositions concernant les mesures d’éradication dans la zone délimitée, incluant la zone infectée et la zone tampon, qui portent tant sur les végétaux infectés que sur des végétaux se trouvant dans un rayon de 100 mètres autour des végétaux infectés, notamment, les végétaux hôtes de la bactérie Xf, quel que soit leur état sanitaire, ne peut en aucun cas être établie par les éléments démontrant la violation des dispositions distinctes prévues à l’article 7, paragraphe 2, sous c), et paragraphe 7, de ladite décision d’exécution, qui portent sur les seuls végétaux infectés dans la bande des 20 kilomètres de la zone d’enrayement, laquelle se trouve dans la seule zone infectée et n’en constitue qu’une partie.
84 Il en ressort que, en prétendant ainsi déduire la violation par la République italienne des obligations spécifiques prévues à l’article 6, paragraphes 2, 7 et 9, de la décision d’exécution 2015/789 de la constatation selon laquelle la bactérie Xf n’a cessé de se propager depuis l’année 2013 dans la région des Pouilles, la Commission aboutit à présumer l’existence d’une telle violation ainsi que celle d’un lien de causalité entre celle-ci et la propagation de la bactérie Xf.
85 Or, en l’absence de telles preuves concrètes de la violation de ces obligations spécifiques, il ne peut être exclu que, ainsi que le fait valoir à juste titre la République italienne, la propagation de la bactérie Xf résulte, au moins en partie, d’autres circonstances que d’une violation desdites obligations par cet État membre.
86 Il convient, dès lors, de constater que la Commission n’a pas établi que la République italienne a violé de manière répétée les obligations spécifiques prévues à l’article 6, paragraphes 2, 7 et 9, de la décision d’exécution 2015/789 modifiée.
87 Il s’ensuit que la Commission ne saurait non plus reprocher à la République italienne d’avoir commis une violation de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2000/29 et de l’article 4, paragraphe 3, TUE, les griefs formulés à cet égard par cette institution se fondant, de la même manière, sur le seul fait de la propagation de la bactérie Xf depuis l’année 2013 dans la région des Pouilles.
88 Dans ces conditions, il apparaît que la Commission n’a pas établi que la République italienne a commis un manquement général et persistant à l’obligation d’adopter les mesures nécessaires pour empêcher la propagation de la bactérie Xf par des violations répétées et distinctes des mesures prévues par la décision d’exécution 2015/789 modifiée.
89 En conséquence, il convient de rejeter le troisième grief.
90 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que la République italienne,
– en omettant de veiller, dans la zone d’enrayement, à ce qu’il soit procédé immédiatement à l’enlèvement d’au moins tous les végétaux dont l’infection par Xf a été constatée s’ils sont situés dans la zone infectée, à une distance maximale de 20 kilomètres de la démarcation entre cette zone infectée et le reste du territoire de l’Union, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution 2015/789 modifiée, et
– en omettant de garantir, dans la zone d’enrayement, la surveillance de la présence de Xf en menant des enquêtes annuelles à des moments opportuns de l’année, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 7, de cette décision d’exécution.
Sur les dépens
91 Aux termes de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure de la Cour, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. En l’espèce, les parties ayant succombé sur un ou plusieurs chefs, il y a lieu de décider que chacune d’elles supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) déclare et arrête :
1) La République italienne,
– en omettant de veiller, dans la zone d’enrayement, à ce qu’il soit procédé immédiatement à l’enlèvement d’au moins tous les végétaux dont l’infection par Xylellafastidiosa a été constatée s’ils sont situés dans la zone infectée, à une distance maximale de 20 kilomètres de la démarcation entre cette zone infectée et le reste du territoire de l’Union, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 2, sous c), de la décision d’exécution (UE) 2015/789 de la Commission, du 18 mai 2015, relative à des mesures visant à éviter l’introduction et la propagation dans l’Union de Xylellafastidiosa(Wells et al.), telle que modifiée par la décision d’exécution (UE) 2016/764 de la Commission, du 12 mai 2016, et
– en omettant de garantir, dans la zone d’enrayement, la surveillance de la présence de Xylellafastidiosa en menant des enquêtes annuelles à des moments opportuns de l’année, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 7, de cette décision d’exécution.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) La Commission européenne et la République italienne supportent chacune leurs propres dépens.
Signatures
* Langue de procédure : l’italien.
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