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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Czarnecki v Parliament (Order) French Text [2019] EUECJ T-230/18_CO (06 June 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/T23018_CO.html Cite as: EU:T:2019:395, [2019] EUECJ T-230/18_CO, ECLI:EU:T:2019:395 |
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ORDONNANCE DU TRIBUNAL (sixième chambre)
6 juin 2019 (*)
« Droit institutionnel – Membre du Parlement européen – Propos exprimés à l’encontre d’un autre député du Parlement – Cessation anticipée du mandat et des fonctions de vice-président du Parlement – Droits de la défense – Détournement de pouvoir – Égalité de traitement »
Dans l’affaire T‑230/18,
Ryszard Czarnecki, demeurant à Varsovie (Pologne), représenté par Me M. Casado García-Hirschfeld, avocat,
partie requérante,
contre
Parlement européen, représenté par M. N. Görlitz, Mme S. Seyr et M. S. Alonso de León, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision du Parlement du 7 février 2018 mettant fin de manière anticipée au mandat de vice-président du Parlement confié au requérant,
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de MM. G. Berardis, président, S. Papasavvas (rapporteur) et Mme O. Spineanu‑Matei, juges,
greffier : M. E. Coulon,
rend la présente
Ordonnance
Antécédents du litige
1 Le requérant, M. Ryszard Czarnecki, est député au Parlement européen depuis mai 2004. Le 1er juillet 2014, il a été élu vice-président, puis réélu le 1er janvier 2017.
2 Les 4 et 5 janvier 2017, le requérant a, sur son blog ainsi que lors d’un entretien diffusé sur une radio polonaise en ligne, comparé l’eurodéputé polonaise, Mme V., à des « szmalcownik » – expression polonaise désignant les collaborateurs des nazis pendant la seconde guerre mondiale – en affirmant que celle-ci aurait agi comme « un informateur contre son propre pays » (ci-après l’« incident »). Ces propos ont été tenus par le requérant en réaction à des critiques exprimées par Mme V. à l’égard du gouvernement polonais dans le cadre d’un documentaire diffusé sur une chaîne de télévision allemande.
3 Le 10 janvier 2018, les présidents de quatre groupes politiques du Parlement, à savoir le PPE, le S&D, l’ALDE et les Verts/ALE, ont adressé une lettre au président du Parlement dénonçant l’incident et exigeant que des mesures appropriées soient prises à l’égard du requérant compte tenu de ses déclarations. Ils ont notamment proposé d’appliquer l’article 21 du règlement intérieur du Parlement (ci-après le « règlement intérieur »), prévoyant la cessation anticipée du mandat de vice-président du Parlement.
4 Par lettre du 18 janvier 2018, adressée au président du Parlement, le requérant a réagi à cette démarche, en niant avoir prononcé les propos litigieux (ci-après la « lettre du 18 janvier 2018 »).
5 À cette même date, la conférence des présidents du Parlement s’est réunie et a discuté de l’incident ainsi que des suites à lui donner.
6 Le 23 janvier 2018, le président du Parlement a entendu le requérant dans le cadre d’une audition (ci-après l’« audition »), à l’issue de laquelle un compte rendu a été établi et adressé à la conférence des présidents du Parlement.
7 Le 1er février 2018, après avoir pris note des arguments présentés par le requérant, tant dans la lettre du 18 janvier 2018 que lors de l’audition, la conférence des présidents du Parlement, statuant à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés représentant au moins trois groupes politiques, a décidé, en application de l’article 21 du règlement intérieur, de proposer au Parlement de mettre un terme au mandat de vice-président du requérant de manière anticipée, pour faute grave.
8 Le 5 février 2018, une communication du président du Parlement, décrivant la procédure suivie à la suite de l’incident et annonçant le vote de la plénière au titre de l’article 21 du règlement intérieur, a été publiée.
9 Par lettre de la même date, adressée à l’ensemble des membres du Parlement, le requérant a critiqué la démarche suivie par le Parlement en précisant que ses déclarations n’avaient pas été faites dans son enceinte, mais dans le cadre d’un débat politique national.
10 Par décision du 7 février 2018 (ci-après la « décision attaquée »), adoptée à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés représentant la majorité des membres composant le Parlement, le requérant a été démis de ses fonctions de vice-président du Parlement.
Procédure
11 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 avril 2018, le requérant a introduit le présent recours.
12 Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, le requérant a introduit une demande en référé au titre des articles 278 et 279 TFUE tendant au sursis à l’exécution de la décision attaquée et à l’adoption de mesures provisoires visant à « ordonner le maintien d[e son] mandat » de vice-président. Cette demande a été rejetée par ordonnance du 4 mai 2018, Czarnecki/Parlement (T‑230/18 R, non publiée, EU:T:2018:262), et les dépens ont été réservés.
13 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 17 mai 2018, en application de l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, le requérant a produit une nouvelle offre de preuve, sur laquelle le Parlement a présenté ses observations.
14 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 12 novembre 2018, conformément à l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure, le requérant a demandé à être entendu dans le cadre d’une audience de plaidoiries.
Conclusions des parties
15 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner le Parlement à supporter les dépens.
16 Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours en partie comme irrecevable et en partie comme non fondé ;
– condamner le requérant à supporter les dépens.
En droit
17 Aux termes de l’article 126 du règlement de procédure, lorsqu’un recours est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sur proposition du juge rapporteur, à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.
18 En l’espèce, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sans poursuivre la procédure, et ce en dépit de la demande du requérant visant à la tenue d’une audience [voir ordonnance du 28 novembre 2016, SureID/EUIPO (SUREID), T‑128/16, non publiée, EU:T:2016:702, point 10 et jurisprudence citée].
Sur la recevabilité
19 Sans formellement soulever une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Parlement exprime des doutes quant au caractère attaquable de la décision attaquée, au sens de l’article 263 TFUE, du fait de sa nature politique et compte tenu de la jurisprudence applicable en matière de mesures d’organisation interne.
20 À cet égard, il convient de rappeler que le juge de l’Union européenne est en droit d’apprécier, suivant les circonstances de chaque espèce, si une bonne administration de la justice justifie de rejeter au fond le recours, sans statuer préalablement sur le grief d’irrecevabilité soulevé par la partie défenderesse (voir arrêt du 13 septembre 2012, Protégé International/Commission, T‑119/09, non publié, EU:T:2012:421, point 26 et jurisprudence citée).
21 Dans les circonstances du cas d’espèce et dans un souci d’économie de la procédure, il y a lieu d’examiner d’emblée le bien-fondé des conclusions en annulation du requérant, sans qu’il soit besoin de statuer préalablement sur la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement.
Sur le fond
22 À l’appui de son recours, le requérant soulève trois moyens, tirés, le premier, de la violation du droit à la présomption d’innocence, des droits de la défense, du principe d’égalité des armes, du principe de bonne administration et, en particulier, du droit d’être entendu visé à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, du principe de proportionnalité et du droit à la liberté d’expression, le deuxième, d’une erreur manifeste d’appréciation, d’un fumus persecutionis, d’un détournement de pouvoir ainsi que de la violation du principe d’égalité de traitement, et, le troisième, de la violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.
Observations liminaires
23 Premièrement, il importe de relever que le requérant se méprend sur le cadre juridique applicable en l’espèce. En effet, le requérant invoque, dans l’ensemble des moyens du recours, la méconnaissance des articles 165 et 166 du règlement intérieur, qui s’appliquent au déroulement des sessions parlementaires et portent sur les mesures disciplinaires ou sanctions pouvant être adoptées par le président du Parlement à l’égard de députés participant aux séances, en cas de non-respect par ces derniers des règles de conduite (ci-après les « règles de conduite »). Le requérant mentionne également les dispositions prévoyant les voies de recours internes offertes aux députés contre les sanctions disciplinaires dont ils font l’objet (voir l’article 167 du règlement intérieur), ainsi que la procédure prévue en cas de violation des règles de conduite et du code de conduite des députés en matière d’intérêts financiers et de conflits d’intérêts, annexé au règlement intérieur et adopté sur le fondement de son article 11, intitulé « Intérêts financiers des députés et règles de conduite ». À cet égard, il reproche au Parlement de ne pas avoir observé la procédure prévue par lesdites dispositions, avant de l’avoir prétendument accusé, « reconnu coupable » d’une « infraction » ou « puni » et de lui avoir infligé une « sanction », voire même d’avoir violé des principes issus du droit pénal ou figurant parmi les éléments du procès pénal équitable exigé par l’article 6, paragraphe 1, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, tels que le principe de la présomption d’innocence, ou applicables dans le cadre de procédures juridictionnelles, tels que le droit à un procès équitable.
24 Or, ainsi que le note à juste titre le Parlement, la décision attaquée a été adoptée sur le fondement de l’article 21 du règlement intérieur, qui fait partie des dispositions du titre I, intitulé « Députés, organes du Parlement et groupes politiques » et qui a trait à des questions de nature purement organisationnelle concernant notamment les mandats des députés, et non des articles 165 et 166 dudit règlement, lesquels prévoient l’adoption, par le président du Parlement, en tant que responsable du maintien de l’ordre des travaux parlementaires, de mesures à l’égard des députés en cas de non-respect des règles de conduite pendant le déroulement des sessions du Parlement, visées par le chapitre 4 du titre VII du même règlement.
25 Il convient de rappeler à cet égard que, aux termes de l’article 21, premier alinéa, du règlement intérieur, dans sa version applicable aux faits de l’espèce, la conférence des présidents du Parlement, statuant à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, représentant au moins trois groupes politiques, peut proposer au Parlement de mettre fin au mandat du président du Parlement, d’un vice-président, d’un questeur, ou à la fonction d’un président ou d’un vice-président d’une commission, d’un président ou d’un vice-président d’une délégation interparlementaire ou de tout autre titulaire d’une fonction élu au sein du Parlement, si elle considère que le député en question a commis une faute grave. Le Parlement statue sur cette proposition à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés représentant la majorité des députés qui le composent.
26 Certes, l’article 166, paragraphe 5, du règlement intérieur, qui a trait aux sanctions pouvant être adoptées à l’égard d’un député pour non-respect des règles de conduite, permet au président du Parlement de proposer à la conférence des présidents, notamment, la cessation anticipée d’un mandat de vice-président. Toutefois, force est de constater que, dans le contexte de cette disposition, une telle mesure vise à sanctionner un trouble de la séance ou une perturbation des travaux du Parlement d’une manière grave, en violation des principes définis à l’article 11 dudit règlement. Or, contrairement à ce que semble considérer le requérant en faisant référence à une atteinte ou à un trouble grave à l’ordre au sein du Parlement, rien de tel ne lui a été reproché en l’espèce.
27 De surcroît, ainsi que le relève à juste titre le Parlement, les organes compétents désignés par l’article 21 du règlement intérieur pour procéder à la cessation anticipée d’un mandat ou d’une fonction, à savoir la conférence des présidents et la plénière, ne disposent d’aucune compétence pour imposer des mesures ou sanctions disciplinaires en vertu des articles 165 et 166 dudit règlement. En effet, il découle de ces dernières dispositions que, selon le cas, les autorités compétentes sont le président du Parlement, voire les présidents des organes, des commissions ou délégations du Parlement, et le bureau.
28 Il s’ensuit que, contrairement à ce que prétend le requérant, la décision attaquée ne peut être assimilée ni à une sanction disciplinaire ni a fortiori à une sanction pénale qui lui aurait été infligée pour avoir commis une infraction. Partant, les articles 165 et 166 du règlement intérieur et, par voie de conséquence, les voies de recours qu’ils prévoient ou les droits qui en découlent n’avaient pas vocation à s’appliquer en l’espèce, de sorte que l’ensemble des arguments par lesquels le requérant entend s’en prévaloir ne sauraient prospérer.
29 Deuxièmement, il y a lieu de relever que, en raison du caractère intrinsèquement politique d’une décision adoptée sur le fondement de l’article 21 du règlement intérieur, concernant une fonction élective, le Parlement dispose d’un très large pouvoir d’appréciation pour l’adoption d’une telle décision, ce qui implique un contrôle restreint de la part du juge de l’Union.
Sur le premier moyen
30 D’une part, le requérant soutient, en substance, que la décision attaquée est irrégulière, illégale et contraire au droit à la présomption d’innocence, aux droits de la défense, au principe d’égalité des armes et au droit à un procès équitable, en ce qu’elle aurait eu pour effet de l’accuser et de lui infliger une sanction avant même qu’il n’eut l’occasion de se défendre, en violation de son droit d’être entendu.
31 D’autre part, le requérant prétend, en substance, que, dès lors qu’aucune procédure équitable n’aurait été régulièrement engagée à son encontre, telle qu’une procédure disciplinaire ou la procédure prévue en cas de non-respect des règles de conduite applicables aux députés, le Parlement n’a pas respecté son obligation d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce, en violation du principe de bonne administration, du principe de proportionnalité et en éludant toute procédure contradictoire. Dans ce contexte, outre la violation du droit d’être entendu et de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux, le requérant invoque la violation du droit d’accès au dossier le concernant, une insuffisance de motivation quant à la « nature exacte de la menace d’un comportement prétendument grave pour lequel il aurait été accusé et sanctionné », ainsi qu’une ingérence au droit de liberté d’expression dans la mesure où le Parlement lui aurait infligé une sanction pour avoir exprimé son opinion politique.
32 À la lecture de l’exposé des différents griefs invoqués à l’appui du présent moyen comme s’articulant prétendument en deux branches, bien que le requérant évoque la violation de droits fondamentaux tels que le droit à la présomption d’innocence, au demeurant non applicable en l’espèce (voir, en ce sens, arrêt du 29 novembre 2017, Montel/Parlement, T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 91) et le principe d’égalité des armes en tant que composante du principe de protection juridictionnelle effective, il en résulte que, outre la violation du principe de proportionnalité, le requérant tend, in fine, par son argumentation, à faire grief au Parlement de ne pas avoir respecté ses droits de la défense, en ce compris son droit d’être entendu, ainsi que son droit de recevoir une décision motivée, en tant qu’exigences liées au droit à un procès équitable et au droit à une bonne administration.
33 Partant, en premier lieu, il convient d’examiner si c’est à bon droit que le requérant reproche au Parlement d’avoir violé ses droits de la défense en l’espèce.
34 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les droits de la défense, qui comportent le droit d’être entendu et le droit d’accès au dossier, figurent au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union et consacrés par la charte des droits fondamentaux (voir arrêt du 10 septembre 2013, G. et R., C‑383/13 PPU, EU:C:2013:533, point 32 et jurisprudence citée).
35 Le respect des droits de la défense, dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci, doit être assuré même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure en cause. Ce principe exige que la personne concernée soit mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue au sujet des éléments qui pourraient être retenus à sa charge dans l’acte à intervenir (voir arrêt du 22 mars 2018, HJ/EMA, T‑579/16, non publié, EU:T:2018:168, points 67 et 68 et jurisprudence citée).
36 En outre, l’existence d’une violation des droits de la défense doit être appréciée en fonction des circonstances spécifiques de chaque cas d’espèce, notamment de la nature de l’acte en cause, du contexte de son adoption et des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 10 septembre 2013, G. et R., C‑383/13 PPU, EU:C:2013:533, point 34 et jurisprudence citée).
37 En l’espèce, bien que l’article 21 du règlement intérieur ne fasse peser sur le Parlement, la conférence des présidents et le président du Parlement, aucune obligation d’entendre l’intéressé, il convient de relever, tout d’abord, que, ainsi que le fait valoir le Parlement, le requérant a pu faire valoir son point de vue préalablement à l’adoption de la décision attaquée, et ce à trois reprises. À cet égard, premièrement, il convient de rappeler que, par le biais de la lettre du 18 janvier 2018, le requérant, en réaction à la lettre dénonçant l’incident qui avait été adressée au président du Parlement par les présidents de quatre groupes politiques le 10 janvier 2018, a exposé sa version des faits et a contesté la conduite qui lui avait été reprochée. Deuxièmement, il importe de relever, d’une part, que, conformément à l’engagement pris par le président du Parlement et approuvé par la conférence des présidents le 18 janvier 2018, le requérant a été entendu dans le cadre d’une audition et que, d’autre part, avant de voter en faveur d’une motion visant à la cessation anticipée de ses fonctions en tant que vice-président du Parlement à l’issue de sa réunion du 1er février 2018, la conférence des présidents a pris note des arguments présentés par le requérant tant dans la lettre du 18 janvier 2018 que lors de l’audition. Troisièmement, le requérant a présenté des observations complémentaires par le biais d’une lettre du 5 février 2018, adressée à l’ensemble des membres du Parlement.
38 Dans ces conditions, le requérant ne saurait sérieusement faire valoir que la proposition de mettre un terme à son mandat de vice-président a été présentée à ses collègues en séance plénière sans débat et sans qu’il ait eu l’opportunité de faire connaître son point de vue devant l’assemblée qui allait voter sa prétendue « sanction ». À cet égard, la circonstance que la conférence plénière n’ait pas estimé opportun de l’entendre oralement avant de procéder au vote final est dénuée de pertinence. En effet, le droit d’être entendu n’implique pas nécessairement la tenue d’un débat public dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci. Le respect des droits de la défense et du contradictoire n’implique par conséquent pas que l’adoption, par le Parlement, d’une décision concernant la cessation anticipée d’un mandat de vice-président soit nécessairement précédée d’un débat en séance plénière (voir, par analogie, arrêt du 17 janvier 2013, Gollnisch/Parlement, T‑346/11 et T‑347/11, EU:T:2013:23, points 178 et 179).
39 Par conséquent, sans même qu’il soit nécessaire de se prononcer sur sa recevabilité, il y a lieu d’écarter l’offre de preuve présentée par le requérant et citée au point 13 ci-dessus au soutien de son affirmation selon laquelle, malgré une demande en ce sens, il n’a pas pu se défendre avant le vote au Parlement.
40 S’agissant, ensuite, de la prétendue violation de son droit d’accès au dossier, il suffit de constater que, ainsi que le fait valoir le Parlement, il ne ressort pas des éléments du dossier que le requérant a sollicité l’accès au dossier ou aux documents visés au cours de la procédure ayant trait à la cessation de son mandat. En tout état de cause, il doit être relevé que le requérant a été étroitement associé à la procédure engagée à son encontre au titre de l’article 21 du règlement intérieur et qu’il connaissait les faits qui lui étaient reprochés.
41 Il s’ensuit qu’aucune violation des droits de la défense, du droit d’être entendu et du droit d’accès au dossier ne saurait être reprochée au Parlement, ni par voie de conséquence, du droit à un procès équitable, du principe d’égalité des armes et du principe de bonne administration.
42 Pour le surplus, dans la mesure où, par le présent moyen, le requérant vise à établir une violation de la procédure disciplinaire, des dispositions qui s’y rapportent ou des règles de conduite, en ce que le Parlement l’aurait « accusé », « inculpé » et lui aurait « infligé une sanction », en propageant une information prétendument fausse, construite à partir d’éléments sortis de leur contexte national et politique, il convient de le rejeter comme inopérant. En effet, ainsi qu’il a été constaté aux points 24 à 29 ci-dessus, la décision attaquée, qui n’a pas été adoptée dans le cadre d’une procédure disciplinaire et qui ne relève d’aucune des dispositions applicables à celle-ci, ne constitue pas une sanction.
43 Au demeurant, il suffit de relever que, si, dans ses lettres des 18 janvier et 5 février 2018, le requérant a nié avoir tenu les propos litigieux, tel n’est pas le cas dans la requête, dans laquelle il ne conteste pas la matérialité des faits et notamment le fait qu’il ait utilisé l’expression « szmalcownik ». En effet, il indique, tout d’abord, avoir prononcé le terme en question, lequel serait une expression polonaise désignant les collaborateurs des nazis, à l’attention de Mme V. et avoir déclaré qu’elle avait agi comme « un informateur contre son propre pays », cette dernière étant une opposante politique du gouvernement polonais. Or, il se borne, ensuite, à affirmer qu’ainsi qu’il l’avait indiqué dans ses lettres des 18 janvier et 5 février 2018, « contrairement à l’opinion dominante visiblement influencée par les déclarations de ses opposants politiques et divers communiqués de presse, il [n’]aurait pas employé [ladite expression] avec l’intention d’insulter son adversaire politique, ni même dans le cadre d’un débat au sein du Parlement, mais dans le contexte d[’un] débat politique polonais où elle n’a[urait] pas, de surcroît, la même résonance ». D’ailleurs, le fait qu’il a effectivement employé l’expression litigieuse à l’égard de la député polonaise en cause ressort tant de l’extrait de l’article publié sur son blog le 4 janvier 2018, produit par le Parlement et cité au point 2 ci-dessus, que du procès-verbal du compte rendu de l’audition, signé par le requérant lui-même.
44 Dans ces circonstances, le requérant ne saurait, en tout état de cause, faire utilement valoir que les membres du Parlement seraient partis de l’idée préconçue qu’il avait commis l’acte « incriminé » et auraient préjugé de l’appréciation des faits.
45 En deuxième lieu, s’agissant de la prétendue violation du principe de proportionnalité, il importe de relever que, outre le fait que les arguments avancés à son appui ne sont pas dépourvus d’ambiguïté, le requérant n’a nullement établi que la mesure de cessation des fonctions adoptée par le Parlement à son égard sur le fondement de l’article 21 du règlement intérieur était manifestement disproportionnée eu égard à l’objectif poursuivi, de manière à affecter sa légalité (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2018, De Geoffroy e.a./Parlement, T-788/16, non publié, EU:T:2018:534, point 127).
46 Au surplus, pour autant que, par le présent grief, le requérant reproche au Parlement, d’une part, l’absence d’engagement d’une procédure disciplinaire et, d’autre part, une ingérence disproportionnée dans l’exercice de sa liberté d’expression, dans la mesure où la décision attaquée lui aurait infligé une sanction pour avoir exprimé son opinion politique sans avoir établi qu’il aurait gravement porté atteinte à l’image ou troublé l’ordre au sein du Parlement, il convient de les écarter pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 43 ci-dessus.
47 En troisième lieu, quant à la prétendue insuffisance de motivation de la « nature exacte de la menace d’un comportement prétendument grave pour lequel il aurait été accusé et sanctionné », il suffit de rappeler que la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. Or, en l’espèce, d’une part, il ressort de la décision attaquée que celle-ci renvoie au procès-verbal de la séance du 7 février 2018 au cours de laquelle il est constant que la proposition de la conférence des présidents de mettre un terme au mandat de vice-président du requérant a été adoptée par le Parlement à bulletin secret, par 447 voix pour, 196 voix contre et 30 abstentions. D’autre part, force est de constater que le requérant a produit devant le Tribunal la communication du président du 5 février 2018 annonçant le vote sur la proposition de la conférence des présidents prévu le 7 février suivant et rappelant les différentes étapes suivies au titre de l’article 21 du règlement intérieur, que ladite proposition était fondée sur une faute grave et que cette faute était constituée par les déclarations du requérant à l’égard d’un autre député européen.
48 Partant, le grief tiré d’une insuffisance de motivation ainsi que le premier moyen dans son ensemble doivent être rejetés.
Sur le deuxième moyen
49 Le deuxième moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation, d’un préjudice aux activités politiques du requérant ou fumus persecutionis et d’un détournement de pouvoir, en ce que la décision attaquée aurait été adoptée par une majorité politique dans le seul but de lui porter préjudice, tout en s’affranchissant des droits fondamentaux, des garanties procédurales et de la règlementation interne applicable en matière disciplinaire. De plus, le requérant invoque la violation du principe d’égalité de traitement, en ce que le Parlement n’aurait pas sanctionné une autre député européenne pour avoir publié sur son compte Twitter des propos prétendument insultants et diffamatoires à son égard et pour lesquels les coprésidents du groupe politique ECR avaient saisi la conférence des présidents.
50 Le requérant considère que, dès lors que la décision attaquée est intervenue dans le contexte d’un débat politique sur la Pologne entre deux opposants au niveau national et non au sein du Parlement, elle a été convenue entre les groupes politiques majoritaires du Parlement, aux seules fins de nuire à son activité politique et de le discréditer, sans avoir eu recours à une procédure disciplinaire et en méconnaissance des garanties procédurales applicables. Pour ces motifs, elle serait entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.
51 Par ailleurs, il affirme que, conformément à la jurisprudence applicable en matière disciplinaire, il aurait dû bénéficier du droit d’être entendu. Faute d’une telle garantie procédurale, l’ingérence dans l’exercice de son droit à la liberté d’expression dont il aurait été victime représenterait une restriction disproportionnée, aggravée par le fait que ses déclarations n’ont pas eu lieu dans le cadre d’un débat au sein du Parlement. Il s’ensuivrait que le « pouvoir de sanction » aurait été appliqué pour une prétendue faute grave, alors que ni la nature des propos tenus, ni leur incidence sur son mandat de vice-président n’auraient fait l’objet d’une analyse quelconque, conformément à l’article 166 du règlement intérieur, aux termes duquel « l’appréciation des comportements observés doit prendre en considération leur caractère exceptionnel, récurrent ou permanent, ainsi que leur degré de gravité ».
52 À cet égard, premièrement, il suffit de constater que, eu égard aux considérations exposées aux points 24 à 29 et 47 ci-dessus, les arguments tirés de la méconnaissance des garanties procédurales applicables en matière disciplinaire qui auraient conduit à une ingérence disproportionnée dans l’exercice du droit du requérant à la liberté d’expression doivent être écartés, ainsi que, par identité de motifs, le grief tiré d’une erreur manifeste d’appréciation en ce que la « sanction pour prétendue faute grave » ne reposerait pas sur un examen conforme aux exigences de l’article 166 du règlement intérieur. Au demeurant, et pour autant que le requérant reproche au Parlement d’avoir violé son droit d’être entendu, il convient de rappeler que, ainsi qu’il a été conclu à l’issue de l’examen du premier moyen, ce droit a été respecté en l’espèce.
53 Deuxièmement, il importe de relever que, par les développements relatifs au présent moyen, le requérant ne soulève pas véritablement de grief tiré d’une erreur manifeste d’appréciation viciant la légalité des motifs de la décision attaquée, mais reproche, en substance, au Parlement d’avoir commis un détournement de pouvoir, qu’il mentionne d’ailleurs également.
54 À cet égard, il convient de rappeler qu’un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (voir arrêt du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement, T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 152 et jurisprudence citée).
55 Or, il doit être relevé que les éléments évoqués par le requérant dans le cadre du présent moyen et cités au point 51 ci-dessus ne constituent pas des indices permettant de considérer que la décision attaquée aurait été adoptée pour atteindre des fins autres que celles excipées, de sorte qu’ils ne sont pas en mesure d’établir l’existence d’un détournement de pouvoir. Partant, ledit grief doit être rejeté comme manifestement non fondé.
56 Troisièmement, s’agissant du grief pris de l’existence d’un fumus persecutionis, force est de constater qu’il est fait application d’une telle notion dans le contexte de demandes de levée d’immunité parlementaire de députés, et non dans le cadre de procédures de cessation prématurée des fonctions de vice-président telles que celle en cause en l’espèce. En effet, il y a lieu de rappeler que ladite notion a été définie dans un document de la commission juridique et du marché intérieur du Parlement, intitulé « Communication aux membres no 11/2003 », du 6 juin 2003, comme la présomption que les poursuites judiciaires à l’encontre d’un parlementaire sont entamées dans l’intention de porter atteinte à ses activités politiques. Or, il convient de relever que la décision attaquée ne constitue pas une « poursuite judiciaire », mais est issue d’une procédure mise en œuvre sur le fondement de l’article 21 du règlement intérieur. En tout état de cause, aucun élément ne démontre que ladite procédure aurait été entamée dans l’intention de porter atteinte aux activités politiques du requérant, d’autant plus que son mandat de député n’a nullement été affecté par la décision attaquée.
57 Il s’ensuit que le présent grief doit être écarté.
58 Quatrièmement, s’agissant du grief tiré de la violation du principe d’égalité de traitement invoqué par le requérant dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que les institutions sont tenues d’exercer leurs compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union, tels que le principe d’égalité de traitement et le principe de bonne administration, et que, eu égard à ces principes, il leur appartient de prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et de s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens. En outre, les principes d’égalité de traitement et de bonne administration doivent se concilier avec le respect de la légalité (voir arrêt du 17 janvier 2013, Gollnisch/Parlement, T‑346/11 et T‑347/11, EU:T:2013:23, point 109 et jurisprudence citée).
59 Il convient de rappeler, à cet égard, que le principe d’égalité de traitement s’oppose, notamment, à ce que des situations comparables soient traitées de manière différente, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 17 janvier 2013, Gollnisch/Parlement, T‑346/11 et T‑347/11, EU:T:2013:23, point 110 et jurisprudence citée).
60 Sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la nature comparable de la situation de l’eurodéputé Mme T. avec celle du requérant, il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le respect du principe d’égalité de traitement doit se concilier avec le respect du principe de légalité selon lequel nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité commise en faveur d’autrui (voir arrêt du 22 décembre 2005, Gorostiaga Atxalandabaso/Parlement, T‑146/04, EU:T:2005:584, point 141 et jurisprudence citée). Aussi, à supposer même que les reproches formulés par le requérant concernant le fait qu’une vice-présidente d’une commission parlementaire ayant tenu des propos diffamatoires à son égard n’a pas été démise de ses fonctions soient fondés, il ne saurait en tout état de cause en tirer profit (voir, en ce sens, arrêt du 22 décembre 2005, Gorostiaga Atxalandabaso/Parlement, T‑146/04, EU:T:2005:584, point 142).
61 Il s’ensuit que le grief tiré de la violation du principe d’égalité de traitement doit être écarté.
62 Partant, le deuxième moyen du recours doit être rejeté.
Sur le troisième moyen
63 Le troisième moyen est tiré de la violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, en ce qui concerne la procédure suivie et la légitimité du vote menant à la cessation prématurée de son mandat de vice-président.
64 D’une part, le requérant fait valoir que, bien qu’il soit évident que la décision attaquée a trait à sa conduite, le Parlement n’a suivi ni la procédure prévue en cas d’éventuelles violations des règles ou du code de conduite, ni la procédure disciplinaire et notamment l’article 167 du règlement intérieur qui prévoirait des voies de recours internes en cas de proposition de retrait d’un mandat au titre de son article 21. Or, d’après le requérant, en l’absence d’un cadre juridique et procédural équitable pour engager une procédure de cessation prématurée de ses fonctions de vice-président, le Parlement avait l’obligation de l’informer des motifs ayant justifié une telle démarche, de la procédure qu’il allait suivre ainsi que de ses droits, obligations et voies de recours, sous peine d’enfreindre les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime. D’autre part, il conteste la légitimité du vote et, notamment, la comptabilisation des voix, dans la mesure où elle aurait été fondée sur l’article 178, paragraphe 3, du règlement intérieur, lequel ne serait pas applicable aux sanctions administratives et ne tiendrait pas compte des abstentions en tant que votes exprimés.
65 Le Parlement excipe de l’irrecevabilité du présent moyen en ce que le requérant invoque l’absence de règles de procédure détaillées dans le règlement intérieur et demande, ainsi, au Tribunal, soit de constater une carence sur ce point soit de lui adresser une injonction.
66 D’emblée, il suffit de rappeler que, ainsi que cela a déjà été relevé notamment aux points 24 à 29 ci-dessus, et contrairement à ce que soutient le requérant, la procédure de cessation prématurée des fonctions ou d’un mandat de vice-président ne relève pas de la procédure disciplinaire, de sorte qu’il ne saurait utilement prétendre que le Parlement aurait dû suivre la procédure prévue en cas de non-respect des règles de conduite ou d’éventuelles violations du code de conduite en matière d’intérêts financiers et de conflits d’intérêts. Au demeurant, contrairement à la thèse soutenue par le requérant, l’article 167 du règlement intérieur, qui porte sur les voies de recours internes, ne prévoit pas de possibilité d’introduire un recours contre les décisions adoptées sur le fondement de l’article 21 dudit règlement, même dans le cas où le président du Parlement présente, conformément à l’article 166, paragraphe 5, de ce règlement, dans le contexte d’une procédure disciplinaire, une proposition de suspension ou de retrait d’un ou de plusieurs mandats ou fonctions exercés par l’intéressé au sein du Parlement conformément à la procédure définie à l’article 21 du même règlement.
67 Force est de constater, par ailleurs, que, la décision attaquée a été adoptée au titre de l’article 21 du règlement intérieur, lequel, contrairement à ce que fait valoir le requérant, prévoit une procédure particulière en ce qui concerne la cessation anticipée d’un mandat de vice-président. En outre, il suffit de relever que le recours à cette procédure a été évoqué à plusieurs reprises avant l’adoption de la décision attaquée. Partant, le requérant ne saurait utilement reprocher au Parlement d’avoir violé les principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique en omettant prétendument de l’informer des motifs ayant justifié une telle démarche, de la procédure qu’il allait suivre ainsi que de ses droits, obligations et voies de recours applicables.
68 S’agissant de la régularité de la procédure suivie, il résulte de l’article 21 du règlement intérieur, d’une part, qu’une majorité de trois cinquièmes des suffrages exprimés, représentant au moins trois groupes politiques, est requise au titre de la proposition présentée par la conférence des présidents au Parlement de mettre fin au mandat d’un vice-président si elle considère qu’il a commis une faute grave. D’autre part, aux fins de l’adoption d’une décision de cessation dudit mandat ou desdites fonctions, une majorité des deux tiers des suffrages exprimés représentant la majorité des députés qui composent le Parlement est nécessaire.
69 Or, en l’espèce, premièrement, il importe de constater qu’il ressort du dossier et, notamment, du procès-verbal de la conférence des présidents du 1er février 2018 que celle-ci a proposé de mettre fin au mandat de vice-président du requérant pour faute grave, conformément à l’article 21 du règlement intérieur, à l’issue d’un vote où s’est dégagée une large majorité, dépassant les trois cinquièmes des suffrages exprimés et représentant non pas trois, mais cinq groupes politiques.
70 Deuxièmement, il est constant que la proposition a été adoptée à 447 voix pour, 196 voix contre et 30 abstentions, en tenant compte des seules voix « pour » et « contre » en tant que suffrages exprimés.
71 Or, à cet égard, le requérant se limite à faire valoir que c’est à tort que le Parlement a, en application de l’article 178, paragraphe 3, du règlement intérieur, comptabilisé, au titre des suffrages exprimés, uniquement les voix « pour » et « contre », sans tenir compte des abstentions, contrairement à la pratique habituellement suivie, selon laquelle les abstentions seraient considérées comme des votes exprimés. Il affirme, par ailleurs, que cette disposition s’appliquerait en matière d’adoption de textes législatifs et non en matière de sanctions administratives internes à l’institution.
72 S’agissant de l’inapplicabilité prétendue de l’article 178, paragraphe 3, du règlement intérieur en l’espèce, il suffit de rappeler que, contrairement à ce qu’indique le requérant, une décision de cessation prématurée des fonctions de vice-président adoptée au titre de l’article 21 dudit règlement ne constitue pas une sanction. En outre, la procédure prévue au titre de l’article 21 de ce même règlement ne renvoie à aucune disposition ou procédure particulière pour le décompte des voix, mais se limite à prévoir les seuils des majorités requises, de sorte qu’il n’est pas permis de considérer que l’article 178, paragraphe 3, dudit règlement n’était pas applicable en l’espèce. En tout état de cause, le requérant n’explique pas sur quel fondement le Parlement aurait dû tenir compte des abstentions.
73 Partant, le requérant n’établit pas de violation de la procédure applicable et les griefs tirés de la violation des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique doivent être rejetés comme manifestement non fondés.
74 Au vu de tout ce qui précède, le troisième moyen doit être rejeté ainsi que le recours dans son ensemble comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.
Sur les dépens
75 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
76 Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé, conformément aux conclusions du Parlement.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
ordonne :
1) Le recours est rejeté.
2) M. Ryszard Czarnecki est condamné aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure de référé.
Fait à Luxembourg, le 6 juin 2019.
Le greffier | Le président |
E. Coulon | G. Berardis |
* Langue de procédure : le français.
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