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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> CSUE v KF (Abstract) French Text [2020] EUECJ C-14/19P (25 June 2020)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/C1419P.html
Cite as: EU:C:2020:492, [2021] 1 CMLR 36, ECLI:EU:C:2020:492, [2020] EUECJ C-14/19P

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Affaire C14/19 P

Centre satellitaire de l’Union européenne (CSUE)

contre

KF

 Arrêt de la Cour(deuxième chambre) du 25 juin 2020

« Pourvoi – Personnel du Centre satellitaire de l’Union européenne (CSUE) – Agent contractuel du CSUE – Plaintes pour harcèlement moral – Enquête administrative – Demande d’assistance – Suspension de l’agent – Procédure disciplinaire – Révocation de l’agent – Commission de recours du CSUE – Attribution d’une compétence exclusive pour connaître des litiges du personnel du CSUE – Recours en annulation – Article 263, premier et cinquième alinéas, TFUE – Recours en indemnité – Article 268 TFUE – Compétence du juge de l’Union – Recevabilité – Actes attaquables – Nature contractuelle du litige – Articles 272 et 274 TFUE – Protection juridictionnelle effective – Article 24, paragraphe 1, second alinéa, dernière phrase, TUE – Article 275, premier alinéa, TFUE – Principe d’égalité de traitement – Obligation de motivation incombant au Tribunal – Dénaturation des faits et des éléments de preuve – Droits de la défense – Principe de bonne administration »

1.        Agences de l’Union européenne – Centre satellitaire de l’Union européenne (CSUE) – Règlement du personnel – Procédure de recours – Possibilité pour le Conseil d’exclure la compétence tant des juridictions nationales que du Tribunal pour statuer sur les litiges entre le CSUE et ses agents – Absence

(Art. 2 et 19, § 1, 1er al., TUE ; art. 263, 5e al., TFUE ; décision du Conseil 2009/747/PESC, art. 28, § 6, et annexe X, point 1)

(voir points 59, 62-65)

2.        Recours en annulation – Actes susceptibles de recours – Notion – Actes produisant des effets juridiques obligatoires à l’égard de tiers – Décisions de suspension, d’ouverture d’une procédure disciplinaire et de révocation d’un agent contractuel adoptées par le Centre satellitaire de l’Union européenne – Inclusion

(Art. 263 et 270 TFUE ; décisions du Conseil 2009/747/PESC et 2014/401/PESC)

(voir points 69-77)

3.        Recours en annulation – Recours concernant en réalité un litige de nature contractuelle – Annulation d’un acte s’inscrivant dans un cadre contractuel – Incompétence du juge de l’Union au titre de l’article 263 TFUE – Irrecevabilité – Exception – Décisions adoptées par le Centre satellitaire de l’Union européenne ayant pour effet de mettre un terme au contrat de l’un de ses agents – Compétence exclusive d’une commission de recours – Nécessité d’assurer un contrôle juridictionnel effectif par une juridiction nationale ou de l’Union

(Art. 263, 268, 272 et 274 TFUE ; décision du Conseil 2009/747/PESC, art. 28, § 6)

(voir points 78-86)

4.        Politique étrangère et de sécurité commune – Compétence du juge de l’Union – Actes adoptés par le Centre satellitaire de l’Union européenne ayant pour effet de mettre un terme au contrat de l’un de ses agents – Inclusion

(Art. 24, § 1, 2d al., TUE ; art. 275, 1er al., TFUE ; décision du Conseil 2009/747/PESC, art. 28, § 6, et annexe X, point 1)

(voir points 92-95)

5.        Fonctionnaires – Principes – Droits de la défense – Obligation d’entendre l’intéressé avant l’adoption d’un acte lui faisant grief – Portée – Violation – Conséquences

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 41, § 2 ; décision du Conseil 2009/747/PESC, annexe IX, art. 1, § 1, et 2)

(voir points 117-121, 123)

Résumé

Dans l’arrêt CSUE/KF (C‑14/19 P), prononcé le 25 juin 2020, la Cour a confirmé, sur pourvoi, l’arrêt du Tribunal (1) qui avait, d’une part, annulé deux décisions du directeur du Centre satellitaire de l’Union européenne (CSUE) (2), portant respectivement suspension et révocation de KF, agent contractuel, et la décision de la commission de recours du CSUE rendue dans le même contentieux (ci-après, ensemble, les « décisions litigieuses ») ainsi que, d’autre part, condamné le CSUE à verser à KF la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi.

KF avait été recrutée par le CSUE à compter du 1er août 2009 en qualité de cheffe de la division administrative. Lorsque des dysfonctionnements dans les rapports humains au sein de cette division ont été relevés, et à la suite d’une plainte concernant le comportement et la conduite de KF, une enquête administrative a été ouverte à son encontre. À l’issue de cette enquête, le directeur adjoint du CSUE a conclu que les faits reprochés à KF étaient confirmés et constitutifs de harcèlement moral. En conséquence, le directeur du CSUE a décidé d’ouvrir une procédure disciplinaire à l’encontre de KF et de suspendre celle-ci de ses fonctions. Au terme de cette procédure, le directeur du CSUE a révoqué KF pour motif disciplinaire ; la réclamation administrative présentée par KF contre cette décision auprès du directeur du Centre a été rejetée, ainsi que le recours formé devant la commission de recours du CSUE, instance dont les décisions, exécutoires pour les deux parties, sont sans appel (3).

KF a introduit un recours devant le Tribunal tendant à l’annulation, notamment, des décisions litigieuses et à la condamnation du CSUE à lui verser les salaires non perçus et la somme de 500 000 euros au titre du préjudice moral subi. Au soutien de son recours, elle a, notamment, invoqué des moyens tirés des violations du principe de bonne administration, du principe d’impartialité et du principe du respect des droits de la défense. En outre, elle a soulevé, sur le fondement de l’article 277 TFUE, une exception d’illégalité de l’article 28, paragraphe 6, du règlement du personnel du CSUE, au motif que cette disposition ferait de la commission de recours la seule instance de contrôle de légalité des décisions du directeur du CSUE, soustrayant ainsi ces décisions à tout contrôle juridictionnel. Le Tribunal ayant accueilli l’exception d’illégalité et ayant fait partiellement droit au recours, le CSUE a introduit un pourvoi contre l’arrêt attaqué. À l’appui, il a soulevé quatre moyens, tirés respectivement de l’incompétence du Tribunal pour connaître du recours de première instance, de l’irrecevabilité de ce recours, d’une dénaturation des faits et d’une méconnaissance du principe de bonne administration et du principe du respect des droits de la défense.

Examinant, en premier lieu, les moyens tirés de l’incompétence du Tribunal pour connaître du recours en première instance et de l’irrecevabilité de ce dernier, la Cour a jugé, premièrement, que l’article 263, cinquième alinéa, TFUE, n’autorise pas à une institution de l’Union à introduire des conditions et modalités particulières que soustraient des litiges impliquant l’interprétation ou l’application du droit de l’Union à la compétence tant des juridictions des États membres que du juge de l’Union. Or, tel est l’effet de la disposition attribuant à la commission de recours des compétences exclusives pour appliquer et interpréter, sans possibilité d’appel, le règlement du personnel du CSUE, qui est contenu dans une décision adoptée par le Conseil et comporte de ce fait des dispositions du droit de l’Union. Partant, l’attribution exclusive de ces compétences à ladite commission est contraire à la jurisprudence de la Cour (4) selon laquelle l’article 19 TUE confie aux juridictions nationales et à la Cour la charge de garantir la pleine application du droit de l’Union.

Deuxièmement, la Cour a jugé que les décisions litigieuses remplissaient les conditions requises pour être regardées comme étant des actes attaquables, au sens de l’article 263 TFUE. En effet, elles fixent définitivement la position du CSUE et visent à produire des effets de droit obligatoires de nature à affecter les intérêts de KF, qui est sa destinataire et à qui elles font grief, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique. Par ailleurs, la Cour a relevé que le lien d’emploi existant entre KF et le CSUE, auquel l’article 270 TFUE n’est pas applicable, ne permet pas de considérer que le litige n’oppose pas le CSUE à un tiers au sens de l’article 263, premier alinéa, TFUE. Ce lien d’emploi n’exclut donc pas ce litige du champ d’application de cette disposition.

Troisièmement, la Cour a rappelé que la préservation de la cohérence du système juridictionnel exige, en principe, que le juge de l’Union renonce à l’exercice des compétences que lui confère l’article 263 TFUE, lorsque la situation juridique du requérant s’inscrit dans le cadre de relations contractuelles qui relèvent des compétences prévues aux articles 272 ou 274 TFUE. Cependant, dans un contexte où est exclu tout contrôle juridictionnel, au titre des articles 272 ou 274 TFUE, par les juridictions nationales et par le juge de l’Union des décisions adoptées par le CSUE, cette renonciation du juge de l’Union n’est pas justifiée par l’objectif de la préservation de la cohérence du système juridictionnel. Dans de telles conditions, afin d’assurer l’existence d’un contrôle juridictionnel effectif, il incombe au juge de l’Union d’exercer les compétences qui lui sont conférées par l’article 263 TFUE.

Quatrièmement, la Cour a souligné que, si le rattachement initial du CSUE à l’Union de l’Europe occidentale, qui est une organisation internationale intergouvernementale, avait impliqué, par le passé, que la situation du personnel du CSUE n’eût pu être assimilée à celle des agents de la Communauté européenne, tel n’est plus le cas depuis l’entrée en vigueur, le 1er décembre 2009, du traité de Lisbonne, les litiges entre le CSUE et son personnel faisant apparaître depuis cette date une situation comparable à celle des litiges opposant les agents de l’Union à leur employeur. De même, la dérogation à la compétence du juge de l’Union concernant les dispositions des traités relatives à la politique étrangère et de sécurité commune (5) n’exclut pas la compétence du juge de l’Union pour contrôler la légalité d’actes de gestion du personnel tels que les décisions litigieuses.

Examinant, en second lieu, le moyen fondé sur la méconnaissance du principe de bonne administration et du principe du respect des droits de la défense, la Cour a affirmé qu’il ressort tant du principe de bonne administration, qui comporte le droit à être entendu, que du règlement du personnel du CSUE (6) que le directeur adjoint du CSUE, avant de tirer des conclusions à l’issue de l’enquête interne et, en tout état de cause, le directeur du CSUE, avant d’ouvrir la procédure disciplinaire à l’encontre de KF, étaient tenus de respecter le droit de celle-ci d’être entendue. Ceux-ci devaient, à cette fin, communiquer à l’intéressée les faits la concernant et lui accorder un délai raisonnable pour préparer ses observations. Cette communication doit se faire, à tout le moins, au moyen d’un résumé des déclarations utilisées, établi dans le respect des éventuels intérêts légitimes de confidentialité des témoins consultés


1      Arrêt du Tribunal du 25 octobre 2018, KF/CSUE (T‑286/15, EU:T:2018:718)


2      Le 27 juin 1991, le Conseil des ministres de l’Union de l’Europe occidentale (UEO) a adopté une décision portant création d’un centre d’exploitation de données satellites. Le 10 novembre 2000, le Conseil de l’Union européenne a décidé de créer, sous la forme d’une agence de l’Union européenne, un centre satellitaire incorporant les éléments pertinents de celui établi au sein de l’UEO. Ce centre a été institué par l’action commune 2001/555/PESC du Conseil, du 20 juillet 2001, relative à la création d’un centre satellitaire de l’Union européenne (JO 2001, L 200, p. 5). Par la suite, le Conseil a adopté la décision 2014/401/PESC, du 26 juin 2014, relative au CSUE et abrogeant l’action commune 2001/555, relative à la création d’un centre satellitaire de l’Union européenne (JO 2014, L 188, p. 73), qui constitue désormais le cadre juridique applicable au CSUE


3      En vertu de l’article 28, paragraphe 6, de la décision 2009/747/PESC du Conseil, du 14 septembre 2009, concernant le règlement du personnel du Centre satellitaire de l’Union européenne (JO 2009, L 276, p. 1) (ci‑après le « règlement du personnel du CSUE »). La composition, le fonctionnement et la procédure propres à cette instance sont décrits dans l’annexe X de la décision 2009/747


4      Avis 1/17, du 30 avril 2019, EU:C:2019:341, point 111, et arrêt du 19 novembre 2019, A. K. e.a. (Indépendance de la chambre disciplinaire de la Cour suprême), C‑585/18, C‑624/18 et C‑625/18, EU:C:2019:982, point 167


5      Article 24, paragraphe 1, second alinéa, dernière phrase, TUE et article 275, premier alinéa, TFUE


6      Article 1er, paragraphe 1, et 2 de l’annexe IX du règlement du personnel du CSUE

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