Sanchez Romero Carvajal Jabugo v EUIPO - Embutidos Monells (5MS MMMMM) (EU trade mark - Judgment) French Text [2020] EUECJ T-639/19 (02 December 2020)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/T63919.html
Cite as: ECLI:EU:T:2020:581, EU:T:2020:581, [2020] EUECJ T-639/19

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

2 décembre 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative 5MS MMMMM – Marque de l’Union européenne figurative antérieure 5J – Motifs relatifs de refus – Absence de risque de confusion – Absence de similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Absence d’atteinte à la renommée – Article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001) »

Dans l’affaire T‑639/19,

Sánchez Romero Carvajal Jabugo, SAU, établie à El Puerto de Santa María (Espagne), représentée par Me J. Iglesias Monravá, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Palmero Cabezas, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Embutidos Monells, SA, établie à San Miguel de Balenya (Espagne), représentée par Mes L. Broschat García et L. Polo Flores, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 24 juillet 2019 (affaire R 1728/2018-4), relative à une procédure d’opposition entre Sánchez Romero Carvajal Jabugo et Embutidos Monells,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Spielmann (rapporteur), président, Mme O. Spineanu‑Matei et M. R. Mastroianni, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 25 septembre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 20 décembre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 5 décembre 2019,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 février 2017, l’intervenante, Embutidos Monells, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 29 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, à la description suivante : « Viande ; volaille [viande] ; gibier ; extraits de viande ; saucisses séchées ; produits à base de viande transformée ; conserves de viande, charcuterie ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2017/050 du 14 mars 2017.

5        Le 12 juin 2017, la requérante, Sánchez Romero Carvajal Jabugo, SAU, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne figurative antérieure enregistrée le 5 juillet 2015 sous le numéro 9 335 662, reproduite ci-après :

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7        La marque antérieure désigne des produits relevant, notamment, de la classe 29 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « Viande, poisson, viande de volaille et viande de gibier ; extraits de viande ; fruits et légumes, herbes potagères et légumineuses en conserve, congelés, séchés et cuits ; gelées, confitures, compotes ; œufs, lait et produits laitiers ; huiles et graisses comestibles ».

8        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 [devenus respectivement article 8, paragraphe 1, sous b), et article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001].

9        Le 5 juillet 2018, la division d’opposition a accueilli l’opposition dans son intégralité en application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, en concluant que l’utilisation de la marque demandée pour tous les produits désignés reviendrait à tirer indûment profit de la renommée de la marque antérieure et en considérant qu’il était inutile d’évaluer l’opposition fondée sur le motif énoncé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

10      Le 4 septembre 2018, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 24 juillet 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a accueilli le recours. En particulier, elle a considéré, en ce qui concerne le moyen tiré de l’article article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, que le public pertinent était composé du grand public de l’Union européenne, dont le niveau d’attention pour les produits alimentaires concernés ne serait ni faible ni particulièrement élevé. S’agissant de la comparaison des produits concernés, elle a relevé que ceux-ci étaient identiques. Par ailleurs, s’agissant de la comparaison des signes, elle a constaté que les signes en cause présentaient, au plus, un faible degré de similitude visuelle. Sur la similitude phonétique, elle a indiqué que, même dans le cas où lesdits signes devaient être prononcés sous une forme abrégée, la coïncidence dans leur partie initiale ne pouvait produire qu’une faible similitude phonétique en raison des différences significatives en matière de rythme, d’intonation et de nombre de syllabes. En outre, elle a considéré que l’indication d’une référence numérique à deux lettres distinctes de l’alphabet n’était pas de nature à créer une similitude conceptuelle pertinente entre ces signes. S’agissant du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, elle a considéré que ce dernier était normal. Elle a déduit de ces circonstances qu’il n’existait pas de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

12      En ce qui concerne le moyen tiré de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, la chambre de recours a considéré que, en l’absence de preuve concluante de la renommée de la marque antérieure, il n’était pas nécessaire d’examiner si les autres conditions cumulatives de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement, trouvaient application.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        refuser l’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

14      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

15      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        rejeter l’opposition et autoriser l’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité de certains éléments de preuve déposés pour la première fois devant le Tribunal

16      La requérante produit « par précaution » des documents, qu’elle désigne comme les « annexes A 12 à A 14 », aux fins d’établir davantage la renommée de la marque antérieure.

17      L’EUIPO et l’intervenante invoquent l’irrecevabilité des annexes A 13 à A 16 de la requête, dès lors qu’elles ont été produites pour la première fois devant le Tribunal. L’intervenante formule le même grief à l’égard de l’annexe A 17 de la requête.

18      En l’espèce, il y a lieu, tout d’abord, de relever que les documents mentionnés au point 61 de la requête comme les « annexes A 12 à A 14 », correspondent, selon la liste dressée par la requérante au point 78 de la requête et le résumé des annexes inclus à la fin de celle-ci, aux documents figurant aux annexes A 14 à A 16 de la requête. Ces annexes contiennent respectivement un certificat émis par l’Association Andema, daté du 13 décembre 2017, cinq décisions de l’Oficina Española de Patentes y Marcas (l’Office des brevets et des marques espagnol) ayant refusé des marques espagnoles relevant de la classe 29, dont trois sont datées de 2018 et les deux autres de septembre 2019 ainsi que deux articles de presse, datés du début 2018. La requérante reconnaît, en substance, dans la requête que lesdites annexes ont été présentées pour la première fois devant le Tribunal.

19      Par ailleurs, l’« annexe A 13 », ainsi désignée au point 78 de la requête et dans le résumé des annexes inclus à la fin de la requête, contient, selon les dires de la requérante, « des documents justificatifs complémentaires à l’appui de la renommée de la marque antérieure » et datant de 2012, de 2013, de 2014, de 2015 et de 2016. Enfin, l’annexe A 17 de la requête inclut un article paru sur Internet le 16 février 2019, selon lequel le jambon ibérique produit par la marque antérieure était la grande attraction du menu à l’occasion de la 92cérémonie des Oscars du cinéma. Force est de constater que ces annexes de la requête ont également été présentées pour la première fois devant le Tribunal.

20      Dès lors, ces pièces, produites pour la première fois devant le Tribunal, ne peuvent être prises en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter les documents susvisés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probatoire [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 19].

21      Par conséquent, les annexes A 13 à A 17 de la requête doivent être écartées comme irrecevables.

 Sur le fond

22      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 9 février 2017, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12 et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

23      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par l’EUIPO à l’article 8 paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, comme visant l’article 8 paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement d’une teneur identique du règlement no 207/2009.

24      À l’appui du recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, respectivement, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 et de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.

25      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

26      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

 Sur le public et le territoire pertinents

27      En l’espèce, la chambre de recours a relevé, sans être contredite par la requérante, que l’examen du risque de confusion devait être mené au regard du grand public composé des consommateurs ayant un niveau d’attention moyen et situé sur le territoire de l’Union. Cette appréciation de ladite chambre n’est pas entachée d’erreur.

 Sur la comparaison des produits

28      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude des produits et des services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur finalité, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

29      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les produits « viande, volaille (viande), gibier, extraits de viande » figuraient également dans la liste des produits couverts par la marque antérieure et qu’ils étaient donc identiques. Quant aux « saucisses séchées, produit à base de viande transformée, conserves de viande et charcuterie », elle a estimé qu’ils étaient également identiques, dès lors qu’il s’agissait de produits dérivés de la viande et qu’ils étaient donc repris sous le libellé « viande » couvert par la marque antérieure. La requérante et l’EUIPO ne contestent pas les appréciations de ladite chambre quant à la comparaison de tous les produits concernés.

30      Toutefois, l’intervenante fait valoir que les produits désignés par les marques en conflit sont totalement différents du fait que les produits élaborés par la requérante, à savoir des jambons de bellota, sont des produits de luxe, vendus dans les rayons gourmet des supermarchés ou par des établissements différents. Néanmoins, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les choix commerciaux, effectués ou susceptibles d’être effectués par les titulaires des marques en conflit, sont des facteurs devant être distingués des droits tirés de ces marques et, dans la mesure où ils ne dépendent que de la volonté des titulaires desdites marques, ne sont pas immuables. Aussi longtemps que la liste des produits désignés par les marques en conflit n’a pas été modifiée, de tels facteurs ne pourraient avoir une incidence quelconque sur l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [voir arrêt du 28 avril 2016, Zehnder Group International/EUIPO – Stiebel Eltron (comfotherm), T‑267/14, non publié, EU:T:2016:252, point 60 et jurisprudence citée].

31      En outre, il ressort de la jurisprudence que des produits peuvent être considérés comme identiques lorsque les produits que désigne la marque antérieure sont inclus dans une catégorie plus générale visée par la demande de marque [voir arrêt du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM’S BABY-PROP), T‑133/05, EU:T:2006:247, point 29 et jurisprudence citée].

32      Par conséquent, l’appréciation de la chambre de recours quant à l’identité des produits concernés est exempte d’erreur.

 Sur la comparaison des signes

33      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

34      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

35      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les signes en cause présentaient, tout au plus, un faible degré de similitude visuelle et une faible similitude phonétique. Elle a également conclu à l’absence de similitude conceptuelle entre lesdits signes. Elle a estimé que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure était normal pour conclure à l’absence de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

36      La requérante conclut que les signes en cause sont pratiquement identiques sur le plan visuel et sont similaires sur les plans phonétique et conceptuel. Elle fait valoir que ces similitudes sont susceptibles de donner lieu à un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

37      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

–       Sur la comparaison visuelle

38      La chambre de recours a considéré, sur le plan visuel, que, bien que les signes en cause coïncident en ce sens que tous deux comportaient le chiffre 5 à l’intérieur d’une figure circulaire, des différences visuelles nombreuses et importantes, notamment la différence totale entre les lettres majuscules « M » et « J », ne passeraient pas inaperçues aux yeux du consommateur, d’autant plus que lesdits signes étaient composés d’un petit nombre d’éléments. Elle a conclu à cet égard qu’il existe un faible degré de similitude visuelle entre ces signes.

39      La requérante allègue que les éléments verbaux « 5j » et « 5ms », inscrits dans un cercle, sont les éléments les plus distinctifs et dominants visuellement des signes en cause. Elle ajoute qu’il existe une identité graphique presque parfaite entre eux, dès lors qu’ils consistent tous deux en la prononciation du chiffre 5 dans une même graphie, suivie d’une lettre majuscule, le tout à l’intérieur d’un cercle.

40      Il y a lieu de relever, tout d’abord, que bien que le chiffre 5 soit un élément de taille importante au sein des signes en cause, il est suivi par les lettres majuscules « J » et « M » respectivement dans la marque antérieure et la marque demandée. Étant donné que les consonnes « j » et « m », suivent dans chacun desdits signes le chiffre 5 et qu’elles ont des dimensions proportionnellement similaires à ce dernier, la chambre de recours a, sans commettre d’erreur, considéré que les éléments verbaux « 5j » et 5ms », et non le chiffre 5 pris isolément, dominaient l’impression d’ensemble dégagée par ces signes.

41      En outre, il convient de constater que les signes en cause intègrent les éléments verbaux « 5ms » et « 5j » dans un cercle. Néanmoins, ces éléments se distinguent par leur couleur. En particulier, l’élément verbal « 5ms » figure en couleur noire dans une police de caractères standard au tracé fin. L’élément verbal « 5j » est quant à lui reproduit dans différentes nuances de couleur dorée.

42      Par ailleurs, la marque demandée se distingue visuellement de la marque antérieure par la quintuple reproduction de la consonne « m » en lettres majuscules et en couleur blanche, placée au-dessous de l’élément verbal « 5ms » dans une taille nettement plus petite que celui-ci, ainsi que par la présence de la lettre majuscule « S » en son sein. À l’inverse, la reproduction graphique de deux glands dans la marque antérieure, de taille suffisamment importante pour être immédiatement perceptible par le public pertinent, ne trouve pas d’équivalent dans la marque demandée.

43      Enfin, il est vrai que les éléments verbaux « 5j » et « 5ms » sont inclus dans des cercles. Cependant, outre le fait que, ainsi que la chambre de recours l’a à juste titre relevé, l’utilisation d’une telle figure géométrique est abondamment utilisée sur le marché pour mettre en évidence des éléments verbaux ou graphiques auxquels on souhaite conférer de l’importance, l’emplacement, la taille et la couleur des cercles au sein de chaque signe présentent des différences chromatiques et stylistiques qui peuvent être identifiées par le consommateur.

44      Au vu de ce qui précède, les signes en cause intègrent, en tant qu’élément commun, le chiffre 5 dans un cercle. Toutefois, ils présentent des différences visuelles importantes qui seront identifiées par le public pertinent. Dès lors, contrairement à ce que la requérante soutient, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a qualifié de faible le degré de similitude de ces signes sur le plan visuel.

–       Sur la comparaison phonétique

45      La chambre de recours a admis que, même dans le cas où les signes en cause seraient prononcés sous une forme abrégée, le consommateur observerait des différences significatives en matière de rythme, d’intonation et de nombre de syllabes, de sorte que la coïncidence dans la partie initiale desdits signes produirait une faible similitude phonétique.

46      La requérante fait valoir que les signes en cause sont phonétiquement similaires dans la mesure où ils consistent tous deux en la prononciation du chiffre 5.

47      Il convient tout d’abord de relever que, selon la jurisprudence, lors de la comparaison sur le plan phonétique de deux signes qui comportent des éléments verbaux, seuls ceux-ci doivent être pris en compte, tandis que leurs éventuels éléments figuratifs relèvent plutôt de l’analyse des signes sur le plan visuel [arrêt du 9 juillet 2019, Hugo’s Hotel/EUIPO – H’ugo’s (HUGO’S BURGER Bar), T‑397/18, non publié, EU:T:2019:489, point 74].

48      En l’espèce, contrairement à ce qui a été considéré par la chambre de recours, la quintuple reproduction de la lettre « m » dans la marque demandée ne sont pas susceptibles de distinguer les signes en cause. En particulier, cette quintuple reproduction apparaît davantage comme une répétition graphique de l’élément verbal « 5ms » et, de surcroît, elle est difficilement prononçable. Par conséquent, en ce qui concerne la comparaison phonétique, il y a lieu de tenir compte uniquement de l’élément verbal « 5ms » de la marque demandée et de le comparer à l’élément verbal « 5j » de la marque antérieure.

49      Ainsi, les signes en cause ont en commun le chiffre 5 qui sera le premier élément prononcé. Dans la mesure où le consommateur prête, en principe, une plus grande attention à la partie initiale d’une marque, ledit chiffre joue donc un rôle décisif dans l’appréciation phonétique de la marque demandée [voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2017, For Tune/EUIPO – Simplicity trade (opus AETERNATUM), T‑815/16, non publié, EU:T:2017:888, point 60].

50      Cela est d’autant plus vrai que, pour une partie importante du public pertinent, la prononciation du chiffre 5 sera plus longue que celle de la lettre « j » ou de la suite de lettres « ms ». À titre d’exemple, ledit chiffre sera prononcé en tant que « cinq » en français, « five » en anglais, « cinque » en italien et « cinci » en roumain. À cet égard, il y a lieu de rappeler que le constat d’un risque de confusion pour une partie non négligeable du public pertinent est suffisant pour accueillir une opposition formée contre une demande d’enregistrement de marque [voir, en ce sens, arrêts du 10 novembre 2011, Esprit International/OHMI – Marc O’Polo International (Représentation d’une lettre sur une poche), T‑22/10, non publié, EU:T:2011:651, point 119, et du 24 juin 2014, Hut.com/OHMI – Intersport France (THE HUT), T‑330/12, non publié, EU:T:2014:569, point 58].

51      Au vu de ce qui précède, c’est à tort que la chambre de recours a constaté une faible similitude phonétique entre les signes en cause et il convient de considérer que lesdits signes présentent une similitude moyenne sur le plan phonétique.

–       Sur la comparaison conceptuelle

52      La chambre de recours a estimé que, outre le fait qu’elles constituaient toutes deux des symboles de l’alphabet dans une langue donnée, les lettres « j » et « m » ne transmettraient pas, par elles-mêmes, une notion claire et univoque au consommateur. Partant, l’indication d’une référence numérique, à savoir le chiffre 5, à deux lettres distinctes n’était pas de nature à créer une similitude conceptuelle pertinente entre les signes en cause.

53      La requérante fait valoir que les différences conceptuelles relevées par la chambre de recours étaient purement théoriques et que, dans la pratique, le public pertinent n’associera pas les signes en cause à une signification particulière, mais gardera en mémoire leurs représentations visuelles pratiquement identiques. Elle relève que, dès lors que lesdits signes reproduisent le chiffre 5, ils seront associés à celui-ci. Par ailleurs, elle renvoie à des précédents de marques reproduisant ce chiffre, visant des produits relevant de la classe 29, dont l’enregistrement a été refusé sur opposition de sa part soit par les autorités espagnoles soit par les instances de l’EUIPO.

54      En l’espèce, la conclusion de la chambre de recours relative à l’absence de similitude conceptuelle entre les signes en cause est erronée. Il est vrai, ainsi que ladite chambre l’a considéré, que les signes en cause ne reproduisent pas uniquement le chiffre 5, mais comportent respectivement la consonne « j », dans la marque antérieure, et les consonnes « m » et « s », ainsi qu’une quintuple reproduction de la première de la consonne « m » dans la marque demandée. Il n’en demeure pas moins que lesdits signes comportent tous deux un même chiffre ainsi qu’une lettre, qui est une majuscule et une consonne. Dans la mesure où ledit chiffre est identique au nombre de fois où la lettre majuscule « M » est reproduite dans la partie inférieure de la marque demandée, la présence de la lettre « s » et quintuple reproduction de la consonne « m » dans ladite marque ne modifient pas le concept véhiculé par cette marque. Partant, ces signes transmettent un concept commun, à savoir celui de la combinaison d’un chiffre et d’une lettre, qui est une consonne et une majuscule.

55      Partant, c’est à tort que la chambre de recours a considéré que, sur le plan conceptuel, les signes en cause n’étaient pas similaires. Compte tenu de ce qui précède, il convient de conclure à une similitude conceptuelle élevée de ceux-ci.

 Sur le risque de confusion

56      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

57      L’appréciation du risque de confusion dépend également de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

58      La chambre de recours a considéré que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure était normal. Plus précisément, elle a admis que, contrairement à ce qui était relevé par la requérante, la lettre « j » figurant dans ladite marque ne serait pas associée à une notion ni à une idée différente de celle d’être une lettre de l’alphabet, ni à celle de la commune de Jabugo, lieu d’où proviendraient les produits désignés par cette marque.

59      Quant à l’existence d’un caractère distinctif de la marque antérieure accru par l’usage qui en a été fait sur le marché, la chambre de recours, après avoir examiné les éléments de preuve qui avaient été produits par la requérante, a conclu qu’ils étaient insuffisants et, en tout état de cause, qu’ils étaient éloignés du moment de la demande de marque, auquel il convenait d’apprécier si ladite marque présentait un caractère distinctif accru ou jouissait d’une renommée. Sur la base de cette constatation, elle a conclu qu’elle procéderait à l’examen de l’existence d’un risque de confusion au regard du caractère distinctif intrinsèque normal de la marque antérieure.

60      En ce qui concerne le risque de confusion, la chambre de recours a relevé que, malgré l’identité des produits et l’interdépendance entre la similitude des signes et l’identité des produits, les faibles similitudes existantes entre les signes et le caractère distinctif normal de la marque antérieure, n’entraîneraient pas de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement no 207/2009.

61      La requérante conteste la conclusion de la chambre de recours relative à l’absence de tout risque de confusion.

62      En l’espèce, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation quant au caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure. En particulier, outre le fait que la requérante n’a pas spécifiquement contesté dans la requête la conclusion de ladite chambre sur ce point, il convient de relever qu’aucun élément ressortant de ladite marque ne permet d’associer la lettre « j » à un lieu ou, en général, à une notion autre que celle d’une lettre de l’alphabet.

63      Par ailleurs, en ce qui concerne la conclusion de la chambre de recours sur l’absence de caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, il convient de relever que, si, dans le cadre de son moyen tiré de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, la requérante n’a pas contesté la conclusion qui y est afférente de ladite chambre, elle a fait valoir, dans le cadre de son moyen tiré de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement, que ladite marque était notoirement connue en Espagne comme désignant, notamment, des jambons et des saucisses. Ainsi, elle a, en substance, allégué que la renommée de cette marque était reconnue par l’intervenante et que des décisions rendues récemment, tant par des instances nationales que par celles de l’EUIPO, avaient déjà confirmé celle-ci.

64      S’agissant de la reconnaissance par l’intervenante de la renommée de la marque antérieure, il y a lieu de relever que, ainsi que la chambre de recours l’a constaté, les allégations de l’intervenante ne sont pas cohérentes à cet égard. Plus précisément, devant la division d’opposition, l’intervenante avait admis la renommée de la marque antérieure pour les « jambons et saucisses de porc ibérique » dans le cadre d’un de ses moyens tout en la rejetant dans le cadre d’un autre de ses moyens. Par la suite, devant le Tribunal, l’intervenante a fait valoir qu’elle avait seulement reconnu la renommée de l’appellation d’origine protégée « Jabugo », lieu de production des produits de la requérante. Il convient donc de considérer que, en raison du caractère incohérent des allégations de l’intervenante, la renommée de la marque antérieure n’a pas été explicitement reconnue en l’espèce par celle-ci.

65      Quant aux décisions des instances nationales ainsi que de l’EUIPO, invoquées par la requérante, qui auraient reconnu la renommée de la marque antérieure, il y a lieu de constater que leur examen n’est pas nécessaire pour tirer une conclusion, dans le cadre du présent moyen, sur le risque de confusion en l’espèce. En effet, les autres facteurs qui doivent être pris en compte lors de l’appréciation globale du risque de confusion ainsi que le caractère distinctif intrinsèque normal de ladite marque, suffisent pour conclure à l’existence d’un risque de confusion en l’espèce, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur le caractère distinctif accru par l’usage de cette marque.

66      En particulier, ainsi qu’il résulte des points 44, 51 et 55 ci-dessus, le degré de similitude des signes en cause est respectivement faible sur le plan visuel, moyen sur le plan phonétique et élevé sur le plan conceptuel. Étant donné que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pu considérer que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure n’était pas élevé, il y a lieu de conclure que c’est à tort que ladite chambre a conclu, au point 84 de la décision attaquée, à l’absence de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement no 207/2009.

67      Il convient donc d’accueillir le premier moyen et, partant, d’annuler la décision attaquée, conformément au premier chef de conclusions de la requérante, sans qu’il soit besoin d’examiner le second moyen. Par ailleurs, s’agissant du deuxième chef de conclusions de la requérante, il reviendra à la chambre de recours de se prononcer à cet égard, lorsqu’elle prendra les mesures que comporte l’exécution du présent arrêt.

 Sur les dépens

68      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

69      En l’espèce, l’EUIPO et l’intervenante ayant succombé pour l’essentiel, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que, chacun, la moitié des dépens exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 24 juillet 2019 (affaire R 1728/2018-4) est annulée.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      L’EUIPO et Embutidos Monells, SA supporteront leurs propres dépens ainsi que, chacun, la moitié des dépens exposés par Sánchez Romero Carvajal Jabugo, SAU.

Spielmann

Spineanu-Matei

Mastroianni

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 décembre 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol.

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