Berebene v EUIPO - Consorzio vino Chianti Classico (GHISU) (European Trade Mark - Judgment) French Text [2021] EUECJ T-201/20 (14 April 2021)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2021/T20120.html
Cite as: EU:T:2021:192, ECLI:EU:T:2021:192, [2021] EUECJ T-201/20

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)

14 avril 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative GHISU – Marque collective nationale figurative antérieure CHIANTI CLASSICO – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001] – Profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure »

Dans l’affaire T‑201/20,

Berebene Srl, établie à Rome (Italie), représentée par Me A. Massimiani, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme M. Capostagno, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Consorzio vino Chianti Classico, établie à Radda in Chianti (Italie), représentée par Mes S. Corona et F. Corona, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 23 janvier 2020 (affaire R 592/2019-1), relative à une procédure d’opposition entre Consorzio vino Chianti Classico et Berebene,

LE TRIBUNAL (dixième chambre),

composé de MM. A. Kornezov, président, E. Buttigieg (rapporteur) et Mme K. Kowalik‑Bańczyk, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 6 avril 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 3 août 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 6 août 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 21 septembre 2017, la requérante, Berebene Srl, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Boissons alcoolisées à l’exception des bières ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2017/184, du 27 septembre 2017.

5        Le 21 décembre 2017, l’intervenante, Consorzio vino Chianti Classico a formé opposition, au titre de l’article 46 du règlement 2017/1001, à l’enregistrement de la marque demandée, pour certains des produits qu’elle visait, à savoir pour les produits relevant de la classe 33 visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque collective italienne figurative enregistrée le 20 janvier 2014 sous le numéro 1571590, pour des vins relevant de la classe 33, reproduite ci-après :

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7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient notamment ceux visés à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

8        Afin de prouver la renommée de la marque antérieure, l’intervenante a produit un nombre important de documents.

9        Par décision du 18 janvier 2019, la division d’opposition a accueilli l’opposition pour tous les produits relevant de la classe 33, en constatant l’existence du motif de refus visé par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

10      Le 14 mars 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 23 janvier 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours sur le fondement de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. La chambre de recours a constaté que la renommée de la marque antérieure était un fait constant entre les parties. En outre, elle a relevé l’existence d’une similitude entre les signes en conflit et d’un lien entre les marques en conflit dans l’esprit des consommateurs. Elle a conclu que, eu égard à l’image d’excellence et de prestige attachée à la marque antérieure, l’usage de la marque demandée était susceptible de donner lieu à un profit indu en faveur de la requérante.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        en conséquence, ordonner l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 33 ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens pour la procédure d’opposition et la procédure de recours.

13      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 21 septembre 2017, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009, tel que modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21) (voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

15      En ce qui concerne les règles de fond, il convient de comprendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par l’EUIPO dans le mémoire en réponse à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 comme visant la même disposition d’une teneur identique du règlement no 207/2009.

16      À l’appui de son recours, la requérante soutient que la décision de la chambre de recours se fonde sur une comparaison erronée des signes en conflit et sur une évaluation globale erronée du risque de confusion. Compte tenu du fait que la décision attaquée est fondée uniquement sur le motif de refus visé à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, il y a lieu de comprendre les griefs de la requérante comme visant à contester l’application par la chambre de recours de cette dernière disposition.

17      Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens du paragraphe 2, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou a des similitudes avec la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui n’ont pas de similitudes avec ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque de l’Union européenne antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’Union et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice.

18      La protection élargie accordée à la marque antérieure par l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 présuppose donc la réunion de plusieurs conditions cumulatives tenant, premièrement, à l’identité ou à la similitude des marques en conflit, deuxièmement, à l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition et, troisièmement, à l’existence d’un risque de voir l’usage sans juste motif de la marque demandée tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porter préjudice (arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 54).

19      En l’espèce, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir erronément apprécié les facteurs devant être pris en compte dans l’analyse des risques visés à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 et, en conséquence, d’avoir constaté à tort que les conditions d’application de cette disposition étaient réunies en l’espèce. Alors qu’elle ne conteste pas que la marque antérieure jouit d’un degré élevé de renommée, ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée, elle estime que l’appréciation de la chambre de recours est erronée en ce qui concerne, premièrement, la comparaison des signes en conflit, deuxièmement, l’existence d’un lien entre les marques ainsi que, troisièmement, l’existence d’un risque de voir l’usage sans juste motif de la marque demandée tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure.

 Sur l’identité ou la similitude des signes en conflit 

20      S’agissant de la comparaison des signes en conflit, la requérante soutient, en premier lieu, que l’évaluation de la chambre de recours à cet égard est vague et approximative en ce qu’elle conclut à l’existence d’une « certaine similitude » sans indiquer concrètement les motifs qui rendent les signes similaires. En deuxième lieu, cette évaluation serait également contradictoire du fait que, bien que la chambre de recours ait exclu l’existence d’une similitude entre les signes en conflit sur le plan visuel et phonétique, elle a conclu à l’existence d’une similitude globale entre lesdits signes. En troisième lieu, la requérante soutient que les signes en conflit ne sont pas similaires conceptuellement en ce que le message véhiculé par lesdits signes ne dépend pas de la représentation d’un coq et il est différent dans la mesure où la marque antérieure est une marque collective et désigne des vins rouges qui proviennent de la zone viticole de Chianti en Toscane (Italie), tandis que la marque demandée est une marque individuelle qui désigne un vin blanc qui provient de la zone viticole de la Gallura en Sardaigne (Italie), qui doit son nom à l’animal en question.

21      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

22      À cet égard, il convient de rappeler que l’existence d’une similitude entre une marque antérieure et une marque demandée constitue une condition d’application commune à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement no 207/2009. Cette condition présuppose, tant dans le cadre du paragraphe 1, sous b), que dans celui du paragraphe 5 dudit article, l’existence, notamment, d’éléments de ressemblance visuelle, phonétique ou conceptuelle [voir, en ce sens, arrêts du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, point 52, et du 4 octobre 2017, Gappol Marzena Porczyńska/EUIPO – Gap (ITM) (GAPPOL), T‑411/15, non publié, EU:T:2017:689, point 148].

23      Toutefois, le degré de similitude requis dans le cadre de l’une et de l’autre desdites dispositions est différent. En effet, tandis que la mise en œuvre de la protection instaurée par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 est subordonnée à la constatation d’un degré tel de similitude entre les marques en conflit qu’il existe, dans l’esprit du public concerné, un risque de confusion entre celles-ci, l’existence d’un tel risque n’est pas requise pour la protection conférée par le paragraphe 5 de ce même article. Ainsi, les atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 peuvent être la conséquence d’un degré moindre de similitude entre les marques antérieure et demandée, pour autant que celui-ci soit suffisant pour que le public pertinent effectue un rapprochement entre lesdites marques, c’est-à-dire établisse un lien entre celles-ci. En revanche, il ne ressort ni du libellé desdites dispositions ni de la jurisprudence que la similitude entre les marques en conflit devrait être appréciée de manière différente selon qu’elle est effectuée au regard de l’une ou de l’autre de ces dispositions (arrêt du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, points 53 et 54).

24      Ensuite, il y a lieu de rappeler que la comparaison des signes doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [arrêt du 25 janvier 2012, Viaguara/OHMI – Pfizer (VIAGUARA), T‑332/10, non publié, EU:T:2012:26, point 32]. De même, il convient d’observer que la similitude des signes en conflit doit être appréciée du point de vue du consommateur moyen, en faisant référence aux qualités intrinsèques desdits signes, tels qu’ils sont enregistrés ou tels qu’ils sont demandés [voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, CEDC International/OHMI – Fabryka Wódek Polmos Łańcut (WISENT VODKA), T‑450/13, non publié, EU:T:2015:841, point 95].

25      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une similitude entre les signes en conflit.

26      En premier lieu, il y a lieu de constater que, contrairement à ce que soutient la requérante, l’évaluation par la chambre de recours de la similitude entre les signes en conflit n’est ni vague ni approximative. En effet, aux points 16 à 22 de la décision attaquée, la chambre de recours a procédé à la comparaison des signes en conflit en vérifiant concrètement, comme cela est requis par la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus, l’existence d’éléments de ressemblance et de différence visuelle, phonétique et conceptuelle. Elle a correctement relevé, au point 16 de la décision attaquée, que les signes en conflit étaient tous les deux composés d’éléments verbaux et d’éléments figuratifs constitués d’une représentation d’un coq entier vu de profil et mis en évidence par sa taille par rapport aux éléments verbaux composant les signes, sa position centrale et la représentation de ses traits caractéristiques. Elle a ensuite pris en compte tant les éléments figuratifs que les éléments verbaux dans le cadre de la comparaison des signes sur chacun des plans.

27      Ainsi, s’agissant de la comparaison sur le plan visuel, la chambre de recours a relevé, au point 18 de la décision attaquée, que les parties figuratives des signes en conflit présentaient une similitude du fait qu’ils contenaient tous les deux une image d’un volatile domestique reproduit de manière très similaire. Elle a ensuite relevé que, s’agissant de la marque antérieure, son élément figuratif représentant le coq noir constituait l’élément dominant du signe dans la mesure où il ne présentait pas de lien avec les produits désignés par la marque qui étaient les vins, alors que son élément verbal « chianti classico » était moins distinctif pour ces produits, car il désignait une zone viticole bien connue. Elle a donc conclu, contrairement à ce que relève la requérante, non pas à l’absence de similitude sur le plan visuel, mais à l’existence d’une similitude visuelle « moyenne-faible » eu égard aux fortes ressemblances des parties figuratives des signes en conflit et à l’absence de similitude entre leurs éléments verbaux.

28      En ce qui concerne la similitude phonétique, il ressort du point 20 de la décision attaquée, que la chambre de recours n’a pas pris position définitive sur la comparaison phonétique des signes en conflit, mais s’est limitée à observer que, alors que les éléments verbaux des signes en conflit, qui sont prononcés, sont différents, une comparaison entre lesdits signes sur le plan phonétique était difficile à effectuer dans la mesure où la marque antérieure était également connue sous le nom de Gallo Nero (coq noir) ou Marchio del Gallo Nero (marque du coq noir).

29      S’agissant de la comparaison sur le plan conceptuel, la chambre de recours a conclu, au point 21 de la décision attaquée, que les signes étaient similaires à un degré moyen en raison du concept véhiculé par l’élément figuratif des deux signes renvoyant à un concept de coq, lequel était immédiatement reconnaissable dans les deux signes. Ce concept était, selon la chambre de recours, contrebalancé, mais pas annulé, par celui véhiculé par les éléments verbaux différents composant les signes en conflit.

30      Il résulte de ce qui précède que c’est après avoir concrètement relevé les éléments de similitude et de dissemblance entre les signes en conflit et après les avoir mis en balance dans le cadre d’une appréciation globale que la chambre de recours a conclu, au point 22 de la décision attaquée, à l’existence d’une similitude entre ces signes. L’argument de la requérante tiré du caractère vague et approximatif de l’évaluation de la similitude des signes en conflit par la chambre de recours doit donc être rejeté.

31      De même, ne saurait prospérer l’argument de la requérante, selon lequel l’appréciation globale de la chambre de recours en ce qui concerne la similitude entre les signes en conflit est contradictoire. En effet, d’une part, la requérante procède à une lecture erronée de la décision attaquée en ce qu’elle relève que la chambre de recours a conclu à l’absence de similitude des signes sur le plan visuel et phonétique, alors que celle-ci a relevé que les signes étaient similaires à tout le moins faiblement sur le plan visuel (voir point 27 ci-dessus), et qu’il était difficile de les comparer sur le plan phonétique (voir point 28 ci-dessus).

32      D’autre part, c’est à bon droit que la chambre de recours a relevé, au point 20 de la décision attaquée, que, aux fins de sa décision, il n’était pas indispensable d’établir avec précision si les signes en conflit étaient globalement similaires sur le plan phonétique. En effet, contrairement à ce que soutient la requérante, il n’est pas contradictoire de conclure, dans le cadre de la comparaison des signes au titre de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, à l’existence d’une similitude globale entre les signes en conflit sans prendre une position définitive sur cette similitude sur le plan phonétique à condition que la similitude globale soit suffisante pour que le public concerné effectue un rapprochement entre lesdites marques, c’est-à-dire établisse un lien entre celles-ci. Ainsi, un degré de similitude, même faible, et même sur un seul plan, ne permet pas, à lui seul, d’écarter l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêt du 20 novembre 2014, Intra-Presse/Golden Balls, C‑581/13 P et C‑582/13 P, non publié, EU:C:2014:2387, points 72 à 77).

33      Enfin, en ce qui concerne les arguments de la requérante par lesquels elle entend contester la conclusion de la chambre de recours en ce qui concerne la similitude conceptuelle entre les signes en conflit, il convient de relever que ceux-ci sont fondés sur la nature collective de la marque antérieure par opposition à la nature individuelle de la marque demandée ainsi que sur le fait que ces marques désigneraient les vins soit rouges pour la marque antérieure, soit blancs pour la marque demandée, et ayant une origine géographique différente.

34      Toutefois, de tels arguments ne sont pas pertinents dans le cadre de l’appréciation de la similitude conceptuelle des signes en conflit laquelle doit être fondée sur la perception de ces signes par le public pertinent. Ainsi, d’une part, cette perception ne saurait être différente selon qu’il s’agit d’une marque individuelle ou d’une marque collective. En effet, il convient de relever, à l’instar de l’EUIPO, que la comparaison entre les signes en conflit dont l’un compose une marque collective, et l’autre compose une marque individuelle, est fondée sur les mêmes critères que ceux applicables à la comparaison des signes composant deux marques individuelles (voir, en ce sens, arrêt du 5 mars 2020, Foundation for the Protection of the Traditional Cheese of Cyprus named Halloumi/EUIPO, C‑766/18 P, EU:C:2020:170, point 59). En conséquence, rien n’empêche de conclure que le signe composant une marque individuelle et celui composant une marque collective véhiculent le même concept ou, comme en l’espèce, un concept similaire.

35      D’autre part, certes, certains éléments des signes en conflit, à savoir l’élément verbal « chianti » pour la marque antérieure, lequel renvoie à une région en Italie réputée pour les vins (point 18 de la décision attaquée), et l’élément figuratif de la marque demandée représentant le coq (gallo en italien) qui est le symbole de la région de la Gallura en Sardaigne, sont susceptibles de véhiculer un concept lié à l’origine géographique des vins désignés par les marques en cause. Toutefois, cela demeure sans incidence sur le fait que les signes en conflit se réfèrent également, dans l’esprit du public pertinent, au concept de coq, ainsi que l’a relevé la chambre de recours, du fait de la présence de la représentation de ce volatile dans les deux signes et que, de ce fait, ils sont similaires sur le plan conceptuel.

36      Par ailleurs, l’argument de la requérante, selon lequel la différence entre les signes en conflit sur le plan conceptuel résulterait du fait que le signe antérieur est utilisé pour désigner les vins rouges, alors que le signe demandé désigne les vins blancs, est dépourvu de pertinence dans le cadre de la comparaison des signes sur le plan conceptuel laquelle est fondée sur la comparaison des concepts véhiculés par les signes en conflit et non pas sur la comparaison des produits visés par les marques en cause.

37      Il s’ensuit que la requérante n’est pas fondée à remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les signes en conflit sont similaires sur le plan conceptuel.

38      Il ressort de ce qui précède que c’est à bon droit et sans aucune contradiction que la chambre de recours a conclu, compte tenu des similitudes entre les marques sur le plan visuel et conceptuel, à l’existence d’une similitude globale entre les signes en conflit.

 Sur le lien entre les marques en conflit

39      Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence rappelée au point 23 ci-dessus, les atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, lorsqu’elles se produisent, sont la conséquence d’un certain degré de similitude entre la marque antérieure renommée et la marque demandée, en raison duquel le public pertinent effectue un rapprochement entre ces marques, c’est-à-dire établit un lien entre celles-ci, alors même qu’il ne les confond pas. Il suffit que le degré de similitude entre la marque renommée et la marque demandée ait pour effet que le public pertinent établit un lien entre ces marques. Conformément à la jurisprudence, le fait que la marque demandée évoque la marque antérieure dans l’esprit du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, équivaut à l’existence d’un tel lien (voir, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 60).

40      L’existence du lien mentionné au point 39 ci-dessus doit, de même que l’existence d’un risque de confusion, être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Parmi lesdits facteurs figurent le degré de similitude entre les marques en présence, la nature des produits ou des services couverts par ces marques, y compris le degré de proximité ou de dissemblance de ces produits ou de ces services, ainsi que le public concerné, l’intensité de la renommée de la marque antérieure et le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure [arrêts du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, point 56, et du 10 octobre 2019, McDreams Hotel/EUIPO – McDonald’s International Property (mc dreams hotels Träumen zum kleinen Preis!), T‑428/18, non publié, EU:T:2019:738, point 30].

41      La chambre de recours a, sur la base d’une analyse de chacun des facteurs pertinents cités par la jurisprudence rappelés au point 40 ci-dessus, conclu, au point 30 de la décision attaquée, à l’existence d’un lien entre les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent. À cet égard, elle a retenu que les signes en conflit présentaient une similitude visuelle et conceptuelle en ce qu’ils contenaient l’image d’un coq, en substance, que les produits étaient identiques, dans la mesure où les produits visés par la marque demandée comprenaient les vins visés par la marque antérieure, que la marque antérieure jouissait d’une renommée élevée et avait un caractère distinctif intrinsèque, renforcé par son usage pendant des décennies. Enfin, la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion ou, à tout le moins un risque d’association entre les marques, parce qu’elles coïncidaient dans leurs éléments distinctifs représenté par le coq et désignaient des produits identiques. La présence du terme « ghisu » dans la marque demandée n’était pas suffisante, selon la chambre de recours, pour exclure le risque que celle-ci pourrait être comprise comme une variante autorisée de la marque collective antérieure.

42      Afin de contester la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existe un lien entre les marques en cause, la requérante soulève les griefs relatifs, en substance, premièrement, au degré de la similitude entre les signes en conflit et, deuxièmement, à la nature et au degré de proximité des produits visés par les marques en conflit.

43      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

 Sur le degré de similitude des signes en conflit

44      S’agissant du degré de similitude entre les signes en conflit, plus ceux-ci sont similaires, plus il est vraisemblable que la marque demandée évoquera, dans l’esprit du public pertinent, la marque antérieure renommée. En outre, plus la marque antérieure présente un caractère distinctif fort, qu’il soit intrinsèque ou acquis par l’usage qui a été fait de cette marque, plus il est vraisemblable que, confronté à une marque identique ou similaire, le public pertinent établisse un lien avec ladite marque antérieure (voir, en ce sens, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 44 et 54).

45      En premier lieu, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas suffisamment pris en considération l’existence de l’appellation d’origine contrôlée et garantie (DOCG) « Vermentino di Gallura », dont le nom provient du mot « coq » (gallo en italien) et dont la réglementation sur la production imposerait l’utilisation d’une représentation d’un coq stylisé pour tous les produits de type vermentino provenant de la zone viticole de la Gallura en Sardaigne.

46      À cet égard, il importe de relever, à l’instar de l’EUIPO et de l’intervenante, que la réglementation de la DOCG « Vermentino di Gallura » produite par la requérante à l’appui de son argument ne concerne que la marque collective de la DOCG « Vermentino di Gallura » qui n’est pas en cause dans la présente affaire. En conséquence, l’argument de la requérante n’est pas pertinent pour remettre en cause la conclusion de la chambre de recours concernant l’existence d’une similitude entre la marque antérieure et la marque demandée individuelle, l’appréciation de l’existence d’une telle similitude devant être effectuée au cas par cas et selon les caractéristiques propres des signes en cause [arrêt du 24 septembre 2015, Dellmeier/OHMI – Dell (LEXDELL), T‑641/14, non publié, EU:T:2015:683, point 20]. Par ailleurs, ainsi que le soutiennent, en substance, l’EUIPO et l’intervenante, il ne ressort pas de la réglementation relative à la production des vins couverts par la DOCG « Vermentino di Gallura » que la requérante doive obtenir un enregistrement à son nom d’une marque individuelle contenant l’image d’un coq. Ladite réglementation fait uniquement état de l’utilisation d’un logo ou d’une marque collective appartenant en tant que droit collectif à tous les producteurs de vins couverts par la DOCG en cause et qui est composé d’un verre contenant un coq stylisé, ce qui semble par ailleurs être admis par la requérante.

47      En deuxième lieu, la requérante allègue qu’une comparaison entre une marque collective antérieure et une marque individuelle serait trompeuse, de sorte que, dans le cas d’espèce, il faudrait soit comparer la marque demandée avec les marques individuelles des produits provenant de la zone viticole du Chianti, soit apprécier si la marque collective Vermentino di Gallura peut utiliser l’image d’un coq.

48      Toutefois, ainsi qu’il a été relevé au point 45 ci-dessus, l’existence d’une similitude entre les signes en conflit doit être effectuée au cas par cas et selon les caractéristiques propres des signes en cause et non pas, comme semble le suggérer la requérante, en tenant compte des signes qui ne sont pas visés par la demande d’enregistrement ou dans le cadre de l’opposition. Par ailleurs, ainsi qu’il a été relevé au point 34 ci-dessus, la nature collective ou individuelle des marques n’a aucune importance pour évaluer si, dans la perception par le public pertinent, les signes sont similaires ou dissemblables.

49      En troisième lieu, la requérante soutient qu’un lien entre les signes en conflit ne pourrait pas être établi en raison des différences d’utilisation des signes, notamment de la position et de la taille des signes sur les bouteilles et des caractéristiques organoleptiques différentes des vins couverts par les marques en conflit, en ce que la marque collective antérieure ainsi que la marque collective de la DOCG « Vermentino di Gallura », qui représenterait elle-même un coq stylisé, figureraient sur le col de la bouteille, tandis que l’étiquette avec la marque individuelle demandée serait apposée sur le corps de la bouteille. Par conséquent, le consommateur des produits désignés par les deux marques n’aurait jamais sous les yeux deux étiquettes représentant le coq.

50      À cet égard, il y a lieu de relever que les modalités particulières de commercialisation des produits en cause pouvant varier dans le temps et suivant la volonté des titulaires des marques, elles ne sont pas appropriées aux fins de l’analyse prospective d’un lien dans l’esprit du public pertinent entre les marques (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/OHMI, C‑171/06 P, non publié, EU:C:2007:171, point 59). Cet argument de la requérante doit donc être rejeté.

51      Il convient donc de conclure qu’aucun des arguments de la requérante n’est susceptible de remettre en cause l’appréciation par la chambre de recours du degré de la similitude entre les signes en conflit dans le cadre de l’examen du lien, dans l’esprit du public pertinent, entre les marques en cause.

 Sur la nature et le degré de proximité des produits visés par les marques en conflit

52      La requérante souligne la différence entre les produits pour lesquels les signes en conflit sont utilisés, l’un étant un vin blanc de type vermentino di Gallura, l’autre un vin rouge provenant de la région de Chianti. Ces produits seraient souvent répartis par leur couleur ou leur région d’origine dans les lieux de distribution, de sorte qu’il ne serait pas réaliste d’imaginer que le consommateur puisse trouver les produits désignés par les deux marques côte à côte ou de considérer que ces produits aient une origine commerciale commune. La marque antérieure, désignant une zone bien délimitée de production de vins rouges, la renommée dont elle jouit ne pourrait pas s’appliquer à d’autres produits que ceux pour lesquels elle est utilisée, à savoir pour des vins rouges provenant de la zone géographique du Chianti.

53      À cet égard, il convient de relever que le signe faisant l’objet de la demande de marque tend à être enregistré de façon générale pour des « boissons alcoolisées à l’exception des bières » et que la requérante n’a pas restreint les produits visés par l’enregistrement demandé au vin blanc. Or, dans le cadre de l’appréciation du degré de proximité entre les produits en cause dans le cadre de l’appréciation de l’existence d’un lien dans l’esprit du public pertinent entre les marques en conflit au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, il convient de prendre en compte les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et non pas ceux pour lesquels elle est effectivement utilisée. Dès lors, l’argument soulevé par la requérante quant à la différence entre les produits commercialisés sous les signes en conflit est inopérant.

54      Le public pertinent auquel il convient de faire référence ne doit pas être le public composé des consommateurs susceptibles d’utiliser à la fois les produits désignés par la marque antérieure et les produits visés par la marque contestée, comme c’est le cas dans le cadre de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, mais le public qui pourra évoquer la marque antérieure lorsqu’il sera confronté aux produits couverts par la marque contestée. Or, à moins que ce public soit totalement distinct de celui des produits visés par la marque antérieure et que celle-ci n’ait pas acquis une renommée telle qu’elle va au-delà du public concerné par les produits qu’elle désigne, une telle possibilité d’évocation ne saurait être exclue [arrêt du 28 mai 2020, Martínez Albainox/EUIPO – Taser International (TASER), T‑342/19, non publié, EU:T:2020:234, point 37].

55      En l’espèce, la requérante n’a pas soutenu devant la chambre de recours et n’a pas présenté devant le Tribunal d’arguments convaincants pour établir que la renommée de la marque antérieure s’étendait uniquement à des vins rouges. En effet, elle n’a pas contesté la conclusion de la chambre de recours aux points 25 et 27 de la décision attaquée, selon laquelle la marque antérieure jouissait d’un degré élevé de renommée en ce qui concerne les vins. Au contraire, ainsi qu’il ressort du point 26 de la décision attaquée, lors de la procédure administrative, la requérante a admis que l’intervenante a prouvé le degré élevé de renommée de la marque antérieure sur le marché italien des vins.

56      En tout état de cause, les produits « Boissons alcoolisées à l’exception des bières » visés par la marque demandée qui comportent, notamment, les vins et les « vins » visés par la marque antérieure renommée sont identiques, et ce même si la renommée de cette dernière devait être limitée à des vins rouges comme le prétend la requérante.

57      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de conclure que les arguments invoqués par la requérante ne sont pas susceptibles d’infirmer la conclusion de la chambre de recours quant à la possibilité pour le public pertinent d’établir un lien entre les marques en conflit au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.

 Sur l’existence dun risque de voir l’usage sans juste motif de la marque demandée tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porter préjudice

58      S’agissant de la condition de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 tenant au risque de voir l’usage sans juste motif de la marque demandée tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porter préjudice, celle-ci vise trois types de risques distincts et alternatifs, à savoir que l’usage sans juste motif de la marque demandée, premièrement, porte préjudice au caractère distinctif de la marque antérieure, deuxièmement, porte préjudice à la renommée de la marque antérieure ou, troisièmement, tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure [voir arrêt du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, point 36 et jurisprudence citée].

59      Le troisième type des risques mentionnés au point 58 ci-dessus doit être compris comme un risque que l’image de la marque renommée ou les caractéristiques projetées par cette dernière soient transférées aux produits désignés par la marque demandée, de sorte que leur commercialisation puisse être facilitée par cette association avec la marque antérieure renommée (voir arrêt du 10 octobre 2019, mc dreams hotels Träumen zum kleinen Preis!, T‑428/18, non publié, EU:T:2019:738, point 89 et jurisprudence citée). Le profit résultant de l’usage par un tiers d’un signe similaire à une marque renommée est tiré indûment par ce tiers desdits caractère distinctif ou renommée lorsque celui-ci tente par cet usage de se placer dans le sillage de la marque renommée afin de bénéficier de son pouvoir d’attraction, de sa réputation et de son prestige, et d’exploiter, sans compensation financière, l’effort commercial déployé par le titulaire de la marque renommée pour créer et entretenir l’image de celle-ci (arrêt du 18 juin 2009, L’Oréal e.a., C‑487/07, EU:C:2009:378, point 50).

60      En l’espèce, la chambre de recours a conclu, aux points 34 et 35 de la décision attaquée, que l’apposition d’un signe contenant l’image d’un coq sur les vins de la requérante aurait comme résultat prévisible le transfert de l’image d’excellence, de prestige et de lien avec un territoire, dont jouit la marque antérieure de l’intervenante, sur les produits du même type de la requérante et, par conséquent, de faciliter la commercialisation de ceux-ci et donner lieu à un profit indu en faveur de la requérante.

61      La requérante conteste cette appréciation de la chambre de recours. Elle fait valoir, en premier lieu, que l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 exige une exploitation et un parasitisme manifestes pour qu’un profit indu puisse se réaliser. Elle soutient  que le risque de tirer un profit indu doit être sérieux, en ce sens qu’il est prévisible, et pas seulement hypothétique. En deuxième lieu, elle soutient qu’en réalité elle n’a pas réalisé de profit pouvant être reconduit à la renommée des vins provenant de la zone du Chianti et note que les signes en conflit visent des produits qui ne sont pas en concurrence les uns avec les autres. Enfin, elle fait valoir que l’intervenante n’aurait pas fourni de preuves d’un préjudice. Le profit indu allégué par l’intervenante serait donc hypothétique.

62      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

63      À cet égard, il convient de rappeler que, contrairement à ce que laisse entendre la requérante, le titulaire de la marque antérieure renommée n’est pas tenu de démontrer, au titre de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, l’existence d’une atteinte effective et actuelle à ses marques. Il doit seulement apporter des éléments permettant de conclure prima facie à un risque futur non hypothétique de profit indu ou de préjudice [voir arrêt du 30 novembre 2016, K&K Group/EUIPO – Pret A Manger (Europe) (Pret A Diner), T‑2/16, non publié, EU:T:2016:690, point 58 et jurisprudence citée]. Une telle conclusion peut être établie notamment sur la base de déductions logiques résultant d’une analyse des probabilités et en prenant en compte les pratiques habituelles dans le secteur commercial pertinent ainsi que toute autre circonstance de l’espèce [voir arrêt du 11 avril 2019, Inditex/EUIPO – Ansell (ZARA TANZANIA ADVENTURES), T‑655/17, non publié, EU:T:2019:241, point 48 et jurisprudence citée].

64      S’agissant de l’argument avancé par la requérante quant à la nature simplement hypothétique du risque de profit indu dans le cas d’espèce, il convient d’observer, premièrement, que la renommée élevée de la marque antérieure n’est pas contestée. En outre, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 30 de la décision attaquée, sans que cette conclusion soit contestée par la requérante, la marque antérieure jouit d’un caractère distinctif intrinsèque du fait que l’élément figuratif dominant du coq n’a aucun lien évident avec les produits en cause, caractère distinctif qui est d’ailleurs renforcé par son usage.

65      Or, conformément à la jurisprudence, plus le caractère distinctif et la renommée de la marque antérieure seront importants, plus l’existence d’une atteinte sera aisément admise (voir arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 69 et jurisprudence citée).

66      Deuxièmement, la chambre de recours a estimé, au point 34 de la décision attaquée, que l’image d’excellence et de prestige associée par les consommateurs aux vins de l’intervenante était susceptible d’être transférée aux produits visés par la marque demandée, notamment aux vins de la requérante.

67      À cet égard, il convient de rappeler que la marque agit comme moyen de transmission des messages concernant, notamment, les qualités ou caractéristiques particulières des produits ou des services qu’elle désigne, ou les images et sensations qu’elle projette, tels que, dans le cas d’espèce, l’excellence, le prestige et le lien avec un territoire. En ce sens, la marque possède une valeur économique intrinsèque autonome et distincte par rapport à celle des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée. Les messages en question que véhicule notamment une marque renommée ou qui lui sont associés confèrent à celle‑ci une valeur importante et digne de protection, et ce d’autant plus que, dans la plupart des cas, la renommée d’une marque est le résultat d’efforts et d’investissements considérables de son titulaire (voir, par analogie, arrêt du 22 mars 2007, VIPS, T‑215/03, EU:T:2007:93, point 35).

68      En l’espèce, force est de constater que, vu la renommée élevée et le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, le fait d’utiliser un signe ayant une certaine similitude avec la marque antérieure pour des produits identiques à ceux visés par cette dernière présente un risque non hypothétique que le public pertinent établisse un lien entre les marques en associant l’image du coq de la marque demandée avec les produits de l’intervenante, de sorte que l’usage de la marque demandée puisse tirer un profit indu de la renommée, du prestige et de l’excellence projetée par la marque antérieure ce qui risque de donner lieu à un bénéfice indu résultant des efforts commerciaux de l’intervenante pour le développement de sa marque.

69      Par conséquent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant que l’usage de la marque demandée était susceptible de donner lieu à un profit indu en faveur de la requérante.

70      Il ressort de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son intégralité sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur la recevabilité du deuxième et, partiellement, du troisième chef de conclusion, contestée par l’EUIPO.

 Sur les dépens

71      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

72      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre)

déclare et arrête :

1.      Le recours est rejeté.

2.      Berebene Srl est condamnée aux dépens.

Kornezov

Buttigieg

Kowalik-Bańczyk

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 avril 2021.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon


*      Langue de procédure : l’italien.

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