Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Delai de transfert - Pluralite de demandes) (Protection of natural persons with regard to the processing of personal data - Complaint to a supervisory authority - Judicial remedies - Opinion) French Text [2022] EUECJ C-323/21_O (08 September 2022)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2022/C32321_O.html
Cite as: [2022] EUECJ C-323/21_O

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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN RICHARD DE LA TOUR

présentées le 8 septembre 2022 (1)

Affaire C323/21

Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid

en présence de

B.

[demande de décision préjudicielle formée par le Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas)]

et

Affaires jointes C324/21 et C-325/21

Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (C324/21)

K. (C325/21)

en présence de

F.,

Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid

[demandes de décision préjudicielle formées par le Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas)]

« Renvoi préjudiciel – Politique d’asile – Critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale – Règlement (UE) no 604/2013 – Recours exercé contre une décision de transfert – Notion d’“État membre requérant” – Incidence d’un accord conclu précédemment entre deux autres États membres – Portée du recours »






I.      Introduction

1.        Les présentes demandes de décision préjudicielle sont l’occasion pour la Cour de préciser les modalités selon lesquelles il convient d’articuler des procédures de reprise en charge qui ont été engagées successivement par deux États membres différents à l’égard d’un même demandeur de protection internationale, en application du règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (2).

2.        Ces demandes ont été présentées dans le cadre de litiges opposant le Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (secrétaire d’État à la Sécurité et à la Justice, Pays-Bas) (ci-après le « secrétaire d’État ») à B., F. et K., qui sont tous les trois des ressortissants de pays tiers demandeurs de protection internationale, au sujet de la légalité des décisions de transfert qui ont été adoptées à leur encontre. Après avoir déposé leur première demande de protection internationale auprès d’un État membre, chacun d’entre eux s’est déplacé sur le territoire de l’Union européenne, introduisant, à cette occasion et dans des délais très brefs, de nouvelles demandes de protection internationale auprès des États membres sur les territoires desquels ils se sont rendus.

3.        En l’absence de précisions dans le règlement Dublin III et son règlement d’application (3) concernant l’articulation de procédures de reprise en charge qui seraient menées de manière successive par des États membres différents à l’égard d’un même demandeur, la Cour devra définir des modalités qui permettent, d’une part, de maintenir une méthode claire, opérationnelle et rapide pour déterminer l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale (4) et, d’autre part, de prévenir les abus découlant des multiples demandes de protection internationale, présentées simultanément ou successivement par une même personne dans plusieurs États membres, dans le but soit de prolonger son séjour dans l’Union, en bénéficiant de conditions matérielles d’accueil, soit de choisir l’État membre en charge de l’examen de sa demande de protection internationale (5).

4.        Dans les présentes conclusions, j’exposerai les raisons pour lesquelles je considère que, dans des situations telles que celles en cause au principal, où la première procédure de reprise en charge a été valablement engagée après concertation entre les États membres concernés, les événements postérieurs à cette concertation, à savoir le départ du demandeur du territoire de l’État membre requérant avant que son transfert soit exécuté et l’introduction successive d’une seconde requête aux fins de sa reprise en charge par un autre État membre sur le territoire duquel le demandeur se trouve, privent cette première procédure d’un élément essentiel à sa validité. J’expliquerai alors pourquoi l’État membre requis, en tant qu’il est impliqué dans deux procédures de reprise en charge engagées dans des délais très courts à l’égard de la même personne par deux États membres requérants différents, est en mesure de convenir avec le premier État membre requérant de la caducité de la première de ces procédures, à compter de son acceptation de la seconde requête aux fins de reprise en charge.

II.    Le cadre juridique

5.        Les considérants 4 et 5 du règlement Dublin III énoncent ce qui suit :

« (4)      Les conclusions de Tampere ont [...] précisé que le [régime d’asile européen commun] devrait comporter à court terme une méthode claire et opérationnelle pour déterminer l’État membre responsable de l’examen d’une demande d’asile.

(5)      Une telle méthode devrait être fondée sur des critères objectifs et équitables tant pour les États membres que pour les personnes concernées. Elle devrait, en particulier, permettre une détermination rapide de l’État membre responsable afin de garantir un accès effectif aux procédures d’octroi d’une protection internationale et ne pas compromettre l’objectif de célérité dans le traitement des demandes de protection internationale. »

6.        Au chapitre II, intitulé « Principes généraux et garanties », l’article 3, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement Dublin III dispose ce qui suit :

« Lorsque aucun État membre responsable ne peut être désigné sur la base des critères énumérés dans le présent règlement, le premier État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite est responsable de l’examen. »

7.        Le chapitre VI du règlement Dublin III, intitulé « Procédures de prise en charge et de reprise en charge », comprend les articles 20 à 33 de celui-ci. L’article 20, paragraphe 5, premier alinéa, de ce règlement énonce :

« L’État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite pour la première fois est tenu, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, et en vue d’achever le processus de détermination de l’État membre responsable de l’examen de la demande de protection internationale, de reprendre en charge le demandeur qui se trouve dans un autre État membre sans titre de séjour ou qui y introduit une demande de protection internationale après avoir retiré sa première demande présentée dans un autre État membre pendant le processus de détermination de l’État membre responsable. »

8.        L’article 23, paragraphes 1 à 3, du règlement Dublin III dispose :

« 1.      Lorsqu’un État membre auprès duquel une personne visée à l’article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu’un autre État membre est responsable conformément à l’article 20, paragraphe 5, et à l’article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre État membre aux fins de reprise en charge de cette personne.

2.      Une requête aux fins de reprise en charge est formulée aussi rapidement que possible et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac (“hit”) [...]

Si la requête aux fins de reprise en charge est fondée sur des éléments de preuve autres que des données obtenues par le système Eurodac, elle est envoyée à l’État membre requis dans un délai de trois mois à compter de la date d’introduction de la demande de protection internationale [...]

3.      Lorsque la requête aux fins de reprise en charge n’est pas formulée dans les délais fixés au paragraphe 2, c’est l’État membre auprès duquel la nouvelle demande est introduite qui est responsable de l’examen de la demande de protection internationale. »

9.        L’article 27, paragraphe 1, du règlement Dublin III est libellé comme suit :

« Le demandeur ou une autre personne visée à l’article 18, paragraphe 1, point c) ou d), dispose d’un droit de recours effectif, sous la forme d’un recours contre la décision de transfert ou d’une révision, en fait et en droit, de cette décision devant une juridiction. »

10.      L’article 29, paragraphes 1 et 2, du règlement Dublin III prévoit :

« 1.      Le transfert du demandeur [...] de l’État membre requérant vers l’État membre responsable s’effectue conformément au droit national de l’État membre requérant, après concertation entre les États membres concernés, dès qu’il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l’acceptation par un autre État membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l’effet suspensif est accordé [...]

[...]

2.      Si le transfert n’est pas exécuté dans le délai de six mois, l’État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l’État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s’il n’a pas pu être procédé au transfert en raison d’un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. »

III. Les faits des litiges au principal et les questions préjudicielles

A.      L’affaire C323/21

11.      Le 3 juillet 2017, B. a introduit une demande de protection internationale en Allemagne. B. ayant antérieurement sollicité cette protection en Italie, les autorités allemandes ont demandé aux autorités italiennes de le reprendre en charge. Le 4 octobre 2017, les autorités italiennes ont accepté cette requête aux fins de reprise en charge. Le délai de transfert a, par la suite, été prolongé jusqu’au 4 avril 2019 en raison de la fuite de B.

12.      Le 17 février 2018, B. a introduit une demande de protection internationale aux Pays-Bas. Le secrétaire d’État a demandé, le 17 mars 2018, aux autorités italiennes de reprendre en charge B. Le 1er avril 2018, les autorités italiennes ont accepté cette requête aux fins de reprise en charge. Le secrétaire d’État a, par lettre du 29 juin 2018, informé ces autorités que B. avait pris la fuite, ce qui aurait impliqué une prolongation du délai de transfert jusqu’au 1er octobre 2019.

13.      Le 9 juillet 2018, B. a introduit une seconde demande de protection internationale en Allemagne. Les autorités allemandes ont adopté, le 14 septembre 2018, une décision au titre du règlement Dublin III, laquelle n’a pas fait l’objet d’un recours.

14.      Le 27 décembre 2018, B. a introduit une seconde demande de protection internationale aux Pays-Bas. Par décision du 8 mars 2019, le secrétaire d’État a écarté sans examen cette demande au motif que la République italienne demeurait l’État membre responsable de l’examen de celle-ci.

15.      Le 29 avril 2019, B. a été transféré vers l’Italie.

16.      B. a introduit un recours contre la décision du secrétaire d’État du 8 mars 2019 devant le tribunal compétent. Par jugement du 12 juin 2019, ce tribunal a accueilli ce recours et annulé cette décision, au motif que la République fédérale d’Allemagne était devenue, le 4 avril 2019, l’État membre responsable en raison de l’expiration du délai de transfert.

17.      Le secrétaire d’État a interjeté appel de ce jugement devant la juridiction de renvoi. Il a notamment fait valoir, à l’appui de cet appel, d’une part, que le calcul du délai de transfert devrait être opéré au regard de la relation entre le Royaume des Pays-Bas et la République italienne et, d’autre part, que, en application de la « règle de la chaîne », un nouveau délai de transfert avait commencé à courir pour la République fédérale d’Allemagne lors de l’introduction par B. d’une demande de protection internationale aux Pays-Bas.

18.      La juridiction de renvoi relève qu’il est constant que la République italienne était l’État membre responsable au jour de l’introduction de la dernière demande de protection internationale de B. En revanche, les parties au principal s’opposent quant à une éventuelle expiration du délai de transfert antérieure au transfert de B., une fois la durée de 18 mois échue depuis l’acceptation par la République italienne de la première requête aux fins de reprise en charge.

19.      En l’occurrence, il aurait existé en même temps deux « accords valables » aux fins de la reprise en charge, avec deux délais de transfert différents, ce qui impliquerait de préciser le rapport entre ces deux délais. À cette fin, il conviendrait de déterminer si le premier État membre ayant formulé une requête aux fins de reprise en charge doit encore être considéré comme étant l’« État membre requérant », au sens de l’article 29, paragraphe 2, du règlement Dublin III, ou si cette qualité doit être réservée au dernier État membre ayant formulé une telle requête.

20.      Si la seconde interprétation devait être retenue, la juridiction de renvoi se demande si ce dernier État membre est lié, d’une quelconque façon, au délai de transfert qui s’impose au premier État membre. En revanche, si la première interprétation devait être privilégiée, il serait nécessaire de déterminer si B. peut se prévaloir de l’expiration du délai de transfert convenu entre la République fédérale d’Allemagne et la République italienne devant les juridictions néerlandaises, situation qui favoriserait le « forum shopping ».

21.      Dans ces conditions, le Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      a)      La notion d’“État membre requérant” visée à l’article 29, paragraphe 2, du règlement [Dublin III] doit-elle être interprétée en ce sens que, par ces termes, il faut entendre l’État membre (en l’espèce le troisième État membre, à savoir le Royaume des Pays-Bas) qui a présenté le dernier, auprès d’un autre État membre, une requête aux fins de reprise ou de prise en charge ?

b)      Si la réponse est négative, la circonstance qu’un accord aux fins de la reprise en charge a été conclu antérieurement entre deux États membres (en l’espèce la République fédérale d’Allemagne et la République italienne) a-t-elle alors encore des conséquences pour les obligations juridiques du troisième État membre (en l’espèce le Royaume des Pays-Bas) au titre du règlement [Dublin III] à l’égard de l’étranger ou bien des États membres concernés par cet accord et, dans l’affirmative, lesquelles ?

2)      Si la première question appelle une réponse affirmative, l’article 27, paragraphe 1, du règlement [Dublin III], lu au regard du considérant 19 de ce règlement, doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que, dans le cadre d’une voie de recours contre une décision de transfert, un demandeur de protection internationale fasse valoir avec succès que ce transfert ne peut pas avoir lieu parce que le délai pour un transfert convenu antérieurement entre deux États membres (en l’espèce la République fédérale d’Allemagne et la République italienne) a expiré ? »

B.      Les affaires jointes C324/21 et C325/21

1.      L’affaire C324/21

22.      Le 24 novembre 2017, F. a introduit une demande de protection internationale aux Pays-Bas. F. ayant antérieurement demandé cette protection en Italie, le secrétaire d’État a demandé aux autorités italiennes de le reprendre en charge. Le 19 décembre 2017, les autorités italiennes ont accepté cette requête aux fins de reprise en charge. Le secrétaire d’État a, par lettre du 12 avril 2018, informé ces autorités que F. avait pris la fuite, ce qui a impliqué une prolongation du délai de transfert jusqu’au 19 juin 2019.

23.      Le 29 mars 2018, F. a introduit une demande de protection internationale en Allemagne. Les suites éventuellement données à cette demande ne sont pas connues par la juridiction de renvoi.

24.      Le 30 septembre 2018, F. a introduit une seconde demande de protection internationale aux Pays-Bas. Par décision du 31 janvier 2019, le secrétaire d’État a écarté sans examen cette demande au motif que la République italienne demeurait l’État membre responsable de l’examen de celle-ci.

25.      Après avoir quitté le centre de demandeurs d’asile dans lequel il était hébergé, F. a été interpellé, puis placé en rétention, par une décision du secrétaire d’État du 1er juillet 2019, en vue de son transfert vers l’Italie.

26.      F. a introduit un recours contre cette décision devant le tribunal compétent. Par jugement du 16 juillet 2019, ce tribunal a accueilli ce recours et annulé ladite décision, au motif que le Royaume des Pays-Bas était devenu, le 19 juin 2019, l’État membre responsable en raison de l’expiration du délai de transfert.

27.      Le secrétaire d’État a interjeté appel de ce jugement devant la juridiction de renvoi. Il a notamment fait valoir, à l’appui de cet appel, que, en application de la « règle de la chaîne », un nouveau délai de transfert avait commencé à courir pour le Royaume des Pays-Bas lors de l’introduction par F. d’une demande de protection internationale en Allemagne.

28.      La juridiction de renvoi relève qu’il est constant que la République italienne devait être considérée comme étant l’État membre responsable, à tout le moins jusqu’au 19 juin 2019.

29.      Cette juridiction s’interroge toutefois sur la pertinence que pourrait revêtir la circonstance que, avant l’expiration du délai de transfert, la personne concernée a introduit une nouvelle demande de protection internationale dans un autre État membre.

30.      Dans ces conditions, le Raad van State (Conseil d’État) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 29 du règlement [Dublin III] doit-il être interprété en ce sens qu’un délai de transfert en cours tel que visé à l’article 29, paragraphes 1 et 2, prend à nouveau cours au moment où, après avoir entravé le transfert par un État membre en prenant la fuite, l’étranger introduit dans un autre État membre (en l’espèce un troisième État membre) une nouvelle demande de protection internationale ? »

2.      L’affaire C325/21

31.      Le 6 septembre 2018, K. a introduit une demande de protection internationale en France. K. ayant antérieurement demandé cette protection en Autriche, les autorités françaises ont demandé aux autorités autrichiennes de le reprendre en charge. Le 4 octobre 2018, les autorités autrichiennes ont accepté cette requête aux fins de reprise en charge.

32.      Le 27 mars 2019, K. a introduit une demande de protection internationale aux Pays-Bas. Le secrétaire d’État a demandé, le 3 mai 2019, aux autorités autrichiennes de reprendre K. en charge. Le 10 mai 2019, ces autorités ont rejeté cette requête aux fins de reprise en charge, au motif que la République française était, depuis le 4 avril 2019, l’État membre responsable de l’examen de la demande de K.

33.      Le 20 mai 2019, le secrétaire d’État a demandé aux autorités françaises de reprendre K. en charge. Ces autorités ont rejeté cette requête aux fins de reprise en charge, au motif que le délai de transfert n’avait pas encore expiré au jour de l’introduction par K. d’une demande de protection internationale aux Pays-Bas.

34.      Le 31 mai 2019, le secrétaire d’État a demandé tant aux autorités autrichiennes qu’aux autorités françaises de reconsidérer la requête aux fins de reprise en charge. Dans la demande ainsi adressée aux autorités autrichiennes, il était soutenu qu’un nouveau délai de transfert entre la République française et la République d’Autriche avait pris cours à compter de l’introduction par K. d’une demande de protection internationale aux Pays-Bas. Le 3 juin 2019, les autorités autrichiennes ont accepté de reprendre K. en charge.

35.      Par décision du 24 juillet 2019, le secrétaire d’État a écarté sans examen la demande de protection internationale introduite par K.

36.      K. a introduit un recours contre cette décision devant le tribunal compétent. Par jugement du 17 octobre 2019, ce tribunal a rejeté ce recours, au motif que le secrétaire d’État aurait considéré à bon droit que la République d’Autriche était l’État membre responsable de l’examen de la demande de protection internationale de K.

37.      K. a interjeté appel de ce jugement devant la juridiction de renvoi. Il a fait valoir, à l’appui de cet appel, que l’introduction d’une demande de protection internationale dans un troisième État membre ne saurait faire obstacle à l’expiration du délai encadrant un transfert prévu entre deux autres États membres.

38.      La juridiction de renvoi relève qu’il est constant que la République d’Autriche devait être considérée comme étant l’État membre responsable, à tout le moins jusqu’au 4 avril 2019, dans la mesure où cet État membre n’avait pas été informé par les autorités françaises de la fuite de K.

39.      C’est dans ces conditions que le Raad van State (Conseil d’État) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      L’article 29 du règlement [Dublin III] doit-il être interprété en ce sens qu’un délai de transfert en cours tel que visé à l’article 29, paragraphes 1 et 2, prend à nouveau cours au moment où, après avoir entravé le transfert par un État membre en prenant la fuite, l’étranger introduit dans un autre État membre (en l’espèce un troisième État membre) une nouvelle demande de protection internationale ?

2)      Si la première question appelle une réponse négative, l’article 27, paragraphe 1, du règlement [Dublin III], lu au regard du considérant 19 de ce règlement, doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que, dans le cadre d’une voie de recours contre une décision de transfert, un demandeur de protection internationale fasse valoir avec succès que ce transfert ne peut pas avoir lieu parce que le délai pour un transfert convenu antérieurement entre deux États membres (en l’espèce la République française et la République d’Autriche) a expiré, avec comme conséquence que le délai dans lequel le Royaume des Pays-Bas peut procéder au transfert a expiré ? »

C.      La procédure devant la Cour

40.      Les affaires C‑324/21 et C‑325/21 ont fait l’objet d’une jonction à ce stade de la procédure. En revanche, l’affaire C‑323/21 n’a pas été jointe aux deux autres. Toutefois, au regard du lien qu’entretiennent ces trois affaires, celles-ci ont donné lieu à une audience de plaidoiries commune, le 5 mai 2022, au cours de laquelle les parties ont été entendues et ont été notamment invitées à répondre aux questions pour réponse orale adressées par la Cour.

IV.    Analyse

A.      Sur la première question préjudicielle posée dans l’affaire C323/21, la question unique visée dans l’affaire C324/21 et la première question préjudicielle adressée à la Cour dans l’affaire C325/21

41.      J’examinerai conjointement la première question posée dans l’affaire C‑323/21, la question unique visée dans l’affaire C‑324/21 et la première question adressée à la Cour dans l’affaire C‑325/21.

42.      En effet, bien que ces questions aient été posées dans des termes différents, elles visent, en substance, à interpréter les dispositions relatives à la computation des délais de transfert, énoncées à l’article 29, paragraphes 1 et 2, du règlement Dublin III, dans la situation où l’État membre dans lequel une demande de protection internationale a été introduite pour la première fois est requis par deux États membres différents aux fins de la reprise en charge d’un même demandeur, le premier État membre requérant se trouvant dans l’impossibilité d’exécuter le transfert de ce demandeur selon les modalités et dans les délais visés à cet article, au motif que celui-ci a quitté le territoire national pour se rendre sur le territoire du second État membre requérant (6).

43.      Dans chacune de ces trois affaires, la juridiction de renvoi concentre ses questions sur l’interprétation des termes de l’article 29 du règlement Dublin III.

44.      Je rappelle que cet article définit les modalités et les délais dans lesquels l’État membre requérant doit, aux fins de la prise en charge ou de la reprise en charge d’un demandeur, procéder au transfert de ce dernier vers l’État membre responsable.

45.      L’article 29, paragraphe 1, premier alinéa, de ce règlement dispose que le transfert s’effectue conformément au droit national de l’État membre requérant, après concertation entre les États membres concernés, dès qu’il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l’acceptation par l’État membre requis de la requête aux fins de prise ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision en cas d’effet suspensif.

46.      L’article 29, paragraphe 2, du règlement Dublin III précise, toutefois, que ce délai peut être prolongé, à titre exceptionnel, afin de tenir compte du fait qu’il est matériellement impossible pour l’État membre requérant de procéder au transfert de la personne concernée en raison de l’emprisonnement ou de la fuite de celle-ci. Ledit délai est alors porté à un an au maximum s’il n’a pas pu être procédé au transfert en raison d’un emprisonnement de cette personne, cette notion ayant été définie dans l’arrêt du 31 mars 2022, Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl e.a. (Placement d’un demandeur d’asile dans un hôpital psychiatrique) (7), ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée a pris la fuite, la notion de « fuite » ayant, quant à elle, été précisée dans l’arrêt du 19 mars 2019, Jawo (8).

47.      L’article 29, paragraphe 2, de ce règlement dispose, en outre, que, à l’expiration de ces délais, l’État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et que la responsabilité est alors transférée à l’État membre requérant. Conformément à la jurisprudence de la Cour, ce dernier n’est alors plus habilité à opérer le transfert et il doit, au contraire, prendre d’office les dispositions nécessaires pour entamer sans retard l’examen de la demande de protection internationale (9).

48.      L’énoncé de cette disposition s’inscrit dans le cadre d’une procédure de reprise en charge classique entre deux États membres, d’une part, l’État membre requis et, d’autre part, l’État membre requérant, auprès duquel le demandeur a introduit une nouvelle demande de protection internationale.

49.      Or, les questions préjudicielles qu’adresse la juridiction de renvoi s’inscrivent chacune dans un cadre différent puisqu’elles concernent les modalités selon lesquelles il convient de procéder au transfert d’un demandeur qui, en raison de la multiplicité des demandes de protection internationale qu’il a formulées, fait l’objet de procédures de reprise en charge, menées de manière successive par des États membres différents.

50.      Aucune disposition du règlement Dublin III ou du règlement no 1560/2003 ne prévoit de règles particulières dans ce cas de figure, celui-ci étant emblématique du phénomène des « mouvements secondaires », par lesquels de nombreux demandeurs de protection internationale se déplacent de l’État membre responsable du traitement de leur demande vers d’autres États membres où ils souhaitent demander la protection internationale et s’installer.

51.      Dans ce contexte, les dispositions prévues à l’article 29 du règlement Dublin III, relatives au déroulement de la procédure de transfert, me semblent bien trop circonscrites pour rendre une réponse utile à la juridiction de renvoi et notamment pour définir des modalités qui permettent, d’une part, de maintenir une méthode claire, opérationnelle et rapide pour déterminer l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale et, d’autre part, de prévenir les abus découlant du déplacement dans l’Union de certains demandeurs.

52.      À cette fin, il me semble essentiel d’analyser les termes dans lesquels les États membres concernés concluent une procédure de reprise en charge, ces termes étant posés notamment à l’article 20, paragraphe 5, et à l’article 23, paragraphe 1, du règlement Dublin III, ainsi que d’examiner la finalité que poursuit le législateur de l’Union dans ces circonstances.

1.      Les termes dans lesquels la procédure de reprise en charge est définie à l’article 20, paragraphe 5, du règlement Dublin III

53.      Il ressort de l’exposé des faits des affaires au principal que chacun des demandeurs a introduit pour la première fois une demande de protection internationale dans un État membre, à savoir l’Italie dans les affaires C‑323/21 et C‑324/21 ainsi que l’Autriche dans l’affaire C‑325/21, avant de se déplacer dans l’Union et de se rendre sur le territoire d’autres États membres auprès desquels ils ont introduit successivement d’autres demandes de protection internationale.

54.      Cela implique que les demandeurs relèvent du champ d’application de l’article 18, paragraphe 1, sous b) à d), du règlement Dublin III. Cet article se réfère à une personne qui, d’une part, a introduit une demande de protection internationale qui soit est en cours d’examen [sous b)], soit a été retirée par le demandeur alors qu’elle était en cours d’examen [sous c)], soit a été rejetée [sous d)] et qui, d’autre part, soit a présenté une demande dans un autre État membre, soit se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d’un autre État membre (10).

55.      En outre, cela implique que le premier État membre dans lequel la demande de protection internationale a été introduite, à savoir l’Italie dans les affaires C‑323/21 et C‑324/21 et l’Autriche dans l’affaire C‑325/21, est tenu de reprendre en charge le demandeur, conformément à l’article 20, paragraphe 5, du règlement Dublin III.

56.      En effet, je rappelle que, conformément à l’article 3, paragraphe 1, du règlement Dublin III, une demande de protection internationale présentée par un ressortissant d’un pays tiers sur le territoire de l’un des États membres, quel qu’il soit, est, en principe, examinée par le seul État membre que les critères énoncés au chapitre III de ce règlement désignent comme responsable (11). Toutefois, outre les critères énoncés au chapitre III du règlement Dublin III, le chapitre VI de ce règlement institue des procédures de prise et de reprise en charge par un autre État membre qui « contribuent également, au même titre que les critères énoncés au chapitre III dudit règlement, à déterminer l’État membre responsable » (12).

57.      Ainsi en est-il des dispositions énoncées à l’article 20, paragraphe 5, du règlement Dublin III.

58.      Cet article 20 concerne, comme son intitulé l’indique, le début de la procédure de prise en charge et de reprise en charge.

59.      Le paragraphe 5 dudit article dispose que l’État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite pour la première fois est tenu de reprendre en charge le demandeur qui, avant que le processus de détermination de l’État membre responsable soit achevé, a quitté le territoire national et a introduit une demande de protection internationale dans un autre État membre (13). La reprise en charge du demandeur a pour but de permettre à l’État membre auprès duquel la demande a été introduite en premier « d’achever le processus de détermination de l’État membre responsable de l’examen de la demande », et non de procéder à l’examen de la demande de protection internationale (14).

60.      Conformément à la jurisprudence de la Cour, cette disposition est également applicable à la situation dans laquelle un demandeur a implicitement retiré sa demande en quittant le territoire de l’État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite pour la première fois sans informer l’autorité nationale compétente de son souhait de renoncer à cette demande et dans laquelle, par conséquent, le processus de détermination de l’État membre responsable est toujours en cours (15).

61.      En outre, l’article 20, paragraphe 5, du règlement Dublin III prévoit que la procédure de reprise en charge du demandeur doit être conduite conformément aux conditions énoncées aux articles 23, 24, 25 et 29 de ce dernier.

62.      En vertu de l’article 23, paragraphe 1, dudit règlement, l’État membre requérant ne peut présenter une requête aux fins de reprise en charge qu’à condition que l’État membre requis satisfasse aux conditions prévues à l’article 20, paragraphe 5, ou à l’article 18, paragraphe 1, sous b) à d), du même règlement (16). Par conséquent, la conduite de la procédure de reprise en charge suppose la réunion de deux conditions cumulatives que le législateur de l’Union vise à l’article 20, paragraphe 5, du règlement Dublin III : en premier lieu, le demandeur doit avoir introduit sa première demande de protection internationale auprès de l’État membre requis et, en second lieu, ce demandeur doit se trouver sur le territoire de l’État membre requérant sans titre de séjour ou doit avoir introduit auprès des autorités nationales de ce dernier État une nouvelle demande de protection internationale.

63.      Le législateur de l’Union ne prévoit pas le cas de figure dans lequel les conditions posées pour la conduite de cette procédure ne seraient plus satisfaites en raison de la survenance de circonstances postérieures à son engagement.

64.      Il découle seulement des termes de l’article 29 du règlement Dublin III que la procédure de reprise en charge prend fin de trois façons : soit le transfert a été exécuté selon les modalités et dans les délais énoncés à cet article (paragraphe 1), soit le transfert n’a pas pu être exécuté dans les délais applicables, par exemple en raison de l’emprisonnement ou de la fuite de la personne concernée (paragraphe 2), soit la décision de transfert a été annulée à l’issue d’un recours ou d’une demande de révision introduite par le demandeur, conformément à l’article 27, paragraphe 1, de ce règlement (paragraphe 3).

65.      Or, rien ne s’oppose, à mon sens, à ce que la « concertation » menée entre les États membres concernés en vue de définir les modalités du transfert, visée à l’article 29, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement Dublin III, n’aboutisse au constat que la procédure de reprise en charge qui a été antérieurement engagée a perdu son objet et devient caduque à compter de l’acceptation par l’État membre requis d’une nouvelle requête aux fins de reprise en charge du demandeur. En effet, dans des situations telles que celles en cause au principal, si la première procédure de reprise en charge a été valablement engagée après concertation entre les États membres concernés, les événements postérieurs à cette concertation, à savoir le départ du demandeur du territoire de l’État membre requérant et son séjour sur le territoire d’un autre État membre auprès duquel il a introduit une nouvelle demande de protection internationale, privent cette première procédure d’un élément essentiel à sa validité. En effet, contrairement aux conditions énoncées à l’article 20, paragraphe 5, du règlement Dublin III, le demandeur ne se trouve plus sur le territoire de l’État membre requérant et, en raison même de son départ, la demande de protection internationale qu’il a introduite doit être considérée comme ayant été retirée. En effet, je rappelle que la Cour a jugé que le départ du demandeur du territoire d’un État membre dans lequel il a introduit une demande de protection internationale doit être assimilé, aux fins de l’application de l’article 20, paragraphe 5, de ce règlement, à un retrait implicite de cette demande (17). Ce constat s’impose, à mon avis, d’autant plus dans des situations telles que celles en cause au principal, où le demandeur non seulement a quitté le territoire de l’État membre requérant, mais s’est également rendu sur le territoire d’un autre État membre auprès duquel il a introduit une nouvelle demande de protection internationale.

66.      Il en découle que les conditions posées à l’article 20, paragraphe 5, du règlement Dublin III, aux fins de la reprise en charge du demandeur, ne sont plus réunies.

67.      À cet égard, je considère que l’État membre requis, en tant qu’il est impliqué dans deux procédures de reprise en charge, engagées dans des délais très courts et à l’égard de la même personne par deux États membres différents, est en mesure de convenir avec le premier État membre requérant de la caducité de la première procédure de reprise en charge qu’ils ont conclue.

68.      En effet, l’État membre requis est informé de l’impossibilité dans laquelle se trouve le premier État membre requérant de procéder, en raison de la fuite du demandeur, à l’exécution du transfert dans les délais et selon les modalités qu’ils avaient convenus ensemble, alors qu’il est, dans le même temps, amené à statuer sur la seconde requête aux fins de reprise en charge adressée par le second État membre et sur le territoire duquel se trouve le demandeur.

69.      Compte tenu de la nature des informations dont l’État membre requis est alors appelé à prendre connaissance, s’agissant notamment de la localisation du demandeur et de l’état des procédures engagées à son encontre, je suis d’avis qu’il ne peut valablement s’engager auprès du second État membre requérant à reprendre en charge le demandeur et ainsi convenir des modalités du transfert de ce dernier, sans qu’il reconnaisse avec le premier État membre requérant la caducité des engagements antérieurement conclus dans le cadre de la première procédure de reprise en charge. Ainsi que je l’ai indiqué précédemment, une telle interprétation ne semble pas méconnaître les termes de l’article 29 du règlement Dublin III.

70.      En outre, je pense que les informations communiquées dans le cadre de la seconde procédure de reprise en charge, relatives à la localisation du demandeur et à l’état des procédures engagées à son encontre, relèvent de celles que l’État membre requis peut partager auprès des États membres concernés, en application de l’article 34, paragraphe 1, du règlement Dublin III. Cet article, qui figure au chapitre VII de ce règlement, intitulé « Coopération administrative », prévoit à son paragraphe 2, sous d), f) et g), que ces informations peuvent porter sur les lieux de séjour et les itinéraires de voyage du demandeur ainsi que sur la date d’introduction d’une éventuelle demande de protection internationale antérieure, la date d’introduction de la demande actuelle, l’état d’avancement de la procédure et le, cas échéant, la teneur de la décision prise.

71.      La caducité de la première procédure de reprise en charge participerait également aux objectifs que poursuit le législateur de l’Union dans le cadre du règlement Dublin III.

2.      La finalité du règlement Dublin III

72.      Ainsi que cela ressort de ses considérants 4 et 5, le règlement Dublin III a pour finalité d’établir une méthode qui se veut « claire et opérationnelle » pour déterminer l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale, méthode qui doit être fondée sur des critères « objectifs et équitables tant pour les États membres que pour les personnes concernées ». Cette méthode doit, avant tout, « permettre une détermination rapide de l’État membre responsable afin de [...] ne pas compromettre l’objectif de célérité dans le traitement des demandes de protection internationale ». Le législateur de l’Union entend ainsi rationaliser le traitement de ces demandes, en garantissant aux demandeurs l’examen de leur demande au fond par un seul État membre clairement déterminé. En instaurant des mécanismes et des critères uniformes tendant à la détermination de l’État membre responsable, ce législateur vise, en outre, à prévenir les mouvements secondaires des ressortissants de pays tiers ayant déposé une demande de protection internationale dans un État membre vers d’autres États membres (18).

73.      Or, il va de soi que deux procédures de reprise en charge ne peuvent être valablement menées dans le même temps par des États membres différents à l’égard de la même personne, sauf à méconnaître la finalité du règlement Dublin III.

74.      En premier lieu, la conduite de la première procédure de reprise en charge jusqu’à son terme après le départ de la personne concernée du territoire de l’État membre requérant, et le transfert de responsabilité que cette procédure est susceptible d’impliquer, ne garantirait nullement la célérité de ladite procédure. Au contraire, la conduite de cette première procédure, jusqu’à son terme, d’une part, serait de nature à limiter de manière notable l’efficacité recherchée par le législateur de l’Union et, d’autre part, risquerait d’inciter les personnes concernées à quitter le territoire de l’État membre requérant dans le but soit d’empêcher leur transfert vers l’État membre responsable, soit de prolonger leur séjour dans l’Union, en bénéficiant de conditions matérielles d’accueil.

75.      Le transfert de responsabilité requis au titre de l’article 29, paragraphe 2, première phrase, du règlement Dublin III équivaut à déterminer l’État membre responsable de l’examen de la demande par le jeu d’une « sanction » de l’État membre requérant, lorsque celui-ci n’a pas exécuté ce transfert qu’il a lui-même demandé. À partir du moment où l’État membre requérant manque aux délais fixés à cette disposition, le transfert de responsabilité est automatique et s’opère indépendamment des circonstances du cas d’espèce.

76.      Toutefois, dans des situations telles que celles en cause au principal, l’automaticité de ce mécanisme ne permet pas de tenir compte du fait que le demandeur a quitté le territoire du premier État membre requérant en violation des obligations de coopération lui incombant. Les autorités compétentes de cet État ne se trouvent, dès lors, ni en mesure de le transférer, selon les modalités et dans les délais énoncés à l’article 29, paragraphes 1 et 2, du règlement Dublin III, ni en mesure de mener l’examen de sa demande de protection internationale en cas de dévolution de la responsabilité, et ce contrairement aux autorités compétentes du second État membre requérant.

77.      Je rappelle, en effet, que tant la procédure de transfert que celle d’examen de la demande de protection internationale impliquent que le demandeur soit à la disposition des autorités nationales compétentes.

78.      Or, si ces autorités peuvent localiser le demandeur en raison des formalités que celui-ci a dû accomplir en vue de l’introduction de sa demande de protection internationale dans un autre État membre (en particulier, grâce à l’inscription dans le système Eurodac) (19), celles-ci ne disposent, en revanche, d’aucune compétence pour procéder à l’exécution du transfert de cette personne, conformément à l’article 29 du règlement Dublin III, dès lors que ladite personne se trouve hors du territoire national, la procédure instaurée par ce règlement n’étant pas de nature pénale.

79.      De la même façon, la procédure d’examen d’une demande de protection internationale implique que le demandeur se soumette aux obligations que lui imposent tant la directive procédure que la directive 2013/33/UE (20), et ce aux fins du traitement rapide et du suivi efficace de sa demande de protection internationale. Parmi ces obligations figurent celle de résider au lieu indiqué et celle de se présenter régulièrement devant les autorités nationales compétentes.

80.      Dans de telles circonstances, je ne vois aucune raison permettant de justifier la poursuite de cette procédure et, en particulier, la prolongation du délai de transfert, ce dernier étant voué à l’échec.

81.      En deuxième lieu, la poursuite de la première procédure de reprise en charge ne participe pas au maintien de la méthode claire et opérationnelle que le législateur de l’Union tend à établir dans le cadre du règlement Dublin III.

82.      D’une part, l’automaticité du transfert de responsabilité ne permet pas de tenir compte du fait que ce transfert concerne l’examen d’une demande de protection internationale qui est une demande vraisemblablement identique à celle qui a été présentée antérieurement dans le premier État membre et à celle introduite postérieurement auprès d’un autre État membre.

83.      D’autre part, le déroulement successif de ces deux procédures implique, par le jeu de la règle de la dévolution de responsabilité, énoncée notamment à l’article 29, paragraphe 2, première phrase, du règlement Dublin III, des difficultés susceptibles d’entraver le fonctionnement effectif du « système de Dublin » (21).

84.      Ainsi, la seconde procédure de reprise en charge est entamée, alors que la première procédure de reprise en charge est en cours, et peut aboutir, en cas d’expiration des délais énoncés à l’article 29, paragraphe 2, du règlement Dublin III, à un transfert de responsabilité au premier État membre requérant. Dès lors, compte tenu du délai de deux mois dans lequel le second État membre requérant est tenu d’adresser sa requête aux fins de reprise en charge, cette requête sera introduite et, le cas échéant, acceptée par l’État membre requis, alors que la responsabilité de ce dernier n’est pas définitivement fixée puisqu’elle est susceptible d’être transférée au premier État membre requérant par l’effet de la dévolution de la responsabilité. Un tel mécanisme expose les autorités nationales compétentes de chacun des États membres concernés à des incertitudes quant aux responsabilités leur incombant, et ce d’autant plus que le système Eurodac ne permet pas d’être informé de l’état d’avancement des procédures de prise en charge ou de reprise en charge menées dans les autres États membres. Comme l’illustrent les présentes affaires, l’autorité compétente du second État membre requérant s’expose ainsi à ce que la décision de transfert qu’elle a notifiée au demandeur fasse l’objet d’un recours conformément à l’article 27, paragraphe 1, du règlement Dublin III et, le cas échéant, que le transfert qu’elle a pu effectuer soit annulé, cet État étant alors tenu, conformément à l’article 29, paragraphe 3, dudit règlement, de reprendre en charge sans tarder la personne concernée.

85.      Un tel mécanisme est, à mon avis, susceptible d’aboutir à la paralysie du système de Dublin, encourageant paradoxalement le mouvement des demandeurs de protection internationale dans l’Union.

86.      Dans ces circonstances, il me semble donc essentiel de préserver l’effet utile de l’article 20, paragraphe 5, du règlement Dublin III, en maintenant le « statut particulier » et le « rôle spécifique » que le législateur de l’Union accorde à l’État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite pour la première fois (22). À cette fin, des situations telles que celles en cause au principal, qui se caractérisent par l’introduction d’une multiplicité de demandes de protection internationale auprès d’États membres différents, nécessitent d’établir un mécanisme ordonné et contrôlé, de façon à éviter que le rôle et la mission de chacun ne soient constamment remis en cause en conséquence des déplacements du demandeur.

87.      En troisième lieu, je suis d’avis qu’il est important de mettre l’accent sur l’arsenal juridique dont dispose le second État membre requérant pour garantir une procédure de reprise en charge bien plus rapide et bien plus efficace que celle qu’est en mesure de mener le premier État membre requérant, et ce en raison de la présence de la personne concernée sur son territoire. À l’évidence, comme le confirme la règle de l’attribution des compétences, visée à l’article 20, paragraphe 4, du règlement Dublin III, la présence de la personne concernée sur le territoire de l’État membre constitue un élément essentiel aux fins de la conduite du processus de reprise en charge (23).

88.      Ainsi, je rappelle que l’introduction d’une nouvelle demande de protection internationale implique, dans le cadre du régime d’asile européen commun, la mise en œuvre d’un cadre législatif contraignant, mettant à la charge de l’État membre concerné des obligations juridiques définies tant dans le règlement Dublin III que dans la directive procédure et la directive 2013/33.

89.      Cet État membre est tout d’abord tenu, conformément à l’article 4, paragraphe 1, sous a), du règlement Dublin III et dès qu’une demande de protection internationale est introduite, au sens de l’article 20, paragraphe 2, de ce règlement, d’informer le demandeur, par écrit et dans une langue qu’il comprend, des conséquences liées à l’introduction de sa nouvelle demande de protection internationale ainsi que des conséquences de son passage d’un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l’État membre responsable est déterminé et la demande de protection internationale est examinée. Dans ce contexte, je pense que les autorités nationales compétentes peuvent informer ce demandeur de l’état des procédures qui ont été engagées à son encontre et des conséquences liées à l’introduction de multiples demandes de protection internationale dans l’Union.

90.      Ensuite, l’État membre requérant est tenu, conformément à l’article 23 paragraphe 1, du règlement Dublin III, de requérir l’État membre responsable, conformément à l’article 20, paragraphe 5, et à l’article 18, paragraphe 1, de ce règlement, aux fins de la reprise en charge du demandeur dans les délais et les conditions énoncées dans ledit règlement. Afin de garantir l’effectivité de la procédure de reprise en charge, l’État membre requérant peut décider, conformément à l’article 7, paragraphe 2, de la directive 2013/33, du lieu où le demandeur doit résider et exiger de ce dernier, en application de l’article 13, paragraphe 2, sous a), de la directive procédure, qu’il se manifeste auprès des autorités compétentes ou qu’il se présente en personne, soit immédiatement soit à une date précise.

91.      Enfin, cet État membre peut décider, en considération de l’existence du risque important de fuite du demandeur et sous réserve du respect des droits et des garanties qui sont accordés à ce dernier, de recourir à des mesures coercitives en vue de garantir l’efficience de la procédure de transfert, telles que le placement en rétention, dans les conditions visées à l’article 8, paragraphe 3, sous f), de la directive 2013/33 et à l’article 28, paragraphe 2, du règlement Dublin III.

92.      Au regard de l’ensemble de ces éléments et, en particulier, des conditions prévues à l’article 20, paragraphe 5, du règlement Dublin III aux fins de la conduite d’une procédure de reprise en charge ainsi que des objectifs que poursuit le législateur de l’Union, je pense qu’il est donc essentiel que, dans des situations telles que celles en cause au principal, la caducité de la première procédure de reprise en charge soit prononcée.

93.      Compte tenu des considérations, je propose à la Cour de dire pour droit que l’article 29, paragraphes 1 et 2, du règlement Dublin III doit être interprété en ce sens que, dans une situation dans laquelle un État membre, sur le territoire duquel une demande de protection internationale a été introduite pour la première fois, est requis, sur le fondement de l’article 23, paragraphe 1, de ce règlement, au titre de deux procédures de reprise en charge engagées successivement par deux États membres différents à l’égard d’un même demandeur, l’État membre requis et le premier État membre requérant doivent, dans l’hypothèse où ce dernier ne peut exécuter le transfert du demandeur selon les modalités et dans les délais énoncés à l’article 29 dudit règlement en raison du départ de cette personne du territoire du premier État membre requérant, constater la caducité de cette première procédure de reprise en charge à compter de l’acceptation par l’État membre requis de la seconde requête aux fins de reprise en charge formulée par le second État membre requérant.

B.      Sur la seconde question préjudicielle dans les affaires C323/21 et C325/21

94.      Par sa seconde question préjudicielle dans les affaires C-323/21 et C-325/21, la juridiction de renvoi demande, en substance, à la Cour si l’article 27, paragraphe 1, du règlement Dublin III doit être interprété en ce sens que, dans la situation dans laquelle une seconde procédure de reprise en charge est engagée à l’égard de la même personne dans un État membre autre que l’État membre ayant conduit la première procédure de reprise en charge, le demandeur peut, dans le cadre du recours qu’il exerce contre la décision de transfert adoptée par le second État membre requérant, se prévaloir de l’expiration des délais énoncés à l’article 29, paragraphes 1 et 2, de ce règlement et du transfert de responsabilité qui en a résulté.

95.      Compte tenu de la réponse que je propose d’apporter à la première question préjudicielle, j’estime qu’il n’y a pas lieu de répondre à cette seconde question préjudicielle.

V.      Conclusion

96.      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas) dans les affaires C‑323/21, C‑324/21 et C‑325/21 de la manière suivante :

L’article 29, paragraphes 1 et 2, du règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride,

doit être interprété en ce sens que :

dans une situation dans laquelle un État membre, sur le territoire duquel une demande de protection internationale a été introduite pour la première fois, est requis, sur le fondement de l’article 23, paragraphe 1, de ce règlement, au titre de deux procédures de reprise en charge engagées successivement par deux États membres différents à l’égard d’un même demandeur, l’État membre requis et le premier État membre requérant doivent, dans l’hypothèse où ce dernier ne peut exécuter le transfert du demandeur selon les modalités et dans les délais énoncés à l’article 29 dudit règlement en raison du départ de cette personne du territoire du premier État membre requérant, constater la caducité de cette première procédure de reprise en charge à compter de l’acceptation par l’État membre requis de la seconde requête aux fins de reprise en charge formulée par le second État membre requérant.


1      Langue originale : le français.


2      JO 2013, L 180, p. 31, ci‑après le « règlement Dublin III ».


3      Règlement (CE) no 1560/2003 de la Commission, du 2 septembre 2003, portant modalités d’application du règlement (CE) no 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers (JO 2003, L 222, p. 3), tel que modifié par le règlement d’exécution (UE) no 118/2014 de la Commission, du 30 janvier 2014 (JO 2014, L 39, p. 1) (ci-après le « règlement no 1560/2003 »).


4      Voir, en ce sens, arrêt du 19 mars 2019, Jawo (C‑163/17, EU:C:2019:218, points 58 et 59). Voir, également, considérants 4 et 5 du règlement Dublin III.


5      Voir proposition de règlement du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers, présentée par la Commission européenne le 26 juillet 2001 [COM(2001) 447 final, point 2.1].


6      La première question préjudicielle posée dans l’affaire C‑323/21 se distingue davantage dans sa formulation de la question unique visée dans l’affaire C‑324/21 et de la première question adressée à la Cour dans l’affaire C‑325/21, puisque la juridiction de renvoi se concentre sur l’interprétation de la notion d’« État membre requérant », employée à l’article 29, paragraphe 2, du règlement Dublin III. En particulier, elle se demande si, dans la situation dans laquelle l’État membre requérant ne peut exécuter le transfert du demandeur au motif que ce dernier a quitté le territoire national pour se rendre dans un autre État membre auprès duquel il a introduit une nouvelle demande de protection internationale et sur le territoire duquel il se trouve, la notion d’« État membre requérant » (employée à l’article 29, paragraphe 2, de ce règlement) vise le dernier État membre auprès duquel la nouvelle demande de protection internationale a été introduite et en conséquence de laquelle une nouvelle requête aux fins de reprise en charge du demandeur a été adressée.


7      C‑231/21, EU:C:2022:237 (points 55 et 58).


8      C‑163/17, EU:C:2019:218 (points 56 et 57).


9      Voir, à cet égard, arrêt du 25 octobre 2017, Shiri (C‑201/16, EU:C:2017:805, point 43).


10      Voir, notamment, arrêt du 2 avril 2019, H. et R. (C‑582/17 et C‑583/17, ci-après l’« arrêt H. et R. », EU:C:2019:280, point 51, ainsi que jurisprudence citée).


11      Voir arrêt du 16 février 2017, C. K. e.a. (C‑578/16 PPU, EU:C:2017:127, point 56).


12      Arrêt du 25 octobre 2017, Shiri (C‑201/16, EU:C:2017:805, point 39). Dans l’arrêt du 26 juillet 2017, Mengesteab (C‑670/16, EU:C:2017:587), la Cour a dit pour droit que, « si les dispositions de l’article 21, paragraphe 1, [du règlement Dublin III, relatives à la présentation d’une requête aux fins de prise en charge,] visent à encadrer la procédure de prise en charge, elles contribuent également, au même titre que les critères énoncés au chapitre III dudit règlement, à déterminer l’État membre responsable, au sens du même règlement » (point 53).


13      En outre, il résulte de l’article 3, paragraphe 2, du règlement Dublin III que, lorsque aucun État membre responsable ne peut être désigné sur la base des critères énumérés dans ce même règlement, le premier État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite est responsable de l’examen.


14      Voir arrêt H. et R. (points 59 à 64).


15      Voir arrêt H. et R. (points 47 à 50).


16      Voir arrêt H. et R. (points 59 à 61).


17      Voir arrêt H. et R. (point 50). Je souligne également que, aux termes de l’article 28, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (JO 2013, L 180, p. 60, ci-après la « directive procédure »), intitulé « Procédure en cas de retrait implicite de la demande ou de renonciation implicite à celle-ci », les États membres « peuvent présumer que le demandeur a implicitement retiré sa demande de protection internationale ou y a implicitement renoncé, notamment lorsqu’il est établi [...] qu’il a fui ou quitté sans autorisation le lieu où il vivait ou était placé en rétention, sans contacter l’autorité compétente dans un délai raisonnable ou qu’il n’a pas, dans un délai raisonnable, respecté l’obligation de se présenter régulièrement aux autorités ou d’autres obligations de communication, à moins que le demandeur ne démontre que cela était dû à des circonstances qui ne lui sont pas imputables » [sous b)].


18      Voir arrêt du 10 décembre 2013, Abdullahi (C‑394/12, EU:C:2013:813, point 53 et jurisprudence citée). Voir, également, arrêt H. et R. (point 77, ainsi que jurisprudence citée).


19      En vue, notamment, d’assurer une application effective de ces dispositions, l’article 9, paragraphe 1, du règlement (UE) no 603/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relatif à la création d’Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l’application efficace du règlement (UE) no 604/2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride et relatif aux demandes de comparaison avec les données d’Eurodac présentées par les autorités répressives des États membres et Europol à des fins répressives, et modifiant le règlement (UE) no 1077/2011 portant création d’une agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice (JO 2013, L 180, p. 1) prévoit que les empreintes digitales de chaque demandeur d’asile doivent, en principe, être transmises au système Eurodac au plus tard 72 heures après l’introduction de la demande de protection internationale, telle que définie à l’article 20, paragraphe 2, du règlement Dublin III. Voir, également, article 6, paragraphe 4, de la directive procédure.


20      Directive du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (JO 2013, L 180, p. 96).


21      Le « système de Dublin » comprend le règlement Dublin III, le règlement no 603/2013 et le règlement no 1560/2003.


22      Voir arrêt du 26 juillet 2017, Mengesteab (C‑670/16, EU:C:2017:587, point 93), et arrêt H. et R. (point 64).


23      Le législateur de l’Union en fait d’ailleurs un critère décisif à l’article 20, paragraphe 4, du règlement Dublin III. Cet article prévoit que, dans l’hypothèse où une demande de protection internationale est introduite dans un État membre autre que l’État membre dans lequel se trouve le demandeur, la détermination de l’État membre responsable incombe à ce dernier État, celui-ci étant alors considéré, aux fins de ce règlement, comme l’État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite. Dans ce cas de figure, le demandeur doit être informé par écrit de ce changement et de la date à laquelle il a eu lieu, cette exigence intégrant les dispositions énoncées à l’article 4, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 2, du règlement Dublin III.

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