Papier Mettler Italia (Approximation of laws - Environment - Packaging and packaging waste - Judgment) French Text [2023] EUECJ C-86/22 (21 December 2023)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2023/C8622.html
Cite as: ECLI:EU:C:2023:1023, EU:C:2023:1023, [2023] EUECJ C-86/22

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ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

21 décembre 2023 (*)

« Renvoi préjudiciel – Rapprochement des législations – Environnement – Directive 94/62/CE – Emballages et déchets d’emballages – Directive 98/34/CE – Procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information – Obligation des États membres de notifier à la Commission européenne tout projet de règle technique – Réglementation nationale prévoyant des règles techniques plus restrictives que celles prévues par la réglementation de l’Union européenne »

Dans l’affaire C‑86/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional du Latium, Italie), par décision du 7 février 2022, parvenue à la Cour le 9 février 2022, dans la procédure

Papier Mettler Italia Srl

contre

Ministero della Transizione Ecologica,

Ministero dello Sviluppo Economico,

en présence de :

Associazione Italiana delle Bioplastiche e dei Materiali Biodegradabili e Compostabili – Assobioplastiche,

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme K. Jürimäe, présidente de chambre, MM. N. Piçarra, M. Safjan, N. Jääskinen et M. Gavalec (rapporteur), juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. C. Di Bella, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 mars 2023,

considérant les observations présentées :

–        pour Papier Mettler Italia Srl, par Me V. Cannizzaro, avvocato,

–        pour l’Associazione Italiana delle Bioplastiche e dei Materiali Biodegradabili e Compostabili – Assobioplastiche, par Mes G. Belotti, F. De Leonardis et S. Micono, avvocati,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de MM. M. Cherubini et G. Palatiello, avvocati dello Stato,

–        pour la Commission européenne, par Mme M. Escobar Gómez, M. G. Gattinara et Mme L. Haasbeek, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 25 mai 2023,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 1er, 2, 9, 16 et 18 de la directive 94/62/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 1994, relative aux emballages et aux déchets d’emballages (JO 1994, L 365, p. 10), telle que modifiée par la directive 2013/2/UE de la Commission, du 7 février 2013 (JO 2013, L 37, p. 10) (ci-après la « directive 94/62 »), et de l’article 8 de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information (JO 1998, L 204, p. 37), telle que modifiée par le règlement (UE) no 1025/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012 (JO 2012, L 316, p. 12) (ci-après la « directive 98/34 »), ainsi que de l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Papier Mettler Italia Srl au Ministero della Transizione Ecologica (ministère de la Transition écologique, Italie) (ci-après le « ministère de l’Environnement ») et au Ministero dello Sviluppo Economico (ministère du Développement économique, Italie) au sujet, d’une part, de la légalité d’un décret imposant le respect de certaines caractéristiques techniques pour la commercialisation des sacs en plastique destinés à l’enlèvement de marchandises et, d’autre part, de la réparation des dommages qui auraient été causés en raison de l’adoption de ce décret.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La directive 94/62

3        Les premier, deuxième, quatrième, septième et trente-troisième considérants de la directive 94/62 énoncent :

« considérant qu’il convient d’harmoniser les diverses mesures nationales relatives à la gestion des emballages et des déchets d’emballages de manière, d’une part, à éviter ou réduire leurs effets sur l’environnement, et assurer ainsi un niveau élevé de protection de l’environnement, et, d’autre part, à assurer le fonctionnement du marché intérieur et éviter les entraves aux échanges ainsi que les distorsions et restrictions de la concurrence à l’intérieur de la Communauté [européenne] ;

considérant que le meilleur moyen d’éviter la production de déchets d’emballages consiste à réduire le volume global d’emballages ;

[...]

considérant que la réduction du volume des déchets est une condition préalable à la croissance durable mentionnée expressément dans le traité sur l’Union européenne ;

[...]

considérant que, conformément à la stratégie communautaire pour la gestion des déchets fixée dans la résolution du Conseil du 7 mai 1990 sur la politique en matière de déchets [(JO 1990, C 122, p. 2)] et dans la directive 75/442/CEE du Conseil, du 15 juillet 1975, relative aux déchets [(JO 1975, L 194, p. 39)], la gestion des emballages et des déchets d’emballages devrait viser comme première priorité la prévention des déchets d’emballages et avoir pour principes fondamentaux supplémentaires, la réutilisation des emballages, le recyclage et les autres formes de valorisation des déchets d’emballages ainsi que, partant, la réduction de l’élimination définitive de ces déchets ;

[...]

considérant que, sans préjudice de la directive 83/189/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques [(JO 1983, L 109, p. 8)], les mesures envisagées par les États membres devraient être préalablement notifiées par ceux-ci à la Commission [européenne] afin qu’elle puisse vérifier leur conformité avec la présente directive. »

4        L’article 1er de la directive 94/62, intitulé « Objet », dispose :

« 1.      La présente directive a pour objet d’harmoniser les mesures nationales concernant la gestion des emballages et des déchets d’emballages afin, d’une part, de prévenir et de réduire leur incidence sur l’environnement des États membres et des pays tiers et d’assurer ainsi un niveau élevé de protection de l’environnement et, d’autre part, de garantir le fonctionnement du marché intérieur et de prévenir l’apparition d’entraves aux échanges et de distorsions et restrictions de concurrence dans la Communauté.

2.      À cet effet, la présente directive prévoit des mesures visant, comme première priorité, la prévention de déchets d’emballages et, comme autres principes fondamentaux, la réutilisation d’emballages, le recyclage et les autres formes de valorisation des déchets d’emballages et, partant, la réduction de l’élimination finale de ces déchets. »

5        L’article 2 de cette directive, intitulé « Champ d’application », énonce :

« 1.      La présente directive s’applique à tous les emballages mis sur le marché dans la Communauté et à tous les déchets d’emballages, qu’ils soient utilisés ou mis au rebut par les industries, les commerces, les bureaux, les ateliers, les services, les ménages ou à tout autre niveau, quels que soient les matériaux dont ils sont constitués.

[...] »

6        La directive (UE) 2015/720 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2015, modifiant la directive 94/62/CE en ce qui concerne la réduction de la consommation de sacs en plastique légers (JO 2015, L 115, p. 11), a introduit à l’article 3 de la directive 94/62, intitulé « Définitions », des points 1 ter et 1 quater, lesquels disposent :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

1 ter)            “sacs en plastique”, les sacs, avec ou sans poignées, composés de plastique, qui sont fournis aux consommateurs dans les points de vente de marchandises ou de produits ;

1 quater)      “sacs en plastique légers”, les sacs en plastique d’une épaisseur inférieure à 50 microns ».

7        La directive 2015/720 a également introduit à l’article 4 de la directive 94/62, intitulé « Prévention », des paragraphes 1 bis et 1 ter, lesquels disposent :

« 1 bis.      Les États membres prennent des mesures visant à réduire durablement la consommation de sacs en plastique légers sur leur territoire.

Ces mesures peuvent comprendre le recours à des objectifs nationaux de réduction, le maintien ou la mise en place d’instruments économiques, ainsi que des restrictions à la commercialisation par dérogation à l’article 18, à condition que ces restrictions aient un caractère proportionné et non discriminatoire.

Ces mesures peuvent varier en fonction des incidences sur l’environnement qu’ont les sacs en plastique légers lorsqu’ils sont valorisés ou éliminés, de leurs propriétés de compostage, de leur durabilité ou de la spécificité de leur utilisation prévue.

Les mesures prises par les États membres comprennent l’une ou l’autre des mesures suivantes, ou les deux :

a)      l’adoption de mesures garantissant que le niveau de la consommation annuelle ne dépasse pas 90 sacs en plastique légers par personne au 31 décembre 2019 et 40 sacs en plastique légers par personne au 31 décembre 2025, ou la fixation d’objectifs équivalents en poids. Les sacs en plastique très légers peuvent être exclus des objectifs de consommations nationaux ;

b)      l’adoption d’instruments garantissant que, au 31 décembre 2018, aucun sac en plastique léger n’est fourni gratuitement dans les points de vente de marchandises ou de produits, sauf si des instruments d’une efficacité égale sont mis en œuvre. Les sacs en plastique très légers peuvent être exclus du champ d’application de ces mesures.

[...]

1 ter.      Sans préjudice de l’article 15, les États membres peuvent adopter des mesures telles que des instruments économiques et des objectifs nationaux de réduction, pour tout type de sacs en plastique, quelle que soit leur épaisseur. »

8        L’article 9 de la directive 94/62, intitulé « Exigences essentielles », prévoit :

« 1.      Les États membres veillent à ce que, trois ans après l’entrée en vigueur de la présente directive, un emballage ne puisse être mis sur le marché que s’il répond à toutes les exigences essentielles définies par la présente directive, y compris à l’annexe II.

[...] »

9        L’article 16 de cette directive, intitulé « Notification », dispose :

« 1.      Sans préjudice de la directive 83/189/CEE, les États membres notifient à la Commission, avant leur adoption, les projets des mesures qu’ils prévoient d’adopter dans le cadre de la présente directive, à l’exception des mesures de nature fiscale, mais y compris les spécifications techniques liées à des mesures fiscales qui favorisent le respect de ces spécifications techniques, afin qu’elle puisse les examiner à la lumière des dispositions existantes en appliquant dans chaque cas la procédure prévue par ladite directive.

2.      Si la mesure envisagée concerne également une question d’ordre technique au sens de la directive 83/189/CEE, l’État membre concerné peut préciser que la notification effectuée au titre de la présente directive vaut également au titre de la directive 83/189/CEE. »

10      L’article 18 de la directive 94/62, intitulé « Liberté de mise sur le marché », énonce :

« Les États membres ne peuvent faire obstacle à la mise sur le marché, sur leur territoire, d’emballages conformes à la présente directive. »

11      L’annexe II de la directive 94/62, intitulée « Exigences essentielles portant sur la composition et le caractère réutilisable et valorisable (notamment recyclable) des emballages », énonce :

« 1.      Exigences portant sur la fabrication et la composition de l’emballage

–        L’emballage sera fabriqué de manière à limiter son volume et son poids au minimum nécessaire pour assurer le niveau requis de sécurité, d’hygiène et d’acceptabilité aussi bien pour le produit emballé que pour le consommateur.

–        L’emballage sera conçu, fabriqué et commercialisé de manière à permettre sa réutilisation ou sa valorisation, y compris son recyclage, et à réduire au minimum son incidence sur l’environnement lors de l’élimination des déchets d’emballages ou des résidus d’opérations de gestion des déchets d’emballages.

–        L’emballage sera fabriqué en veillant à réduire au minimum la teneur en substances et matières nuisibles et autres substances dangereuses du matériau d’emballage et de ses éléments, en ce qui concerne leur présence dans les émissions, les cendres ou le lixiviat qui résultent de l’incinération ou de la mise en décharge des emballages ou des résidus d’opérations de gestion des déchets d’emballages.

2.      Exigences portant sur le caractère réutilisable d’un emballage

L’emballage doit répondre simultanément aux exigences suivantes :

–        ses propriétés physiques et ses caractéristiques lui permettent de supporter plusieurs trajets ou rotations dans les conditions d’utilisation normalement prévisibles,

–        il est possible de traiter l’emballage utilisé pour satisfaire aux exigences en matière de santé et de sécurité des travailleurs,

–        les exigences propres à l’emballage valorisable au moment où l’emballage cesse d’être réutilisé, devenant ainsi un déchet, sont respectées.

3.      Exigences portant sur le caractère valorisable d’un emballage

a)      Emballage valorisable par recyclage de matériaux

L’emballage doit être fabriqué de manière à permettre qu’un certain pourcentage en poids des matériaux utilisés soit recyclé pour la production de biens commercialisables, dans le respect des normes en vigueur dans la Communauté. La fixation de ce pourcentage peut varier en fonction du type de matériau constituant l’emballage.

b)      Emballage valorisable par valorisation énergétique

Les déchets d’emballages traités en vue de leur valorisation énergétique auront une valeur calorifique minimale inférieure permettant d’optimiser la récupération d’énergie.

c)      Emballage valorisable par compostage

Les déchets d’emballages traités en vue du compostage doivent être suffisamment biodégradables pour ne pas faire obstacle à la collecte séparée ni au processus ou à l’activité de compostage dans lequel (laquelle) ils sont introduits.

d)      Emballage biodégradable

Les déchets d’emballages biodégradables doivent être de nature à pouvoir subir une décomposition physique, chimique, thermique ou biologique telle que la plus grande partie du compost obtenu se décompose finalement en dioxyde de carbone, en biomasse et en eau. »

 La directive 98/34

12      L’article 1er, point 12, de la directive 98/34, qui a été abrogée par la directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil, du 9 septembre 2015, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information (JO 2015, L 241, p. 1), mais demeure applicable ratione temporis au litige au principal, disposait :

« Au sens de la présente directive, on entend par :

[...]

12)      “projet de règle technique” : le texte d’une spécification technique, ou d’une autre exigence ou d’une règle relative aux services, y compris de dispositions administratives, qui est élaboré dans le but de l’établir ou de la faire finalement établir comme une règle technique et qui se trouve à un stade de préparation où il est encore possible d’y apporter des amendements substantiels. »

13      L’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34 disposait :

« Sous réserve de l’article 10, les États membres communiquent immédiatement à la Commission tout projet de règle technique, sauf s’il s’agit d’une simple transposition intégrale d’une norme internationale ou européenne, auquel cas une simple information quant à la norme concernée suffit. Ils adressent également à la Commission une notification concernant les raisons pour lesquelles l’établissement d’une telle règle technique est nécessaire, à moins que ces raisons ne ressortent déjà du projet.

[...] »

14      L’article 9, paragraphe 1, de cette directive énonçait :

« Les États membres reportent l’adoption d’un projet de règle technique de trois mois à compter de la date de la réception par la Commission de la communication prévue à l’article 8, paragraphe 1. »

 Le droit italien

15      L’article 1er, paragraphes 1129 et 1130, de la legge n. 296 – Disposizioni per la formazione del bilancio annuale e pluriennale dello Stato (loi no 296, portant dispositions relatives à la formation du bilan annuel et pluriannuel de l’État), du 27 décembre 2006 (GURI no 299, du 27 décembre 2006, supplément ordinaire no 244), prévoyait une interdiction de commercialisation des sacs en plastiques non biodégradables pour l’enlèvement des marchandises qui aurait dû être appliquée à compter du 1er janvier 2010. Toutefois, l’entrée en vigueur de cette interdiction a été reportée jusqu’à l’adoption du decreto-legge n. 2 – Misure straordinarie e urgenti in materia ambientale (décret-loi no 2, portant mesures exceptionnelles et urgentes en matière d’environnement), du 25 janvier 2012 (GURI no 20, du 25 janvier 2012) (ci-après le « décret-loi no 2/2012 »). L’article 2, paragraphe 1, de ce décret-loi prévoyait la prolongation du délai prévu à l’article 1er, paragraphe 1130, de la loi no 296, du 27 décembre 2006, pour l’entrée en vigueur de ladite interdiction jusqu’à l’adoption d’un décret par le ministère de l’Environnement et le ministère du Développement économique.

16      Le décret-loi no 2/2012 a été converti en loi, avec modifications, par la legge n. 28 – Conversione in legge, con modificazioni, del decreto-legge 25 gennaio 2012, n. 2, recante misure straordinarie e urgenti in materia ambientale (loi no 28 de conversion législative, portant modification du décret-loi no 2 du 25 janvier 2012, mesures d’exception et urgentes dans le domaine de l’environnement), du 24 mars 2012 (GURI no 71, du 24 mars 2012). L’article 2 de ce décret-loi énonçait alors :

« 1.      Le délai prévu à l’article 1er, paragraphe 1130, de la [loi no 296, du 27 décembre 2006], pour l’entrée en vigueur de l’interdiction de commercialisation des sacs d’enlèvement de marchandises est prorogé jusqu’à l’adoption du décret visé au paragraphe 2 uniquement pour la commercialisation des sacs d’enlèvement de marchandises à usage unique en polymères conformes à la norme harmonisée UNI EN 13432 :2002, en accord avec les certifications délivrées par les organismes accrédités, et de ceux, réutilisables, fabriqués avec d’autres polymères, comportant une poignée non comprise dans la taille utile du sac, et dont l’épaisseur est supérieure à 200 microns lorsqu’ils sont destinés à un usage alimentaire et à 100 microns pour ceux voués à d’autres usages, ainsi que de ceux, réutilisables, fabriqués avec d’autres polymères, comportant une poignée comprise dans la taille utile du sac, et dont l’épaisseur est supérieure à 100 microns lorsqu’ils sont destinés à un usage alimentaire et à 60 microns pour ceux voués à d’autres usages.

2.      Sans préjudice des dispositions du paragraphe 1, par décret non réglementaire pris par les [ministres de l’Environnement] et du Développement économique, après avis des commissions parlementaires compétentes, notifié conformément au droit de l’Union européenne, devant être adopté avant le 31 décembre 2012, conformément à la hiérarchie des mesures à adopter pour le traitement des déchets, [...] d’éventuelles caractéristiques techniques complémentaires peuvent être identifiées aux fins de leur commercialisation, notamment en prévoyant des formes de promotion de la reconversion d’installations existantes, ainsi que, en tout état de cause, les modalités d’information des consommateurs, sans charges nouvelles ou plus lourdes pour les finances publiques. »

17      L’article 1er du decreto ministeriale n. 73 – Individuazione delle caratteristiche tecniche dei sacchi per l’asporto delle merci (décret ministériel no 73, portant identification des caractéristiques techniques des sacs pour l’enlèvement des marchandises), du 18 mars 2013 (GURI no 73, du 27 mars 2013) (ci-après le « décret en cause au principal »), intitulé « Définitions », prévoyait :

« Aux fins du présent décret, on entend par :

a)      Sacs pour l’enlèvement des marchandises : sacs mis à disposition des consommateurs dans le point de vente, à titre onéreux ou gratuit, pour l’enlèvement des produits alimentaires et non alimentaires.

[...] »

18      L’article 2 du décret en cause au principal, intitulé « Mise sur le marché », énonçait :

« 1.      La mise sur le marché des sacs pour l’enlèvement des marchandises relevant de l’une des catégories indiquées ci‑après est autorisée :

a)      sacs à usage unique biodégradables et compostables conformes à la norme harmonisée UNI EN 13432 :2002 ;

b)      sacs réutilisables en polymères autres que ceux visés au point a) ayant une poignée externe de la taille utile du sac :

b.1)      sacs d’une épaisseur supérieure à 200 microns et contenant au moins 30 % de plastique recyclé, s’ils sont destinés à un usage alimentaire ;

b.2)      sacs d’une épaisseur supérieure à 100 microns et contenant au moins 10 % de plastique recyclé, s’ils ne sont pas destinés à un usage alimentaire ;

c)      sacs réutilisables en polymères autres que ceux visés au point a) ayant une poignée interne de la taille utile du sac :

c.1)      sacs d’une épaisseur supérieure à 100 microns et contenant au moins 30 % de plastique recyclé, s’ils sont destinés à un usage alimentaire ;

c.2)      sacs d’une épaisseur supérieure à 60 microns et contenant au moins 10 % de plastique recyclé, s’ils ne sont pas destinés à un usage alimentaire.

[...] »

19      L’article 6 de ce décret prévoyait :

« Le présent décret fait l’objet d’une procédure de communication conformément à la [directive 98/34] et entre en vigueur à la date à laquelle cette procédure connaît une issue favorable. »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

20      Papier Mettler Italia est une société exerçant son activité dans la distribution d’emballages et de conditionnements en papier et en matière synthétique. Elle a concentré son activité sur le développement et la production d’emballages en polyéthylène et, plus particulièrement, de sacs en plastique tels que des sacs à provisions.

21      Le ministère de l’Environnement et le ministère du Développement économique ont adopté, le 18 mars 2013, le décret en cause au principal qui interdit la fabrication et la commercialisation de sacs en plastique destinés à l’enlèvement des marchandises qui ne répondent pas à certaines exigences détaillées dans celui-ci. Plus particulièrement, l’article 2 de ce décret limitait la mise sur le marché, d’une part, aux sacs en plastique à usage unique biodégradables et compostables qui répondent à la norme UNI EN 13432 :2002 et, d’autre part, aux sacs en plastique réutilisables d’une épaisseur donnée qui varie selon la forme et la destination alimentaire de ces derniers.

22      Papier Mettler Italia a saisi le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional du Latium, Italie), qui est la juridiction de renvoi, d’un recours visant, d’une part, à l’annulation dudit décret et, d’autre part, à la condamnation de l’administration à réparer l’ensemble des dommages causés par l’adoption du même décret.

23      Au soutien de ce recours, Papier Mettler Italia allègue, en substance, que le décret en cause au principal est entaché d’illégalité pour plusieurs motifs. En premier lieu, les autorités italiennes auraient méconnu leur obligation de notifier le projet de décret à la Commission à trois titres. Premièrement, dès lors que ce décret comporterait des règles techniques, au sens de la directive 98/34, ces autorités auraient méconnu leur obligation de communication préalable du projet de règles techniques prévue à l’article 8, paragraphe 1, de cette directive. Deuxièmement, lesdites autorités auraient violé leur obligation de notifier préalablement à la Commission le projet de mesures qu’elles prévoyaient d’adopter en vertu de l’article 16 de la directive 94/62. Troisièmement, les mêmes autorités auraient également violé l’article 114, paragraphe 5, TFUE, dès lors qu’elles n’auraient pas notifié à la Commission les mesures qu’elles envisageaient d’adopter aux fins de la protection de l’environnement.

24      En deuxième lieu, Papier Mettler Italia fait valoir que le décret en cause au principal viole les articles 1er, 9 et 18 de la directive 94/62, tels que complétés à l’annexe II de celle-ci, dès lors que ce décret instaurerait une interdiction de mise sur le marché d’emballages qui seraient pourtant conformes à l’une des conditions de valorisation établies au point 3 de cette annexe. Papier Mettler Italia fait encore valoir que, à supposer que l’adoption dudit décret vise à préciser des règles prévues par le décret-loi no 2/2012, lequel violerait également les dispositions de cette directive, les autorités italiennes n’auraient pas appliqué directement le droit de l’Union en laissant inappliqué ce décret-loi.

25      En troisième et dernier lieu, Papier Mettler Italia soutient que, en ce que le décret en cause au principal exige que tous les sacs en plastique en vente en Italie doivent porter une mention obligatoire, en langue italienne, afin d’informer les consommateurs de leurs caractéristiques, ce décret constitue une entrave à la libre circulation de ces produits.

26      Tout d’abord, le ministère de l’Environnement et le ministère du Développement économique rétorquent que, afin de rompre l’habitude des consommateurs italiens d’utiliser des sacs en plastique jetables pour la collecte des déchets organiques, il est apparu nécessaire de promouvoir l’utilisation de sacs en plastique biodégradables et compostables, ainsi que celle des sacs réutilisables, au moyen de règles techniques prévues par le décret en cause au principal.

27      Ensuite, le projet de décret aurait été communiqué conformément aux exigences de la directive 94/62 et de la directive 98/34, dès lors que cette communication aurait eu lieu le 12 mars 2013, avant la publication de ce projet à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana le 27 mars suivant. L’article 6 du décret en cause au principal aurait subordonné l’entrée en vigueur de celui-ci à la condition que la procédure engagée auprès de la Commission au titre de la directive 98/34 ait une issue favorable.

28      En outre, les autorités italiennes soutiennent que le principe de proportionnalité est respecté dès lors que l’interdiction mise en place par la réglementation en cause au principal se caractériserait par sa sélectivité en ce qu’elle ne viserait que les sacs en plastique jetables qui présentent un danger pour l’environnement. Aussi, loin d’interdire la commercialisation de tout sac en plastique, le décret en cause au principal autoriserait la commercialisation de sacs en plastique à usage unique biodégradables et compostables conformes à la norme harmonisée UNI EN 13432 :2002, de sacs en plastique traditionnels d’une certaine épaisseur et donc réutilisables, ainsi que celle de sacs réutilisables pour l’enlèvement de marchandises en d’autres matières que le polymère telles que, par exemple, le papier, les tissus de fibres naturelles et les fibres de polyamide.

29      Enfin, les autorités italiennes soulignent que cette réglementation n’a fait qu’anticiper les mesures de protection de l’environnement adoptées postérieurement au niveau de l’Union européenne.

30      Dans ces conditions, le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional du Latium) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      L’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE, l’article 16, paragraphe 1, de la [directive 94/62] et l’article 8 de la [directive 98/34] s’opposent-ils à l’application d’une disposition nationale telle que celle prévue par le décret [en cause au principal], qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables mais respectant les autres exigences fixées par la [directive 94/62], lorsque cette disposition nationale contenant des règles techniques plus restrictives que le droit de l’Union n’a pas été notifiée préalablement par l’État membre à la Commission européenne, mais n’a été communiquée qu’après son adoption et avant sa publication ?

2)      Les articles 1er et 2, l’article 9, paragraphe 1, et l’article 18 de la [directive 94/62], complétés par les dispositions des points 1er[ à] 3 de l’annexe II de cette directive, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’adoption d’une réglementation nationale interdisant la commercialisation de sacs à emporter à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables mais en respectant les autres exigences prévues par ladite directive, ou bien les normes techniques supplémentaires prévues par cette réglementation nationale peuvent-elles être justifiées par l’objectif d’assurer un niveau plus élevé de protection de l’environnement, compte tenu, le cas échéant, de la nature particulière des problèmes de collecte des déchets dans l’État membre concerné et de la nécessité pour cet État membre de mettre également en œuvre les obligations communautaires en la matière ?

3)      Les articles 1er et 2, l’article 9, paragraphe 1, et l’article 18 de la [directive 94/62], complétés par les dispositions des points 1er[ à] 3 de l’annexe II de cette directive, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils constituent une règle claire et précise qui interdit toute entrave à la commercialisation des sacs conformes aux exigences prévues par ladite directive et qui oblige tous les organes de l’État, y compris les autorités publiques, à laisser inappliquée toute réglementation nationale qui serait contraire à cette règle ?

4)      Enfin, l’adoption d’une réglementation nationale interdisant la commercialisation de sacs à poignées jetables qui ne sont pas biodégradables mais qui ont été fabriqués conformément aux exigences prévues par la [directive 94/62], lorsqu’elle n’est pas justifiée par l’objectif d’assurer un niveau plus élevé de protection de l’environnement, par la nature particulière des problèmes de collecte des déchets dans l’État membre concerné et par la nécessité pour l’État lui-même de mettre également en œuvre les obligations communautaires prévues à cet égard, peut-elle constituer une violation grave et manifeste de l’article 18 de la [directive 94/62] ? »

 Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

31      L’Associazione Italiana delle Bioplastiche e dei Materiali Biodegradabili e Compostabili – Assobioplastiche (Association italienne des bioplastiques et des matériaux biodégradables et compostables – Assobioplastiche, ci-après l’« AIB ») et le gouvernement italien soutiennent, en substance, que la demande de décision préjudicielle est irrecevable au motif que, la procédure de notification n’ayant pas abouti, le décret en cause au principal ne serait jamais entré en vigueur ou, du moins, aurait été abrogé par la suite.

32      L’AIB soulève un autre motif d’irrecevabilité de la demande de décision préjudicielle, tiré de ce que la juridiction de renvoi aurait méconnu le paragraphe 1 bis introduit à l’article 4 de la directive 94/62, en ce qu’il prévoit des dispositions spécifiques sur les sacs en plastique.

33      Aucun de ces motifs ne sauraient être retenus.

34      En effet, il convient de rappeler qu’il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation d’une règle de droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (arrêt du 6 octobre 2021, Sumal, C‑882/19, EU:C:2021:800, point 27 et jurisprudence citée).

35      Il s’ensuit que les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation d’une règle de l’Union sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (arrêt du 6 octobre 2021, Sumal, C‑882/19, EU:C:2021:800, point 28 et jurisprudence citée).

36      Or, tel n’est pas le cas en l’occurrence. Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, la solution du litige au principal dépend des réponses que la Cour est appelée à donner aux quatre questions posées dans la mesure où ces réponses permettront à la juridiction de renvoi de statuer sur le recours en responsabilité introduit par Papier Mettler Italia, laquelle fait valoir un manque à gagner causé par la cessation de la vente des sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées par la directive 94/62 à la suite de l’entrée en vigueur de l’interdiction prévue dans le décret en cause au principal.

37      À cet égard, il convient de rappeler qu’il incombe à la Cour de prendre en compte, dans le cadre de la répartition des compétences entre cette dernière et les juridictions nationales, le contexte factuel et réglementaire dans lequel s’insèrent les questions préjudicielles, tel que défini par la décision de renvoi, de sorte que l’examen d’un renvoi préjudiciel ne saurait être effectué au regard de l’appréciation du droit national défendue par le gouvernement d’un État membre ou par une partie au litige au principal [voir, en ce sens, arrêt du 15 avril 2021, État belge (Éléments postérieurs à la décision de transfert), C‑194/19, EU:C:2021:270, point 26 et jurisprudence citée].

38      Dans ces circonstances, il ne saurait être soutenu que l’interprétation sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal ni que le problème soulevé par la juridiction de renvoi est de nature hypothétique. Au demeurant, la Cour dispose des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées.

39      Par ailleurs, l’argumentation de l’AIB, tirée de la méconnaissance du paragraphe 1 bis introduit à l’article 4 de la directive 94/62, ne peut qu’être écartée dès lors que ce paragraphe n’est pas applicable ratione temporis aux faits en cause au principal. En effet, ledit paragraphe a été inséré dans cette directive par la directive 2015/720 et, par conséquent, postérieurement à ces faits.

40      Il s’ensuit que la demande de décision préjudicielle est recevable.

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la première question

41      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 8 et 9 de la directive 98/34 ainsi que l’article 16 de la directive 94/62 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’adoption d’une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées par la directive 94/62 lorsque cette réglementation a été communiquée à la Commission quelques jours seulement avant son adoption et sa publication.

42      À titre liminaire, il y a lieu de relever qu’il n’est pas contesté, en l’occurrence, que l’article 2 du décret en cause au principal, interdisant la fabrication et la commercialisation de sacs en plastique destinés à l’enlèvement des marchandises qui ne répondent pas à certaines exigences détaillées dans celui-ci, ainsi que cela est rappelé au point 21 du présent arrêt, constitue une « règle technique », au sens de l’article 1er de la directive 98/34.

43      Cette précision liminaire étant faite, il y a lieu de rappeler, en premier lieu, qu’il est de jurisprudence constante que la directive 98/34 vise, par un contrôle préventif, à protéger la libre circulation des marchandises, qui est l’un des fondements de l’Union, et que ce contrôle est utile dans la mesure où des règles techniques relevant de cette directive peuvent constituer des entraves aux échanges des marchandises entre les États membres, ces entraves ne pouvant être admises que si elles sont nécessaires pour satisfaire à des exigences impératives poursuivant un but d’intérêt général (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 1996, CIA Security International, C‑194/94, EU:C:1996:172, points 40 et 48 ; du 8 septembre 2005, Lidl Italia, C‑303/04, EU:C:2005:528, point 22, ainsi que du 9 juin 2011, Intercommunale Intermosane et Fédération de l’industrie et du gaz, C‑361/10, EU:C:2011:382, point 10).

44      Il ressort également de la jurisprudence constante de la Cour qu’une règle technique ne peut être appliquée lorsqu’elle n’a pas été notifiée conformément à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34, ou lorsque, quand bien même elle a été notifiée, elle a été approuvée et exécutée avant l’expiration de la période de suspension de trois mois prévue à l’article 9, paragraphe 1, de cette directive (arrêt du 16 juillet 2015, UNIC et Uni.co.pel, C‑95/14, EU:C:2015:492, point 29 ainsi que jurisprudence citée).

45      À cet égard, en ce qui concerne, premièrement, l’obligation de notification préalable prévue à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34, il convient de relever que, conformément à cette disposition, les États membres notifient à la Commission tout « projet de règle technique », lequel est défini à l’article 1er, point 12, de cette directive comme étant une règle « qui se trouve à un stade de préparation où il est encore possible d’y apporter des amendements substantiels ».

46      Or, il ressort de la décision de renvoi que le décret en cause au principal a été, tout d’abord, notifié à la Commission le 12 mars 2013 en application de l’article 8 de la directive 98/34. Ce décret a été ensuite adopté le 18 mars suivant et il a été, enfin, publié à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana le 27 mars 2013.

47      Il s’ensuit que cette notification ne saurait être considérée comme ayant porté sur un « projet de règle technique », au sens de l’article 1er, point 12, de cette directive, dès lors que cette notification portait, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 45 de ses conclusions, non pas sur un « projet de règle technique », au sens de cette disposition, mais sur une version finale de celle-ci, qui se trouvait à un stade de préparation où il n’était alors pas possible d’apporter d’amendements substantiels ni de tenir compte des observations et des avis circonstanciés émis par les États membres postérieurement à cette notification.

48      Deuxièmement, il y a lieu de relever que l’adoption du décret en cause au principal dans un délai de six jours à compter de la notification de celui-ci à la Commission sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, de ladite directive viole également l’obligation prévue à l’article 9, paragraphe 1, de celle-ci, aux termes duquel les États membres reportent l’adoption d’un « projet de règle technique » de trois mois à compter de la date de réception par la Commission de la communication prévue à l’article 8, paragraphe 1, de la même directive.

49      À cet égard, les deux motifs invoqués par le gouvernement italien pour justifier l’adoption du décret en cause au principal dans de telles circonstances ne sauraient convaincre.

50      D’une part, en ce que ce gouvernement soutient que l’interdiction de commercialisation visée par le décret en cause au principal se limitait à reproduire un dispositif législatif qui avait déjà été notifié à la Commission, le 5 avril 2011, en tant que « projet de loi relatif à l’interdiction de commercialisation des sacs non biodégradables pour l’enlèvement de marchandises », il convient de relever, à l’instar de M. l’avocat général aux points 49 et 50 de ses conclusions, que la notification du projet concerné ne saurait être analysée comme étant une simple réitération de celle effectuée en 2011. En effet, le décret en cause au principal comporte des spécifications techniques plus rigoureuses que celles figurant dans l’acte notifié le 5 avril 2011, de telle sorte que ce décret devait être notifié à la Commission en vertu de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34.

51      D’autre part, ledit gouvernement soutient que l’entrée en vigueur du décret en cause au principal aurait été conditionnée, en vertu de l’article 6 de celui-ci, à l’« issue favorable » de la procédure de notification engagée le 12 mars 2013 sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34. Or, cette procédure n’aurait pas connu une telle issue dès lors que la Commission n’aurait pas émis d’avis quant à ce décret. Cette argumentation ne peut qu’être écartée dès lors que, premièrement, l’adoption et la publication dudit décret sont susceptibles en tant que telles d’avoir certains effets sur la libre circulation des produits concernés, deuxièmement, elles n’ont pas permis de prendre en considération les observations et les avis circonstanciés émis par le Royaume des Pays-Bas, le Royaume de Suède et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et, troisièmement, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 52 de ses conclusions, elles constituent une technique législative qui méconnaît le principe de sécurité juridique.

52      Il découle des considérations qui précèdent que la notification à la Commission du décret en cause au principal quelques jours seulement avant l’adoption et la publication de celui-ci méconnaît l’article 8, paragraphe 1, et l’article 9 de la directive 98/34.

53      En second lieu, il y a lieu de déterminer si la méconnaissance par un État membre de son obligation de notification préalable des projets de mesures qu’il prévoit d’adopter dans le cadre de la directive 94/62, au titre de l’article 16, paragraphe 1, de cette dernière, entraîne l’inapplicabilité et, partant, l’inopposabilité à des particuliers de la réglementation concernée, à l’instar des conséquences, rappelées au point 44 du présent arrêt, découlant de la méconnaissance par un État membre de son obligation de notification préalable des règles techniques, prévue à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34.

54      À cet égard, il importe de constater que l’article 16, paragraphe 1, de la directive 94/62 se limite, en substance, à imposer aux États membres l’obligation de notifier à la Commission, avant leur adoption, les projets des mesures qu’ils prévoient d’adopter dans le cadre de cette directive, afin que cette institution puisse les examiner à la lumière des dispositions existantes. L’article 16, paragraphe 2, de ladite directive prévoit que, si la mesure envisagée concerne également une question d’ordre technique, au sens de la directive 98/34, l’État membre concerné peut préciser que la notification effectuée au titre de la directive 94/62 vaut également au titre de la directive 98/34.

55      Il résulte du libellé de l’article 16 de la directive 94/62 que celui-ci ne fixe pas de procédure de contrôle de l’Union de ces projets et ne subordonne pas l’entrée en vigueur desdits projets à l’accord ou à l’absence d’opposition de la Commission.

56      L’objectif poursuivi par cette directive consiste, ainsi que cela ressort du considérant 1 de celle-ci, à harmoniser les diverses mesures nationales relatives à la gestion des emballages et des déchets d’emballages de manière, d’une part, à éviter ou à réduire leurs effets sur l’environnement, et à assurer ainsi un niveau élevé de protection de l’environnement, et, d’autre part, à assurer le fonctionnement du marché intérieur et à éviter les entraves aux échanges ainsi que les distorsions et les restrictions de concurrence. L’objectif plus spécifique poursuivi à l’article 16 de ladite directive vise, ainsi que cela ressort du considérant 33 de celle-ci, à permettre à la Commission de vérifier la conformité des mesures envisagées à la même directive.

57      L’obligation imposée aux États membres à l’article 16, paragraphe 1, de la directive 94/62 vise ainsi à permettre à la Commission d’être informée des mesures nationales envisagées dans le domaine des emballages et des déchets d’emballages, afin de pouvoir évaluer si les projets de mesures qui lui sont soumis sont ou non compatibles avec le droit de l’Union et, d’en tirer, le cas échéant, les conséquences juridiques appropriées.

58      Il s’ensuit que ni le libellé ni le but de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 94/62 ne permettent de considérer que le non-respect de l’obligation de notification préalable qui incombe aux États membres produit les mêmes effets rappelés au point 44 du présent arrêt que la méconnaissance de l’obligation de notification préalable prévue à l’article 8 de la directive 98/34.

59      Ainsi que le soutient la Commission dans ses observations, la circonstance que l’article 16 de la directive 94/62 fasse référence à la directive 83/189, qui a été remplacée par la directive 98/34, ne saurait être interprétée en ce sens qu’une méconnaissance de cette disposition produit les mêmes effets qu’une méconnaissance de l’article 8 de la directive 98/34. En effet, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 64 de ses conclusions, cette référence croisée vise simplement à éviter qu’un même projet de mesures soit communiqué à de multiples reprises à la Commission au titre de différentes obligations de notification.

60      Il en découle que l’obligation de notification préalable instaurée à l’article 16 de la directive 94/62 constitue une simple obligation d’information des États membres à l’égard de la Commission dont la méconnaissance n’est pas susceptible de constituer un vice substantiel de nature à entraîner l’inapplicabilité des mesures envisagées par les États membres de telle sorte qu’elles ne peuvent être opposées aux particuliers. Partant, cet article ne saurait être invoqué devant une juridiction nationale pour obtenir l’annulation de règles non notifiées ou l’absence d’opposabilité de celles-ci.

61      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que les articles 8 et 9 de la directive 98/34 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’adoption d’une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées dans la directive 94/62 lorsque cette réglementation a été communiquée à la Commission quelques jours seulement avant son adoption et sa publication.

 Sur la deuxième question

62      Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9 et l’annexe II de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées dans cette directive et, le cas échéant, si cette réglementation peut être justifiée par l’objectif d’assurer un niveau plus élevé de protection de l’environnement.

63      En premier lieu, il convient de relever que l’article 18 de la directive 94/62, intitulé « Liberté de mise sur le marché », prévoit que les États membres ne peuvent faire obstacle à la mise sur le marché sur leur territoire d’emballages conformes à cette directive.

64      L’article 9, paragraphe 1, de la directive 94/62 énonce qu’un emballage ne peut être mis sur le marché que s’il répond à toutes les exigences essentielles définies dans cette directive, y compris à l’annexe II de celle-ci. Cette annexe mentionne les exigences essentielles portant sur la composition ainsi que sur le caractère réutilisable et valorisable des emballages concernés. Plus précisément, elle énumère, à son point 3, les exigences spécifiques auxquelles doivent satisfaire les emballages valorisables par recyclage des matériaux, par valorisation énergétique ou par compostage ainsi que les emballages biodégradables.

65      Or, la Cour a jugé que les exigences concernant la composition et le caractère réutilisable ou compostable, régies par les articles 8 à 11 et l’annexe II de ladite directive, ont fait l’objet d’une harmonisation complète (voir, en ce sens, arrêts du 14 décembre 2004, Radlberger Getränkegesellschaft et S. Spitz, C‑309/02, EU:C:2004:799, point 56, ainsi que du 14 décembre 2004, Commission/Allemagne, C‑463/01, EU:C:2004:797, point 44).

66      Conformément à une jurisprudence constante, lorsqu’un domaine a fait l’objet d’une harmonisation complète au niveau de l’Union, les États membres sont liés et ne peuvent maintenir des dispositions nationales contraires ni subordonner la circulation des produits visés à des conditions supplémentaires (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2003, ATRAL, C‑14/02, EU:C:2003:265, point 44, et du 12 avril 2018, Fédération des entreprises de la beauté, C‑13/17, EU:C:2018:246, point 23).

67      En outre, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 72 de ses conclusions, lorsqu’elles procèdent à une harmonisation exhaustive, les institutions de l’Union procèdent à la mise en balance nécessaire entre l’objectif de libre circulation du produit concerné et la protection d’autres intérêts généraux et particuliers, de telle sorte que le résultat de cette mise en balance ne peut être remis en cause par les autorités nationales.

68      En l’occurrence, il ressort de l’article 2 du décret en cause au principal que celui-ci n’autorise la commercialisation que des sacs en plastique biodégradables et compostables qui sont conformes à la norme harmonisée UNI EN 13432 :2002 et de ceux répondant aux caractéristiques de forme et d’épaisseur rappelées au point 18 du présent arrêt, à l’exclusion de tous les autres sacs, y compris ceux qui répondent aux autres exigences de valorisation prévues au point 3 de l’annexe II de la directive 94/62.

69      Il en découle que l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9 et l’annexe II de celle-ci, s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal.

70      En deuxième lieu, il convient d’ajouter que, si le gouvernement italien avait entendu adopter des dispositions plus strictes pour la mise sur le marché des sacs en plastique pour des raisons environnementales, il n’aurait pu le faire que conformément à l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE.

71      L’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE autorise l’État membre qui l’estime nécessaire, après l’adoption d’une mesure d’harmonisation, à introduire des dispositions nationales fondées sur des preuves scientifiques nouvelles relatives à la protection de l’environnement qui surgissent après l’adoption de cette mesure, à la condition qu’il notifie à la Commission les mesures envisagées ainsi que les raisons de leur adoption.

72      Or, il ne ressort ni de la décision de renvoi ni des observations déposées devant la Cour d’élément susceptible d’étayer le fait que le gouvernement italien a notifié à la Commission, sur le fondement de cette disposition, son intention d’introduire une mesure dérogatoire.

73      En troisième et dernier lieu, quant à l’argumentation du gouvernement italien et de l’AIB, tirée de l’introduction d’un paragraphe 1 bis à l’article 4 de la directive 94/62 par la directive 2015/720, il suffit de constater, ainsi qu’il est relevé au point 39 du présent arrêt, que ce paragraphe n’est pas applicable ratione temporis au litige au principal.

74      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la deuxième question que l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9 et l’annexe II de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées dans cette directive. Cette réglementation peut toutefois être justifiée par l’objectif d’assurer un niveau plus élevé de protection de l’environnement, lorsque les conditions prévues à l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE sont satisfaites.

 Sur la troisième question

75      Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci, est d’effet direct, de telle sorte que cette juridiction doit laisser inappliquée une réglementation nationale qui est contraire à cet article 18.

76      À cet égard, conformément à une jurisprudence constante, pour être reconnue comme étant d’effet direct, une disposition d’une directive doit apparaître comme étant, du point de vue de son contenu, inconditionnelle et suffisamment précise. Une disposition est inconditionnelle lorsqu’elle énonce une obligation qui n’est assortie d’aucune condition ni subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l’intervention d’aucun acte soit des institutions de l’Union, soit des États membres. Une disposition est considérée comme étant suffisamment précise pour être invoquée par un justiciable et appliquée par le juge lorsqu’elle énonce une obligation en des termes non équivoques [voir, en ce sens, arrêt du 8 mars 2022, Bezirkshauptmannschaft Hartberg-Fürstenfeld (Effet direct), C‑205/20, EU:C:2022:168, points 17 et 18].

77      Même si une directive laisse aux États membres une certaine marge d’appréciation lorsqu’ils adoptent les modalités de sa mise en œuvre, une disposition de cette directive peut être considérée comme ayant un caractère inconditionnel et précis lorsqu’elle met à la charge des États membres, en des termes non équivoques, une obligation de résultat précise et qui n’est assortie d’aucune condition quant à l’application de la règle qu’elle énonce [arrêt du 8 mars 2022, Bezirkshauptmannschaft Hartberg-Fürstenfeld (Effet direct), C‑205/20, EU:C:2022:168, point 19].

78      En l’occurrence, l’article 18 de la directive 94/62 prévoit que les États membres ne peuvent faire obstacle à la mise sur le marché, sur leur territoire, d’emballages conformes à cette directive.

79      Il ressort donc, d’une part, du libellé de cet article qu’il instaure, en des termes non équivoques, une obligation de ne pas faire, de telle sorte qu’il constitue une « disposition suffisamment précise », au sens de la jurisprudence citée aux points 76 et 77 du présent arrêt. Par conséquent, les États membres doivent s’abstenir d’adopter toute mesure restreignant la commercialisation d’emballages conformes aux dispositions de ladite directive.

80      D’autre part, ledit article présente un « caractère inconditionnel », au sens de cette jurisprudence, dès lors que l’interdiction qu’il énonce ne nécessite l’intervention d’aucun acte des institutions de l’Union et qu’elle ne confère pas aux États membres la faculté d’assortir de conditions ou de restreindre la portée de cette interdiction.

81      Certes, il ressort du même article que les emballages concernés doivent être conformes à la même directive, c’est-à-dire que ceux-ci doivent être conformes aux exigences essentielles posées à l’article 9, paragraphe 1, de cette dernière qui renvoie à l’annexe II de celle-ci.

82      Toutefois, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 89 de ses conclusions, le bénéfice de la libre commercialisation des emballages conformément à la directive 94/62 revêtait un caractère inconditionnel jusqu’à l’entrée en vigueur du paragraphe 1 bis introduit à l’article 4 de la directive 94/62 par la directive 2015/720, lequel a autorisé les États membres à introduire des mesures plus restrictives pour la commercialisation des sacs en plastique légers. Ainsi qu’il est relevé au point 39 du présent arrêt, cette dernière disposition n’est cependant pas applicable ratione temporis aux faits en cause au principal.

83      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la troisième question que l’article 18 de la directive 94/62, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu’il est d’effet direct, de telle sorte qu’une juridiction nationale doit, dans un litige opposant un particulier à des autorités nationales, laisser inappliquée une réglementation nationale qui est contraire à cet article 18.

 Sur la quatrième question

84      Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 18 de la directive 94/62 doit être interprété en ce sens que l’adoption d’une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées dans cette directive est susceptible de constituer une violation suffisamment caractérisée de cet article 18.

85      S’agissant de la responsabilité des États membres en cas de violation du droit de l’Union, il est de jurisprudence constante que le droit à réparation d’un particulier présuppose, notamment, que la violation de la règle du droit de l’Union concernée soit suffisamment caractérisée [voir, en ce sens, arrêt du 22 décembre 2022, Ministre de la Transition écologique et Premier ministre (Responsabilité de l’État pour la pollution de l’air), C‑61/21, EU:C:2022:1015, point 44].

86      À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante qu’une violation suffisamment caractérisée implique une méconnaissance manifeste et grave par l’État membre des limites qui s’imposent à son pouvoir d’appréciation (arrêt du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame, C‑46/93 et C‑48/93, EU:C:1996:79, point 55).

87      Les éléments à prendre en considération dans ce contexte sont, notamment, le degré de clarté et de précision de la règle violée, l’étendue de la marge d’appréciation que la règle enfreinte laisse aux autorités nationales concernées, le caractère excusable ou inexcusable d’une éventuelle erreur de droit, le caractère intentionnel ou involontaire du manquement commis ou du préjudice causé, ou encore la circonstance que les attitudes prises par une institution de l’Union ont pu contribuer à l’omission, à l’adoption ou au maintien de mesures ou de pratiques nationales contraires au droit de l’Union (arrêts du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame, C‑46/93 et C‑48/93, EU:C:1996:79, point 56, et du 4 octobre 2018, Kantarev, C‑571/16, EU:C:2018:807, point 105).

88      Par ailleurs, dans l’hypothèse où l’État membre n’est pas confronté à des choix normatifs et dispose d’une marge d’appréciation considérablement réduite, voire inexistante, la simple infraction au droit de l’Union peut suffire à établir l’existence d’une violation suffisamment caractérisée (arrêt du 16 octobre 2008, Synthon, C‑452/06, EU:C:2008:565, point 38).

89      À cet égard, il suffit de constater que, ainsi qu’il est rappelé au point 79 du présent arrêt, l’article 18 de la directive 94/62 instaure, en des termes non équivoques, une obligation de ne pas faire, de telle sorte qu’il constitue une « disposition suffisamment précise », au sens de la jurisprudence citée aux points 76 et 77 du présent arrêt, et que par conséquent, les États membres doivent s’abstenir d’adopter toute mesure restreignant la commercialisation d’emballages conformes aux règles de cette directive. Il s’ensuit que, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 98 de ses conclusions, cet article, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de ladite directive, ne laissait aucune marge d’appréciation aux autorités italiennes pour interdire, sur leur territoire, les emballages conformes aux règles de la même directive.

90      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la quatrième question que l’article 18 de la directive 94/62 doit être interprété en ce sens qu’une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées dans cette directive est susceptible de constituer une violation suffisamment caractérisée de cet article 18.

 Sur les dépens

91      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :

1)      Les articles 8 et 9 de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information, telle que modifiée par le règlement (UE) no 1025/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012,

doivent être interprétés en ce sens que :

ils s’opposent à l’adoption d’une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées dans la directive 94/62/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 1994, relative aux emballages et aux déchets d’emballages, telle que modifiée par la directive 2013/2/UE de la Commission, du 7 février 2013, lorsque cette réglementation a été communiquée à la Commission européenne quelques jours seulement avant son adoption et sa publication.

2)      L’article 18 de la directive 94/62, telle que modifiée par la directive 2013/2, lu en combinaison avec l’article 9 et l’annexe II de la directive 94/62, telle que modifiée,

doit être interprété en ce sens que :

il s’oppose à une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées dans la directive 94/62, telle que modifiée. Cette réglementation peut toutefois être justifiée par l’objectif d’assurer un niveau plus élevé de protection de l’environnement, lorsque les conditions prévues à l’article 114, paragraphes 5 et 6, TFUE sont satisfaites.

3)      L’article 18 de la directive 94/62, telle que modifiée par la directive 2013/2, lu en combinaison avec l’article 9, paragraphe 1, et l’annexe II de la directive 94/62, telle que modifiée,

doit être interprété en ce sens que :

il est d’effet direct, de telle sorte qu’une juridiction nationale doit, dans un litige opposant un particulier à des autorités nationales, laisser inappliquée une réglementation nationale qui est contraire à cet article 18.

4)      L’article 18 de la directive 94/62, telle que modifiée par la directive 2013/2,

doit être interprété en ce sens que :

une réglementation nationale qui interdit la commercialisation de sacs à usage unique fabriqués à partir de matériaux non biodégradables et non compostables mais respectant les autres exigences fixées dans la directive 94/62, telle que modifiée, est susceptible de constituer une violation suffisamment caractérisée de cet article 18.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.

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