Granini France v EUIPO - Pichler (Joro) (EU trade mark- Judgment) French Text [2023] EUECJ T-68/22 (24 May 2023)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2023/T6822.html
Cite as: EU:T:2023:287, [2023] EUECJ T-68/22, ECLI:EU:T:2023:287

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

24 mai 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Joro – Marque nationale verbale antérieure JOKO – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des produits – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑68/22,

Granini France, établie à Mâcon (France), représentée par Me J. Wachsmuth, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. T. Klee et D. Gája, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Josef Pichler, demeurant à San Leonardo in Passiria (Italie),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, MM. E. Buttigieg (rapporteur) et I. Dimitrakopoulos, juges,

greffier : M. T. Henze, greffier faisant fonction,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Granini France, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 8 novembre 2021 (affaire R 2336/2020-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 11 octobre 2019, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, M. Josef Pichler, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal Joro.

3        La marque demandée désignait les produits relevant des classes 32 et 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié. Les produits pertinents aux fins du présent recours relèvent de la classe 33 et correspondent, notamment, à la description suivante : « Apéritifs à base de liqueurs distillées ; apéritifs à base de liqueurs ; liqueur de ginseng ; alcools forts japonais aromatisés aux extraits de prunes d’Asie ; liqueur de ginseng rouge ; liqueur d’orge décortiqué ; liqueur tonique aromatisée aux extraits de prunes japonaises [umeshu] ; mélanges alcoolisés pour cocktails ; cocktails alcoolisés contenant du lait ; cocktails alcoolisés sous forme de gélatines réfrigérées ; cocktails de fruits alcoolisés ; boissons alcoolisées contenant des fruits ; boissons alcoolisées à base de thé ; boissons alcoolisées prémélangées autres qu’à base de bière ; boissons alcooliques prémélangées ; apéritifs à base de vin ; vins de raisins japonais sucrés aux extraits de ginseng et écorces de quinquina ; vin de framboises noires [bokbunjaju] ; boissons alcoolisées de fruits ; boisson à base de vin et de jus de fruits ; extraits de fruits avec alcool ».

4        Le 12 décembre 2019, la requérante, Granini France, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour, en substance, les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur la marque française verbale antérieure JOKO visant les produits relevant de la classe 32 et correspondant à la description suivante : « Jus de fruits et jus de légumes (boissons), boissons à base de fruits et boissons à base de légumes, cocktails de fruits et cocktails de légumes (boissons), boissons à base d’extraits de fruits et boissons à base d’extraits de légumes, nectars et autres boissons non alcoolisées à base de fruits ou de légumes ; limonades, sodas ; sirops et autres préparations pour la préparation de boissons ; boissons sans alcool ».

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 19 novembre 2020, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. En revanche, ladite division a rejeté l’opposition fondée sur ce même article à l’égard, en substance, des diverses boissons alcooliques relevant de la classe 33 désignées par la marque demandée (voir point 3 ci-dessus) en considérant qu’elles n’étaient pas similaires aux diverses boissons non alcooliques relevant de la classe 32 couvertes par la marque antérieure (voir point 5 ci-dessus).

8        Le 8 décembre 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que les produits visés respectivement par la marque antérieure et la marque demandée n’étaient pas similaires, de sorte que l’existence d’un risque de confusion au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 était exclue.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        réformer la décision attaquée, en ce sens que l’opposition soit accueillie s’agissant des produits visés au point 3 ci-dessus ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée pour autant qu’elle a rejeté l’opposition s’agissant des produits visés au point 3 ci-dessus ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      À l’appui de son recours, la requérante présente un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

13      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

14      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

15      Plus particulièrement, pour apprécier la similitude entre les produits visés par les marques en conflit, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

16      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a conclu à l’absence de similitude des produits en cause. Plus particulièrement, aux points 27, 28 et 30 de la décision attaquée, lors de l’appréciation de la similitude de ces produits eu égard à leur nature, à leur destination, à leur utilisation et à leur caractère concurrent, la chambre de recours a procédé à la comparaison de ceux-ci en se fondant sur des caractéristiques inhérentes, d’une part, à l’« eau », et aux « eaux minérales » et, d’autre part, à la catégorie générale des boissons alcooliques. Elle a considéré que les conclusions tirées de la comparaison de ces dernières boissons s’appliquaient aux produits en cause. Elle a conclu que les produits visés par les marques en conflit n’étaient pas similaires quant à aucun des facteurs d’appréciation de similitude susmentionnés.

17      Aux points 29 et 31 de la décision attaquée, lors de l’appréciation de la similitude des produits en cause, eu égard à leur caractère complémentaire et à leurs canaux de distribution, la chambre de recours a procédé à cette appréciation sur le fondement des considérations tirées de la comparaison des catégories générales des boissons alcooliques, d’une part, et des boissons non alcooliques, d’autre part. Plus généralement, au point 34 de ladite décision, elle a estimé que les consommateurs procéderont à la distinction entre les boissons alcooliques désignées par la marque demandée et les boissons non alcooliques visées par la marque antérieure en raison de la présence ou de l’absence d’alcool dans leur composition, de sorte que ces consommateurs ne s’attendaient pas à ce que lesdites boissons aient la même origine commerciale.

18      La requérante soutient que la chambre de recours a considéré, à tort, que les produits visés par les marques en conflit n’étaient pas similaires. Elle estime que, lors de l’appréciation de la similitude de ces produits, ladite chambre a appliqué un critère trop strict et, en particulier, a erronément transposé en l’espèce les considérations relatives à la comparaison, en substance, de l’« eau » et des « eaux minérales », d’une part, avec des diverses boissons alcooliques, d’autre part, sans tenir compte du fait que ces boissons étaient différentes des produits visés par les marques en conflit. Elle fait valoir que les produits désignés par la marque demandée ont tous leur équivalent non alcoolique visé par la marque antérieure. Selon la requérante, la chambre de recours a opéré une distinction catégorique entre les produits en cause en fonction de la présence ou de l’absence d’alcool dans leur composition, sans tenir compte d’autres caractéristiques communes, notamment, de la coïncidence de leurs ingrédients et de leur processus de fabrication similaire. Ainsi, les produits en cause seraient similaires quant à leur nature, leur destination, leur utilisation, leurs producteurs et leurs canaux de distribution. Elle estime également que ces produits sont concurrents.

19      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante. Ainsi qu’il résulte de l’ensemble des écritures de l’EUIPO devant le Tribunal, tout en admettant que la présence ou l’absence d’alcool dans les boissons en cause ne saurait être déterminante pour l’appréciation de leur similitude, il fait toutefois valoir, en substance, que la requérante n’a pas démontré que les équivalents sans alcool des boissons alcooliques désignées par la marque demandée existaient sur le marché à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de cette marque. Il estime que, en tout état de cause, les produits en cause ne sont similaires quant à aucun des facteurs d’appréciation de similitude.

20      À titre liminaire, il convient de rappeler que la comparaison des produits en cause doit être fondée sur la liste des produits visés par les marques en conflit [voir arrêt du 6 avril 2022, Moio/EUIPO – Paul Hartmann (moio.care), T‑276/21, non publié, EU:T:2022:221, point 42 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 juin 2010, Kureha/OHMI – Sanofi-Aventis (KREMEZIN), T‑487/08, non publié, EU:T:2010:237, point 71] et que cette liste doit être interprétée en tenant compte du sens littéral de l’indication ou du terme en cause (voir, en ce sens, arrêt du 11 octobre 2017, EUIPO/Cactus, C‑501/15 P, EU:C:2017:750, point 42).

21      Cela étant précisé, il convient d’observer que, en ce qui concerne la marque antérieure, d’une part, la liste des produits pour laquelle cette marque est protégée ne vise pas la seule catégorie générale des boissons non alcooliques sur laquelle s’est fondée la chambre de recours dans son analyse du caractère complémentaire et des canaux de distribution, mais diverses boissons non alcooliques spécifiques (voir point 5 ci-dessus). D’autre part, l’« eau » et les « eaux minérales », prises en compte par la chambre de recours dans le cadre de son analyse de la nature, de la destination, de l’utilisation et du caractère concurrent des produits en cause, ne sauraient être assimilées à l’ensemble des boissons, au demeurant, très variées, visées par la marque antérieure.

22      S’agissant de la liste de produits désignée par la marque demandée, celle-ci ne porte pas sur une catégorie générale des boissons alcooliques sur laquelle s’est fondée la chambre de recours dans le cadre de son appréciation de la comparaison des produits en cause, mais désigne des boissons alcooliques spécifiques (voir point 3 ci-dessus).

23      Or, il convient de constater que, eu égard à l’obligation qui incombe à l’EUIPO, dans le cadre de l’appréciation de la similitude des produits visés par les marques en conflit, au sens de la jurisprudence rappelée au point 20 ci-dessus, de prendre en compte la liste de produits, d’une part, telle qu’elle figure dans la demande d’enregistrement de marque en cause et, d’autre part, telle qu’elle est établie lors de l’enregistrement de la marque antérieure, la chambre de recours devait effectuer une appréciation concrète, fondée sur les boissons spécifiques qui figurent sur les listes de produits respectives des marques en conflit en tenant compte de tous les facteurs pertinents d’appréciation de similitude. Or, au lieu de suivre cette approche, la chambre de recours a fondé ses conclusions sur des considérations générales concernant les différences entre, d’une part, les boissons alcooliques et, d’autre part, les boissons non alcooliques ou l’« eau » et les « eaux minérales ».

24      À cet égard, il convient de rappeler qu’il est certes vrai, ainsi qu’il résulte de la jurisprudence, que la distinction entre les boissons alcooliques et non alcooliques est nécessaire, certains consommateurs ne souhaitant pas, voire ne pouvant pas, consommer d’alcool [voir arrêt du 22 septembre 2021, Sociedade da Água de Monchique/EUIPO – Ventura Vendrell (chic ÁGUA ALCALINA 9,5 PH), T‑195/20, EU:T:2021:601, point 42 et jurisprudence citée]. Toutefois, l’importance qu’il convient d’accorder à cette distinction ne saurait permettre à la chambre de recours de déroger à l’obligation mentionnée au point 23 ci-dessus, en effectuant la comparaison des produits en cause sur la base, notamment, des catégories générales des boissons alcooliques et des boissons non alcooliques.

25      En effet, l’approche consistant à limiter la comparaison de la similitude des produits spécifiques en cause aux catégories générales des boissons alcooliques et des boissons non alcooliques reviendrait, en substance, à établir une présomption générale relative à l’absence de similitude entre l’ensemble des boissons appartenant respectivement à chacune des catégories susmentionnées en raison de la seule caractéristique liée à la présence ou à l’absence d’alcool dans leur composition. Or, cette approche priverait la jurisprudence citée au point 15 ci-dessus de tout effet utile, dans la mesure où elle fonderait l’absence de similitude des produits en cause sur la base d’un facteur relatif à la nature des produits visés par les marques en conflit. Au demeurant, il ne ressort pas de cette jurisprudence qu’un facteur d’appréciation de similitude des produits visés par les marques en conflit relatif à la nature des produits en cause soit doté d’une prééminence générale sur les autres facteurs d’appréciation de similitude, tels qu’ils sont énoncés par cette même jurisprudence précitée.

26      En outre, ainsi que le fait valoir la requérante, les boissons spécifiques telles qu’elles résultent des listes de produits visées par les marques en conflit, bien qu’elles se distinguent par la présence ou l’absence d’alcool dans leur composition, présentent d’autres caractéristiques par rapport aux boissons analysées dans la décision attaquée en ce qui concerne, notamment, leur utilisation, leurs ingrédients, leurs processus de fabrication, leurs canaux de distribution et leurs producteurs, que la chambre de recours a omis d’analyser de manière concrète en tenant compte des produits spécifiques visés respectivement par chacune des marques en conflit.

27      De plus, il est raisonnable de considérer que le rapport de similitude entre les boissons non alcooliques spécifiques visées par la marque antérieure et les boissons alcooliques spécifiques désignées par la marque demandée ne saurait être assimilé à celui qui résulte de la comparaison, premièrement, de l’« eau » et des « eaux minérales », d’une part, avec la catégorie générale des boissons alcooliques, d’autre part, et, deuxièmement, de la catégorie générale de boissons non alcooliques, d’une part, avec la catégorie générale des boissons alcooliques, d’autre part.

28      Dès lors, c’est à tort que, dans la décision attaquée, la chambre de recours n’a pas fondé son analyse sur les produits spécifiques visés par les marques en conflit sur la base du constat, figurant au point 34 de la décision attaquée, selon lequel, en substance, les considérations relatives à la comparaison de l’« eau » et des « eaux minérales » avec la catégorie générale des boissons alcooliques constituaient des « vérités universelles et des principes généraux valables pour l’ensemble du marché européen des boissons (alcoolisées et non alcoolisées) ».

29      Enfin, ne saurait prospérer l’argumentation de l’EUIPO selon laquelle la requérante n’aurait pas démontré que les équivalents sans alcool des boissons alcooliques désignées par la marque demandée existaient sur le marché à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de cette marque. En effet, cette circonstance est sans incidence sur l’obligation qui incombe à la chambre de recours d’effectuer la comparaison des produits en cause sur la base des listes de produits visées respectivement par chacune des marques en conflit.

30      Dans ces circonstances, il y a lieu de constater que, en omettant de prendre en compte les produits spécifiques en cause, tels que visés par chacune des marques en conflit, la chambre de recours a entaché la décision attaquée d’une erreur de droit.

31      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’accueillir le moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

32      Enfin, il convient de rappeler que, si le pouvoir de réformation reconnu au Tribunal n’a pas pour effet de conférer à celui-ci le pouvoir de substituer sa propre appréciation à celle de la chambre de recours et, pas davantage, de procéder à une appréciation sur laquelle ladite chambre n’a pas encore pris position, il doit être exercé dans les situations où le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par la chambre de recours, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils sont établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre (arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, point 72).

33      En l’espèce, il convient de relever que, après avoir considéré que l’une des conditions cumulatives d’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, à savoir la similitude ou l’identité des produits en cause, faisait défaut, la chambre de recours a exclu l’existence d’un risque de confusion dans le cas d’espèce sans procéder à l’analyse de la similitude des marques en conflit. Dans ces circonstances, il n’appartient pas au Tribunal, dans le cadre de l’examen de la demande de réformation de ladite décision au sens de la jurisprudence rappelée au point 32 ci-dessus, d’apprécier lui‑‑même, pour la première fois, la similitude des produits spécifiques tels qu’ils figurent sur les listes de produits visés respectivement par les marques en conflit, et la similitude de ces mêmes marques.

34      Il s’ensuit que la demande de réformation de la décision attaquée doit être rejetée.

35      Partant, il y a lieu d’examiner la demande d’annulation de la décision attaquée formée à titre subsidiaire.

36      À cet égard, il convient de rappeler que le moyen unique de la requérante, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, a été accueilli (voir points 30 et 31 ci-dessus).

37      Dès lors, il y a lieu d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité des annexes K7 à K10, produites par la requérante pour la première fois devant le Tribunal.

 Sur les dépens

38      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

39      L’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 8 novembre 2021 (affaire R 2336/2020-1) est annulée.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      L’EUIPO est condamné aux dépens.

Kowalik-Bańczyk

Buttigieg

Dimitrakopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 mai 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.

© European Union
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