Deutsche Bank v SRB (Economic and monetary union - Banking union - Single Resolution Mechanism for credit institutions and certain investment firms (SRM) - Judgment) French Text [2024] EUECJ T-396/21 (17 July 2024)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2024/T39621.html
Cite as: [2024] EUECJ T-396/21

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

17 juillet 2024 (*) (1)

« Union économique et monétaire – Union bancaire – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement (MRU) – Fonds de résolution unique (FRU) – Décision du CRU sur le calcul des contributions ex ante pour 2021 – Obligation de motivation – Protection juridictionnelle effective – Égalité de traitement – Principe de proportionnalité – Marge d’appréciation du CRU – Exception d’illégalité – Marge d’appréciation de la Commission – Limitation des effets de l’arrêt dans le temps »

Dans l’affaire T‑396/21,

Deutsche Bank AG, établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée par Mes H. Berger, M. Weber et D. Schoo, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de résolution unique (CRU), représenté par MM. J. Kerlin, T. Wittenberg et D. Ceran, en qualité d’agents, assistés de Mes H.‑G. Kamann, F. Louis, P. Gey et L. Hesse, avocats,

partie défenderesse,

soutenu par

Parlement européen, représenté par MM. U. Rösslein, M. Menegatti et Mme G. Bartram, en qualité d’agents,

par

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. J. Bauerschmidt, Mmes J. Haunold et A. Westerhof Löfflerová, en qualité d’agents,

et par

Commission européenne, représentée par M. D. Triantafyllou et Mme A. Steiblytė, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie),

composé de MM. A. Kornezov, président, G. De Baere, D. Petrlík (rapporteur), K. Kecsmár et Mme S. Kingston, juges,

greffier : Mme S. Jund, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 7 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Deutsche Bank AG, demande l’annulation de la décision SRB/ES/2021/22 du Conseil de résolution unique (CRU), du 14 avril 2021, sur le calcul des contributions ex ante pour 2021 au Fonds de résolution unique (ci-après la « décision attaquée »), en ce qu’elle la concerne.

I.      Antécédents du litige

2        La requérante est un établissement de crédit établi en Allemagne.

3        Par la décision attaquée, le CRU a fixé, conformément à l’article 70, paragraphe 2, du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1), les contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) (ci-après les « contributions ex ante »), pour l’année 2021 (ci-après la « période de contribution 2021 »), des établissements relevant des dispositions combinées de l’article 2 et de l’article 67, paragraphe 4, de ce règlement (ci-après les « établissements »), dont la requérante.

4        Par avis de perception du 21 avril 2021, la Bundesanstalt für Finanzdienstleistungsaufsicht (BaFin, Autorité fédérale de surveillance des services financiers, Allemagne), en sa qualité d’autorité de résolution nationale (ci-après l’« ARN »), au sens de l’article 3, paragraphe 1, point 3, du règlement no 806/2014, a enjoint à la requérante d’acquitter  sa contribution ex ante pour la période de contribution 2021, telle qu’elle avait été fixée par le CRU.

II.    Décision attaquée

5        La décision attaquée comprend un corps qui est accompagné de trois annexes.

6        Le corps de la décision attaquée décrit le processus de détermination des contributions ex ante pour la période de contribution 2021, qui est applicable à tous les établissements.

7        Plus particulièrement, dans la section 5 de ladite décision, le CRU a déterminé le niveau cible annuel, mentionné à l’article 4 du règlement d’exécution (UE) 2015/81 du Conseil, du 19 décembre 2014, définissant des conditions uniformes d’application du règlement no 806/2014 en ce qui concerne les contributions ex ante au Fonds de résolution unique (JO 2015, L 15, p. 1), pour la période de contribution 2021 (ci-après le « niveau cible annuel »).

8        Le CRU a expliqué qu’il avait fixé ce niveau cible annuel à un huitième de 1,35 % du montant moyen des dépôts couverts, calculé trimestriellement, de l’ensemble des établissements en 2020 (ci-après le « montant moyen des dépôts couverts en 2020 »), tel qu’il avait été obtenu à partir des données communiquées par les systèmes de garantie des dépôts (SGD) conformément à l’article 16 du règlement délégué (UE) 2015/63 de la Commission, du 21 octobre 2014, complétant la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contributions ex ante aux dispositifs de financement pour la résolution (JO 2015, L 11, p. 44).

9        Dans la section 6 de la décision attaquée, le CRU a décrit la méthode à suivre pour le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2021. À cet égard, il a précisé, au considérant 59 de ladite décision, que, pour cette période, 13,33 % des contributions ex ante avaient été calculées sur la « base nationale », c’est-à-dire sur la base des données communiquées par des établissements agréés sur le territoire de l’État membre participant concerné (ci-après la « base nationale »), conformément à l’article 103 de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190), et conformément à l’article 4 du règlement délégué 2015/63. Le reste des contributions ex ante (à savoir 86,67 %) a été calculé sur la « base de l’union bancaire », c’est-à-dire sur la base des données communiquées par l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participant au mécanisme de résolution unique (MRU) (ci-après la « base de l’union » et les « États membres participants »), conformément aux articles 69 et 70 du règlement no 806/2014 et à l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81.

10      Dans cette même section 6 de la décision attaquée, le CRU a également expliqué qu’il existait, en substance, deux catégories d’établissements assujettis aux contributions ex ante. La première catégorie comprend les établissements qui doivent verser une contribution forfaitaire eu égard à leurs caractéristiques particulières, telles que leur taille ou la nature de leurs activités. Le calcul de la contribution ex ante de ces établissements est régi par les articles 10 et 11 du règlement délégué 2015/63.

11      Les établissements relevant de la seconde catégorie doivent verser une contribution ex ante ajustée à leur profil de risque, que le CRU a fixée en suivant les phases principales suivantes.

12      Dans la première phase, le CRU a calculé, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous a), du règlement no 806/2014, la contribution annuelle de base de chaque établissement, qui est proportionnelle au montant du passif de l’établissement concerné, hors fonds propres et dépôts couverts (ci-après le « passif net »), rapporté au passif net de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants. Conformément à l’article 5, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, le CRU a déduit certains types de passifs du passif net de l’établissement à prendre en compte pour la détermination de cette contribution.

13      Dans la seconde phase du calcul de la contribution ex ante, le CRU a procédé à un ajustement de la contribution annuelle de base en fonction du profil de risque de l’établissement concerné, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous b), du règlement no 806/2014. Il a évalué ce profil de risque sur la base des quatre piliers de risque mentionnés à l’article 6 du règlement délégué 2015/63, qui sont composés d’indicateurs de risque. Afin de classer les établissements selon leur niveau de risque, tout d’abord, le CRU a établi – pour chaque indicateur de risque appliqué pour la période de contribution 2021 – des bins (paniers) dans lesquels ont été regroupés les établissements, conformément à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 3, de ce règlement délégué. Les établissements appartenant au même bin se sont vu attribuer une valeur commune pour l’indicateur de risque donné, dite « valeur discrétisée ». En combinant les valeurs discrétisées pour chaque indicateur de risque, le CRU a calculé le « multiplicateur d’ajustement en fonction du profil de risque » de l’établissement concerné (ci-après le « multiplicateur d’ajustement »). En multipliant la contribution annuelle de base de cet établissement par le multiplicateur d’ajustement de celui-ci, le CRU a obtenu la « contribution annuelle de base ajustée en fonction du profil de risque » dudit établissement.

14      Ensuite, le CRU a additionné toutes les contributions annuelles de base ajustées en fonction des profils de risque pour obtenir un « dénominateur commun » utilisé pour calculer la part du niveau cible annuel que chaque établissement devait verser.

15      Enfin, le CRU a calculé la contribution ex ante de chaque établissement en répartissant le niveau cible annuel entre tous les établissements sur la base du ratio existant entre la contribution annuelle de base ajustée en fonction du profil de risque, d’une part, et le dénominateur commun, d’autre part.

16      L’annexe I de la décision attaquée contient une fiche individuelle pour chaque établissement soumis au versement des contributions ex ante, dont la requérante, qui comporte les résultats du calcul de la contribution ex ante de chacun de ces établissements (ci-après la « fiche individuelle »). Chacune de ces fiches expose le montant de la contribution annuelle de base de l’établissement concerné ainsi que la valeur de son multiplicateur d’ajustement, tant sur la base de l’union que sur la base nationale, en mentionnant, pour chaque indicateur de risque, le numéro du bin auquel ledit établissement a été assigné. En outre, la fiche individuelle expose des données qui sont utilisées pour le calcul des contributions ex ante de tous les établissements concernés et que le CRU a déterminées en additionnant ou en combinant les données individuelles de tous ces établissements. Enfin, cette fiche comporte les données déclarées par l’établissement concerné dans le formulaire de déclaration et utilisées dans le calcul de sa contribution ex ante.

17      L’annexe II de la décision attaquée comprend des données statistiques relatives au calcul des contributions ex ante pour chaque État membre participant, sous une forme résumée et agrégée. Cette annexe précise, notamment, le montant global des contributions ex ante à verser par les établissements concernés pour chacun de ces États membres. Par ailleurs, ladite annexe énumère, pour chaque indicateur de risque, le nombre de bins, le nombre d’établissements appartenant à chacun des bins ainsi que les valeurs minimales et maximales de ces bins. Dans le cas des bins relatifs à la base nationale, ces valeurs sont, pour des raisons de confidentialité, diminuées ou augmentées d’un montant aléatoire, la répartition originale des établissements étant maintenue.

18      L’annexe III de la décision attaquée, intitulée « Évaluation des commentaires soumis dans le cadre de la consultation sur les contributions ex ante au Fonds de résolution unique pour 2021 », examine les observations présentées par les établissements lors de la procédure de consultation menée par le CRU entre les 5 et 19 mars 2021 en vue de l’adoption de la décision attaquée.

III. Conclusions des parties

19      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, y compris ses annexes, en ce qu’elle la concerne ;

–        condamner le CRU aux dépens.

20      Le CRU conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, en cas d’annulation de la décision attaquée, maintenir les effets de la décision attaquée jusqu’à son remplacement ou, à tout le moins, pendant une période de six mois à compter de la date à laquelle le jugement sera définitif.

21      Le Parlement européen conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans la mesure où il repose sur l’exception d’illégalité du règlement no 806/2014 ;

–        condamner la requérante aux dépens.

22      Le Conseil de l’Union européenne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

23      La Commission européenne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

IV.    En droit

24      À l’appui de son recours, la requérante soulevait initialement huit moyens, tirés :

–        le premier, d’une violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et de l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous c), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), en raison de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée ;

–        le deuxième, d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective garanti par l’article 47, paragraphe 1, de la Charte ;

–        le troisième, d’une exception d’illégalité des articles 4 à 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, fondée sur la violation du droit à une protection juridictionnelle effective garanti par l’article 47, paragraphe 1, de la Charte et du principe de sécurité juridique ;

–        le quatrième, d’une violation de l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, lu conjointement avec l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, et d’une exception d’illégalité de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 ;

–        le cinquième, d’une exception d’illégalité des articles 6, 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, fondée sur une violation du « principe du calcul des contributions adapté au risque », des articles 16 et 20 de la Charte, du principe de proportionnalité et de l’obligation de prise en compte de l’ensemble des faits ;

–        le sixième, d’une violation des articles 16 et 52 de la Charte, en raison du caractère inapproprié de l’adaptation de la contribution ex ante de la requérante à son profil de risque ;

–        le septième, d’une violation des articles 16, 20, 41 et 52 de la Charte, au motif que la décision attaquée serait entachée de nombreuses erreurs manifestes d’appréciation ;

–        le huitième, d’une exception d’illégalité de l’article 20, paragraphe 1, premier et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63, fondée sur une violation de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 et du « principe du calcul des contributions adapté au risque ».

25      En outre, la requérante a soulevé, dans son mémoire en réplique, un neuvième moyen, tiré, d’une part, d’une violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 ainsi que des articles 16 et 17 de la Charte et, d’autre part, d’une exception d’illégalité des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014, fondée sur une violation du « principe du calcul des contributions adapté au risque », du principe de proportionnalité, des articles 16 et 17 de la Charte, des exigences de l’État de droit et des principes issus de l’arrêt du 13 juin 1958, Meroni/Haute Autorité (10/56, EU:C:1958:8).

26      Il convient d’examiner d’abord les moyens par lesquels la requérante excipe de l’illégalité des dispositions du règlement no 806/2014 ainsi que du règlement délégué 2015/63, puis les moyens portant directement sur la légalité de la décision attaquée.

A.      Sur les exceptions d’illégalité de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 et des articles 4 à 9 et 20 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63

1.      Sur la deuxième et la troisième branche du quatrième moyen, tirées d’une illégalité de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 

27      Dans le cadre du quatrième moyen, la requérante a soulevé, en substance, trois branches. La première porte sur une violation, par la décision attaquée, de l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, lu conjointement avec l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, et sera ainsi examinée dans le cadre de l’appréciation de la légalité de cette décision. Les deuxième et troisième branches sont, quant à elles, tirées de l’illégalité de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, en ce que cette disposition serait contraire, d’une part, au « principe du calcul des contributions adapté au risque » et, d’autre part, à l’article 114 TFUE.

28      La requérante a soulevé les deuxième et troisième branches dans l’hypothèse où l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 devrait être interprété en ce sens qu’il fonderait le calcul du niveau cible final devant être atteint par la somme des contributions ex ante prélevées avant le 31 décembre 2023 (ci-après le « niveau cible final »), sur le montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale de huit années à compter du 1er janvier 2016 (ci-après la « période initiale »). Avant d’examiner lesdites branches, il y a ainsi lieu de clarifier, d’emblée, la portée de l’article 69, paragraphe 1, dudit règlement.

a)      Sur la portée de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014

29      La  requérante soutient que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 doit être interprété en ce sens que le niveau cible final doit être déterminé de manière « statique », à savoir au regard du montant des dépôts couverts au moment de l’entrée en vigueur de ce règlement. Ainsi, selon ladite disposition, ce niveau cible ne devrait pas être déterminé au regard du niveau des dépôts couverts à la fin de la période initiale.

30      Tout d’abord, les termes de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 renverraient en effet uniquement au délai pour la constitution des moyens financiers du FRU. Ils ne signifieraient pas, en revanche, que le niveau cible final doit être défini au regard du montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale.

31      Ensuite, les travaux préparatoires du règlement no 806/2014 montreraient que, lors de la création du FRU, un niveau cible final « statique » d’environ 55 milliards d’euros était prévu, ce qui correspondrait à 1 % des dépôts couverts prévus de tous les établissements au moment de l’entrée en vigueur de ce règlement.

32      Enfin, au regard d’une interprétation téléologique et systématique de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, le risque couvert par le FRU ne devrait pas être mesuré par référence à l’évolution des dépôts couverts, l’accroissement de ces dépôts ne conduisant pas à une augmentation du risque que le FRU soit utilisé.

33      Le CRU, le Parlement, le Conseil et la Commission contestent cette argumentation.

34      L’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 dispose que, « au terme [de la] période initiale », « les moyens financiers disponibles du [FRU] atteignent au moins 1 % du montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements de crédit agréés dans tous les États membres participants ».

35      Tout d’abord, il ressort du libellé de cette disposition que la date de la fin de la période initiale n’est pas seulement déterminante pour fixer la date à laquelle les moyens financiers disponibles du FRU doivent atteindre au moins 1 % du montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés dans tous les États membres participant au MRU, à savoir le niveau cible final, mais également pour préciser le montant de ces dépôts qui doit être pris en considération aux fins de calculer ce niveau cible.

36      Ensuite, il découle des travaux préparatoires du règlement no 806/2014 que, contrairement à ce que prétend la requérante, l’article 69, paragraphe 1, de ce règlement est fondé sur une approche dynamique du niveau cible final, en ce sens que ce dernier doit être déterminé au regard du montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale. En effet, au point 4.3.2 de l’exposé des motifs de sa proposition COM(2013) 520 final, du 10 juillet 2013, qui a abouti à l’adoption dudit règlement, la Commission a expliqué que le niveau cible final resterait dynamique et qu’il augmenterait si le secteur bancaire se développait.

37      Enfin, la nécessité de prendre en compte l’évolution du montant des dépôts couverts s’explique par l’objectif de perception des contributions ex ante, qui est de garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour que ce dernier puisse remplir ses fonctions, ainsi que cela ressort du considérant 41 du règlement no 806/2014 (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113). L’objectif du MRU consiste, conformément au considérant 12 de ce règlement, à renforcer à son tour la stabilité des établissements dans les États membres participants et à prévenir la propagation d’éventuelles crises aux États membres non participants.

38      À cet égard, il ressort du point 4.3.2 de l’exposé des motifs de la proposition COM(2013) 520 final que, plus la taille du secteur bancaire croît dans le temps, plus les ressources financières devant être mises à disposition du FRU devraient augmenter. Une estimation de cette taille permet ainsi de prévoir le montant des moyens financiers qui devraient être procurés au FRU afin que ce dernier puisse être utilisé, en cas de crise affectant le secteur bancaire, pour financer les instruments de résolution et assurer ainsi leur application efficace, conformément à l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, lu à la lumière du considérant 101 de ce même règlement.

39      Or, dans le cadre de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, le législateur de l’Union a opté pour une approche selon laquelle le montant des dépôts couverts vise à estimer la taille du secteur bancaire et à calculer ainsi les ressources financières qui doivent être mises à disposition du FRU. Dans une telle optique, une éventuelle augmentation du montant des dépôts couverts entre le début et la fin de la période initiale reflète un accroissement de la taille du secteur bancaire, ce qui implique une augmentation des moyens financiers requis par le FRU à la fin de cette période.

40      Il découle de ce qui précède que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 doit être interprété en ce sens que le montant du niveau cible final, prévu par cette disposition, doit être déterminé au regard du montant des dépôts couverts existant à la fin de la période initiale.

b)      Sur la légalité de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014

1)      Sur la deuxième branche, tirée de ce que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 viole le « principe du calcul des contributions adapté au risque »

41      La requérante  soutient que, si l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 est interprété en ce sens que le niveau cible final est déterminé au regard du montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale, cette disposition viole le « principe du calcul des contributions adapté au risque », qui constituerait l’expression du principe de proportionnalité et découlerait des articles 16, 17 et 52 de la Charte, de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 et de l’article 103, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2014/59.

42      En effet, au regard de la croissance importante du montant des dépôts couverts au cours des dernières années, l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 imposerait aux établissements des charges injustifiées et disproportionnées. Les contributions ex ante de l’ensemble des établissements auraient ainsi augmenté, passant d’environ 6,9 milliards d’euros en 2016 à environ 11,3 milliards d’euros en 2021, ce qui représenterait une croissance de 64 %.

43      Or, le risque couvert par le MRU et le FRU n’aurait pas augmenté de manière significative pendant cette période.

44      Le CRU, le Parlement, le Conseil et la Commission contestent cette argumentation.

45      Ainsi qu’il a été relevé aux points 35 à 40 ci-dessus, le niveau cible final est défini, conformément à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, par référence au montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements concernés à la fin de la période initiale.

46      Si, en vue de contester ce mode de détermination du niveau cible final, la requérante soutient que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 viole le « principe du calcul des contributions adapté au risque », il découle de ses écritures, notamment de son mémoire en réplique et de ses observations sur les mémoires du Parlement et du Conseil, qu’elle estime que ce « principe » découle du principe de proportionnalité, tel qu’il est consacré par l’article 5, paragraphe 4, TUE.

47      Dans ces conditions, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la question de savoir s’il existe, en droit de l’Union, un « principe » autonome dit « du calcul des contributions ex ante adapté au risque ». Il suffit, en suivant l’argumentation de la requérante, d’apprécier si l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 méconnaît le principe de proportionnalité.

48      Le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, exige que les actes des institutions et des organes de l’Union soient aptes à réaliser les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause et ne dépassent pas les limites de ce qui est nécessaire à la réalisation de ces objectifs, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (arrêts du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a., C‑547/14, EU:C:2016:325, point 165, et du 20 janvier 2021, ABLV Bank/CRU, T‑758/18, EU:T:2021:28, point 142).

49      En ce qui concerne le contrôle juridictionnel des conditions mentionnées au point 48 ci-dessus, il y a lieu de rappeler que, lors de la détermination du mode de calcul des contributions ex ante, le législateur de l’Union bénéficie d’un large pouvoir d’appréciation, puisqu’il est amené à intervenir dans un domaine impliquant, de sa part, des choix de nature politique, économique et sociale et dans lequel il est appelé à effectuer des appréciations complexes (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, points 117 et 118).

50      Dans ces conditions et conformément à la jurisprudence, le contrôle par le Tribunal du respect du principe de proportionnalité doit se limiter à examiner si les mesures arrêtées par le législateur de l’Union sont manifestement inappropriées par rapport à l’objectif poursuivi, si elles ne vont pas manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif ou si elles n’entraînent pas d’inconvénients manifestement disproportionnés par rapport audit objectif (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2016, Pologne/Parlement et Conseil, C‑358/14, EU:C:2016:323, points 79, 96 et 97).

51      En ce qui concerne, premièrement, le caractère approprié de la règle prévue à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, il ressort du point 37 ci-dessus que celle-ci vise à doter le MRU de suffisamment de ressources pour que ce dernier puisse remplir ses fonctions, parmi lesquelles figure, notamment, la réalisation des résolutions d’établissements défaillants.

52      À cet égard, en vue de démontrer le caractère manifestement inapproprié du mode de détermination du niveau cible final pour atteindre l’objectif énoncé au point 51 ci-dessus, la requérante soulève, en substance, deux catégories d’arguments, la première portant sur la pertinence des dépôts couverts comme paramètre de définition de ce niveau cible et la seconde concernant la prise en compte du montant de ces dépôts à la fin de la période initiale.

53      Ainsi, en premier lieu, la requérante soutient, en substance, que les dépôts couverts ne constituent pas un critère approprié pour la détermination du niveau cible final, étant donné que ces dépôts n’entraînent pas nécessairement de risque que le FRU soit utilisé dans le cadre d’une procédure de résolution.

54      À cet égard, il convient de relever que, afin d’atteindre l’objectif énoncé au point 51 ci-dessus et ainsi qu’il ressort des considérants 101, 104 et 105 du règlement no 806/2014, il appartenait au législateur de l’Union de doter le FRU de ressources financières suffisantes pour lui permettre d’intervenir en cas de crise du secteur bancaire et de financer une éventuelle procédure de résolution des établissements, dans le cadre des missions lui étant dévolues par l’article 76, paragraphe 1, de ce même règlement.

55      Ces ressources financières, qui correspondent au niveau cible final, doivent être estimées au regard de la taille du secteur bancaire, étant précisé que le risque couvert par le FRU est celui que l’ensemble de ce secteur fait courir à la stabilité du système financier (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2021, ABLV Bank/CRU, T‑758/18, EU:T:2021:28, points 71 et 72).

56      À cet égard, le CRU a expliqué, dans ses écritures, sans être sérieusement contredit par la requérante, que les dépôts couverts permettaient d’estimer, de manière approximative, la taille du secteur bancaire et de calculer ainsi les ressources financières requises par le FRU, aux fins de financer l’application des instruments de résolution en cas de crise de ce secteur.

57      En effet, ces dépôts constituent des engagements souscrits par les établissements, étant précisé que, comme le soutient la Commission dans son mémoire en intervention, sans être contredite par la requérante, ces dépôts représentent même la majorité des engagements, à tout le moins pour de grands établissements.

58      Dans ces conditions, il n’est pas établi que, en tant que catégorie spécifique d’engagements assumés par les établissements, les dépôts couverts sont manifestement inappropriés pour estimer la taille du secteur bancaire et calculer ainsi les ressources requises par le FRU.

59      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel, en cas de résolution, les dépôts couverts sont protégés par les SGD, de sorte que leur accroissement n’entraîne pas d’augmentation du risque couvert par le FRU.

60      En effet, sans qu’il soit nécessaire d’examiner dans quelle mesure les dépôts couverts présentent un risque pour l’utilisation des moyens financiers du FRU, il convient de relever que l’argument de la requérante est fondé, en réalité, sur la prémisse selon laquelle ces dépôts peuvent augmenter de manière isolée, sans qu’une telle augmentation s’accompagne d’une augmentation d’autres engagements des établissements pouvant entraîner un risque pour le FRU.

61      Or, rien n’indique que tel est le cas.

62      À cet égard, ainsi que le CRU et le Parlement l’affirment, en substance, dans leurs écritures, sans que la requérante apporte un quelconque élément concret pour contester ces affirmations, le montant des dépôts couverts détenu par l’ensemble des établissements peut être de nature à refléter l’évolution globale du secteur bancaire. En particulier, rien n’indique que l’éventuel accroissement de ce montant ne peut pas être accompagné d’une augmentation d’autres engagements souscrits par ces établissements, tels que les dépôts non couverts, qui ne sont pas protégés par les SGD et qui impliquent, quant à eux, une augmentation du risque couvert par le FRU.

63      Dans ce contexte, la requérante ne saurait prétendre que les dépôts couverts constituent une mesure manifestement inappropriée pour calculer le niveau cible final, en s’appuyant sur le considérant 105 du règlement no 806/2014, aux termes duquel :

« Le niveau cible du [FRU] devrait être défini comme un pourcentage du montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements de crédit agréés dans les États membres participants. Néanmoins, étant donné que le montant du total des passifs de ces établissements constituerait, compte tenu des fonctions du [FRU], une référence plus appropriée, la Commission devrait évaluer si les dépôts couverts ou le total des passifs constituent la base la plus appropriée et s’il ne conviendrait pas d’instaurer à l’avenir un montant minimum absolu pour le [FRU], de manière à maintenir des conditions équitables par rapport à la directive [2014/59]. »

64      En effet, le simple fait qu’un autre critère puisse être tout autant approprié que celui retenu dans la réglementation concernée et que le législateur de l’Union indique qu’il incombe à la Commission de réévaluer à l’avenir l’application de ce critère ne signifie pas que le critère retenu en toute connaissance de cause par ce législateur est manifestement inapproprié pour atteindre l’objectif légitime visé. À cet égard, il ressort de la jurisprudence qu’il ne revient pas au Tribunal, dans le cadre du contrôle du respect du principe de proportionnalité, de déterminer si la mesure adoptée par ledit législateur était la seule ou la meilleure possible, mais si elle était manifestement inappropriée (arrêt du 12 juillet 2001, Jippes e.a., C‑189/01, EU:C:2001:420, point 83).

65      En second lieu, la requérante soutient que la prise en compte du montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale, aux fins de la détermination du niveau cible final, constitue une mesure manifestement inappropriée pour atteindre l’objectif cité au point 51 ci-dessus, à savoir doter le MRU de suffisamment de ressources pour qu’il puisse remplir ses fonctions.

66      À cet égard, il découle des points 38 et 40 ci-dessus que, aux fins de permettre au MRU de remplir efficacement ses fonctions, le législateur de l’Union a prévu le financement du FRU en tenant compte de l’évolution du secteur bancaire, étant entendu qu’une éventuelle croissance de la taille de ce secteur dans le temps impliquerait également une augmentation des ressources financières devant être mises à disposition du FRU et, par conséquent, du niveau cible final. Or, compte tenu de la constatation faite au point 58 ci-dessus, le montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale n’est pas manifestement dépourvu de pertinence aux fins de refléter la taille future dudit secteur et de garantir ainsi un financement suffisant du FRU en fonction de la situation prévisible de ce même secteur.

67      Par ailleurs, ainsi qu’il a été relevé au point 62 ci-dessus, il n’est pas manifestement inapproprié de se fonder sur l’évolution des dépôts couverts pour présumer une augmentation d’autres engagements souscrits par les établissements et estimer ainsi l’éventuelle augmentation du risque couvert par le FRU.

68      Dans ce contexte, la requérante ne saurait, notamment, s’appuyer sur les articles 428 quaterdecies et 428 quindecies du règlement no 575/2013 du Parlement et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO 2013, L 176, p. 1), en prétendant que, selon ces dispositions, les dépôts couverts diminuent le risque de liquidité des établissements, de sorte que leur croissance n’implique aucun risque d’utilisation du FRU et ne doit ainsi pas entraîner d’augmentation du niveau cible final.

69      À cet égard, il ressort du considérant 32 du règlement no 575/2013, lu conjointement avec le considérant 12 du règlement no 806/2014, que la réglementation portant sur les exigences prudentielles poursuit un objectif différent de la celui de la réglementation afférente à la résolution des établissements. Dans ces conditions, les articles 428 quaterdecies et 428 quindecies du règlement no 575/2013 ne sont pas de nature à établir le caractère manifestement inapproprié du mode de détermination du niveau cible final, ce mode relevant de la réglementation relative à la résolution des établissements.

70      De même, la requérante n’est pas fondée à prétendre que la croissance de ces dépôts ne devrait pas entrainer une augmentation du niveau cible final en se fondant sur la circonstance selon laquelle la prise en compte des liquidités élevées en matière de dépôts couverts lors du calcul de l’indicateur de risque « ratio de couverture des besoins de liquidité », au titre de l’article 6, paragraphe 3, sous b), du règlement délégué 2015/63 conduirait à une réduction du multiplicateur d’ajustement de l’établissement concerné.

71      En effet, cette circonstance seule n’est pas de nature à démontrer que le développement du montant des dépôts couverts est manifestement inapproprié pour refléter l’évolution de la taille du secteur bancaire et déterminer en conséquence les besoins financiers du FRU et, en particulier, pour estimer l’augmentation des engagements présentant un risque pour le FRU et mesurer ainsi un tel risque que le FRU serait appelé à couvrir dans le cadre des procédures de résolution.

72      Il découle de ce qui précède que la requérante n’a pas démontré que le mode de détermination du niveau cible final, tel qu’il est prévu par l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, était manifestement inapproprié pour atteindre l’objectif mentionné au point 51 ci-dessus.

73      Deuxièmement, la requérante n’explique pas en quoi la méthode de détermination du niveau cible final, telle qu’elle découle de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, va manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif visé au point 51 ci-dessus. En particulier, elle n’apporte pas d’éléments concrets en vue de démontrer que cet objectif pourrait être atteint par des mesures aussi efficaces que celles prévues par cette disposition, mais moins contraignantes pour les établissements concernés, que la détermination de ce niveau cible au regard du montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale.

74      À cet égard, à supposer que la requérante considère que la détermination du niveau cible final en fonction du montant des dépôts couverts au moment de l’entrée en vigueur du règlement no 806/2014 constitue une telle mesure moins contraignante, elle n’établit pas en quoi cette mesure permettrait au FRU de disposer des ressources financières suffisantes pour assurer un fonctionnement efficace du MRU.

75      De même, la requérante ne saurait soutenir que, aux fins de la détermination du niveau cible final, le législateur de l’Union aurait dû tenir compte de la réduction du risque d’utilisation du FRU en raison des engagements éligibles détenus par les établissements, en conformité avec l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles (ci-après l’« EMEE ») et avec l’exigence d’une capacité d’absorption des pertes. À cet égard, la requérante n’a, notamment, pas expliqué en quoi la prise en compte de ces engagements, aux fins de fixer les modalités de calcul du niveau cible final, entraînerait moins de charges pour les établissements concernés, tout en permettant au FRU de disposer de ressources financières suffisantes.

76      Enfin, à supposer que le calcul du niveau cible final au regard de l’ensemble des engagements des établissements constitue une mesure appropriée, la requérante n’a pas démontré qu’un tel calcul provoquerait moins de charges pour les établissements concernés que la détermination de ce niveau cible sur la base du montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale.

77      Troisièmement, la requérante n’a soumis au Tribunal aucun élément concret visant à démontrer que, en ayant déterminé le niveau cible final par référence aux dépôts couverts existant à la fin de la période initiale, l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 avait entraîné pour les établissements des inconvénients manifestement démesurés par rapport aux objectifs poursuivis par le législateur de l’Union.

78      Eu égard à ce qui précède, la présente branche doit être rejetée.

2)      Sur la troisième branche, tirée de ce que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 viole l’article 114 TFUE

79      La requérante  soutient que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 ne relève pas du champ d’application de l’article 114, paragraphe 1, TFUE. En particulier, en déterminant le niveau cible final en fonction de l’évolution dynamique du montant des dépôts couverts au terme de la période initiale, cette disposition ne contribuerait pas à atteindre l’objectif d’harmonisation des conditions du financement des résolutions au regard du risque posé par le secteur bancaire. En effet, l’augmentation des contributions ex ante à la suite de la croissance des dépôts couverts, malgré une diminution du risque de résolution, conduirait à une accumulation des ressources qui ne serait pas nécessaire pour réaliser cet objectif d’harmonisation. En raison de l’absence de connexion entre le montant des dépôts couverts et le risque pour le CRU, une détermination dynamique du niveau cible final aboutirait à un caractère disproportionné de ce dernier.

80      De plus, la contribution ex ante se transformerait en un impôt qui ne serait pas couvert par la compétence d’harmonisation du législateur de l’Union en vertu de l’article 114, paragraphe 2, TFUE.

81      Le CRU, le Parlement, le Conseil, et la Commission contestent cette argumentation.

82      À titre liminaire, il convient de rappeler que le choix de la base juridique d’un acte de l’Union doit se fonder sur des éléments objectifs susceptibles de faire l’objet d’un contrôle juridictionnel, parmi lesquels figurent la finalité et le contenu de l’acte [voir avis 1/15 (Accord PNR UE-Canada), du 26 juillet 2017, EU:C:2017:592, point 76 et jurisprudence citée ; arrêt du 4 septembre 2018, Commission/Conseil (Accord avec le Kazakhstan), C‑244/17, EU:C:2018:662, point 36].

83      Les actes législatifs adoptés sur le fondement de l’article 114, paragraphe 1, TFUE doivent, d’une part, comporter des mesures relatives au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres et, d’autre part, avoir pour objet l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur (arrêt du 22 janvier 2014, Royaume-Uni/Parlement et Conseil, C‑270/12, EU:C:2014:18, point 100).

84      En premier lieu, il importe de rappeler que l’article 114 TFUE ne saurait être utilisé en tant que base juridique que lorsqu’il ressort objectivement et effectivement de l’acte juridique que ce dernier a pour objectif d’améliorer les conditions de l’établissement et du fonctionnement du marché intérieur (voir arrêt du 22 janvier 2014, Royaume-Uni/Parlement et Conseil, C‑270/12, EU:C:2014:18, point 113 et jurisprudence citée).

85      En l’espèce, il découle, notamment, des considérants 1 et 3 du règlement no 806/2014 ainsi que du considérant 1 de la directive 2014/59 que ce règlement a été adopté dans un contexte de crise économique et financière, lequel a révélé, s’agissant de l’Union, un manque d’instruments permettant de faire face efficacement au risque présenté par les établissements ayant des difficultés financières, ce qui contraignait les États membres à utiliser les moyens financiers publics pour soutenir de tels établissements.

86      Il découle également du considérant 1 du règlement n° 806/2014 que cette crise a mis en évidence les menaces pesant sur le fonctionnement du marché intérieur des services bancaires et le risque croissant de fragmentation financière. Cela constituait une véritable source de préoccupation au sein du marché intérieur dans lequel les banques auraient dû être en mesure d’exercer des activités transfrontalières importantes, alors qu’un repli de ces activités était constaté, lié à une crainte de contagion.

87      Par ailleurs, le législateur de l’Union a souligné, aux considérants 2 à 4 et 12 du règlement no 806/2014, que les divergences entre les réglementations nationales en matière de résolution et entre les pratiques administratives correspondantes ainsi que l’absence de processus décisionnel unifié pour la résolution dans l’union bancaire alimentaient une défiance des systèmes bancaires nationaux envers ceux des autres États membres, y compris les États membres ne participant pas au MRU, et contribuaient à l’instabilité du marché en ne garantissant aucune prévisibilité quant à l’issue d’une défaillance d’une banque. Ces divergences pouvaient également entraîner des coûts d’emprunts plus élevés pour certaines banques et leurs clients en raison uniquement du lieu d’établissement de ces banques, indépendamment de leur solvabilité réelle.

88      Enfin, le législateur de l’Union a mis en exergue, aux considérants 9 et 19 du règlement no 806/2014, le fait que tant que les réglementations et les pratiques en matière de résolution ainsi que les modalités de partage des charges ne dépasseraient pas le niveau national et que les ressources financières nécessaires au financement des procédures de résolution seraient collectées et dépensées au niveau national, le lien entre les États membres et le secteur bancaire ne serait pas totalement brisé et le marché intérieur resterait fragmenté. Cette situation restreindrait les activités transfrontalières des banques, créerait des obstacles à l’exercice des libertés fondamentales et fausserait la concurrence dans le marché intérieur.

89      C’est au regard de ces considérations que le règlement no 806/2014 vise à desserrer le lien existant entre la situation budgétaire de chaque État membre, telle qu’elle est perçue, et les coûts de financement des banques et des entreprises qui y sont implantées ainsi qu’à faire peser la responsabilité du financement de la stabilisation du système financier sur le secteur financier dans son ensemble.

90      Ainsi, comme l’indique son article 1er, le règlement no 806/2014 établit, notamment, des règles uniformes et une procédure uniforme pour la résolution des établissements, qui devraient être appliquées par le CRU, et ce afin de pallier les menaces évoquées aux points 85 à 88 ci-dessus.

91      Un élément essentiel de ces règles et de cette procédure est le FRU, qui permet, ainsi qu’il ressort des articles 67 et 76 du règlement no 806/2014 et du considérant 107 de ce règlement, d’assurer l’exercice efficient des pouvoirs de résolution et de contribuer au financement des instruments de résolution en assurant leur application efficiente.

92      Afin de garantir des moyens financiers suffisants dans le FRU, ce dernier est financé, au regard des considérations énoncées aux points 85 à 88 ci-dessus, notamment, par les contributions ex ante versées par les établissements et dont le montant dépend du niveau cible final établi conformément à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014.

93      Par conséquent, le versement de ces contributions, tel qu’il est déterminé en conformité avec l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, assure l’application efficiente des règles uniformes et de la procédure uniforme de résolution des établissements. Les règles fixant lesdites contributions permettent, à leur tour, comme cela ressort des considérants 12 et 19 du même règlement, d’éviter que des pratiques nationales divergentes n’entravent l’exercice des libertés fondamentales ou ne faussent la concurrence dans le marché intérieur. 

94      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 se dissocie de l’objectif d’harmonisation dès lors que le montant du niveau cible final, prévu par cette disposition, est déterminé au regard du montant des dépôts couverts existant à la fin de la période initiale.

95      En effet, d’une part, le calcul des contributions ex ante au regard du niveau cible final vise à procurer au FRU des ressources financières sur la base d’une référence uniforme, et ce aux fins d’une application efficiente des mesures de résolution dans le cadre d’une procédure uniforme. Un tel calcul est ainsi de nature à rompre le lien entre un établissement et l’État membre dans lequel il a son siège, tout en contribuant à l’établissement et au fonctionnement du marché intérieur au sens de l’article 114, paragraphe 1, TFUE. D’autre part, compte tenu des motifs exposés aux points 66 et 67 ci-dessus, le fait que le niveau cible final est déterminé au regard du montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale ne peut être considéré comme étant dissocié de l’objectif d’harmonisation.

96      Eu égard à ce qui précède, il convient de constater que le règlement no 806/2014, notamment son article 69, paragraphe 1, a pour objectif d’améliorer les conditions de l’établissement et du fonctionnement du marché intérieur.

97      En second lieu, il convient de rappeler que, par l’expression « mesures relatives au rapprochement » figurant à l’article 114 TFUE, les auteurs du traité FUE ont voulu conférer au législateur de l’Union, en fonction du contexte général et des circonstances spécifiques de la matière à harmoniser, une marge d’appréciation quant à la technique de rapprochement la plus appropriée afin d’aboutir au résultat souhaité, notamment dans des domaines qui se caractérisent par des particularités techniques complexes (voir arrêt du 22 janvier 2014, Royaume-Uni/Parlement et Conseil, C‑270/12, EU:C:2014:18, point 102 et jurisprudence citée).

98      Partant, le législateur de l’Union, dans son choix de la technique de rapprochement et compte tenu de la marge d’appréciation dont il bénéficie quant aux mesures visées à l’article 114 TFUE, peut déléguer à un organe ou à un organisme de l’Union des compétences visant à la mise en œuvre de l’harmonisation recherchée. Tel est, notamment, le cas lorsque les mesures à prendre doivent s’appuyer sur une expertise professionnelle et technique particulière ainsi que sur une capacité réactive d’une telle entité (arrêt du 22 janvier 2014, Royaume-Uni/Parlement et Conseil, C‑270/12, EU:C:2014:18, point 105).

99      Dans ce contexte, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort des points 85 à 88 ci-dessus, les mesures à prendre dans le domaine de la résolution doivent s’appuyer sur une expertise professionnelle et technique particulière. Dans ces conditions, le législateur de l’Union pouvait confier au CRU les compétences pour fixer, au regard de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, le montant des contributions ex ante et pour gérer les moyens financiers du FRU conformément à l’article 67, paragraphes 2 et 3, de ce règlement.

100    En outre, ainsi qu’il ressort des points 92 et 93 ci-dessus, l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 est un élément essentiel des règles et de la procédure de résolution des établissements, qui contribue à éviter que des pratiques nationales divergentes n’entravent l’exercice des libertés fondamentales ou ne faussent la concurrence dans le marché intérieur.

101    Dans ces conditions, l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 peut être considéré comme une disposition relative au rapprochement des dispositions des États membres en matière de résolution des établissements dans l’union bancaire.

102    Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 satisfait aux conditions énoncées à l’article 114, paragraphe 1, TFUE.

103    En troisième lieu, il convient d’examiner l’argument de la requérante selon lequel, en raison de la fixation du niveau cible final au regard du montant des dépôts couverts, la contribution ex ante constitue, en substance, un impôt et n’est pas, dès lors, couverte par la compétence d’harmonisation du législateur de l’Union en vertu de l’article 114, paragraphe 2, TFUE.

104    L’article 114, paragraphe 2, TFUE prévoit que le paragraphe 1 de cette disposition ne s’applique pas, notamment, aux « dispositions fiscales ».

105    En ce qui concerne l’interprétation de l’expression « dispositions fiscales », il y a lieu de constater que le traité FUE ne contient pas de définition de cette dernière (voir, en ce sens, arrêt du 29 avril 2004, Commission/Conseil, C‑338/01, EU:C:2004:253, point 63).

106    Cela étant, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’un prélèvement versé par les opérateurs économiques d’un secteur particulier n’a pas de nature fiscale dans une situation où, en particulier, il est directement affecté au seul financement des dépenses de ce secteur et où ces dépenses sont nécessaires au fonctionnement de ce dernier afin, notamment, de le stabiliser (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 11 juillet 1989, Schräder HS Kraftfutter, 265/87, EU:C:1989:303, points 9 et 10).

107    Or, ce raisonnement s’applique également dans le cas des contributions ex ante, qui suivent une logique d’ordre assurantiel et qui sont versées par les opérateurs économiques d’un secteur particulier en vue de financer exclusivement les dépenses de ce secteur.

108    Ainsi, s’agissant de la nature des contributions ex ante, il a déjà été relevé au point 85 ci-dessus que le règlement no 806/2014 avait été adopté dans un contexte de crise économique et financière qui avait révélé, s’agissant de l’Union, un manque d’instruments permettant de faire face efficacement au risque présenté par les établissements ayant des difficultés financières, ce qui contraignait les États membres à utiliser les moyens financiers publics pour soutenir de tels établissements. Le MRU vise à éviter les conséquences dommageables des défaillances des établissements survenues lors de telles crises, dès lors que la défaillance des établissements dans un seul État membre peut compromettre la stabilité des marchés financiers dans leur ensemble, ainsi que cela ressort des considérants 8 et 12 de ce règlement.

109    Dans ce contexte, le législateur de l’Union a considéré qu’il incombait au secteur financier dans son ensemble de financer la stabilisation du système financier, ainsi que cela ressort, notamment, du considérant 100 du règlement no 806/2014.

110    Dans cette optique, la nature spécifique des contributions ex ante consiste, comme le confirment les considérants 105 à 107 de la directive 2014/59 et le considérant 41 du règlement no 806/2014, à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour qu’il puisse remplir ses fonctions (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

111    Par conséquent, conformément à l’article 67, paragraphes 2 et 4, et au considérant 61 du règlement no 806/2014, les contributions ex ante sont collectées auprès des opérateurs économiques du secteur financier afin d’alimenter le FRU, auquel il est permis d’avoir recours uniquement aux fins de l’application efficiente des instruments de résolution et de l’exercice efficient des pouvoirs de résolution lorsque de telles mesures s’avèrent nécessaires pour atteindre l’objectif de stabilité financière de ce secteur.

112    À cet égard, il convient de relever que, ainsi qu’il découle de l’article 1er du règlement n° 806/2014, les mesures mentionnées au point 111 ci-dessus ne sont appliquées qu’au profit des établissements qui sont tenus de verser les contributions ex ante.

113    Certes, le règlement no 806/2014 n’établit aucun lien automatique entre le versement de la contribution ex ante et la résolution de l’établissement concerné. C’est la raison pour laquelle les contributions ex ante ne sauraient être considérées comme des primes d’assurance dont la mensualisation et le remboursement seraient possibles (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2021, ABLV Bank/CRU, T‑758/18, EU:T:2021:28, points 70 et 73).

114    Il n’en demeure pas moins que les établissements profitent à double titre du FRU, lequel est financé précisément par leurs contributions ex ante.

115    D’une part, lorsque la défaillance des établissements est avérée ou prévisible, leur situation financière peut être régularisée dans le cadre d’une procédure de résolution qui peut être entamée en leur faveur si les autres conditions prévues par l’article 18 du règlement no 806/2014 sont également remplies. Une telle procédure permet ainsi d’utiliser des moyens financiers du FRU au profit de tels établissements, étant entendu que ces moyens ont été alimentés par les contributions de ces derniers.

116    D’autre part, tous les établissements bénéficient de leurs contributions ex ante au travers de la stabilité du système financier, laquelle est assurée par le FRU.

117    En effet, le risque couvert par le FRU est celui que l’ensemble du secteur financier fait courir à la stabilité du système financier (arrêt du 20 janvier 2021, ABLV Bank/CRU, T‑758/18, EU:T:2021:28, point 72).

118    Il s’ensuit que le FRU vise, dans une optique d’ordre non pas fiscal, mais assurantiel, à garantir la stabilité du secteur financier dans son ensemble, en ayant pour objectif d’assurer une protection contre sa propre crise au bénéfice de tous les établissements.

119    Cette finalité d’ordre assurantiel se reflète d’ailleurs également dans le calcul des contributions ex ante, étant donné que celles-ci ne résultent pas de l’application d’un taux déterminé à une assiette, mais, en application des articles 102 et 103 de la directive 2014/59 ainsi que des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014, de la définition d’un niveau cible final, puis d’un niveau cible annuel, lequel est ensuite réparti entre les établissements (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113). Cette répartition du niveau cible annuel est fondée, notamment, ainsi qu’il découle également du considérant 109 du règlement no 806/2014, sur le risque que représente chaque établissement pour la stabilité du système financier, ce qui incite les établissements à adopter des modes de fonctionnement moins risqués.

120    Il découle de ce qui précède que les établissements versent les contributions ex ante dans une logique d’ordre assurantiel, étant entendu que ces contributions sont directement affectées au seul financement des dépenses du secteur financier dont ces établissements relèvent et que ces dépenses s’avèrent nécessaires pour le fonctionnement de ce secteur afin, notamment, de le stabiliser en cas de défaillance de certains établissements et de limiter des effets de contagion.

121    Par conséquent, les dispositions du règlement no 806/2014 qui obligent les établissements à verser des contributions ex ante et précisent les modalités de leur calcul, notamment son article 69, paragraphe 1, ne constituent pas des « dispositions fiscales » au sens de l’article 114, paragraphe 2, TFUE.

122    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 se dissocie de l’objectif d’harmonisation dès lors que le montant du niveau cible final prévu par cette disposition est déterminé au regard du montant des dépôts couverts existant à la fin de la période initiale, de sorte que la contribution ex ante se transformerait en impôt.

123    En effet, d’une part, pour les motifs exposés au point 95 ci-dessus, un tel mode de calcul du niveau cible final ne peut être considéré comme étant dissocié de l’objectif d’harmonisation. D’autre part, les modalités de calcul de ce montant n’ont pas d’incidence sur le fait que le produit des contributions ex ante est spécifiquement et directement affecté au seul financement des dépenses du secteur financier et que ces contributions peuvent être considérées comme étant nécessaires pour le fonctionnement dudit secteur, afin de le stabiliser.

124    Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’article 114 TFUE constituait une base juridique appropriée pour l’adoption de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014.

125    Eu égard à ce qui précède, il convient de rejeter la troisième branche du quatrième moyen.

c)      Conclusion sur la deuxième et la troisième branche du quatrième moyen

126    Il résulte de ce qui précède que le quatrième moyen doit être rejeté en ce qu’il repose sur une exception d’illégalité de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014.

2.      Sur le troisième moyen, tiré d’une exception d’illégalité des articles 4 à 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, en ce qu’ils violeraient les principes de protection juridictionnelle effective et de sécurité juridique

127    Le troisième moyen s’articule autour de deux branches.

128    À titre liminaire, il convient de relever que l’article 4 du règlement délégué 2015/63 prévoit que le CRU calcule la contribution ex ante que doit verser chaque établissement en proportion du profil de risque de l’établissement sur la base des informations fournies par celui-ci et en application de la méthode énoncée aux articles 4 à 13 de ce règlement délégué.

129    L’article 5 du règlement délégué 2015/63, intitulé « Ajustement au risque des contributions annuelles de base », indique, notamment, les passifs qui sont exclus du calcul de ces contributions. L’article 6 de ce règlement délégué énumère les piliers et indicateurs de risque que le CRU doit prendre en compte pour évaluer le profil de risque des établissements, tandis que l’article 7 dudit règlement délégué précise la pondération relative de chaque pilier de risque et indicateur de risque qui doit être appliquée par le CRU lorsqu’il évalue le profil de risque de chaque établissement.

130    L’article 8 du règlement délégué 2015/63 est, quant à lui, relatif à l’application des indicateurs de risque dans des cas spécifiques.

131    Par ailleurs, l’article 9 du règlement délégué 2015/63, intitulé « Application de l’ajustement en fonction du profil de risque à la contribution annuelle de base », prévoit que le CRU calcule le multiplicateur d’ajustement sur la base des indicateurs de risque mentionnés à l’article 6 de ce règlement délégué conformément à la formule et aux procédures exposées à l’annexe I dudit règlement délégué et qu’il calcule la contribution annuelle de chaque établissement pour chaque période de contribution en multipliant la contribution annuelle de base par ce multiplicateur d’ajustement, conformément à la formule et aux procédures exposées à l’annexe I de ce même règlement délégué.

132    Enfin, l’annexe I du règlement délégué 2015/63 établit la procédure de calcul des contributions annuelles des établissements en plusieurs étapes.

a)      Sur la première branche, portant sur une prétendue violation du principe de protection juridictionnelle effective

133    La requérante soutient que les articles 4 à 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 violent le principe de protection juridictionnelle effective, tel que consacré par l’article 47, paragraphe 1, de la Charte. Tout d’abord, ces dispositions créeraient un système opaque pour le calcul des contributions ex ante, puisqu’elles prévoiraient, aux fins de ce calcul, l’usage d’informations couvertes par le secret des affaires, ce qui empêcherait le CRU de fournir une motivation suffisante des décisions fixant lesdites contributions. En effet, en dépit du fait que le montant de la contribution ex ante de chaque établissement dépend des données relatives aux autres établissements, la nature confidentielle de ces données s’opposerait à leur divulgation à l’établissement concerné.

134    Ensuite, lesdites dispositions créeraient un système de détermination des contributions ex ante qui se caractériserait par de nombreuses marges d’appréciation du CRU, ce qui augmenterait davantage le caractère opaque de la réglementation concernée.

135    Enfin, il ne serait pas possible pour le Tribunal de contrôler la légalité de la décision attaquée, puisqu’il ne disposerait pas du logiciel utilisé par le CRU pour calculer les contributions ex ante, lequel serait nécessaire à la vérification du calcul de ces contributions.

136    Le CRU et la Commission contestent cette argumentation.

137    Les articles 4 à 9 du règlement délégué 2015/63 énoncent, ainsi qu’il découle des points 128 à 132 ci-dessus, les règles que le CRU doit appliquer pour déterminer la contribution annuelle de base et pour ajuster cette dernière en fonction du profil de risque des établissements. Ces règles sont ensuite mises en œuvre, de manière plus concrète, à l’annexe I de ce règlement délégué.

138    Selon ces dispositions, l’ajustement de la contribution annuelle de base de chaque établissement en fonction de son profil de risque est fondé sur la comparaison des données individuelles de tous les établissements concernés. Or, le CRU considère que toutes ces données sont couvertes par le secret des affaires, de sorte qu’il ne peut pas les communiquer aux établissements dont la contribution ex ante est calculée dans la décision fixant le montant de ces contributions.

139    L’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte exige que l’intéressé puisse connaître les motifs sur lesquels est fondée la décision prise à son égard, soit par la lecture de la décision elle-même, soit par une communication de ces motifs faite sur sa demande, sans préjudice du pouvoir du juge compétent d’exiger de l’autorité en cause qu’elle communique lesdits motifs, afin de lui permettre de défendre ses droits dans les meilleures conditions possibles et de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile de saisir le juge compétent, ainsi que pour mettre ce dernier pleinement en mesure d’exercer le contrôle de la légalité de la décision en cause (voir arrêts du 26 avril 2018, Donnellan, C‑34/17, EU:C:2018:282, point 55, et du 24 novembre 2020, Minister van Buitenlandse Zaken, C‑225/19 et C‑226/19, EU:C:2020:951, point 43).

140    En outre, eu égard au principe du contradictoire, lequel fait partie des droits de la défense mentionnés à l’article 47 de la Charte, les parties à un procès doivent avoir le droit de prendre connaissance de toutes les pièces ou observations présentées au juge en vue d’influer sur sa décision et de les discuter. En effet, le droit fondamental à un recours juridictionnel effectif ne permet pas de fonder une décision juridictionnelle sur des faits et des documents dont les parties elles-mêmes, ou l’une d’entre elles, n’ont pas pu prendre connaissance et sur lesquels elles n’ont donc pas été en mesure de prendre position (voir arrêts du 4 juin 2013, ZZ, C‑300/11, EU:C:2013:363, points 55 et 56, et du 23 octobre 2014, Unitrading, C‑437/13, EU:C:2014:2318, point 21).

141    Cependant, dans certains cas exceptionnels, une autorité de l’Union peut s’opposer à la communication à l’intéressé des motifs précis et complets qui constituent le fondement d’une décision prise à l’encontre de celui-ci, en invoquant des raisons relevant de la protection des données confidentielles. Dans un tel cas, il est nécessaire de mettre en œuvre des techniques et des règles de droit permettant de concilier, d’une part, les considérations légitimes relatives à la protection de données confidentielles ayant été prises en considération pour l’adoption d’une telle décision et, d’autre part, la nécessité de garantir à suffisance au justiciable le respect de ses droits procéduraux, tels que le droit d’être entendu ainsi que le principe du contradictoire (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 115 à 120 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 125).

142    Au regard de la nature spécifique des contributions ex ante, une telle conciliation doit être également effectuée dans le cas du calcul de ces contributions. En effet, ainsi qu’il ressort des considérants 105 à 107 de la directive 2014/59 et du considérant 41 du règlement no 806/2014, lesdites contributions visent à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour qu’il puisse remplir ses fonctions, tout en encourageant l’adoption, par les établissements concernés, de modes de fonctionnement moins risqués. Ainsi, le calcul des contributions ex ante repose, non sur l’application d’un taux à une assiette, mais, en application des articles 102 et 103 de la directive 2014/59 ainsi que des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014, sur la définition d’un niveau cible final, puis d’un niveau cible annuel devant être réparti entre les établissements agréés sur le territoire des États membres participants (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

143    Dès lors que le niveau cible final est défini comme devant s’élever à au moins 1 % du montant des dépôts couverts de l’ensemble de ces établissements et que la contribution annuelle de base de chaque établissement est calculée proportionnellement au montant de son passif net, rapporté au passif net cumulé de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants, il apparaît que le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, implique l’utilisation, par le CRU, de données couvertes par le secret des affaires (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 114).

144    Or, les institutions et organismes de l’Union sont, en principe, tenus, en application du principe de protection du secret des affaires, qui constitue un principe général du droit de l’Union, lequel est, notamment, concrétisé à l’article 339 TFUE, de ne pas révéler aux concurrents d’un opérateur privé des informations confidentielles fournies par celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 109 et 114 et jurisprudence citée).

145    Dans ces conditions, il appartenait à la Commission, lors de la mise en place du système de calcul des contributions ex ante par le règlement délégué 2015/63, de concilier le respect du secret des affaires avec le principe de protection juridictionnelle effective, de sorte que les données couvertes par ce secret ne puissent pas être communiquées aux intéressés et qu’elles ne puissent pas, notamment, être incluses dans la motivation des décisions fixant le montant des contributions ex ante.

146    Cette caractéristique du système de calcul des contributions ex ante n’empêche pas pour autant l’exercice d’un contrôle juridictionnel effectif par le juge de l’Union.

147    En effet, d’une part, rien dans les dispositions dont la requérante excipe de l’illégalité ne s’oppose à ce que, conformément à l’article 88, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 806/2014, le CRU divulgue, lors de l’adoption de sa décision fixant les contributions ex ante, des informations confidentielles obtenues dans le cadre de son activité sous une forme résumée ou agrégée, de telle sorte que les établissements concernés ne puissent être identifiés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 136).

148    D’autre part, lorsque la motivation d’une telle décision doit être limitée en vue d’assurer la protection des données confidentielles, il appartient à l’auteur de cette décision, en cas de recours devant les juridictions de l’Union mettant en cause ces données, de se justifier devant ces dernières dans le cadre de l’instruction contentieuse (voir, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a., C‑341/06 P et C‑342/06 P, EU:C:2008:375, point 110, et du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 145).

149    Le cas échéant, afin d’exercer un contrôle juridictionnel effectif conforme aux exigences de l’article 47 de la Charte, les juridictions de l’Union peuvent solliciter du CRU la production de données susceptibles de justifier les calculs dont l’exactitude est contestée devant elles, en assurant, en tant que de besoin, la confidentialité de ces données (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 146).

150    En outre, en procédant à un examen de l’ensemble des éléments de droit et de fait fournis par le CRU, il incombe au juge de l’Union de vérifier le bien-fondé des raisons invoquées par celui-ci pour s’opposer à la communication des données utilisées aux fins du calcul de la contribution ex ante (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 126).

151    S’il s’avère que les raisons invoquées par le CRU s’opposent effectivement à la communication d’informations ou d’éléments de preuve produits devant le juge de l’Union, il est nécessaire de mettre en balance de manière appropriée les exigences liées au droit à une protection juridictionnelle effective, en particulier au respect du principe du contradictoire, et celles découlant de la protection du secret des affaires (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 128).

152    Il découle de ce qui précède que le calcul des contributions ex ante sur la base de données couvertes par le secret des affaires, conformément aux articles 4 à 9 ainsi qu’à l’annexe I du règlement délégué 2015/63, sans que lesdites données soient mises à la disposition des intéressés, n’implique pas en soi que ces dispositions soient incompatibles avec le principe de protection juridictionnelle effective.

153    En ce qui concerne l’argument de la requérante tiré du pouvoir d’appréciation dont disposerait le CRU, il résulte de la jurisprudence que, si, dans les domaines donnant lieu à des appréciations économiques complexes, une institution ou un organisme de l’Union dispose d’un pouvoir d’appréciation en matière économique, cela n’implique pas que le juge de l’Union doit s’abstenir de contrôler l’interprétation, par cette institution ou cet organisme, de données de nature économique. Le juge de l’Union doit, notamment, non seulement vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (voir arrêt du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 115 et jurisprudence citée).

154    Dans ces conditions, la seule existence d’un pouvoir d’appréciation du CRU ne saurait impliquer que le Tribunal est empêché d’exercer un contrôle juridictionnel effectif de la décision attaquée.

155    Enfin, il y a lieu d’écarter l’argument de la requérante selon lequel le règlement délégué 2015/63 violerait le principe de protection juridictionnelle effective au motif que les juridictions de l’Union ne peuvent pas vérifier l’exactitude du calcul du montant de la contribution ex ante d’un établissement donné.

156    À cet égard, la requérante se limite à soutenir, sans d’autres précisions, qu’une telle vérification présuppose que le Tribunal dispose du logiciel utilisé par le CRU, lequel n’aurait pourtant pas été mis à sa disposition. Or, cette circonstance n’est pas susceptible de remettre en cause la légalité des articles 4 à 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63. En outre, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le Tribunal prenne, parmi les mesures prévues, notamment, dans son règlement de procédure, celles qu’il juge appropriées pour pouvoir vérifier le montant de la contribution ex ante.

157    Eu égard à ce qui précède, la première branche du troisième moyen doit être rejetée.

b)      Sur la seconde branche, portant sur une prétendue violation du principe de sécurité juridique

158    La seconde branche du troisième moyen s’articule, en substance, autour de trois griefs.

1)      Sur le premier grief, tiré de ce que les articles 4 à 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 ne permettraient pas aux établissements de calculer au préalable leurs contributions ex ante

159    La requérante fait valoir que les articles 4 à 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 violent le principe de sécurité juridique dès lors qu’ils ne lui permettent pas de calculer au préalable la contribution ex ante dont elle est redevable au cours d’une période de contribution, en raison des nombreuses marges d’appréciation conférées au CRU par ces dispositions. Le CRU aurait d’ailleurs fait usage de ces marges d’appréciation en adoptant des décisions internes qui ont précisé la méthodologie à suivre pour le calcul des contributions ex ante (ci-après les « décisions intermédiaires »), mais qui n’ont été ni publiées ni rendues accessibles à la requérante. Cela démontrerait que la structure des dispositions contestées dudit règlement délégué ne présente pas une « densité appropriée » qui permettrait d’exclure tout comportement arbitraire des autorités de l’Union concernées.

160    Le CRU et la Commission contestent cette argumentation.

161    À titre liminaire, il y a lieu de définir la portée exacte de la présente exception d’illégalité.

162    À cet égard, d’une part, force est de constater que, en dépit de l’intitulé de la présente exception d’illégalité, tel que formulé par la requérante, l’argumentation de cette dernière se concentre sur la conformité des articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63 avec le principe de sécurité juridique. En revanche, la requérante n’avance aucune argumentation autonome et ciblée concernant la légalité des articles 4, 5, 8 et 9 de ce règlement délégué ou de son annexe I qui irait au-delà de son argumentation relative aux articles 6 et 7 dudit règlement délégué. Dans ces conditions, il convient d’en déduire que la présente exception d’illégalité porte, en réalité, sur les articles 6 et 7 de ce règlement délégué.

163    D’autre part, il convient de relever que, aux termes de ces dispositions, il incombe au CRU d’ajuster la contribution annuelle de base des établissements en tenant compte de quatre piliers de risque, chaque pilier étant composé d’indicateurs de risque qui, à leur tour, peuvent être composés de sous-indicateurs de risque.

164    Or, s’agissant des trois premiers piliers de risque mentionnés à l’article 6, paragraphe 1, sous a) à c), du règlement délégué 2015/63, la requérante n’a soumis au Tribunal aucun élément concret afin de contester leur légalité au motif de leur supposée contradiction avec le principe de sécurité juridique. En outre, en ce qui concerne le pilier de risque mentionné à l’article 6, paragraphe 1, sous d), de ce règlement délégué, dénommé « indicateurs de risque supplémentaires à déterminer par l’autorité de résolution » (ci-après le « pilier de risque IV »), la requérante n’a pas soutenu que l’indicateur de risque « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel », qui constitue l’un des indicateurs de risque du pilier de risque IV, manquerait en clarté et serait donc contraire à ce principe.

165    Dans ces conditions, il y a lieu d’en déduire que la présente exception d’illégalité vise la prétendue non-conformité avec le principe de sécurité juridique des indicateurs de risque du pilier de risque IV, à l’exception de l’indicateur de risque « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel ».

166    Ces précisions étant faites, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, le principe de sécurité juridique exige, d’une part, que les règles de droit soient claires et précises et, d’autre part, que leur application soit prévisible pour les justiciables, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir des conséquences défavorables. Ledit principe exige, notamment, qu’une réglementation permette aux intéressés de connaître avec exactitude l’étendue des obligations qu’elle leur impose et que ces derniers puissent connaître sans ambiguïté leurs droits et leurs obligations et prendre leurs dispositions en conséquence (arrêts du 29 avril 2021, Banco de Portugal e.a., C‑504/19, EU:C:2021:335, point 51, et du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, point 319).

167    Pour autant, ces exigences ne sauraient être comprises comme s’opposant à ce qu’une institution de l’Union, dans le cadre d’une norme qu’elle adopte, emploie une notion juridique abstraite ni comme imposant qu’une telle norme abstraite mentionne les différentes hypothèses concrètes dans lesquelles elle est susceptible de s’appliquer, dans la mesure où toutes ces hypothèses ne peuvent pas être déterminées à l’avance par ladite institution (voir, par analogie, arrêts du 20 juillet 2017, Marco Tronchetti Provera e.a., C‑206/16, EU:C:2017:572, points 39 et 40, et du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, point 320).

168    En conséquence, une disposition d’un acte de l’Union ne viole le principe de sécurité juridique, en raison de son manque de clarté, que si elle présente une ambiguïté telle qu’elle ferait obstacle à ce que les justiciables puissent lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur la portée ou le sens de cette disposition (voir, en ce sens, arrêts du 14 avril 2005, Belgique/Commission, C‑110/03, EU:C:2005:223, point 31, et du 22 mai 2007, Mebrom/Commission, T‑216/05, EU:T:2007:148, point 108).

169    De même, le fait qu’un acte de l’Union confère un pouvoir d’appréciation aux autorités chargées de sa mise en œuvre ne méconnaît pas en soi l’exigence de prévisibilité, à la condition que l’étendue et les modalités d’exercice d’un tel pouvoir soient définies avec une netteté suffisante, eu égard au but légitime en jeu, pour fournir une protection adéquate contre l’arbitraire (voir arrêt du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, point 321 et jurisprudence citée).

170    Au regard de ces considérations, il convient d’examiner si la méthode de calcul des contributions ex ante, dans la mesure où elle est influencée par le pilier de risque IV, est définie avec suffisamment de précision pour que les justiciables puissent lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes quant à la portée ou au sens des dispositions relatives à ce pilier de risque.

171    À cet égard, il y a lieu de relever que la requérante ne fait pas valoir que les notions utilisées aux articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63 sont d’une ambiguïté telle qu’elle ne peut pas lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur leur portée ou leur sens.

172    S’agissant, en particulier, des termes utilisés à l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63, la requérante a admis à l’audience, en substance, qu’elle comprenait le sens qui devait être donné auxdits termes. Certes, elle ne partageait pas l’interprétation que le CRU avait donnée à certains de ces mêmes termes, notamment les termes « modèle économique global », mais elle n’a pas contesté que ceux-ci avaient un sens déterminable, de sorte qu’il était possible de lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur leur portée ou leur sens.

173    Il en va d’autant plus ainsi que la plupart des termes utilisés à l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 ont été définis au considérant 98 de la décision attaquée et aux notes de bas de page 36 à 40 de celle-ci, qui renvoient à plusieurs dispositions de la réglementation applicable. Or, la requérante n’a pas soutenu que ces définitions ne ressortaient pas de ces dispositions.

174    En revanche, il convient de relever, à l’instar de la requérante, que les articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63 octroient une marge d’appréciation au CRU.

175    En effet, conformément à l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, du règlement délégué 2015/63, le pilier de risque IV se compose de trois indicateurs de risque, à savoir, premièrement, les « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », deuxièmement, l’« éventuelle appartenance de l’établissement à un [SPI] » et, troisièmement, la « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel ».

176    Selon l’article 6, paragraphe 5, deuxième alinéa, du règlement délégué 2015/63, le CRU doit tenir compte, lorsqu’il détermine ces indicateurs de risque, « de la probabilité que l’établissement concerné soit mis en résolution et de la probabilité consécutive que le dispositif de financement pour la résolution soit utilisé à cette fin ».

177    Il ressort du libellé de l’article 6, paragraphe 5, deuxième alinéa, du règlement délégué 2015/63 que cette disposition octroie une marge d’appréciation au CRU s’agissant de la façon dont celui-ci doit « tenir compte », aux fins de la détermination desdits indicateurs de risque, « de la probabilité que l’établissement concerné soit mis en résolution et de la probabilité consécutive que le dispositif de financement pour la résolution soit utilisé à cette fin », car les critères indiqués dans ladite disposition doivent être précisés par le CRU pour pouvoir être appliqués à un cas particulier.

178    S’agissant du premier indicateur de risque qui relève du pilier de risque IV et qui est relatif aux activités de négociation, aux expositions hors bilan, aux instruments dérivés, à la complexité et à la résolvabilité de l’établissement, l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 prévoit plusieurs éléments que le CRU doit prendre en compte lors de la détermination de cet indicateur, dont certains peuvent conduire à augmenter le profil de risque de l’établissement concerné et d’autres à le diminuer.

179    Ainsi, les éléments pouvant entraîner une augmentation de ce profil de risque sont au nombre de quatre, à savoir, premièrement, « l’importance des activités de négociation par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres, au degré de risque des expositions et au modèle économique global de l’établissement », deuxièmement, « l’importance des expositions hors bilan par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres et au degré de risque des expositions », troisièmement, « l’importance du montant des instruments dérivés par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres, au degré de risque des expositions et au modèle économique global de l’établissement » et, quatrièmement, « la mesure dans laquelle […] le modèle économique et la structure organisationnelle de l’établissement sont jugés complexes ».

180    Les éléments pouvant entraîner une diminution dudit profil de risque sont au nombre de deux, à savoir « le montant relatif des instruments dérivés qui sont compensés par une contrepartie centrale » et « la mesure dans laquelle […] l’établissement peut faire l’objet d’une résolution rapide et sans obstacles juridiques ».

181    Il résulte du libellé de l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 que cette disposition octroie au CRU une marge d’appréciation s’agissant de l’« importance » que le CRU doit attacher aux « activités de négociation », aux « expositions hors bilan » et au « montant des instruments dérivés » et de l’articulation entre les différents éléments mentionnés dans cette disposition.

182    Ainsi, s’il ressort de l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 que, selon le premier sous-indicateur de risque mentionné par cette disposition, il convient de comparer l’importance des « activités de négociation » par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres, au degré de risque des expositions et au modèle économique global de l’établissement, ladite disposition ne contient pas de précisions concernant la mise en œuvre concrète de cette comparaison.

183    Il en va de même en ce qui concerne les deuxième et troisième sous-indicateurs de risque prévus à l’article 6, paragraphe 6, sous a), ii) et iii), du règlement délégué 2015/63.

184    S’agissant, par ailleurs, de la détermination de l’indicateur de risque SPI, il découle de l’article 6, paragraphe 7, du règlement délégué 2015/63 que le CRU doit tenir compte de l’adéquation du montant des fonds immédiatement disponibles avec celui des fonds nécessaires « pour permettre un soutien crédible et efficace de [l’établissement concerné] » et du degré de sécurité juridique ou contractuelle quant au fait que ces fonds « seront pleinement utilisés avant que le moindre soutien public extraordinaire puisse être demandé ».

185    Il ressort du libellé de cette disposition que le CRU dispose d’une marge d’appréciation s’agissant du respect des conditions prévues par ladite disposition, lesquelles sont liées à l’adéquation des fonds disponibles du SPI concerné avec les fonds nécessaires au financement de l’établissement en cause et au degré de sécurité juridique ou contractuelle concernant ces fonds.

186    Il en va de même s’agissant de la pondération des différents indicateurs de risque dans le cadre du pilier de risque IV, prévue à l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63.

187    En effet, bien que l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 indique de façon claire la pondération relative des trois indicateurs de risque qui composent le pilier de risque IV et qui sont mentionnés au point 175 ci-dessus, il ne ressort pas de cette disposition de quelle façon la pondération des différents sous-indicateurs de risque au sein des deux premiers indicateurs de risque doit être effectuée. En particulier, ladite disposition ne précise pas si cette pondération doit être répartie entre de tels sous-indicateurs de risque d’une manière proportionnelle. Ainsi, l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 confère un pouvoir d’appréciation au CRU s’agissant de déterminer la pondération des différents sous-indicateurs de risque constituant ces indicateurs de risque, lesquels doivent être pris en compte, conformément à l’article 6, paragraphes 5 à 7, du règlement délégué 2015/63.

188    Dans ces conditions, il convient d’examiner si l’article 6, paragraphes 5 à 7, et l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 peuvent être considérés, conformément à la jurisprudence citée au point 169 ci-dessus, comme des dispositions qui définissent avec une netteté suffisante l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation conféré au CRU, eu égard au but légitime en jeu, de sorte qu’elles fournissent une protection adéquate contre l’arbitraire et que les justiciables puissent lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur la portée ou le sens desdites dispositions.

189    Lorsqu’une disposition confère aux institutions ou aux organes de l’Union un pouvoir d’imposer des charges pécuniaires, il convient de déterminer au regard de tous les éléments pertinents si elle définit avec une netteté suffisante l’étendue et les modalités d’exercice d’un tel pouvoir, afin de permettre aux justiciables d’anticiper les conditions dans lesquelles une telle charge sera imposée (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, points 319 à 321).

190    En particulier, il convient d’évaluer si un opérateur avisé peut, en recourant au besoin aux services d’un conseil juridique et économique, prévoir de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur de telles charges, étant entendu que le fait que cet opérateur ne puisse, à l’avance, connaître avec précision le niveau desdites charges que l’institution ou l’organe de l’Union imposera dans chaque espèce ne saurait constituer une violation du principe de sécurité juridique (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, EU:C:2010:346, point 95, et du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission, C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 58 et jurisprudence citée).

191    À cet égard, il convient, notamment, d’apprécier si l’institution ou l’organe de l’Union sont guidés dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation par certaines indications objectives qui permettent aux justiciables d’anticiper de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur des charges à imposer. Parmi ces indices figurent, notamment, les règles de conduite que l’institution ou l’organe de l’Union s’est lui-même imposées dans ce domaine et qui limitent son pouvoir d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, EU:C:2010:346, point 95). Cependant, de tels indices peuvent également découler de la pratique administrative constante, connue et accessible de cette institution ou de cet organe (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 31).

192    De même, une définition claire dans la réglementation applicable du résultat à atteindre peut constituer un indice pertinent pour les justiciables permettant d’anticiper la façon dont une institution ou un organe de l’Union exercera son pouvoir d’appréciation (voir, par analogie, arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38, C‑477/14, EU:C:2016:324, point 100). Il en va d’autant plus ainsi si la méthode ou le procédé concret aux fins de l’atteinte de ce résultat est prescrit par la réglementation en cause (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38, C‑477/14, EU:C:2016:324, point 101).

193    En l’espèce, il convient de relever, en premier lieu, que la réglementation applicable prévoit le résultat à atteindre, selon lequel les moyens financiers disponibles dans le FRU doivent atteindre le niveau cible final au terme de la période initiale de huit années à compter du 1er janvier 2016 (ci-après la « période initiale »), ainsi qu’une méthode pour atteindre ce résultat, ce qui réduit l’impact du pouvoir d’appréciation que le CRU exerce lors de la détermination des contributions ex ante. D’une part, le montant de la contribution ex ante de chaque établissement dépend du montant du niveau cible annuel qui est déterminé par le CRU sur la base de son estimation du montant qui correspond, au 31 décembre 2023, à au moins 1 % des dépôts couverts dans l’ensemble des États membres participants, en vertu de l’article 69, paragraphes 1 et 2, du règlement no 806/2014.

194    D’autre part, ainsi qu’il ressort du point 12 ci-dessus, la contribution ex ante de chaque établissement est déterminée, notamment, sur le fondement de la contribution annuelle de base qui est calculée à partir des montants des passifs nets des établissements concernés. Or, le CRU n’exerce aucun pouvoir d’appréciation concernant la détermination de ces montants. En outre, l’établissement concerné a connaissance du montant de ses passifs nets et il peut avoir accès au montant global des passifs nets des autres établissements, sans pouvoir exiger, en raison de la protection du secret des affaires, d’avoir accès aux données individuelles confidentielles d’autres établissements afin de vérifier le calcul desdits montants (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 114 à 125).

195    En second lieu, la contribution annuelle de base est ajustée au regard du profil de risque de l’établissement concerné, étant entendu que, conformément à l’article 9, paragraphe 3, du règlement délégué 2015/63, le multiplicateur d’ajustement est compris entre les valeurs 0,8 et 1,5.

196    Cet ajustement est calculé sur la base de l’appréciation des quatre piliers de risque prévus à l’article 6 du règlement délégué 2015/63. Or, ainsi qu’il a été relevé au point 164 ci-dessus, la requérante n’a soumis aucun élément au Tribunal pour démontrer le manque de clarté des trois premiers piliers de risque, ces piliers déterminant 80 % du profil de risque de chaque établissement, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, dudit règlement délégué.

197    De même, la requérante n’a pas contesté un manque de clarté de l’indicateur de risque « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel », qui fait partie du pilier de risque IV et qui a, conformément à l’article 7, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), du règlement délégué 2015/63, une pondération de 10 % au sein de ce pilier.

198    Il s’ensuit que les indicateurs de risque dont le manque de clarté est contesté par la requérante et pour lesquels le CRU exerce un certain pouvoir d’appréciation n’influent sur le profil de risque de l’établissement qu’à une hauteur qui se situe au-dessous de 20 %. En outre, l’impact de ces indicateurs sur le montant final de la contribution ex ante est davantage réduit par le fait que le CRU n’exerce aucun pouvoir d’appréciation concernant la détermination du montant de la contribution annuelle de base et que l’ajustement de cette contribution au profil de risque d’un établissement est nettement encadré dans une fourchette préalablement définie allant de 0,8 à 1,5, ainsi qu’il a été rappelé au point 195 ci-dessus.

199    Dans ces conditions, l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation que l’article 6, paragraphes 5 à 7, et l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 confèrent au CRU ne peuvent être considérées comme étant insuffisamment encadrées ou définies avec une netteté insuffisante, eu égard au but légitime en jeu, et ne peuvent donc être considérées comme ne fournissant pas une protection adéquate contre l’arbitraire.

200    Il en va d’autant plus ainsi que la requérante est un opérateur avisé qui peut, en recourant au besoin aux services d’un conseil juridique et économique, prévoir de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur de sa contribution ex ante.

201    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel les articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63 violent le principe de sécurité juridique au motif que le CRU a exercé le pouvoir d’appréciation conféré par ces dispositions par le biais des décisions intermédiaires qui n’ont pas été publiées ou rendues autrement accessibles.

202    En effet, l’éventuelle adoption ou absence d’accessibilité de telles décisions est imputable au CRU et n’est pas prévue par les articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63.

203    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de conclure que la requérante n’a pas démontré que les articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63 violaient le principe de sécurité juridique.

204    Par conséquent, le premier grief de la seconde branche du troisième moyen doit être rejeté.

2)      Sur le deuxième grief, tiré de ce que la Commission aurait pu établir une autre méthode de calcul des contributions ex ante

205    La requérante fait valoir que la Commission aurait pu établir une méthode de calcul des contributions ex ante qui ne tienne compte que des seules données de l’établissement concerné, de sorte qu’il ne soit pas nécessaire de se servir de données confidentielles d’autres établissements. Une telle méthode de calcul permettrait ainsi à la requérante de mieux comprendre l’étendue de ses obligations et ne se heurterait, dès lors, pas au principe de sécurité juridique.

206    Le CRU conteste cette argumentation.

207    À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans le contexte d’un pouvoir délégué au sens de l’article 290 TFUE, la Commission dispose, dans le cadre de l’exercice des compétences qui lui sont conférées, d’un large pouvoir d’appréciation lorsqu’elle est appelée, notamment, à effectuer des appréciations et des évaluations complexes (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2017, Dyson/Commission, C‑44/16 P, EU:C:2017:357, point 53 et jurisprudence citée).

208    Tel est le cas en ce qui concerne la fixation des critères d’adaptation des contributions ex ante au profil de risque en vertu de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59.

209    À cet égard, il convient de rappeler que la nature spécifique de ces contributions consiste, ainsi qu’il ressort des considérants 105 à 107 de la directive 2014/59 et du considérant 41 du règlement no 806/2014, à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour que ce dernier puisse remplir ses fonctions, tout en encourageant l’adoption, par les établissements concernés, de modes de fonctionnement moins risqués (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

210    Dans ce contexte, et ainsi qu’il ressort du considérant 114 de la directive 2014/59, le législateur de l’Union a chargé la Commission de préciser, par acte délégué, la façon d’ajuster les contributions des établissements aux dispositifs de financement pour la résolution en proportion de leur profil de risque.

211    Dans cette même optique, le considérant 107 de cette directive précise que, pour assurer un calcul équitable des contributions ex ante aux dispositifs de financement nationaux et encourager l’adoption de modes de fonctionnement moins risqués, il convient que ces contributions soient fonction du risque de crédit, de liquidité et de marché encouru par les établissements.

212    Il découle de ce qui précède que la Commission devait élaborer des règles d’ajustement des contributions ex ante en fonction du profil de risque des établissements en poursuivant deux objectifs liés, à savoir, d’une part, assurer la prise en compte des différents risques que génèrent les activités des établissements, bancaires ou plus largement financières, et, d’autre part, encourager ces mêmes établissements à suivre des modes de fonctionnement moins risqués.

213    Or, ainsi qu’il ressort des documents afférents à l’adoption du règlement délégué 2015/63, notamment les documents « JRC technical work supporting Commission second level legislation on risk based contributions to the (single) resolution fund » [Étude technique du JRC au soutien de la législation de deuxième niveau de la Commission sur les contributions fondées sur les risques au fonds de résolution (unique), ci-après l’« étude technique du JRC »], et « Commission Staff Working Document: estimates of the application of the proposed methodology for the calculation of contributions to resolution financing arrangements » (Document de travail des services de la Commission : estimations de l’application de la méthode proposée pour le calcul des contributions aux dispositifs de financement des résolutions), l’élaboration de telles règles impliquait des appréciations et des évaluations complexes de la part de la Commission dans la mesure où celle-ci devait examiner les différents éléments au vu desquels les divers types de risque étaient appréhendés dans les secteurs bancaire et financier.

214    Dans ces conditions, s’agissant de la méthode d’adaptation des contributions annuelles de base au titre de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, le contrôle du juge de l’Union doit se limiter à examiner si l’exercice du pouvoir d’appréciation octroyé à la Commission n’est pas entaché d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir ou encore si celle-ci n’a pas manifestement dépassé les limites de ce pouvoir (voir, en ce sens, arrêt du 21 juillet 2011, Etimine, C‑15/10, EU:C:2011:504, point 60).

215    En l’espèce, il convient de relever, d’une part, que la requérante n’explique pas comment le seul fait que la Commission aurait pu établir une autre méthode de calcul des contributions ex ante que la méthode instaurée par le règlement délégué 2015/63 a pour conséquence que ce règlement délégué est entaché d’une telle erreur manifeste ou d’un tel détournement de pouvoir, qu’il va manifestement au-delà des limites du pouvoir d’appréciation octroyé à la Commission ou qu’il viole les exigences du principe de sécurité juridique, telles que rappelées au point 166 ci-dessus.

216    D’autre part, il est vrai que, en l’absence des données relatives aux autres établissements, qui relèvent du secret des affaires et qui ne peuvent donc pas être portées à la connaissance de la requérante, cette dernière ne peut pas calculer en amont le montant exact des contributions ex ante dont elle est redevable.

217    Cependant, comme il a été relevé au point 143 ci-dessus, le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, dont la validité n’a pas été contestée, implique l’utilisation, par le CRU, de données couvertes par le secret des affaires.

218    Dans ces conditions, le seul fait que la Commission aurait pu adopter une autre méthode de calcul des contributions ex ante ne constitue pas une violation du principe de sécurité juridique.

219    Partant, le présent grief doit être rejeté.

3)      Sur le troisième grief, tiré d’une violation de l’article 12 du règlement 2016/1011

220    La requérante  soutient que les articles 6 et 7 du règlement délégué 2015/63 ne satisfont pas à l’exigence prévue à l’article 12, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2016/1011 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, concernant les indices utilisés comme indices de référence dans le cadre d’instruments et de contrats financiers ou pour mesurer la performance de fonds d’investissement et modifiant les directives 2008/48/CE et 2014/17/UE et le règlement (UE) no 596/2014 (JO 2016, L 171, p. 1). Selon cette disposition, pour déterminer un indice de référence dans le domaine de la régulation des marchés financiers, il serait nécessaire d’utiliser une méthodologie « assortie de règles claires établissant les modalités selon lesquelles une appréciation discrétionnaire peut être portée dans la détermination de cet indice de référence et à quel moment elle peut l’être ».

221    Le CRU  conteste cette argumentation.

222    Il convient de relever que le règlement 2016/1011 se rapporte, ainsi qu’il ressort déjà de son intitulé, aux indices utilisés comme indices de référence dans le cadre d’instruments et de contrats financiers ou pour mesurer la performance de fonds d’investissement.

223    De ce fait, le règlement 2016/1011 n’a pas vocation à s’appliquer à la détermination des contributions ex ante. Par conséquent, la requérante ne saurait faire valoir que le règlement délégué 2015/63 n’est pas compatible avec les prescriptions de transparence et de précision résultant de l’article 12 dudit règlement.

224    Partant, le présent grief doit être rejeté.

c)      Conclusion sur le troisième moyen

225    Eu égard à ce qui précède, le troisième moyen doit être rejeté.

3.      Sur le cinquième moyen, tiré d’une exception d’illégalité des articles 6, 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, en ce qu’ils violeraient plusieurs normes supérieures

226    Le cinquième moyen s’articule, en substance, autour de deux branches.

a)      Sur la première branche, portant sur la méthode dite de « binning »

227    La requérante soutient que les articles 6, 7 et 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 violent le « principe du calcul des contributions adapté au risque » ainsi que les articles 16 et 20 de la Charte, le principe de proportionnalité et le « principe de prise en compte intégrale des faits », dans la mesure où ces dispositions définissent des piliers et des indicateurs de risque, ainsi qu’une procédure et des formules applicables à leur combinaison, sur la base d’une « image idéalisée qui ne correspond pas à l’expérience réelle et à la situation effective de l’ensemble des établissements [devant verser des contributions ex ante adaptées à leur profil de risque] ».

228    En effet, la pondération des indicateurs de risque et leur mise en œuvre à l’annexe I du règlement délégué 2015/63 conduiraient à la constitution de bins et à l’assignation de différents établissements à ces bins qui entraîneraient une charge objectivement injustifiée, disproportionnée et discriminatoire pour des établissements tels que la requérante.

229    En particulier, ainsi qu’il ressortirait de l’annexe II de la décision attaquée, l’application de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63 aurait pour résultat de créer une fourchette de valeurs excessivement large pour les premier et dernier bins. À titre d’exemple, en ce qui concerne l’indicateur de risque « actifs pondérés en fonction du risque du marché, divisés par l’exposition au risque totale » – qui fait partie du pilier de risque IV –, pour la partie de la contribution ex ante calculée sur la base de l’Union, la requérante relèverait avec sa valeur de [confidentiel](2)% du bin [confidentiel], [confidentiel], et se verrait mise sur le même pied d’égalité qu’un établissement qui présente une valeur [confidentiel][confidentiel] fois plus élevée, à savoir de [confidentiel] %, alors que [confidentiel]. Il en irait de même pour d’autres indicateurs de risque, tel que l’indicateur « exposition aux instruments dérivés, divisée par le total des actifs ».

230    De plus, il ressortirait également de l’annexe II de la décision attaquée que, en ce qui concerne six des neuf indicateurs de risque du pilier de risque IV mentionnés à l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous a), du règlement délégué 2015/63, plusieurs bins n’ont pas été pourvus, tandis que les premiers bins comprendraient à chaque fois un très grand nombre d’établissements, ce qui ne serait pas conforme au libellé de l’annexe I de ce règlement délégué en vertu duquel le CRU doit assigner le même nombre d’établissements à chaque bin. Cela montrerait que la Commission a créé une réglementation dont l’application donne des résultats incohérents qui ne reflètent pas le profil de risque des établissements assujettis aux contributions ex ante.

231    Le CRU et la Commission contestent cette argumentation.

232    En premier lieu, il convient d’examiner la compatibilité de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63 avec le principe d’égalité de traitement, tel qu’il est consacré par l’article 20 de la Charte.

233    L’article 20 de la Charte consacre le principe d’égalité de traitement, lequel exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêt du 3 février 2021, Fussl Modestraße Mayr, C‑555/19, EU:C:2021:89, point 95).

234    Selon une jurisprudence constante, le caractère comparable de situations différentes s’apprécie eu égard à l’ensemble des éléments qui les caractérisent. Ces éléments doivent, notamment, être déterminés et appréciés à la lumière de l’objet et du but de l’acte qui institue la distinction en cause. Doivent, en outre, être pris en considération les principes et les objectifs du domaine dont relève cet acte (voir arrêt du 3 février 2021, Fussl Modestraße Mayr, C‑555/19, EU:C:2021:89, point 99 et jurisprudence citée).

235    À cet égard, il y a lieu, tout d’abord, d’apprécier si les établissements assignés au même bin se trouvent dans une situation comparable.

236    En application de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63, il appartient au CRU de calculer, dans un premier temps, un nombre de bins afin de comparer les établissements eu égard aux différents indicateurs et sous-indicateurs de risque. Dans un deuxième temps, il incombe au CRU d’assigner, en principe, le même nombre d’établissements à chaque bin, en commençant par assigner au premier bin les établissements pour lesquels les valeurs de l’indicateur brut sont les plus faibles. Dans un troisième temps, il appartient au CRU d’assigner à tous les établissements figurant dans un bin donné le même score, dénommé « indicateur discrétisé », dont il doit tenir compte pour le reste du calcul de leur multiplicateur d’ajustement.

237    Il n’est pas exclu que l’application de cette méthode, dite « de binning » (regroupement), telle qu’instaurée par l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63, puisse aboutir, dans les faits, à des situations dans lesquelles des établissements ayant des valeurs pour un indicateur de risque donné qui sont proches de celles des établissements assignés au bin précédent sont pourtant assignés au bin suivant, contenant des établissements ayant des valeurs pour ce même indicateur de risque qui pourraient parfois être considérablement plus élevées. Cette conséquence découle de l’application de la règle prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 3, du règlement délégué 2015/63, selon laquelle le CRU assigne, en principe, le même nombre d’établissements à chaque bin.

238    Afin d’examiner si les établissements assignés au même bin, mais ayant des valeurs considérablement différentes les uns des autres pour le même indicateur de risque, se trouvent dans une situation comparable, il y a lieu de prendre en compte, au regard de la jurisprudence citée au point 234 ci-dessus, les principes et les objectifs du domaine dont relève le règlement délégué 2015/63.

239    À cet égard, il convient de rappeler que la nature spécifique des contributions ex ante consiste, ainsi qu’il ressort des considérants 105 à 107 de la directive 2014/59 et du considérant 41 du règlement no 806/2014, à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour que ce dernier puisse remplir ses fonctions, tout en encourageant l’adoption, par les établissements concernés, de modes de fonctionnement moins risqués (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

240    Il convient de constater que, compte tenu du fait que l’un des objectifs principaux du MRU consiste à encourager les établissements concernés à suivre des modes de fonctionnement moins risqués, les établissements assignés au même bin mais ayant des valeurs considérablement différentes les unes des autres pour le même indicateur de risque, ne se trouvent pas dans des situations comparables, puisqu’ils ont des caractéristiques différentes s’agissant du degré de risque mesuré par cet indicateur.

241    Pourtant, ainsi qu’il découle du point 236 ci-dessus, ces établissements sont traités de manière égale, puisqu’ils sont assignés au même bin relatif audit indicateur de risque et, partant, se voient attribuer le même indicateur discrétisé, dont le CRU tiendra compte pour le calcul du multiplicateur d’ajustement.

242    Cela étant, lorsque des personnes se trouvant dans des situations différentes sont traitées de manière égale, le principe d’égalité de traitement n’est pas violé, pour autant qu’un tel traitement soit dûment justifié (voir arrêt du 7 mars 2017, RPO, C‑390/15, EU:C:2017:174, point 52 et jurisprudence citée).

243    Tel est le cas lorsque ce traitement est en rapport avec un objectif légalement admissible poursuivi par la mesure ayant pour effet d’instaurer ledit traitement et qu’elle est proportionnée à cet objectif (voir arrêt du 7 mars 2017, RPO, C‑390/15, EU:C:2017:174, point 53 et jurisprudence citée).

244    À cet égard, la Cour a reconnu la légitimité de l’objectif consistant, pour une institution de l’Union, à établir des règles générales susceptibles d’être facilement appliquées et aisément contrôlées par les autorités compétentes (voir, en ce sens, arrêts du 24 février 2015, Sopora, C‑512/13, EU:C:2015:108, point 33, et du 7 mars 2017, RPO, C‑390/15, EU:C:2017:174, point 60).

245    En l’espèce, il convient de relever que le règlement délégué 2015/63 est conforme à cet objectif.

246    En effet, le règlement délégué 2015/63 a prévu une méthode d’ajustement des contributions ex ante au profil de risque des établissements consistant à comparer leurs profils de risque sur la base de valeurs que ces établissements obtiennent pour une série d’indicateurs de risque.

247    La méthode de binning, telle que décrite au point 236 ci-dessus, permet au CRU de gérer de manière efficace un grand nombre de données dont il doit tenir compte pour effectuer la comparaison mentionnée au point 196 ci-dessus, tout en évitant, dans la mesure du possible, que la présence de valeurs dites extrêmes, c’est-à-dire présentant un grand écart par rapport à la moyenne, mène à des comparaisons dénaturées.

248    En effet, ainsi qu’il ressort, notamment, de l’étude technique du JRC, relative au règlement délégué 2015/63, l’un des objectifs de la méthode de binning est de prévoir une méthode simple pour comparer le grand nombre de données déclarées par les établissements dont la contribution ex ante est ajustée à leur profil de risque. En outre, cette méthode permet d’éviter que des établissements ayant des valeurs particulièrement négatives pour certains indicateurs de risque reçoivent néanmoins un score qui indique un profil de risque peu élevé pour cet indicateur, puisqu’il existe certains établissements ayant des valeurs extrêmes.

249    Ensuite, en ce qui concerne la proportionnalité de la méthode de binning au regard de l’objectif poursuivi par la réglementation en cause, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort des points 209 à 213 ci-dessus, la Commission jouit d’une large marge d’appréciation en ce qui concerne la mise en œuvre de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59.

250    Dans ces conditions, et conformément à la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêts du 16 juin 2015, Gauweiler e.a., C‑62/14, EU:C:2015:400, points 80, 81 et 91 ; du 30 novembre 2022, Trasta Komercbanka e.a./BCE, T‑698/16, non publié, sous pourvoi, EU:T:2022:737, points 221 et 222 et jurisprudence citée, et du 21 décembre 2022, Firearms United Network e.a./Commission, T‑187/21, non publié, sous pourvoi, EU:T:2022:848, points 122 et 123 et jurisprudence citée), le contrôle du Tribunal du respect du principe de proportionnalité doit se limiter à examiner si la méthode de binning est manifestement inappropriée au regard de l’objectif que la Commission entend poursuivre, si elle ne va pas manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif ou si elle n’entraîne pas d’inconvénients manifestement disproportionnés au regard de l’objectif poursuivi.

251    S’agissant de la question de savoir si la méthode de binning permet d’atteindre l’objectif poursuivi, tel que ce dernier a été précisé aux points 247 et 248 ci-dessus, il convient d’observer que cette méthode est une méthode statistique reconnue, ainsi qu’il ressort, notamment, de l’étude technique du JRC. De même, ladite méthode emploie des critères objectifs pour la détermination des contributions ex ante, à savoir, notamment, une formule mathématique prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 2, du règlement délégué 2015/63.

252    En outre, la méthode de binning permet de comparer facilement les données d’un grand nombre d’établissements et de calculer d’une manière efficace et objective leurs contributions ex ante.

253    Dans ces conditions, cette méthode permet d’atteindre l’objectif poursuivi consistant à établir une méthode simple et aisément contrôlable pour comparer un grand nombre de données aux fins du calcul des contributions ex ante.

254    Par ailleurs, la requérante ne démontre pas que la méthode de binning dépasse manifestement les limites de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objectif poursuivi. En particulier, elle n’a pas démontré qu’une autre méthode de comparaison des profils de risque des établissements présenterait manifestement moins d’inconvénients pour ceux-ci que celle du binning, tout en permettant d’atteindre, d’une manière aussi efficace, ledit objectif.

255    Enfin, il est vrai que, comme cela est relevé au point 237 ci-dessus, cette méthode statistique pourrait avoir pour conséquence, dans les faits, que, dans certains cas, des établissements ayant des valeurs considérablement différentes pourraient néanmoins se retrouver dans le même bin, comme cela transparaît à l’annexe II de la décision attaquée. Cependant, une telle circonstance ne peut être considérée comme un inconvénient manifestement démesuré eu égard à l’objectif poursuivi par la réglementation en cause.

256    En effet, il convient de relever, premièrement, que l’ajustement des contributions ex ante ne peut se réaliser que dans la fourchette d’un coefficient compris entre 0,8 et 1,5, en vertu de l’article 9, paragraphe 3, du règlement délégué 2015/63. La contribution annuelle de base demeure ainsi l’élément prépondérant pour la détermination de la contribution ex ante au regard du profil de risque des établissements.

257    Deuxièmement, ainsi qu’il découle de l’étude empirique conduite préalablement à l’adoption du règlement délégué 2015/63, dont les résultats ont été résumés dans l’étude technique du JRC, le phénomène statistique identifié aux points 237 et 255 est circonscrit en ce qu’il tend à se produire surtout dans les derniers bins, et non dans la grande majorité des bins.

258    Troisièmement, il demeure constant que les établissements se trouvant dans ces derniers bins ont des valeurs plus élevées pour l’indicateur de risque concerné que les établissements assignés aux bins inférieurs.

259    Quatrièmement, la méthode de l’ajustement des contributions ex ante au profil de risque tient compte d’une multitude d’indicateurs de risque, ainsi qu’il ressort de l’article 6 du règlement délégué 2015/63. Un établissement est dès lors assigné, au total, à une multitude de bins en fonction de ses valeurs et de celles des autres établissements pour chaque indicateur de risque.

260    Or, ainsi qu’il ressort de l’étude technique du JRC mentionnée au point 257 ci-dessus, les établissements ont tendance à se retrouver dans d’autres bins pour différents indicateurs de risque. De ce fait, si un établissement se retrouve dans le dernier bin pour un indicateur de risque donné, et se voit ainsi mis sur un pied d’égalité avec des établissements ayant des valeurs considérablement plus élevées, il en va différemment, en règle générale, pour d’autres indicateurs de risque, cela permettant de procéder à une comparaison globale des établissements concernés.

261    Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la requérante n’a pas démontré que l’article 20 de la Charte et le principe de proportionnalité s’opposaient à l’utilisation de la méthode de binning.

262    Au demeurant, le phénomène décrit aux points 259 et 260 ci-dessus est illustré par le calcul de la contribution ex ante de la requérante pour la période de contribution 2021, comme en atteste sa fiche individuelle. En effet, en ce qui concerne la partie de sa contribution ex ante calculée sur la base de l’union, la requérante se retrouve dans le[confidentiel] bin pour [confidentiel]. En revanche, pour aucun des indicateurs de risque faisant partie des piliers de risque [confidentiel] la requérante ne se retrouve dans le [confidentiel] bin, alors que [confidentiel].

263    La situation est d’ailleurs similaire pour la partie de la contribution ex ante de la requérante qui a été calculée sur la base nationale. Il ressort de sa fiche individuelle que la requérante se retrouve dans le [confidentiel] bin pour [confidentiel]. En revanche, elle ne se retrouve dans le [confidentiel] bin pour aucun des indicateurs de risque composant [confidentiel] piliers de risque.

264    En ce qui concerne, en deuxième lieu, le grief tiré de la violation d’un « principe du calcul des contributions adapté au risque », il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la question de savoir s’il existe, en droit de l’Union, un tel principe. Ce grief peut être compris en ce sens que la requérante reproche à la Commission, en réalité, d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a prévu la méthode de binning, puisque cette dernière empêcherait le CRU d’adapter, d’une manière appropriée, les contributions annuelles de base au profil de risque réel des établissements.

265    Or, au regard des considérations exposées aux points 251 à 261 ci-dessus, la requérante ne saurait prétendre que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a instauré la méthode de binning.

266    S’agissant, en troisième lieu, de la compatibilité de la méthode de binning avec l’article 16 de la Charte et le principe de prise en compte intégrale des faits, la requérante ne développe aucune argumentation autonome et ciblée concernant la violation de cet article et de ce principe, en se bornant à invoquer la violation de ceux-ci.

267    À cet égard, il découle de la jurisprudence que, pour qu’un recours soit recevable, il est nécessaire que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même, et ce afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice. Ainsi, tout moyen qui n’est pas suffisamment articulé dans la requête introductive d’instance doit être considéré comme étant irrecevable. Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief est invoqué au soutien d’un moyen. Cette fin de non-recevoir d’ordre public doit être relevée d’office par le juge de l’Union (voir arrêts du 30 juin 2021, Italie/Commission, T‑265/19, non publié, EU:T:2021:392, point 33 et jurisprudence citée, et du 7 juillet 2021, Bateni/Conseil, T‑455/17, EU:T:2021:411, point 135 et jurisprudence citée).

268    Les griefs mentionnés au point 266 ne répondant pas à ces exigences, ils doivent être rejetés comme étant irrecevables.

269    En dernier lieu, la requérante ne développe, dans sa requête, aucune argumentation autonome et ciblée concernant la prétendue illégalité des articles 6, 7 et 9 du règlement délégué 2015/63 ou d’autres parties de l’annexe I de ce règlement délégué que celle figurant sous le titre « Étape 2 », qui irait au-delà de l’argumentation examinée ci-dessus.

270    De ce fait, la première branche du cinquième moyen, tirée d’une exception d’illégalité concernant ces dernières dispositions, doit être rejetée.

b)      Sur la seconde branche, portant sur la prise en compte, de la part des prêts et des dépôts interbancaires dans l’Union européenne, des activités de négociation et des instruments dérivés lors du calcul du multiplicateur d’ajustement

271    La requérante soutient que la prise en compte de la part des prêts et des dépôts interbancaires dans l’Union européenne, dans le cadre du pilier de risque « importance de l’établissement pour la stabilité du système financier ou de l’économie », ainsi que des activités de négociation et des instruments dérivés, dans le cadre du pilier de risque IV, aux fins du calcul du multiplicateur d’ajustement, aboutit à une charge discriminatoire à son détriment. En effet, ces éléments auraient été déjà intégrés dans le calcul de la contribution annuelle de base, en tant que partie du total des passifs, de sorte que leur prise en compte supplémentaire conduirait à une double comptabilisation inappropriée.

272    Le CRU conteste cette argumentation.

273    À cet égard, il ressort de la jurisprudence citée au point 233 ci-dessus que le principe d’égalité de traitement exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié.

274    La requérante ayant invoqué la violation du principe d’égalité de traitement, c’est à elle qu’il incombe d’identifier avec précision et au regard des critères mentionnés dans la jurisprudence citée au point 234 ci-dessus les situations comparables dont elle estime qu’elles ont été traitées de manière différente ou les situations différentes dont elle estime qu’elles ont été traitées de manière identique [arrêt du 12 avril 2013, Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, T‑31/07, non publié, EU:T:2013:167, point 311].

275    Or, la requérante n’explique pas avec une clarté suffisante en quoi le principe d’égalité de traitement serait violé par la prise en compte des éléments mentionnés au point 271 ci-dessus, à la fois lors du calcul de la contribution annuelle de base et lors de l’ajustement de cette contribution au profil de risque des établissements. Il n’apparaît, notamment, pas clairement, au regard de l’argumentation de la requérante, si une telle violation découle d’un traitement différent de situations comparables ou d’un traitement identique de situations différentes.

276    Ensuite, et en tout état de cause, il est constant que la requérante est traitée de la même manière que les autres établissements s’agissant de la prise en compte des éléments mentionnés au point 271 ci-dessus aux fins du calcul de la contribution annuelle de base et du multiplicateur d’ajustement.

277    Si, dans une telle situation, la présente branche devait être comprise en ce sens que la requérante soutient qu’elle devrait être traitée différemment des autres établissements en ce qui concerne la prise en compte des éléments mentionnés au point 271 ci-dessus, elle n’a soumis au Tribunal aucun élément concret visant à démontrer qu’elle se trouve dans une situation différente de celle de ces établissements.

278    Dans ces conditions, la seconde branche du cinquième moyen doit être rejetée.

c)      Conclusion sur le cinquième moyen

279    Eu égard à ce qui précède, le cinquième moyen doit être rejeté.

4.      Sur le huitième moyen, tiré d’une exception d’illégalité de l’article 20, paragraphe 1, première et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63, en ce qu’il violerait l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 et le « principe du calcul des contributions adapté au risque »

280    La requérante excipe de l’illégalité de l’article 20, paragraphe 1, première et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63 au motif que, dans la mesure où cette disposition permet au CRU de ne pas appliquer, pour une période indéterminée, dans le cadre du calcul des contributions ex ante, un ou plusieurs indicateurs de risque si les données pour ces indicateurs ne sont pas disponibles, la Commission n’aurait pas respecté l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, qui aurait exigé d’elle qu’elle tienne compte de tous les éléments prévus par cette disposition lors de l’adoption du règlement délégué 2015/63.

281    Plus concrètement, l’article 20, paragraphe 1, première et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63 aurait pour effet que, pour la période de contribution 2021, le CRU n’aurait pas tenu compte, dans le cadre du pilier de risque « exposition au risque », de l’indicateur de risque « fonds propres et engagements ou passifs éligibles détenus par l’établissement au-delà de l’[exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles (EMEE)] », dans le cadre du pilier de risque « stabilité et diversité des sources de financement », de l’indicateur de risque « ratio de financement net stable » et, dans le cadre du pilier de risque IV, des indicateurs de risque « complexité » et « résolvabilité ».

282    Pour les mêmes raisons, l’article 20, paragraphe 1, première et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63 serait également contraire au « principe du calcul des contributions adapté au risque ».

283    Le CRU  et la Commission contestent cette argumentation.

284    À titre liminaire, il convient de préciser, d’une part, que, dans le cadre du huitième moyen, la requérante se limite à soulever une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63.

285    D’autre part, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la directive 2014/59 ou une autre règle du droit de l’Union consacre un « principe du calcul des contributions adapté au risque », le grief de la requérante tiré de la violation de ce principe doit être compris en ce sens qu’elle soutient, en substance, que l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation, au motif que cette disposition empêcherait le CRU d’adapter, d’une manière appropriée, les contributions annuelles de base au profil de risque réel des établissements.

286    Cela étant précisé, il convient de relever que, aux termes de l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, intitulé « Dispositions transitoires », un indicateur de risque ne s’applique pas tant que les informations requises au titre d’un indicateur de risque spécifique mentionné à l’annexe II de ce règlement délégué ne font pas partie des exigences d’information prudentielle mentionnées à l’article 14 dudit règlement délégué, à savoir les exigences d’information prudentielle établies par le règlement d’exécution no 680/2014 de la Commission, du 16 avril 2014, définissant des normes techniques d’exécution en ce qui concerne l’information prudentielle à fournir par les établissements, conformément au règlement no 575/2013 (JO 2014, L 191, p. 1), ou, le cas échéant, au niveau des États membres.

287    Il convient de rappeler, à cet égard, que le règlement délégué 2015/63 a été adopté sur le fondement de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, lequel oblige la Commission à tenir compte de tous les éléments énumérés sous a) à h) de cette disposition aux fins de préciser la notion d’« adaptation des contributions en fonction du profil de risque des établissements ».

288    Malgré cela, l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 habilite le CRU, à titre transitoire, à ne pas appliquer certains de ces éléments, qui sont reflétés dans les indicateurs de risque prévus par ce règlement délégué.

289    À cet égard, il y a lieu de souligner que, si l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 oblige, certes, la Commission à « tenir compte » de l’ensemble des éléments énumérés à l’article 103, paragraphe 7, sous a) à h), de la directive 2014/59, cette disposition ne précise pas la manière dont elle doit les prendre en compte. À cette fin et comme il a été rappelé aux points 209 à 213 ci-dessus, la Commission jouit d’une large marge d’appréciation concernant la mise en œuvre de cette disposition.

290    Or, une telle marge d’appréciation peut impliquer, le cas échéant, la nécessité de prévoir des périodes transitoires en ce qui concerne l’application des éléments énumérés à l’article 103, paragraphe 7, sous a) à h), de la directive 2014/59, en raison, notamment, de l’indisponibilité des données nécessaires pour le calcul des indicateurs de risque fondés sur ces éléments.

291    L’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 introduit une telle période transitoire dès lors qu’il n’autorise pas le CRU à ne pas appliquer certains desdits éléments indéfiniment dans le temps, mais uniquement à titre transitoire, comme cela découle de l’intitulé de l’article 20 de ce règlement délégué, ainsi que des conditions d’application de son paragraphe 1.

292    En outre, il convient de relever, à l’instar du CRU et de la Commission, que la justification de la période transitoire prévue par cette disposition est étroitement liée au caractère progressif du processus de mise en place des exigences prudentielles et des exigences d’information correspondantes. En effet, ainsi qu’il découle, notamment, du considérant 6 de la directive 2014/59, le règlement délégué 2015/63 a été adopté à un moment où ces exigences n’étaient pas encore définitivement arrêtées ou faisaient encore l’objet d’ajustements. À cet égard, la requérante n’a pas sérieusement contesté l’affirmation du CRU selon laquelle les autorités compétentes détermineraient progressivement certaines desdites exigences qui, à leur tour, influenceraient les données qui devaient être disponibles pour calculer les indicateurs de risque prévus par le règlement délégué 2015/63. Il s’ensuit que de telles données nécessaires pour le calcul de certains de ces indicateurs de risque pouvaient ne pas être disponibles pour l’ensemble des établissements concernés ou, à tout le moins, pour l’ensemble des établissements ayant leur siège dans un État membre, pendant à tout le moins une partie de la période initiale, étant précisé que ces données pouvaient ne pas être déclarées à titre d’informations prudentielles selon le droit de l’Union ou, le cas échéant, le droit national.

293    Dans ce contexte, l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 vise à éviter que des charges disproportionnées ou discriminatoires soient, le cas échéant, imposées aux établissements lors du calcul des contributions ex ante en raison précisément de cette mise en œuvre progressive des exigences prudentielles et des exigences d’information qui y sont afférentes. En effet, ce calcul implique un exercice comparatif. À cet égard, le CRU a expliqué, en substance, sans être contredit, que, si les données indispensables pour le calcul de certains indicateurs de risque n’étaient pas déclarées à titre d’informations prudentielles par l’ensemble des établissements ou, à tout le moins, par l’ensemble des établissements ayant leur siège dans un État membre, le CRU serait obligé de prendre en compte des données relatives à de tels indicateurs qui ne sont pourtant pas comparables.

294    Enfin, il est vrai que l’exception prévue à l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 peut aboutir à une situation où certains indicateurs de risque prévus à l’article 6 de ce règlement délégué demeurent inappliqués pendant toute la période initiale. Cependant, d’une part, une telle conséquence est le résultat de la nature progressive de la mise en œuvre des exigences prudentielles, telle que relevée au point 292 ci-dessus. D’autre part, comme il ressort de l’article 71 du règlement no 806/2014, lesdits indicateurs de risque ont vocation à s’appliquer également au-delà de la période initiale.

295    Dans ces conditions, et compte tenu des considérations énoncées au point 289 ci-dessus, la requérante n’a pas démontré que l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation ou d’un détournement de pouvoir ou encore qu’il va manifestement au-delà des limites du large pouvoir d’appréciation octroyé à la Commission par l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59.

296    Partant, le huitième moyen doit être rejeté.

B.      Sur les moyens portant sur la légalité de la décision attaquée

1.      Sur le premier moyen, tiré de défauts de motivation

297    Le premier moyen s’articule autour de six branches.

a)      Observations préliminaires

298    L’article 296, deuxième alinéa, TFUE dispose que les actes juridiques sont motivés. De même, le droit à une bonne administration, consacré à l’article 41 de la Charte, prévoit l’obligation, pour les institutions, les organes et les organismes de l’Union, de motiver leurs décisions.

299    La motivation d’une décision d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union revêt une importance toute particulière, en tant qu’elle permet à l’intéressé de décider en pleine connaissance de cause s’il entend introduire un recours contre cette décision ainsi qu’à la juridiction compétente d’exercer son contrôle, et qu’elle constitue donc l’une des conditions de l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 103 et jurisprudence citée).

300    Une telle motivation doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. À cet égard, il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée et, en particulier, de l’intérêt que les personnes concernées par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Par conséquent, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 104 et jurisprudence citée).

301    Afin d’examiner si cette motivation est suffisante en ce qui concerne une décision fixant les contributions ex ante, il convient de rappeler, premièrement, qu’il ne saurait être déduit de la jurisprudence de la Cour que la motivation de toute décision d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union mettant à la charge d’un opérateur privé le paiement d’une somme d’argent doit nécessairement comprendre l’intégralité des éléments permettant à son destinataire de vérifier l’exactitude du calcul du montant de cette somme d’argent (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 105 et jurisprudence citée).

302    Deuxièmement, les institutions, les organes et les organismes de l’Union sont, en principe, tenus, en application du principe de protection du secret des affaires, qui constitue un principe général du droit de l’Union, lequel est, notamment, concrétisé à l’article 339 TFUE, de ne pas révéler aux concurrents d’un opérateur privé des informations confidentielles fournies par celui-ci (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 109 et jurisprudence citée).

303    Troisièmement, considérer que la motivation de la décision du CRU fixant des contributions ex ante doit nécessairement permettre aux établissements de vérifier l’exactitude du calcul de leur contribution ex ante impliquerait, nécessairement, d’interdire au législateur de l’Union d’instituer un mode de calcul de cette contribution intégrant des données dont le caractère confidentiel est protégé par le droit de l’Union et, partant, de réduire de manière excessive le large pouvoir d’appréciation dont doit disposer, à cette fin, ce législateur, en l’empêchant, notamment, d’opter pour une méthode susceptible d’assurer une adaptation dynamique du financement du FRU aux évolutions du secteur financier, par la prise en compte comparative, en particulier, de la situation financière de chaque établissement agréé sur le territoire d’un État membre participant au FRU (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 118).

304    Quatrièmement, s’il résulte de ce qui précède que l’obligation de motivation pesant sur le CRU doit être mise en balance, en raison de la logique du système de financement du FRU et du mode de calcul établi par le législateur de l’Union, avec l’obligation du CRU de respecter le secret des affaires des établissements concernés, il n’en demeure pas moins que cette dernière obligation ne doit pas être interprétée à ce point extensivement qu’elle vide l’obligation de motivation de sa substance (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 120).

305    Toutefois, il ne saurait être considéré, dans le cadre de la mise en balance de l’obligation de motivation avec le principe de protection du secret des affaires, que motiver une décision mettant à la charge d’un opérateur privé le paiement d’une somme d’argent sans lui fournir l’intégralité des éléments permettant de vérifier avec exactitude le calcul du montant de cette somme d’argent porte nécessairement, dans tous les cas, atteinte à la substance de l’obligation de motivation (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 121).

306    S’agissant de la décision du CRU fixant des contributions ex ante, l’obligation de motivation doit être considérée comme étant respectée lorsque les personnes concernées par cette décision, tout en ne se voyant pas transmettre de données couvertes par le secret des affaires, disposent de la méthode de calcul utilisée par le CRU et d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, de quelle façon leur situation individuelle a été prise en compte, aux fins du calcul de leur contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 122).

307    Dans un tel cas, ces personnes sont, en effet, en mesure de vérifier si leur contribution ex ante a été fixée de manière arbitraire, en méconnaissant la réalité de leur situation économique ou en utilisant des données relatives au reste du secteur financier dépourvues de plausibilité. Lesdites personnes peuvent, dès lors, comprendre les justifications de la décision fixant leur contribution ex ante et évaluer s’il apparaît utile d’introduire un recours contre cette décision, de sorte qu’il serait excessif d’exiger du CRU qu’il communique chacun des éléments chiffrés sur lesquels s’appuie le calcul de la contribution de chaque établissement concerné (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 123).

308    Il résulte de ce qui précède que le CRU n’est pas, notamment, tenu de fournir à un établissement les données lui permettant de vérifier, de manière complète, l’exactitude de la valeur du multiplicateur d’ajustement, puisque cette vérification supposerait de disposer de données couvertes par le secret des affaires relatives à la situation économique de chacun des autres établissements concernés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 135).

309    En revanche, il incombe au CRU de publier ou de transmettre aux établissements concernés, sous une forme agrégée et anonymisée, les informations relatives à ces établissements, utilisées pour calculer cette contribution, dans la mesure où ces informations peuvent être communiquées sans porter atteinte au secret des affaires (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 166).

310    Parmi les informations devant ainsi être mises à la disposition des établissements figurent, notamment, les valeurs limites de chaque bin et celles des indicateurs de risque s’y rapportant, sur la base desquelles la contribution ex ante des établissements a été adaptée au profil de risque de ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 167).

311    C’est au regard de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments de la requérante développés dans le cadre du premier moyen.

b)      Sur la première branche, portant sur la complexité de la motivation du calcul de la contribution ex ante

312    La requérante fait valoir, tout d’abord, que les explications fournies par le CRU dans la décision attaquée, réparties en quatre documents distincts, sont excessivement complexes et opaques.

313    Ensuite, l’outil de calcul utilisé par le CRU pour calculer les contributions ex ante ne serait accessible ni à la requérante ni au Tribunal.

314    Enfin, les vices de motivation de la décision attaquée seraient davantage confirmés par le fait que le CRU a approfondi la motivation de la décision fixant les contributions ex ante pour la période de contribution 2022.

315    Le CRU conteste cette argumentation.

316    Tout d’abord, la requérante n’explique pas à suffisance de droit en quoi le fait que la décision attaquée soit répartie en quatre documents rend cette décision incompréhensible et constitue donc un vice de motivation.

317    De même, bien que la requérante prétende que les documents composant la décision attaquée sont reliés entre eux par de nombreux renvois et des références croisées, de sorte qu’il serait impossible de comprendre pleinement chacun des éléments de calcul, elle ne fournit aucun exemple d’un tel élément qui deviendrait incompréhensible pour cette raison.

318    En ce qui concerne, ensuite, l’outil de calcul utilisé par le CRU pour calculer les contributions ex ante, il convient de relever que le grief de la requérante concerne, selon ses clarifications apportées lors de l’audience, l’outil de calcul sous la forme d’un logiciel utilisé en interne par le CRU pour calculer les contributions ex ante pour la période de contribution 2021 de tous les établissements.

319    Or, la requérante ne saurait reprocher au CRU de ne pas lui avoir donné accès à un tel outil, dès lors qu’elle n’a soumis au Tribunal aucun élément concret qui expliquerait les motifs pour lesquels cet accès était nécessaire pour se conformer aux exigences résultant de la jurisprudence citée aux points 306, 309 et 310 ci-dessus.

320    Enfin, le seul fait que le CRU ait prétendument approfondi la motivation de la décision fixant les contributions ex ante pour la période de contribution 2022 n’est pas pertinent pour apprécier si la décision attaquée est suffisamment motivée. En effet, la motivation de cette dernière décision ne saurait être examinée à la lumière de celle d’un acte adopté à peu près un an après la décision attaquée.

321    À la lumière de ce qui précède, la première branche du premier moyen doit être rejetée.

c)      Sur la cinquième branche, portant sur la rétention des données des autres établissements

322    Selon la requérante, la motivation de la décision attaquée est insuffisante dès lors que le CRU n’a pas divulgué les données des autres établissements qui constituaient le fondement du calcul des contributions ex ante, ce qui la laisserait dans l’incertitude quant à l’exactitude du calcul de sa contribution ex ante. Ainsi, le CRU n’aurait pas établi un juste équilibre entre l’obligation de motivation et le secret des affaires.

323    Le CRU conteste cette argumentation.

324    Au considérant 88 de la décision attaquée, le CRU a observé que « les secrets d’affaires des établissements – c’est-à-dire toutes les informations concernant l’activité professionnelle des établissements qui, en cas de divulgation à un concurrent et/ou à un public plus large, pourraient porter gravement atteinte aux intérêts des établissements – [étaient] considérés comme des informations confidentielles ». Il a ajouté que, « [d]ans le cadre du calcul des contributions ex ante […], les informations individuelles fournies par les établissements par l’intermédiaire de leurs formulaires de [déclaration] […], sur lesquelles [il] s’appu[yait] pour calculer leur contribution ex ante, [étaient] considérées comme des secrets d’affaires ».

325    En outre, aux considérants 90 à 92 de la décision attaquée, le CRU a relevé qu’il lui était interdit de « divulguer les points de données de chaque établissement, qui constitu[aie]nt la base des calculs dans [ladite décision] », alors qu’il était autorisé à « divulguer les points de données agrégés et communs, dans la mesure où ces données [étaient] cumulées ». Cela étant, les établissements bénéficiaient, selon ladite décision, d’une « transparence totale quant au calcul de leur [contribution annuelle de base] et de leur multiplicateur d’ajustement » pour les étapes de calcul de cette contribution, telles qu’elles étaient définies à l’annexe I du règlement délégué 2015/63, qui portaient sur le « calcul des indicateurs bruts » (étape 1), le « rééchelonnement des indicateurs » (étape 3) et le « calcul de l’indicateur composite » (étape 5). En outre, les établissements étaient en mesure d’obtenir des « points de données communs utilisés indifféremment par le CRU pour tous les établissements ajustés en fonction de leur profil de risque » pour les étapes de calcul portant sur la « discrétisation des indicateurs » (étape 2), l’« intégration du signe affecté » (étape 4) et le « calcul des contributions annuelles » (étape 6).

326    À cet égard, il convient de rappeler, en premier lieu, que le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, implique l’utilisation, par le CRU, de données couvertes par le secret des affaires ne pouvant pas être reprises dans la motivation de la décision de fixation des contributions ex ante (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 114).

327    En second lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, l’obligation de motivation n’impose pas au CRU de faire figurer, dans la décision attaquée, des considérations détaillées démontrant le caractère confidentiel de chaque catégorie de données fournies par les établissements.

328    En effet, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 300 ci-dessus, il n’est pas exigé que la motivation d’un acte spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée et, en particulier, de l’intérêt que les personnes concernées par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications.

329    Or, d’une part, il découle des considérations figurant au considérant 88 de la décision attaquée que le CRU a considéré que l’ensemble des données déclarées par chaque établissement était couvert, dans sa globalité, par le secret des affaires, puisque la divulgation de ces données à un concurrent ou à un public plus large pourrait porter gravement atteinte aux intérêts de l’établissement concerné.

330    D’autre part, étant donné que la requérante a fourni ses propres données aux fins du calcul des contributions ex ante, conformément à l’article 14 du règlement délégué 2015/63, elle avait une pleine connaissance de la nature et des caractéristiques générales de chaque catégorie de ces données. Elle était ainsi, notamment, à même d’évaluer dans quelle mesure chacune de ces catégories de données pouvait comporter des informations confidentielles.

331    Dans ces conditions, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre et, le cas échéant, contester les raisons pour lesquelles le CRU avait considéré que les données individuelles des autres établissements étaient couvertes par le secret des affaires. Elle pouvait, notamment, contester, au regard de la nature et des caractéristiques générales de chaque catégorie de ces données, l’appréciation du CRU figurant au considérant 88 de la décision attaquée, selon laquelle lesdites données avaient un caractère secret et leur divulgation pouvait porter gravement atteinte aux intérêts de l’établissement concerné. Ainsi, elle disposait de tous les éléments nécessaires pour pouvoir contester le non-respect par le CRU des exigences dégagées par la Cour concernant la mise en balance de l’obligation de motivation avec le principe de protection du secret des affaires, telles qu’elles sont rappelées aux points 306, 309 et 310 ci-dessus.

332    Or, la requérante n’a pas apporté d’éléments qui viseraient à remettre en cause l’appréciation du CRU selon laquelle les données individuelles des autres établissements étaient couvertes par le secret des affaires.

333    Eu égard à ce qui précède, la requérante ne saurait prétendre que la décision attaquée est insuffisamment motivée en ce qu’elle ne fournit pas les données individuelles des autres établissements permettant de vérifier le calcul de sa contribution ex ante.

334    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante, selon lequel le CRU, pour s’acquitter de son obligation de motivation, doit lui fournir, sous une forme anonymisée, une liste de toutes les données des établissements qui se trouvent dans le même bin qu’elle.

335    D’une part, imposer au CRU une telle exigence irait au-delà des exigences imposées par la jurisprudence qui ont été rappelées aux points 306, 309 et 310 ci-dessus.

336    D’autre part, le CRU a soutenu, sans être sérieusement contredit sur ce point, que même une liste avec des données anonymisées pour un bin particulier risquait de permettre aux opérateurs économiques actifs dans le domaine bancaire, lesquels sont des opérateurs avisés, d’apprendre des secrets d’affaires de certains établissements. À cet égard, la requérante n’a pas, notamment, contesté que de tels opérateurs savaient quels établissements avaient tendance à avoir des valeurs élevées pour certains indicateurs de risque. Or, s’ils obtenaient des listes avec de telles données chaque année, ils pourraient suivre l’évolution des indicateurs de risque de ces établissements, quand bien même ceux-ci seraient composés de données commercialement sensibles. Un tel risque existe en particulier en ce qui concerne les grands établissements et ceux établis dans les États membres dans lesquels il n’existe qu’un nombre limité d’établissements redevables de la contribution ex ante. En effet, il n’est pas exclu que, dans ces hypothèses, un opérateur avisé soit en position de déduire l’identité de tels établissements, quand bien même ces derniers auraient été anonymisés. Ainsi, il ne saurait être reproché au CRU de ne pas avoir établi de liste de toutes les données anonymisées des établissements qui se trouvaient dans un même bin.

337    À la lumière de ce qui précède, la cinquième branche du premier moyen doit être rejetée.

d)      Sur la deuxième branche, portant sur la motivation du niveau cible annuel

338    Selon la requérante, la détermination du niveau cible annuel n’est pas dûment motivée dans la décision attaquée. En particulier, le CRU aurait dû expliquer dans quelle mesure il avait pris en compte l’incidence éventuelle des contributions procycliques sur la position financière des établissements concernés. De plus, le CRU n’aurait pas communiqué le niveau cible final pronostiqué ni son interprétation du plafond mentionné à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 806/2014. Or, ainsi que la décision fixant les contributions ex ante pour la période de contribution 2022 le montrerait, le CRU s’estimerait être habilité à augmenter librement le niveau cible annuel en appliquant un coefficient qui n’est pas prévu par la réglementation applicable et à imposer ainsi aux établissements une charge disproportionnée.

339    Le CRU rétorque qu’il ressort des considérants 35 à 48 de la décision attaquée qu’il a respecté son obligation de motivation en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel pour la période de contribution 2021.

340    En particulier, il résulterait des considérants 43 à 48 de la décision attaquée que le CRU a tenu compte de la pandémie de COVID-19 dans le cadre de l’analyse de la phase du cycle conjoncturel ainsi que des effets procycliques potentiels des contributions sur la situation financière des établissements contributeurs. À cet égard, le CRU aurait expliqué qu’il anticipait une reprise économique au cours de l’année 2021, même si cette reprise demeurait difficilement prévisible.

341    Par ailleurs, le CRU aurait publié sur son site Internet le niveau cible final pronostiqué et la requérante aurait eu connaissance de cette publication. La prétendue absence de divulgation de l’interprétation du CRU concernant le plafond de 12,5 % prévu à l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 ne serait pas de nature à affecter la légalité de la motivation de la décision attaquée.

342    À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, au terme de la période initiale, les moyens financiers disponibles dans le FRU doivent atteindre le niveau cible final, qui correspond à au moins 1 % du montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants.

343    Selon l’article 69, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, au cours de la période initiale, les contributions ex ante doivent être réparties aussi uniformément que possible dans le temps jusqu’à ce que le niveau cible final mentionné au point 342 ci-dessus soit atteint, mais en tenant dûment compte de la phase du cycle d’activité et de l’incidence que les contributions procycliques peuvent avoir sur la position financière des établissements.

344    L’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 précise que, chaque année, les contributions dues par l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants ne dépassent pas 12,5 % du niveau cible final.

345    En ce qui concerne le mode de calcul des contributions ex ante, l’article 4, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 prévoit que le CRU détermine leur montant sur la base du niveau cible annuel, compte tenu du niveau cible final, et sur la base du montant moyen des dépôts couverts de l’année précédente, calculé trimestriellement, pour tous les établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants.

346    En l’espèce, ainsi qu’il ressort du considérant 48 de la décision attaquée, le CRU a fixé, pour la période de contribution 2021, le montant du niveau cible annuel à 11 287 677 212,56 euros.

347    Aux considérants 36 et 37 de la décision attaquée, le CRU a expliqué, en substance, que le niveau cible annuel devait être déterminé sur la base d’une analyse portant sur l’évolution des dépôts couverts au cours des années précédentes, sur toute évolution pertinente de la situation économique ainsi que sur une analyse portant sur les indicateurs relatifs à la phase du cycle d’activité et sur les effets que des contributions procycliques auraient sur la situation financière des établissements. Par la suite, le CRU a considéré approprié de fixer un coefficient qui était fondé sur cette analyse et sur les moyens financiers disponibles dans le FRU (ci-après le « coefficient »). Le CRU a appliqué ce coefficient à un huitième du montant moyen des dépôts couverts en 2020, aux fins d’obtenir le niveau cible annuel.

348    Le CRU a exposé la démarche suivie pour fixer le coefficient aux considérants 38 à 47 de la décision attaquée.

349    Au considérant 38 de la décision attaquée, le CRU a constaté une tendance constante à la hausse des dépôts couverts pour tous les établissements des États membres participants. En particulier, le montant moyen de ces dépôts, calculé trimestriellement, s’élevait pour l’année 2020 à 6,689 billions d’euros.

350    Aux considérants 40 et 41 de la décision attaquée, le CRU a présenté l’évolution pronostiquée des dépôts couverts pour les trois années restantes de la période initiale, à savoir de 2021 à 2023. Il a estimé que les taux annuels de croissance des dépôts couverts jusqu’à la fin de la période initiale se situeraient entre 4 % et 7 %.

351    Aux considérants 42 à 45 de la décision attaquée, le CRU a présenté une évaluation de la phase du cycle d’activité et de l’effet procyclique potentiel que les contributions ex ante pourraient avoir sur la situation financière des établissements. Pour ce faire, il a indiqué avoir tenu compte de plusieurs indicateurs, tels que la prévision de croissance du produit intérieur brut de la Commission et les projections de la BCE à cet égard ou le flux de crédit du secteur privé en pourcentage du produit intérieur brut.

352    Au considérant 46 de la décision attaquée, le CRU a conclu que, s’il était raisonnable de s’attendre à la poursuite de la croissance des dépôts couverts au sein de l’union bancaire, le rythme de cette croissance serait inférieur à celui de l’année 2020. À cet égard, le CRU a indiqué, au considérant 47 de la décision attaquée, avoir adopté une « approche prudente » en ce qui concernait les taux de croissance des dépôts couverts pour les années à venir jusqu’à 2023.

353    Au regard de ces considérations, le CRU a fixé, au considérant 48 de la décision attaquée, la valeur du coefficient à 1,35 %. Il a ensuite calculé le montant du niveau cible annuel, en multipliant le montant moyen des dépôts couverts en 2020 par ce coefficient et en divisant le résultat de ce calcul par huit, conformément à la formule mathématique suivante, figurant au considérant 48 de ladite décision :

« Cible0 [montant du niveau cible annuel] = Total dépôts couverts2020 * 0,0135 * ⅛ = EUR 11 287 677 212,56 ».

354    Lors de l’audience, le CRU a cependant indiqué qu’il avait déterminé le niveau cible annuel pour la période de contribution 2021 comme suit.

355    Premièrement, sur la base d’une analyse prospective, le CRU a fixé le montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants, pronostiqué pour la fin de la période initiale, à environ 7,5 billions d’euros. Pour aboutir à ce montant, le CRU a pris en compte le montant moyen des dépôts couverts en 2020, à savoir 6,689 billions d’euros, un taux de croissance annuel des dépôts couverts de 4 % ainsi que le nombre de périodes de contribution restantes jusqu’à la fin de la période initiale, à savoir trois.

356    Deuxièmement, conformément à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, le CRU a calculé 1 % de ces 7,5 billions d’euros pour obtenir le montant estimé du niveau cible final devant être atteint le 31 décembre 2023, à savoir environ 75 milliards d’euros.

357    Troisièmement, le CRU a déduit de ce dernier montant les ressources financières déjà disponibles dans le FRU en 2021, c’est-à-dire environ 42 milliards d’euros, pour obtenir le montant qu’il restait à percevoir pendant les périodes de contribution restantes avant la fin de la période initiale, à savoir de 2021 à 2023. Ce montant s’élevait à environ 33 milliards d’euros.

358    Quatrièmement, le CRU a divisé ce dernier montant par trois pour le répartir uniformément entre lesdites trois périodes de contribution restantes. Le niveau cible annuel pour la période de contribution 2021 a été ainsi fixé au montant mentionné au point 346 ci-dessus, à savoir environ 11,287 milliards d’euros.

359    Le CRU a également affirmé, lors de l’audience, qu’il avait rendu publics des éléments d’information sur lesquels avait été fondée la méthode décrite aux points 355 à 358 ci-dessus et qui auraient permis à la requérante de comprendre la méthode par laquelle le niveau cible annuel avait été déterminé. En particulier, il a précisé qu’il avait publié sur son site Internet, en mai 2021, c’est-à-dire après l’adoption de la décision attaquée, mais avant l’introduction du présent recours, une fiche descriptive dénommée « Fact Sheet 2021 » (ci-après la « fiche descriptive »), qui indiquait le montant estimé du niveau cible final. De même, le CRU a affirmé que le montant des moyens financiers disponibles dans le FRU était également disponible sur son site Internet ainsi que par le biais d’autres sources publiques, et ce bien avant l’adoption de la décision attaquée.

360    Afin d’examiner si le CRU a respecté son obligation de motivation en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel, il convient tout d’abord de rappeler qu’un défaut ou une insuffisance de motivation constitue un moyen d’ordre public pouvant, voire devant, être soulevé d’office par le juge de l’Union (voir arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 34 et jurisprudence citée). Par conséquent, le Tribunal peut, voire doit, prendre en compte également d’autres défauts de motivation que ceux invoqués par la requérante, et ce, notamment, lorsque ceux-ci se révèlent au cours de la procédure.

361    À cette fin, les parties ont été entendues, au cours de la phase orale de la procédure, sur tous les éventuels défauts de motivation dont serait entachée la décision attaquée en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel. En particulier, interrogé expressément et à plusieurs reprises à cet égard, le CRU a décrit, étape par étape, la méthode qu’il avait réellement suivie pour déterminer le niveau cible annuel pour la période de contribution 2021, telle qu’elle est exposée aux points 355 à 358 ci-dessus.

362    En ce qui concerne, ensuite, le contenu de l’obligation de motivation, il ressort de la jurisprudence que la motivation d’une décision prise par une institution ou un organe de l’Union doit être, notamment, dépourvue de contradictions pour permettre aux intéressés de connaître les motifs réels de cette décision, en vue de défendre leurs droits devant la juridiction compétente, et à cette dernière d’exercer son contrôle (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 169 et jurisprudence citée ; du 22 septembre 2005, Suproco/Commission, T‑101/03, EU:T:2005:336, points 20 et 45 à 47, et du 16 décembre 2015, Grèce/Commission, T‑241/13, EU:T:2015:982, point 56).

363    De même, lorsque l’auteur de la décision attaquée fournit certaines explications concernant les motifs de celle-ci au cours de la procédure devant le juge de l’Union, ces explications doivent être cohérentes avec les considérations exposées dans cette décision (voir, en ce sens, arrêts du 22 septembre 2005, Suproco/Commission, T‑101/03, EU:T:2005:336, points 45 à 47, et du 13 décembre 2016, Printeos e.a./Commission, T‑95/15, EU:T:2016:722, points 54 et 55).

364    En effet, si les considérations exposées dans la décision attaquée ne sont pas cohérentes avec de telles explications fournies lors de la procédure juridictionnelle, la motivation de la décision concernée ne remplit pas les fonctions rappelées aux points 299 et 300 ci-dessus. En particulier, une telle incohérence empêche, d’une part, les intéressés de connaître les motifs réels de la décision attaquée, avant l’introduction du recours, et de préparer leur défense à leur égard et, d’autre part, le juge de l’Union d’identifier les motifs ayant servi de véritable support juridique à cette décision et d’examiner leur conformité aux règles applicables.

365    Enfin, il y a lieu de rappeler que, lorsque le CRU adopte une décision fixant les contributions ex ante, il doit porter à la connaissance des établissements concernés la méthode de calcul de ces contributions (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 122).

366    Il doit en aller de même pour la méthode de détermination du niveau cible annuel, ce montant revêtant une importance essentielle dans l’économie d’une telle décision. En effet, ainsi qu’il ressort du point 15 ci-dessus, le mode de calcul des contributions ex ante consiste en la répartition dudit montant entre tous les établissements concernés, de sorte qu’une augmentation ou une réduction de ce même montant entraîne une augmentation ou une réduction correspondante de la contribution ex ante de chacun de ces établissements.

367    Il ressort de ce qui précède que, si le CRU est tenu de fournir aux établissements, par le biais de la décision attaquée, des explications concernant la méthode de détermination du niveau cible annuel, ces explications doivent être cohérentes avec les explications fournies par le CRU pendant la procédure juridictionnelle et portant sur la méthode réellement appliquée.

368    Or, tel n’est pas le cas dans la présente affaire.

369    En effet, il convient tout d’abord de relever que la décision attaquée a exposé, au considérant 48, une formule mathématique qu’elle a présentée comme étant à la base de la détermination du niveau cible annuel. Or, il s’avère que cette formule n’intègre pas les éléments de la méthode réellement appliquée par le CRU, telle qu’explicitée lors de l’audience. En effet, ainsi qu’il ressort des points 355 à 358 ci-dessus, le CRU a obtenu le montant du niveau cible annuel, dans le cadre de cette méthode, en déduisant du niveau cible final les moyens financiers disponibles dans le FRU, en vue de calculer le montant qu’il restait à percevoir jusqu’à la fin de la période initiale et en divisant ce dernier montant par trois. Or, ces deux étapes du calcul ne trouvent aucune expression dans ladite formule mathématique.

370    Il résulte, certes, de l’argumentation de la requérante, dans le cadre du présent moyen, que celle-ci avait connaissance de la fiche descriptive et, par conséquent, des éventuels montants du niveau cible final indiqués dans la fourchette qui y était incluse. Cependant, à supposer qu’elle ait connu également le montant des moyens financiers disponibles dans le FRU, ces circonstances seules n’étaient pas de nature à lui permettre de comprendre que les deux opérations mentionnées au point 369 ci-dessus avaient été effectivement appliquées par le CRU, étant précisé, au surplus, que la formule mathématique prévue au considérant 48 de la décision attaquée ne les mentionnait même pas.

371    Des incohérences similaires affectent également la manière dont a été fixé le coefficient de 1,35 %, qui joue pourtant un rôle primordial dans la formule mathématique mentionnée au point 370 ci-dessus. En effet, ce coefficient pourrait être compris en ce sens qu’il est fondé, parmi d’autres paramètres, sur la croissance pronostiquée des dépôts couverts pendant les années restantes de la période initiale. Or, comme le CRU l’a reconnu lors de l’audience, ce coefficient a été fixé de manière à pouvoir justifier le résultat du calcul du montant du niveau cible annuel, c’est-à-dire après que le CRU a calculé ce montant en application des quatre étapes exposées aux points 355 à 358 ci-dessus et, notamment, par la division par trois du montant issu de la déduction des moyens financiers disponibles dans le FRU du niveau cible final. Or, cette démarche ne ressort aucunement de la décision attaquée.

372    En outre, il convient de rappeler que, selon la fiche descriptive, le montant du niveau cible final estimé se situait dans une fourchette comprise entre 70 et 75 milliards d’euros. Or, cette fourchette s’avère incohérente avec la fourchette du taux de croissance des dépôts couverts comprise entre 4 % et 7 % figurant au considérant 41 de la décision attaquée. En effet, le CRU a indiqué à l’audience que, aux fins de la détermination du niveau cible annuel, il avait tenu compte du taux de croissance des dépôts couverts de 4 % – qui était le taux le plus bas de la seconde fourchette – et qu’il avait ainsi obtenu le niveau cible final estimé de 75 milliards d’euros – qui constituait la valeur la plus élevée de la première fourchette. Il s’avère ainsi qu’il existe une discordance entre ces deux fourchettes. En effet, d’une part, la fourchette portant sur le taux d’évolution des dépôts couverts comprend également des valeurs supérieures au taux de 4 %, dont l’application aurait pourtant abouti à un montant estimé du niveau cible final supérieur à ceux inclus dans la fourchette relative à ce niveau cible. D’autre part, il est impossible pour la requérante de comprendre la raison pour laquelle le CRU a inclus dans la fourchette afférente audit niveau cible des montants inférieurs à 75 milliards d’euros. En effet, pour y aboutir, il aurait été nécessaire d’appliquer un taux en deçà de 4 %, qui n’est pourtant pas compris dans la fourchette relative au taux de croissance des dépôts couverts. Dans ces conditions, la requérante n’était pas en mesure de déterminer la manière dont le CRU avait utilisé la fourchette portant sur le taux d’évolution de ces dépôts pour aboutir au calcul du niveau cible final estimé.

373    Il s’ensuit que, en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel, la méthode réellement appliquée par le CRU, telle qu’explicitée lors de l’audience, ne correspond pas à celle décrite dans la décision attaquée, de sorte que les motifs réels, au regard desquels a été fixé ce niveau cible, ne pouvaient être identifiés sur la base de la décision attaquée ni par les établissements ni par le Tribunal.

374    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de constater que la décision attaquée est entachée de vices de motivation en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel.

375    La deuxième branche du premier moyen doit ainsi être accueillie. Compte tenu des enjeux juridiques et économiques de la présente affaire, il est pourtant dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de poursuivre l’examen des autres moyens du recours.

e)      Sur la troisième branche, portant sur la motivation insuffisante de la contribution annuelle de base

376    La requérante fait valoir que le CRU n’a pas précisé tous les éléments concrets du calcul de la contribution annuelle de base en ce qui concerne la requérante. La fiche individuelle ne contiendrait pas, notamment, le dénominateur qui doit être appliqué à cette contribution, à savoir la somme des passifs nets de tous les établissements concernés, adaptée conformément à l’article 5 du règlement délégué 2015/63, ni le « montant […] de la contribution de base de la requérante après application de la formule énoncée dans la décision [attaquée] ».

377    Le CRU conteste cette argumentation.

378    À titre liminaire, il convient de rappeler que, s’agissant des établissements qui doivent verser une contribution ex ante ajustée à leurs profils de risque, le calcul de cette contribution se fait, en substance, en deux étapes.

379    Dans la première étape, le CRU calcule une contribution annuelle de base en fonction du passif net de l’établissement concerné, conformément à l’article 70, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 et à l’article 103, paragraphe 2, de la directive 2014/59. En vertu de l’article 5 du règlement délégué 2015/63, certains passifs sont déduits de ce passif net.

380    Dans la seconde étape, le CRU adapte la contribution annuelle de base au profil de risque de l’établissement concerné, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous b), du règlement no 806/2014 et à l’article 103, paragraphe 2, second alinéa, de la directive 2014/59.

381    La troisième branche du premier moyen vise la première étape du calcul des contributions ex ante.

382    Aux considérants 62 à 65 de la décision attaquée, le CRU a expliqué la méthode de détermination du numérateur et du dénominateur servant de base pour ce calcul.

383    Par ailleurs, à la page 1 de la fiche individuelle, le CRU a exposé, sous le titre « Contribution annuelle de base (CAB) : numérateur », la valeur du numérateur qui avait été prise en compte pour calculer la contribution annuelle de base de la requérante ainsi que les données sur la base desquelles cette dernière avait été calculée.

384    En outre, à la page 2 de la fiche individuelle, sous le titre « Calcul de la contribution brute ([règlement délégué 2015/63], annexe 1, ‟étape 6”) », la décision attaquée a exposé la valeur du dénominateur qui avait été prise en compte pour ce calcul.

385    Il s’ensuit que la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, de quelle façon sa situation individuelle avait été prise en compte, conformément à la jurisprudence citée au point 306 ci-dessus.

386    Il est vrai que le CRU n’a pas décomposé, ni dans le corps de la décision attaquée ni dans les annexes de cette décision, le dénominateur de la contribution annuelle de base en fonction des éléments qui le constituaient, à savoir la somme des passifs nets de tous les établissements concernés, ajustée conformément à l’article 5 du règlement délégué 2015/63.

387    Cependant, ainsi que la requérante l’a admis à l’audience, ces éléments englobent les données individualisées de tous les établissements concernés.

388    Or, de tels éléments ne s’avèrent pas nécessaires pour permettre à la requérante de comprendre, en substance, de quelle façon sa situation individuelle a été prise en compte, aux fins du calcul de sa contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés.

389    Par conséquent, imposer au CRU une exigence de communication desdits éléments irait au-delà des exigences prévues par la jurisprudence citée aux points 306, 309 et 310 ci-dessus.

390    La troisième branche du premier moyen doit ainsi être rejetée.

f)      Sur la quatrième branche, portant sur la motivation insuffisante de l’ajustement de la contribution annuelle de base au risque

391    La quatrième branche du premier moyen s’articule, en substance, autour de trois griefs.

1)      Sur le premier grief, portant sur l’impossibilité de vérifier l’assujettissement de l’ensemble des établissements concernés à une contribution ajustée en fonction du profil de risque

392    Selon la requérante, il est impossible de vérifier si l’ensemble des établissements a effectivement été soumis à un ajustement au risque, étant donné qu’il existe une divergence entre, d’une part, le nombre d’établissements figurant dans les statistiques publiées sur le site Internet du CRU et, d’autre part, le nombre de ceux-ci indiqué dans la fiche descriptive.

393    Le CRU  conteste cette argumentation.

394    Tout d’abord, il y a lieu de relever que, conformément à l’article 9, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, le CRU calcule le multiplicateur d’ajustement pour tous les établissements, hormis ceux qui sont éligibles au versement d’une contribution forfaitaire en vertu de l’article 10 de ce règlement délégué et ceux qui sont mentionnés à l’article 11 dudit règlement délégué, en combinant les indicateurs de risque mentionnés à l’article 6 du règlement délégué 2015/63 conformément à la formule mathématique et aux procédures exposées à l’annexe I de ce règlement délégué.

395    Ensuite, dans la mesure où l’argumentation de la requérante devrait être comprise en ce sens qu’elle reproche au CRU de ne pas avoir identifié dans la décision attaquée, par leur dénomination, tous les établissements participant au MRU dont la contribution ex ante avait été adaptée à leur profil de risque, il convient de relever que la requérante n’a pas présenté au Tribunal d’éléments de preuve sur la base desquels il serait possible de conclure que cette information était pertinente pour comprendre la manière dont sa situation individuelle avait été prise en compte aux fins du calcul de sa contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés, en vertu de la jurisprudence citée au point 306 ci-dessus.

396    Enfin, dans la mesure où l’argumentation de la requérante devrait être comprise comme exigeant du CRU de communiquer le seul nombre d’établissements pour lesquels la contribution ex ante avait été ajustée en fonction de leur profil de risque pour la période de contribution 2021, force est de constater que l’annexe II de la décision attaquée permet d’identifier le nombre de tels établissements. En effet, en ce qui concerne la partie des contributions ex ante calculée sur la base nationale, ce nombre peut être vérifié, pour chaque État membre, dans la rubrique « N », aux pages 6 à 131 de l’annexe II de la décision attaquée. Il en va de même pour la partie des contributions ex ante calculée sur la base de l’union, dont les statistiques sont exposées aux pages 132 à 137 de l’annexe II de cette décision. Il ressort ainsi de ces statistiques que, pour la période de contribution 2021, un total de 1 627 établissements ont été soumis à une contribution ex ante ajustée à leur profil de risque.

397    Eu égard à ce qui précède, le premier grief de la quatrième branche du premier moyen doit être rejeté.

2)      Sur le deuxième grief, portant sur la prise en compte de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité »

398    La requérante  soutient que le CRU n’a pas fourni de motivation suffisante quant à la détermination de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », en n’exposant pas, notamment, son analyse des éléments qui conduisaient à l’augmentation du profil de risque des établissements et qui étaient énoncés à l’article 6, paragraphe 6, sous a), i) à iv), du règlement délégué 2015/63. Or, le CRU aurait exposé une telle analyse pour les éléments qui conduisaient à la diminution du profil de risque des établissements et qui étaient définis à l’article 6, paragraphe 6, sous b), i) et ii), de ce règlement délégué.

399    Le CRU  conteste cette argumentation.

400    Il convient de relever, en premier lieu, que les sous-indicateurs relatifs à l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » sont déterminés par le CRU conformément aux conditions posées par l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63.

401    En second lieu, aux considérants 98 à 100 de la décision attaquée, le CRU a expliqué de quelle manière il avait déterminé les sous-indicateurs de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ». Le CRU y a, notamment, inclus une liste de ceux-ci, accompagnée de leurs définitions, et a expliqué, d’une part, les données précises qui constituaient ces sous-indicateurs et, d’autre part, la manière dont il avait pondéré lesdits sous-indicateurs aux fins du calcul de ce pilier de risque.

402    Une telle motivation permet à la requérante de comprendre la manière dont le CRU a appliqué l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » et répond ainsi aux exigences énoncées par la jurisprudence citée aux points 306, 309 et 310 ci-dessus.

403    Eu égard à ce qui précède, le deuxième grief de la quatrième branche du premier moyen doit être rejeté.

3)      Sur le troisième grief, portant sur la motivation des étapes 1 à 6 de l’adaptation de la contribution annuelle de base au profil de risque de la requérante

404    La requérante soutient que la motivation des étapes 1 à 6 de l’adaptation de la contribution annuelle de base à son profil de risque, telles que décrites dans la fiche individuelle, est insuffisante.

405    Le CRU conteste cette argumentation.

406    Afin d’apprécier le présent grief, il y a lieu d’examiner si la requérante disposait de la méthode de calcul utilisée par le CRU et d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, de quelle façon sa situation individuelle avait été prise en compte, aux fins du calcul de sa contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés, à travers les différentes étapes de ce calcul, telles qu’elles sont définies à l’annexe I du règlement délégué 2015/63.

i)      Étape 1

407    Lors de l’étape 1, le CRU calcule, pour chaque indicateur et sous-indicateur de risque, l’« indicateur brut ». S’agissant des trois premiers piliers de risque, l’indicateur brut est calculé sur la base des définitions et des opérations énoncées au tableau reproduit à l’annexe I, sous le titre « Étape 1 », du règlement délégué 2015/63. Quant au pilier de risque IV, l’indicateur brut est calculé sur la base des définitions et des opérations énoncées aux considérants 98 à 101 de la décision attaquée. Tous les indicateurs bruts sont calculés en tenant compte des informations fournies par chaque établissement. Ces indicateurs bruts, tels que retenus par le CRU aux fins du calcul de la contribution ex ante de chaque établissement, ont ensuite été reproduits dans la fiche individuelle.

408    Dans la mesure où la fiche individuelle a été communiquée à la requérante, celle-ci disposait des éléments suffisants pour pouvoir vérifier, en substance, le calcul des indicateurs bruts qui la concernaient.

409    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel le CRU s’est abstenu d’indiquer, dans le cadre du pilier de risque « importance de l’établissement pour la stabilité du système financier ou de l’économie », le dénominateur pour le calcul de l’indicateur de risque « part des prêts et dépôts interbancaires dans l’Union européenne », tel qu’il figurait à l’annexe I, sous le titre « Étape 1 », septième ligne, du règlement délégué 2015/63.

410    À cet égard, la requérante n’a soumis au Tribunal aucun élément qui expliquerait en quoi la connaissance d’une telle donnée lui aurait permis de comprendre, en substance, de quelle façon sa situation individuelle avait été prise en compte, aux fins du calcul de sa contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés. En effet, pour cet indicateur de risque, la requérante peut vérifier sa position par rapport aux autres établissements en se fondant sur sa propre part des prêts et des dépôts interbancaires, telle qu’elle figure aux rubriques 4C6 et 4C7, sous le titre « Autres données déclarées utilisées dans le calcul », à la page 3 de la fiche individuelle. Elle peut, par la suite, comparer cette valeur avec les valeurs limites du bin auquel elle a été assignée pour ledit indicateur de risque, ces valeurs limites étant portées à sa connaissance à la page 31 (en ce qui concerne la base nationale) et à la page 133 (en ce qui concerne la base de l’union) de l’annexe II de la décision attaquée.

411    En outre, et en tout état de cause, la requérante pouvait prendre connaissance du montant du dénominateur de la formule que le CRU avait utilisé pour calculer ledit indicateur de risque, à savoir la somme de l’ensemble des prêts et des dépôts interbancaires détenus par les établissements dans chaque État membre ou dans l’union bancaire, en multipliant le nombre total d’établissements (N) par la valeur moyenne de cet indicateur [Moy. (Image not found)]. Les données pour effectuer cette multiplication se trouvent également aux pages 31 et 133 de l’annexe II de la décision attaquée.

ii)    Étape 2

412    Lors de l’étape 2, pour chaque indicateur brut calculé à l’étape 1 pour chacun des indicateurs et des sous-indicateurs de risque et à l’exception de l’indicateur « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel », le CRU procède aux opérations suivantes. Il calcule, dans un premier temps, un nombre de bins afin de comparer les indicateurs bruts des établissements. Dans un deuxième temps, le CRU assigne le même nombre d’établissements à chaque bin, en commençant par assigner au premier bin les établissements pour lesquels les valeurs de l’indicateur brut sont les plus faibles. De cette manière, chaque bin a des valeurs limites, qui sont déterminées par l’indicateur brut le plus faible et l’indicateur brut le plus élevé. Dans un troisième temps, le CRU assigne à tous les établissements figurant dans un bin donné l’« indicateur discrétisé » pour ce bin, dénommé , qui représente la valeur de l’ordre de ce bin, de la gauche vers la droite, de façon que l’indicateur discrétisé soit défini comme étant égal à 1, 2, 3 et jusqu’au chiffre du dernier bin.

413    En ce qui concerne, en premier lieu, le calcul du nombre de bins, celui-ci se fonde sur la formule mathématique prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 2, du règlement délégué 2015/63. Cette formule est composée des trois éléments suivants :

–        le nombre d’établissements contribuant au FRU, dénommé N ;

–        la valeur , qui est calculée sur le fondement de ce nombre d’établissements N ;

–        la valeur , qui est calculée sur la base de ce même nombre d’établissements N, de la moyenne des indicateurs bruts en question, dénommé Image not found, et des indicateurs bruts de chaque établissement, dénommés .

414    Ainsi qu’il ressort du point 396 ci-dessus, la requérante pouvait prendre connaissance du nombre d’établissements N contribuant au FRU.

415    Par ailleurs, le CRU a communiqué, aux pages 30 à 34 et 132 à 136 de l’annexe II de la décision attaquée, les valeurs et ainsi que la moyenne des indicateurs bruts Image not found pour chaque indicateur et sous-indicateur de risque.

416    Enfin, il ressort des considérations exposées aux points 326 à 336 ci-dessus que le CRU n’était pas tenu de communiquer aux établissements les indicateurs bruts de tous les autres établissements concernés.

417    De ce fait, pour ce qui est du calcul du nombre de bins, le CRU a fourni aux établissements la transparence la plus étendue, dans les limites imposées par son obligation de respecter le secret des affaires de ces derniers, de sorte que la requérante disposait d’éléments suffisants pour comprendre, en substance, la manière dont le CRU avait effectué ce calcul.

418    En deuxième lieu, d’une part, la requérante avait accès aux valeurs minimales et maximales de chaque bin, pour chacun des indicateurs ou des sous-indicateurs de risque, puisque celles-ci figuraient aux pages 30 à 34 et 132 à 136 de l’annexe II de la décision attaquée. D’autre part, elle connaissait les indicateurs bruts qui avaient été retenus par le CRU pour le calcul de sa contribution ex ante, ces indicateurs figurant dans sa fiche individuelle. La requérante pouvait ainsi vérifier si les indicateurs bruts qui lui avaient été attribués étaient compris entre les valeurs minimales et maximales des bins auxquels elle avait été assignée.

419    En troisième lieu, les établissements peuvent vérifier, dans la fiche individuelle, l’indicateur discrétisé qui leur a été assigné pour un indicateur ou un sous-indicateur de risque donné.

420    Dans ces conditions, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, les opérations effectuées lors de l’étape 2.

421    Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

422    La requérante soutient tout d’abord que, dans le cadre de l’application de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 3, du règlement délégué 2015/63, il est impossible de vérifier si les établissements présentant le même indicateur brut ont bien été assignés au même bin. Ainsi, le CRU aurait dû fournir une liste de classement de tous les établissements, afin que la requérante soit en mesure de vérifier si leur répartition dans les différents bins était correcte. En outre, puisque la décision attaquée ne contient pas de détails concernant le troisième stade de l’étape 2, à savoir l’assignation aux établissements de l’indicateur discrétisé, la requérante n’aurait pas pu vérifier l’indicateur discrétisé qui lui a été attribué pour les différents indicateurs de risque.

423    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 303 ci-dessus, l’obligation de motivation n’exige pas que la requérante ait accès à tous les éléments lui permettant de vérifier l’exactitude du calcul de sa contribution ex ante.

424    En particulier, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 308 ci-dessus, le CRU n’est pas tenu de fournir à la requérante des données couvertes par le secret des affaires relatives à la situation économique de chacun des autres établissements concernés.

425    Or, le CRU a pu légitimement considérer que l’indicateur discrétisé assigné à un établissement était couvert par le secret des affaires. En effet, le CRU pouvait estimer qu’une éventuelle divulgation de cette information risquerait de révéler la situation économique d’un tel établissement et, notamment, le niveau de risque encouru par ce dernier pour certaines activités financières, en permettant d’effectuer une comparaison directe de ce niveau de risque avec celui encouru par les autres établissements.

iii) Étape 3

426    Lors de l’étape 3, le CRU rééchelonne, pour chaque indicateur et sous-indicateur de risque, les indicateurs discrétisés résultant de l’étape 2 sur une échelle de 1 à 1 000 afin d’obtenir un « indicateur rééchelonné », dénommé .

427    Pour calculer cet indicateur rééchelonné, le CRU applique une formule qui a recours aux trois éléments suivants :

–        l’indicateur discrétisé assigné à l’établissement concerné lors de l’étape 2 ;

–        l’argument de fonction maximum, dont la valeur correspond au chiffre du dernier bin pour l’indicateur ou le sous-indicateur de risque concerné ;

–        l’argument de fonction minimum, dont la valeur correspond au chiffre du premier bin pour l’indicateur ou le sous-indicateur de risque en question.

428    La requérante avait accès à ces éléments. D’une part, l’indicateur discrétisé est le résultat de l’opération de l’étape 2 qui est décrite au point 412 ci-dessus. D’autre part, les valeurs des arguments de fonction maximum et minimum mentionnées au point 427 ci-dessus figurent aux pages 30 à 34 et 132 à 136 de l’annexe II de la décision attaquée, aux lignes « Bin min. » et « Bin max. ».

429    Par conséquent, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre l’opération effectuée lors de l’étape 3 et obtenir ainsi l’indicateur rééchelonné.

iv)    Étape 4

430    À l’étape 4, pour chaque indicateur et sous-indicateur de risque, le CRU calcule l’« indicateur rééchelonné transformé », dénommé .

431    À cet égard, l’annexe I, sous le titre « Étape 4 », point 1, du règlement délégué 2015/63, affecte à chaque indicateur de risque soit un signe positif, soit un signe négatif. Pour les indicateurs de risque affectés d’un signe positif, plus les valeurs sont élevées, plus le profil de risque de l’établissement est élevé. Pour les indicateurs de risque affectés d’un signe négatif, plus les valeurs sont élevées, plus le profil de risque de l’établissement est faible.

432    Une fois le signe appliqué, le CRU calcule les indicateurs rééchelonnés transformés, conformément à la formule prévue à cet effet à l’annexe I, sous le titre « Étape 4 », point 2, du règlement délégué 2015/63.

433    Le calcul de l’indicateur rééchelonné transformé est effectué en employant l’indicateur rééchelonné obtenu au cours de l’étape 3. Ainsi, si le signe appliqué à l’indicateur de risque concerné est négatif, l’indicateur rééchelonné transformé a la même valeur que l’indicateur rééchelonné. En revanche, si le signe appliqué à l’indicateur de risque en cause est positif, il convient de déduire l’indicateur rééchelonné du nombre 1 001, conformément à la formule .

434    Tout d’abord, compte tenu de la nature des opérations mentionnées au point 433 ci-dessus, qui soit n’impliquent aucun calcul, soit se limitent à des calculs simples sans utilisation de données supplémentaires, la requérante ne saurait prétendre qu’elle ne disposait pas d’informations suffisantes pour vérifier lesdites opérations effectuées par le CRU.

435    Ensuite, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel, dans le cadre de l’étape 4, le CRU n’a pas expliqué les raisons pour lesquelles il avait appliqué systématiquement un signe positif aux indicateurs de risque du pilier de risque IV.

436    Sur ce point, le CRU a précisé, au considérant 112 de la décision attaquée, que l’application d’un signe négatif ou positif dépendait du caractère de l’indicateur de risque donné. Ensuite, il a rappelé que, pour les indicateurs affectés d’un signe positif, plus les valeurs étaient élevées, plus le profil de risque de l’établissement était élevé. Ainsi, le CRU a appliqué à tous les indicateurs de risque qui composaient le pilier de risque IV, à l’exception de l’indicateur de risque SPI, un signe positif, puisque plus les valeurs pour ces indicateurs étaient élevées, plus le profil de risque de l’établissement était élevé.

437    Enfin, la requérante a tort de soutenir qu’elle ne peut pas vérifier les opérations effectuées lors de l’étape 4, car celles-ci s’appuient sur les valeurs résultant de l’étape 3, qu’elle n’est pas en mesure de connaître.

438    En effet, comme cela a été exposé aux points 426 à 428 ci-dessus, la requérante peut calculer elle-même les indicateurs rééchelonnés qui lui ont été appliqués, de sorte qu’elle peut également vérifier si le résultat de leur transformation lors de l’étape 4 – qui figure dans la colonne « Score du bin (TRI) » de sa fiche individuelle – est correct.

v)      Étape 5

439    Lors de l’étape 5, le CRU effectue les opérations suivantes.

440    Dans un premier temps, le CRU agrège les indicateurs de risque i au sein de chaque pilier de risque j selon une moyenne arithmétique pondérée, en appliquant la formule prévue à cet effet à l’annexe I, sous le titre « Étape 5 », point 1, du règlement délégué 2015/63.

441    Cette formule est résolue sur la base, d’une part, de la pondération de l’indicateur de risque concerné au sein du pilier de risque donné, dénommée , et, d’autre part, de l’indicateur rééchelonné transformé. Or, de telles pondérations figurent non seulement à l’article 7, paragraphes 2 à 4, du règlement délégué 2015/63, mais aussi dans la fiche individuelle de la requérante et à la page 5 de l’annexe II de la décision attaquée. En outre, l’indicateur rééchelonné transformé a été obtenu au cours de l’étape 4.

442    Dans ces conditions, la requérante ne saurait prétendre qu’elle n’avait pas accès aux données nécessaires pour résoudre ladite formule.

443    Dans un deuxième temps, le CRU agrège les piliers de risque j pour obtenir l’« indicateur composite », dénommé , selon une moyenne géométrique pondérée, en appliquant la formule prévue à cet effet à l’annexe I, sous le titre « Étape 5 », point 2, du règlement délégué 2015/63.

444    Cette formule est résolue sur la base de la pondération des piliers de risque, dénommée , prévue à l’article 7, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 et des valeurs obtenues à la suite de l’agrégation des indicateurs de risque au sein de chaque pilier de risque, dans le cadre de l’opération décrite aux points 440 et 441 ci-dessus. Ces dernières valeurs sont communiquées à la requérante dans sa fiche individuelle.

445    Dans un troisième temps, le CRU adapte l’indicateur composite en appliquant la formule prévue à cet effet à l’annexe I, sous le titre « Étape 5 », point 3, du règlement délégué 2015/63, à savoir 1 000 , pour obtenir l’« indicateur composite final », dénommé . Par conséquent, les établissements ayant un profil de risque plus élevé obtiennent un indicateur composite final plus élevé.

446    Dans ce contexte, la requérante soutient que, dans le cadre de l’étape 5, le CRU aurait dû expliquer, d’une part, la procédure d’agrégation des indicateurs de risque au sein de chaque pilier de risque, en tenant compte, notamment, des pondérations relatives des indicateurs prescrites à l’article 7 du règlement délégué 2015/63 et en exposant comment il avait abouti à l’agrégation desdits indicateurs et, d’autre part, la manière dont l’indicateur composite avait été obtenu. Il en irait d’autant plus ainsi que, lors de la période de contribution 2021, certains de ces mêmes indicateurs n’ont pas été appliqués par le CRU et que leur pondération a, par conséquent, dû être répartie.

447    À cet égard, il convient tout d’abord de relever que, ainsi qu’il ressort des points 439 à 445 ci-dessus, le processus d’agrégation des indicateurs de risque est fondé sur les formules prévues à l’annexe I, sous le titre « Étape 5 », points 1 à 3, du règlement délégué 2015/63.

448    Ensuite, il découle de ces mêmes points que la requérante disposait de tous les éléments nécessaires pour résoudre lesdites formules.

449    Enfin, le CRU a expliqué au considérant 94 de la décision attaquée que, comme certains indicateurs de risque n’avaient pas été appliqués lors de la période de contribution 2021, les pondérations des indicateurs de risque disponibles avaient été proportionnellement rééchelonnées, de sorte que la somme de leurs pondérations atteigne 100 %, étant entendu qu’un tel redimensionnement était prévu à l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63.

450    Eu égard à ce qui précède, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre les opérations prévues lors de l’étape 5 et mises en œuvre par le CRU.

vi)    Étape 6

451    Lors de l’étape 6, le CRU effectue les deux opérations suivantes.

452    Dans un premier temps, le CRU calcule le multiplicateur d’ajustement, dénommé , en rééchelonnant l’indicateur composite final résultant de l’étape 5 sur une échelle allant de 0,8 à 1,5, conformément à la formule prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 1, du règlement délégué 2015/63.

453    Pour résoudre cette formule, le CRU s’appuie sur trois types de données, à savoir :

–        l’indicateur composite final de l’établissement concerné ;

–        l’argument de fonction minimum de l’indicateur composite final, dénommée , qui correspond à la valeur minimale de cet indicateur pour tous les établissements contribuant au FRU pour lesquels un tel indicateur est calculé ;

–        l’argument de fonction maximum de l’indicateur composite final, dénommée , qui correspond à la valeur maximale de ce même indicateur pour lesdits établissements.

454    L’indicateur composite final de l’établissement concerné résulte de l’étape 5. En outre, les fonctions minimum et maximum, mentionnées au point 453 ci-dessus, sont des données qui sont identiques pour tous les établissements dont la contribution annuelle de base est ajustée selon leur profil de risque. Ces données figurent dans la fiche individuelle de chaque établissement ainsi qu’à la page 4 de l’annexe II de la décision attaquée, dans la quatrième et la cinquième colonne du tableau qui y figure, intitulées respectivement « k » et « l ». Par conséquent, la requérante avait accès aux données nécessaires pour résoudre la formule prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 1, du règlement délégué 2015/63.

455    Dans un second temps, le CRU calcule la contribution finale de l’établissement concerné, dénommée , selon la formule exposée à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 2, du règlement délégué 2015/63.

456    Ce calcul est effectué sur la base de cinq données, à savoir :

–        le niveau cible annuel ajusté conformément à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 2, du règlement délégué 2015/63, dénommé « Target » ;

–        le passif net de l’établissement donné ajusté selon l’article 5 du règlement délégué 2015/63, qui constitue le numérateur de la contribution annuelle de base, dénommé ;

–        la somme des contributions annuelles de base ajustées au risque de tous les établissements concernés, dénommée ;

–        le passif net cumulé de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants, qui constitue le dénominateur de la contribution annuelle de base, dénommé ;

–        le multiplicateur d’ajustement de l’établissement donné.

457    Le passif net de la requérante, ajusté selon l’article 5 du règlement délégué 2015/63, et son multiplicateur d’ajustement ainsi que le passif net cumulé de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants ont été communiqués à la requérante dans sa fiche individuelle. Par ailleurs, l’annexe II de la décision attaquée a indiqué, à la page 4, le niveau cible annuel ajusté – dans la première colonne, intitulée « h », du tableau y figurant – ainsi que la somme des contributions annuelles de base ajustées au risque de tous les établissements concernés, cette somme étant reproduite dans la troisième colonne, intitulée « j », du même tableau.

458    Enfin, des explications supplémentaires concernant l’étape 6 ont été fournies par le CRU aux considérants 118 à 121 de la décision attaquée.

459    Dans ces conditions, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre les calculs de l’étape 6.

460    Cette conclusion n’est pas infirmée par l’argumentation de la requérante.

461    S’agissant du calcul du multiplicateur d’ajustement, lors de l’étape 6, mentionné aux points 452 et 453 ci-dessus, la requérante a tort de soutenir que, en l’absence de communication des indicateurs composites finals de tous les établissements, elle ne serait pas en mesure de savoir si les valeurs des arguments des fonctions minimum et maximum des indicateurs composites finals, mentionnées au point 453 ci-dessus, ne constituent pas des exceptions conduisant à une déformation des multiplicateurs d’ajustement.

462    Sur ce point, il ressort de la jurisprudence citée au point 301 ci‑dessus que l’obligation de motivation n’exige pas que la requérante ait accès à tous les éléments lui permettant de vérifier l’exactitude du calcul de sa contribution ex ante. Parmi les éléments que le CRU n’est ainsi pas tenu de communiquer à la requérante figurent également les indicateurs composites finals de tous les établissements. Leurs valeurs sont en effet susceptibles de constituer des informations sur la situation économique des établissements concernés et, notamment, sur le niveau de risque encouru par eux sur les marchés, étant entendu que les établissements ayant un profil de risque plus élevé obtiennent un indicateur composite final plus élevé. Dans ces conditions, le CRU a pu légitimement considérer que la divulgation des indicateurs composites finals de tous les établissements porterait atteinte à son obligation de protéger le secret des affaires des établissements concernés. Par conséquent, à la lumière de la jurisprudence citée au point 303 ci‑dessus, les explications fournies par le CRU au considérant 118 de la décision attaquée et les données communiquées par le biais de la fiche individuelle et de la page 4 de l’annexe II de cette décision peuvent être considérées comme étant suffisantes.

463    De même, la requérante ne saurait soutenir, s’agissant du calcul de la contribution finale lors de l’étape 6 mentionné aux points 455 et 456 ci-dessus, que, malgré la reproduction de la formule utilisée pour ce calcul et l’explication de ses différentes composantes dans la décision attaquée, le CRU n’expliquerait pas comment il est parvenu, en ce qui la concerne, au résultat du calcul indiqué dans la fiche individuelle.

464    D’une part, ainsi qu’il ressort des considérants 119 à 121 de la décision attaquée, la contribution finale de la requérante a été calculée selon la formule exposée à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 2, du règlement délégué 2015/63. D’autre part, comme il a été relevé au point 457 ci-dessus, la requérante pouvait retrouver les données nécessaires pour résoudre cette formule dans sa fiche individuelle ainsi que dans les colonnes h et j du tableau figurant à la page 4 de l’annexe II de la décision attaquée.

465    Il résulte de ce qui précède qu’en utilisant, d’une part, les formules prévues par l’annexe I du règlement délégué 2015/63 et, d’autre part, les données figurant aux annexes I et II de la décision attaquée, la requérante est effectivement en mesure de vérifier, étape par étape, le calcul de sa contribution ex ante par le CRU.

466    En conséquence, le troisième grief de la quatrième branche du premier moyen doit être rejeté.

g)      Sur la sixième branche, portant sur l’existence des décisions intermédiaires non publiées

467    La requérante soutient que la motivation de la décision attaquée est insuffisante, puisque le CRU a adopté des décisions intermédiaires qui n’ont pas été publiées et ne lui ont pas été communiquées.

468    Le CRU conteste cette argumentation.

469    Il ressort de la jurisprudence que la motivation figurant dans la décision fixant des contributions ex ante doit être considérée comme étant insuffisante lorsque cette motivation repose, s’agissant de certains éléments pour lesquels le CRU doit fournir une motivation, uniquement sur d’autres actes juridiques, tels que les décisions intermédiaires, que le CRU a adoptées aux fins de préciser et, dans certains cas, compléter certains aspects de la fixation desdites contributions, mais qu’il n’a pas publiées ou autrement communiquées aux établissements (voir arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU, T377/16, T645/16 et T809/16, EU:T:2019:823, points 194 et 199, et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU, T365/16, EU:T:2019:824Hypo Vorarlberg Bank/CRU, points 171 et 176).

470    En l’espèce, le CRU a produit, en réponse à une mesure d’instruction du Tribunal du 9 novembre 2022, les décisions intermédiaires qui étaient pertinentes pour le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2021. Ces décisions, qui ont été ensuite signifiées à la requérante dans leur version non confidentielle, comportent, notamment, des positions internes qui étaient adressées au personnel du CRU en vue de le guider dans le processus de calcul des contributions ex ante.

471    Toutefois, ainsi qu’il ressort du résumé de la décision attaquée aux points 5 à 18 ci-dessus, celle-ci comporte une motivation concernant la fixation des contributions ex ante pour la période de contribution 2021.

472    En outre, la requérante n’a identifié aucun élément figurant dans les décisions intermédiaires qui n’a pas été repris dans la décision attaquée elle-même et qui aurait été pris en compte aux fins de la détermination des contributions ex ante pour la période de contribution 2021.

473    Par conséquent, rien n’indique que l’existence des décisions intermédiaires ait eu une incidence quelconque sur l’étendue des informations dont la requérante disposait afin de pouvoir vérifier la légalité de la fixation de sa contribution ex ante et de la contester devant le juge de l’Union. En particulier, ainsi qu’il ressort de l’examen des première à cinquième branches du premier moyen, la requérante a pu comprendre tous les éléments du calcul de la contribution ex ante, à l’exception de la détermination du niveau cible annuel, sur la seule base de la décision attaquée.

474    Partant, la décision attaquée se distingue de la décision du CRU fixant les contributions ex ante qui faisait l’objet des affaires ayant donné lieu aux arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU (T‑377/16, T‑645/16 et T‑809/16, EU:T:2019:823), et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU (T‑365/16, EU:T:2019:824). En effet, cette dernière décision ne comportait pas, notamment, d’indications concernant la détermination par le CRU du pilier de risque IV, de telles indications ne figurant que dans les décisions intermédiaires en cause dans ces affaires (arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU, T‑377/16, T‑645/16 et T‑809/16, EU:T:2019:823, point 195, et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU, T‑365/16, EU:T:2019:824, point 172).

475    Enfin, la requérante n’a pas expliqué comment – compte tenu des considérations figurant aux points 471 à 473 ci-dessus – la publication des décisions intermédiaires lui aurait permis d’exercer, dans de meilleures conditions, ses droits devant les juridictions de l’Union ni comment une telle publication aurait permis à ces dernières d’exercer plus efficacement leur contrôle.

476    Dans ces conditions, la seule absence de publication ou de communication des décisions intermédiaires ne saurait, en elle-même, entraîner un défaut de motivation de la décision attaquée.

477    Eu égard à ce qui précède, la sixième branche du premier moyen doit être rejetée.

h)      Conclusion sur le premier moyen

478    Eu égard à ce qui précède, la deuxième branche du premier moyen doit être accueillie. Les autres branches de ce moyen doivent être rejetées.

2.      Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective en raison du caractère invérifiable de la décision attaquée

479    La requérante fait valoir que le CRU a violé le principe de protection juridictionnelle effective, puisque le contrôle juridictionnel de la décision attaquée est en pratique impossible. D’une part, ni le Tribunal ni la requérante ne disposeraient de données afférentes aux établissements autres que la requérante, bien que ces données soient nécessaires pour la vérification du calcul de la contribution ex ante versée par cette dernière. D’autre part, même si le Tribunal obtenait un accès aux données en question, il ne pourrait pas les exploiter, puisqu’il ne disposerait pas du logiciel utilisé par le CRU pour calculer les contributions ex ante, afin de suivre les différentes étapes du calcul conformément à l’annexe I du règlement délégué 2015/63.

480    Le CRU conteste cette argumentation.

481    Comme il a été relevé au point 145 ci-dessus, il appartenait à la Commission, lors de la mise en place du système de calcul des contributions ex ante par le règlement délégué 2015/63, de concilier le respect du secret des affaires et le principe de protection juridictionnelle effective, de sorte que les données couvertes par ce secret ne puissent pas être communiquées aux intéressés et qu’elles ne puissent pas, notamment, être incluses dans la motivation des décisions fixant le montant des contributions ex ante.

482    Par ailleurs, en vertu de l’article 339 TFUE et de l’article 88 du règlement no 806/2014, le CRU était également tenu, lors de la communication de la décision attaquée, de veiller à ce ne pas divulguer de données couvertes par le secret des affaires aux établissements.

483    Cela étant, il incombe au juge de l’Union de vérifier le bien-fondé des raisons invoquées par le CRU pour s’opposer à la communication des données utilisées aux fins du calcul desdites contributions, comme cela a été relevé au point 150 ci-dessus.

484    En l’espèce, il résulte de l’examen effectué aux points 326 à 336 ci-dessus que le CRU était fondé à s’opposer à la communication à la requérante des données individuelles afférentes aux autres établissements.

485    En outre, pour les mêmes raisons que celles évoquées au point 156 ci-dessus, il y a lieu de rejeter l’argument selon lequel l’utilisation par le CRU d’un logiciel pour le calcul des contributions ex ante empêche l’exercice d’un contrôle juridictionnel ultérieur.

486    Dans ces conditions, le deuxième moyen doit être rejeté.

3.      Sur la première branche du quatrième moyen, tirée d’une violation de l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, lu conjointement avec l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014

487    La  requérante soutient, dans le cadre de la première branche soulevée à l’appui du quatrième moyen, que le CRU a violé l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, lu conjointement avec l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, car, lorsqu’il a déterminé le niveau cible final, il a pris en considération le montant prévu des dépôts couverts des établissements à la fin de la période initiale. Or, au regard de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, le CRU aurait dû déterminer ce niveau cible de manière « statique », en prenant en compte le montant des dépôts couverts des établissements au moment de l’entrée en vigueur de ce dernier règlement.

488    Le CRU, le Parlement, le Conseil et la Commission contestent cette argumentation.

489    À cet égard, il résulte des points 35 à 40 ci-dessus que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 doit être interprété en ce sens que la détermination du niveau cible final doit être faite au regard du montant des dépôts couverts à la fin de la période initiale. Par conséquent, c’est à juste titre que le CRU a tenu compte, aux considérants 38 à 41 de la décision attaquée, de l’évolution des dépôts couverts jusqu’à la fin de la période initiale, en vue de déterminer le niveau cible final et d’en déduire, par la suite, le niveau cible annuel.

490    La première branche du quatrième moyen doit ainsi être aussi rejetée.

4.       Sur le sixième moyen, tiré de la violation des articles 16 et 52 de la Charte, en raison du caractère inapproprié du multiplicateur d’ajustement 

491    La requérante soutient que le CRU a violé l’article 16 et l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, en ce qu’il a fixé à son égard des multiplicateurs d’ajustement en fonction du profil de risque sans tenir compte de l’indicateur relatif aux fonds propres et aux engagements éligibles qui vont au-delà de l’EMEE (ci-après l’« indicateur de risque EMEE »), étant entendu que l’article 7, paragraphe 2, sous a), du règlement délégué 2015/63 attribue à cet indicateur, dans le cadre du pilier de risque « exposition au risque », une pondération de 25 %. Or, disposant d’un volume [confidentiel] d’engagements éligibles et de fonds propres, la requérante [confidentiel], durant les six derniers trimestres, le pourcentage d’EMEE fixé à son égard. Le risque de résolution étant ainsi [confidentiel] en ce qui la concerne, les multiplicateurs d’ajustement en fonction du profil de risque pour le calcul des contributions ex ante – [confidentiel] – ne correspondraient pas à sa situation réelle.

492    Le refus du CRU de prendre en considération l’indicateur de risque EMEE ne pourrait pas être justifié par la circonstance selon laquelle les données propres à cet indicateur de risque n’étaient pas disponibles pour un nombre suffisant d’établissements au moment de la préparation de la décision attaquée. D’une part, en raison des déclarations régulières de la requérante, le CRU saurait qu’un pourcentage d’EMEE avait été fixé à l’égard de cette dernière, pourcentage qu’elle aurait dépassé en moyenne durant les six derniers trimestres. D’autre part, il ne serait pas établi que le CRU ne disposait pas de données propres audit indicateur de risque pour un nombre suffisamment élevé d’établissements. Une telle affirmation serait, en effet, obsolète, puisqu’elle serait fondée, ainsi que cela ressort de la note de bas de page no 15 de la décision attaquée, sur le rapport annuel du CRU de 2019. En tout état de cause, la circonstance selon laquelle certains établissements ne déclarent pas les données nécessaires propres à ce même indicateur de risque ne devrait pas être invoquée au détriment de la requérante.

493    Par ailleurs, puisque le CRU disposerait en ce qui concerne l’indicateur de risque EMEE des données d’un nombre suffisamment élevé d’établissements, parmi lesquels la requérante, l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, qui permet de ne pas prendre en compte certains indicateurs de risque, ne serait pas applicable.

494    Le CRU conteste cette argumentation.

495    À titre liminaire, il y a lieu de constater que la requérante se borne à invoquer des violations des principes consacrés aux articles 16 et 20 de la Charte et du principe de proportionnalité, sans développer une quelconque argumentation ciblée concernant ces principes.

496    Au regard de la jurisprudence citée au point 267 ci-dessus, l’argumentation de la requérante doit ainsi être rejetée dans la mesure où elle vise la violation desdits principes.

497    Par ailleurs, et en tout état de cause, si cette argumentation doit être comprise en ce sens que la requérante soutient, en réalité, que le CRU a commis une erreur manifeste d’appréciation quand il a calculé ses multiplicateurs d’ajustement sans tenir compte de l’indicateur de risque EMEE, il convient de relever ce qui suit.

498    Aux termes de l’article 6, paragraphe 2, sous a), du règlement délégué 2015/63, le CRU doit, en principe, tenir compte de l’indicateur de risque EMEE d’un établissement pour déterminer le profil de risque de ce dernier.

499    Cependant, conformément à l’article 20, intitulé « Dispositions transitoires », paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, un indicateur de risque ne s’applique pas tant que les informations requises au titre de cet indicateur de risque spécifique, mentionné à l’annexe II de ce règlement délégué, ne font pas partie des exigences d’information prudentielle mentionnées à l’article 14 du même règlement délégué, à savoir les exigences d’information prudentielle établies par le règlement d’exécution no 680/2014 ou, le cas échéant, par le droit national.

500    L’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, dont la légalité n’a pas été contestée avec succès dans la présente affaire, soumet ainsi la possibilité de ne pas appliquer un indicateur de risque à la double condition que, en premier lieu, les informations requises au titre d’un tel indicateur ne fassent pas partie des exigences d’information prudentielle mentionnées à l’article 14 de ce règlement délégué et que, en second lieu, cet indicateur soit mentionné à l’annexe II dudit règlement délégué, laquelle est intitulée « Données à soumettre aux autorités de résolution » et contient quinze catégories de données.

501    En ce qui concerne la première condition, il y a lieu de relever que, pour déterminer si, conformément à l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, les informations requises au titre d’un indicateur de risque spécifique font partie des exigences d’information prudentielle, il appartient au CRU de vérifier si les établissements étaient tenus de déclarer ces informations à des fins prudentielles à l’autorité compétente pour l’exercice de référence en cause conformément au règlement d’exécution no 680/2014 ou au droit national. Selon une lecture conjointe de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 14, paragraphes 1 à 4, du règlement délégué 2015/63, cet exercice de référence est celui de l’année à laquelle se rapportent les états financiers annuels approuvés disponibles au 31 décembre de l’année précédant la période de contribution. Il s’ensuit que, en ce qui concerne la présente affaire, l’exercice de référence est celui de l’année à laquelle se rapportent les états financiers annuels approuvés disponibles au 31 décembre 2020 (ci-après l’« exercice de référence pertinent »). Ainsi que l’affirme le CRU, sans être sérieusement contesté par la requérante, cet exercice correspond à celui de l’année 2019.

502    Or, aucune disposition du règlement d’exécution no 680/2014 n’exigeait que les établissements fournissent, pour l’exercice de référence pertinent, des informations sur leurs engagements éligibles à titre d’informations prudentielles à l’autorité compétente. Une telle obligation n’a été instaurée qu’à partir du 28 juin 2021, ainsi que cela découle du titre I du règlement d’exécution (UE) 2021/763 de la Commission, du 23 avril 2021, définissant des normes techniques d’exécution pour l’application du règlement no 575/2013 et de la directive 2014/59 en ce qui concerne la déclaration à des fins de surveillance et la publication de l’[EMEE] (JO 2021, L 168, p. 1), lu conjointement avec l’article 17, deuxième alinéa, de ce règlement d’exécution.

503    Par ailleurs, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si l’éventuelle existence d’une obligation de déclaration des engagements éligibles à titre d’informations prudentielles en droit national obligeait le CRU à en tenir compte pour la détermination de l’indicateur de risque EMEE en ce qui concerne, à tout le moins, le calcul de la contribution ex ante sur la base nationale, le CRU a expliqué, en substance, dans sa duplique, sans être contredit par la requérante, que, en tout état de cause, une telle obligation ne découlait pas du droit de l’État membre où était établie la requérante, à savoir l’Allemagne pour ce qui concernait l’exercice de référence pertinent. Dans ces conditions, aucun élément dans le dossier dont dispose le Tribunal ne démontre que, en vertu du droit allemand, les informations relatives à l’indicateur de risque EMEE faisaient l’objet d’exigences d’information prudentielle pendant l’exercice de référence pertinent et que les établissements étaient tenus de les déclarer à cette fin à l’autorité compétente.

504    Enfin, les circonstances invoquées par la requérante selon lesquelles elle déclarait régulièrement des informations relatives à l’EMEE, un pourcentage d’EMEE avait été fixé à son égard et [confidentiel] sont dépourvues de conséquences pour l’appréciation du présent moyen. En effet, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si ces circonstances correspondent à la réalité, celles-ci ne changent rien au fait qu’il n’a pas été établi que, pour l’exercice de référence pertinent, il n’existait pas d’obligation légale de déclaration des engagements éligibles à titre d’informations prudentielles en application du règlement d’exécution no 680/2014 ou du droit allemand.

505    S’agissant de la seconde condition mentionnée au point 500 ci-dessus, il convient de relever que, selon le libellé de l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, cette disposition a vocation à s’appliquer, notamment, lorsque les données mentionnées à l’annexe II de ce règlement délégué constituent en elles-mêmes des indicateurs de risque.

506    Cependant, contrairement à ce que semble soutenir la requérante, l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 s’applique également dans une situation dans laquelle l’annexe II de ce règlement délégué se réfère aux données qui, sans constituer des indicateurs de risque en elles-mêmes, sont déterminantes pour le calcul de tels indicateurs de risque qui, quant à eux, ne sont pas mentionnés dans cette annexe. Un indicateur de risque peut ainsi ne pas s’appliquer lorsque les données indispensables pour son calcul figurent dans ladite annexe.

507    À cet égard, force est de rappeler que, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (arrêts du 17 novembre 1983, Merck, 292/82, EU:C:1983:335, point 12, et du 19 juillet 2012, ebookers.com Deutschland, C‑112/11, EU:C:2012:487, point 12). En outre, il y a lieu de tenir compte de l’effet utile de celle-ci (voir arrêt du 13 décembre 2012, BLV Wohn- und Gewerbebau, C‑395/11, EU:C:2012:799, point 25 et jurisprudence citée).

508    En ce qui concerne le contexte et les objectifs poursuivis par l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, ainsi qu’il a été relevé aux points 292 et 293 ci-dessus, cette disposition vise à éviter que des charges disproportionnées ou discriminatoires soient, le cas échéant, imposées aux établissements lors du calcul des contributions ex ante en raison de la mise en œuvre progressive des exigences prudentielles et des exigences d’information qui y sont afférentes. En effet, en cas d’indisponibilité pour l’ensemble des établissements des données indispensables pour le calcul de certains indicateurs de risque, le CRU serait obligé de prendre en compte des données relatives à de tels indicateurs, qui ne sont pourtant pas comparables.

509    Un tel risque n’existe pas uniquement lorsque les données en question constituent en elles-mêmes des indicateurs de risque, mais aussi lorsque ces données, sans constituer des indicateurs de risque en elles-mêmes, sont pourtant nécessaires pour le calcul de ces derniers.

510    Dans ces conditions, l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas seulement lorsque les données mentionnées à l’annexe II de ce règlement délégué constituent en elles-mêmes des indicateurs de risque, mais également lorsque les données mentionnées à cette annexe sont indispensables pour le calcul des indicateurs de risque.

511    En ce qui concerne l’indicateur de risque EMEE, il convient de relever que, si cet indicateur n’est pas mentionné en tant que tel à l’annexe II du règlement délégué 2015/63, cette annexe mentionne néanmoins les « engagements éligibles » parmi les données à soumettre aux autorités de résolution. Ces engagements constituent d’ailleurs des données qui sont déterminantes pour le calcul de cet indicateur de risque. En effet, conformément à l’article 6, paragraphe 2, sous a), et à l’annexe I, sous le titre « Étape 1 », du règlement délégué 2015/63, ledit indicateur se fonde sur des données telles que, notamment, les fonds propres, les engagements éligibles et l’EMEE, étant entendu que, aux fins du calcul de cet indicateur, le CRU doit déterminer l’excédent des fonds propres et des engagements éligibles par rapport à l’EMEE.

512    Dans ces conditions, au regard de l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, le CRU a pu à bon droit s’abstenir d’appliquer l’indicateur de risque EMEE.

513    Par conséquent, le sixième moyen doit être rejeté.

5.      Sur le septième moyen, tiré de la violation des articles 16, 20, 41 et 52 de la Charte en raison d’erreurs manifestes d’appréciation

514    La requérante fait valoir que le CRU a méconnu son pouvoir d’appréciation et a, dès lors, violé les articles 16, 20 et 41 de la Charte ainsi que le principe de proportionnalité consacré à l’article 52 de celle-ci, en raison des multiples erreurs manifestes d’appréciation qu’il a commises lors du calcul de sa contribution ex ante.

515    En premier lieu, le CRU n’aurait pas dûment pris en compte ni déterminé :

–        l’incidence que les contributions procycliques pouvaient avoir sur la position financière des établissements lors de la détermination du niveau cible annuel prévu à l’article 69, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 ;

–        le net dépassement par la requérante du pourcentage d’EMEE fixé à son égard, dans le cadre du pilier de risque « exposition au risque » prévu à l’article 6, paragraphe 1, sous a), du règlement délégué 2015/63 ;

–        l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » ;

–        le rééchelonnement des pondérations des indicateurs de risque au sein d’un pilier de risque en cas de non-application de certains indicateurs de risque.

516    En deuxième lieu, les indicateurs de risque ainsi que les pondérations en application du règlement délégué 2015/63 autoriseraient une formation de bins et un regroupement dans les bins qui conduisent à une charge pour la requérante qui est manifestement injustifiée au fond, disproportionnée et discriminatoire. Ainsi qu’il a été exposé dans le cadre du cinquième moyen, l’annexe I de ce règlement délégué conduirait à une situation où la fourchette de valeurs maximums et minimums est disproportionnellement large pour les premier et dernier bins, où plusieurs bins sont vides et où d’autres bins ont un nombre manifestement trop élevé d’établissements. À cet égard, le CRU aurait méconnu son pouvoir d’appréciation et aurait omis de procéder aux adaptations des contributions ex ante imposées par les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité.

517    En troisième lieu, la requérante soutient que le CRU a limité, à tort, la part des engagements irrévocables de paiement (ci-après les « EPI ») à 15 % de la contribution ex ante. Ce faisant, il aurait privé de leur effet utile l’article 70, paragraphe 3, du règlement no 806/2014 et l’article 8, paragraphe 3, du règlement d’exécution 2015/81 dont il résulterait, après avoir tenu compte des éventuels effets procycliques, une part des EPI comprise entre 15 % et 30 % du montant de la contribution ex ante de la requérante. Ensuite, cette part réduite des EPI entraînerait des effets procycliques pour les établissements tant que la pandémie de COVID‑19 continue.

518    Le CRU conteste cette argumentation.

519    Tout d’abord, il y a lieu de constater que la requérante se borne à invoquer des violations des principes consacrés aux articles 16, 20 et 41 de la Charte ainsi que du principe de proportionnalité consacré à l’article 52 de celle-ci, sans développer d’argumentation autonome et ciblée concernant ces principes.

520    Au regard de la jurisprudence citée au point 267 ci-dessus, l’argumentation de la requérante doit ainsi être rejetée dans la mesure où elle vise la violation desdits principes.

521    Ensuite, dans la mesure où la requérante soutient que le CRU a commis des erreurs manifestes d’appréciation lors de la constitution des bins et de l’assignation des établissements à ces bins, ce grief n’est pas appuyé par des arguments spécifiques. En particulier, la requérante ne précise pas comment le pouvoir d’appréciation octroyé au CRU est lié aux facteurs indiqués au point 515 ci-dessus ni de quelle manière précise le CRU aurait dû tenir compte de ces facteurs.

522    De même, bien que la requérante reproche au CRU d’avoir omis de procéder aux « adaptations individuelles nécessaires » des résultats de l’application de la formule mathématique figurant à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 2, du règlement délégué 2015/63 répondant au principe d’égalité de traitement et de proportionnalité, elle ne précise pas la nature de telles adaptations.

523    Par ailleurs, la requérante a présenté une argumentation ambiguë concernant la méthode de binning. D’une part, en renvoyant à ses arguments présentés dans le cadre du cinquième moyen, elle reproche au CRU de ne pas avoir reconnu que l’application de l’étape 2 conduisait à une fourchette de valeurs disproportionnellement large pour les premier et dernier bins, que divers bins étaient vides et que les premiers bins comportaient un nombre manifestement trop élevé d’établissements. Par son grief, la requérante laisse ainsi sous-entendre qu’elle considère que la méthode de binning n’est pas conforme aux règles de droit supérieur, sans pourtant invoquer d’exception d’illégalité dans le cadre du présent moyen. Or, une telle exception doit être invoquée de manière claire, pour permettre à l’auteur de l’acte de défendre la légalité de celui-ci (voir, en ce sens, ordonnance du 20 janvier 2009, Sack/Commission, C‑38/08 P, EU:C:2009:21, points 21 et 22). D’autre part, la requérante reproche au CRU d’avoir, pour les mêmes motifs, violé les prescriptions de l’annexe I du règlement délégué 2015/63. Dans ces circonstances, il est impossible pour le Tribunal d’identifier précisément la portée des arguments de la requérante à cet égard et d’en juger le bien-fondé.

524    En ce qui concerne, enfin, le grief tiré de l’erreur manifeste d’appréciation commise par le CRU lors de la détermination de la part des EPI accordés, il y a lieu de relever ce qui suit.

525    L’article 70, paragraphe 3, du règlement no 806/2014 prévoit que les moyens financiers disponibles à prendre en compte pour atteindre le niveau cible final peuvent inclure des EPI entièrement garantis par des actifs à faible risque non grevés de droits de tiers, réservés à l’utilisation exclusive du CRU, étant précisé que la part des EPI ne peut dépasser 30 % du montant total des contributions ex ante chaque année. Une telle possibilité est également prévue à l’article 103, paragraphe 3, de la directive 2014/59.

526    Selon l’article 13, paragraphe 3, du règlement délégué 2015/63, il appartient au CRU de préciser, dans la décision portant sur les contributions ex ante au titre d’une période de contribution donnée, la part des EPI que chaque établissement peut utiliser.

527    Il résulte des dispositions susmentionnées que la somme de l’ensemble des EPI autorisés ne doit pas dépasser la limite maximale de 30 % du total des contributions ex ante pour toute la période de contribution donnée. Ce dernier plafond fixé par le législateur de l’Union vise, ainsi que le relève à juste titre le CRU, à ne pas mettre en péril la liquidité et la capacité opérationnelle du FRU.

528    Ainsi, il appartient au CRU de fixer la part précise des EPI accordés à un établissement qui en fait la demande tout en veillant à ce que le plafond maximal mentionné au point 527 ci-dessus concernant la somme de l’ensemble des EPI autorisés ne soit pas dépassé. Étant donné que cette appréciation implique des évaluations complexes d’ordre économique et technique, le contrôle du juge de l’Union doit se limiter à examiner si l’exercice du pouvoir d’appréciation octroyé au CRU n’est pas entaché d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir, ou si le CRU n’a pas manifestement dépassé les limites de ce pouvoir.

529    Dans ce contexte, la requérante soutient, en substance, que le CRU a commis une erreur manifeste d’appréciation en ce que, en n’autorisant pas une part des EPI supérieure à 15 %, il a entraîné lui-même un effet procyclique pour les établissements pendant que la pandémie de COVID‑19 continuait.

530    À cet égard, il est vrai que, si le CRU fixe la part des EPI de chaque établissement qui en fait la demande à un niveau supérieur à 15 % du total de ses obligations de paiement, ce niveau peut présenter un allègement à court terme pour les établissements en cause, comme le soutient la requérante, en ce qu’il réduit la part de la contribution ex ante devant être versée immédiatement en espèces.

531    Cependant, ainsi que le relève en substance le CRU, sans être contredit sur ce point, un niveau supérieur à 15 % risque d’avoir des effets procycliques sur la position des établissements à long terme. En effet, lorsqu’une mesure de résolution fait intervenir le FRU conformément à l’article 76 du règlement no 806/2014, tout ou partie des EPI sont appelés par le CRU afin que les sommes correspondantes soient versées au FRU. Il en découle que, dans une telle situation, les établissements ayant recours aux EPI doivent mobiliser ces derniers et verser les sommes correspondantes, ce qui entraîne un risque de pertes importantes pour eux, lequel serait encore plus important si la part des EPI était fixée à un niveau élevé.

532    Il en va d’autant plus ainsi que la décision attaquée a été adoptée dans des circonstances particulières qui étaient marquées par l’incertitude économique liée à la pandémie de COVID‑19. Dans ce contexte, les effets provoqués par un éventuel appel des EPI sur la position des établissements auraient pu être encore aggravés, ainsi que le relève en substance le CRU aux considérants 150, 152 et 153 de la décision attaquée.

533    Dans ces conditions, le CRU pouvait estimer qu’un niveau plus élevé d’EPI pourrait avoir des effets procycliques sur le long terme pour les établissements en augmentant leurs pertes à la suite du paiement des sommes correspondant aux EPI dans le cadre d’une éventuelle mesure de résolution.

534    Partant, la requérante n’a pas démontré que le CRU avait commis une erreur manifeste d’appréciation ou qu’il avait manifestement dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation en fixant la part des EPI à 15 % pour la période de contribution 2021.

535    Cette constatation n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

536    D’une part, la requérante soutient que, en limitant le niveau des EPI accordés à 15 %, le CRU a privé de son effet utile l’article 8, paragraphe 3, du règlement d’exécution 2015/81, cette disposition autorisant le CRU à fixer un taux de ces EPI supérieur à 15 % de la contribution ex ante de l’établissement concerné. Or, compte tenu du pouvoir d’appréciation reconnu au CRU dans ce domaine (voir point 528 ci-dessus), ce dernier aurait dû fixer le taux desdits EPI dans le cadre d’une analyse concrète, ce qu’il n’aurait pas fait.

537    Un tel argument repose sur une prémisse erronée. En effet, ainsi qu’il ressort, notamment, du considérant 150 de la décision attaquée, le CRU a écarté la possibilité de fixer un niveau des EPI supérieur à 15 % après avoir procédé à un examen concret de toutes les circonstances pertinentes, notamment de celles liées à la pandémie de COVID‑19, ainsi que des conséquences sur le long terme qu’aurait un appel des EPI sur la situation des établissements.

538    D’autre part, la requérante fait valoir qu’une part plus élevée des EPI n’aurait pas d’effets procycliques, puisque, conformément à la pratique prudentielle de la BCE, ces EPI devraient être déduits des fonds propres de base de catégorie 1, de sorte que leur éventuel appel n’aurait ainsi que des effets limités sur la présentation comptable du compte de résultat. À cet égard, il suffit de constater que, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation, le CRU pouvait donner une importance particulière au fait, non contesté par la requérante, que, lorsque les EPI sont appelés en cas de mesure de résolution, ils sont enregistrés en tant que pertes à des fins comptables au cours du trimestre donné, ce qui pourrait créer un risque de liquidité pour les établissements et aggraver ainsi les effets procycliques sur leur situation.

539    Eu égard à ce qui précède, le septième moyen doit ainsi être rejeté.

6.      Sur le neuvième moyen, tiré de la violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 et d’une incompatibilité des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014 avec les normes de rang supérieur

540    Il est constant que la requérante a invoqué le neuvième moyen pour la première fois dans la réplique. Malgré cela, elle considère que ce moyen est recevable en ce qu’il est fondé sur des éléments de fait et de droit qui seraient apparus au cours de la procédure juridictionnelle. En effet, l’élément nécessaire pour comprendre si le niveau cible annuel dépasse le plafond de 12,5 % du niveau cible final, qui est prévu par l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, aurait été porté à sa connaissance par le biais de la décision SRB/ES/2022/18 du CRU, du 11 avril 2022, sur le calcul des contributions ex ante pour 2022 au FRU.

541    Le CRU conclut, d’une part, à l’irrecevabilité du présent moyen pour cause de tardiveté et, d’autre part, à son rejet sur le fond.

542    Conformément à l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure ou qu’ils ne constituent l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 2020, HeidelbergCement et Schwenk Zement/Commission, T‑380/17, EU:T:2020:471, point 87 et jurisprudence citée).

543    Or, d’une part, il est constant que le CRU a indiqué dans la fiche descriptive mentionnée au point 359 ci-dessus le montant du niveau cible final pronostiqué par lui, sous la forme d’une fourchette comprise entre 70 et 75 milliards d’euros, aux fins de la fixation des contributions ex ante pour la période de contribution 2021. D’autre part, il ressort de la requête que la requérante avait pu prendre connaissance de cette fiche avant l’introduction de son recours, puisqu’elle y a fait référence dans le cadre de son argumentation invoquée au soutien de son premier moyen.

544    Dans ces conditions, la requérante ne saurait prétendre que les éléments de fait invoqués par elle au soutien du neuvième moyen, qui justifieraient la production de ce moyen au stade de la réplique, ne lui étaient pas déjà connus au moment de l’introduction du recours.

545    En outre, la requérante n’a pas soutenu que le présent moyen constituait une ampliation d’un moyen énoncé antérieurement.

546    Dans ces conditions, le neuvième moyen doit être rejeté comme étant irrecevable.

547    Par ailleurs, à supposer que le neuvième moyen soit recevable, le Tribunal ne serait pas en mesure d’en apprécier le bien-fondé. En effet, ainsi qu’il ressort des points 342 à 373 ci-dessus, la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation concernant la détermination du niveau cible annuel pour la période de contribution 2021 et doit être annulée pour ce motif. Or, un tel défaut de motivation empêche le Tribunal d’examiner le bien-fondé du neuvième moyen.

C.      Conclusion

548    Il résulte de tout ce qui précède que la deuxième branche du premier moyen est fondée, tandis que les autres branches de ce moyen, ainsi que tous les autres moyens invoqués, doivent être rejetés. La deuxième branche du premier moyen étant, à elle seule, de nature à fonder l’annulation de la décision attaquée, il y a lieu d’annuler cette dernière en tant qu’elle concerne la requérante.

V.      Sur la limitation dans le temps des effets de l’arrêt

549    Le CRU demande au Tribunal de maintenir, en cas d’annulation de la décision attaquée, les effets de celle-ci jusqu’à son remplacement ou, à tout le moins, pendant une période de six mois à compter de la date à laquelle l’arrêt est devenu définitif.

550    La requérante a indiqué à l’audience, en substance, qu’elle ne s’opposait pas à cette demande dans la mesure où la décision attaquée serait annulée sur la base de la violation d’une forme substantielle.

551    Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 264, second alinéa, TFUE, le juge de l’Union peut, s’il l’estime nécessaire, indiquer ceux des effets d’un acte annulé qui doivent être considérés comme étant définitifs.

552    À cet égard, il ressort de la jurisprudence que, eu égard à des motifs ayant trait à la sécurité juridique, les effets d’un tel acte peuvent être maintenus, notamment lorsque les effets immédiats de son annulation entraîneraient des conséquences négatives graves et que la légalité de l’acte attaqué est contestée non pas en raison de sa finalité ou de son contenu, mais pour des motifs de violation des formes substantielles (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 175 et jurisprudence citée).

553    En l’espèce, la décision attaquée a été prise en violation des formes substantielles. En revanche, le Tribunal n’a pas constaté, dans la présente procédure, d’erreur affectant la légalité au fond de cette décision.

554    En outre, à l’instar de ce que la Cour a jugé dans l’arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU (C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 177), il convient de constater que prononcer l’annulation de la décision attaquée sans prévoir le maintien de ses effets jusqu’à ce qu’elle soit remplacée par un nouvel acte serait de nature à porter atteinte à la mise en œuvre de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014 et du règlement délégué 2015/63, qui constituent une partie essentielle de l’union bancaire, laquelle contribue à la stabilité de la zone euro.

555    Dans ces circonstances, il y a lieu de maintenir les effets de la décision attaquée, en ce qu’elle concerne la requérante, jusqu’à l’entrée en vigueur, dans un délai raisonnable qui ne saurait dépasser six mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt, d’une nouvelle décision du CRU fixant la contribution ex ante au FRU de la requérante pour la période de contribution 2021.

VI.    Sur les dépens

556    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le CRU ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

557    Conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Parlement, le Conseil et la Commission supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      La décision SRB/ES/2021/22 du Conseil de résolution unique (CRU), du 14 avril 2021, sur le calcul des contributions ex ante pour 2021 au Fonds de résolution unique est annulée en ce qu’elle concerne Deutsche Bank AG.

2)      Les effets de la décision SRB/ES/2021/22, en ce qu’elle concerne Deutsche Bank AG, sont maintenus jusqu’à l’entrée en vigueur, dans un délai raisonnable qui ne saurait dépasser six mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt, d’une nouvelle décision du CRU fixant la contribution ex ante au Fonds de résolution unique de cet établissement pour la période de contribution 2021.

3)      Le CRU supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Deutsche Bank AG.

4)      Le Parlement européen, le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne supporteront leurs propres dépens.

Kornezov

De Baere

Petrlík

Kecsmár

 

      Kingston

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 juillet 2024.

Signatures


Table des matières


I. Antécédents du litige

II. Décision attaquée

III. Conclusions des parties

IV. En droit

A. Sur les exceptions d’illégalité de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 et des articles 4 à 9 et 20 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63

1. Sur la deuxième et la troisième branche du quatrième moyen, tirées d’une illégalité de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014

a) Sur la portée de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014

b) Sur la légalité de l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014

1) Sur la deuxième branche, tirée de ce que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 viole le « principe du calcul des contributions adapté au risque »

2) Sur la troisième branche, tirée de ce que l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 viole l’article 114 TFUE

c) Conclusion sur la deuxième et la troisième branche du quatrième moyen

2. Sur le troisième moyen, tiré d’une exception d’illégalité des articles 4 à 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, en ce qu’ils violeraient les principes de protection juridictionnelle effective et de sécurité juridique

a) Sur la première branche, portant sur une prétendue violation du principe de protection juridictionnelle effective

b) Sur la seconde branche, portant sur une prétendue violation du principe de sécurité juridique

1) Sur le premier grief, tiré de ce que les articles 4 à 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 ne permettraient pas aux établissements de calculer au préalable leurs contributions ex ante

2) Sur le deuxième grief, tiré de ce que la Commission aurait pu établir une autre méthode de calcul des contributions ex ante

3) Sur le troisième grief, tiré d’une violation de l’article 12 du règlement 2016/1011

c) Conclusion sur le troisième moyen

3. Sur le cinquième moyen, tiré d’une exception d’illégalité des articles 6, 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, en ce qu’ils violeraient plusieurs normes supérieures

a) Sur la première branche, portant sur la méthode dite de « binning »

b) Sur la seconde branche, portant sur la prise en compte, de la part des prêts et des dépôts interbancaires dans l’Union européenne, des activités de négociation et des instruments dérivés lors du calcul du multiplicateur d’ajustement

c) Conclusion sur le cinquième moyen

4. Sur le huitième moyen, tiré d’une exception d’illégalité de l’article 20, paragraphe 1, première et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63, en ce qu’il violerait l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 et le « principe du calcul des contributions adapté au risque »

B. Sur les moyens portant sur la légalité de la décision attaquée

1. Sur le premier moyen, tiré de défauts de motivation

a) Observations préliminaires

b) Sur la première branche, portant sur la complexité de la motivation du calcul de la contribution ex ante

c) Sur la cinquième branche, portant sur la rétention des données des autres établissements

d) Sur la deuxième branche, portant sur la motivation du niveau cible annuel

e) Sur la troisième branche, portant sur la motivation insuffisante de la contribution annuelle de base

f) Sur la quatrième branche, portant sur la motivation insuffisante de l’ajustement de la contribution annuelle de base au risque

1) Sur le premier grief, portant sur l’impossibilité de vérifier l’assujettissement de l’ensemble des établissements concernés à une contribution ajustée en fonction du profil de risque

2) Sur le deuxième grief, portant sur la prise en compte de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité »

3) Sur le troisième grief, portant sur la motivation des étapes 1 à 6 de l’adaptation de la contribution annuelle de base au profil de risque de la requérante

i) Étape 1

ii) Étape 2

iii) Étape 3

iv) Étape 4

v) Étape 5

vi) Étape 6

g) Sur la sixième branche, portant sur l’existence des décisions intermédiaires non publiées

h) Conclusion sur le premier moyen

2. Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective en raison du caractère invérifiable de la décision attaquée

3. Sur la première branche du quatrième moyen, tirée d’une violation de l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, lu conjointement avec l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014

4. Sur le sixième moyen, tiré de la violation des articles 16 et 52 de la Charte, en raison du caractère inapproprié du multiplicateur d’ajustement

5. Sur le septième moyen, tiré de la violation des articles 16, 20, 41 et 52 de la Charte en raison d’erreurs manifestes d’appréciation

6. Sur le neuvième moyen, tiré de la violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 et d’une incompatibilité des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014 avec les normes de rang supérieur

C. Conclusion

V. Sur la limitation dans le temps des effets de l’arrêt

VI. Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’allemand.


1      Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.


2 Données confidentielles occultées.

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