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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Zink v Commission (Staff Regulations of officials and Conditions of Employment of other servants - Judgment) French Text [2018] EUECJ T-338/16P (27 February 2018) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2018/T33816P.html Cite as: EU:T:2018:98, [2018] EUECJ T-338/16P, ECLI:EU:T:2018:98 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)
27 février 2018 (*)
« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires ‐ Rémunération ‐ Indemnité de dépaysement – Non-versement de l’indemnité pendant plusieurs années à la suite d’une erreur administrative – Article 90, paragraphe 1, du statut – Délai raisonnable »
Dans l’affaire T‑338/16 P,
ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 11 avril 2016, Zink/Commission (F‑77/15, EU:F:2016:74), et tendant à l’annulation de cet arrêt,
Richard Zink, ancien fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Bamako (Mali), représenté par Mes N. de Montigny et J.-N. Louis, avocats,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant
Commission européenne, représentée par M. T. Bohr et Mme F. Simonetti, en qualité d’agents,
partie défenderesse en première instance,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),
composé de MM. M. Jaeger, président, H. Kanninen (rapporteur) et D. Gratsias, juges,
greffier : Mme M. Marescaux, administrateur,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 20 juin 2017,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le requérant, M. Richard Zink, demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 11 avril 2016, Zink/Commission (F‑77/15, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:F:2016:74), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission européenne, qui lui a été communiquée par courriel du 23 juillet 2014, de limiter le paiement de l’indemnité de dépaysement, erronément omise depuis le 1er septembre 2007, à la période de cinq ans précédant la date de la découverte de l’erreur commise par la Commission (ci-après la « décision du 23 juillet 2014 »).
Faits à l’origine du litige
2 Les faits pertinents à l’origine du litige sont énoncés dans l’arrêt attaqué dans les termes suivants :
« 4 Le requérant, fonctionnaire de la Commission, est entré en service en 1988 et a été détaché dans l’intérêt du service en tant qu’agent temporaire à l’Agence européenne pour la reconstruction (AER) du 1er mars 2001 au 31 août 2007, pour y exercer les fonctions de directeur.
5 Le 1er septembre 2007, le requérant a réintégré les services de la Commission au siège à Bruxelles (Belgique) et, le 13 décembre 2007, il a été affecté à la délégation de la Commission à Kinshasa (République démocratique du Congo) en tant que chef de la délégation.
6 Le 21 septembre 2007, le requérant a signé une fiche destinée à la section “Rémunérations” de l’unité “Rémunérations et gestion des droits pécuniaires individuels” du PMO [ci-après la “fiche du PMO du 21 septembre 2007”] de laquelle il ressort, entre autres, qu’il avait droit à l’indemnité de dépaysement [...]
7 Au mois de février 2012, le requérant a été nommé chef de la délégation de l’Union européenne à Bamako (Mali).
8 Au mois de mai 2014, le chef de l’administration de la délégation de l’Union européenne à Bamako s’est aperçu que sur les bulletins de rémunération du requérant ne figurait pas la rubrique “IDE” attestant du versement de l’indemnité de dépaysement et cela, après vérification avec le requérant, “déjà en 2008”.
9 Par courriel du 8 juillet 2014 adressé au PMO, le requérant a demandé un traitement rapide de son dossier, indiquant qu’il avait découvert que l’indemnité de dépaysement lui avait été payée pour la dernière fois en août 2007 et qu’il considérait que le versement de ladite indemnité, dont il avait été assuré par les services de la délégation à Kinshasa qu’il reprendrait avec son salaire du mois de juin 2014, représentait “seulement une très petite part du montant auquel [il] a[vait] droit et qu[’il] réclam[ait]”.
10 Par courriel du 23 juillet 2014, un agent du PMO a répondu au requérant que plusieurs raisons faisaient obstacle à ce que l’indemnité de dépaysement lui soit versée rétroactivement : premièrement, l’indemnité de dépaysement aurait dû lui être accordée à compter du 1er septembre 2007 ; deuxièmement, les bulletins de rémunération doivent être considérés comme des actes faisant grief et les délais fixés par les articles 90 et 91 du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne] sont impératifs ; troisièmement, tout fonctionnaire est réputé connaître les règles concernant son traitement. L’agent du PMO ajoutait que l’indemnité de dépaysement lui serait néanmoins versée pour la période de cinq ans précédant sa demande, soit avec effet à compter du mois de mai 2009, mais qu’il s’agissait d’une décision prise à titre gracieux ne pouvant pas fonder des prétentions pour la période antérieure […]
11 Le requérant a reçu une somme correspondant à l’indemnité de dépaysement pour la période allant du 1er mai 2009 au 31 mai 2014 avec son traitement du mois d’août 2014.
12 Par lettre du 11 septembre 2014, transmise par voie électronique au chef d’unité et au chef d’unité adjoint du PMO.1, le conseil du requérant a demandé le versement au requérant du montant de l’indemnité de dépaysement pour la période allant du 1er septembre 2007 au 30 avril 2009, majoré des intérêts moratoires à compter du 1er septembre 2007 et jusqu’au jour du paiement, au taux de la Banque centrale européenne (BCE) augmenté de deux points. Dans cette lettre, le conseil du requérant précisait que “[l]a présente constitu[ait], bien entendu, une réclamation au titre de l’article 90, [paragraphe] 2, du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne][contre la décision du 23 juillet 2014]”.
13 Par lettre du 24 septembre 2014, le chef d’unité du PMO.1 a indiqué au requérant qu’il ne pouvait pas donner une suite positive à sa “demande” du 11 septembre 2014.
14 Par lettre du 23 octobre 2014, le requérant a adressé au directeur général de la direction générale “Ressources humaines et sécurité” de la Commission une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne] contre la décision du 23 juillet 2014, en y annexant sa lettre du 11 septembre 2014 et la réponse du chef d’unité du PMO.1 du 24 septembre 2014 et en précisant que “[l]a présente constitu[ait] […] une réclamation ampliative et confirmative”.
15 La réclamation du 23 octobre 2014 a été rejetée par décision du 9 février 2015 du directeur faisant fonction de la direction “Affaires juridiques, communication et relations avec les parties prenantes” de la direction générale “Ressources humaines et sécurité” de la Commission, agissant en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination ».
Procédure en première instance et arrêt attaqué
3 Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 18 mai 2015 et enregistrée sous la référence F‑77/15, le requérant a introduit un recours tendant, notamment, à l’annulation de la décision du 23 juillet 2014.
4 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le recours du requérant comme irrecevable au motif qu’il n’avait pas été précédé d’une procédure de réclamation régulière.
5 Le Tribunal de la fonction publique a d’abord rappelé la jurisprudence aux termes de laquelle, si un bulletin de rémunération, du fait de sa nature et de son objet, n’a pas, en tant que tel, les caractéristiques d’un acte faisant grief, dès lors qu’il ne fait que traduire, en termes pécuniaires, la portée de décisions juridiques antérieures relatives à la situation du fonctionnaire, il peut constituer, sur le plan de la procédure, un acte produisant des effets juridiques précis à l’égard de son destinataire. Ainsi, la communication du bulletin de rémunération a pour effet de faire courir les délais de réclamation et de recours contre une décision administrative lorsque ce bulletin fait apparaître clairement l’existence et la portée de cette décision. Dans ces conditions, les bulletins de rémunération, transmis mensuellement et contenant le décompte des droits pécuniaires, peuvent constituer des actes faisant grief, susceptibles de faire l’objet d’une réclamation et, le cas échéant, d’un recours.
6 Sur la base de cette jurisprudence, le Tribunal de la fonction publique a par la suite vérifié si, en l’espèce, les bulletins de rémunération du requérant, à compter de ceux relatifs aux traitements pour les mois de septembre et d’octobre 2007, reflétaient une décision adoptée par l’administration relative à sa situation juridique, de sorte que la communication au requérant desdits bulletins aurait fait courir les délais de réclamation et de recours.
7 À cet égard, le Tribunal de la fonction publique a jugé que les bulletins de rémunération du requérant pour la période allant du 1er septembre 2007 au 31 mai 2014 ne reflétaient pas une décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination et ne pouvaient donc avoir pour effet de faire courir le délai de réclamation.
8 Le Tribunal de la fonction publique a néanmoins considéré que, en l’absence d’une décision faisant grief au requérant, et plus spécifiquement d’une décision le privant de l’indemnité de dépaysement, le non-versement de ladite indemnité, à laquelle il avait pourtant droit, constituait une faute de service de la Commission due au comportement négligent de ses services.
9 Or, le Tribunal de la fonction publique a rappelé, à cet égard, que, lorsque le préjudice que le requérant estime avoir subi a été causé par un comportement de l’administration dépourvu de caractère décisionnel, il appartient à l’intéressé de saisir l’administration d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), visant à obtenir un dédommagement. Il a ajouté que le rejet de cette demande constituait une décision faisant grief contre laquelle une réclamation pouvait être dirigée et que ce n’était qu’après le rejet explicite ou implicite de cette réclamation qu’un recours en indemnité pouvait être formé devant le Tribunal.
10 Le Tribunal de la fonction publique a précisé, ensuite, que, dans le silence de l’article 90, paragraphe 1, du statut, le délai pour introduire une demande au sens de cette disposition devait être raisonnable et que, dans le cadre de l’appréciation du caractère raisonnable de ce délai, un point de comparaison pouvait être utilement tiré du délai de prescription de cinq ans prévu à l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne en matière d’action en responsabilité non contractuelle de l’Union.
11 Le Tribunal de la fonction publique a jugé en outre que, en l’espèce, les effets dommageables de l’erreur technique commise par les services de la Commission étaient apparus lors du paiement au requérant de ses traitements relatifs aux mois de septembre et d’octobre 2007 et que c’était donc à compter de la date de ce paiement que le requérant disposait d’un délai raisonnable pour introduire une demande visant à corriger les effets de ladite erreur technique.
12 Or, le Tribunal de la fonction publique a constaté que le requérant n’avait demandé le versement de l’indemnité de dépaysement que le 8 juillet 2014, à savoir plus de six ans et huit mois après l’apparition des effets dommageables dus à l’erreur technique de la Commission et que ce délai ne pouvait être considéré comme raisonnable. À cet égard, le Tribunal de la fonction publique a estimé, s’appuyant sur la jurisprudence, que le requérant ne pouvait se prévaloir des conditions dans lesquelles il avait travaillé lors de son détachement auprès de l’Agence européenne pour la reconstruction (AER), puis en délégation, à Kinshasa (République démocratique du Congo) et à Bamako (Mali), pour justifier le dépassement du délai de cinq ans.
Procédure devant le Tribunal et conclusions des parties
13 Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 22 juin 2016, le requérant a introduit le présent pourvoi.
14 Le 22 septembre 2016, la Commission a déposé le mémoire en réponse.
15 Le 10 octobre 2016, le président de la chambre des pourvois a, sur le fondement de l’article 201, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, accordé le droit au requérant de déposer une réplique.
16 Le requérant a déposé une réplique le 30 novembre 2016 et la Commission une duplique le 4 janvier 2017.
17 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 17 janvier 2017, le requérant a demandé la tenue d’une audience, en vertu de l’article 207, paragraphe 1, du règlement de procédure. La Commission n’a pas présenté une telle demande.
18 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler l’arrêt attaqué ;
– annuler la décision du 23 juillet 2014 ;
– condamner la Commission à lui payer « les indemnités de dépaysement auxquel[le]s il a droit depuis le 1er septembre 2007 ainsi [que les] intérêts moratoires calculés au taux fixé par la Banque centrale européenne pour les principales opérations de refinancement majoré de deux points sur les sommes déjà versées au requérant à titre d’arriérés de rémunération (indemnité de dépaysement) et [sur] celles encore dues, à compter de leur échéance respective, et ce, jusqu’à complet paiement sous déduction des sommes déjà payées » ;
– condamner la Commission aux dépens afférents aux deux instances.
19 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le pourvoi ;
– à titre subsidiaire, lui adjuger ses conclusions de première instance ;
– condamner le requérant aux dépens afférents aux deux instances.
Sur le pourvoi
20 À l’appui du pourvoi, le requérant invoque quatre moyens, tirés, respectivement, le premier, de la violation de l’article 62 du statut, le deuxième, de la violation du « principe de légalité » des actes de la Commission, le troisième, de l’erreur de droit résultant de la limitation à cinq ans du paiement des arriérés dus et, le quatrième, de la violation de l’obligation de motivation.
21 Il convient d’examiner en premier lieu le troisième moyen, puis, le cas échéant, les premier, deuxième et quatrième moyens.
22 Par le troisième moyen, le requérant soutient que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en décidant que le paiement des arriérés de rémunération devait être limité à cinq années, alors que la Commission aurait elle-même reconnu que l’absence de versement de l’indemnité de dépaysement constituait une faute de service.
23 Dans la réplique, le requérant prétend que son argumentation exposée au soutien du troisième moyen est suffisamment claire. Il fait également valoir que le statut ne prévoit pas de délai pour l’introduction d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, dudit statut.
24 La Commission conteste la recevabilité et le bien-fondé des arguments du requérant. Elle prétend, tout d’abord, que l’argumentation du requérant n’est pas claire et que le présent moyen doit être rejeté comme irrecevable pour non-respect des dispositions de l’article 194, paragraphe 1, sous e), et de l’article 195, paragraphe 2, du règlement de procédure.
25 Elle soutient ensuite que, en tout état de cause, le présent moyen est inopérant. Enfin, la Commission précise qu’elle n’a pas réexaminé la situation du requérant à la suite de sa demande et qu’elle n’avait pas l’obligation de le faire. Elle aurait seulement estimé équitable de rembourser le requérant à titre gracieuxpour les cinq années antérieures en considération de la situation particulière dans laquelle il se trouvait. Ce geste ne serait pas de nature à remettre en cause la constatation, par le Tribunal de la fonction publique, que le paiement n’était pas dû étant donné que la demande avait été introduite au-delà d’un délai raisonnable.
26 À titre liminaire, il convient de considérer que, contrairement à ce que prétend la Commission, l’argumentation du requérant ne souffre d’aucun défaut de compréhension. Le requérant soutient en substance que, au regard des dispositions de l’article 90, paragraphe 1, du statut, il n’était pas tenu d’introduire la demande dans un délai raisonnable de cinq ans et que, en considérant le paiement des arriérés de rémunération comme étant limité à une période de cinq ans, le Tribunal de la fonction publique a donc commis une erreur de droit.
27 À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 90, paragraphe 1, du statut, « [t]oute personne visée au présent statut peut saisir l’autorité investie du pouvoir de nomination d’une demande l’invitant à prendre à son égard une décision ».
28 Comme l’a relevé à bon droit le Tribunal de la fonction publique, au point 45 de l’arrêt attaqué, dans le silence de l’article 90, paragraphe 1, du statut, le délai pour introduire une demande au sens de cette disposition doit être raisonnable.
29 Toutefois, il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le respect d’un délai raisonnable est requis dans tous les cas où, dans le silence des textes, les principes de sécurité juridique ou de protection de la confiance légitime font obstacle à ce que les institutions de l’Union et les personnes physiques ou morales agissent sans aucune limite de temps, risquant ainsi, notamment, de mettre en péril la stabilité de situations juridiques acquises (voir, en ce sens, arrêts du 5 octobre 2004, Sanders e.a./Commission, T‑45/01, EU:T:2004:289, point 59, et du 12 juillet 2012, Commission/Nanopoulos, T‑308/10 P, EU:T:2012:370, point 76 et jurisprudence citée).
30 Or, en l’espèce, comme il ressort des points 6, 38, 39 et 43 de l’arrêt attaqué, sans que la Commission le conteste, le requérant avait droit à l’indemnité de dépaysement depuis le 21 septembre 2007. Il ressort également des points 38 et 43 de l’arrêt attaqué que le non-versement de ladite indemnité résulte d’une erreur technique de l’administration et constitue une faute de service de la Commission. En outre, si, comme il ressort du point 45 de l’arrêt attaqué, dans les actions en responsabilité susceptibles d’aboutir à une charge pécuniaire pour l’Union, le respect d’un délai raisonnable pour présenter une demande d’indemnisation s’inspire aussi d’un souci de protection des finances publiques, cette considération ne saurait être transposée dans le cas d’espèce. En effet, aucun risque de bouleversement des finances publiques ne saurait être admis en l’espèce, dès lors que la fiche destinée à la section « Rémunérations » de l’unité « Rémunérations et gestion des droits pécuniaires individuels » du PMO du 21 septembre 2007 impliquait l’engagement juridique d’une dépense, lequel a donné lieu à un engagement budgétaire visant à réserver les crédits nécessaires à l’exécution des paiements de l’indemnité de dépaysement au requérant. Par conséquent, l’action de ce dernier ne vise pas à amender de quelque manière que ce soit ni la situation juridique acquise et régissant dès le début sa relation avec la Commission ni le cours normal de l’exécution du budget, mais précisément à amener l’administration à agir en conformité avec les engagements juridiques et budgétaires déjà pris à cet effet.
31 Il s’ensuit que, dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en exigeant du requérant qu’il introduise une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut dans un délai raisonnable de cinq ans et en considérant par conséquent son recours comme irrecevable faute d’avoir été précédé d’une procédure de réclamation régulière, alors qu’aucun risque de mettre en péril une situation juridique acquise n’existait.
32 Partant, le présent moyen doit être accueilli et l’arrêt attaqué annulé, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi.
Sur le recours en première instance
33 En vertu de l’article 4 du règlement (UE, Euratom) 2016/1192 du Parlement européen et du Conseil, du 6 juillet 2016, relatif au transfert au Tribunal de la compétence pour statuer, en première instance, sur les litiges entre l’Union européenne et ses agents (JO 2016, L 200, p. 137), lorsque le Tribunal annule une décision du Tribunal de la fonction publique tout en considérant que le litige est en état d’être jugé, la chambre qui statue sur le pourvoi statue elle-même sur le litige.
34 En l’espèce, le Tribunal dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer définitivement sur le recours initialement introduit devant le Tribunal de la fonction publique par le requérant en tant qu’il demande l’annulation de la décision du 23 juillet 2014.
35 En première instance, le requérant a invoqué l’illégalité de la décision du 23 juillet 2014 qui a limité à cinq années le paiement de l’indemnité de dépaysement non versée, alors que, selon lui, aucune disposition du statut ne permettait à la Commission de fixer une telle limitation. À cet égard, le requérant prétendait que le délai raisonnable d’introduction d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut ne s’appliquait pas en l’espèce.
36 Il ressort de la décision du 23 juillet 2014 que le requérant était tenu de respecter les dispositions des articles 90 et 91 du statut et, en particulier, les délais impératifs prévus à ces dispositions. Dans la décision de rejet de la réclamation du 9 février 2015, l’autorité investie du pouvoir de nomination a précisé, en citant l’ordonnance du 9 juillet 2010, Marcuccio/Commission (F‑91/09, EU:F:2010:87), que la demande aurait dû être introduite dans un délai raisonnable de cinq ans et que, dès lors que le requérant l’avait introduite près de sept ans après le premier bulletin faisant apparaître le non-versement erroné, elle devait être considérée comme tardive.
37 Il suffit de rappeler, comme il ressort du point 29 ci-dessus, que le respect d’un délai raisonnable est requis dans tous les cas où, dans le silence des textes, les principes de sécurité juridique ou de protection de la confiance légitime font obstacle à ce que les institutions de l’Union et les personnes physiques ou morales agissent sans aucune limite de temps, risquant ainsi, notamment, de mettre en péril la stabilité de situations juridiques acquises.
38 Or, comme il a déjà été relevé au point 30 ci-dessus, dans les circonstances de l’espèce, compte tenu du fait non contesté que, depuis le 21 septembre 2007, le requérant avait droit à l’indemnité de dépaysement et que, depuis cette date, les crédits nécessaires à son paiement avaient été réservés, il n’existait aucun risque de mettre en péril une situation juridique acquise, justifiant dès lors le respect par le requérant d’un délai raisonnable en vue de demander le paiement de l’indemnité de dépaysement qui avait été, à tort, non versée. Bien au contraire, l’action de ce dernier s’inscrit dans l’ordre de la bonne exécution des engagements juridiques et budgétaires résultant de la fiche destinée à la section « Rémunérations » de l’unité « Rémunérations et gestion des droits pécuniaires individuels » du PMO du 21 septembre 2007.
39 Il s’ensuit que le recours en première instance doit être accueilli et que la décision du 23 juillet 2014 doit être annulée en ce que, en vertu de cette décision, constatant le caractère tardif de la demande formulée par le requérant, la Commission avait refusé de lui verser l’indemnité de dépaysement afférente à la période allant du 1er septembre 2007 au 30 avril 2009. S’agissant de la demande du requérant de condamner la Commission à lui verser la somme correspondant à l’indemnité de dépaysement non payée, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 266 TFUE, la Commission est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution du présent arrêt d’annulation. Partant, une telle demande, qui revient à ce que le Tribunal adresse une injonction à la Commission, ce qu’il ne lui appartient pas de faire, doit être rejetée comme irrecevable.
Sur les dépens
40 Conformément à l’article 211, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est fondé et que le Tribunal juge lui-même le litige, il statue sur les dépens.
41 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 211, paragraphe 1, du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
42 La Commission ayant succombé en l’essentiel de ses conclusions en ce qui concerne tant la procédure de pourvoi que de première instance, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du requérant.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)
déclare et arrête :
1) L’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 11 avril 2016, Zink/Commission (F‑77/15) est annulé.
2) La décision du 23 juillet 2014 de l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission européenne est annulée en ce que, en vertu de cette décision, la Commission avait refusé de verser à M. Richard Zink l’indemnité de dépaysement afférente à la période allant du 1er septembre 2007 au 30 avril 2009.
3) Le recours introduit devant le Tribunal de la fonction publique sous la référence F‑77/15 est rejeté pour le surplus.
4) La Commission est condamnée aux dépens afférents à la procédure de pourvoi et à la procédure de première instance.
Jaeger | Kanninen | Gratsias |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 février 2018.
Signatures
* Langue de procédure : le français.
© European Union
The source of this judgment is the Europa web site. The information on this site is subject to a information found here: Important legal notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.
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