Breyer v REA (Judgment) French Text [2021] EUECJ T-158/19 (15 December 2021)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2021/T15819.html
Cite as: EU:T:2021:902, ECLI:EU:T:2021:902, [2021] EUECJ T-158/19

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ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)

15 décembre 2021 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Programme‑cadre pour la recherche et l’innovation “Horizon 2020” (2014-2020) – Règlement (UE) no 1290/2013 – Documents relatifs au projet de recherche “iBorderCtrl : Intelligent Portable Border Control System” – Exception relative à la protection des intérêts commerciaux d’un tiers – Refus partiel d’accès – Intérêt public supérieur »

Dans l’affaire T‑158/19,

Patrick Breyer, demeurant à Kiel (Allemagne), représenté par Me J. Breyer, avocat,

partie requérante,

contre

Agence exécutive européenne pour la recherche (REA), représentée par Mmes S. Payan-Lagrou et V. Canetti, en qualité d’agents, assistées de Mes R. van der Hout et C. Wagner, avocats,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision de la REA du 17 janvier 2019 [ARES (2019) 266593], relative à l’accès partiel à des documents,

LE TRIBUNAL (dixième chambre),

composé de MM. A. Kornezov, président, E. Buttigieg (rapporteur) et G. Hesse, juges,

greffier : M. L. Ramette, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 5 février 2021,

rend le présent

Arrêt

I.      Antécédents du litige

1        Le 19 avril 2016, l’Agence exécutive européenne pour la recherche (REA) a conclu la convention de subvention no 700626 (ci‑après la « convention de subvention ») avec les membres d’un consortium en vue du financement du projet « iBorderCtrl : Intelligent Portable Control System » (ci‑après le « projet iBorderCtrl ») dans le cadre du programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon 2020 » (2014-2020) (ci‑après le « programme Horizon 2020 ») pour une période de 36 mois à compter du 1er septembre 2016.

2        La REA décrit le projet iBorderCtrl comme visant à tester des nouvelles technologies dans les scénarios de gestion contrôlée des frontières (« controlled border management scenarios ») qui pourraient accroître l’efficacité de la gestion des frontières extérieures de l’Union européenne et assurer la gestion plus rapide des voyageurs légitimes ainsi qu’une détection plus rapide des activités illégales. Toutefois, la REA relève que le projet ne concerne pas le développement d’une technologie visant la mise en œuvre effective d’un système fonctionnel avec de vrais clients.

3        Dans le cadre du financement et de la mise en œuvre du projet, la REA a reçu de la part des membres du consortium, conformément à la convention de subvention, certains documents relatifs à différentes étapes du développement du projet iBorderCtrl.

4        Le 5 novembre 2018, le requérant, M. Patrick Breyer, a soumis, sur le fondement du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), à la Commission européenne une demande d’accès (ci‑après la « demande initiale ») à plusieurs documents, d’une part, ceux relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl et, d’autre part, ceux élaborés au cours de ce projet. Ladite demande a été enregistrée le même jour sous la référence ARES (2018) 5639117 et a été transmise à la REA le 7 novembre 2018.

5        Par courrier du 23 novembre 2018 (ci-après la « décision initiale »), la REA a informé le requérant qu’un des documents demandés était accessible au public, qu’elle lui accordait un accès partiel à un autre document demandé et qu’elle rejetait sa demande d’accès s’agissant d’autres documents élaborés au cours du projet en justifiant le refus d’accès par l’application des exceptions visant la protection, d’une part, de la vie privée et de l’intégrité de l’individu au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, dans la mesure où les documents demandés contenaient des données à caractère personnel des personnes impliquées dans le projet ne relevant pas du domaine public, et, d’autre part, des intérêts commerciaux des membres du consortium, au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, de ce règlement.

6        Le 26 novembre 2018, le requérant a adressé à la Commission une demande confirmative d’accès enregistrée sous la référence ARES (2018) 6073379 (ci‑après la « demande confirmative »), tout en acceptant que les noms des personnes physiques impliquées dans le projet soient occultés dans les documents en cause.

7        Par décision du 17 janvier 2019 [ARES (2019) 266593], la REA a accordé au requérant un accès partiel à d’autres documents demandés et rejeté sa demande d’accès pour le surplus en invoquant la protection des intérêts commerciaux des membres du consortium au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 et en se référant notamment à l’article 3 du règlement (UE) no 1290/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2013, définissant les règles de participation au programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon 2020 » (2014-2020) et les règles de diffusion des résultats et abrogeant le règlement (CE) no 1906/2006 (JO 2013, L 347, p. 81) et à la convention de subvention (ci-après la « décision attaquée »). 

8        Le tableau suivant résume la position de la REA à l’égard des différents documents demandés élaborés au cours du projet iBorderCtrl (ci-après les « documents demandés ») :

Documents/résultats

Position de la REA

Informations confidentielles

D 1.1 Premier rapport du conseiller en éthique (Ethics advisor’s first report)

Refus d’accès

Évaluation éthique et juridique des outils, des composants techniques et des méthodes développés dans le projet

D 1.2 L’éthique du profilage, le risque de stigmatisation des individus et le plan de mitigation (Ethics of profiling, the risk of stigmatization of individuals and mitigation plan)

Refus d’accès

Évaluation éthique et juridique des outils, des composants technologiques et des méthodes développés dans le projet

D 1.3 Conseiller en éthique (Ethics Advisor)

Refus d’accès

Données du conseiller en éthique

D 2.1 Rapport de l’analyse des exigences (Requirement Analysis Report)

Refus d’accès

Solutions technologiques et description de l’architecture globale du système

D 2.2 Architecture de référence et spécification des composants (Reference Architecture and components specification)

Refus d’accès

Solutions technologiques et description de l’architecture globale du système

D 2.3 Rapport d’examen juridique et éthique à l’échelle de l’UE (EU wide legal and ethical review report)

Refus d’accès

Évaluation éthique et juridique des outils, des composants technologiques et des méthodes développés dans le projet

D 3.1 Dispositifs de collecte de données – spécifications (Data Collection Devices – specifications)

Accès partiel

Les parties noircies du document contiendraient des informations qui affectent les intérêts commerciaux

D 7.3 Plan de diffusion et communication (Dissemination and communication plan)

Accès partiel

Les parties noircies du document contiendraient des informations qui affectent les intérêts commerciaux

D 7.6 Rapport de communication annuel, y compris le matériel de communication (Yearly communication report including communication material)

Indication : document publiquement accessible

Aucune

D 7.8 Plan de diffusion et communication 2 (Dissemination and communication plan 2)

Accès partiel

Les parties noircies du document contiendraient des informations qui affectent les intérêts commerciaux

D 8.1 Plan de gestion de la qualité (Quality Management Plan)

Refus d’accès

Informations confidentielles du consortium relatives à la gestion du projet, de la planification des mesures techniques à la livraison des résultats

D 8.3 Rapport de progrès périodique (Periodic Progress Report)

Refus d’accès

Description des progrès techniques concernant les différents lots de travail

D 8.4 Rapport annuel (Annual Report)

Refus d’accès

Description des progrès techniques concernant les différents lots de travail

D 8.5 Rapport de progrès périodique 2 (Periodic Progress Report 2)

Refus d’accès

Description des progrès techniques concernant les différents lots de travail

D 8.7 Rapport annuel 2 (Annual Report 2)

Refus d’accès

Description des progrès techniques concernant les différents lots de travail

II.    Procédure et conclusions des parties

9        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 mars 2019, le requérant a introduit le présent recours dans lequel la Commission a été formellement désignée comme étant la partie défenderesse.

10      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 18 juin 2019, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité en application de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Par ordonnance du 12 novembre 2019, le Tribunal a décidé qu’il y avait lieu de considérer que la partie contre laquelle le présent recours avait été introduit n’était pas la Commission, mais la REA et que, dès lors, il n’y avait pas lieu de statuer sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission.

11      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 20 juin 2020, le requérant a présenté des nouvelles offres de preuve et des nouveaux éléments de preuve. La REA a présenté ses observations sur ceux-ci dans le délai imparti.

12      Dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure adoptée le 17 novembre 2020 au titre de l’article 89 de son règlement de procédure, le Tribunal a invité le requérant à produire l’annexe 1 de la décision initiale, ainsi qu’à répondre à une question écrite. Le requérant n’a pas déféré à cette demande dans le délai imparti. En dépit du non-respect dudit délai, par décision du 10 décembre 2021, en application de l’article 62 du règlement de procédure, le président de la dixième chambre du Tribunal a décidé que l’instruction de la présente affaire serait facilitée par le versement au dossier des documents présentés tardivement. Ainsi, la réponse du requérant et le document demandé ont été versés au dossier.

13      Par ordonnance du 26 novembre 2020, adoptée en application de l’article 91, sous c), du règlement de procédure, le Tribunal a ordonné à la REA de produire des copies de la convention de subvention et des versions confidentielles de tous les documents liés à la demande confirmative auxquels l’accès total ou partiel a été refusé. La REA a déféré à cette demande dans le délai imparti. Conformément à l’article 104 du règlement de procédure, ces documents n’ont pas été communiqués au requérant.

14      Le 17 février 2021, la phase orale de la procédure a été clôturée.

15      Par lettre déposé au greffe du Tribunal le 23 mars 2021, le requérant a présenté des documents. Par ordonnance du 21 avril 2021, le Tribunal a décidé de rouvrir la phase orale de la procédure, conformément à l’article 113, paragraphe 2, sous a), du règlement de procédure et, par décision du même jour, il a décidé de verser au dossier les documents déposés par le requérant le 23 mars 2021 et d’inviter la REA à présenter ses observations sur ceux-ci. Cette dernière a présenté ses observations dans le délai imparti.

16      Par décision du Tribunal du 16 juin 2021, la procédure orale a été de nouveau clôturée.

17      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la REA aux dépens.

18      La REA conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens, y compris ceux afférents au dépôt des nouvelles offres de preuve et des nouveaux éléments de preuve.

III. En droit

19      À l’appui de son recours, le requérant invoque deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret et dernier membre de phrase, du règlement no 1049/2001 et, le second, d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 8, paragraphe 1, du même règlement.

20      Dans la mesure où le second moyen porte sur le champ même de la demande d’accès, il convient de l’examiner d’abord.

A.      Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001

21      Le requérant fait valoir que la REA a violé l’article 7, paragraphe 1, et l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001 en ce que la décision initiale et la décision attaquée ont porté sur les seuls documents demandés élaborés au cours du projet iBorderCtrl, à l’exclusion de ceux relatifs à l’autorisation même du projet en cause, lesquels étaient pourtant également visés dans la demande d’accès.

22      Le requérant précise à cet égard que la demande confirmative s’est référée expressément à la demande initiale, dans laquelle il avait mentionné les documents relatifs à l’autorisation du projet en cause, de sorte qu’il était superflu d’énumérer de nouveau dans la demande confirmative chacun des documents auxquels l’accès avait été demandé. Il fait valoir que, en l’absence de tout retrait partiel de la demande d’accès, la REA ne pouvait pas supposer que la demande confirmative ne portait plus sur tous les documents visés dans la demande initiale.

23      La REA relève que, conformément à l’article 8 du règlement no 1049/2001, la décision attaquée a visé tous les documents auxquels le requérant avait demandé l’accès dans sa demande confirmative. Or, cette dernière n’ayant pas fait référence aux documents relatifs à l’autorisation du projet en cause, qui n’étaient déjà pas mentionnés ni nommés dans la décision initiale ni visés par la motivation de celle‑ci, et lesdits documents n’ayant pas été mentionnés, même indirectement, dans le cadre des motifs de la demande confirmative, la REA aurait présumé que ces documents ne faisaient pas l’objet de la demande confirmative. Si le requérant avait voulu étendre sa demande confirmative à ces documents, il aurait dû s’y référer expressément dans sa demande confirmative. Toutefois, rien n’empêcherait le requérant de soumettre une demande d’accès portant sur ces documents dans le futur.

24      Par le second moyen, le requérant fait valoir, en substance, que la REA n’a pas examiné de manière complète la demande d’accès en ce qu’elle a omis de prendre position sur celle-ci pour autant qu’elle portait sur les documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl.

25      Il est constant entre les parties que, dans la demande initiale, le requérant avait sollicité l’accès, notamment, à tous les documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl. Il est également constant que ces documents n’ont pas été mentionnés dans la décision initiale. En effet, ils ne figurent pas parmi les documents énumérés sous le titre A de la décision initiale comme relevant du champ de la demande initiale. De même, sous le titre B de la décision initiale, consacré à l’examen de la demande d’accès, la REA précisait qu’elle considérait que c’étaient les documents énumérés dans l’annexe 1 de celle‑ci qui faisaient partie de la demande initiale. Or, les documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl n’étaient pas mentionnés dans ladite annexe. Par ailleurs, la motivation de la décision initiale ne visait pas ces documents, ce qui est admis explicitement par la REA. En effet, cette décision se référait systématiquement aux documents demandés tels que définis préalablement dans la même décision, dont les documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl ne faisaient pas partie.

26      À cet égard, il convient de rappeler que le règlement no 1049/2001 vise, comme l’indiquent son considérant 4 et son article 1er, à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible, le bénéfice d’un tel droit n’étant pas subordonné, en application de l’article 6, paragraphe 1, de ce règlement, à une justification de la demande.

27      Lorsque la divulgation d’un document est demandée à une institution, un organe ou un organisme de l’Union, ceux-ci sont tenus d’apprécier, dans chaque cas d’espèce, si ce document relève des exceptions au droit d’accès du public aux documents des institutions énumérées à l’article 4 du règlement no 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêt du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, EU:C:2008:374, point 35).

28      En outre, ainsi que cela ressort des termes du considérant 13 du règlement no 1049/2001, l’application d’une procédure administrative en deux phases, assortie d’une possibilité de recours juridictionnel ou de plainte auprès du Médiateur européen, a été prévue afin d’assurer le plein respect du droit d’accès du public aux documents des institutions de l’Union.

29      De même, selon la jurisprudence, les articles 7 et 8 du règlement no 1049/2001, en prévoyant une procédure en deux temps, ont pour objectif de permettre, d’une part, un traitement rapide et facile des demandes d’accès aux documents des institutions concernées ainsi que, d’autre part, de manière prioritaire, un règlement amiable des différends pouvant éventuellement surgir (arrêt du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, EU:C:2010:40, point 53).

30      Il ressort des points 25 à 29 ci-dessus que l’institution, l’organe ou l’organisme concerné est tenu de procéder à un examen complet de l’ensemble des documents visés dans la demande de divulgation. Une telle exigence s’applique, en principe, non seulement lors du traitement d’une demande confirmative, au sens de l’article 8 du règlement no 1049/2001, mais aussi lors du traitement d’une demande initiale, au sens de l’article 7 dudit règlement (arrêt du 22 mai 2012, Internationaler Hilfsfonds/Commission, T‑300/10, EU:T:2012:247, point 69).

31      Or, il ressort des éléments mis en exergue au point 25 ci-dessus que, en l’espèce, la REA a omis de statuer sur la demande d’accès initiale pour autant qu’elle visait les documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl en violation de son obligation d’examen complet de ladite demande. Une telle abstention de sa part porte manifestement atteinte aux objectifs poursuivis par le règlement no 1049/2001 de traitement rapide et facile des demandes d’accès et d’un règlement amiable des différends, tels que rappelés au point 29 ci-dessus (voir, en ce sens, arrêt du 22 mai 2012, Internationaler Hilfsfonds/Commission, T‑300/10, EU:T:2012:247, point 73).

32      La REA fait valoir qu’il appartenait au requérant de viser explicitement les documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl dans sa demande confirmative faute de quoi elle pouvait présumer que ces documents n’étaient pas couverts par ladite demande.

33      À cet égard, d’une part, il importe de souligner que, dans la demande confirmative d’accès, le requérant a explicitement indiqué que celle-ci faisait suite à sa demande d’accès initiale. Aucun passage de la demande confirmative ne laisse apparaître que le requérant aurait procédé au retrait de sa demande d’accès aux documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl. L’intention du requérant visant à réitérer sa demande d’accès à l’ensemble des documents visés dans la demande initiale ressort également du fait, mis en avant par le requérant, qu’il a explicitement accepté de faire d’autres concessions à la suite de la décision initiale, à savoir d’accepter que les données à caractère personnel contenues dans les documents en cause soient occultées. Dans ces circonstances, la REA ne pouvait pas présumer que, dans le cadre de sa demande confirmative, le requérant avait renoncé de demander l’accès aux documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl.

34      D’autre part, pour autant que, par un tel argument, la REA soutient, en substance, que le requérant aurait dû explicitement contester, dans le cadre de la demande confirmative, l’omission de statuer, dans la décision initiale, sur sa demande d’accès pour autant qu’elle portait sur les documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl, un tel argument ne saurait prospérer. En effet, une omission de sa part de statuer, dans la décision initiale, sur une partie de la demande initiale d’accès a eu pour conséquence que la deuxième étape de la procédure à l’égard des documents concernés par cette omission n’a pas été déclenchée. Une approche contraire, défendue par la REA, contreviendrait aux objectifs visés par les articles 7 et 8 du règlement no 1049/2001, tels que rappelés au point 29 ci-dessus.

35      Enfin, il est certes vrai que, ainsi que le soutient la REA, une personne peut former une nouvelle demande d’accès portant sur des documents auxquels l’accès lui a été précédemment refusé et qu’une telle demande oblige l’institution concernée à examiner si le refus d’accès antérieur demeure justifié au regard d’une modification de la situation de droit ou de fait intervenue entre-temps (voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, EU:C:2010:40, points 56 et 57).

36      Toutefois, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, une omission de statuer sur une partie d’une demande d’accès ne saurait être assimilée à un refus d’accès (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, points 122 et 123). En conséquence, une telle possibilité de présenter une nouvelle demande d’accès ne saurait servir pour remédier à un défaut d’examen complet par l’institution concernée de la première demande d’accès ou constituer un argument pour priver le demandeur d’une possibilité de recours dont il dispose en vertu de l’article 8, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 (voir, en ce sens, conclusions de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:455, point 40).

37      Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient d’accueillir le second moyen et d’annuler la décision attaquée dans la mesure où la REA a omis de statuer sur la demande du requérant en ce que celle-ci visait à obtenir l’accès aux documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl.

B.      Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, et de l’article 4, paragraphe 2, dernier membre de phrase, du règlement no 1049/2001

38      Le premier moyen est divisé en deux branches, la première étant tirée de l’absence d’atteinte à la protection des intérêts commerciaux au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 et, la seconde étant tirée de l’existence d’un intérêt public supérieur à la divulgation des documents en cause au sens de l’article 4, paragraphe 2, dernier membre de phrase, de ce règlement.

39      À titre liminaire, il convient d’examiner la recevabilité, contestée par la REA, des nouveaux éléments de preuve et des nouvelles offres de preuve présentés par le requérant dans sa lettre du 20 juin 2020 et du grief par lequel celui-ci fait valoir que la REA aurait dû lui accorder à tout le moins un accès partiel aux documents demandés.

1.      Sur la recevabilité des nouveaux éléments de preuve et des nouvelles offres de preuve

40      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 20 juin 2020, le requérant a soumis quelques extraits de sites Internet au titre de nouveaux éléments de preuve et a présenté des nouvelles offres de preuve consistant en des références à ces sites Internet. Dans le cadre de ses observations du 9 juillet 2020 sur ceux-ci, la REA soutient, d’une part, que ces éléments de preuve et ces offres de preuve sont irrecevables, car ils ont été présentés tardivement et sans que le retard dans leur présentation ait été dûment justifié par le requérant. D’autre part, la REA conteste la présentation des faits proposée par le requérant sur le fondement de ces éléments de preuve.

41      Aux termes de l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure, à titre exceptionnel, les parties principales peuvent encore produire des preuves ou faire des offres de preuve avant la clôture de la phase orale de la procédure ou avant la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié. Cependant, il ressort de la jurisprudence que la preuve contraire et l’ampliation des offres de preuve fournies à la suite d’une preuve contraire de la partie adverse dans le mémoire en duplique ne sont pas visées par la règle de forclusion prévue par ladite disposition. En effet, cette disposition concerne les offres de preuve nouvelles et doit être lue à la lumière de l’article 92, paragraphe 7, dudit règlement, qui prévoit expressément que la preuve contraire et l’ampliation des offres de preuve restent réservées (voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2004, M/Cour de justice, T‑172/01, EU:T:2004:108, point 44 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 12 décembre 2018, Servier e.a./Commission, T‑691/14, sous pourvoi, EU:T:2018:922, point 1460 et jurisprudence citée). Par ailleurs, il a déjà été jugé que la présentation tardive, par une partie, de preuves ou d’offres de preuve pouvait être justifiée, notamment, si les productions tardives de la partie adverse justifient que le dossier soit complété, de façon à assurer le respect du principe du contradictoire (arrêt du 14 avril 2005, Gaki-Kakouri/Cour de justice, C‑243/04 P, non publié, EU:C:2005:238, point 32).

42      En l’espèce, les éléments de preuve et les offres de preuve présentés par le requérant dans sa lettre du 20 juin 2020 ne peuvent pas être déclarés irrecevables au motif qu’ils auraient été produits après le dépôt de la duplique en méconnaissance de l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure. En effet, ainsi que le requérant indique dans sa lettre du 20 juin 2020, ces éléments de preuve et ces offres de preuve visent à répondre à l’argument de la REA au point 17 de la duplique selon lequel seuls les gardes-frontières et des collaborateurs du projet iBorderCtrl pouvaient participer aux essais pilotes de ce projet.

43      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument que la REA tire du fait que le requérant a déjà soutenu dans la réplique que chacun avait pu participer aux essais pilotes et qu’il aurait ainsi pu produire, dès ce stade, les éléments de preuve ou faire les offres de preuve au soutien de cette affirmation.

44      En effet, la positi on exprimée par la REA au point 17 de la duplique ne ressort pas de la décision initiale, de la décision attaquée ou du mémoire en défense, de sorte que le requérant, qui n’a pris connaissance de celle-ci qu’avec la duplique, n’était pas obligé de soutenir son argument présenté dans la réplique par des éléments de preuve contraire.

45      Partant, la règle de forclusion prévue à l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure ne trouve pas à s’appliquer à l’égard des éléments de preuve et des offres de preuve présentés par le requérant dans sa lettre du 20 juin 2020, de sorte que ceux-ci sont recevables.

2.      Sur la recevabilité du grief tiré d’une omission à accorder un accès partiel

46      La REA soutient que l’objet du premier moyen, tel qu’il est formulé dans la requête, est limité à une violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Ainsi, le grief tiré du non-respect de l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001, en ce que la REA n’a pas accordé à tout le moins un accès partiel aux documents demandés, invoqué pour la première fois au stade de la réplique, serait irrecevable.

47      Le requérant fait valoir que le grief selon lequel la REA aurait dû communiquer au moins une partie des documents demandés n’est pas nouveau. D’une part, il ne serait pas nécessaire que l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001 soit « cité séparément », dans la mesure où la REA a elle-même divulgué les documents en cause partiellement occultés. D’autre part, la question d’une divulgation au moins partielle des documents demandés a été invoquée déjà au stade de la requête.

48      À cet égard, il convient de relever que, s’il n’est, certes, pas indispensable pour la recevabilité d’un grief de mentionner explicitement une disposition dont une violation est alléguée, il doit néanmoins ressortir clairement de l’argumentation telle que présentée dès le stade de la requête que le requérant entendait faire valoir une telle violation.

49      En l’espèce, ainsi que le soutient le requérant, plusieurs passages de la requête doivent être compris comme relevant d’un grief tiré implicitement, mais nécessairement, d’une violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001.

50      En effet, au point 26 de la requête, le requérant a fait valoir que différentes parties des documents auxquels il avait demandé accès pouvaient être divulguées sans qu’il soit porté atteinte aux intérêts commerciaux du consortium. En outre, en faisant valoir, au point 28 de la requête, en s’appuyant sur la jurisprudence, que la REA a omis d’examiner en détail les documents demandés afin de vérifier dans quelles mesures ils contenaient des informations nouvelles essentielles qui n’étaient pas encore connues, le requérant a visé, implicitement, mais nécessairement, une obligation de la REA d’examiner si un accès partiel auxdits documents pouvait être accordé du fait qu’ils contiendraient des informations accessibles au public ne constituant pas une compilation de telles informations digne de protection au titre de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

51      Dans ces conditions, il convient de considérer que les arguments plus détaillés présentés dans la réplique constituent une ampliation du grief tiré d’un refus d’accès au moins partiel aux documents demandés invoqué au stade de la requête. L’argument de la REA selon lequel ce grief est irrecevable doit donc être rejeté.

3.      Sur la première branche du premier moyen, tirée de l’absence d’atteinte à la protection des intérêts commerciaux

52      Dans le cadre de leur argumentation relative à la première branche du premier moyen, les parties s’opposent notamment sur la question relative à l’application au cas d’espèce du règlement no 1290/2013, des clauses de la convention de subvention et de l’article 339 TFUE, question qu’il convient d’examiner au préalable.

a)      Sur l’application en l’espèce du règlement no 1290/2013, des clauses de la convention de subvention et de l’article 339 TFUE

53      Le requérant fait valoir que le fondement juridique de l’examen de la légalité de la décision attaquée doit être le règlement no 1049/2001, et non le règlement no 1290/2013, les clauses de la convention de subvention ou l’article 339 TFUE également invoqués par la REA dans la décision attaquée au soutien du refus d’accès. En tout état de cause, selon le requérant, le règlement no 1290/2013 ne saurait primer le règlement no 1049/2001 et il ne pourrait pas être dérogé à l’application dudit règlement par un contrat, tel que la convention de subvention.

54      La REA soutient que le requérant affirme à tort que ni le règlement no 1290/2013 ni l’article 339 TFUE ne sont pertinents aux fins de l’appréciation de sa demande d’accès aux documents en cause. Selon la REA, même si les dispositions plus récentes du règlement no 1290/2013 n’ont pas été expressément désignées comme plus spécifiques à l’égard du règlement no 1049/2001, les deux règlements doivent être respectés et conciliés par une application cohérente, le règlement no 1290/2013, et plus particulièrement son article 3, accordant à cet égard une protection complémentaire et renforcée de l’accès aux documents relevant de cette disposition. Par ailleurs, la convention de subvention contiendrait des dispositions sur la confidentialité et l’accès aux documents créés dans le cadre du projet iBorderCtrl au sens de l’article 3 du règlement no 1290/2013. Ainsi, en application de l’article 36.1 de la convention de subvention, les documents demandés, lesquels étaient désignés comme étant « confidentiels », ne pouvaient pas être diffusés.

55      L’examen de cette question implique de rappeler que, en application de l’article 2, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001, les dispositions relatives à l’accès du public aux documents de la REA s’appliquent à tous les documents détenus par cette agence, c’est-à-dire à tous les documents établis ou reçus par elle et en sa possession, dans tous ses domaines d’activité. En outre, si ledit règlement vise à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible, ce droit est toutefois soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé (voir, en ce sens, arrêts du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 88, et du 5 février 2018, Pari Pharma/EMA, T‑235/15, EU:T:2018:65 point 39 et jurisprudence citée).

56      Le régime des exceptions prévu à l’article 4 du règlement no 1049/2001 est fondé sur une mise en balance des intérêts qui s’opposent dans une situation donnée, à savoir, d’une part, les intérêts qui seraient favorisés par la divulgation des documents concernés et, d’autre part, ceux qui seraient menacés par cette divulgation. La décision prise sur une demande d’accès à des documents dépend de la question de savoir quel est l’intérêt qui doit prévaloir dans le cas d’espèce (voir arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 63 et jurisprudence citée).

57      Alors que l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union concerné doit fournir des explications quant à la question de savoir comment l’accès à un document dont la divulgation a été demandée pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par une exception prévue à l’article 4 du règlement no 1049/2001, la Cour a reconnu qu’il est loisible à l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union de se fonder, à cet égard, sur des présomptions générales s’appliquant à certaines catégories de documents, des considérations d’ordre général similaires étant susceptibles de s’appliquer à des demandes de divulgation portant sur des documents de même nature (voir arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, points 64 et 65 et jurisprudence citée).

58      Dans la décision attaquée, pour fonder le refus partiel d’accès aux documents demandés, la REA a invoqué la protection des intérêts commerciaux des membres du consortium au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, mais en estimant que cette dernière disposition devait être interprétée conformément aux dispositions relatives à la confidentialité figurant à l’article 3 du règlement no 1290/2013 et à l’article 36 de la convention de subvention relative au projet iBorderCtrl. En s’appuyant sur la jurisprudence des juridictions de l’Union, la REA a estimé que le règlement no 1049/2001 et le règlement no 1290/2013 devaient donc être appliqués de manière à assurer une application de chacun desdits règlements qui soit compatible avec celle de l’autre et qui permettrait ainsi leur application cohérente.

59      L’article 3 du règlement no 1290/2013, intitulé « Confidentialité », prévoit que des données, des connaissances et des informations communiquées sous le sceau de la confidentialité dans le cadre d’une action restent confidentielles, sous réserve des conditions définies dans les accords, les décisions ou les contrats de mise en œuvre et en tenant compte du droit de l’Union relatif à la protection des informations classifiées et à l’accès de telles informations. La confidentialité des documents soumis à la REA dans le cadre du projet iBorderCtrl est soumise, notamment, aux conditions définies dans la convention de subvention dont l’article 36.1 prévoit qu’au cours de l’exécution de l’action et quatre ans après la période de 36 mois à partir du début de l’action, les parties doivent assurer la confidentialité de toute donnée, tout document ou autre matériel désigné comme étant confidentiel au moment de sa divulgation. Ce délai n’avait pas expiré lors de la demande initiale du requérant.

60      Il convient de relever que, dans le cadre du présent recours, la REA soutient que, l’objectif spécifique de l’article 3 du règlement no 1290/2013 étant de limiter l’accès des tiers aux documents couverts par cette disposition, les documents désignés comme étant « confidentiels » en application de l’article 36.1 de la convention de subvention ne pouvaient pas être diffusés à un tiers. En effet, selon la REA, lorsqu’une protection au titre du règlement no 1290/2013 et de la convention de subvention s’applique, la protection « supplémentaire » ou « renforcée » ainsi instaurée doit être garantie au risque de porter atteinte au succès des projets financés, lequel repose sur la disponibilité des chercheurs de participer aux projets, cette disponibilité pouvant être compromise si les documents soumis, contenant souvent des solutions innovantes et des informations commercialement sensibles, risquaient d’être divulgués au titre du règlement no 1049/2001. L’esprit et les dispositions du règlement no 1290/2013 et de la convention de subvention régissant une telle protection « supplémentaire » seraient vidés de leur sens si le public avait accès à des documents relatifs au projet en cause désignés comme étant confidentiels.La REA indique donc avoir « présumé » que les documents du consortium qualifiés de confidentiels, en application de l’article 36.1 de la convention de subvention, contenaient des informations sensibles dont la divulgation porterait atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium.

61      Par une telle argumentation, la REA plaide implicitement, mais nécessairement, en faveur de l’instauration d’une présomption générale selon laquelle les documents communiqués à la REA par un participant à une action sous le sceau de confidentialité au sens de l’article 3 du règlement no 1290/2013 et de l’article 36.1 de la convention de subvention ne devraient pas être divulgués à un tiers sans qu’il soit nécessaire d’examiner concrètement si une des exceptions au principe de transparence prévues par le règlement no 1049/2001 s’appliquait auxdits documents.

62      Par ailleurs, en s’appuyant sur la jurisprudence relative aux présomptions générales de non-divulgation, la REA invite le Tribunal à examiner l’application, en l’espèce, d’une telle présomption générale fondée sur le règlement no 1290/2013.

63      À cet égard, il convient de rappeler que l’application de la présomption générale de confidentialité est facultative pour l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union saisi d’une demande d’accès aux documents (voir arrêt du 22 janvier 2020, MSD Animal Health Innovation et Intervet international/EMA, C‑178/18 P, EU:C:2020:24, point 59 et jurisprudence citée).

64      Ainsi, même à supposer qu’une telle présomption générale s’appliquait en l’espèce, force est de constater que, dans la décision attaquée, la REA n’a pas répondu à la demande d’accès aux documents en cause en se prévalant d’une telle présomption générale de confidentialité mais a examiné de manière concrète et individuelle si, notamment eu égard à la protection conférée auxdits documents par l’article 3 du règlement no 1290/2013 et à l’article 36.1 de la convention de subvention, l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 devait s’appliquer à leur égard. Par ailleurs, la REA a explicitement admis tant dans ses écrits que lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, avoir procédé à un examen concret et individuel de la possibilité d’accorder l’accès aux documents demandés.

65      En conséquence, l’ensemble des arguments par lesquels la REA fait valoir implicitement, mais nécessairement, l’existence d’une présomption générale de non-divulgation des documents demandés fondée sur leur caractère confidentiel en vertu de l’article 3 du règlement no 1290/2013 et de l’article 36.1 de la convention de subvention sont inopérants.

66      Toutefois, une telle conclusion n’a pas pour conséquence que, contrairement à ce que soutient le requérant, seul le règlement no 1049/2001 s’applique en l’espèce. En effet, il ressort de la jurisprudence que, lorsque les règlements ne comportent pas de dispositions prévoyant expressément la primauté de l’un sur l’autre, il convient d’assurer une application de chacun desdits règlements qui soit compatible avec celle de l’autre et en permette ainsi une application cohérente (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 84 et jurisprudence citée).

67      En l’espèce, l’article 3 du règlement no 1290/2013 et l’article 36.1 de la convention de subvention posent et mettent en œuvre la règle de la confidentialité des informations et des documents relatifs au projet en cause qui ont été identifiés comme étant « confidentiels », en l’occurrence dans l’annexe I de ladite convention. Si ledit règlement et la convention de subvention instaurent certaines exceptions, notamment s’agissant de la mise à la disposition des institutions, des organes et des organismes de l’Union et des États membres des informations conformément à l’article 4 de ce règlement et à l’article 36.1 de ladite convention, ou relatives à l’obligation de diffusion des résultats conformément à l’article 43, paragraphe 2, du même règlement ainsi que des articles 29.1 et 29.2 de la convention de subvention, ils préservent néanmoins le principe de confidentialité des informations à l’égard du public en général au cours de la période déterminée dans la convention de subvention.

68      Par ailleurs, ainsi qu’il ressort de l’article 38.2.1 de la convention de subvention, le droit de la REA d’utiliser le matériel, les documents et les informations des bénéficiaires englobe l’octroi de l’accès en réponse à des demandes individuelles en application du règlement no 1049/2001. Toutefois, conformément à cette disposition, ce droit est sans effet, notamment, sur les obligations en matière de confidentialité prévues à l’article 36 de la convention de subvention, qui continuent à s’appliquer.

69      Il s’ensuit que c’est à bon droit que la REA a tenu compte, dans la décision attaquée, de la protection de la confidentialité prévue à l’égard des documents demandés en vertu de l’article 3 du règlement no 1290/2013 et de l’article 36.1 de la convention de subvention lors de l’examen concret et individuel des documents demandés au regard de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

70      Contrairement à la thèse défendue par le requérant, l’article 36.1, sous e), de la convention de subvention, selon lequel, en substance, les obligations de confidentialité garanties en vertu de l’article 3 du règlement no 1290/2013 ne s’appliquent plus si la divulgation de l’information est requise par la législation de l’Union ou nationale, ne saurait être interprété en ce sens que le principe d’accès aux documents résultant du règlement no 1049/2001 prévaut nécessairement sur la protection de la confidentialité des documents instaurée par le règlement no 1290/2013. En effet, si la thèse du requérant était suivie, celle-ci aurait pour conséquence de priver d’effet pour l’essentiel l’obligation générale visée à l’article 3 de ce règlement d’assurer le traitement confidentiel des documents désignés comme tels, que, conformément à l’article 18, paragraphe 3, du même règlement, ladite convention est censée respecter en définissant les droits et les obligations des parties. Cela étant, l’article 36.1, sous e), de la convention de subvention reflète la nécessité, rappelée au point 66 ci-dessus, d’assurer une application des règlements no 1290/2013 et n° 1049/2001 qui soit compatible avec celle de l’autre et qui en permette une application cohérente.

71      Ainsi, le fait que les documents soumis à la REA par un participant à une action, comme en l’espèce les membres du consortium, ont été qualifiés, par les parties à la convention, de confidentiels constitue un indice pour la REA, lorsqu’elle examine la demande d’accès d’un tiers à ces documents, que leur contenu est sensible du point de vue des intérêts de ce participant. La qualification des documents communiqués à la REA de confidentiels dans le cadre d’un projet ne saurait toutefois être suffisante pour justifier l’application de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 et ne dispense pas la REA, dans le cadre de l’examen concret et individuel de la demande d’accès à ces documents désignés comme étant « confidentiels », de son obligation d’examiner s’ils relèvent partiellement ou dans leur intégralité de cette exception (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 4 mai 2012, In ’t Veld/Conseil, T‑529/09, EU:T:2012:215, point 21 et jurisprudence citée).

72      En outre, l’examen diligent par l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union de toute demande d’un tiers visant l’accès aux documents au titre du règlement no 1049/2001, et notamment de l’application des exceptions visées à l’article 4 de ce règlement, vise à garantir la mise en balance entre, d’une part, le droit du public à avoir accès à ces documents et, d’autre part, la protection des intérêts légitimes des personnes concernées, de sorte que ne sont pas fondées les préoccupations de la REA selon lesquelles l’application du règlement no 1049/2001 aux documents qui lui sont communiqués sous le sceau de la confidentialité dissuaderait les chercheurs de participer aux actions financées sur le fondement du règlement no 1290/2013, en raison du fait que ceux-ci craindraient la divulgation aux tiers des informations confidentielles.

73      Enfin, contrairement à ce que soutient le requérant, c’est également à bon droit que la REA a examiné si les informations contenues dans les documents demandés contenaient notamment des informations susceptibles d’être couvertes par le secret professionnel au sens de l’article 339 TFUE afin de refuser, le cas échéant, leur divulgation en application de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

74      C’est à la lumière de ces précisions qu’il convient d’examiner le premier moyen du recours.

b)      Sur l’application en l’espèce de l’exception visant à la protection des intérêts commerciaux des tiers et la possibilité d’accorder au moins un accès partiel

75      Le requérant fait valoir que, contrairement à ce qu’a retenu la REA dans la décision attaquée, les documents demandés pouvaient être divulguées, intégralement ou en partie, sans qu’il soit porté atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium.

76      La REA soutient que, dans la décision attaquée, elle a vérifié individuellement tous les documents concernés et expliqué qu’ils contenaient des informations internes des membres du consortium concernant la propriété intellectuelle, les recherches en cours, le savoir-faire, les méthodes, les techniques et les stratégies du consortium, dont la diffusion porterait atteinte aux intérêts commerciaux de celui-ci, car elle procurerait un avantage aux concurrents potentiels des membres du consortium. Ce faisant, elle aurait agi conformément au règlement no 1049/2001, à la jurisprudence applicable et au titre III du règlement no 1290/2013, et aurait correctement tenu compte de la protection de la confidentialité des informations qui lui ont été soumises dans le cadre du projet iBorderCtrl résultant de l’article 3 de ce dernier règlement. Le requérant n’aurait pas démontré que son évaluation était incorrecte.

77      À cet égard, il importe de rappeler que, en vertu de l’article 15, paragraphe 3, TFUE, tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre ont un droit d’accès aux documents des institutions, des organes et des organismes de l’Union sous réserve des principes et des conditions qui sont fixés conformément à la procédure législative ordinaire. Le droit d’accès aux documents a été consacré à l’article 42 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

78      Le règlement no 1049/2001 vise, comme l’indiquent le considérant 4 et l’article 1er de celui-ci, à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible (voir arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 40 et jurisprudence citée).

79      Le principe de l’accès le plus large possible du public aux documents n’en est pas moins soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé. En effet, le règlement no 1049/2001, notamment en son considérant 11 et en son article 4, prévoit un régime d’exceptions imposant aux institutions et aux organismes de ne pas divulguer des documents dans le cas où cette divulgation porterait atteinte à l’un de ces intérêts (voir, en ce sens, arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 40 et jurisprudence citée, et du 13 janvier 2017, Deza/ECHA, T‑189/14, EU:T:2017:4, point 51).

80      Dès lors que les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 dérogent au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, elles doivent être interprétées et appliquées strictement (voir, en ce sens, arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 75).

81      Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence rappelée au point 56 ci-dessus, le régime des exceptions prévu à l’article 4 du règlement no 1049/2001 est fondé sur une mise en balance des intérêts qui s’opposent dans une situation donnée, à savoir, d’une part, les intérêts qui seraient favorisés par la divulgation des documents concernés et, d’autre part, ceux qui seraient menacés par cette divulgation. La décision prise sur une demande d’accès à des documents dépend de la question de savoir quel est l’intérêt qui doit prévaloir dans le cas d’espèce (voir arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 63 et jurisprudence citée).

82      Pour justifier le refus d’accès à un document, il ne suffit pas, en principe, que ce document relève d’une activité ou d’un intérêt mentionnés à l’article 4 du règlement no 1049/2001, l’institution concernée devant, en principe, expliquer également comment l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par une exception prévue à cet article (voir arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 64 et jurisprudence citée).

83      Quant au concept d’« intérêts commerciaux », il ressort de la jurisprudence que toute information relative à une société et à ses relations d’affaires ne saurait être considérée comme relevant de la protection qui doit être garantie aux intérêts commerciaux conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, sauf à tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions (voir arrêt du 13 janvier 2017, Deza/ECHA, T‑189/14, EU:T:2017:4, point 55 et jurisprudence citée).

84      Ainsi, afin d’appliquer l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, il est nécessaire de démontrer que les documents litigieux contiennent des éléments susceptibles, du fait de leur divulgation, de porter atteinte aux intérêts commerciaux d’une personne morale. Il en est ainsi lorsque, notamment, les documents demandés contiennent des informations commerciales sensibles relatives, en particulier, aux stratégies commerciales des entreprises concernées, à leurs relations commerciales et aux méthodes de travail ou lorsque ceux-ci contiennent des données propres à l’entreprise qui mettent en avant son expertise (voir arrêt du 9 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, points 82 à 84 et jurisprudence citée ; voir également, arrêt du 13 janvier 2017, Deza/ECHA, T‑189/14, EU:T:2017:4, point 56).

85      Selon la jurisprudence, l’examen de l’accès partiel à un document des institutions, des organes ou des organismes de l’Union doit être réalisé à l’aune du principe de proportionnalité (voir, en ce sens, arrêt du 6 décembre 2001, Conseil/Hautala, C‑353/99 P, EU:C:2001:661, points 27 et 28).

86      Il résulte des termes mêmes de l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001 que les institutions, les organes ou les organismes de l’Union sont tenus d’examiner s’il convient d’accorder un accès partiel aux documents visés par une demande d’accès en limitant un refus éventuel aux seules données couvertes par les exceptions visées par ledit article. L’institution doit accorder un tel accès partiel si le but poursuivi par cette institution, lorsqu’elle refuse l’accès au document, peut être atteint dans l’hypothèse où cette institution se limiterait à occulter les passages qui peuvent porter atteinte à l’intérêt public protégé (arrêt du 25 avril 2007, WWF European Policy Programme/Conseil, T‑264/04, EU:T:2007:114, point 50 ; voir également, en ce sens, arrêt du 6 décembre 2001, Conseil/Hautala, C‑353/99 P, EU:C:2001:661, point 29).

87      Il appartient ainsi à l’institution, à l’organe ou à l’organisme de l’Union d’examiner, premièrement, si le document faisant l’objet de la demande d’accès entre dans le champ d’application de l’une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001, deuxièmement, si la divulgation de ce document porterait concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé et, troisièmement, dans l’affirmative, si le besoin de protection s’applique à l’ensemble du document (arrêts du 30 janvier 2008, Terezakis/Commission, T‑380/04, non publié, EU:T:2008:19, point 88 et du 22 mai 2012, Internationaler Hilfsfonds/Commission, T‑300/10, EU:T:2012:247, point 93).

88      Dans la décision attaquée, pour fonder le refus d’accès aux documents en cause, la REA a invoqué la protection des intérêts commerciaux des membres du consortium au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, mais en estimant, ainsi qu’il a été rappelé aux points 58 et 73 ci-dessus, que cette dernière disposition devait être interprétée conformément aux dispositions relatives à la confidentialité figurant à l’article 3 du règlement no 1290/2013 et à l’article 36 de la convention de subvention relative au projet iBorderCtrl et compte tenu de la protection conférée par l’article 339 TFUE aux informations qui, par nature, sont couvertes par le secret professionnel.

89      La décision attaquée précise à cet égard que les informations en cause sont des connaissances internes (« inside knowledge ») du consortium et reflètent la propriété intellectuelle spécifique, les recherches en cours, le savoir-faire, les méthodologies, les techniques et les stratégies qui appartiennent au consortium. La publication de ces informations affecterait la position concurrentielle du consortium sur le marché et, en retour, porterait sensiblement atteinte aux intérêts commerciaux de celui-ci, y compris s’agissant de la propriété intellectuelle, en donnant un avantage aux concurrents potentiels du projet en cause, qui en tireraient indûment les avantages suivants. Premièrement, les concurrents pourraient anticiper les stratégies et les faiblesses des membres du consortium, notamment lors de la participation à des appels d’offres. Deuxièmement, ils pourraient copier ou utiliser la propriété intellectuelle, le savoir-faire, les méthodes, les techniques et les stratégies du consortium pour améliorer leurs propres produits ou leurs services concurrents ou bénéficier d’un avantage déloyal lors de demandes de brevets, d’approbation ou d’autorisation pour leurs produits ou leurs services. Troisièmement, la divulgation compromettrait les possibilités des membres du consortium d’obtenir des financements de la part d’investisseurs dans un contexte très concurrentiel où seule la confidentialité permet de préserver la valeur commerciale des informations en cause. Quatrièmement, au vu de la nature sensible de ces dernières, leur divulgation pourrait nuire à la réputation des membres du consortium et à celle des personnes qui leur sont liées.

90      La REA en a conclu qu’il existait un risque que l’accès aux documents demandés porterait atteinte aux intérêts commerciaux du consortium, y compris s’agissant de la propriété intellectuelle.

91      Sur le fondement de ces considérations, la REA a accordé, dans la décision attaquée, un accès partiel aux documents D 3.1, D 7.3 et D 7.8 et a refusé l’accès intégral aux autres documents demandés élaborés aux cours du projet iBorderCtrl, ainsi qu’il ressort du point 8 ci-dessus.

92      Il y a dès lors lieu de vérifier si, comme le prétend le requérant, la REA a considéré à tort que les documents demandés, considérés individuellement et concrètement, contenaient des informations de nature à justifier l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, de sorte qu’il existait un risque réel et non hypothétique que leur divulgation porterait effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium et, le cas échéant, si un accès intégral ou partiel aurait pu être accordé. Cet examen doit être conduit à la lumière des conclusions énoncées aux points 64, 69 et 73 ci-dessus.

93      Au soutien de ses allégations, le requérant invoque des arguments de nature transversale, ainsi que des arguments plus spécifiques concernant l’évaluation individuelle de chacun de ces documents ou des documents de même nature.

1)      Sur les arguments de nature transversale

94      S’agissant, tout d’abord, des arguments de nature transversale, premièrement, le requérant soutient que la REA commet une erreur en évoquant les intérêts commerciaux du « consortium », qui n’existe pas en tant que personne juridique et dont les nombreux membres sont par ailleurs aussi des institutions scientifiques ou l’université qui, « a priori », n’ont pas d’intérêts commerciaux.

95      À cet égard, d’une part, à supposer que, comme le fait valoir le requérant, ce sont les intérêts commerciaux non pas du consortium, mais, individuellement ou collectivement, ceux de ses membres qui doivent être visés lors de l’examen de l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, il n’en reste pas moins que, dans la décision attaquée, et malgré quelques références aux intérêts commerciaux du consortium, la REA a examiné si la divulgation des documents en cause porterait préjudice aux intérêts commerciaux des membres dudit consortium. En tout état de cause, il importe de relever que le requérant ne tire aucune conséquence de son argument en ce qui concerne la légalité de la décision attaquée. D’autre part, c’est à tort que le requérant soutient que des institutions scientifiques ou une université ne peuvent pas poursuivre d’activités auxquelles s’attachent des intérêts commerciaux (voir, en ce sens, arrêt du 21 octobre 2010, Agapiou Joséphidès/Commission et EACEA, T‑439/08, non publié, EU:T:2010:442, points 124 à 128).

96      Deuxièmement, il convient de relever que ni le moment auquel un document a été élaboré, invoqué par le requérant lorsqu’il soutient que les documents élaborés au début du projet ne sont pas susceptibles de contenir des secrets d’affaires, ni le temps nécessaire pour leur élaboration, mis en avant par la REA, ne sont pertinents pour établir si un document auquel l’accès est demandé contient les informations relevant des intérêts commerciaux d’une entreprise. Ces arguments des parties sont donc inopérants.

97      Troisièmement, le requérant soutient que les résultats de recherches financées par des fonds publics doivent profiter au public, y compris les concurrents des membres commerciaux du consortium, dans la mesure notamment où une concurrence efficace portant sur la meilleure technologie présente un avantage pour le public dans l’hypothèse où l’Union devrait décider d’utiliser une telle technologie et de faire des appels d’offres à son sujet.

98      À cet égard, il y a lieu de constater que la question de savoir si les intérêts commerciaux des membres du consortium, notamment ceux liés aux résultats du projet, sont dignes de protection, notamment au regard d’un intérêt qui pourrait exister pour les concurrents et le public d’avoir un accès généralisé aux projets financés par le budget de l’Union, relève de l’appréciation de l’existence d’un intérêt public supérieur à la divulgation des documents demandés en dépit de l’existence éventuelle d’intérêts commerciaux légitimes et sera donc, le cas échéant, examinée dans le cadre de l’examen de la seconde branche du premier moyen.

99      Par ailleurs, selon le requérant, l’allégation de la REA selon laquelle le système à développer n’aurait de « valeur commerciale » que si son mode de fonctionnement restait secret est inexacte, et ce tant pour des motifs de sécurité, une technologie de l’information ne pouvant être utilisée avec suffisamment de sécurité que lorsque son mode de fonctionnement et son code sont accessibles au public et qu’elle peut ainsi être contrôlée publiquement et testée au regard de ses points faibles, que pour des motifs commerciaux, le mode de fonctionnement d’une technologie devant pouvoir être contrôlé et confirmé par des parties indépendantes (par exemple scientifiques) avant qu’un organisme public ne dépense de l’argent pour son acquisition.

100    Dans la mesure où ces arguments du requérant doivent être compris en ce sens que celui-ci soutient, en substance, que les membres du consortium ne disposent pas d’intérêts commerciaux dignes de protection liés à un projet tel qu’iBorderCtrl, il convient de relever, à l’instar de la REA, que, en application de l’article 41 du règlement no 1290/2013, relevant du titre III de ce règlement contenant des règles régissant l’exploitation et la diffusion des résultats, les « résultats » d’un projet sont soit la propriété du participant au projet qui les a générés, soit la propriété commune des participants au projet. En outre, l’article 42 du même règlement prévoit que, lorsque des résultats peuvent donner lieu à une exploitation industrielle ou commerciale, le participant qui en est propriétaire étudie les possibilités de les protéger et, si cela s’avère possible, raisonnable et justifié, compte tenu des circonstances, il assure leur protection adéquate en tenant dûment compte de ses intérêts légitimes ainsi que des intérêts légitimes des autres participants à l’action, en particulier leurs intérêts commerciaux.

101    Il en ressort que les résultats des projets qui sont la propriété des participants au projet sont susceptibles de présenter une valeur commerciale et financière pour ceux-ci et, de ce fait, leur exploitation industrielle et commerciale peut être protégée. Ainsi, les participants à un tel projet, comme, en l’espèce, les membres de consortium, peuvent avoir des intérêts commerciaux légitimes liés aux résultats dudit projet susceptibles de relever de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

102    C’est aussi à tort que le requérant allègue, dans ce contexte, que la protection conférée par l’article 41 du règlement no 1290/2013 est limitée à la propriété de biens « corporels » produits. En effet, il résulte de l’article 2, paragraphe 1, point 19, du règlement no 1290/2013 que, par « résultats », il convient d’entendre tous les résultats tangibles ou intangibles de l’action, tels que les données, connaissances ou informations, qui résultent de l’action menée, quelle que soit leur forme ou leur nature, susceptibles ou non de protection, ainsi que tous les droits qui y sont associés, notamment les droits de propriété intellectuelle.

103    L’analogie faite dans ce contexte par le requérant à une exclusivité commerciale excluant la mise sur le marché d’autres médicaments pour dix ans telle que visée dans l’arrêt du 5 février 2018, PTC Therapeutics International/EMA (T‑718/15, EU:T:2018:66, point 91), n’est pas susceptible de remettre en cause cette conclusion. En effet, d’une part, il ressort des points 100 et 102 ci-dessus qu’une action peut générer tant des résultats susceptibles de protection que des résultats non susceptibles de protection, ou qu’il n’est pas raisonnable ou justifié compte tenu des circonstances d’assurer leur protection. D’autre part, s’agissant des résultats du projet susceptibles d’être protégés, notamment, par les droits de propriété intellectuelle ou industrielle, tels que les brevets, quand bien même ces droits sont, contrairement à ce que soutient, en substance, la REA, de nature à protéger les résultats contre une exploitation industrielle et commerciale injustifiée, et notamment contre une commercialisation de produits similaires, ce fait ne rend pas en soi non fondée une décision refusant l’accès aux documents demandés fondée sur une exception visant à protéger des intérêts commerciaux légitimes, lesquels comportent notamment des droits de propriété intellectuelle.

104    Cet argument du requérant doit dès lors être rejeté.

2)      Sur l’évaluation individuelle des documents en cause

105    Ainsi qu’il a été rappelé au point 91 ci-dessus, par la décision attaquée, la REA a accordé un accès partiel aux documents D 3.1, D 7.3 et D 7.8 et a refusé l’accès intégral aux autres documents demandés.

106    À titre liminaire, en premier lieu, il convient de préciser la portée des griefs du requérant visant à contester le refus d’accès aux documents demandés. Premièrement, s’agissant du document D 7.6, il y a lieu d’observer, à l’instar de la REA, que cette dernière a répondu à la demande initiale, pour autant qu’elle visait l’accès à ce document, que celui-ci était accessible au public, ce qui n’est pas contesté par le requérant dans le cadre du présent recours. Il convient d’en conclure que le document D 7.6 n’est pas visé par le présent litige. Deuxièmement, le requérant ayant consenti, dans le cadre de sa demande confirmative, à ce que les données à caractère personnel des personnes impliquées dans le projet soient occultées et n’ayant, en outre, présenté aucun argument pour contester cet élément dans le cadre du présent recours, il convient de conclure que le refus d’accès aux documents demandés n’est pas contesté pour autant qu’il porte sur ces données.

107    En second lieu, il convient de relever que, dans l’annexe I de la convention de subvention, tous les documents demandés, à l’exception des documents D 3.1 et D 8.7, sont désignés comme étant confidentiels à l’aide de la mention « confidentiel, réservé aux membres du consortium (y compris les services de la Commission et/ou les services de la REA) » [« confidential, only for members of the consortium (including the Commission Services and/or REA Services) »].

108    S’agissant des documents D 3.1 et D 8.7, il y a lieu de relever que le statut d’un document est susceptible de changer au cours du projet, ce qui nécessite, eu égard au fait que le statut « confidentiel » ou « public » d’un document est décidé au moment de la signature de la convention comme, en l’espèce, à l’annexe I de la convention de subvention, une adaptation de la convention de subvention en application de l’article 55 de celle-ci. Ainsi, d’une part, le document D 3.1 avait été inclus, dans la convention de subvention, parmi ceux à l’égard desquels le caractère « sensible » devait être évalué avant sa divulgation selon le mécanisme interne du consortium. La procédure de modification de son statut vers « confidentiel » était en cours au moment de la demande initiale d’accès. D’autre part, s’agissant du document D 8.7, il a été désigné comme étant confidentiel au moment de sa présentation, ce qui ressort de la mention apposée sur la première page de celui-ci.

109    La REA était en droit de tenir compte des circonstances rappelées aux points 107et 108 ci-dessus lors de l’examen de la demande d’accès du requérant (voir point 69 ci-dessus).

i)      Sur les documents D 1.1 (Premier rapport du conseiller en éthique), D 1.2 (L’éthique du profilage, le risque de stigmatisation des individus et le plan de mitigation) et D 2.3 (Rapport d’examen juridique et éthique à l’échelle de l’Union)

110    Le requérant fait valoir que la protection légitime des intérêts commerciaux ne saurait être étendue au point d’englober des informations non liées à l’entreprise qui ne constituent pas des « secrets d’affaires » telles que, en l’espèce, notamment, l’appréciation éthique et l’examen du cadre juridique, lesquels ne concernent pas une technologie en particulier, mais traitent des questions générales de l’appréciation éthique et juridique, qui se poseraient indépendamment de la conception concrète du système et du projet concret du consortium. Selon le requérant, c’est à tort que la REA soutient que toute information utile aux concurrents des partenaires du consortium constitue un secret d’affaires et devrait être protégé. Il fait remarquer que les concurrents des entreprises faisant partie du consortium participaient au test du système que ce dernier a développé.

111    Ainsi, la divulgation des documents D 1.1, D 1.2 et D 2.3, lesquels ne reflètent pas, selon le requérant, le savoir-faire scientifique et ne contiennent pas d’informations sur des méthodes de production et d’analyse, ne serait pas de nature à porter atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium. En tout état de cause, même si ces documents contenaient des éléments relevant du savoir-faire scientifique des membres du consortium, une divulgation par extrait de ces documents devrait être possible.

112    La REA soutient que les évaluations éthiques et juridiques contenues dans les documents D 1.1, D 1.2 et D 2.3 sont spécifiquement adaptées au projet iBorderCtrl en ce qu’ils abordent et analysent comment les différentes préoccupations sont concrètement prises en compte dans la méthodologie de celui-ci. Ils présenteraient également des mesures de protection à l’égard des risques et des exigences identifiées spécifiques au projet. En outre, la compilation des informations contenues dans le document D 2.3 relèverait d’un « travail intellectuel » non accessible à des personnes ne faisant pas partie du consortium et contiendrait donc un savoir-faire spécifique de ses membres. Les évaluations éthiques contenues dans les documents D 1.1 et D 1.2 contiendraient des informations sensibles dont la diffusion pourrait nuire à la réputation des membres du consortium, des partenaires et des individus associés au projet. La divulgation de ces informations porterait ainsi atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium et constituerait un avantage indu pour les concurrents.

113    Ayant consulté les documents D 1.1, D 1.2 et D 2.3, le Tribunal constate qu’ils comportent notamment, ainsi qu’il ressort de la décision attaquée, des évaluations éthiques et juridiques des outils, des composants technologiques et des méthodes développés dans le cadre du projet iBorderCtrl.

114    En effet, s’agissant du document D 1.1, celui-ci contient, ainsi que le relève la REA, notamment la description de la manière dont les préoccupations éthiques et juridiques identifiées dans les documents D 1.2 et D 2.3 doivent concrètement être prises en compte lors du développement des différentes composantes technologiques et des méthodes développées dans le cadre du projet iBorderCtrl, tant pour la phase de recherche que pour une éventuelle phase d’exploitation afin d’assurer le respect des principes éthiques et des droits fondamentaux invoqués. Le document contient, dans le cadre des recommandations qu’il formule, des références aux éléments du savoir-faire, aux méthodologies, aux techniques et aux stratégies développées par les membres du consortium pour les besoins du projet ou des informations permettant de les identifier.

115    S’agissant du document D 1.2, lequel indique présenter un lien et se chevaucher partiellement avec le rapport juridique constituant le document D 2.3, il présente, ainsi que le relève la REA, la méthodologie selon laquelle le projet iBorderCtrl aborde spécifiquement le profilage et le risque de stigmatisation aussi bien des individus que des groupes, l’analyse d’un problème des fausses informations (« false positives », « false negatives ») des outils informatiques et une première description des risques du projet et les mesures de protection pertinentes. Cet examen, lequel est spécifique au projet, utilise des informations concernant les composantes technologiques et des méthodes développées dans le cadre du projet et fait ainsi référence aux éléments du savoir-faire, des méthodologies, des techniques et des stratégies développées par les membres du consortium pour les besoins du projet ou des informations permettant d’identifier ces éléments.

116    Le document D 2.3, rédigé par une université participante, explique de manière détaillée comment les exigences du droit de l’Union et du droit national sont mises en œuvre dans les différents sous-domaines des technologies développées par le projet. Cette analyse, laquelle examine en détail l’infrastructure du projet iBorderCtrl, concerne donc, en partie, spécifiquement les technologies, les fonctionnalités et les outils utilisés par ce projet et permet d’identifier la stratégie suivie au regard du cadre réglementaire identifié.

117    Les informations relevées aux points 114 à 116 ci-dessus relèvent donc des intérêts commerciaux des membres du consortium au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. C’est sans commettre d’erreur que la REA a considéré dans la décision attaquée que leur divulgation était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle, en ce qu’elle permettrait aux concurrents de tirer indûment avantage de leur savoir-faire présentant une valeur commerciale.

118    Toutefois, la lecture des documents D 1.1, D 1.2 et D 2.3 révèle qu’ils contiennent également des informations autres que des évaluations concernant les implications juridiques et éthiques concrètes du projet iBorderCtrl ou des solutions envisagées concrètement dans le développement des technologies ou des fonctionnalités de celui-ci.

119    En effet, ces documents contiennent, en outre, une description de la politique de l’Union en matière de contrôles de ses frontières et de l’état du droit de l’Union relatif à cette politique ainsi que des développements quant à la question de l’opportunité de renforcer ces contrôles par l’application de moyens technologiques innovants. Ils contiennent également un résumé détaillé du cadre juridique pertinent en droit international, en droit de l’Union et dans les droits nationaux, notamment celui relatif à la protection des données à caractère personnel, aux principes du droit et aux droits fondamentaux. Ces informations, lesquelles sont fondées notamment sur des sources publiquement accessibles identifiées par des références à des sites Internet, ne se réfèrent pas aux outils ou aux technologies concrètement utilisés dans le cadre du projet iBorderCtrl, mais, ainsi que le fait valoir le requérant, traitent de questions générales quant à l’appréciation éthique et juridique d’un système utilisant des moyens technologiques innovants telles qu’une « reconnaissance automatique de tromperie » ou une « appréciation du risque » automatisée, qui sont susceptibles de se poser indépendamment de la conception concrète du système et du projet élaboré par les membres du consortium.

120    Par ailleurs, alors que la REA soutient avoir vérifié si les documents en cause contenaient des informations publiquement accessibles, elle n’a pas avancé dans la décision attaquée que les informations identifiées au point 119 ci-dessus présentaient une plus-value par rapport aux informations publiquement accessibles sur lesquelles elles se fondent au sens de la jurisprudence résultant de l’arrêt du 13 janvier 2017, Deza/ECHA (T‑189/14, EU:T:2017:4, point 60 et jurisprudence citée).

121    Elle soutient uniquement, au cours de la présente instance, que la compilation des informations contenues dans le document D 2.3 relève d’un « travail intellectuel » non accessible à des personnes ne faisant pas partie du consortium et que celui-ci contient un savoir-faire spécifique de ses membres. À cet égard, il convient de relever que, s’il est certes vrai qu’un travail de systématisation des informations publiquement accessibles pourrait avoir une certaine valeur commerciale, il doit être démontré que la systématisation desdites informations a été accompagnée d’appréciations débouchant sur des conclusions scientifiques nouvelles ou sur des considérations relatives à une stratégie inventive de nature à procurer à l’entreprise un avantage commercial sur ses concurrents et qui seraient, de ce fait, à l’évidence de nature confidentielle (voir, en ce sens, arrêt du 13 janvier 2017, Deza/ECHA, T‑189/14, EU:T:2017:4, point 67). Or, la REA reste en défaut de démontrer que ce travail intellectuel de compilation présenterait une plus-value par rapport aux informations publiquement accessibles au sens de la jurisprudence rappelée au point 120 ci-dessus et que la simple tâche de compilation de ces informations nécessiterait un savoir-faire spécifique de la part des membres du consortium présentant pour eux un intérêt commercial digne de protection au titre de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêt du 13 janvier 2017, Deza/ECHA, T‑189/14, EU:T:2017:4, point 65).

122    Il doit donc être conclu que la REA a commis une erreur en considérant, dans la décision attaquée, que le refus d’accès aux informations contenues dans les documents D 1.1, D 1.2 et D 2.3 identifiées au point 119 ci-dessus était justifié par la protection des intérêts commerciaux des membres du consortium.

123    L’argument de la REA figurant dans la décision attaquée, selon lequel les concurrents des membres du consortium pourraient tirer avantage de la divulgation de ces documents, notamment en anticipant des faiblesses et des stratégies relatives au projet en cause dans le cadre du développement de projets similaires, ou utiliser leur savoir-faire, ne saurait justifier le refus d’accès aux informations identifiées au point 119 ci-dessus. En effet, ces informations ne relèvent pas du savoir-faire ou de l’expertise propre aux membres du consortium et, dans la mesure où elles ne concernent pas une application concrète des principes juridiques et éthiques au projet en cause, elles ne constituent pas des informations commerciales sensibles, de sorte que leur divulgation n’est pas de nature à procurer un avantage aux concurrents des membres du consortium. Ces informations ne relèvent donc pas de la protection des intérêts commerciaux assurée par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

124    En outre, force est de constater, à l’instar du requérant, que la REA n’explique pas comment la divulgation des documents D 1.1, D 1.2 et D 2.3 serait, notamment en ce qui concerne des informations identifiées au point 119 ci-dessus, susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte à la réputation des membres du consortium. En tout état de cause, si l’argument de la REA doit être compris en ce sens que le fait que le projet en cause soulève des préoccupations de nature éthique et juridique est susceptible de porter, en soi, atteinte à la réputation des membres du consortium qui l’ont conçu, cet argument ne saurait prospérer. En effet, il peut être déduit de l’objet et de l’objectif du projet iBorderCtrl, lesquels sont publiquement connus, ainsi que le relève le requérant en se référant aux informations diffusées sur le site Internet consacré audit projet, que celui-ci est fondé sur l’utilisation de moyens technologiques innovants fondés notamment sur la collecte d’informations, de sorte que ne constituent pas un secret d’affaires ou une information commercialement sensible le fait qu’un système tel qu’iBorderCtrl, comme tout autre système fondé sur de tels moyens innovants, est susceptible de soulever certaines préoccupations de nature juridique et éthique.

125    Il résulte de ce qui précède que c’est à tort que la REA a considéré que l’ensemble des informations contenues dans les documents D 1.1, D 1.2 et D 2.3 relevaient des intérêts commerciaux des membres du consortium et a refusé l’accès à l’intégralité de ceux-ci. Le présent grief est donc partiellement fondé.

ii)    Sur le document D 1.3 (Conseiller en éthique)

126    Selon le requérant, une publication anonymisée, purgée des données à caractère personnel, du document demandé D 1.3 concernant la nomination du conseiller en éthique externe ne pourrait pas affecter les intérêts commerciaux des membres du consortium.

127    La REA fait valoir que la diffusion de données contenues dans le document D 1.3 qui peuvent être utilisées pour identifier le conseiller en éthique et qui concernent la quasi-totalité du document, telles que la description détaillée de son expertise ou son curriculum vitae, peut porter atteinte à son indépendance ainsi qu’à ses intérêts commerciaux.

128    À cet égard, il convient de relever que la REA a indiqué, dans la décision attaquée, que le document D 1.3, à l’instar des documents D 1.1, D 1.2 et D 2.3, comportait des évaluations éthiques et juridiques des outils, des composants technologiques et des méthodologies développés dans le cadre du projet. Or, la lecture dudit document révèle que tel n’est à l’évidence pas le cas. En effet, ainsi que l’indique la REA dans le cadre de la présente affaire, le document D 1.3 contient le curriculum vitae détaillé du conseiller en éthique externe ainsi que son courrier d’acceptation des tâches qui lui sont confiées par le consortium.

129    Aucune autre motivation concernant le refus d’accès au document D 1.3 ne figure dans la décision attaquée et notamment aucun motif n’est invoqué pour soutenir qu’une divulgation dudit document expurgé des données à caractère personnel, à laquelle le requérant a consenti dans la demande confirmative, ne serait pas possible. Le motif invoqué à cet égard par la REA au cours de la présente instance, selon lequel la divulgation des données permettant d’identifier le conseiller en éthique porterait atteinte à son indépendance ainsi qu’à ses intérêts commerciaux, ne figure pas dans la décision attaquée, laquelle se réfère uniquement aux intérêts commerciaux des membres du consortium. Or, ainsi qu’il ressort du document D 1.3, le conseiller en éthique en question n’est employé par aucun des membres du consortium et est une personne indépendante de ceux-ci. Ses intérêts commerciaux ne sauraient donc être confondus avec ceux des membres du consortium.

130    En outre, il importe de relever que la décision attaquée n’indique pas, en réponse à la demande confirmative dans laquelle le requérant a consenti que les données à caractère personnel soient occultées dans les documents demandés, que le document D 1.3 serait, dans son intégralité, couvert par l’exception visée à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001. En effet, la décision attaquée se réfère uniquement à l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, de ce règlement. Par ailleurs, aucune mention de l’impossibilité d’accorder un accès partiel du fait qu’un document expurgé des données à caractère personnel n’aurait aucune utilité pour le requérant ne figure davantage dans la décision attaquée. En tout état de cause, même à supposer que tel était le cas de l’ensemble des informations contenues dans le curriculum vitae du conseiller en éthique, la REA n’explique notamment pas comment une telle circonstance s’appliquerait à d’autres informations figurant dans le document D 1.3, notamment à la description des tâches confiées par les membres du consortium au conseiller en éthique.

131    Il s’ensuit que les motifs avancés dans la décision attaquée ne permettent pas de fonder le refus d’accès au document D 1.3 sur la seule base de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement n° 1049/2001. Le présent grief est donc fondé.

iii) Sur le document D 2.1 (Rapport de l’analyse des exigences)

132    Le requérant fait valoir que les procédures de surveillance des frontières dans les États membres ainsi que leurs exigences, décrites dans le document D 2.1, ne sont pas des secrets d’affaires, mais une question publique. La REA aurait tort de considérer comme un secret d’affaires toute information qui pourrait être utile aux concurrents des partenaires du consortium exerçant des activités commerciales alors qu’elle ne fait pas valoir que cette analyse reflète le savoir-faire scientifique d’une personne ou qu’elle contiendrait des informations sur des méthodes de production et d’analyse dont la publication entraînerait nécessairement une atteinte grave aux intérêts d’un membre du consortium. En tout état de cause, cela justifierait seulement d’occulter les passages concernés.

133    La REA fait valoir que le document D 2.1, élaboré en 2016, présente de manière détaillée les procédures de surveillance des frontières dans les États membres pilotes et résume les exigences concernant des utilisateurs pour la période précédant leur arrivée sur le territoire de l’Union et les phases de vérification des antécédents et de contrôle aux frontières. Il contiendrait la méthode d’évaluation de l’enquête et les conclusions. La compilation des informations contiendrait le savoir-faire spécifique des membres du consortium. Les concurrents tireraient avantage de la divulgation de telles informations aussi parce qu’ils apprendraient quelle approche est utilisée par l’un des membres du consortium. Contrairement aux allégations du requérant, la protection accordée par le règlement no 1049/2001 va bien au-delà des seuls « secrets d’affaires ».

134    Ayant consulté le document en cause, le Tribunal constate que celui-ci présente, notamment, ainsi qu’il ressort de la décision attaquée, des solutions technologiques (par exemple technologies biométriques d’identification) et la définition de l’architecture globale du projet iBorderCtrl, fournissant ainsi le cadre général pour les différents modules, y compris les fonctionnalités du matériel et des logiciels composant le système intégré final.

135    Ces informations relèvent du savoir-faire des membres du consortium et concernent des méthodologies, des techniques et des stratégies qu’ils ont développées pour les besoins du projet. Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la REA a considéré dans la décision attaquée que leur divulgation était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium en ce qu’elle permettrait aux concurrents de tirer indûment avantage de leur savoir-faire présentant une valeur commerciale.

136    Toutefois, la lecture de ce document révèle qu’il contient également des informations autres que celles relevant des méthodologies, des techniques et des stratégies spécifiques du projet iBorderCtrl.

137    En effet, ainsi qu’il ressort du document même, l’analyse qu’il contient est conduite en trois étapes, dont la première consiste en une description et une analyse des concepts sous-tendant la gestion des frontières et fournit un aperçu des problèmes opérationnels des utilisateurs finaux dans leur contexte géographique. Dans ce contexte, notamment des procédures de surveillance des frontières dans les États membres concernés par la phase de recherche du projet sont détaillées. Ainsi que le fait valoir le requérant, ces procédures, ainsi que leurs exigences, ne sont pas des secrets d’affaires des membres du consortium, mais relèvent d’une question publique. La deuxième étape consiste en un aperçu de l’« état d’art » des différentes technologies, dont une partie consiste en une présentation de ce qui est, comme le titre de cette partie du document le suggère, la situation actuelle du développement technologique dans les domaines concernés par le projet.

138    Quand bien même ces analyses constituent des étapes préalables aux fins de l’examen des exigences concrètes à l’égard du projet iBorderCtrl, compte tenu notamment des concepts ainsi identifiés et en comparaison avec des technologies déjà existantes, et constituent indéniablement une prémisse aux fins d’effectuer l’analyse de l’architecture de ce système, de ses méthodologies et de ses outils relevés aux points 134 et 135 ci-dessus, les grandes parties de ces analyses ne contiennent pas d’informations relevant du savoir-faire propre aux membres du consortium, de leurs connaissances internes ou de leur expertise. Le seul fait que ces éléments permettraient éventuellement de déterminer quelles sont les technologies préexistantes dont l’application ou le développement est pris en compte dans le cadre de la réflexion sur la conception du système dans le cadre du projet iBorderCtrl n’est pas, en soi, de nature à démontrer que ces éléments relèvent du savoir-faire des membres du consortium. Par ailleurs, le requérant indique que l’« approche » utilisée dans le projet peut d’ores et déjà être déduite des informations accessibles publiquement, ce qui est admis par la REA lorsqu’elle confirme que les informations publiquement accessibles, au travers d’une communication du consortium relative au fonctionnement du système, permettent de savoir comment le système piloté est censé fonctionner.

139    Le fait que les informations contenues dans le document D 2.1 relevées au point 137 ci-dessus ne relèvent pas du savoir-faire scientifique des membres du consortium ou de leurs connaissances internes est confirmé par le fait que ces parties d’analyses sont fondées sur des sources publiquement accessibles dont les publications académiques et les informations diffusées sur Internet, listées dans la partie « Références » du document.

140    En outre, il est certes vrai, ainsi que le soutient la REA, que l’élaboration de la méthodologie des enquêtes ou celle d’évaluation des données ainsi obtenues et les conclusions qui en ont été tirées en ce qui concerne le développement du projet iBorderCtrl, contiennent le savoir-faire spécifique des membres du consortium. Toutefois, tel n’est pas le cas des informations relevées au point 137 ci-dessus dans la mesure où aucune méthodologie spécifique relative à leur compilation n’a été mise en exergue dans la décision attaquée ni ne ressort du document même. Au cours de la présente procédure, la REA a fait valoir que la compilation des informations contenues dans le document D 2.1 contenait le savoir-faire spécifique des membres du consortium. S’il est certes vrai, ainsi qu’il a été rappelé au point 121 ci-dessus, qu’un travail de systématisation des informations accessibles publiquement pourrait avoir une certaine valeur commerciale, la REA n’a pas démontré que, en l’espèce, une compilation des informations publiquement accessibles présenterait une plus-value au sens de la jurisprudence rappelée au point 120 ci-dessus et que la simple tâche de compilation de ces informations nécessiterait un savoir-faire spécifique de la part des membres du consortium présentant pour eux un intérêt commercial digne de protection au titre de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

141    Enfin, force est de constater que, ainsi que le relève elle-même la REA, dans le cadre de l’accès partiel au document D 3.1, l’information de nature similaire, à savoir celle concernant une description générale des techniques et des technologies préexistantes (par exemple les capteurs biométriques) en relation avec les dispositifs de collecte de données, a été divulguée au requérant.

142    Il résulte de ce qui précède que c’est à tort que la REA a considéré que l’ensemble des informations contenues dans le document D 2.1 relevaient des intérêts commerciaux des membres du consortium et a refusé l’accès à l’intégralité de celui-ci. Le présent grief est donc partiellement fondé.

iv)    Sur le document D 2.2 (Architecture de référence et spécification des composants)

143    Selon le requérant, la décision attaquée n’est pas fondée en ce qui concerne le refus de divulgation du document D 2.2 dans la mesure où il ne saurait être déduit de la « nature technique » d’un document qu’il contiendrait nécessairement des « informations sensibles ». La REA n’aurait donc avancé aucun élément de fait dont il résulterait que la divulgation de ce document porterait atteinte aux intérêts commerciaux d’un membre du consortium.

144    La REA relève que le document D 2.2 décrit de manière détaillée comment les exigences techniques sont mises en œuvre dans sept technologies développées par le projet. De plus, l’architecture fonctionnelle globale des matériels et des logiciels serait présentée de manière détaillée. Enfin, les cas d’utilisation pour différents types de voyageurs seraient identifiés aux fins des futures procédures de test. En raison de sa nature technique, ce document contiendrait des informations sensibles, car les concurrents qui ne disposent pas de telles informations tireraient avantage de leur divulgation. Si le requérant constate à juste titre que les informations publiquement accessibles, au travers d’une communication du consortium relative au fonctionnement du système, permettent de savoir comment le système piloté est censé fonctionner, ces informations n’engloberaient toutefois pas les exigences techniques, y compris les spécifications ainsi que l’architecture et les méthodologies liées qui revêtent un intérêt commercial.

145    Ayant consulté le document en cause, le Tribunal constate que celui-ci présente, à l’instar du document D 2.1, comme l’a relevé la REA dans la décision attaquée, des solutions technologiques et la définition de l’architecture globale d’ensemble du projet iBorderCtrl, fournissant ainsi le cadre général pour les différents modules, y compris les fonctionnalités du matériel et des logiciels composant le système intégré final.

146    Ces informations relèvent du savoir-faire des membres du consortium et concernent des méthodologies, des techniques et des stratégies qu’ils ont développées pour les besoins du projet. Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la REA a considéré dans la décision attaquée que leur divulgation était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium en ce qu’elle permettrait aux concurrents de tirer indûment avantage de leur savoir-faire présentant une valeur commerciale.

147    Toutefois, il ressort dudit document que, dans le cadre de l’examen qu’il contient, il a été tenu compte des analyses conduites dans le cadre du rapport constituant le document D 2.1 et de certaines évaluations juridiques faisant l’objet du document D 2.3. En conséquence, le refus d’accès partiel aux informations figurant dans les documents D 2.1 et D 2.3 relevés aux points 137 et 119 ci-dessus, qui ont été reprises ou résumées pour les besoins du document D 2.2, ou aux informations de même portée ou de même nature, n’est pas justifié par la protection des intérêts commerciaux des membres du consortium. Le présent grief est donc partiellement fondé.

v)      Sur le document D 3.1 (Dispositifs de collecte de données – spécifications)

148    Le document D 3.1 a fait l’objet d’une divulgation pour autant qu’il concerne la description générale des techniques et des technologies (par exemple les capteurs biométriques) en relation avec les dispositifs de collecte de données (voir aussi point 141 ci-dessus). Il a été communiqué au requérant dans sa version partiellement occultée.

149    Selon le requérant, la décision attaquée n’est pas fondée en ce qui concerne le refus de divulgation du document D 3.1 dans son intégralité dans la mesure où il ne saurait être déduit de la « nature technique » d’un document qu’il contiendrait nécessairement des « informations sensibles ». La REA n’aurait donc avancé aucun élément de fait dont il résulterait que la divulgation du document porterait atteinte aux intérêts commerciaux d’un membre du consortium.

150    La REA soutient que les parties du document D 3.1 décrivant en détail les techniques et les technologies utilisées dans le projet n’ont pas été rendues accessibles, car, en raison de leur nature technique, elles concernent des informations sensibles dont les concurrents, qui ne disposent pas de telles informations, tireraient avantage en cas de divulgation.

151    Ayant consulté les parties non-divulguées du document D 3.1, le Tribunal constate que celles-ci contiennent une description détaillée des différentes techniques et technologies, comme le fait valoir la REA. Toutefois, d’une part, ainsi que le soutient le requérant, le caractère plus ou moins technique des informations en cause, mis en avant par la REA pour soutenir le bien-fondé du refus d’accès à celles-ci, n’est pas en soi décisif pour évaluer si elles relèvent des intérêts commerciaux au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

152    D’autre part, il ne ressort pas des informations contenues dans les parties occultées du document D 3.1 que l’ensemble des techniques et des technologies qui y sont décrites sont celles effectivement utilisées dans le projet iBorderCtrl, contrairement à ce que soutient la REA. En effet, celles-ci contiennent des descriptions des techniques et des technologies disponibles sur le marché et potentiellement utiles dans l’architecture du système iBorderCtrl. En outre, les parties occultées contiennent également des recommandations quant au choix des technologies et des techniques disponibles qui seraient optimales dans l’architecture du système iBorderCtrl au regard des exigences techniques en cause. Alors que ces dernières évaluations reflètent le savoir-faire des membres du consortium, notamment dans la mesure où, ainsi qu’il est indiqué dans le document, leur expérience est combinée avec les informations publiques collectées, ou que les critères d’évaluation sont spécifiquement conçus par les membres, de sorte que leur divulgation est susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium, tel n’est pas le cas des descriptions objectives des techniques et des technologies disponibles sur le marché.

153    Ces descriptions sont d’ailleurs au moins en partie fondées sur des sources publiquement accessibles, notamment sur des publications scientifiques ou sur les informations diffusées sur Internet. La REA ne fait pas valoir que la compilation de ces informations publiquement accessibles présente une plus-value au sens de la jurisprudence rappelée aux points 120 et 121 ci-dessus.

154    Il convient d’en conclure que c’est à tort que la REA a considéré que l’ensemble des informations contenues dans les parties occultées du document D 3.1 relevaient des intérêts commerciaux des membres du consortium et a refusé l’accès à celles-ci. Le présent grief par lequel le requérant conteste le refus d’accès aux parties occultées du document D 3.1 est donc partiellement fondé.

vi)    Sur les documents D 7.3 (Plan de diffusion et communication) et D 7.8 (Plan de diffusion et communication 2)

155    Dans la décision attaquée, l’accès partiel a été accordé aux documents D 7.3 et D 7.8, lesquels ont été donc communiqués au requérant dans leurs versions partiellement occultées.

156    À titre liminaire, il importe de relever que, par lettre du 23 mars 2021, le requérant a informé le Tribunal qu’il a, par ses propres moyens, « enlevé » les occultations du document D 7.3, lequel a été ainsi joint à sa lettre. Sur le fondement du texte ainsi obtenu, il a formulé certaines observations au soutien du premier moyen et a réitéré son argument selon lequel, en tout état de cause, il existait un intérêt public supérieur à la divulgation complète de ce document.

157    Par lettre du 20 mai 2021, la REA a présenté ses observations sur les arguments du requérant dans le cadre desquelles elle a, notamment, relevé que le requérant avait diffusé, sur son site Internet, la version intégrale du document D 7.3, telle qu’elle a résulté de la levée desdites occultations opérée par le requérant lui-même.

158    À cet égard, il y a lieu de souligner que le fait que le requérant ait obtenu, par ses propres moyens, l’accès aux parties occultées du document D 7.3 et a ainsi pris connaissance des informations auxquelles l’accès lui avait été refusé par la REA dans la décision attaquée, et qu’il ait procédé à la diffusion dudit document sur son site Internet ne permet pas de considérer qu’il ne dispose pas ou plus d’un intérêt à demander l’annulation de la décision attaquée sur ce point. Certes, en procédant de la sorte, le requérant n’a pas respecté les procédures prévues par le droit de l’Union en matière d’accès aux documents et n’a pas non plus attendu l’issue du présent litige afin de savoir s’il pouvait ou non obtenir légalement l’accès à la version intégrale du document en cause. Toutefois, cette seule circonstance, pour critiquable qu’elle soit, ne remet pas en cause l’intérêt du requérant à voir la décision attaquée annulée sur ce point, étant donné que l’auteur de la divulgation des informations litigieuses n’est pas la REA, qui reconnaîtrait ainsi l’intérêt du public à obtenir la divulgation de telles informations. Le requérant est donc en droit d’obtenir du Tribunal qu’il se prononce sur la légalité de cette décision, qui lui fait grief, dès lors que la REA ne l’a pas formellement retirée et qu’elle ne lui a accordé qu’un accès partiel au document demandé sur la base de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Le comportement du requérant à l’égard du document en cause est sans pertinence pour apprécier son intérêt à obtenir l’annulation d’une telle décision (voir, en ce sens, arrêts du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 45 et jurisprudence citée ; du 21 janvier 2021, Leino-Sandberg/Parlement, C‑761/18 P, EU:C:2021:52, points 33 et 45 à 48, et du 22 mars 2011, Access Info Europe/Conseil, T‑233/09, EU:T:2011:105, points 33 à 36 et jurisprudence citée).

159    Il ressort de ce qui précède que, même s’il a pu prendre connaissance des informations auxquelles l’accès lui avait été refusé par la REA, le requérant dispose d’un intérêt à obtenir l’annulation de la décision attaquée pour autant que la REA lui avait refusé l’accès aux parties occultées du document D 7.3.

160    Toutefois, il y a lieu également de souligner que le fait que le requérant ait pu parvenir, par ses propres moyens, à « enlever » les occultations figurant dans le document D 7.3 est sans aucune incidence sur la légalité de la décision attaquée sur ce point et sur le contrôle juridictionnel du Tribunal à cet égard.

161    Pour contester le refus d’accès aux parties occultées des documents D 7.3 et D 7.8, le requérant fait valoir que la protection légitime des intérêts commerciaux ne saurait être étendue au point d’englober des informations non liées à l’entreprise qui ne constitueraient pas des « secrets d’affaires », telles que, notamment, la stratégie de communication. Ainsi, les simples discussions aux fins promotionnelles, parmi lesquelles les discussions avec les institutions publiques et des élus, telles que contenues dans les parties occultées des documents D 7.3 et D 7.8, ne constitueraient pas des secrets d’affaires.

162    Selon la REA, le document D 7.3, qui vise à déterminer comment le projet est diffusé et communiqué au public, a en grande partie fait l’objet d’une divulgation. Uniquement certaines sections du document, dans lesquelles les membres du consortium ont fourni des informations détaillées sur les relations particulières qu’ils entretenaient avec des partenaires commerciaux ou académiques sélectionnés, ont été noircies, dans la mesure où elles représentent des informations sensibles que les concurrents pourraient utiliser à leur avantage (par exemple, en contactant ces partenaires).

163    Le document D 7.8, auquel un accès partiel a également été accordé, étant une version remaniée du document D 7.3 élaborée un an plus tard, les raisons de la non-diffusion des informations en cause seraient les mêmes que celles qui s’appliquent au document D 7.3.

164    Ayant consulté les parties occultées des documents D 7.3 et D 7.8, le Tribunal constate que, d’une part, elles contiennent une stratégie de communication auprès des partenaires commerciaux en vue d’une éventuelle collaboration future. De telles informations relèvent des intérêts commerciaux des membres du consortium dans la mesure où elles concernent leur stratégie commerciale et permettent, en outre, de déduire quels outils ou technologies sont envisagés concrètement dans le cadre du projet iBorderCtrl. C’est sans commettre d’erreur que la REA a considéré dans la décision attaquée que leur divulgation serait susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium.

165    D’autre part, les informations occultées concernent la diffusion et la promotion du projet iBorderCtrl même et de ses résultats auprès des parties intéressées autres que de potentiels partenaires commerciaux. À cet égard, il convient de relever que la REA n’explique pas en quoi ces informations occultées des documents D 7.3 et D 7.8 présentent un caractère plus « sensible » que les informations de la même nature divulguées au requérant. La REA n’explique pas davantage comment ce caractère « sensible » des informations en cause, à le supposer établi, serait susceptible de justifier que celles-ci relèvent des intérêts commerciaux des membres du consortium alors qu’elle admet que les relations visées par les activités promotionnelles et informatives en cause ne concernent pas des négociations en rapport avec la vente ou l’octroi de licences. Par ailleurs, ayant consulté les parties occultées en cause, le Tribunal constate que les activités promotionnelles et informatives visées par les parties divulguées et par la majorité des parties occultées semblent poursuivre le même objectif, à savoir la diffusion de l’information sur le projet et des solutions technologiques qu’il propose de la manière la plus étendue. Le seul fait, avancé par la REA, que les concurrents seraient susceptibles, en prenant en compte les informations ainsi divulguées, de promouvoir leurs systèmes auprès des mêmes parties concernées ne suffit pas pour conclure que ces informations relèvent des intérêts commerciaux des membres du consortium.

166    Par ailleurs, le Tribunal constate que certaines informations figurant dans les parties occultées des documents D 7.3 et D 7.8 font suite aux évaluations éthiques et juridiques formulées dans le document D 1.2 et D 2.3. Ainsi, pour autant que lesdites parties occultées reprennent ou résument les informations visées au point 119 ci-dessus, elles ne sauraient être couvertes par l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

167    Il convient d’en conclure que c’est à tort que la REA a considéré que l’ensemble des informations contenues dans les parties occultées des documents D 7.3 et D 7.8 relevaient des intérêts commerciaux des membres du consortium et a refusé l’accès à celles-ci. Le présent grief, par lequel le requérant conteste le refus d’accès aux parties occultées des documents D 7.3 et D 7.8, est donc partiellement fondé.

vii) Sur le document D 8.1 (Plan de gestion de la qualité)

168    Le requérant fait valoir que la REA n’expose pas que le document D 8.1 contient des secrets d’affaires d’un partenaire du consortium, qu’il reflète le savoir-faire scientifique d’une personne ou qu’il contient des informations sur des méthodes de production et d’analyse dont la publication entraînerait nécessairement une atteinte grave aux intérêts d’un membre du consortium. Ainsi, ce document aurait dû être divulgué au moins par extraits.

169    La REA soutient que le document D 8.1 contient des informations relatives à l’organisation interne du consortium et à son mode opératoire pendant la durée du projet, à savoir notamment l’organisation du projet et des responsabilités, la procédure de contrôle de la qualité, le processus décisionnel et le flux de communication entre les partenaires. Il préciserait également les outils informatiques utilisés par le projet pour sa gestion. Enfin, le document contiendrait en pièces jointes les modèles des documents utilisés par le consortium pour les résultats des travaux, les rapports intermédiaires, l’ordre du jour pour la réunion et les procès-verbaux. La divulgation de ces informations porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux des personnes concernées et donnerait un avantage aux concurrents qui souhaitent mettre en place un projet similaire à l’avenir, car ils bénéficieraient des résultats des travaux des membres du consortium.

170    Ayant consulté le document D 8.1, le Tribunal constate qu’il contient, ainsi que cela a été mis en exergue dans la décision attaquée, les informations concernant la structure de gestion du projet, ainsi que la planification des activités techniques à la livraison finale des résultats, et définit les procédures de contrôle de qualité du projet, les rôles et les responsabilités pour le développement de chaque élément technologique.

171    Afin de présenter le plan de gestion de la qualité, le document en cause décrit en détail, notamment, la structure de la gestion de la qualité du projet et la répartition des responsabilités entre différentes personnes et organes du consortium, les méthodologies, les critères et les procédures conçus pour évaluer la qualité des résultats du projet à l’égard des différentes composantes de celui-ci, tels que les indicateurs clés de performance, ainsi que la gestion des risques. L’ensemble de ces informations relèvent du savoir-faire des membres du consortium et mettent en avant l’expertise de ceux-ci concernant la gestion de la qualité du projet. Par ailleurs, les descriptions des différents rendements scientifiques et technologiques incluent des références aux techniques et aux fonctionnalités spécifiquement visées dans le cadre dudit projet et reflètent ainsi l’architecture générale du système, telle que conçue par les membres du consortium. Ces informations relèvent donc de leur savoir-faire scientifique.

172    Il s’ensuit que l’ensemble des informations contenues dans le document D 8.1 relèvent des intérêts commerciaux des membres du consortium au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. C’est sans commettre d’erreur que la REA a considéré dans la décision attaquée que leur divulgation était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium en ce qu’elle permettrait aux concurrents de tirer indûment avantage de leur savoir-faire présentant une valeur commerciale.

173    Partant, le présent grief doit être rejeté.

viii) Sur les documents D 8.3 (Rapport de progrès périodique), D 8.4 (Rapport annuel), D 8.5 (Rapport de progrès périodique 2) et D 8.7 (Rapport annuel 2)

174    Le requérant fait valoir que la REA n’expose pas que les documents « descriptifs » D 8.3, D 8.4, D 8.5 et D 8.7 contiennent des secrets d’affaires d’un partenaire du consortium, qu’ils reflètent le savoir-faire scientifique d’une personne ou qu’ils contiennent des informations sur des méthodes de production et d’analyse dont la publication entraînerait nécessairement une atteinte grave aux intérêts d’un membre du consortium. Ainsi, lesdits documents auraient dû être divulgués au moins par extraits.

175    La REA soutient que les documents D 8.3, D 8.4, D 8.5 et D 8.7 contiennent des informations relatives à l’état d’avancement du projet par rapport aux lots de travail concernés, les résultats techniques étant décrits en relation avec les indicateurs de performance spécifiques au projet. De plus, les risques du projet et les mesures de protection sont présentés et les futures étapes techniques sont résumées. Enfin, ces documents contiennent un aperçu très détaillé de l’utilisation des ressources par partenaire et lot de travail, dans lequel les tâches terminées sont également indiquées. En résumé, ces documents auraient un contenu technique et financier et les concurrents tireraient avantage de l’accès à ceux-ci, car ils pourraient tirer des leçons des mesures prises et éviter les étapes qui se sont révélées non pertinentes ou superflues, ce qui leur permettrait d’estimer les coûts d’investissement, de réduire les coûts et d’accélérer les tests ou le développement d’une technologie comparable.

176    Ayant consulté les documents D 8.3, D 8.4, D 8.5 et D 8.7, le Tribunal constate qu’ils décrivent, ainsi qu’il ressort de la décision attaquée, l’état d’avancement technique du projet par rapport aux lots de travail concernés après 6, 12, 18 et 24 mois en référence aux différents rendements scientifiques et technologiques dudit projet.

177    Afin de présenter cet état d’avancement du projet, les documents en cause décrivent en détail la stratégie développée par les membres du consortium pour la réalisation du projet en cause, y compris la description détaillée des tâches réalisées au cours de la période concernée et la répartition des tâches entre les membres, ainsi que les méthodologies conçues pour suivre cet état d’avancement, ce qui relève de leur savoir-faire. Par ailleurs, les descriptions des différents rendements scientifiques et technologiques incluent des références aux techniques, aux outils et aux fonctionnalités spécifiquement visés dans le cadre dudit projet et reflétant ainsi l’architecture générale du système, telle que conçue par les membres du consortium. Ces informations relèvent donc de leur savoir-faire scientifique.

178    L’ensemble des informations contenues dans les documents D 8.3, D 8.4, D 8.5 et D 8.7 relèvent donc des intérêts commerciaux des membres du consortium au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. C’est sans commettre d’erreur que la REA a considéré dans la décision attaquée que leur divulgation était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des membres du consortium en ce qu’elle permettrait aux concurrents de tirer indûment avantage de leur savoir-faire présentant une valeur commerciale.

179    Partant, le présent grief doit être rejeté.

3)      Conclusion sur la première branche du premier moyen

180    Eu égard à ce qui précède, il convient d’accueillir la première branche du premier moyen en ce qui concerne le refus d’accès intégral au document D 1.3, le refus d’accès partiel aux documents D 1.1, D 1.2, D 2.1, D 2.2 et D 2.3, ainsi que de l’accès plus étendu aux documents D 3.1, D 7.3 et D 7.8, et de la rejeter en ce qui concerne le refus d’accès aux documents D 8.1, D 8.3, D 8.4, D 8.5 et D 8.7. Il convient toutefois de rappeler qu’il n’appartient pas au Tribunal de se substituer à la REA et d’indiquer concrètement les parties des documents auxquels un accès partiel aurait dû être accordé, l’agence étant tenue, lors de l’exécution du présent arrêt, de prendre en considération les motifs exposés à cet égard dans celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, point 95 et jurisprudence citée).

C.      Sur la seconde branche du premier moyen, tirée de l’existence d’un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents en cause

181    Le requérant fait valoir l’existence de plusieurs intérêts publics à la divulgation dans leur intégralité des documents demandés. Premièrement, il y aurait lieu de garantir l’accès général de la société aux résultats de recherches financées par des fonds publics. Deuxièmement, il y aurait un intérêt scientifique à la divulgation, seuls les résultats de recherches qui sont discutés, critiqués, testés et qui peuvent être reproduits par d’autres pouvant être qualifiés de scientifiques. Troisièmement, il existerait également un intérêt public à la divulgation en ce que, d’un point de vue éthique et sous l’angle des droits fondamentaux, le projet iBorderCtrl, serait particulièrement discutable. Quatrièmement, il existerait un intérêt médiatique à la divulgation des documents ainsi qu’en témoignerait le grand nombre de reportages relatifs aux projet iBorderCtrl. Cinquièmement, il y aurait un intérêt politique et démocratique à la divulgation des documents du projet iBorderCtrl dont l’utilisation pratique exigerait, dans une prochaine étape, la création d’une base légale appropriée. Sixièmement, il existerait un intérêt budgétaire à n’investir aucun fonds dans la recherche sur une technique dont l’utilisation serait illicite en l’état actuel du droit et qui, pour des motifs politiques, ne devrait pas être utilisée.

182    Concernant la mise en balance des intérêts en présence, le requérant fait valoir, d’une part, que les intérêts commerciaux des membres du consortium « ne pèsent pas particulièrement lourd » : premièrement, un grand nombre d’informations sur le projet iBorderCtrl seraient déjà connues du public ou ont été divulguées ; deuxièmement, il serait douteux que les documents demandés contiennent même des secrets d’affaires si ce n’est en raison de la manière dont le système iBorderCtrl est conçu, l’objet du projet semblant plutôt être de tester et de combiner des technologies existantes que de développer une nouvelle technologie ; troisièmement, la divulgation des documents du projet n’affecterait pas la protection juridique des composants du système utilisés ou du système dans sa globalité, qui est déjà protégé par des brevets, et la législation en matière de propriété intellectuelle de codes de programmation susceptibles d’avoir été développés au cours du projet n’est pas affectée par la divulgation des rapports sur le projet, de sorte que leur divulgation ne dévaloriserait pas leurs inventions même si elle pouvait amoindrir la position concurrentielle et les perspectives de profits de certains membres du consortium. D’autre part, l’intérêt à la transparence du public « pèserait en revanche lourd » dans l’évaluation des intérêts en conflit, dans la mesure où, premièrement, le projet est entièrement financé par des fonds publics et, deuxièmement, il est particulièrement douteux et contesté et soulève ainsi des questions de principe sur l’utilisation de l’intelligence artificielle.

183    En tout état de cause, les différents intérêts publics, pris ensemble, à une divulgation des documents « pèseraient plus lourds » que les intérêts commerciaux à la confidentialité.

184    La REA conteste les arguments du requérant et soutient qu’il n’a pas démontré l’existence d’un intérêt public supérieur à la divulgation.

185    Conformément à l’article 4, paragraphe 2, dernier membre de phrase, du règlement no 1049/2001, les institutions refusent l’accès à un document lorsque sa divulgation porterait atteinte, notamment, à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée « à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé ». Il en ressort que les institutions de l’Union ne refusent pas l’accès à un document lorsque sa divulgation est justifiée par un intérêt public supérieur, même si celle-ci pourrait porter atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée.

186    Dans ce contexte, il y a lieu de mettre en balance, d’une part, l’intérêt spécifique devant être protégé par la non-divulgation du document concerné et, d’autre part, notamment, l’intérêt général à ce que ce document soit rendu accessible, eu égard aux avantages découlant, ainsi qu’il est précisé au considérant 2 du règlement no 1049/2001, d’une transparence accrue, à savoir une meilleure participation des citoyens au processus décisionnel ainsi qu’une plus grande légitimité, efficacité et responsabilité de l’administration des citoyens dans un système démocratique (voir arrêt du 21 octobre 2010, Agapiou Joséphidès/Commission et EACEA, T‑439/08, non publié, EU:T:2010:442, point 136 et jurisprudence citée ; voir également, arrêt du 5 février 2018, PTC Therapeutics International/EMA, T‑718/15, EU:T:2018:66, point 107).

187    Il incombe au demandeur d’invoquer de manière concrète des circonstances fondant un intérêt public supérieur qui justifie la divulgation des documents concernés (voir arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 94 et jurisprudence citée, et du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 90 et jurisprudence citée). En effet, c’est à ceux qui soutiennent l’existence d’un intérêt public supérieur au sens du dernier membre de phrase de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 qu’il incombe de le démontrer (arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑306/12, EU:T:2014:816, point 97).

188    L’intérêt public supérieur susceptible de justifier la divulgation d’un document ne doit, certes, pas nécessairement être distinct des principes qui sous‑tendent le règlement no 1049/2001. Cependant, des considérations générales ne sauraient être retenues pour justifier l’accès aux documents demandés, lequel exige que le principe de transparence présente, dans la situation donnée, une acuité particulière qui prime les raisons justifiant le refus de divulgation des documents en question (voir, en ce sens, arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, points 92 et 93 et jurisprudence citée, et du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, points 92 et 93)

189    Dans la demande confirmative, le requérant a invoqué un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents demandés consistant, d’une part, en l’intérêt légitime du public d’accéder aux résultats d’une recherche financée par des fonds publics et, d’autre part, en le droit du public de savoir si le développement d’un projet comportant éventuellement des ingérences non éthiques ou illégales dans le droit au respect de la vie privée des citoyens est financé par des fonds publics afin de permettre un débat public et démocratique éclairé sur la mise en place de nouveaux systèmes de contrôle de masse controversés comme celui proposé dans le cadre du projet iBorderCtrl.

190    En réponse à cette argumentation, la REA indique, dans la décision attaquée, d’une part, que l’intérêt du public à la diffusion des résultats du projet en cause est assuré par la mise en place d’un ensemble cohérent de stratégies et d’outils visant à disséminer les résultats des projets finalisés, habituellement au travers des résumés approuvés par la REA et qui préservent les droits de propriété intellectuelle du consortium ainsi que les autres intérêts commerciaux des personnes concernées, y compris en ce qui concerne les documents relatifs à l’évaluation juridique et éthique du projet en cause qui se réfèrent spécifiquement aux développements technologiques et scientifiques, aux méthodes et aux résultats du projet. D’autre part, le projet iBorderCtrl serait un projet de recherche en cours qui aurait pour objet d’expérimenter des nouvelles technologies dans le domaine du contrôle des frontières de l’Union et non pas de mettre en œuvre ces technologies directement sur le terrain, étant entendu par ailleurs que les préoccupations en matière de protection des droits fondamentaux auraient été dûment intégrées dans le projet. La REA en conclut, dans la décision attaquée, que les intérêts publics invoqués par le requérant ne prévalent pas sur les intérêts des tiers à la protection de leurs intérêts commerciaux.

191    À titre liminaire, il convient de relever que l’examen de la seconde branche du premier moyen ne concerne que les documents demandés ou les parties desdits documents à l’égard desquels la REA a correctement conclu qu’ils relevaient de l’exception visée l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 conformément à la conclusion reprise au point 180 ci-dessus.

192    À cet égard, il convient de relever que, si, comme l’affirme à juste titre le requérant, il existe un intérêt public à la diffusion des résultats des projets bénéficiant d’un financement par des fonds de l’Union, le législateur de l’Union a mis en place des règles en vue d’assurer la diffusion des résultats des projets financés au titre du programme Horizon 2020.

193    Comme le relève la REA, le règlement no 1290/2013 et la convention de subvention prévoient une approche équilibrée qui s’efforce de tenir compte, d’une part, des intérêts du public, du monde scientifique et des médias à la divulgation des résultats et, d’autre part, des intérêts des membres du consortium à la protection de leurs intérêts commerciaux, y compris dans le domaine de la propriété intellectuelle.

194    En effet, d’une part, l’article 43, paragraphe 2, du règlement no 1290/2013, sur lequel s’appuie par ailleurs le requérant, et l’article 29.1 de la convention de subvention prévoient une obligation pour les participants de diffuser par des moyens appropriés, notamment par voie de publications scientifiques, des résultats du projet, sous réserve d’éventuelles restrictions imposées, notamment, par la protection de la propriété intellectuelle, des règles de sécurité ou des intérêts légitimes. En outre, l’article 29.2 de la convention de subvention stipule qu’un accès libre aux publications scientifiques des résultats évalués par les pairs doit être garanti. Par ailleurs, l’article 38.2.1 de la convention de subvention prévoit que la REA peut, dans le respect de la confidentialité des informations, utiliser les informations relatives à l’action, les documents, notamment les résumés prévus pour publication, et les services destinés au public, pour ses activités de communication et de publicité.

195    En outre, conformément à l’article 20.3, sous a), iii), et à l’article 20.4, sous a), de la convention de subvention, les participants doivent soumettre à la REA, avec les rapports périodiques techniques et financiers, les résumés contenant, notamment, un aperçu des résultats et de leur diffusion, destinés à la publication par la REA.

196    D’autre part, l’article 4 du règlement no 1290/2013 et l’article 36.1 de la convention de subvention prévoient, dans les conditions qui y sont énoncées, l’accès des institutions, des organes et des organismes de l’Union et des États membres aux informations concernant les résultats générés par un participant ayant bénéficié d’un financement de l’Union. En outre, l’article 49 du règlement no 1290/2013 assure aux mêmes institutions, organes et organismes et aux États membres des droits d’accès nécessaires, aux fins du développement, de la mise en œuvre et du suivi de politiques ou programmes de l’Union, aux résultats générés par un participant ayant bénéficié d’un financement de l’Union.

197    Il s’ensuit que l’intérêt public à la diffusion des résultats des recherches financées par les fonds publics dans le cadre du programme Horizon 2020 est assuré par les dispositions pertinentes du règlement no 1290/2013 et de la convention de subvention. Le requérant reste en défaut de démontrer que ce système de diffusion des résultats n’est pas susceptible de satisfaire pleinement l’intérêt scientifique, médiatique et du public en général à disposer d’un accès aux résultats des projets financés par l’Union et qu’il serait ainsi nécessaire de divulguer, en outre, des informations contenues dans les documents demandés, même si une telle divulgation porterait atteinte aux intérêts commerciaux légitimes des membres du consortium protégés au titre de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

198    Deuxièmement, pour autant que le requérant soutient que l’obligation de divulguer tous les documents demandés résulterait du caractère controversé du projet en cause du point de vue éthique et sous l’angle des droits fondamentaux, il importe de relever que, d’une part, les dispositions pertinentes applicables aux projets de recherche et d’innovation financés au titre du programme Horizon 2020, dont notamment l’article 19 du règlement (UE) no 1291/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2013, portant l’établissement du programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon 2020 » (2014-2020) et abrogeant la décision no 1982/2006/CE (JO 2013, L 347, p. 104), l’article 14 du règlement no 1290/2013, lu à la lumière de son considérant 9, ainsi que l’article 34 de la convention de subvention visent à imposer aux participants l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes reconnus, en particulier, par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et à la Commission une obligation de veiller au respect de ces droits et de ces principes, ce qui est par ailleurs reflété dans le fait que les évaluations juridiques et éthiques du projet iBorderCtrl, ces dernières étant soumises à une évaluation par le conseiller en éthique indépendant, sont spécifiquement incluses dans les étapes obligatoires du développement de celui-ci.

199    D’autre part, ainsi que la REA l’a fait observer sans être contredite sur ce point par le requérant, le projet en cause était un projet de recherche en cours qui avait pour seul objectif d’expérimenter des technologies. Le requérant n’allègue pas que les droits fondamentaux des personnes participant aux essais pilotes dans le cadre du projet iBorderCtrl n’ont pas été respectés. L’intérêt public invoqué par le requérant concerne, en réalité, un éventuel déploiement futur dans des conditions réelles des systèmes fondés sur des techniques et des technologies développées dans le cadre du projet iBorderCtrl. Un tel intérêt sera satisfait par la diffusion des résultats dans les conditions déterminées par le règlement no 1290/2013 et précisées dans la convention de subvention (voir points 194 à 196 ci-dessus).

200    De même, le Tribunal considère, à l’instar du requérant, qu’il existe un intérêt du public à participer à une discussion publique éclairée et démocratique sur la question de savoir si des technologies de contrôle telles que celles en cause sont souhaitables et si elles doivent être financées par des fonds publics, et que cet intérêt doit être dûment sauvegardé. Eu égard au fait que le projet iBorderCtrl n’est cependant qu’un projet de recherche en cours de développement, il est tout à fait possible de tenir une telle discussion publique éclairée sur les différents aspects faisant l’objet de la recherche en cause sur le fondement des résultats de ces recherches divulguées conformément aux règles énoncées dans le règlement no 1290/2013 et la convention de subvention, telles que rappelées aux points 194 à 196 ci-dessus.

201    Enfin, il convient de rappeler dans ce contexte que, selon la jurisprudence, l’intérêt public à la transparence n’a pas le même poids lorsqu’il s’agit de l’activité administrative de l’institution concernée, dans le cadre de laquelle s’inscrivent en l’espèce les documents demandés, que lorsque l’activité législative de celle-ci est en cause (voir, en ce sens, arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 60, et du 25 octobre 2013, Beninca/Commission, T‑561/12, non publié, EU:T:2013:558, point 64).

202    Il s’ensuit que le requérant est resté en défaut de démontrer que le principe de transparence présentait, en l’espèce, une acuité particulière primant l’intérêt légitime à la protection des intérêts commerciaux des membres du consortium en ce qui concerne les documents ou parties de documents pour lesquels la REA a pu valablement considérer qu’ils relevaient de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement n° 1049/2001, tels qu’énumérés au point 180 ci-dessus. La REA a pu considérer sans commettre d’erreur que l’existence d’un intérêt public supérieur à cette divulgation n’avait pas pu être établie sur la base des circonstances invoquées par le requérant eu égard en particulier au régime de diffusion et d’accès aux résultats des recherches mis en place par le règlement no 1290/2013 et par la convention de subvention.

203    Au vu des considérations qui précèdent, il convient de conclure que le requérant n’a pas établi l’existence d’un intérêt public supérieur, résultant de la prise en compte des différents intérêts invoqués pris individuellement ou considérés ensemble, qui justifierait la divulgation au public en vertu du dernier membre de phrase du paragraphe 2 de l’article 4 du règlement no 1049/2001 des informations couvertes par l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, de ce règlement.

204    En conséquence, il y a lieu de rejeter la seconde branche du premier moyen.

205    Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu d’annuler la décision attaquée en ce que la REA a omis de statuer sur la demande du requérant d’accès aux documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl et en ce qu’elle a refusé l’accès intégral au document D 1.3 et l’accès partiel ou plus étendu aux documents D 1.1, D 1.2, D 2.1, D 2.2, D 2.3, D 3.1, D 7.3 et D 7.8 et de rejeter le recours pour le surplus.

IV.    Sur les dépens

206    Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.

207    En l’espèce, le requérant a obtenu satisfaction en ce qui concerne le second moyen ainsi qu’une partie importante de la première branche du premier moyen. Il sera donc fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en décidant que le requérant supportera la moitié de ses propres dépens et que la REA supportera ses propres dépens ainsi que la moitié des dépens exposés par le requérant.

208    En outre, aux termes de l’article 135, paragraphe 2, du règlement de procédure, le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, partiellement ou totalement aux dépens, si cela apparaît justifié en raison de son attitude, y compris avant l’introduction de l’instance, en particulier si elle a fait exposer à l’autre partie des frais que le Tribunal reconnaît comme frustratoires ou vexatoires.

209    En l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 156 et 157 ci-dessus, le requérant a obtenu, par ses propres moyens, l’accès aux parties occultées du document D 7.3, a ainsi pris connaissance des informations auxquelles l’accès lui avait été refusé par la décision attaquée et a diffusé la version intégrale ainsi obtenue du document D 7.3 sur son site Internet. En procédant ainsi, le requérant n’a pas respecté les procédures prévues par le droit de l’Union relatif à l’accès aux documents et n’a pas non plus attendu l’issue du présent litige afin de savoir s’il pouvait ou non obtenir légalement accès à la version intégrale du document en cause. Le Tribunal estime qu’il doit être tenu compte de ce comportement du requérant, lors de la répartition des dépens. En effet, étant donné que le dépôt dudit document par le requérant dans sa lettre du 23 mars 2021 est dépourvu de toute pertinence aux fins de la solution du présent litige, il a exposé de cette manière la REA à des frais frustratoires, consistant en la préparation d’observations écrites sur ce dépôt, lesquels auraient pu être évités si le requérant avait agi dans le respect de la présente procédure juridictionnelle, en attendant l’issue de celle-ci et en obtenant, le cas échéant, légalement l’accès auxdites informations ou à certaines d’entre elles, conformément à l’arrêt du Tribunal. En conséquence, en application de l’article 135, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a lieu de mettre à la charge du requérant les dépens afférents au dépôt de sa lettre du 23 mars 2021 ainsi que ceux afférents au dépôt des observations écrites de la REA du 20 mai 2021.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de l’Agence exécutive européenne pour la recherche (REA) du 17 janvier 2019 [ARES (2019) 266593] est annulée, premièrement, pour autant que la REA a omis de statuer sur la demande de M. Patrick Breyer d’accès aux documents relatifs à l’autorisation du projet iBorderCtrl et, deuxièmement, pour autant que la REA a refusé l’accès intégral au document D 1.3, un accès partiel aux documents D 1.1, D 1.2, D 2.1, D 2.2 et D 2.3, ainsi qu’un accès plus étendu aux documents D 3.1, D 7.3 et D 7.8, dans la mesure où ces documents contiennent des informations non couvertes par l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      M. Breyer supportera ses propres dépens afférant au dépôt de sa lettre du 23 mars 2021 et les dépens exposés par la REA afférant au dépôt de ses observations du 20 mai 2021.

4)      M. Breyer supportera la moitié de ses propres dépens autres que ceux afférant au dépôt de sa lettre du 23 mars 2021.

5)      La REA supportera ses propres dépens, à l’exception de ceux afférant au dépôt de ses observations du 20 mai 2021, ainsi que la moitié des dépens exposés par M. Breyer autres que ceux afférant au dépôt de la lettre de M. Breyer du 23 mars 2021.

Kornezov

Buttigieg

Hesse

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 décembre 2021.

Signatures


Table des matières


I. Antécédents du litige

II. Procédure et conclusions des parties

III. En droit

A. Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001

B. Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, et de l’article 4, paragraphe 2, dernier membre de phrase, du règlement no 1049/2001

1. Sur la recevabilité des nouveaux éléments de preuve et des nouvelles offres de preuve

2. Sur la recevabilité du grief tiré d’une omission à accorder un accès partiel

3. Sur la première branche du premier moyen, tirée de l’absence d’atteinte à la protection des intérêts commerciaux

a) Sur l’application en l’espèce du règlement no 1290/2013, des clauses de la convention de subvention et de l’article 339 TFUE

b) Sur l’application en l’espèce de l’exception visant à la protection des intérêts commerciaux des tiers et la possibilité d’accorder au moins un accès partiel

1) Sur les arguments de nature transversale

2) Sur l’évaluation individuelle des documents en cause

i) Sur les documents D 1.1 (Premier rapport du conseiller en éthique), D 1.2 (L’éthique du profilage, le risque de stigmatisation des individus et le plan de mitigation) et D 2.3 (Rapport d’examen juridique et éthique à l’échelle de l’Union)

ii) Sur le document D 1.3 (Conseiller en éthique)

iii) Sur le document D 2.1 (Rapport de l’analyse des exigences)

iv) Sur le document D 2.2 (Architecture de référence et spécification des composants)

v) Sur le document D 3.1 (Dispositifs de collecte de données – spécifications)

vi) Sur les documents D 7.3 (Plan de diffusion et communication) et D 7.8 (Plan de diffusion et communication 2)

vii) Sur le document D 8.1 (Plan de gestion de la qualité)

viii) Sur les documents D 8.3 (Rapport de progrès périodique), D 8.4 (Rapport annuel), D 8.5 (Rapport de progrès périodique 2) et D 8.7 (Rapport annuel 2)

3) Conclusion sur la première branche du premier moyen

C. Sur la seconde branche du premier moyen, tirée de l’existence d’un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents en cause

IV. Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’allemand.

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