Inpost Paczkomaty v Commission (Judgment) French Text [2020] EUECJ C-431/19P (17 December 2020)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/C43119P.html
Cite as: ECLI:EU:C:2020:1051, EU:C:2020:1051, [2020] EUECJ C-431/19P

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ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

17 décembre 2020 (*)

« Pourvoi – Aides d’État – Article 106, paragraphe 2, TFUE – Services d’intérêt économique général (SIEG) – Encadrement de l’Union européenne – Application aux aides d’État sous forme de compensations de service public – Secteur postal – Directive 97/67/CE – Article 7 – Compensation du coût net résultant des obligations de service universel – Décision déclarant l’aide compatible avec le marché intérieur »

Dans les affaires jointes C‑431/19 P et C‑432/19 P,

ayant pour objet deux pourvois au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduits le 5 juin 2019,

Inpost Paczkomaty sp. z o.o., établie à Cracovie (Pologne), représentée par M. M. Doktór, radca prawny,

partie requérante dans l’affaire C‑431/19 P,

et

Inpost S.A., établie à Cracovie (Pologne), représentée par M. W. Knopkiewicz, radca prawny,

partie requérante dans l’affaire C‑432/19 P,

les autres parties à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par Mmes D. Recchia, K. Blanck et K. Herrmann, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

République de Pologne, représentée par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, MM. C. Lycourgos (rapporteur) et I. Jarukaitis, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par leurs pourvois, Inpost Paczkomaty sp. z o.o. et Inpost S.A. demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 19 mars 2019, Inpost Paczkomaty et Inpost/Commission (T‑282/16 et T‑283/16, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2019:168), par lequel le Tribunal a rejeté leurs recours tendant à l’annulation de la décision C(2015) 8236 final de la Commission, du 26 novembre 2015, par laquelle celle-ci n’a pas soulevé d’objections à l’égard de la mesure notifiée par les autorités polonaises relative à l’aide octroyée à Poczta Polska sous la forme d’une compensation du coût net résultant de l’accomplissement, par cette société, de ses obligations de service postal universel pour la période comprise entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2015 (ci-après la « décision litigieuse »).

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La directive postale

2        Sous le titre « Financement des services universels », l’article 7 de la directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 décembre 1997, concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l’amélioration de la qualité du service (JO 1998, L 15, p. 14), telle que modifiée par la directive 2008/6/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 février 2008 (JO 2008, L 52, p. 3, et rectificatif JO 2015, L 225, p. 49) (ci-après la « directive postale »), prévoit :

« 1.      Les États membres n’accordent pas ou ne maintiennent pas en vigueur de droits exclusifs ou spéciaux pour la mise en place et la prestation de services postaux. Les États membres peuvent financer la prestation de services universels par un ou plusieurs des moyens prévus aux paragraphes 2, 3 et 4 ou par tout autre moyen compatible avec le traité.

2.      Les États membres peuvent garantir la prestation des services universels en les confiant en sous-traitance dans le respect de la réglementation applicable à la passation de marchés publics, y compris en recourant au dialogue compétitif ou aux procédures négociées avec ou sans publication d’un avis de marché, qui sont prévus par la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services [(JO 2004, L 134, p. 114)].

3.      Lorsqu’un État membre détermine que les obligations de service universel prévues par la présente directive font supporter un coût net, calculé en tenant compte des dispositions de l’annexe I, et constituent une charge financière inéquitable pour le ou les prestataires du service universel, il peut introduire :

a)      un mécanisme de dédommagement des entreprises concernées par des fonds publics ; ou

b)      un mécanisme de répartition du coût net des obligations de service universel entre les prestataires de services et/ou les utilisateurs.

4.      Lorsque le coût net est partagé conformément au paragraphe 3, point b), les États membres peuvent mettre en place un fonds de compensation qui peut être financé par une redevance imposée aux prestataires de services et/ou aux utilisateurs et administré à cette fin par un organisme indépendant du ou des bénéficiaires. Les États membres peuvent lier l’octroi des autorisations aux prestataires de services prévues à l’article 9, paragraphe 2, à l’obligation de contribuer financièrement à ce fonds ou de se conformer aux obligations de service universel. Les obligations de service universel qui incombent au(x) prestataire(s) du service universel visée(s) à l’article 3 peuvent faire l’objet d’un financement de ce type.

5.      Les États membres veillent à ce que les principes de transparence, de non-discrimination et de proportionnalité soient respectés lors de l’établissement du fonds de compensation et de la fixation du niveau des contributions financières visées aux paragraphes 3 et 4. Les décisions prises en vertu des paragraphes 3 et 4 se fondent sur des critères objectifs et vérifiables et sont rendues publiques. »

3        Conformément à l’article 8 de cette directive, les dispositions de l’article 7 de celle-ci ne portent pas atteinte au droit des États membres d’organiser, conformément à leur législation nationale, le placement de boîtes aux lettres sur la voie publique, l’émission de timbres-poste et le service d’envois recommandés utilisé dans le cadre de procédures judiciaires ou administratives.

 L’encadrement SIEG

4        La communication de la Commission européenne, intitulée « Encadrement de l’Union européenne applicable aux aides d’État sous forme de compensations de service public (2011) » (JO 2012, C 8, p. 15, ci-après l’« encadrement SIEG »), dispose, au point 14 de la section 2.2, intitulée « Véritable service d’intérêt économique général visé à l’article 106 [TFUE] » :

« Aux fins de l’application des principes énoncés dans la présente communication, les États membres doivent prouver qu’ils ont pris dûment en considération les besoins en matière de service public concernés, en effectuant une consultation publique ou par d’autres moyens appropriés permettant de tenir compte des intérêts des utilisateurs et des prestataires de services. Cette disposition ne s’applique pas lorsqu’il est évident qu’une nouvelle consultation n’apportera aucune valeur ajoutée significative à une consultation récente. »

5        Sous la section 2.6, intitulée « Respect des règles de l’Union applicables aux marchés publics », le point 19 de l’encadrement SIEG prévoit :

« Une aide ne pourra être considérée comme compatible avec le marché intérieur sur la base de l’article 106, paragraphe 2, [TFUE]que si l’autorité responsable, au moment de confier la prestation du service à l’entreprise concernée, s’est conformée ou s’engage à se conformer aux règles de l’Union applicables dans le domaine des marchés publics. Cela comprend toutes les exigences en matière de transparence, d’égalité de traitement et de non-discrimination découlant directement du traité et, s’il y a lieu, du droit dérivé de l’Union. Toute aide ne respectant pas ces règles et exigences est réputée affecter le développement des échanges dans une mesure contraire aux intérêts de l’Union, au sens de l’article 106, paragraphe 2, du traité. »

6        Sous la section 2.8, intitulée « Montant de la compensation », le point 25 de cet encadrement précise :

« La méthode du coût net évité consiste à calculer le coût net nécessaire, effectif ou escompté, pour exécuter les obligations de service public comme la différence entre le coût net supporté par le prestataire lorsqu’il exécute ces obligations et le coût ou bénéfice net du même prestataire lorsqu’il ne les exécute pas. Il convient de veiller à évaluer correctement les coûts que le prestataire de services éviterait et les recettes qu’il ne percevrait pas si aucune obligation de service public ne lui était imposée. Le calcul du coût net devrait évaluer les bénéfices, y compris immatériels dans la mesure du possible, pour le prestataire du SIEG. »

7        Sous la section 2.9, intitulée « Exigences supplémentaires pouvant se révéler nécessaires pour garantir que le développement des échanges n’est pas affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union », les points 51, 52 et 56 dudit encadrement disposent :

« 51.      Les exigences énoncées aux sections 2.1 à 2.8 suffisent généralement pour garantir que l’aide ne donne pas lieu à des distorsions de concurrence contraires à l’intérêt de l’Union.

52.      On peut toutefois envisager que, dans certaines circonstances exceptionnelles, de graves distorsions de la concurrence sur le marché intérieur restent sans réponse et que l’aide affecte les échanges dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union.

[...]

56.      Une autre situation dans laquelle une appréciation plus détaillée peut s’avérer nécessaire est lorsque l’État membre charge, sans passer par une procédure concurrentielle, un prestataire de services publics de fournir un SIEG sur un marché non réservé sur lequel des services très similaires sont déjà fournis ou sont susceptibles d’être fournis dans un avenir proche en l’absence du SIEG. Ces effets négatifs sur l’évolution des échanges peuvent être plus prononcés si le SIEG est proposé à un prix inférieur aux coûts de tout prestataire réel ou potentiel et entraîner ainsi un verrouillage du marché. Tout en respectant totalement le large pouvoir discrétionnaire de l’État membre en matière de définition du SIEG, la Commission peut donc exiger des modifications, par exemple dans l’allocation de l’aide, lorsqu’elle peut raisonnablement démontrer qu’il serait possible de fournir le même SIEG à des conditions équivalentes pour les utilisateurs, en faussant moins la concurrence et à un coût moindre pour l’État. »

8        Le point 60 de l’encadrement SIEG indique, sous la section 2.10, intitulée « Transparence » :

« Pour chaque compensation de SIEG relevant du champ d’application de la présente communication, l’État membre concerné doit publier les informations suivantes sur l’internet ou par un autre moyen approprié :

a)      les résultats de la consultation publique ou d’autres moyens appropriés visés au point [14] ;

b)      la nature et la durée des obligations de service public ;

c)      l’entreprise et, s’il y a lieu, le territoire concerné ;

d)      les montants annuels correspondant à l’aide octroyée à l’entreprise. »

 Le droit polonais

9        En Pologne, la directive postale a été transposée par l’ustawa Prawo pocztowe (loi postale), du 23 novembre 2012 (Dz. U. de 2012, position 1529) (ci-après la « loi postale »). Selon les termes de l’article 3, point 30, de la loi postale, les services relevant du service universel sont, dans cet État membre, ceux comprenant les envois de lettres et de colis postaux ainsi que les envois pour les aveugles, qui ne sont pas effectués par l’opérateur désigné dans le cadre de ses obligations de service universel.

10      Il résulte des articles 45 et 46 de cette loi que, au titre du service postal universel, l’acheminement et la distribution de lettres et de colis postaux doivent être assurés chaque jour ouvrable et pas moins de cinq jours par semaine. Le poids des envois postaux concernés ne peut dépasser 2 000 grammes, celui des colis pouvant toutefois aller jusqu’à 10 000 grammes.

 Les antécédents du litige

11      Poczta Polska (ci-après « PP ») est une société anonyme polonaise dont l’unique actionnaire est le Trésor public de la République de Pologne. À l’époque des faits en cause, son activité couvrait, essentiellement, les services postaux universels ainsi que ceux de messagerie, services dont elle était alors le principal opérateur en Pologne.

12      Sur le fondement de l’article 178, paragraphe 1, de la loi postale, la mise en œuvre de la réforme du service postal polonais a été confiée, dans un premier temps et pour une durée de trois ans à compter du 1er janvier 2013, à PP, qui a été ainsi chargée d’assumer les obligations de prestataire du service postal universel sur l’ensemble du territoire polonais.

13      Les autorités polonaises ont alors notifié à la Commission, le 10 juin 2014, un régime d’aide concernant, d’une part, un mécanisme de répartition du coût net des obligations de service universel et, d’autre part, la mise en place d’un fonds de compensation, complémentaire à l’établissement de ce mécanisme.

14      Le fonds de compensation était financé, pour partie, par les contributions que les opérateurs postaux concernés étaient tenus de verser à ce fonds ainsi que, pour partie, par le budget de l’État.

15      En particulier, l’obligation de contribution prévue à l’article 108, paragraphe 2, de la loi postale visait les opérateurs postaux fournissant des services universels équivalents, dont les revenus annuels perçus à ce titre devaient néanmoins être supérieurs à 1 million de zlotys polonais (PLN) (environ 218 603 euros). Dans tous les cas, le montant dû par chaque opérateur concerné ne pouvait pas dépasser, annuellement, le plafond de 2 % du montant des revenus provenant de ses prestations de service universel.

16      Prévu initialement pour couvrir la période allant de l’année 2013 à l’année 2026, ce mécanisme a été finalement limité, par une lettre que les autorités compétentes polonaises ont transmise à la Commission le 5 janvier 2015, à la période couvrant les années 2013 à 2015 (ci-après le « régime national de compensation » ou la « mesure en cause »).

17      Les requérantes, qui font partie du groupe polonais Integer.pl S.A., étaient tenues de contribuer au financement du fonds de compensation.

18      Le 26 novembre 2015, la Commission a, en vertu de l’article 4, paragraphe 3, du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 [TFUE] (JO 2015, L 248, p. 9), adopté la décision litigieuse, dans laquelle elle a décidé de ne pas soulever d’objections à l’encontre du régime national de compensation au motif qu’il s’agissait d’une aide d’État compatible avec le marché intérieur. Selon la Commission, conformément aux critères énoncés aux sections 2.1 à 2.8 de l’encadrement SIEG, la mesure en cause n’est pas de nature à affecter les échanges commerciaux dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union. En outre, les principes de fonctionnement du fonds de compensation n’entraîneraient pas de graves distorsions de la concurrence et n’imposeraient donc pas d’exigences supplémentaires pour garantir que le développement des échanges ne soit pas affecté dans une mesure incompatible avec les intérêts de l’Union.

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

19      Par requêtes déposées au greffe du Tribunal le 30 mai 2016, les requérantes ont introduit deux recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

20      Par décisions du 28 octobre 2016, le président de la troisième chambre du Tribunal a admis l’intervention de la République de Pologne au soutien des conclusions de la Commission.

21      Par décision du président de la troisième chambre du Tribunal du 14 novembre 2016, les recours des requérantes ont été joints aux fins des phases écrite et orale de la procédure ainsi que de la décision mettant fin à l’instance.

22      Au soutien de leurs recours, les requérantes avançaient sept moyens, tirés, en substance, pour les trois premiers d’entre eux, de violations de l’article 106, paragraphe 2, TFUE en ce que l’encadrement SIEG et l’article 7 de la directive postale n’auraient pas été respectés, pour le quatrième, d’une violation des articles 7 et 8 de cette directive, pour le cinquième, d’une violation des articles 102 et 106, paragraphe 1, TFUE, pour le sixième, d’une violation des articles 16 et 17 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et, pour le septième, d’une méconnaissance de l’obligation de motivation.

23      Le Tribunal a, dans l’arrêt attaqué, rejeté chacun de ces moyens et, par conséquent, les recours dans leur ensemble.

 Les conclusions des parties

24      Les requérantes demandent à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué ;

–        d’annuler la décision litigieuse, et

–        de condamner la Commission aux dépens des présentes procédures de pourvoi ainsi qu’à ceux de la procédure en première instance.

25      La Commission et le gouvernement polonais demandent à la Cour de rejeter les pourvois et de condamner les requérantes aux dépens.

 Sur les pourvois

26      À l’appui de leurs pourvois, les requérantes invoquent quatre moyens qui recoupent, en substance, les cinq premiers moyens de leurs recours en annulation. Ces moyens de pourvoi sont tirés d’une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, en ce que plusieurs exigences de l’encadrement SIEG n’auraient pas été respectées (premier à troisième moyens), d’une violation des principes du traité FUE concernant la passation des marchés publics (premier moyen) ainsi que d’une violation de l’article 7 de la directive postale (premier, troisième et quatrième moyens).

 Sur le premier moyen

 Argumentation des parties

27      Par leur premier moyen, les requérantes allèguent, d’une part, une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, en ce que le Tribunal a jugé à tort que les exigences du point 19 de l’encadrement SIEG avaient été respectées et, d’autre part, une violation des principes de non‑discrimination, d’égalité de traitement et de transparence dans le cadre de la passation des marchés publics ainsi qu’une interprétation erronée de l’article 7, paragraphe 2, de la directive postale.

28      Elles considèrent que, même lorsqu’un État membre désigne le prestataire du service universel par la voie législative, en dehors des procédures de passation des marchés publics, les processus d’adoption et de publication de la loi doivent être appréciés au regard du respect des exigences de transparence, de non-discrimination et d’égalité de traitement. En l’occurrence, les autorités nationales auraient induit en erreur les opérateurs concernés en indiquant un taux de participation au fonds de compensation qui était inférieur de 100 % au taux qui a été finalement introduit, privant ainsi ces opérateurs de tout bénéfice et engendrant des pertes. Un tel mode de désignation du prestataire du service universel porterait atteinte à l’exigence de transparence.

29      Les requérantes précisent, dans leurs mémoires en réplique, que le premier moyen est recevable dans la mesure où elles ont expressément indiqué que le Tribunal a conclu à tort que le simple fait d’adopter et de publier l’acte juridique sur le fondement duquel PP a fourni le service universel suffit pour conclure que les exigences découlant du point 19 de l’encadrement SIEG ont été remplies.

30      La Commission et le gouvernement polonais estiment que le premier moyen est irrecevable. Ce gouvernement ajoute que ledit moyen est, en tout état de cause, non-fondé.

 Appréciation de la Cour

31      Selon une jurisprudence constante, il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de celle-ci qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande. Un pourvoi dépourvu de telles caractéristiques n’est pas susceptible de faire l’objet d’une appréciation juridique permettant à la Cour d’exercer la mission qui lui incombe dans le domaine considéré et d’effectuer son contrôle de légalité [arrêt du 1er février 2018, Panalpina World Transport (Holding) e.a./Commission, C‑271/16 P, non publié, EU:C:2018:59, point 17 ainsi que jurisprudence citée].

32      Or, dans le cadre de leur premier moyen, les requérantes se limitent, en substance, à indiquer les exigences qui, selon elles, résultent du point 19 de l’encadrement SIEG en ce qui concerne le respect des principes de non‑discrimination, d’égalité de traitement et de transparence, sans toutefois identifier de manière précise l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt attaqué.

33      Dans ce contexte, il convient de relever que, contrairement à ce qu’elles font valoir dans leur mémoire en réplique, les lacunes constatées au point précédent du présent arrêt ne sont pas comblées par la seule affirmation selon laquelle ce serait à tort que le Tribunal a conclu que le simple fait d’adopter et de publier l’acte juridique sur la base duquel PP a fourni le service universel suffit pour conclure que les exigences découlant du point 19 de l’encadrement SIEG sont remplies.

34      Par ailleurs, les requérantes ne donnent aucune indication en ce qui concerne la violation alléguée de l’article 7, paragraphe 2, de la directive postale.

35      Il s’ensuit que le premier moyen est irrecevable.

 Sur le deuxième moyen

 Argumentation des parties

36      Dans le cadre de leur deuxième moyen, les requérantes font valoir, en substance, que le Tribunal a violé l’article 106, paragraphe 2, TFUE, en ce qu’il a jugé à tort que les exigences des points 14 et 60 de l’encadrement SIEG avaient été respectées.

37      Par la première branche du deuxième moyen, elles contestent les points 46 à 48 et 51 de l’arrêt attaqué et soutiennent que, afin de respecter les exigences du point 14 de l’encadrement SIEG, il ne suffit pas d’organiser une consultation publique, mais il est également nécessaire de prouver que cette dernière a permis de prendre dûment en considération les besoins en matière de service public concernés ou que l’application d’un autre moyen approprié a permis de tenir compte des intérêts des utilisateurs finals et des prestataires.

38      Or, en l’espèce, il n’existerait aucun document ou élément de preuve attestant de la réponse du gouvernement polonais à l’observation formulée par les requérantes lors de la consultation publique du mois de septembre 2010, en ce qui concerne leur critique quant au taux de contribution de 1 %, qui prouverait, notamment, le caractère infondé de cette observation.

39      Même si le Tribunal n’a pas tiré les conclusions appropriées, les raisons indiquées au point 137 de l’arrêt attaqué montreraient à quel point cette consultation publique a eu un caractère illusoire et n’a pas dûment pris en considération les besoins des utilisateurs ni ceux des prestataires. En effet, le relèvement du taux de contribution de 1 % à 2 % aurait eu pour effet de priver les opérateurs alternatifs tenus de contribuer au financement du coût net de la quasi-totalité des bénéfices réalisés, d’imposer au prestataire du service universel l’obligation de couvrir 95 % de la totalité du coût net, ainsi que de réduire au minimum la contribution du Trésor public et de répercuter effectivement la totalité du financement sur le marché, malgré le caractère mixte du fonds de compensation (participation des opérateurs et du budget de l’État).

40      Les requérantes contestent, en outre, l’affirmation du Tribunal, au point 48 de l’arrêt attaqué, selon laquelle, étant donné que les opérateurs ont pu se prononcer sur le taux de contribution de 1 %, il n’était pas nécessaire, de facto, de renouveler la consultation concernant le taux de contribution modifié de 2 %. En effet, il serait évident que le montant du taux, plus ou moins élevé, est important pour les observations et les positions formulées lors de la consultation publique, compte tenu notamment du fait que son appréciation doit être corrélée avec la rentabilité de l’activité concernée. Or, la position du Tribunal reviendrait à vider de toute utilité la consultation publique dès lors que les positions des opérateurs consultés peuvent être complètement ignorées et que cette consultation peut aboutir à une décision aux antipodes des positions exprimées lors de celle-ci, comme cela aurait été le cas en l’espèce.

41      Par la seconde branche du deuxième moyen, relative aux exigences découlant du point 60 de l’encadrement SIEG, les requérantes allèguent, d’une part, que, contrairement à ce qu’affirme le Tribunal, au point 54 de l’arrêt attaqué, il ressort clairement de ce point 60 que les résultats de la consultation publique doivent être publiés séparément. En tout état de cause, le gouvernement polonais n’aurait publié de tels résultats ni séparément, ni conjointement avec la publication de la loi postale.

42      D’autre part, il découlerait clairement des points 14 à 16 de l’encadrement SIEG que, afin de s’acquitter de ses obligations, le gouvernement polonais aurait dû publier non seulement le mandat conférant la fourniture du service universel à PP, à savoir la loi postale, précisant les obligations de service public et les méthodes de calcul de la compensation, mais aussi les résultats de la consultation publique.

43      Le gouvernement polonais considère que la première branche du deuxième moyen est irrecevable dans la mesure où les questions de savoir si une nouvelle consultation était nécessaire ou non, si les sociétés requérantes pouvaient utilement faire valoir leurs observations et quelles étaient les motivations des autorités polonaises sont des questions de nature factuelle. La Commission et ce gouvernement estiment, par ailleurs, que ce deuxième moyen ainsi que la troisième branche du troisième moyen doivent être rejetés comme étant non fondés.

 Appréciation de la Cour

44      S’agissant de la première branche du deuxième moyen, tirée d’une méconnaissance du point 14 de l’encadrement SIEG, les requérantes font valoir, en substance, que, afin de se conformer à ce point 14, il ne suffit pas d’organiser une consultation publique, mais il est également nécessaire de prouver que cette dernière a permis de prendre en considération les intérêts des utilisateurs finals et des prestataires. Or, dans une situation où le montant du taux de compensation a doublé par rapport au montant discuté lors de la consultation publique, la position du Tribunal, selon laquelle il n’était pas nécessaire de renouveler la consultation, reviendrait à vider de toute utilité une telle consultation.

45      Il y a lieu, à titre liminaire, de relever que, ainsi que l’a à bon droit rappelé le Tribunal, au point 44 de l’arrêt attaqué, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation au titre de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, la Commission peut adopter des règles de conduite afin d’établir les critères sur la base desquels elle entend évaluer la compatibilité, avec le marché intérieur, de mesures d’aide liées à la gestion d’un SIEG, envisagées par les États membres. En adoptant de telles règles de conduite, telles que celle de l’encadrement SIEG, et en annonçant par leur publication qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, la Commission s’autolimite dans l’exercice dudit pouvoir d’appréciation et ne saurait, en principe, se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d’une violation de principes généraux du droit, tels que le principe d’égalité de traitement ou celui de protection de la confiance légitime (voir, par analogie, arrêts du 8 mars 2016, Grèce/Commission, C‑431/14 P, EU:C:2016:145, points 68 et 69, ainsi que du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C‑526/14, EU:C:2016:570, points 39 et 40).

46      À cet égard, il convient de rappeler que, selon le point 14 de l’encadrement SIEG, « [a]ux fins de l’application des principes énoncés dans [cet encadrement], les États membres doivent prouver qu’ils ont pris dûment en considération les besoins en matière de service public concernés, en effectuant une consultation publique ou par d’autres moyens appropriés permettant de tenir compte des intérêts des utilisateurs et des prestataires de services. Cette disposition ne s’applique pas lorsqu’il est évident qu’une nouvelle consultation n’apportera aucune valeur ajoutée significative à une consultation récente ».

47      Il y a lieu, dès lors, de relever que le Tribunal a, à bon droit, affirmé, au point 46 de l’arrêt attaqué, qu’il ressort du libellé de cette disposition que l’organisation d’une consultation publique n’est pas obligatoire, une telle procédure ne constituant, en effet, que l’un des moyens appropriés auxquels l’État membre peut recourir afin de prendre en considération les besoins du service public concerné et de tenir compte des intérêts des utilisateurs ainsi que des prestataires de service.

48      En outre, aux points 47 et 48 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé que, dans la mesure où, lors de la consultation publique du mois de septembre 2010, les requérantes ont pu utilement faire valoir leurs observations au sujet des conditions relatives au fonctionnement du fonds de compensation, en ce qu’elles ont, notamment, pu exprimer leur désaccord sur un taux inférieur au taux finalement retenu, en faisant valoir qu’elles le trouvaient déjà excessif, une nouvelle consultation n’aurait apporté, sur ce point, « aucune valeur ajoutée significative », au sens du point 14 de l’encadrement SIEG.

49      Or, il y a lieu de constater que, ce faisant, le Tribunal a appliqué le point 14 de l’encadrement SIEG sans commettre d’erreur de droit, en ce qu’il a examiné la question de savoir si, eu égard aux éléments pertinents du dossier porté devant lui et, en particulier, compte tenu de la consultation publique du mois de septembre 2010, il était évident qu’une nouvelle consultation publique n’apporterait pas une valeur ajoutée significative, conformément à la seconde phrase de ce point 14. En outre, les requérantes ne font aucunement valoir que le Tribunal a utilisé, à cet égard, un critère juridique différent de celui exigé audit point 14.

50      Dans ces conditions, il importe de relever que le fait que les requérantes allèguent, en substance, ainsi qu’il ressort des points 39 et 40 du présent arrêt, qu’une augmentation du taux de compensation de 100 %, entre le taux ayant été discuté lors de la consultation publique du mois de septembre 2010 et celui finalement adopté dans la décision litigieuse par les autorités polonaises compétentes, signifie qu’une nouvelle consultation publique aurait nécessairement eu une valeur ajoutée significative revient à demander à la Cour de contrôler une appréciation factuelle opérée par le Tribunal.

51      Or, ainsi qu’il résulte d’une jurisprudence constante, la Cour n’est pas compétente pour contrôler une telle appréciation dans le cadre d’un pourvoi, sous réserve du cas de dénaturation qui, en l’espèce, n’a pas été alléguée (voir, en ce sens, arrêt du 28 novembre 2019, LS Cable & System/Commission, C‑596/18 P, non publié, EU:C:2019:1025, point 24 ainsi que jurisprudence citée).

52      Par conséquent, il convient de rejeter la première branche du deuxième moyen.

53      S’agissant de la seconde branche de ce deuxième moyen, les requérantes reprochent au Tribunal d’avoir méconnu, au point 54 de l’arrêt attaqué, les exigences découlant du point 60 de l’encadrement SIEG. Ainsi, d’une part, il ressortirait clairement de ce point 60 que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, les résultats de la consultation publique doivent être publiés séparément. D’autre part, ce serait à tort que le Tribunal a considéré que le gouvernement polonais s’est acquitté de son obligation de publier les résultats de la consultation publique en publiant la loi postale.

54      Selon le point 60, sous a), de l’encadrement SIEG, pour chaque compensation de SIEG relevant du champ d’application de l’encadrement SIEG, l’État membre concerné doit publier au moyen d’Internet ou par tout autre moyen approprié visé au point 14 de cet encadrement, notamment, les résultats de la consultation publique.

55      Au point 54 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé, tout d’abord, que, au considérant 158 de la décision litigieuse, la Commission a constaté, sans erreur de fait, que la loi postale avait été publiée. Ensuite, il a jugé qu’il ne découle pas du point 60 de l’encadrement SIEG une obligation pour l’État membre de publier les résultats des consultations publiques séparément. Enfin, il a déduit du fait que, selon les constatations figurant aux points 46 à 50 de l’arrêt attaqué, la Commission pouvait valablement estimer que les exigences de transparence visées au point 14 de l’encadrement SIEG avaient été respectées que sa conclusion correspondante figurant au considérant 160 de la décision litigieuse est dépourvue d’erreur.

56      À cet égard, il y a lieu de relever qu’il ressort du libellé du point 60, sous a), de l’encadrement SIEG que, contrairement à ce que font valoir les requérantes, les États membres ne sont pas obligés de publier les résultats de la consultation publique séparément, ces résultats pouvant figurer, par exemple, dans l’acte par lequel un État membre confie la responsabilité de la gestion du SIEG à l’entreprise concernée.

57      Cependant, le fait que la loi postale, dont il n’est pas contesté qu’elle contient les éléments essentiels ayant trait aux modalités de calcul de la compensation et au montant de cette dernière, ait été publiée n’implique pas nécessairement que la République de Pologne se soit conformée à l’obligation, prévue au point 60, sous a), de l’encadrement SIEG, de publier les résultats de la consultation publique, en l’occurrence celle du mois de septembre 2010.

58      À cet égard, le gouvernement polonais fait valoir que cette obligation a bien été satisfaite dans la mesure où la notion de « résultats de la consultation publique », au sens de ce point 60, sous a), correspond, en fait, à la décision d’octroyer une compensation spécifique selon des modalités déterminées et que, par conséquent, la publication de ces derniers éléments, figurant dans la loi postale, signifie que lesdits résultats ont aussi été publiés.

59      Il y a lieu, toutefois, de relever que, eu égard au libellé clair du point 60, sous a), de l’encadrement SIEG, une telle interprétation de l’obligation de publication des résultats de la consultation publique, au sens de ce point, ne saurait être retenue. Il importe, à cet égard, de préciser que, lorsqu’un État membre décide de satisfaire à l’obligation de publication des résultats de la consultation publique au moyen de la publication de l’acte par lequel est confiée la gestion d’un SIEG, il convient, afin de ne pas vider d’effet utile cette obligation, que cette publication fasse une référence expresse, avec un degré de détail suffisant, aux résultats de la consultation publique effectuée dans le cadre de la procédure ayant mené à l’adoption dudit acte.

60      Il s’ensuit que l’affirmation du Tribunal figurant à la première phrase du point 54 de l’arrêt attaqué, selon laquelle la Commission a constaté, sans erreur de fait, que la loi postale « avait été publiée », ne suffit pas pour justifier la conclusion que le gouvernement polonais s’était conformé à l’obligation de publication des résultats de la consultation publique du mois de septembre 2010, au sens du point 60, sous a), de l’encadrement SIEG.

61      Il en va de même de l’affirmation du Tribunal, figurant à la dernière phrase du point 54 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le fait que la Commission a pu valablement estimer que les exigences de transparence, visées au point 14 de l’encadrement SIEG, avaient été respectées permet de conclure que cette dernière n’a pas commis d’erreur lorsqu’elle a affirmé que l’exigence de transparence avait été satisfaite.

62      En effet, les exigences découlant dudit point 14, relatives à la preuve de la prise en considération des besoins en matière de service public concernés au moyen d’une consultation publique ou d’autres moyens appropriés, ne sauraient être assimilées à l’exigence de transparence, prévue au point 60, sous a), de l’encadrement SIEG, qui concerne spécifiquement la publication des résultats de la consultation publique. Dès lors, le fait qu’un État membre se soit conformé aux exigences du point 14 de l’encadrement SIEG n’implique pas nécessairement qu’il se soit également conformé à l’obligation de transparence, au sens du point 60, sous a), de cet encadrement.

63      Il résulte des considérations qui précèdent que le Tribunal, au point 54 de l’arrêt attaqué, a commis plusieurs erreurs de droit en ce qui concerne l’interprétation des exigences découlant du point 60 de l’encadrement SIEG.

64      Toutefois, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’une erreur de droit commise par le Tribunal n’est pas de nature à invalider l’arrêt attaqué si le dispositif de celui-ci apparaît fondé pour d’autres motifs de droit (arrêt du 21 septembre 2017, Easy Sanitary Solutions et EUIPO/Group Nivelles, C‑361/15 P et C‑405/15 P, EU:C:2017:720, point 73 ainsi que jurisprudence citée).

65      En l’occurrence, il ressort du considérant 122 de la décision litigieuse que la Commission a estimé que la République de Pologne n’avait pas à prouver qu’elle avait, conformément aux exigences du point 14 de l’encadrement SIEG, pris dûment en considération les besoins en matière de service public, en effectuant une consultation publique ou par d’autres moyens appropriés, car les obligations de service public attribuées à PP correspondaient aux exigences en matière de services postaux universels découlant de la directive postale. La Commission a encore constaté, audit considérant 122, qu’une consultation publique sur la loi postale ainsi que sur les règlements de mise en œuvre de cette loi a été, en tout état de cause, organisée. À cet égard, l’utilisation des termes en langue anglaise « in any event » démontre que ce dernier constat de la Commission apparaît comme étant effectué à titre surabondant.

66      Or, au point 50 de l’arrêt attaqué, qui n’a pas été contesté par les requérantes dans le cadre de leurs pourvois, le Tribunal a confirmé ladite appréciation de la Commission figurant au considérant 122 de la décision litigieuse, en ce sens que, les autorités polonaises s’étant conformées aux exigences découlant de la directive postale, elles n’avaient plus à se conformer aux obligations prévues au point 14 de l’encadrement SIEG.

67      Il s’ensuit que les erreurs commises par le Tribunal et constatées au point 63 du présent arrêt, en ce qui concerne l’interprétation des exigences découlant du point 60 de l’encadrement SIEG, en particulier celle relative à la publication des résultats de la consultation publique visée audit point 14 de cet encadrement, au sens de ce point 60, sous a), ne sont pas de nature à affecter la conclusion du Tribunal quant au rejet des recours des requérantes.

68      Il résulte des considérations qui précèdent que la seconde branche du deuxième moyen ne saurait être accueillie et que ce dernier moyen, dans son ensemble, doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen

 Argumentation des parties

69      Le troisième moyen, qui s’articule en quatre branches, est tiré, d’une part, d’une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, en ce que le Tribunal a jugé à tort que les exigences du point 52 de l’encadrement SIEG avaient été respectées, et, d’autre part, d’une violation de l’article 7, paragraphes 1 et 3 à 5, de la directive postale.

70      S’agissant de la première branche de ce moyen, les requérantes contestent les points 84 à 86 de l’arrêt attaqué et font valoir, en substance, le caractère discriminatoire du fonds de compensation ainsi que la transposition incorrecte de l’article 7, paragraphes 3 et 4, de la directive postale effectuée par le gouvernement polonais.

71      La position du Tribunal manquerait de cohérence, en ce qu’il a considéré que les services de courrier ne constituaient pas des services équivalents aux services universels, alors qu’il a jugé que tel était le cas, du point de vue des consommateurs, des services relevant du service universel.

72      Premièrement, les requérantes affirment que, s’agissant des modalités de prestation de ces services, de leur tarification et des autres exigences légales, il n’existe aucune convergence entre le service universel et les services relevant du service universel. Ces deux types de services seraient fondamentalement différents.

73      En particulier, tout d’abord, le service universel devrait être fourni de manière uniforme et selon une répartition déterminée des bureaux de poste ainsi que sur la base d’un taux spécifique d’acheminement des envois postaux. Or, les prestataires des services relevant du service universel ne seraient soumis à aucune de ces restrictions.

74      Ensuite, le service universel devrait être effectué à des prix abordables validés par l’autorité nationale de régulation postale, alors que les prestataires des services relevant du service universel sont libres de fixer les prix de ces services. Or, la Commission aurait utilisé un pourcentage uniforme pour ces deux types de services alors que les résultats comptables de PP au titre de la prestation desdits types de services seraient très différents. Ces résultats montreraient le caractère erroné des conclusions du Tribunal concernant un traitement identique du service universel et des services relevant du service universel en raison de leurs caractéristiques prétendument similaires.

75      Enfin, le service universel exigerait que l’opérateur garantisse la levée de la boîte aux lettres destinée à recueillir des envois et la distribution des envois postaux, au moins une fois par jour ouvrable et pas moins de cinq jours par semaine, excepté les jours fériés et de manière à permettre à l’expéditeur d’obtenir un accusé de réception d’un envoi recommandé. Or, la législation nationale n’imposerait pas une telle exigence aux services relevant du service universel, ladite exigence pouvant résulter des obligations contractuelles de l’opérateur, sans être, cependant, une caractéristique constitutive de ces services.

76      Deuxièmement, les requérantes font valoir le caractère inexact et contraire aux principes mathématiques de l’affirmation du Tribunal effectuée au point 85 de l’arrêt attaqué au motif que le pourcentage versé par PP au fonds de compensation ne peut en aucun cas être supérieur à la contribution des autres opérateurs postaux.

77      Troisièmement, s’agissant du point 86 de l’arrêt attaqué, elles rappellent que le service universel est fourni dans l’intérêt général dans des conditions de quasi-monopole, alors que les services relevant du service universel constitueraient un segment de marché libéralisé se caractérisant par une forte concurrence.

78      Dans le cadre de la deuxième branche du troisième moyen, elles allèguent que le Tribunal a violé l’article 7, paragraphe 5, de la directive postale en raison du caractère disproportionné du fonds de compensation.

79      Premièrement, lors de l’examen des recours, le Tribunal aurait complètement ignoré la question relative à la divergence entre le coût moyen pondéré du capital (CMPC), adopté pour calculer le financement du coût net, fixé à 10,82 %, et le taux de rentabilité des services équivalents sur lequel la Commission s’est fondée pour déterminer le caractère proportionné de la contribution de 2 % des revenus. Dans la mesure où le coût minimal du capital a été fixé à 10,82 % pour le segment du marché des services postaux, il serait manifestement contradictoire de considérer, comme l’a fait la Commission, puis le Tribunal, qu’un taux de rentabilité de 5,5 % pour les services équivalents permet d’adopter un taux de contribution à 2 %, en tant que taux ne constituant pas un facteur d’éviction du marché des concurrents efficaces ni un facteur qui les dissuaderait d’y entrer.

80      Deuxièmement, les requérantes considèrent que les conclusions du Tribunal ne sont pas corroborées par les éléments de preuve en l’espèce. D’une part, même à supposer que la Commission ne disposait pas d’autres données que celle relative au taux de rentabilité de PP, les conclusions tirées par celle-ci seraient, en tout état de cause, inexactes.

81      D’autre part, la Commission aurait dû prévoir que l’année 2013 était la première année de la libéralisation du marché des services postaux et que, par conséquent, la hausse de la concurrence sur le marché des services relevant du service universel serait accompagnée d’une baisse de la rentabilité.

82      En outre, les requérantes contestent la position du Tribunal selon laquelle seule l’année 2013, qui constitue effectivement la seule année durant laquelle les requérantes ont atteint le taux de rentabilité prévu par la Commission, est pertinente pour les présents litiges car, en adoptant la décision litigieuse, la Commission ne pouvait pas savoir si le coût net n’interviendrait pas également pour l’année 2015.

83      Enfin, la mise en place du fonds de compensation exigerait également l’introduction d’un mécanisme de protection contre des avantages excessifs. En effet, le fonds de compensation devrait prendre en considération les bénéfices réalisés par l’opérateur désigné dans les années ultérieures, notamment lorsque le prestataire n’a pas été désigné par concours, ainsi que la situation particulière du marché durant la phase initiale de sa libéralisation.

84      Dans le cadre de la troisième branche du troisième moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal a violé l’article 7, paragraphe 5, de la directive postale en ne reconnaissant pas le manque de transparence du processus de création du fonds de compensation. À cet égard, le Tribunal aurait erronément invoqué l’arrêt du 12 décembre 2014, Crown Equipment (Suzhou) et Crown Gabelstapler/Conseil (T‑643/11, EU:T:2014:1076).

85      Elles rappellent qu’elles faisaient valoir devant le Tribunal que la forme finale du fonds et la participation maximale au financement (2 % des revenus) n’avaient pas fait l’objet d’une procédure consultative et que les intéressés n’avaient pas pu formuler leurs observations. Ainsi, c’est bien la jurisprudence issue de l’arrêt du 1er octobre 2009, Foshan Shunde Yongjian Housewares & Hardware/Conseil (C‑141/08 P, EU:C:2009:598), qui serait pertinente en l’espèce car il ne saurait être exclu que le gouvernement eût modifié sa position si les intéressés avaient pu exprimer leur avis en ce qui concerne le doublement du taux maximal de participation au financement.

86      S’agissant de la quatrième branche du troisième moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal a, aux points 153 à 156 de l’arrêt attaqué, violé l’article 7, paragraphe 3, de la directive postale en raison d’une méconnaissance de la condition relative à la charge financière inéquitable.

87      Tout d’abord, les requérantes considèrent que, contrairement aux arrêts du 6 octobre 2010, Commission/Belgique (C‑222/08, EU:C:2010:583), ainsi que du 6 octobre 2010, Base e.a. (C‑389/08, EU:C:2010:584), la réglementation nationale prévoit que, dès lors que le coût net génère des pertes, le montant de ces dernières constitue automatiquement une charge inéquitable pour PP. Cette présomption signifierait que ni le montant des pertes ni les caractéristiques propres à PP, telles que la qualité de son équipement, sa situation économique et financière ou sa part de marché, ne doivent être examinées en ce qui concerne la condition relative à la charge inéquitable.

88      Eu égard à la large convergence des réglementations de l’Union relatives au financement du service universel sur le marché des télécommunications et le marché postal, la position de la Cour exprimée dans les arrêts susmentionnés devrait être prise en compte en l’espèce. À cet égard, la méthode suivie par la réglementation nationale afin de financer le coût net du service universel serait incompatible avec le modèle de financement prévu dans la directive postale.

89      La position des requérantes quant à la manière de calculer la charge inéquitable de l’opérateur désigné serait, en outre, confirmée par le Rapport du groupe des régulateurs européens dans le domaine des services postaux de 2012, intitulé « Net Cost Calculation and Evaluation of a Reference Scenario » (Calcul du coût net et évaluation du scénario de référence), ainsi que par la doctrine.

90      Ensuite, elles allèguent une atteinte au principe d’interprétation uniforme du droit de l’Union, au motif que, en Pologne, les juridictions nationales saisies des recours contre les décisions de l’autorité nationale de régulation concernant le marché postal ne prennent pas en considération les demandes de décision préjudicielle adressées à la Cour en cours de procédure.

91      Enfin, la réglementation nationale aurait un caractère insuffisant car, en principe, dans le cadre de la procédure de contrôle, la décision quant au fond ne serait pas examinée.

92      Les requérantes indiquent, dans leurs mémoires en réplique, que, dans le cadre des première, deuxième et quatrième branches du troisième moyen, elles ont expressément identifié les motifs de l’arrêt attaqué et qu’elles ont également présenté des arguments tendant non pas à une remise en cause des faits, mais à la qualification juridique erronée effectuée par le Tribunal des services relevant du service universel ainsi qu’à démontrer que le Tribunal a fait une application erronée du droit de l’Union en ce qui concerne la violation de l’article 7, paragraphes 1 et 3 à 5, de la directive postale.

93      La Commission considère que les premières, deuxième et quatrième branches du troisième moyen sont irrecevables et que, en tout état de cause, ce moyen, dans son ensemble, est non fondé. Quant au gouvernement polonais, il considère que le moyen est irrecevable dans son ensemble et, en tout état de cause, non fondé.

 Appréciation de la Cour

94      Dans le cadre de la première branche du troisième moyen, les requérantes contestent, en substance, les points 84 à 86 de l’arrêt attaqué et font valoir le caractère discriminatoire du fonds de compensation ainsi que la transposition incorrecte de l’article 7, paragraphes 3 et 4, de la directive postale effectuée par le gouvernement polonais.

95      Il convient de relever, premièrement, que les arguments avancés par les requérantes, et résumés aux points 70 à 77 du présent arrêt, au soutien de la première branche de ce moyen, visent, en substance, à remettre en cause l’appréciation factuelle du Tribunal, figurant aux points 84 et 85 de l’arrêt attaqué, quant au caractère interchangeable des services postaux universels et des services postaux équivalents ainsi qu’aux conséquences à tirer de la méthode de calcul du montant de la contribution à la charge de PP.

96      Or, il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour que le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation des faits et des éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi [arrêt du 13 février 2020, Grèce/Commission (Pâturages permanents), C‑252/18 P, EU:C:2020:95, point 59 et jurisprudence citée].

97      En l’espèce, il y a lieu de constater que les requérantes n’allèguent aucune dénaturation des faits ou des éléments de preuve examinés par le Tribunal.

98      Deuxièmement, quant à l’allégation concernant le point 86 de l’arrêt attaqué, les requérantes n’indiquent pas avec suffisamment de clarté l’erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal dans l’arrêt attaqué, ce qui, au regard de la jurisprudence citée au point 31 du présent arrêt, empêche la Cour d’exercer son contrôle de légalité de l’appréciation effectuée par le Tribunal.

99      Il s’ensuit que la première branche du troisième moyen est, dans son ensemble, irrecevable et doit être rejetée.

100    La deuxième branche du troisième moyen est tirée d’une prétendue violation de l’article 7, paragraphe 5, de la directive postale en raison du caractère disproportionné du fonds de compensation. Or, de même que pour ce qui est d’une partie de l’argumentation relative à la première branche de ce moyen, celle au soutien de cette deuxième branche vise, en substance, à remettre en cause une appréciation factuelle du Tribunal quant à l’examen de proportionnalité du fonds de compensation, opéré par ce dernier, au regard des preuves qui lui ont été soumises, sans alléguer une quelconque dénaturation à cet égard.

101    Par conséquent, la deuxième branche du troisième moyen est également irrecevable et doit, dès lors, être rejetée.

102    Par la troisième branche du troisième moyen, les requérantes font valoir, en substance, que le Tribunal a violé l’article 7, paragraphe 5, de la directive postale en ne reconnaissant pas le manque de transparence du processus de création du fonds de compensation.

103    Il convient de rappeler, à cet égard, que, ainsi qu’il ressort des points 45 à 52 du présent arrêt, relatifs à l’examen de la première branche du deuxième moyen, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en concluant, aux points 47 et 48 de l’arrêt attaqué, que les requérantes ont pu utilement faire valoir leurs observations et qu’une nouvelle consultation n’aurait apporté « aucune valeur ajoutée significative », au sens du point 14 de l’encadrement SIEG, par rapport à la consultation publique du mois de septembre 2010.

104    Dans ces conditions, et sans que la Cour ait besoin de se prononcer sur la recevabilité de la troisième branche du troisième moyen, il convient de constater que, dans la mesure où, dans le cadre de cette branche, les requérantes n’allèguent ni ne démontrent que l’obligation de respecter le principe de transparence, prévue à l’article 7, paragraphe 5, de la directive postale, exigerait, en l’occurrence, une consultation des parties intéressées plus étendue que celle découlant du point 14 de l’encadrement SIEG, les motifs exposés aux points 45 à 51 du présent arrêt suffisent pour constater que ladite branche est non fondée.

105    La quatrième branche du troisième moyen est tirée de ce que, aux points 153 à 156 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a violé l’article 7, paragraphe 3, de la directive postale en raison d’une méconnaissance de la condition relative à la charge financière inéquitable.

106    Il convient de relever, à l’instar de la Commission et du gouvernement polonais, que, malgré le fait que les requérantes reproduisent et indiquent les points contestés de l’arrêt attaqué, cette quatrième branche doit être rejetée comme étant irrecevable.

107    En effet, en ce qui concerne la partie de l’argumentation avancée par les requérantes dans le cadre de ladite quatrième branche qui est résumée aux points 87 à 89 et 91 du présent arrêt, il y a lieu de relever que, par cette argumentation, elles se limitent, en substance, à contester le contenu de la décision litigieuse ainsi que celui de la loi postale, sans qu’à aucun moment elles visent, de manière circonstanciée, l’appréciation effectuée par le Tribunal et indiquent en quoi celui-ci aurait commis une erreur de droit.

108    Or, la Cour a déjà jugé que les arguments d’un pourvoi qui critiquent non pas l’arrêt rendu par le Tribunal à la suite d’une demande d’annulation d’une décision, mais la décision dont l’annulation a été demandée devant le Tribunal sont manifestement irrecevables (ordonnance du 27 septembre 2012, Brighton Collectibles/OHMI et Felmar, C‑624/11 P, non publiée, EU:C:2012:598, point 35).

109    Quant à l’argument relatif à l’atteinte au principe d’interprétation uniforme du droit de l’Union, résumé au point 90 du présent arrêt, il suffit de constater que les requérantes restent en défaut d’identifier de manière précise l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt attaqué.

110    En tout état de cause, il importe de souligner que la quatrième branche du troisième moyen est également non fondée.

111    Les requérantes contestent, en substance, la méthode utilisée par les autorités polonaises, qui aurait été confirmée par la Commission, selon laquelle, dès lors que le coût net de la fourniture des services universels génère des pertes pour le prestataire de ces services, le montant de ces pertes constitue une charge financière inéquitable pour ce prestataire, au sens de l’article 7, paragraphe 3, de la directive postale. En particulier, les requérantes considèrent que l’examen de la condition relative à « la charge financière inéquitable » doit correspondre à celui exigé par la Cour, notamment dans les arrêts du 6 octobre 2010, Commission/Belgique (C‑222/08, EU:C:2010:583, points 49 et 50), ainsi que du 6 octobre 2010, Base e.a. (C‑389/08, EU:C:2010:584, points 42 et 43), relatifs au domaine comparable du service universel des communications électroniques, qui impliquerait d’analyser la situation spécifique de l’entreprise concernée sur la base d’un faisceau d’éléments, tels que, notamment, la qualité de son équipement, sa situation économique et financière ou sa part de marché.

112    À cet égard, il y a lieu, premièrement, de rappeler que, au point 153 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a, en substance, constaté que, conformément à l’article 7, paragraphe 3, de la directive postale, la loi postale exige de l’autorité nationale compétente de déterminer si les obligations de service universel constituent une charge financière inéquitable pour le prestataire désigné. Selon le Tribunal, tel est le cas en l’espèce, dans la mesure où il ressort du considérant 16 de la décision litigieuse qu’il revient au régulateur postal polonais d’effectuer cette appréciation selon la loi postale ayant mis en œuvre ladite directive postale.

113    Or, cette dernière affirmation du Tribunal en ce qui concerne l’obligation de ce régulateur postal de vérifier si les obligations de service universel constituent, au sens de l’article 7, paragraphe 3, de la directive postale, une charge financière inéquitable pour le prestataire désigné n’a pas été contestée par les requérantes.

114    Deuxièmement, au point 156 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé que la mesure en cause n’ouvre aucun droit automatique à compensation pour le coût net des obligations de service universel de PP, dans la mesure où, ainsi qu’il ressort des considérants 16, 84 à 87 et 144 de la décision litigieuse, ce droit n’est ouvert que si les prestations de service universel conduisent à des pertes comptables. À ce point 156, le Tribunal ajoute que ce droit à compensation correspond au plus faible des montants relatifs soit aux pertes comptables résultant des prestations de service universel, soit au coût net des obligations de service universel, ce qui implique, ainsi que l’a relevé la Commission au considérant 144 de la décision litigieuse, que la mesure en cause est plus restrictive que l’encadrement SIEG, ce dernier ayant potentiellement permis une compensation totale du coût net des obligations de service universel.

115    Or, à supposer que la jurisprudence issue des arrêts du 6 octobre 2010, Commission/Belgique (C‑222/08, EU:C:2010:583), ainsi que du 6 octobre 2010, Base e.a. (C‑389/08, EU:C:2010:584), soit applicable dans le cadre de l’interprétation de la directive postale, il convient, d’une part, de relever que la constatation, au point 156 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le droit à compensation n’est ouvert que si les prestations de services universels comportent des pertes comptables pour l’entreprise chargée de fournir ces services permet de considérer que le critère utilisé par la Cour dans le cadre de cette jurisprudence, à savoir que la charge concernée présente, pour l’entreprise en question, « un caractère excessif au regard de sa capacité à la supporter », a été rempli.

116    D’autre part, il y a lieu de constater qu’il résulte du point 25 de l’encadrement SIEG, auquel se réfère le considérant 144 de la décision litigieuse, évoqué par le Tribunal au point 156 de l’arrêt attaqué, que le montant de la compensation peut également être calculé par la méthode du « coût net évité », qui consiste à calculer le coût net nécessaire, effectif ou escompté, pour exécuter les obligations de service public, et qui correspond à la différence entre le coût net supporté par le prestataire lorsque celui-ci exécute ces obligations et le coût ou le bénéfice net du même prestataire lorsqu’il ne les exécute pas. Ainsi, eu égard au libellé de ce point 25, une telle méthode de calcul pourrait conduire, en principe, à une compensation pour le coût des obligations de service universel même en l’absence de pertes financières de la part du prestataire des obligations de service public.

117    Or, les requérantes n’ont pas contesté que, ainsi que l’a relevé à juste titre le Tribunal au point 156 de l’arrêt attaqué, cette méthode de calcul du droit à compensation serait moins restrictive que celle appliquée par la République de Pologne dans le cadre de la loi postale et examinée par la Commission dans la décision litigieuse.

118    Il convient d’ajouter, à cet égard, que l’encadrement communautaire des aides d’État sous forme de compensations de service public (JO 2005, C 297, p. 4) applicable à l’époque des faits pertinents dans le cadre des affaires ayant donné lieu aux arrêts du 6 octobre 2010, Commission/Belgique (C‑222/08, EU:C:2010:583), ainsi que du 6 octobre 2010, Base e.a. (C‑389/08, EU:C:2010:584), invoqués par les requérantes, ne prévoyait pas une telle méthode relative au « coût net évité », ce qui confirme que cette jurisprudence n’est, en tout état de cause, pas décisive pour examiner le bien-fondé de l’appréciation du Tribunal dans le cadre des présents pourvois.

119    Il résulte de ce qui précède que la quatrième branche du troisième moyen est irrecevable et, en tout état de cause, non fondée, et doit donc être rejetée.

120    Par conséquent, dans la mesure où aucune des branches du troisième moyen n’a été accueillie, il convient de rejeter ce troisième moyen dans son ensemble.

 Sur le quatrième moyen

 Argumentation des parties

121    Par leur quatrième moyen, qui vise le point 167 de l’arrêt attaqué, les requérantes font valoir que le Tribunal a violé l’article 7, paragraphe 1, de la directive postale, en ce qu’il a accepté le financement du coût du service universel par un certain nombre de droits exclusifs et spéciaux conférés à PP.

122    Elles soulignent que les droits exclusifs et spéciaux, autres que ceux visés à l’article 8 de la directive postale, dont PP continuait à bénéficier, ont été expressément énoncés dans la décision litigieuse, aux considérants 52 à 56 de celle-ci, et que leur existence ne constituait pas un élément litigieux. Il n’aurait donc pas été nécessaire, afin de constater l’existence de ces services, d’avancer des arguments susceptibles d’établir qu’ils ne relevaient pas de la catégorie des droits visés à cet article 8. Il aurait suffi, à cet effet, d’analyser ledit article, ce que le Tribunal a omis de faire. Elles ajoutent que certains de ces droits exclusifs et spéciaux ne présentent aucun lien fonctionnel avec le service universel.

123    Dans leurs mémoires en réplique, elles affirment avoir démontré que, contrairement à ce que le Tribunal a déclaré, il ressort des plaintes qu’elles ont introduites devant la Commission que les droits exclusifs accordés à PP n’étaient pas admissibles au regard de la réglementation sectorielle relative au service universel. En outre, en application de la jurisprudence pertinente, le Tribunal aurait considéré qu’il était justifié d’examiner, notamment, les règles de financement sectoriel du service universel. À cet égard, elles rappellent que la question des droits exclusifs est fonctionnellement liée à l’aide en cause accordée à PP.

124    La Commission et le gouvernement polonais estiment que ce quatrième moyen est irrecevable et, en tout état de cause, non fondé.

 Appréciation de la Cour

125    Au point 167 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que les requérantes n’ont avancé aucun argument susceptible d’établir que les droits accordés à PP, tels que précisés aux considérants 51 à 56 de la décision litigieuse, ne relevaient pas de l’exception prévue expressément à l’article 8 de la directive postale et, partant, susceptible d’établir l’erreur constituée par la méconnaissance alléguée de cette directive.

126    À cet égard, dans le cadre de leur quatrième moyen, les requérantes font valoir, en substance, que les droits exclusifs et spéciaux accordés à PP étaient mentionnés dans la décision litigieuse et que leur existence ne constituait pas un élément litigieux, ce qui impliquait qu’il n’était pas nécessaire d’avancer des arguments susceptibles d’établir qu’ils ne relevaient pas de la catégorie des droits visés audit article 8 de la directive postale.

127    Or, d’une part, il convient de constater que, ce faisant, les requérantes, sans invoquer une quelconque dénaturation de leur argumentation devant le Tribunal, n’allèguent pas de violation des principes généraux du droit ni des règles de procédure applicables en matière de charge et d’administration de la preuve.

128    D’autre part, l’argument selon lequel les droits accordés à PP constituaient des droits exclusifs et spéciaux soumis à l’interdiction prévue à l’article 7, paragraphe 1, de la directive postale, et que, dès lors, ils ne relevaient pas de l’exception de l’article 8 de cette directive ne saurait prospérer.

129    En effet, selon la première phrase de l’article 7, paragraphe 1, de la directive postale, les États membres n’accordent pas ou ne maintiennent pas en vigueur de droits exclusifs ou spéciaux pour la mise en place et la prestation de services postaux. À cet égard, l’article 8 de cette directive constitue une exception aux dispositions de l’article 7 de ladite directive, en ce qu’il prévoit que ces dernières ne portent pas atteinte au droit des États membres d’organiser, conformément à leur législation nationale, le placement de boîtes aux lettres sur la voie publique, l’émission de timbres-poste et le service d’envois recommandés utilisé dans le cadre de procédures judiciaires ou administratives.

130    Il ressort ainsi de l’articulation entre les dispositions de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 8 de la directive postale que l’existence de droits exclusifs ou spéciaux, relevant, en principe, de l’interdiction visée audit article 7, paragraphe 1, n’implique pas nécessairement que de tels droits ne puissent pas appartenir aux différentes catégories de services, visés à l’article 8 de ladite directive et auxquels cette interdiction ne porte pas atteinte.

131    Par conséquent, il y a lieu de conclure au rejet du quatrième moyen.

132    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, dans la mesure où aucun moyen des pourvois n’a été accueilli, ces derniers doivent être rejetés.

 Sur les dépens

133    Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

134    L’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, prévoit que toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

135    Inpost Paczkomaty et Inpost ayant succombé en leurs moyens et la Commission ainsi que le gouvernement polonais ayant conclu à la condamnation de celles-ci aux dépens, il y a lieu de condamner ces sociétés aux dépens afférents aux présents pourvois.

Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) déclare et arrête :

1)      Les pourvois sont rejetés.

2)      Inpost Paczkomaty sp. z o.o. et Inpost S.A. sont condamnées aux dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : le polonais.

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