NRW. Bank v CRU (Economic and monetary union - Banking union - Single resolution mechanism for credit institutions and certain investment firms (SRMs) - Judgment) French Text [2024] EUECJ T-466/16RENV (21 February 2024)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2024/T46616RENV.html
Cite as: EU:T:2024:111, ECLI:EU:T:2024:111, [2024] EUECJ T-466/16RENV

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ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

21 février 2024 (*)

« Union économique et monétaire – Union bancaire – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement (MRU) – Fonds de résolution unique (FRU) – Décision du CRU sur le calcul des contributions ex ante pour 2016 – Obligation de motivation – Principe de non-rétroactivité – Article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué (UE) 2015/63 – Exclusion de certains passifs du calcul des contributions ex ante – Prêts de développement – Activités auxiliaires de développement – Exception d’illégalité »

Dans l’affaire T‑466/16 RENV,

NRW.Bank, établie à Düsseldorf (Allemagne), représentée par Mes J. Seitz et C. Marx, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de résolution unique (CRU), représenté par Mme H. Ehlers, M. J. Kerlin et Mme C. De Falco, en qualité d’agents, assistés de Mes B. Meyring, S. Schelo, T. Klupsch et S. Ianc, avocats,

partie défenderesse,

soutenu par

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme A. Sikora-Kalėda et M. J. Bauerschmidt, en qualité d’agents,

et par

Commission européenne, représentée par M. D. Triantafyllou, Mme A. Steiblytė et M. A. Nijenhuis, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie),

composé de MM. A. Kornezov, président, G. De Baere, D. Petrlík (rapporteur), K. Kecsmár et Mme S. Kingston, juges,

greffier : Mme S. Jund, administratrice,

vu l’arrêt du 14 octobre 2021, NRW.Bank/CRU (C‑662/19 P, EU:C:2021:846),

à la suite de l’audience du 9 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, NRW.Bank, demande l’annulation de la décision SRB/ES/2022/23 du Conseil de résolution unique (CRU), du 27 avril 2022, retirant la décision SRB/ES/SRF/2016/06 du CRU, du 15 avril 2016, sur les contributions ex ante pour 2016 au Fonds de résolution unique, dans la mesure où elle concerne NRW.Bank, et la décision SRB/ES/SRF/2016/13 du CRU, du 20 mai 2016, sur l’ajustement des contributions ex ante pour 2016 au Fonds de résolution unique, complétant la décision SRB/ES/SRF/2016/06, dans la mesure où elle concerne NRW.Bank, et calculant les contributions ex ante de NRW.Bank pour 2016 au Fonds de résolution unique (ci-après la « décision attaquée »).

I.      Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du présent recours

2        La requérante est la banque de développement du Land Nordrhein-Westfalen (Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Allemagne, ci-après le « Land »). Conformément au Gesetz über die NRW.BANK (loi relative à la NRW.Bank), du 16 mars 2004 (GV. NRW. 2004, p. 126, ci‑après la « loi relative à la NRW.Bank »), elle exerce une mission de service public consistant à assister le Land et ses collectivités locales dans le domaine des politiques structurelles, économiques, sociales et d’aménagement du territoire, en mettant en œuvre et en administrant à cet effet des mesures de soutien, notamment par l’octroi de prêts. La requérante exécute à ces fins des opérations bancaires et est titulaire d’un agrément bancaire.

3        Les activités de la requérante se divisent, pour l’essentiel, en deux catégories. En premier lieu, elle exerce des activités dites « de développement », dans le cadre desquelles elle accorde, notamment, des prêts bonifiés dans les domaines énoncés à l’article 3, paragraphe 2, de la loi relative à la NRW.Bank (ci-après les « activités de développement »).

4        En second lieu, la requérante réalise des activités qu’elle dénomme « activités auxiliaires de développement », qui sont en cause dans la présente affaire et sont prévues à l’article 3, paragraphe 5, de la loi relative à la NRW.Bank. Selon cette disposition, la requérante peut, afin d’accomplir ses missions, « effectuer des opérations et fournir des services directement liés à l’accomplissement de ses missions[, étant entendu que, à ce titre,] elle peut notamment effectuer des opérations de gestion de trésorerie et du risque, lever des capitaux de garantie subordonnés, négocier des titres participatifs, des obligations publiques et d’autres obligations ainsi qu’acquérir et céder des créances » (ci-après les « activités auxiliaires de développement »). Dans le cadre de ces activités, la requérante acquiert, en particulier, des fonds sur le marché des capitaux et les place à long terme sous forme d’obligations prenant majoritairement la forme de titres du secteur public.

5        Par sa décision SRB/ES/SRF/2016/06, du 15 avril 2016, sur les contributions ex ante pour 2016 au Fonds de résolution unique, le CRU a fixé, conformément à l’article 70, paragraphe 2, du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1), les contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) (ci-après les « contributions ex ante »), pour l’année 2016 (ci-après la « période de contribution 2016 »), des établissements relevant des dispositions combinées de l’article 2 et de l’article 67, paragraphe 4, de ce règlement (ci-après les « établissements »), dont la requérante.

6        Par sa décision SRB/ES/SRF/2016/13, du 20 mai 2016, sur l’ajustement des contributions ex ante pour 2016 au FRU, complétant la décision SRB/ES/SRF/2016/06, le CRU a majoré la contribution ex ante de la requérante à la suite d’une rectification du calcul des contributions ex ante de tous les établissements pour la période de contribution 2016.

7        Par avis de perception du 22 avril 2016 et du 10 juin 2016, la Bundesanstalt für Finanzmarktstabilisierung (FMSA, Autorité fédérale de stabilisation des marchés financiers, Allemagne), en sa qualité d’autorité de résolution nationale au sens de l’article 3, paragraphe 1, point 3, du règlement no 806/2014, a enjoint à la requérante d’acquitter sa contribution ex ante pour la période de contribution 2016, telle qu’elle avait été fixée par le CRU.

8        Le 27 avril 2022, le CRU a adopté la décision attaquée, par laquelle il a retiré et remplacé les décisions mentionnées aux points 5 et 6 ci-dessus (ci-après les « décisions initiales »). Selon les considérants 19 et 20 de la décision attaquée, celle-ci visait à remédier au défaut de motivation des décisions initiales que le CRU avait constaté à la suite des arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU (T‑377/16, T‑645/16 et T‑809/16, EU:T:2019:823), et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU (T‑365/16, EU:T:2019:824).

II.    Décision attaquée

9        La décision attaquée comprend un corps qui est accompagné de trois annexes.

10      Le corps de la décision attaquée décrit, dans les sections 3 à 9 et 11, le processus de détermination des contributions ex ante pour la période de contribution 2016, qui est applicable à tous les établissements.

11      Plus particulièrement, dans la section 6 de la décision attaquée, le CRU a déterminé le niveau cible annuel, mentionné à l’article 4 du règlement d’exécution (UE) 2015/81 du Conseil, du 19 décembre 2014, définissant des conditions uniformes d’application du règlement no 806/2014 en ce qui concerne les contributions ex ante au Fonds de résolution unique (JO 2015, L 15, p. 1), pour la période de contribution 2016 (ci-après le « niveau cible annuel »).

12      Le CRU a expliqué qu’il avait fixé ce niveau cible annuel à un huitième de 1,05 % du montant des dépôts couverts, calculé en fin d’année, de l’ensemble des établissements en 2015, tel qu’il avait été obtenu à partir des données communiquées par les établissements conformément à l’article 14, paragraphe 2, du règlement délégué (UE) 2015/63 de la Commission, du 21 octobre 2014, complétant la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contributions ex ante aux dispositifs de financement pour la résolution (JO 2015, L 11, p. 44).

13      Dans la section 7 de la décision attaquée, le CRU a décrit la méthode à suivre pour le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2016. À cet égard, il a précisé, au considérant 91 de ladite décision, que, pour cette période, 60 % des contributions ex ante avaient été calculées sur la « base nationale », c’est-à-dire sur la base des données communiquées par des établissements agréés sur le territoire de l’État membre participant concerné (ci-après la « base nationale »), conformément à l’article 103 de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190), et conformément à l’article 4 du règlement délégué 2015/63. Le reste des contributions ex ante (à savoir 40 %) a été calculé sur la « base de l’union bancaire », c’est-à-dire sur la base des données communiquées par l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participant au mécanisme de résolution unique (MRU) (ci-après la « base de l’union » et les « États membres participants »), conformément aux articles 69 et 70 du règlement no 806/2014 et à l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81.

14      Ensuite, le CRU a calculé les contributions ex ante des établissements, tels que la requérante, en suivant les phases principales suivantes.

15      Dans la première phase, le CRU a calculé, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous a), du règlement no 806/2014, la contribution annuelle de base de chaque établissement, qui est proportionnelle au montant du passif de l’établissement concerné, hors fonds propres et dépôts couverts, rapporté au total du passif, hors fonds propres et dépôts couverts, de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants. Conformément à l’article 5, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, le CRU a déduit certains types de passifs du passif total de l’établissement à prendre en compte pour la détermination de cette contribution.

16      Dans la seconde phase du calcul des contributions ex ante, le CRU a procédé à un ajustement de la contribution annuelle de base en fonction du profil de risque de l’établissement concerné, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous b), du règlement no 806/2014. Il a évalué ce profil de risque sur la base des quatre piliers de risque mentionnés à l’article 6 du règlement délégué 2015/63, qui sont composés d’indicateurs de risque. Afin de classer les établissements selon leur niveau de risque, tout d’abord, le CRU a établi – pour chaque indicateur de risque appliqué pour la période de contribution 2016 – des bins (paniers) dans lesquels ont été regroupés les établissements, conformément à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 3, de ce règlement délégué. Les établissements appartenant au même bin se sont vu attribuer une valeur commune pour l’indicateur de risque donné, dite « valeur discrétisée ». En combinant les valeurs discrétisées pour chaque indicateur de risque, le CRU a calculé le « multiplicateur d’ajustement en fonction du profil de risque » de l’établissement concerné (ci-après le « multiplicateur d’ajustement »). En multipliant la contribution annuelle de base de cet établissement par le multiplicateur d’ajustement de celui-ci, le CRU a obtenu la « contribution annuelle de base ajustée en fonction du profil de risque » dudit établissement.

17      Ensuite, le CRU a additionné toutes les contributions annuelles de base ajustées en fonction des profils de risque pour obtenir un « dénominateur commun » utilisé pour calculer la part du niveau cible annuel que chaque établissement devait verser.

18      Enfin, le CRU a calculé la contribution ex ante de chaque établissement en répartissant le niveau cible annuel entre tous les établissements sur la base du ratio existant entre la contribution annuelle de base ajustée en fonction du profil de risque, d’une part, et le dénominateur commun, d’autre part.

19      L’annexe I de la décision attaquée contient la fiche individuelle de la requérante, qui comporte les résultats du calcul de sa contribution ex ante (ci-après la « fiche individuelle »). Cette fiche expose le montant de la contribution annuelle de base de la requérante ainsi que la valeur de son multiplicateur d’ajustement, tant sur la base de l’union que sur la base nationale, en mentionnant, pour chaque indicateur de risque, le numéro du bin auquel la requérante a été assignée. En outre, la fiche individuelle expose des données qui sont utilisées pour le calcul des contributions ex ante de tous les établissements concernés et que le CRU a déterminées en additionnant ou en combinant les données individuelles de tous ces établissements. Enfin, cette fiche comporte les données déclarées par la requérante dans le formulaire de déclaration et utilisées dans le calcul de sa contribution ex ante.

20      L’annexe II de la décision attaquée comprend des données statistiques relatives au calcul des contributions ex ante pour chaque État membre participant, sous une forme résumée et agrégée. Cette annexe précise, notamment, le montant global des contributions ex ante à verser par les établissements concernés pour chacun de ces États membres. Par ailleurs, ladite annexe énumère, pour chaque indicateur de risque, le nombre de bins, le nombre d’établissements appartenant à chacun des bins ainsi que les valeurs minimales et maximales de ces bins. Dans le cas des bins relatifs à la base nationale, ces valeurs sont, pour des raisons de confidentialité, diminuées ou augmentées d’un montant aléatoire, la répartition originale des établissements étant maintenue.

21      L’annexe III de la décision attaquée, intitulée « Évaluation des commentaires [de la requérante] soumis dans le cadre de la consultation sur les contributions ex ante au Fonds de résolution unique pour 2016 », examine les observations présentées par la requérante lors de la procédure de consultation menée par le CRU préalablement à l’adoption de la décision attaquée.

22      En particulier, aux points 21 et 27 à 31 de l’annexe III de la décision attaquée, le CRU a exposé les motifs pour lesquels les passifs liés aux activités auxiliaires de développement n’ont pas été exclus, en application de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, du calcul de la contribution ex ante de la requérante.

III. Conclusions des parties

23      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, y compris ses annexes en ce que ces dernières la concernent ;

–        condamner le CRU aux dépens.

24      Le CRU conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, dans le cas où le Tribunal considérerait que la décision attaquée n’aurait pas dû être adoptée avec effet rétroactif, annuler cette décision uniquement dans cette mesure ou annuler uniquement son article 4 et la maintenir pour le reste ;

–        à titre encore plus subsidiaire, en cas d’annulation de la décision attaquée dans son intégralité, maintenir les effets de ladite décision jusqu’à son remplacement ou, à tout le moins, pendant une période de six mois à compter de la date à laquelle le jugement sera définitif.

25      Le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

IV.    En droit

26      Dans la requête, la requérante a invoqué, en substance, deux moyens. Par le premier moyen, elle a soulevé une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 et du règlement d’exécution 2015/81. À cet égard, elle a soutenu que, dans l’hypothèse où ces dispositions ne permettraient pas d’exclure les passifs liés aux activités auxiliaires de développement du calcul de sa contribution ex ante, elles violeraient l’article 103, paragraphes 2 et 7, de la directive 2014/59 et l’article 70, paragraphes 2 et 7, du règlement no 806/2014. Par le second moyen, la requérante a considéré que, en n’excluant pas du calcul de ladite contribution les passifs liés auxdites activités, le CRU avait interprété l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 de manière erronée.

27      Dans le mémoire en adaptation, déposé au greffe du Tribunal le 11 juillet 2022 au titre de l’article 86 du règlement de procédure du Tribunal, la requérante indique qu’elle maintient l’intégralité de son argumentation exposée dans la requête, tout en précisant qu’elle soulève de nouveaux moyens en réaction au remplacement des décisions initiales par la décision attaquée.

28      Ainsi, la requérante soulève au total onze moyens, tirés :

–        le premier et le septième, d’une violation de l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), en ce que le CRU aurait omis de l’entendre de façon régulière sur le remplacement, avec effet rétroactif, des décisions initiales par la décision attaquée ainsi que sur l’adoption de cette dernière décision elle-même ;

–        le deuxième, d’une violation des normes de rang supérieur, en ce qu’il n’existerait pas de base juridique pour le remplacement, avec effet rétroactif, des décisions initiales par la décision attaquée ;

–        le troisième, d’une violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et de l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte, en ce que la décision attaquée ne mentionnerait aucune base juridique qui fonderait le remplacement des décisions initiales avec effet rétroactif ;

–        le quatrième, d’une violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, en ce que la décision attaquée ne serait pas suffisamment motivée en ce qui concerne le calcul de sa contribution ex ante ;

–        le cinquième, d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective consacré à l’article 47, paragraphe 1, de la Charte, en ce que la décision attaquée ne serait pas suffisamment motivée ;

–        le sixième, d’une violation par la décision attaquée des exigences générales de procédure résultant de l’article 41 de la Charte, de l’article 298 TFUE, des principes généraux du droit ainsi que du règlement intérieur du CRU ;

–        le huitième, d’une violation de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, de l’article 103, paragraphes 2 et 7, de la directive 2014/59, de l’article 70, paragraphes 2 et 7, du règlement no 806/2014, du principe d’égalité de traitement, de la volonté du législateur de l’Union de privilégier intégralement les banques de développement et de l’objectif d’allègement des budgets publics, en ce que le CRU n’aurait pas exclu les passifs liés à ses activités auxiliaires de développement du calcul de sa contribution ex ante ;

–        le neuvième, à titre subsidiaire, d’une illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 et du règlement d’exécution 2015/81, en ce qu’ils seraient contraires aux normes de droit supérieur ;

–        le dixième, d’une illégalité de l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), et de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63, en ce que ces dispositions seraient contraires aux normes de droit supérieur ;

–        le onzième, d’une violation des principes généraux du droit, en ce que le CRU ne se serait pas fondé, à tort, sur les éléments de droit en vigueur existant à la date de l’adoption de la décision attaquée.

29      Il convient d’examiner d’abord les moyens par lesquels la requérante excipe de l’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), de l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), ainsi que de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63, puis les moyens portant directement sur la légalité de la décision attaquée.

A.      Sur les exceptions d’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), de l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), ainsi que de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63

1.      Sur le neuvième moyen, tiré de l’exception d’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63

a)      Observations liminaires

30      En premier lieu, il y lieu de relever que, si, dans la requête, la requérante conteste la validité tant de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 que du règlement d’exécution 2015/81 dans son ensemble, ses arguments ne visent, en substance, que la première disposition. Cela est confirmé par la réponse de la requérante du 13 juin 2022 à la mesure d’organisation de la procédure du 20 mai 2022, dans laquelle elle a indiqué que l’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 entraînerait également l’illégalité de l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, en ce que cette dernière disposition renvoie à la méthode de calcul exposée dans le règlement délégué 2015/63.

31      Dans ces conditions, il y a lieu d’apprécier d’abord la validité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63.

32      En deuxième lieu, il convient d’examiner l’argument du CRU selon lequel le neuvième moyen n’est recevable que dans la mesure où il a été soulevé dans la requête, étant entendu que, selon le CRU, la requête ne contient qu’un exposé succinct et hypothétique des arguments au soutien de ce moyen. Ainsi, le CRU considère, en substance, que le Tribunal ne peut prendre en compte les considérations supplémentaires qui ont été présentées à l’appui de ce moyen dans le mémoire en adaptation, puisque ces considérations seraient substantielles et ne seraient pas « justifiées », au sens de l’article 86 du règlement de procédure, par l’adoption de la décision attaquée.

33      Aux termes de l’article 86, paragraphe 1, du règlement de procédure, lorsqu’un acte, dont l’annulation est demandée, est remplacé ou modifié par un autre acte ayant le même objet, la partie requérante peut, avant la clôture de la phase orale de la procédure ou avant la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure, adapter la requête pour tenir compte de cet élément nouveau.

34      En l’espèce, d’une part, il y a lieu d’observer que les considérations présentées dans le mémoire en adaptation à l’appui du neuvième moyen se fondent sur des motifs d’illégalité et des arguments qui ont été soulevés dans la requête et qui sont relatifs tant à la portée de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 qu’à toutes les branches du neuvième moyen, telles qu’elles sont examinées ci-après.

35      D’autre part, en ce qui concerne la portée de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, la décision attaquée contient un nouvel exposé des motifs pour lesquels le CRU a considéré que cette disposition ne permettait pas d’exclure les passifs liés aux activités auxiliaires de développement de la requérante du calcul de sa contribution ex ante, tandis que les décisions initiales ne contenaient aucune motivation explicite sur ce point.

36      Dans ces circonstances, l’objection du CRU ne peut qu’être rejetée.

37      En troisième lieu, il convient de relever que, après la tenue de l’audience du 9 mars 2023, la requérante a demandé au Tribunal d’adopter une mesure d’organisation de la procédure afin de permettre aux parties de prendre position par écrit sur la séparabilité des activités de développement et des activités auxiliaires de développement. Elle a affirmé à cet égard que, lors de l’audience, le CRU avait soutenu, pour la première fois, qu’une distinction nette entre les deux types d’activités qu’elle exerçait n’était pas possible. Par décision du 16 mai 2023, le président de la huitième chambre élargie du Tribunal a refusé cette demande au motif que la requérante avait eu la possibilité de prendre position sur les arguments du CRU présentés à l’audience lors de sa réplique finale.

38      En quatrième lieu, la requérante n’a soulevé une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 qu’à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où le Tribunal aurait considéré que cette disposition ne permettait pas d’exclure les passifs liés à ses activités auxiliaires de développement du calcul de sa contribution ex ante.

39      Il convient donc d’examiner, dans un premier temps, si l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 permet d’exclure les passifs liés aux activités auxiliaires de développement du calcul de la contribution ex ante de la requérante et, si tel n’est pas le cas, il convient d’apprécier, dans un second temps, si cette disposition est conforme à l’article 103, paragraphes 2 et 7, de la directive 2014/59 et à l’article 70, paragraphes 2 et 7, du règlement no 806/2014.

b)      Sur la portée de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63

40      Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, sont exclus du calcul des contributions ex ante, « dans le cas des établissements qui gèrent des prêts de développement, les passifs de l’établissement intermédiaire envers la banque initiatrice, une autre banque de développement ou un autre établissement intermédiaire, et les passifs de la banque de développement initiatrice envers ses bailleurs de fonds, dans la mesure où le montant des prêts de développement gérés par cet établissement ou cette banque couvre le montant de ces passifs ».

41      Selon l’article 3, point 28, du règlement délégué 2015/63, on entend par « prêt de développement » « un prêt octroyé par une banque de développement ou un établissement intermédiaire sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif en vue de promouvoir les objectifs de politique publique d’une administration centrale ou régionale d’un État membre ».

42      La  requérante fait valoir que ces dispositions doivent être interprétées en ce sens qu’elles permettent d’exclure du calcul de sa contribution ex ante les passifs liés aux activités auxiliaires de développement, telles que celles décrites au point 4 ci-dessus.

43      Le CRU, soutenu par la Commission et le Conseil, conteste cette argumentation.

44      Il ressort de la jurisprudence que l’article 5, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 ne confère pas de pouvoir discrétionnaire au CRU pour exclure certains passifs au titre de l’adaptation en fonction du risque des contributions ex ante, mais énumère, au contraire, de manière précise les conditions dans lesquelles un passif fait l’objet d’une telle exclusion (voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2019, Iccrea Banca, C‑414/18, EU:C:2019:1036, point 93). Selon cette même jurisprudence, la prise en compte des principes d’égalité de traitement, de non-discrimination et de proportionnalité ne saurait justifier un autre résultat, dès lors que le règlement délégué 2015/63 a distingué des situations présentant des particularités notables, directement liées aux risques présentés par les passifs en cause (arrêt du 3 décembre 2019, Iccrea Banca, C‑414/18, EU:C:2019:1036, point 95).

45      Dans ce contexte, il convient de relever que l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 prévoit trois conditions pour l’exclusion des passifs concernés du calcul des contributions ex ante, étant entendu que ces conditions présentent un caractère cumulatif, de sorte que le non-respect de l’une d’entre elles fait obstacle à l’exclusion des passifs concernés dudit calcul.

46      Premièrement, afin de pouvoir être exclus du calcul des contributions ex ante, les passifs doivent être détenus par un établissement qui gère des prêts de développement.

47      Deuxièmement, ces passifs doivent constituer des « passifs de l’établissement intermédiaire envers la banque initiatrice, une autre banque de développement ou un autre établissement intermédiaire » ou des « passifs de la banque de développement initiatrice envers ses bailleurs de fonds ».

48      Troisièmement, les passifs en cause ne peuvent être exclus du calcul des passifs servant à déterminer la contribution ex ante que « dans la mesure où le montant des prêts de développement gérés par cet établissement ou cette banque couvre le montant de ces passifs ».

49      En l’espèce, les parties s’opposent sur la question de savoir si les passifs liés aux activités auxiliaires de développement, telles que celles mentionnées au point 4 ci-dessus, remplissent la troisième condition visée au point 48 ci-dessus, à savoir celle selon laquelle le montant de ces passifs doit être couvert par le montant des prêts de développement gérés par la banque de développement concernée.

50      À cet égard, il ressort tout d’abord du libellé de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, évoqué au point 48 ci-dessus, notamment de l’utilisation des termes « dans la mesure où », que les passifs en cause ne peuvent être exclus du calcul de la contribution ex ante de l’établissement concerné qu’à concurrence du montant des prêts de développement gérés par cet établissement, tels que définis à l’article 3, point 28, du règlement délégué 2015/63.

51      Ainsi, contrairement à ce que semble suggérer la requérante, cette disposition ne permet pas d’exclure du calcul de la contribution ex ante tous les passifs d’une banque de développement qui sont liés, d’une manière ou d’une autre, à l’accomplissement de sa mission de développement, mais seulement les passifs dont le montant correspond exactement au montant des prêts de développement gérés par une telle banque.

52      Par ailleurs, s’agissant de la question de savoir si les activités auxiliaires de développement, telles que celles décrites au point 4 ci-dessus, peuvent relever de la notion de « prêt de développement », au sens de l’article 3, point 28, du règlement délégué 2015/63, il ressort des précisions fournies par la requérante dans son mémoire en adaptation et lors de l’audience que les activités qui sont pertinentes aux fins de la présente exception d’illégalité consistent, notamment, en l’acquisition de titres de créance sur le marché des capitaux.

53      À cet égard, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si de telles opérations peuvent être qualifiées de « prêts », il découle du libellé de l’article 3, point 28, de ce règlement délégué, tel que cela est rappelé au point 41 ci-dessus, que, pour constituer des prêts de développement, ces opérations doivent remplir, en tout état de cause, la condition selon laquelle elles doivent être effectuées « sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif ».

54      En effet, contrairement à ce que soutient la requérante, cette condition doit être remplie non seulement dans le cas d’un prêt octroyé par un établissement intermédiaire, mais également dans le cas d’un prêt octroyé par une banque de développement. Cette conclusion n’est pas infirmée par les versions anglaise et française de l’article 3, point 28, du règlement délégué 2015/63, sur lesquelles la requérante s’est appuyée. À cet égard, il ressort du libellé de ces deux versions linguistiques – tout comme des autres versions linguistiques, dont, notamment, les versions espagnole, italienne ou polonaise – que la condition résultant de l’emploi de l’expression « sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif » est liée à l’emploi du terme « octroyé », de sorte qu’elle se rapporte tant à l’expression « une banque de développement » qu’à l’expression « un établissement intermédiaire ». Sur ce point, le seul fait que ladite condition suit immédiatement ces derniers termes ne signifie pas qu’elle concerne uniquement les prêts de développement accordés par les établissements intermédiaires.

55      Cette interprétation est corroborée, en outre, par la version allemande de l’article 3, point 28, du règlement délégué 2015/63. En effet, dans cette version, la condition résultant de l’emploi de l’expression « sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif » précède la notion de « prêt » et est ainsi indifféremment applicable aux deux hypothèses concernées, c’est-à-dire tant à l’octroi de prêts de développement par un établissement intermédiaire qu’à l’octroi de prêts de développement par une banque de développement.

56      La conclusion énoncée au point 54 ci-dessus est également confirmée par la première phrase du considérant 13 du règlement délégué 2015/63, qui mentionne explicitement la condition résultant de l’emploi de l’expression « sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif » dans le contexte des prêts octroyés directement par une banque de développement.

57      De même, ladite condition fait partie intégrante de l’article 3, point 27, du règlement délégué 2015/63, qui définit la notion de « banque de développement » comme renvoyant à toute entreprise ou entité créée par une administration centrale ou régionale d’un État membre, qui octroie des prêts de développement « sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif ».

58      Il s’ensuit que, pour qu’une opération puisse être considérée comme un prêt de développement aux fins de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, la condition résultant de l’emploi de l’expression « sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif » doit être remplie non seulement dans le cas d’un établissement intermédiaire, mais également dans celui d’une banque de développement.

59      Or, en ce qui concerne les activités auxiliaires de développement qui consistent en l’acquisition de titres de créance sur le marché des capitaux, telles que celles évoquées au point 52 ci-dessus, rien n’indique que de telles opérations d’acquisition remplissent la condition énoncée au point 58 ci-dessus.

60      En effet, d’une part, il n’est pas contesté que de telles opérations sont réalisées sur le marché des capitaux ouvert sur lequel opèrent d’autres acteurs, qui effectuent les mêmes types d’opérations et peuvent acquérir les mêmes titres de créance que les banques de développement, et ce dans les mêmes conditions de marché que ces dernières. Or, sur un tel marché, les banques de développement sont, par définition, en concurrence directe avec ces autres acteurs du marché, de sorte que l’activité concernée ne saurait être considérée comme étant exercée sur une base non concurrentielle.

61      D’autre part, la requérante admet elle-même que les activités consistant en l’acquisition de titres de créance sur le marché des capitaux visent à générer, et génèrent, des revenus, en ce qu’elles consistent à produire des marges d’intérêts afin de financer l’activité bancaire en tant que telle des banques de développement, telles que la requérante. Dès lors, ces activités ne peuvent être considérées comme étant exercées dans un but non lucratif.

62      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel l’« objectif ultime » desdites activités ne consiste pas à réaliser un bénéfice en raison de l’interdiction qui lui est faite de distribuer des dividendes. En effet, le caractère non lucratif d’une activité, aux fins de l’application de l’article 3, point 28, du règlement délégué 2015/63, s’apprécie au regard de la nature de chaque activité concernée, sans qu’il soit pertinent que les bénéfices générés par cette activité soient ou non ultérieurement utilisés pour financer les activités de développement, qui sont quant à elles exercées dans un but non lucratif. Toute autre interprétation reviendrait à considérer que les activités concernées présentent un caractère non lucratif au seul motif qu’elles sont exercées par une banque de développement, ce qui viderait de son contenu la condition résultant de l’emploi de l’expression « sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif », prévue à l’article 3, point 28, du règlement délégué 2015/63.

63      Eu égard à ce qui précède, l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, lu conjointement avec l’article 3, points 27 et 28, de ce même règlement délégué, doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas d’exclure les passifs liés aux activités auxiliaires de développement des banques de développement, telles que la requérante, du calcul de leur contribution ex ante.

c)      Sur la légalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63

64      Dans l’hypothèse où l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 devrait être interprété en ce sens qu’il ne permet pas d’exclure les passifs liés à ses activités auxiliaires de développement du calcul de sa contribution ex ante, la requérante soulève une exception d’illégalité à l’encontre de cette disposition en soutenant qu’elle est incompatible avec l’article 103, paragraphes 2 et 7, de la directive 2014/59 et l’article 70, paragraphes 2 et 7, du règlement no 860/2014.

65      À titre liminaire, d’une part, il y a lieu de préciser que la requérante développe son argumentation essentiellement au regard de l’article 103, paragraphes 2 et 7, de la directive 2014/59 et qu’elle n’invoque une violation de l’article 70, paragraphes 2 et 7, du règlement no 860/2014 qu’en raison du renvoi opéré par le règlement d’exécution 2015/81 à la méthode de calcul exposée dans le règlement délégué 2015/63.

66      D’autre part, il ressort de la requête que la requérante excipe de l’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 en formulant, en réalité, trois branches, tirées, la première, de la méconnaissance des travaux préparatoires de la directive 2014/59, la deuxième, de la violation de l’objectif d’allègement des budgets publics et, la troisième, de la méconnaissance du principe d’alignement des contributions ex ante sur le profil de risque et du principe d’égalité de traitement.

1)      Sur la première branche, tirée de la méconnaissance des travaux préparatoires de la directive 2014/59

67      La requérante soutient que, en n’excluant pas l’ensemble des passifs liés aux activités des banques de développement concernées, qui bénéficient d’une garantie publique, du calcul de leur contribution ex ante, y compris, donc, ceux liés à leurs activités auxiliaires de développement, l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 n’est pas conforme aux travaux préparatoires de la directive 2014/59. En effet, le Parlement aurait proposé, pendant le processus législatif, de prendre en compte l’importance particulière de ces banques ainsi que leur mission de service public lors de la détermination des contributions ex ante, en n’intégrant pas de tels passifs dans le calcul de ces contributions. Le fait que l’amendement du Parlement concernant une telle exclusion n’a pas été repris dans le texte final de cette directive ne serait pas dû à un désaccord de fond, mais à un malentendu. Ainsi, ladite exclusion était déjà envisagée lors de l’adoption de ladite directive et aurait dû être prise en considération au moment de l’adoption du règlement délégué 2015/63.

68      Le CRU,  le Conseil et la Commission contestent cette argumentation.

69      À cet égard, il y a lieu de rappeler que les contributions ex ante sont imposées et calculées sur le fondement de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014.

70      Il ressort de cette disposition que doivent contribuer au FRU les « établissements » au sens de l’article 3, paragraphe 1, point 13, du règlement no 806/2014.

71      Il découle de l’article 3, paragraphe 1, point 13, du règlement no 806/2014, lu conjointement avec l’article 3, paragraphe 2, de ce même règlement et l’article 2, paragraphe 1, point 2, de la directive 2014/59, que font partie de ces établissements, notamment, les établissements de crédit au sens de l’article 4, paragraphe 1, point 1, du règlement (UE) no 575/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO 2013, L 176, p. 1), qui ne figurent pas parmi les entités visées à l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO 2013, L 176, p. 338).

72      Au regard de ces dispositions, les banques de développement régionales de la République fédérale d’Allemagne qui constituent des établissements de crédit au sens de l’article 4, paragraphe 1, point 1, du règlement no 575/2013 (ci-après les « banques de développement régionales »), telles que la requérante, n’étaient pas soustraites au régime général de versement des contributions ex ante, étant donné qu’elles ne figuraient pas parmi les entités exclues du champ d’application du règlement no 806/2014 au titre de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2013/36, dans sa version applicable à la période de contribution 2016.

73      En effet, d’une part, à la différence de la Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW), qui est la banque de développement nationale de la République fédérale d’Allemagne, les banques de développement régionales, telles que la requérante, ne figuraient pas à l’article 2, paragraphe 5, point 6, de la directive 2013/36 dans sa version applicable avant sa modification par la directive 2019/878 du Parlement européen et du Conseil, du 20 mai 2019 (JO 2019, L 150, p. 253).

74      D’autre part, s’il ressort des travaux préparatoires de la directive 2014/59 que, pendant le processus législatif, le Parlement a proposé, en substance, une exclusion intégrale du passif des banques de développement du calcul des contributions ex ante, la version finale de ladite directive n’a pas retenu de telle proposition.

75      Or, contrairement à ce que soutient la requérante, le fait que cette proposition n’a pas été retenue ne peut être considéré comme un « malentendu » survenu lors du processus législatif. En effet, outre le fait que cette allégation n’est pas étayée, elle ne saurait être retenue au motif que le rejet d’une proposition d’amendements constitue un indice de l’interprétation a contrario de la disposition en question, dans la mesure où le législateur a expressément et délibérément décidé d’écarter l’amendement en question (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 1996, RTI e.a., C‑320/94, C‑328/94, C‑329/94 et C‑337/94 à C‑339/94, EU:C:1996:486, point 44).

76      Il découle de ce qui précède que ni le règlement no 806/2014 ni la directive 2014/59 ne dispensent, de manière générale, les banques de développement régionales de l’obligation de verser des contributions ex ante – malgré le fait qu’elles bénéficient d’une garantie publique – et que ce règlement et cette directive n’excluent ainsi pas l’ensemble des passifs liés aux activités de ces banques du calcul de leur contribution ex ante.

77      De même, aucun de ces actes ne prévoit de possibilité, pour la Commission, d’exclure certains établissements, tels que les banques de développement régionales, du champ d’application personnel de l’obligation de versement des contributions ex ante.

78      Partant, il convient d’écarter la première branche du neuvième moyen.

2)      Sur la deuxième branche, tirée de la violation de l’objectif d’allègement des budgets publics

79      La requérante estime que le refus d’exclure du calcul de la contribution ex ante des banques de développement régionales les passifs liés à leurs activités auxiliaires de développement, ainsi qu’il résulte du règlement délégué 2015/63, méconnaît la volonté du législateur de l’Union et l’objectif d’allègement des budgets publics fixé par la directive 2014/59. Ainsi, il existerait une double pression sur les budgets publics dans la mesure où la somme à acquitter sous forme de contributions ex ante serait prélevée sur les banques de développement régionales, telles que la requérante, mais aussi indirectement sur les autorités publiques qui détiennent de telles banques et, par conséquent, sur les budgets publics.

80      Le CRU et la Commission contestent l’argumentation de la requérante.

81      À titre liminaire, il convient de rappeler que, ainsi qu’il découle des points 69 à 77 ci-dessus, ni le règlement no 806/2014 ni la directive 2014/59 ne dispensent, pour la période de contribution 2016, les banques de développement régionales de l’obligation de verser des contributions ex ante, et ce malgré le fait qu’elles bénéficient d’une garantie publique.

82      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’objectif d’allègement des budgets publics visé par la directive 2014/59 sur lequel s’appuie la requérante dans le cadre de la présente branche.

83      Il est vrai que, ainsi que cela ressort du considérant 109 de la directive 2014/59, celle-ci vise à atteindre l’objectif selon lequel l’essentiel du financement des procédures de résolution des établissements concernés devrait provenir des actionnaires et des créanciers des établissements soumis à de telles procédures, puis des entités du secteur, et non des budgets publics.

84      Cependant, dans la mesure où une autorité publique est actionnaire, créancière ou garante d’un tel établissement, il n’est pas incompatible avec l’objectif mentionné au point 83 ci-dessus qu’elle participe, en cette qualité, au financement du FRU et qu’elle contribue ainsi à assurer la solidité du système de dispositifs de financement pour la résolution de l’Union.

85      Dès lors, ledit objectif n’est pas susceptible de remettre en cause la constatation énoncée au point 76 ci-dessus.

86      Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter la deuxième branche du neuvième moyen.

3)      Sur la troisième branche, tirée de la méconnaissance du principe d’alignement des contributions ex ante sur le profil de risque et du principe d’égalité de traitement

87      En premier lieu, la requérante estime que, en ce qu’il n’exclut pas du calcul de la contribution ex ante des banques de développement régionales les passifs liés à leurs activités auxiliaires de développement, l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 viole l’article 103, paragraphes 2 et 7, de la directive 2014/59, qui exige que le montant de la contribution ex ante soit aligné sur le profil de risque des établissements.

88      La requérante considère que, compte tenu de la logique inhérente aux dispositifs de financement pour la résolution, consacrée au considérant 103 de la directive 2014/59, la probabilité que l’établissement soit soumis à une procédure de résolution pourrait revêtir, dans un cas spécifique, une importance prépondérante par rapport aux autres paramètres permettant l’alignement des contributions ex ante sur le profil de risque, tels qu’ils sont énumérés à l’article 103, paragraphe 7, de cette directive. Ainsi, le règlement délégué 2015/63, qui est fondé, en ce qu’il prévoit la méthode d’ajustement des contributions ex ante au profil de risque des établissements, sur cet article 103, paragraphe 7, ne serait légal que dans la mesure où il intègre suffisamment, dans les modalités de calcul des contributions ex ante, la probabilité que les établissements concernés soient soumis à une procédure de résolution.

89      Or, du point de vue de cette probabilité, il n’existerait pas de différence entre les passifs liés aux activités de développement et ceux liés aux activités auxiliaires de développement. D’une part, le Land assurerait, en sa qualité de garant de la requérante, la couverture complète de ces deux catégories de passifs. D’autre part, du fait de la garantie du Land, une défaillance de la requérante serait pratiquement exclue, ce qui signifierait qu’elle n’aurait aucun besoin de recourir aux instruments de résolution.

90      À titre liminaire, il convient de souligner que, dans le contexte d’un pouvoir délégué au sens de l’article 290 TFUE, la Commission dispose, dans le cadre de l’exercice des compétences qui lui sont conférées, d’un large pouvoir d’appréciation lorsqu’elle est appelée, notamment, à effectuer des appréciations et des évaluations complexes (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2017, Dyson/Commission, C‑44/16 P, EU:C:2017:357, point 53 et jurisprudence citée).

91      Tel est le cas en ce qui concerne la fixation des critères d’adaptation des contributions ex ante au profil de risque en vertu de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59.

92      À cet égard, il convient de rappeler que la nature spécifique de ces contributions consiste, ainsi qu’il ressort des considérants 105 à 107 de la directive 2014/59 et du considérant 41 du règlement no 806/2014, à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour que ce dernier puisse remplir ses fonctions, tout en encourageant l’adoption, par les établissements concernés, de modes de fonctionnement moins risqués (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

93      Dans ce contexte, et ainsi qu’il ressort du considérant 114 de la directive 2014/59, le législateur de l’Union a chargé la Commission de préciser, par acte délégué, la façon d’ajuster les contributions des établissements aux dispositifs de financement pour la résolution en proportion de leur profil de risque.

94      Dans cette même optique, le considérant 107 de cette directive précise que, pour assurer un calcul équitable des contributions ex ante aux dispositifs de financement nationaux et encourager l’adoption de modes de fonctionnement moins risqués, il convient que ces contributions soient fonction du risque de crédit, de liquidité et de marché encouru par les établissements.

95      Il découle de ce qui précède que la Commission devait élaborer des règles d’ajustement des contributions ex ante en fonction du profil de risque des établissements en poursuivant deux objectifs liés, à savoir, d’une part, assurer la prise en compte des différents risques que génèrent les activités des établissements, bancaires ou plus largement financières, et, d’autre part, encourager ces mêmes établissements à suivre des modes de fonctionnement moins risqués.

96      Or, ainsi qu’il ressort des documents afférents à l’adoption du règlement délégué 2015/63, notamment les documents « JRC technical work supporting Commission second level legislation on risk based contributions to the (single) resolution fund » [Étude technique du JRC au soutien de la législation de deuxième niveau de la Commission sur les contributions fondées sur les risques au fonds de résolution (unique)], et « Commission Staff Working Document : estimates of the application of the proposed methodology for the calculation of contributions to resolution financing arrangements » (Document de travail des services de la Commission : estimations de l’application de la méthode proposée pour le calcul des contributions aux dispositifs de financement des résolutions), l’élaboration de telles règles impliquait des appréciations et des évaluations complexes de la part de la Commission dans la mesure où celle-ci devait examiner les différents éléments compte tenu desquels les divers types de risque étaient appréhendés dans le secteur bancaire et financier.

97      Eu égard à ce qui précède, la Commission disposait d’un large pouvoir d’appréciation aux fins d’adopter, en vertu de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, les règles précisant la notion d’adaptation des contributions ex ante en fonction du profil de risque.

98      Dans ces conditions, s’agissant de la méthode d’adaptation des contributions annuelles de base au titre de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, le contrôle du juge de l’Union doit se limiter à examiner si l’exercice du pouvoir d’appréciation octroyé à la Commission n’est pas entaché d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir ou encore si celle-ci n’a pas manifestement dépassé les limites de ce pouvoir (voir, en ce sens, arrêt du 21 juillet 2011, Etimine, C‑15/10, EU:C:2011:504, point 60).

99      Par conséquent, il appartient à la requérante de démontrer que l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 est entaché de tels vices en ce qu’il n’exclut pas les passifs liés aux activités auxiliaires de développement des banques de développement régionales du calcul de la contribution ex ante.

100    À cet égard, il convient tout d’abord de rappeler que, pour la période de contribution 2016, ni le règlement no 806/2014 ni la directive 2014/59 n’excluaient, de manière générale, les banques de développement régionales de l’obligation de verser des contributions ex ante, et ce malgré le fait qu’elles bénéficient d’une garantie publique et indépendamment de la probabilité de leur résolution (voir points 69 à 77 ci-dessus).

101    De même, ni la directive 2014/59 ni le règlement no 806/2014 n’obligent la Commission à exclure certains des passifs de tels établissements du calcul des contributions ex ante.

102    Ainsi, conformément à l’article 70, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 et à l’article 103, paragraphe 2, de la directive 2014/59, tous les passifs desdits établissements, hors fonds propres et dépôts couverts, sont à prendre en compte, en principe, aux fins du calcul de ces contributions, sous réserve de l’adaptation desdites contributions en fonction du risque des établissements.

103    Une telle approche correspond à la logique d’ordre assurantiel du système des contributions ex ante, dans laquelle l’ensemble du secteur financier doit procurer des ressources financières suffisantes au MRU pour qu’il puisse remplir ses fonctions (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113). En effet, conformément à cette logique, tous les établissements, y compris ceux dont la probabilité de résolution est plus faible, bénéficient de leurs contributions ex ante au travers de la stabilité du système financier tel qu’elle est assurée par le FRU.

104    Dans ces conditions, la requérante ne saurait soutenir que la Commission était tenue d’exclure certains des passifs des banques de développement régionales, tels que les passifs liés aux activités auxiliaires de développement, du calcul de leur contribution ex ante au seul motif que ces banques avaient une probabilité de résolution plus faible.

105    Il en va d’autant plus ainsi que la requérante n’a pas contesté qu’il n’était pas exclu, sur le plan juridique, qu’une banque de développement régionale puisse, malgré le fait qu’elle bénéficie de garanties publiques, faire l’objet d’une résolution et, partant, puisse avoir recours au FRU.

106    Par ailleurs, conformément à l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, la contribution ex ante n’est pas calculée sur la base des seuls passifs des établissements concernés, mais cette contribution est ajustée, par la suite, en fonction de leur profil de risque. Ainsi, en vertu de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, la Commission est habilitée à préciser, par un acte délégué, les modalités de cette adaptation des contributions ex ante en fonction du profil de risque desdits établissements.

107    À cet égard, l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 prévoit huit éléments que la Commission doit prendre en compte aux fins d’une telle adaptation. Or, bien que « la probabilité que l’établissement soit soumis à une procédure de résolution » et « l’exposition au risque de l’établissement » figurent parmi ces éléments, de sorte que la Commission est tenue de les prendre en compte lors de l’adoption d’un acte délégué tel que le règlement délégué 2015/63, ces éléments ne constituent que deux des huit éléments dont la Commission doit tenir compte dans l’élaboration d’un tel acte.

108    En outre, rien dans l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 n’indique que la Commission est tenue d’accorder une importance prépondérante à un ou à plusieurs desdits éléments, tels que la probabilité que l’établissement soit soumis à une procédure de résolution.

109    Cette conclusion est confirmée par le contexte dans lequel s’insère l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59.

110    D’une part, il ressort du considérant 105 de cette directive que les contributions ex ante sont collectées auprès des acteurs du secteur financier préalablement à toute opération de résolution et indépendamment de celle-ci. D’autre part, les instruments de résolution ne peuvent s’appliquer qu’aux entités dont la défaillance est avérée ou prévisible et uniquement lorsqu’ils sont nécessaires pour atteindre l’objectif de stabilité financière dans l’intérêt public. La réglementation n’établit ainsi aucun lien automatique entre le versement de la contribution ex ante de l’établissement concerné et la résolution de ce dernier, dès lors que c’est uniquement la préservation de l’intérêt public, et non l’intérêt individuel dudit établissement, qui est le facteur décisif pour l’utilisation du FRU (arrêt du 20 janvier 2021, ABLV Bank/CRU, T‑758/18, EU:T:2021:28, point 70). Il en résulte que la probabilité de résolution d’un établissement n’est pas le seul élément qui doit être pris en compte lors du calcul de sa contribution ex ante.

111    Il en va d’autant plus ainsi que l’exclusion des passifs liés aux activités de développement du calcul des contributions ex ante, prévue par l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, n’est pas justifiée par le fait que les banques de développement, qui détiennent ces passifs, auraient une moindre probabilité de résolution. En effet, ainsi que cela découle du considérant 13 de ce règlement délégué, l’exclusion desdits passifs repose sur le fait que les prêts de développement poursuivent un objectif de politique publique, qu’ils sont octroyés sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif et qu’ils sont partiellement garantis, directement ou indirectement, par l’administration centrale ou régionale ou par l’autorité locale d’un État membre. Ainsi, cette exclusion repose sur les caractéristiques propres à une certaine catégorie d’activités, plutôt que sur le profil de risque global des banques de développement qui effectuent ces activités, étant entendu que de telles banques ne présentent pas nécessairement le même profil de risque au seul motif qu’elles effectuent, parmi d’autres activités, des activités de développement.

112    Eu égard à ce qui précède, la requérante n’a pas démontré que l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 était entaché d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir ou qu’il avait manifestement dépassé les limites du pouvoir d’appréciation de la Commission du fait qu’il n’excluait pas les passifs liés aux activités auxiliaires de développement des banques de développement régionales du calcul de leur contribution ex ante.

113    En deuxième lieu, la requérante fait valoir que l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 viole le principe d’égalité de traitement, alors que l’article 103 de la directive 2014/59 exige une égalité de traitement entre les banques présentant le même profil de risque.

114    Premièrement, l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 instaurerait une différence de traitement injustifiée entre les passifs liés aux activités auxiliaires de développement et les passifs liés aux activités de développement. À cet égard, il ressortirait du considérant 13 de ce règlement délégué que le régime privilégié des passifs des banques de développement affectés au refinancement de certains prêts est motivé par le fait que ces prêts sont garantis, directement ou indirectement, par l’administration centrale ou régionale ou par l’autorité locale en question. Or, la garantie de maintien en activité dont bénéficie la requérante – et donc la probabilité « extrêmement faible » de sa résolution – ne dépendrait aucunement de la question de savoir si les passifs de cette dernière correspondent à des créances liées à son activité de développement ou à ses activités auxiliaires de développement. La différence de traitement ne serait pas non plus justifiée du point de vue de la nature de ces activités, car les activités de développement sont économiquement indissociables des activités auxiliaires de développement.

115    Deuxièmement, l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, lu conjointement avec l’article 5, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement délégué, entraînerait une différence de traitement injustifiée entre les passifs liés aux activités auxiliaires de développement et les passifs résultant d’engagements envers des contreparties avec lesquelles un établissement a créé un système de protection institutionnel (ci-après le « SPI »), ces derniers passifs étant exclus du calcul des contributions ex ante selon l’article 5, paragraphe 1, sous b), dudit règlement délégué. En effet, la requérante bénéficierait, en ce qui concerne les moyens utilisés pour ses activités auxiliaires de développement, d’un mécanisme de protection indépendant du FRU, à savoir la garantie du Land, qui serait comparable à la garantie procurée par un SPI.

116    Troisièmement, les banques de développement régionales seraient traitées différemment des banques de développement nationales, qui ne seraient pas considérées comme des établissements de crédit au sens du règlement no 575/2013 et seraient donc exemptées de l’obligation de verser des contributions ex ante, alors même que les banques de développement régionales exerceraient, tout comme les banques de développement nationales, des missions particulières de financement dans l’intérêt général et disposeraient d’une garantie de maintien en activité.

117    À cet égard, il convient de rappeler que le principe d’égalité de traitement, en tant que principe général du droit de l’Union, exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêt du 3 février 2021, Fussl Modestraße Mayr, C‑555/19, EU:C:2021:89, point 95).

118    La requérante ayant invoqué la violation du principe d’égalité de traitement, c’est à elle qu’il incombe d’identifier avec précision les situations comparables dont elle estime qu’elles ont été traitées de manière différente ou les situations différentes dont elle estime qu’elles ont été traitées de manière identique [arrêt du 12 avril 2013, Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, T‑31/07, non publié, EU:T:2013:167, point 311].

119    Selon une jurisprudence constante, le caractère comparable de telles situations s’apprécie eu égard à l’ensemble des éléments qui les caractérisent. Ces éléments doivent, notamment, être déterminés et appréciés à la lumière de l’objet et du but de l’acte qui institue la distinction en cause. Doivent, en outre, être pris en considération les principes et les objectifs du domaine dont relève cet acte (voir arrêt du 3 février 2021, Fussl Modestraße Mayr, C‑555/19, EU:C:2021:89, point 99 et jurisprudence citée).

120    En ce qui concerne l’objet et le but de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014 et du règlement délégué 2015/63, il convient de rappeler que ces actes relèvent du domaine du MRU, dont la création vise, conformément au considérant 12 du règlement no 806/2014, à garantir une approche neutre dans le traitement des établissements défaillants, à renforcer la stabilité des établissements dans les États membres participants et à prévenir la propagation d’éventuelles crises aux États membres ne participant pas à ce mécanisme, afin de faciliter le fonctionnement du marché intérieur dans son ensemble.

121    En vue d’assurer un financement des activités du MRU, la directive 2014/59, le règlement no 806/2014 et le règlement délégué 2015/63 ont instauré les contributions ex ante, dont la nature spécifique consiste, ainsi qu’il ressort des considérants 105 à 107 de cette directive et du considérant 41 de ce règlement, à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour que ce dernier puisse remplir ses fonctions et à encourager les établissements à adopter des modes de fonctionnement moins risqués (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

122    Dans ce contexte, l’exclusion prévue à l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 est motivée, ainsi que cela découle du considérant 13 de ce règlement délégué, par le fait que les prêts de développement poursuivent un objectif de politique publique, sont octroyés sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif, et sont partiellement garantis, directement ou indirectement, par l’administration centrale ou régionale ou par l’autorité locale d’un État membre.

123    En ce qui concerne le premier grief, celui-ci doit être compris en ce sens que la requérante soutient, en substance, que les activités auxiliaires de développement sont comparables aux activités de développement, de sorte que les passifs d’une banque de développement régionale qui effectue les deux catégories d’activités auraient dû être exclus du calcul de sa contribution ex ante non seulement à concurrence du montant correspondant aux activités de développement, mais à concurrence du montant correspondant aux deux catégories d’activités.

124    À cet égard, il ressort tout d’abord du point 60 ci-dessus que les activités auxiliaires de développement sont menées sur le marché des capitaux ouvert et dans un but lucratif, qu’elles peuvent être conduites par des établissements autres que les banques de développement régionales et qu’elles sont exercées en concurrence avec les autres établissements. En revanche, les activités de développement sont réalisées sur la base d’une obligation légale d’assister l’administration centrale ou régionale d’un État membre dans l’exécution de ses missions d’intérêt public.

125    En outre, compte tenu des constats opérés aux points 62 et 124 ci-dessus et contrairement à ce que suggère la requérante, le fait que ces deux catégories d’activités sont complémentaires du point de vue économique ne signifie pas qu’elles sont comparables.

126    Enfin, la circonstance invoquée par la requérante selon laquelle la garantie du Land dont elle bénéficie couvre, dans son cas individuel, toutes ses activités, qu’il s’agisse des activités de développement ou des activités auxiliaires de développement, est sans pertinence pour apprécier le caractère comparable de ces deux catégories d’activités au regard du but poursuivi par l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63. En effet, d’une part, ainsi que cela ressort du point 122 ci-dessus, le but visé par cette disposition n’était pas d’exclure du calcul des contributions ex ante tous les passifs de toutes les banques de développement régionales qui bénéficient de garanties telles que celles dont bénéficie la requérante. D’autre part, il n’est pas établi que les garanties publiques dont bénéficient, en règle générale, les activités de développement des banques de développement régionales s’étendent, dans le cas de toutes ces banques, également aux activités auxiliaires de développement de ces dernières. À cet égard, la requérante n’a, notamment, pas contesté l’argument de la Commission selon lequel il existait des situations dans lesquelles les activités auxiliaires de développement de certaines banques de développement régionales n’étaient couvertes par aucune garantie d’État ni garantie équivalente.

127    Dans ces conditions, les activités auxiliaires de développement ne peuvent être considérées comme étant comparables aux activités de développement. Par conséquent, il n’est pas établi qu’elles doivent être traitées de la même manière s’agissant de l’exclusion des passifs liés à ces activités aux fins du calcul des contributions ex ante.

128    S’agissant du deuxième grief, la requérante soutient à tort que, au regard du but spécifique poursuivi par l’article 5, paragraphe 1, sous b), du règlement délégué 2015/63, les passifs liés aux activités auxiliaires de développement sont comparables aux passifs liés aux engagements envers des contreparties avec lesquelles l’établissement concerné a créé un SPI. En effet, conformément au considérant 8 de ce règlement délégué, l’exclusion des passifs liés aux SPI résulte d’une volonté d’éviter le double comptage de certains passifs lors de la détermination de la contribution ex ante des établissements qui sont membres d’un SPI ou affiliés de façon permanente à un organisme central. Or, la requérante n’a pas soutenu que l’inclusion des passifs liés aux activités auxiliaires de développement dans le calcul de sa contribution ex ante constituait un double comptage de tels passifs.

129    Quant au troisième grief, tiré de ce que les banques de développement régionales sont traitées différemment des banques de développement nationales en ce qui concerne l’obligation de verser les contributions ex ante, il convient de relever ce qui suit.

130    Tout d’abord, cette différence de traitement résulte des dispositions des actes législatifs évoqués aux points 70 à 73 ci-dessus. En effet, ainsi qu’il a été expliqué à ces points, c’est l’article 2, paragraphe 5, point 6, de la directive 2013/36, dans sa version applicable avant sa modification par la directive 2019/878, qui excluait nommément la KfW du champ d’application de la directive 2013/36 et, par voie de conséquence, du régime général de versement des contributions ex ante. Or, la requérante n’a pas contesté la validité de cette disposition ni d’autres dispositions mentionnées aux points 70 à 73 ci-dessus.

131    En revanche, l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63, dont il est excipé de l’illégalité par le présent moyen, s’applique à toutes les banques de développement, au sens de l’article 3, point 27, du règlement délégué 2015/63, relevant du champ d’application personnel du régime général de versement des contributions ex ante. Cette disposition n’établit ainsi aucune différence de traitement entre ces banques selon qu’elles sont créées par une administration centrale ou par une administration régionale d’un État membre.

132    Par ailleurs, ainsi qu’il a été constaté au point 77 ci-dessus, ni l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 ni aucune autre disposition de cette directive ou du règlement no 806/2014 n’habilite la Commission à dispenser entièrement, dans un acte délégué, certains établissements, tels que les banques de développement régionales ou nationales, de l’obligation de verser des contributions ex ante.

133    Dans ces conditions, la légalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 ne saurait être affectée au seul motif que le législateur de l’Union avait décidé de soustraire, à titre individuel, la KfW, désignée nominativement à l’article 2, paragraphe 5, point 6, de la directive 2013/36, dans sa version applicable avant sa modification par la directive 2019/878, du régime général de versement des contributions ex ante.

134    En troisième lieu, la requérante considère, s’agissant du règlement d’exécution 2015/81, que la méthode de calcul prévue par ce règlement et appliquée dans la décision attaquée méconnaît le principe de proportionnalité et engendre une distorsion entre les structures du secteur bancaire des États membres, en ce que cette méthode entraîne des subventions croisées des banques commerciales par le secteur des banques de développement. Ainsi, cette méthode créerait des distorsions entre les structures du secteur bancaire des États membres, en méconnaissance de l’article 70, paragraphe 2, premier alinéa, sous b), du règlement no 806/2014.

135    À cet égard, il convient de rappeler que le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, exige que les actes des institutions de l’Union soient aptes à réaliser les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause et ne dépassent pas les limites de ce qui est nécessaire à la réalisation de ces objectifs, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés au regard des buts visés (arrêts du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a., C‑547/14, EU:C:2016:325, point 165, et du 20 janvier 2021, ABLV Bank/CRU, T‑758/18, EU:T:2021:28, point 142 ; voir également, en ce sens, arrêt du 8 juin 2010, Vodafone e.a., C‑58/08, EU:C:2010:321, point 51).

136    Or, la requérante n’a soumis aucun élément qui vise à démontrer que l’inclusion des passifs liés aux activités auxiliaires de développement dans le calcul des contributions ex ante aurait un caractère inapproprié par rapport aux objectifs que le législateur de l’Union et la Commission entendent poursuivre, tels qu’ils sont mentionnés aux points 120 à 122 ci-dessus.

137    De même, la requérante n’a avancé aucun motif visant à démontrer que l’inclusion de ces passifs dans le calcul des contributions ex ante allait au-delà de ce qui était nécessaire pour atteindre les objectifs énoncés aux points 120 à 122 ci-dessus ou entraînait des inconvénients disproportionnés par rapport auxdits objectifs.

138    S’agissant du seul argument concret invoqué par la requérante dans le cadre du présent grief, à savoir le fait que l’inclusion desdits passifs dans le calcul des contributions ex ante entraîne, selon elle, des « subventions croisées » des banques commerciales par le secteur des banques de développement, la requérante n’a pas expliqué à suffisance de droit les raisons pour lesquelles une telle inclusion ne satisfaisait pas aux critères énoncés au point 135 ci-dessus. En outre, et en tout état de cause, ainsi qu’il a déjà été mentionné au point 124 ci-dessus, les activités auxiliaires de développement sont menées sur le marché des capitaux ouvert dans un but lucratif, de sorte que l’éventuelle exclusion des passifs liés à ces activités du calcul des contributions ex ante risquerait d’aboutir au résultat contraire à celui envisagé par la requérante, à savoir la création de distorsions entre différents établissements actifs sur un tel marché.

139    Il résulte de l’ensemble de ces considérations qu’il convient d’écarter la troisième branche du neuvième moyen et, avec elle, ce moyen dans son ensemble.

2.      Sur le dixième moyen, tiré des exceptions d’illégalité de l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), et de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63

140    Dans le cadre du dixième moyen, la requérante soutient que « la méthode de calcul définie dans le règlement délégué [...] 2015/63 » viole le règlement no 806/2014, la directive 2014/59 et le principe d’égalité de traitement.

141    À cet égard, il y a lieu de préciser que, si la requérante fait valoir, en termes généraux, que c’est la méthode de calcul prévue par le règlement délégué 2015/63 qui viole, en tant que telle, les normes de droit supérieur qu’elle invoque et si elle précise que son argumentation relative à l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), et à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », de ce règlement délégué n’est développée qu’à titre d’exemple, ses écritures ne contiennent pas de considérations sur d’autres aspects de la méthode de calcul que ceux prévus par ces dispositions.

142    Dans ces conditions, il convient de limiter l’examen du présent moyen à la prétendue illégalité de l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), et de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », dudit règlement délégué.

143    En premier lieu, la requérante soutient que le fait que la garantie publique dont elle bénéficie n’est pas prise en compte dans le cadre du pilier de risque intitulé « indicateurs de risque supplémentaires à déterminer par l’autorité de résolution », prévu à l’article 6, paragraphe 5, du règlement délégué 2015/63, viole le principe d’égalité de traitement ainsi que le règlement no 806/2014 et la directive 2014/59, puisque ces actes imposent un alignement du calcul des contributions ex ante sur le profil de risque des établissements. Ce serait, notamment, le sous-indicateur de risque « éventuelle appartenance de l’établissement à un [SPI] », prévu à l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), du règlement délégué 2015/63, qui aurait dû tenir compte des garanties publiques, telles que celle dont bénéficie la requérante, lesquelles seraient même potentiellement plus pertinentes pour l’appréciation du profil de risque des établissements qu’une appartenance à un SPI.

144    En second lieu, selon la requérante, le mécanisme d’assignation des établissements aux bins, établi à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63, viole la directive 2014/59, le principe d’alignement des contributions ex ante sur le profil de risque et le principe d’égalité de traitement. D’une part, cette assignation serait effectuée sur la base d’une comparaison du profil de risque de tous les établissements des États membres participants, ce qui pourrait aboutir à des résultats manifestement injustes. D’autre part, comme la méthode prévue par l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », dudit règlement délégué consiste à assigner, dans la mesure du possible, le même nombre d’établissements à chaque bin, elle serait susceptible de conduire à ce que des établissements présentant des indicateurs de risque bruts similaires soient traités de manière différente et des établissements présentant des indicateurs différents, de manière identique.

145    Ainsi, à titre d’exemple, il ressortirait de l’annexe II de la décision attaquée que, dans le cadre du sous-indicateur de risque « actifs pondérés en fonction du risque du marché, divisés par le total de l’actif » en ce qui concerne les établissements allemands, les bins 1 à 15 seraient occupés par 646 établissements présentant une valeur de 0 % et l’établissement possédant le profil de risque le plus élevé pour cet indicateur, avec une valeur d’environ 1121,1 %, serait assigné au bin 18, soit seulement un bin au-dessus de celui de la requérante, laquelle, avec sa valeur de 0,05 %, est assignée au bin 17. Par conséquent, des établissements avec un profil de risque complètement différent se retrouveraient classés dans le même bin.

146    Le CRU fait valoir que le dixième moyen doit être rejeté comme irrecevable dans son ensemble au motif qu’il aurait dû être soulevé dès l’introduction du recours en 2016. Il serait, en tout état de cause, non fondé.

147    À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Cependant, un moyen, ou un argument, qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et présentant un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (arrêt du 11 juillet 2013, Ziegler/Commission, C‑439/11 P, EU:C:2013:513, point 46).

148    En outre, conformément à l’article 86, paragraphe 1, du règlement de procédure, lorsqu’un acte, dont l’annulation est demandée, est remplacé ou modifié par un autre acte ayant le même objet, la partie requérante peut adapter la requête pour tenir compte de cet élément nouveau.

149    Par ailleurs, les articles 84 et 86 du règlement de procédure doivent faire l’objet d’une interprétation stricte, les règles de procédure ayant un caractère impératif (voir, en ce sens, arrêts du 26 mars 2009, SELEX Sistemi Integrati/Commission, C‑113/07 P, EU:C:2009:191, point 48, et du 20 septembre 2018, Espagne/Commission, C‑114/17 P, EU:C:2018:753, point 54).

150    En l’espèce, la requérante n’a présenté l’exception d’illégalité à l’encontre de l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), et de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63 que dans le mémoire en adaptation.

151    En effet, la requête introductive d’instance ne contient aucune argumentation qui pourrait être considérée comme présentant un lien, même implicite, avec la légalité des dispositions mentionnées au point 150 ci-dessus. Certes, la requête contient une argumentation portant sur l’appartenance des établissements à un SPI, mais celle-ci se rapporte à l’exclusion de certains passifs du calcul des contributions ex ante conformément à l’article 5 du règlement délégué 2015/63, et non à l’ajustement de ces contributions en fonction du profil de risque des établissements conformément aux articles 6 à 9 de ce même règlement délégué. Dès lors, rien ne permet de conclure que la présente exception d’illégalité constitue l’ampliation d’un moyen déjà invoqué dans la requête au sens de la jurisprudence visée au point 147 ci-dessus.

152    En outre, la décision attaquée est fondée sur les dispositions de droit en vigueur lors de l’adoption des décisions initiales, ce qui vaut, notamment, pour l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), et l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63. À cet égard, rien n’indique que la requérante n’a pas disposé, déjà au stade de la requête, de tous les éléments sur lesquels elle s’est fondée dans son mémoire en adaptation pour contester la validité de ces dispositions.

153    Sur ce point, il y a lieu de préciser que la circonstance, mise en cause par la requérante, selon laquelle l’assignation des établissements aux bins est effectuée sur la base des valeurs de l’indicateur de risque brut de tous les établissements pour lesquels cet indicateur est calculé découle directement de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63.

154    Il en va de même du calcul du nombre de bins au sein d’un indicateur de risque donné et du nombre d’établissements assignés à chaque bin, étant entendu que, selon l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 3, du règlement délégué 2015/63, le CRU assigne, en principe, le même nombre d’établissements à chaque bin, en commençant par assigner au premier bin les établissements pour lesquels les valeurs de l’indicateur brut sont les plus faibles.

155    Or, la requérante met en cause l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63 précisément en ce qu’il prévoit l’assignation du même nombre d’établissements à chaque bin.

156    Eu égard à ce qui précède, la présente exception d’illégalité n’est fondée sur aucun élément de droit ou de fait qui se serait révélé au cours de la procédure au sens de l’article 84 du règlement de procédure. De même, elle n’est pas fondée sur un élément dont la requérante pouvait valablement tenir compte, pour la première fois, dans le cadre de l’adaptation de sa requête au titre de l’article 86, paragraphe 1, du règlement de procédure.

157    Partant, la présente exception d’illégalité doit être rejetée comme irrecevable pour cause de tardiveté.

B.      Sur les moyens portant sur la légalité de la décision attaquée

1.      Sur les deuxième et troisième moyens, tirés d’une violation par la décision attaquée de l’article 41 de la Charte et de l’obligation de motivation en raison de l’absence de base juridique pour le remplacement, avec effet rétroactif, des décisions initiales

158    La requérante soutient, dans le cadre de son deuxième moyen, que la décision attaquée, en ce qu’elle remplace, avec effet rétroactif, les décisions initiales, viole l’article 41 de la Charte, lu conjointement avec l’article 4 du code européen de bonne conduite administrative, le principe de l’État de droit et le principe de bonne administration, au motif qu’il n’existait pas de base juridique pour adopter la décision attaquée avec effet rétroactif. À cet égard, ni l’article 70, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 ni l’article 17, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 ne constitueraient une telle base juridique.

159    En tout état de cause, il n’existerait pas de justification objective pour le remplacement des décisions initiales avec effet rétroactif. En particulier, il n’existerait pas de risque avéré que l’absence d’un tel effet compromette l’objectif d’atteindre le niveau cible final. À cet égard, un éventuel déficit de financement du CRU pourrait être compensé par des contributions ex ante plus élevées au cours des années suivantes ou par une prolongation de la phase initiale au titre de l’article 69, paragraphe 4, du règlement no 806/2014. Par ailleurs, l’absence de caractère rétroactif de la décision attaquée ne procurerait pas à la requérante d’avantage concurrentiel déloyal par rapport aux autres établissements, étant donné qu’elle ne serait pas, en tant que banque de développement, en concurrence avec ces autres établissements. Elle n’aurait pas non plus bénéficié d’un avantage déloyal tenant au fait que sa contribution ex ante pour la période de contribution 2016 serait exigible plus tard que celle des autres établissements, car elle avait, de toute façon, déjà versé cette contribution en 2016.

160    Par ailleurs, par son troisième moyen, la requérante fait valoir que la décision attaquée viole l’obligation de motivation prescrite par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte, en ce qu’elle ne mentionne pas la base juridique sur laquelle le CRU s’est fondé pour adopter la décision attaquée avec effet rétroactif.

161    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

162    La décision attaquée a été adoptée le 27 avril 2022 et, conformément à ce que prévoit l’article 4 de son dispositif, elle a pris effet le 15 avril 2016, à savoir au moment de la prise d’effet de la première des décisions initiales.

163    Aux considérants 177 à 184 de la décision attaquée, le CRU a exposé les raisons pour lesquelles il avait fixé les effets dans le temps de cette décision de la manière décrite au point 162 ci-dessus. Il a, notamment, précisé qu’il avait procédé ainsi afin de maintenir le titre juridique par lequel la contribution ex ante de la requérante pour 2016 avait été perçue en 2016 et de préserver la validité du paiement de cette contribution par la requérante.

164    Selon la jurisprudence, le principe de sécurité juridique s’oppose à ce que la portée d’un acte de l’Union dans le temps voie son point de départ fixé à une date antérieure à son adoption, sauf lorsque, à titre exceptionnel, le but à atteindre l’exige et la confiance légitime des intéressés est dûment respectée (voir, en ce sens, arrêts du 13 novembre 1990, Fedesa e.a., C‑331/88, EU:C:1990:391, point 45, et du 5 septembre 2014, Éditions Odile Jacob/Commission, T‑471/11, EU:T:2014:739, point 102 et jurisprudence citée).

165    Il découle de cette jurisprudence que, lorsque les conditions que cette dernière mentionne sont remplies, le pouvoir des institutions, des organes et des organismes de l’Union d’adopter un acte avec effet rétroactif découle des principes généraux du droit de l’Union, sans qu’il soit subordonné à l’existence d’une base juridique explicite dans la réglementation concernée.

166    Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la requérante par son troisième moyen, le fait que la décision attaquée ne se réfère pas à une disposition explicite de la réglementation concernée conférant au CRU un tel pouvoir ne saurait constituer une violation de l’obligation de motivation.

167    Par ailleurs, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la décision attaquée a une véritable portée rétroactive, ainsi que la requérante le fait valoir par son deuxième moyen, il convient de relever que les conditions mentionnées au point 164 ci-dessus sont, en tout état de cause, remplies en l’espèce.

168    En effet, d’une part, la requérante n’allègue pas que le caractère rétroactif de la décision attaquée méconnaît le principe de protection de la confiance légitime. Au demeurant, rien n’indique que la confiance légitime de la requérante ou celle de tiers n’a pas été dûment respectée dans les circonstances de l’espèce.

169    D’autre part, s’agissant de la question de savoir si les buts à atteindre par la décision attaquée exigeaient que cette dernière prenne effet à une date antérieure à la date de son adoption, il convient de tenir compte du contexte dans lequel cette décision a été prise.

170    Ainsi que cela découle des considérants 19, 20 et 183 de la décision attaquée, cette dernière a été adoptée afin de remédier au défaut de motivation des décisions initiales, que le CRU a constaté à la suite des arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU (T‑377/16, T‑645/16 et T‑809/16, EU:T:2019:823), et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU (T‑365/16, EU:T:2019:824), sans que cette décision ou ces arrêts aient modifié la portée de l’obligation de la requérante de verser une contribution ex ante pour la période de contribution 2016, telle qu’elle avait été arrêtée par les décisions initiales et telle qu’elle avait existé pour cette période de contribution.

171    En effet, le calcul de la contribution ex ante de la requérante pour ladite période de contribution ainsi que le montant de cette contribution étaient les mêmes tant dans la seconde des décisions initiales que dans la décision attaquée. À cet égard, le CRU a, notamment, relevé, au considérant 22 de la décision attaquée, que cette dernière était « basée sur les données collectées, les hypothèses formulées, les étapes préparatoires entreprises et la méthodologie appliquée dans le cadre de la procédure de 2016 menant à l’adoption des [décisions initiales] ». Ainsi, le seul élément nouveau introduit par la décision attaquée était une motivation plus étendue du calcul de la contribution ex ante de la requérante pour 2016.

172    Dans ces conditions particulières, si le CRU n’avait pas adopté la décision attaquée en lui donnant effet à compter de la date d’effet de la première des décisions initiales, la décision attaquée n’aurait pas pu déployer ses effets pendant la période allant du 15 avril 2016 au 27 avril 2022, au cours de laquelle la requérante aurait été dispensée de son obligation de verser une contribution ex ante pour la période de contribution 2016, alors qu’elle était soumise à cette obligation en vertu de l’article 2, de l’article 67, paragraphe 4, et des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014. De même, au cours de cette période, le FRU aurait été privé, en méconnaissance de ces mêmes dispositions, des fonds provenant des contributions ex ante de la requérante, ce qui aurait porté atteinte à la mise en œuvre de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014 et du règlement délégué 2015/63 (voir, par analogie, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 176 et 177).

173    Par conséquent, le fait d’adopter la décision attaquée avec effet à compter du 15 avril 2016 visait à assurer une concomitance entre l’applicabilité de la décision attaquée et le moment auquel l’obligation de la requérante de verser une contribution ex ante pour 2016 avait pris naissance et, ainsi, à éviter un résultat contraire à la réglementation applicable. Or, l’atteinte d’un tel but exigeait que cette décision voie son entrée en vigueur fixée à une date antérieure à celle de son adoption.

174    Eu égard à ce qui précède, il convient d’écarter les deuxième et troisième moyens comme non fondés.

2.      Sur le quatrième moyen, tiré d’une insuffisance de motivation de la décision attaquée en ce qui concerne le calcul de la contribution ex ante de la requérante

175    La requérante soutient que la décision attaquée n’est pas suffisamment motivée en ce qui concerne le calcul de sa contribution ex ante et qu’elle viole ainsi l’article 296, deuxième alinéa, TFUE.

176    Le quatrième moyen se décompose, en substance, en trois branches, tirées, la première, de l’absence de motivation individuelle de la décision attaquée, la deuxième, de l’absence de communication des données individuelles des autres établissements et, la troisième, de l’insuffisance de motivation en ce qui concerne la constitution des bins.

a)      Observations liminaires

177    L’article 296, deuxième alinéa, TFUE dispose que les actes juridiques sont motivés. De même, le droit à une bonne administration, consacré à l’article 41 de la Charte, prévoit l’obligation, pour les institutions, les organes et les organismes de l’Union, de motiver leurs décisions.

178    La motivation d’une décision d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union revêt une importance toute particulière, en tant qu’elle permet à l’intéressé de décider en pleine connaissance de cause s’il entend introduire un recours contre cette décision ainsi qu’à la juridiction compétente d’exercer son contrôle, et qu’elle constitue donc l’une des conditions de l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 103 et jurisprudence citée).

179    Une telle motivation doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. À cet égard, il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée et, en particulier, de l’intérêt que les personnes concernées par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Par conséquent, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 104 et jurisprudence citée).

180    Afin d’examiner si cette motivation est suffisante en ce qui concerne une décision fixant les contributions ex ante, premièrement, il convient de rappeler qu’il ne saurait être déduit de la jurisprudence de la Cour que la motivation de toute décision d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union mettant à la charge d’un opérateur privé le paiement d’une somme d’argent doit nécessairement comprendre l’intégralité des éléments permettant à son destinataire de vérifier l’exactitude du calcul du montant de cette somme d’argent (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 105 et jurisprudence citée).

181    Deuxièmement, les institutions, les organes et les organismes de l’Union sont, en principe, tenus, en application du principe de protection du secret des affaires, qui constitue un principe général du droit de l’Union, lequel est, notamment, concrétisé à l’article 339 TFUE, de ne pas révéler aux concurrents d’un opérateur privé des informations confidentielles fournies par celui-ci (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 109 et jurisprudence citée).

182    Troisièmement, considérer que la motivation de la décision du CRU fixant des contributions ex ante doit nécessairement permettre aux établissements de vérifier l’exactitude du calcul de leur contribution ex ante impliquerait, nécessairement, d’interdire au législateur de l’Union d’instituer un mode de calcul de cette contribution intégrant des données dont le caractère confidentiel est protégé par le droit de l’Union et, partant, de réduire de manière excessive le large pouvoir d’appréciation dont doit disposer, à cette fin, ce législateur, en l’empêchant, notamment, d’opter pour une méthode susceptible d’assurer une adaptation dynamique du financement du FRU aux évolutions du secteur financier, par la prise en compte comparative, en particulier, de la situation financière de chaque établissement agréé sur le territoire d’un État membre participant (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 118).

183    Quatrièmement, s’il résulte de ce qui précède que l’obligation de motivation pesant sur le CRU doit être mise en balance, en raison de la logique du système de financement du FRU et du mode de calcul établi par le législateur de l’Union, avec l’obligation du CRU de respecter le secret des affaires des établissements concernés, il n’en demeure pas moins que cette dernière obligation ne doit pas être interprétée à ce point extensivement qu’elle vide l’obligation de motivation de sa substance (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 120).

184    Toutefois, il ne saurait être considéré, dans le cadre de la mise en balance de l’obligation de motivation avec le principe de protection du secret des affaires, que motiver une décision mettant à la charge d’un opérateur privé le paiement d’une somme d’argent sans lui fournir l’intégralité des éléments permettant de vérifier avec exactitude le calcul du montant de cette somme d’argent porte nécessairement, dans tous les cas, atteinte à la substance de l’obligation de motivation (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 121).

185    S’agissant de la décision du CRU fixant des contributions ex ante, l’obligation de motivation doit être considérée comme étant respectée lorsque les personnes concernées par cette décision, tout en ne se voyant pas transmettre de données couvertes par le secret des affaires, disposent de la méthode de calcul utilisée par le CRU et d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, de quelle façon leur situation individuelle a été prise en compte, aux fins du calcul de leur contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 122).

186    Dans un tel cas, ces personnes sont, en effet, en mesure de vérifier si leur contribution ex ante a été fixée de manière arbitraire, en méconnaissant la réalité de leur situation économique ou en utilisant des données relatives au reste du secteur financier dépourvues de plausibilité. Lesdites personnes peuvent, dès lors, comprendre les justifications de la décision fixant leur contribution ex ante et évaluer s’il apparaît utile d’introduire un recours contre cette décision, de sorte qu’il serait excessif d’exiger du CRU qu’il communique chacun des éléments chiffrés sur lesquels s’appuie le calcul de la contribution ex ante de chaque établissement concerné (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 123).

187    Il résulte de ce qui précède que le CRU n’est pas, notamment, tenu de fournir à un établissement les données lui permettant de vérifier, de manière complète, l’exactitude de la valeur du multiplicateur d’ajustement, puisque cette vérification supposerait de disposer de données couvertes par le secret des affaires relatives à la situation économique de chacun des autres établissements concernés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 135).

188    En revanche, il incombe au CRU de publier ou de transmettre aux établissements concernés, sous une forme agrégée et anonymisée, les informations relatives à ces établissements, utilisées pour calculer cette contribution, dans la mesure où ces informations peuvent être communiquées sans porter atteinte au secret des affaires (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 166).

189    Parmi les informations devant ainsi être mises à la disposition des établissements figurent, notamment, les valeurs limites de chaque bin et celles des indicateurs de risque s’y rapportant, sur la base desquelles la contribution ex ante des établissements a été adaptée au profil de risque de ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 167).

190    C’est au regard de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments de la requérante développés dans le cadre du quatrième moyen.

b)      Sur la première branche portant sur labsence de motivation individuelle de la décision attaquée

191    Selon la requérante, la décision attaquée viole l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, en ce qu’elle ne contient pas de motivation individuelle suffisante. Notamment, les considérants 24 à 164 de cette décision ne feraient aucune mention de la requérante et les annexes de ladite décision ne contiendraient pas un examen suffisamment concret de ses particularités individuelles.

192    Plus concrètement, la décision attaquée, notamment les considérants 53 à 57 de celle-ci, ne contiendrait pas d’examen de la situation spécifique de la requérante en ce qui concerne la qualification des activités auxiliaires de développement de cette dernière au regard de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63. En outre, l’exposé concernant cette question figurant à l’annexe III de la décision attaquée reposerait sur une mauvaise compréhension du concept d’« activités auxiliaires de développement ». De plus, cet exposé se limiterait à la simple négation du privilège des activités auxiliaires de développement pour la requérante et inclurait des arguments qui n’ont aucun rapport avec lesdites activités.

193    Enfin, la décision attaquée n’expliquerait pas les raisons pour lesquelles le CRU s’est écarté d’une pratique antérieure de l’autorité de résolution allemande qui appliquait, pour l’année de contribution 2015, l’article 5 paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 aux activités auxiliaires de développement de la requérante.

194    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

195    En premier lieu, il convient de rappeler que, comme il a été déjà évoqué aux points 9 à 21 ci-dessus, la décision attaquée comporte quatre parties distinctes. Ainsi, les considérants 24 à 164 et 167 à 175 du corps de cette décision ainsi que l’annexe II de celle-ci exposent des considérations et des éléments de calcul qui sont applicables à tous les établissements. Cependant, l’annexe I de la décision attaquée, intitulée « Détails du calcul (ajusté en fonction des risques) », et son annexe III, qui comprend une évaluation des observations faites par la requérante dans le cadre de la consultation menée par le CRU préalablement à l’adoption de la décision attaquée, contiennent des éléments de calcul et des motifs qui sont spécifiques à la contribution individuelle à verser au FRU par la requérante.

196    Dans ces conditions, la décision attaquée est suffisamment individualisée à l’égard de la requérante.

197    En deuxième lieu, en ce qui concerne le contenu concret de la décision attaquée, la requérante n’a identifié – outre l’assignation des établissements aux bins qui sera examinée dans la deuxième branche du présent moyen – qu’un seul élément qui ne serait pas suffisamment motivé, à savoir la non-application de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 à ses activités auxiliaires de développement.

198    Or, au considérant 55 de la décision attaquée, le CRU a indiqué qu’il s’était abstenu d’appliquer l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 à des passifs qui ne remplissaient pas toutes les conditions pour être exclus du calcul des contributions ex ante, lorsque l’interprétation permettant une telle exclusion aurait été incompatible avec le libellé de cette disposition. Le CRU a également précisé à ce même considérant que, étant donné le caractère dérogatoire de ladite disposition, cette dernière était d’interprétation stricte et ne devait pas être appliquée de manière extensive ou par analogie, ni en ce qui concernait son champ d’application « subjectif », c’est-à-dire au regard des établissements auxquels elle s’appliquait, ni en ce qui concernait son champ d’application « objectif », c’est-à-dire au regard des types de passifs pouvant bénéficier de l’exclusion du calcul des contributions ex ante.

199    Par ailleurs, aux points 21 à 23 et 27 de l’annexe III de la décision attaquée, le CRU a exposé les motifs pour lesquels il considérait que les activités auxiliaires de développement de la requérante ne relevaient pas de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63. Il a, notamment, précisé, au considérant 22 de cette annexe, que les activités auxiliaires de développement de la requérante et ses activités de développement étaient indépendantes et distinctes. Il a considéré, au même considérant, que les activités de développement ne reposaient pas sur l’économie de marché ni sur la concurrence et étaient menées au titre du mandat octroyé par les autorités publiques, tandis que les activités auxiliaires de développement étaient effectuées dans les conditions du marché et étaient facultatives, concurrentielles et lucratives. Le CRU a ainsi conclu, au point 27 de l’annexe III de la décision attaquée, que les activités auxiliaires de développement de la requérante ne pouvaient pas, par leur nature même, être considérées comme étant menées sur une base non concurrentielle et non lucrative, quelle que soit la façon dont les bénéfices découlant de ses activités étaient utilisés.

200    De tels éléments ont permis à la requérante d’identifier les motifs pour lesquels le CRU avait considéré que les passifs liés à ses activités auxiliaires de développement n’étaient pas exclus du calcul de sa contribution ex ante au titre de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63.

201    Dans ces conditions, rien ne permet d’affirmer que le CRU s’est limité à un simple refus d’application de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 à la requérante ou qu’il a recouru à des arguments qui seraient sans aucun rapport avec les activités auxiliaires de développement de la requérante.

202    En troisième lieu, l’argument de la requérante tenant à la prétendue mauvaise compréhension par le CRU du concept d’« activités auxiliaires de développement » ne repose pas sur une violation de l’obligation de motivation, mais sur une contestation du bien-fondé des motifs pour lesquels le CRU n’a pas appliqué l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 auxdites activités de la requérante. Il en va de même de l’argument tendant à contester l’avis du CRU selon lequel de telles activités seraient concurrentielles et lucratives par leur nature même. Or, selon la jurisprudence, l’obligation de motivation est une question distincte de celle du bien-fondé des motifs de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2006, Ter Lembeek/Commission, T‑217/02, EU:T:2006:361, point 234).

203    En outre, si cette argumentation devait être comprise en ce sens que la requérante conteste le bien-fondé desdits motifs, celle-ci recouperait, en réalité, le huitième moyen, qui sera examiné aux points 258 à 262 ci-après.

204    En quatrième lieu, s’agissant de l’argument selon lequel le CRU se serait écarté d’une pratique antérieure de l’autorité de résolution allemande qui consistait à appliquer, en 2015, l’article 5 paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 aux activités auxiliaires de développement de la requérante, il convient de préciser que la requérante conteste le seul manque de motivation concernant l’écart avec la pratique antérieure, sans invoquer de violation d’une autre règle de droit.

205    À cet égard, d’une part, il ressort des points 198 à 200 ci-dessus que le CRU a suffisamment exposé les motifs pour lesquels il avait considéré que les activités auxiliaires de développement de la requérante ne relevaient pas de l’exception prévue à l’article 5 paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63. D’autre part, au point 23 de l’annexe III de la décision attaquée, le CRU a expliqué que l’évaluation effectuée pour un cycle de contribution donné ne saurait lier l’autorité de résolution lorsqu’elle effectue l’évaluation pour un cycle différent, notamment lorsque ces cycles de contribution relèvent chacun de la compétence d’une autorité de résolution différente. Il a ajouté qu’il ne lui appartenait pas de se prononcer sur une évaluation effectuée par une autre autorité de résolution.

206    De tels éléments permettent à la requérante de comprendre les raisons ayant conduit le CRU à ne pas appliquer l’article 5 paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63 à ses activités auxiliaires de développement pour l’année de contribution 2016, malgré ce qu’elle considère être une pratique antérieure différente. Dès lors, ces éléments satisfont aux exigences de l’obligation de motivation telles qu’elles découlent de la jurisprudence citée au point 179 ci-dessus.

207    Eu égard à ce qui précède, la première branche du quatrième moyen doit être écartée comme non fondée.

c)      Sur la deuxième branche, portant sur l’absence de communication des données individuelles des autres établissements

208    La requérante soutient que la décision attaquée ne permet pas de vérifier si le calcul des contributions ex ante respecte la réglementation applicable. En outre, le détail des calculs figurant aux annexes I et II de cette décision ne permettrait pas de vérifier l’assignation de la requérante aux bins ni la fixation de sa contribution ex ante. En particulier, ladite décision aurait dû contenir les données individuelles des autres établissements, à tout le moins sous une forme anonymisée, sans lesquelles la requérante ne serait pas en mesure de vérifier son assignation aux bins.

209    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

210    Au considérant 118 de la décision attaquée, le CRU a observé que « les secrets d’affaires des établissements – c’est-à-dire toutes les informations concernant l’activité professionnelle des établissements qui, en cas de divulgation à un concurrent et/ou à un public plus large, pourraient porter gravement atteinte aux intérêts des établissements – [étaient] considérés comme des informations confidentielles ». Il a ajouté que, « [d]ans le cadre du calcul des contributions ex ante […], les informations individuelles fournies par les établissements par l’intermédiaire de leurs formulaires de [déclaration] […], sur lesquelles [il] s’appu[yait] pour calculer leur contribution ex ante, [étaient] considérées comme des secrets d’affaires ».

211    En outre, aux considérants 120, 122 et 123 de la décision attaquée, le CRU a relevé qu’il lui était interdit de « divulguer les points de données de chaque établissement, qui constitu[aie]nt la base des calculs dans [ladite décision] », alors qu’il était autorisé à « divulguer les points de données agrégés et communs, dans la mesure où ces données [étaient] cumulées ». Cela étant, les établissements bénéficiaient, selon ladite décision, d’une « transparence totale quant au calcul de leur [contribution annuelle de base] et de leur multiplicateur d’ajustement » pour les étapes de calcul de cette contribution, telles qu’elles étaient définies à l’annexe I du règlement délégué 2015/63, qui portaient sur le « calcul des indicateurs bruts » (étape 1), le « rééchelonnement des indicateurs » (étape 3) et le « calcul de l’indicateur composite » (étape 5). En outre, les établissements étaient en mesure d’obtenir des « points de données communs utilisés indifféremment par le CRU pour tous les établissements ajustés en fonction de leur profil de risque » pour les étapes de calcul portant sur la « discrétisation des indicateurs » (étape 2), l’« intégration du signe affecté » (étape 4) et le « calcul des contributions annuelles » (étape 6).

212    À cet égard, tout d’abord, il convient de rappeler que le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, implique l’utilisation, par le CRU, de données couvertes par le secret des affaires ne pouvant pas être reprises dans la motivation de la décision de fixation des contributions ex ante (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 114).

213    Ensuite, il ressort de la jurisprudence citée aux points 177 à 189 ci-dessus que, contrairement à ce que prétend la requérante, le CRU n’était pas obligé de lui permettre de vérifier, de manière complète, la détermination du nombre de bins ni l’assignation des établissements à ces bins en lui fournissant les données individuelles des autres établissements, puisqu’une telle approche aurait impliqué de lui communiquer des données qui sont couvertes par le secret des affaires.

214    La requérante n’ayant présenté aucun élément visant à remettre en cause la position du CRU selon laquelle les valeurs d’indicateurs bruts sont couvertes par le secret des affaires, elle ne saurait reprocher au CRU de ne pas les avoir divulguées aux établissements.

215    Enfin, si la remarque de la requérante concernant l’anonymisation des valeurs d’indicateurs bruts devait être comprise en ce sens qu’elle vise une situation où le nom de l’établissement serait remplacé par un pseudonyme, un tel procédé ne pourrait pas garantir que les établissements ne puissent pas être identifiés à partir des données ainsi communiquées. Il n’est effectivement pas exclu que certains établissements, même pseudonymisés, puissent néanmoins être identifiés en raison des données individuelles qui ont déjà été rendues publiques, notamment dans le cas des grands établissements et dans celui des États membres ne comptant que quelques établissements.

216    Eu égard à ce qui précède, la deuxième branche du quatrième moyen doit être écartée comme non fondée.

d)      Sur la troisième branche, portant sur une insuffisance de motivation en ce qui concerne la constitution des bins

217    La requérante soutient que la décision attaquée n’explique pas pour quelle raison le nombre des établissements de chaque bin ainsi que le nombre total de bins varient d’un indicateur de risque à l’autre.

218    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

219    En ce qui concerne le nombre de bins au sein de chaque indicateur de risque, le CRU calcule ce nombre selon les règles établies par l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63, auquel le CRU a renvoyé aux considérants 85, 117 et 138 de la décision attaquée, et, plus précisément, selon la formule prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 2, de ce même règlement délégué. Selon cette formule, le « nombre de bins » () pour chaque indicateur brut – à l’exception de l’indicateur « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel » – est calculé, notamment, sur la base du « nombre d’établissements contribuant au dispositif de financement pour la résolution pour lesquels l’indicateur est calculé » (N) et des valeurs d’indicateurs bruts en question (). Ainsi, le nombre de bins est susceptible de varier en fonction des données d’entrée saisies dans cette formule.

220    Dans ces conditions, la requérante a tort de soutenir que la décision attaquée n’a pas fourni d’explications en ce qui concernait les variations du nombre total de bins d’un indicateur de risque à l’autre.

221    De même, s’agissant du nombre inégal d’établissements affecté à chaque bin, le CRU a suffisamment expliqué, au considérant 140 de la décision attaquée, les motifs d’une telle répartition, en indiquant que celle-ci visait à éviter que des établissements présentant la même valeur pour un indicateur de risque brut soient assignés à des bins différents, de sorte que des établissements présentant la même valeur pour un tel indicateur ont été assignés au même bin, ce qui a pu conduire à ce qu’un nombre différent d’établissements soit affecté à chaque bin.

222    Eu égard à ce qui précède, la troisième branche du quatrième moyen doit être écartée comme non fondée et, avec elle, le quatrième moyen dans son ensemble.

3.      Sur le sixième moyen, tiré d’une violation des « exigences générales de procédure » résultant de l’article 41 de la Charte, de l’article 298 TFUE, des principes généraux du droit et du règlement intérieur du CRU

223    La requérante soutient que la décision attaquée viole des « exigences générales de procédure » résultant de l’article 41 de la Charte, de l’article 298 TFUE, des principes généraux du droit et du règlement intérieur du CRU. Il n’aurait, notamment, pas été démontré que cette décision respectait la « durée minimale des procédures écrites » et la requérante serait dans l’impossibilité de le vérifier. Il ne serait pas non plus possible pour elle de vérifier si d’autres règles procédurales ont été respectées. Le Tribunal devrait, dès lors, procéder à une vérification d’office.

224    Le CRU fait valoir que ce moyen n’est pas étayé et doit être rejeté comme purement spéculatif.

225    À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, toute requête doit indiquer l’objet du litige ainsi que l’exposé sommaire des moyens et cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal d’exercer son contrôle, le cas échéant, sans autre information à l’appui (arrêt du 7 mars 2017, United Parcel Service/Commission, T‑194/13, EU:T:2017:144, point 191).

226    Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir arrêt du 25 janvier 2018, BSCA/Commission, T‑818/14, EU:T:2018:33, point 95 et jurisprudence citée). Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief est invoqué au soutien d’un moyen (voir arrêt du 25 mars 2015, Belgique/Commission, T‑538/11, EU:T:2015:188, point 131 et jurisprudence citée).

227    En particulier, la simple invocation du principe du droit de l’Union dont la violation est alléguée, sans indication des éléments de fait et de droit sur lesquels cette allégation se fonde, ne satisfait pas aux exigences de l’article 76, sous d), du règlement de procédure (voir arrêt du 7 novembre 2019, ADDE/Parlement, T‑48/17, EU:T:2019:780, point 22 et jurisprudence citée).

228    En l’espèce, d’une part, il convient de relever que la requérante se borne à soutenir que la décision attaquée a violé des « exigences générales de procédure telles qu’elles résultent de l’article 41 de la Charte, de l’article 298 [TFUE], des principes généraux du droit et du règlement intérieur du CRU » au motif qu’il n’a pas été prouvé que cette décision avait respecté la « durée minimale des procédures écrites » et d’autres règles procédurales, sans pourtant développer d’argumentation pertinente à cet égard.

229    D’autre part, en ce qui concerne la demande de la requérante visant à ce que le Tribunal exerce un contrôle d’office en ce qui concerne la violation de ces principes, il ressort de sa réponse du 31 janvier 2023 aux questions du Tribunal que, par son sixième moyen, elle demande à celui-ci d’ordonner « la production de documents permettant de vérifier la régularité de la procédure » ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée. Or, ainsi qu’il ressort du point 228 ci-dessus, la requérante n’indique pas avec précision les raisons exactes de nature à justifier une telle production, de sorte que cette demande ne répond pas, en tout état de cause, aux exigences de l’article 88, paragraphe 2, du règlement de procédure.

230    Dans ces conditions, il convient de rejeter le sixième moyen comme irrecevable.

4.      Sur les premier et septième moyens, tirés d’une violation de l’article 41, paragraphe1 et 2, sous a), de la Charte en raison du non-respect du droit d’être entendu

231    Dans le cadre des premier et septième moyens, qu’il convient d’examiner ensemble, la requérante soutient que la procédure de consultation menée par le CRU en vue de l’adoption de la décision attaquée afin de remplacer les décisions initiales n’était pas conforme aux exigences du droit d’être entendu, consacré par l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous a), de la Charte.

232    Le présent moyen s’articule autour de deux branches, tirées, la première, de l’insuffisance du délai pour soumettre des observations dans le cadre de cette procédure de consultation et, la seconde, du fait que la décision attaquée aurait été définitivement établie préalablement à ladite procédure.

a)      Sur la première branche, portant sur l’insuffisance du délai pour soumettre des observations dans le cadre de la procédure de consultation

233    La requérante fait valoir que, eu égard à « la complexité de la procédure » et au volume des pièces communiquées par le CRU, le délai de dix jours ouvrables que ce dernier lui a accordé pour soumettre des observations préalablement à l’adoption de la décision attaquée n’était pas suffisamment long pour lui permettre d’effectuer un examen complet des pièces communiquées. En effet, le CRU aurait transmis à la requérante non seulement un projet de décision attaquée comportant 39 pages, mais également « diverses annexes » contenant des détails de calcul et des chiffres incompréhensibles.

234    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

235    Le droit d’être entendu, consacré à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative et avant l’adoption de toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts (voir arrêt du 22 novembre 2012, M., C‑277/11, EU:C:2012:744, point 87 et jurisprudence citée).

236    En l’espèce, préalablement à l’adoption de la décision attaquée, la Bundesanstalt für Finanzdienstleistungsaufsicht (BaFin, Autorité fédérale de surveillance des services financiers, Allemagne), a transmis à la requérante une communication du CRU du 2 mars 2022, dans laquelle ce dernier avait fait part de son intention de retirer et de remplacer les décisions initiales. Cette communication contenait un projet relatif à la nouvelle décision du CRU et à ses annexes I et II pour la période de contribution 2016. Dans ladite communication, le CRU a invité la requérante à soumettre, au plus tard le 23 mars 2022, des observations sur les documents ainsi communiqués.

237    La requérante a soumis ses observations par une lettre du 23 mars 2022 adressée à la BaFin.

238    Il est constant que la requérante s’est vu accorder un délai de dix jours ouvrables pour présenter ses observations.

239    En ce qui concerne le caractère suffisant de ce délai, premièrement, il convient de rappeler le contexte dans lequel s’inscrit la décision attaquée. Ainsi qu’il a été relevé aux points 170 et 171 ci-dessus, la décision attaquée a remplacé les décisions initiales afin de remédier au défaut de motivation de celles-ci constaté par le CRU, étant entendu que le calcul de la contribution ex ante de la requérante pour la période de contribution 2016 ainsi que le montant de cette contribution étaient les mêmes dans la deuxième des décisions initiales et dans la décision attaquée. Ainsi, de nombreux éléments à la base de la décision attaquée, tels que la non-exclusion des passifs liés aux activités auxiliaires de développement de la requérante du calcul des passifs servant à déterminer sa contribution ex ante, étaient connus de la requérante dès l’adoption des décisions initiales, ce qui est d’ailleurs confirmé par les moyens soulevés par la requérante au stade de la requête.

240    Deuxièmement, bien que la requérante fasse valoir que la procédure de consultation menée par le CRU était complexe, elle n’explique pas en quoi consistait cette complexité. Notamment, elle ne fait pas référence à des incertitudes concrètes concernant le contenu des documents fournis dans le cadre de cette procédure ni à des difficultés pratiques qui l’auraient empêchée de soumettre ses observations dans le délai imparti.

241    Troisièmement, la requérante ne saurait être suivie lorsqu’elle s’appuie, pour démontrer le caractère insuffisamment long du délai de consultation, sur « le volume des pièces communiquées par le CRU ». En effet, ainsi qu’elle l’a précisé à l’audience, sa référence aux « diverses annexes » fournies dans le cadre de la procédure de consultation doit être comprise comme visant les annexes I et II du projet de décision attaquée. Or, cette annexe I comportait trois pages, dont une page ne contenait qu’une liste de données communiquées par la requérante. Par ailleurs, bien que l’annexe II, quant à elle, comportait 105 pages, elle comprenait des données statistiques relatives au calcul des contributions ex ante pour chaque État membre participant sous une forme résumée et agrégée. Ainsi, ce n’était qu’une partie limitée de cette annexe qui était directement pertinente pour la requérante. Dans ces conditions, rien n’indique que le volume des documents communiqués par le CRU aurait empêché la requérante de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur le projet de décision attaquée dans le délai imparti.

242    Quatrièmement, il y a lieu d’ajouter que l’argumentation de la requérante figurant aux points 18 à 22 de son mémoire en adaptation, qui vise à contester individuellement chacun des arguments invoqués par le CRU pour justifier le caractère suffisant du délai qu’il a accordé aux établissements, n’apporte aucun élément de nature à soutenir sa thèse selon laquelle la complexité de la procédure de consultation et le volume des pièces communiquées étaient tels que le délai de dix jours qui lui a été accordé était insuffisant.

243    Eu égard à ce qui précède, rien ne permet de conclure que ce délai n’a pas permis à la requérante de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur le projet de décision attaquée.

244    Partant, la présente branche doit être rejetée comme non fondée.

b)      Sur la deuxième branche, portant sur le fait que la décision attaquée aurait été définitivement établie préalablement à la procédure de consultation

245    La requérante soutient que le CRU a considéré la procédure de consultation comme une simple formalité, puisqu’il a initialement annoncé, préalablement à cette procédure, son intention d’adopter la décision attaquée au cours du premier trimestre 2022, soit seulement six jours ouvrables après l’expiration du délai qui lui avait été accordé pour présenter des observations. Ainsi, la requérante n’aurait pas pu s’attendre à un examen sérieux par le CRU de ses observations. Il serait sans pertinence à cet égard que le CRU ait, par la suite, décidé de prévoir plus de six jours ouvrables après l’expiration de ce délai avant d’adopter cette décision.

246    Par ailleurs, il ressortirait de sa constatation figurant au point 9 de l’annexe III de la décision attaquée, selon laquelle il ne s’était pas attendu à ce que l’évaluation de l’argumentation soit un processus long, que le CRU n’était pas disposé à revoir le projet de décision attaquée. Par ailleurs, l’annexe III de la décision attaquée susciterait l’impression que les observations de la requérante n’ont été traitées que partiellement et rejetées au moyen de « considérations en partie inappropriées ».

247    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

248    À cet égard, les circonstances mentionnées par la requérante, telles que le calendrier suivi par le CRU pour l’adoption de la décision attaquée et sa modification ultérieure, ne sont pas de nature à établir que celui-ci n’envisageait pas de prêter toute l’attention requise aux observations potentiellement soumises par la requérante. Les allégations que la requérante tire desdites circonstances sont en effet purement spéculatives.

249    Pour ce qui est, par ailleurs, de l’affirmation de la requérante selon laquelle ses observations n’ont été traitées que partiellement et rejetées au moyen de considérations « en partie inappropriées », la requérante n’a identifié aucune observation spécifique à laquelle le CRU n’aurait pas répondu.

250    En outre, dans la mesure où la requérante est en désaccord avec l’appréciation du CRU dans la décision attaquée, un tel désaccord ne saurait constituer une violation du droit d’être entendue de la requérante, mais relève de l’examen du bien-fondé d’une telle appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 25 mars 2015, Slovenská pošta/Commission, T‑556/08, non publié, EU:T:2015:189, point 89).

251    Enfin, la requérante ne saurait s’appuyer sur le point 31 de l’arrêt du 10 juillet 2001, Ismeri Europa/Cour des comptes (C‑315/99 P, EU:C:2001:391), dans lequel la Cour a constaté qu’une institution de l’Union était naturellement plus disposée à accueillir des commentaires avant d’avoir arrêté sa position définitive qu’après la publication de celle-ci, étant donné que l’acceptation du bien-fondé des critiques après publication l’obligerait à se déjuger en adoptant un rectificatif. En effet, dans la présente affaire, la requérante n’était pas invitée à soumettre des observations sur une position définitivement arrêtée du CRU, dont une modification aurait exigé un rectificatif, mais sur un projet de décision avant qu’une décision finale ne soit adoptée.

252    Dès lors, la présente branche doit être écartée comme non fondée et, avec elle, les premier et septième moyens dans leur ensemble.

5.      Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation par la décision attaquée du droit à une protection juridictionnelle effective

253    La requérante  soutient que les défauts de motivation exposés dans le cadre du quatrième moyen rendent significativement plus difficile pour elle l’exercice de son droit à une protection juridictionnelle effective. En effet, il lui serait pratiquement impossible de comprendre les motifs de la décision attaquée et, partant, d’élaborer les moyens de son recours. Cette décision violerait, dès lors, l’article 47 de la Charte et le principe du contradictoire.

254    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

255    À cet égard, il ressort de la jurisprudence qu’il n’y a pas lieu d’examiner un grief tiré d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective de manière autonome lorsque ce grief n’est pas appuyé par des arguments spécifiques, mais se borne à renvoyer aux arguments exposés dans le cadre des autres griefs (voir, en ce sens, arrêts du 22 septembre 2015, First Islamic Investment Bank/Conseil, T‑161/13, EU:T:2015:667, point 68, et du 27 juillet 2022, RT France/Conseil, T‑125/22, EU:T:2022:483, point 101).

256    Dans la présente affaire, la requérante invoque la violation du droit à une protection juridictionnelle effective, sans toutefois l’appuyer par des arguments spécifiques, en dehors de ceux qu’elle soulève dans le cadre de son quatrième moyen.

257    Partant, il convient de rejeter le cinquième moyen pour les mêmes raisons que celles exposées aux points 175 à 222 ci-dessus dans le cadre de l’appréciation du quatrième moyen.

6.      Sur le huitième moyen, tiré de l’illégalité de la décision attaquée au regard de l’article 3, point 28, et de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63

258    La requérante fait valoir que, en n’excluant pas les passifs liés à ses activités auxiliaires de développement du calcul de sa contribution ex ante, le CRU a erronément interprété le règlement délégué 2015/63, en particulier son article 3, point 28, et son article 5, paragraphe 1, sous f).

259    Le CRU, soutenu par le Conseil et la Commission, conteste cette argumentation. En outre, il considère que le huitième moyen n’est recevable que dans la mesure où il a été soulevé dans la requête, et ce pour les mêmes raisons que celles résumées au point 32 ci-dessus.

260    Au point 27 de l’annexe III de la décision attaquée, le CRU a considéré que les activités auxiliaires de développement de la requérante, « par leur nature même, ne p[o]uv[ai]ent pas être considérées comme étant menées sur une base non concurrentielle et dans un but non lucratif, indépendamment de la manière dont les revenus qu’elles produis[ai]ent [étaie]nt investis, et, en tout état de cause, [que le] montant [desdites activités] ne couvr[ait] pas le montant des prêts de développement de [la requérante] ».

261    À cet égard, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité des considérations présentées par la requérante dans son mémoire en adaptation, il résulte des points 44 à 63 ci-dessus que c’est à juste titre que le CRU a considéré, dans le cadre du calcul de la contribution ex ante de la requérante pour la période de contribution 2016, que les activités auxiliaires de développement de cette dernière ne relevaient pas de la notion de « prêt de développement », telle que définie à l’article 3, point 28, du règlement délégué 2015/63, et que ses passifs liés auxdites activités ne devaient ainsi pas être exclus du calcul de sa contribution ex ante au titre de l’article 5, paragraphe 1, sous f), de ce règlement délégué.

262    Par conséquent, il convient de rejeter le huitième moyen comme non fondé.

7.      Sur le onzième moyen, tiré d’une violation des principes généraux du droit, en ce que la décision attaquée ne serait pas fondée sur les éléments de droit en vigueur à la date de son adoption

263    La requérante soutient que la décision attaquée viole l’exigence découlant des principes généraux du droit et de la jurisprudence selon laquelle un acte adopté par une institution de l’Union doit se fonder sur les éléments de droit en vigueur à la date de son adoption. Ainsi, le CRU aurait dû tenir compte, lors de l’adoption de la décision attaquée en 2022, du fait que, depuis l’adoption de la directive 2019/878, la requérante ne serait plus un établissement relevant du règlement no 806/2014, de sorte qu’elle ne serait plus obligée de verser des contributions ex ante. En effet, le remplacement des décisions initiales concernant la période de contribution 2016 par une nouvelle décision constituerait en réalité une simple adoption, en 2022, d’une nouvelle décision.

264    Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

265    À cet égard, il ressort de la jurisprudence que le respect des principes gouvernant l’application de la loi dans le temps ainsi que les exigences relatives aux principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime imposent l’application des règles matérielles en vigueur à la date des faits en cause quand bien même ces règles ne sont plus en vigueur à la date de l’adoption d’un acte par l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 14 juin 2016, Commission/McBride e.a., C‑361/14 P, EU:C:2016:434, point 40 et jurisprudence citée).

266    Les dispositions régissant le versement des contributions ex ante sont fondées sur ces mêmes principes.

267    En l’espèce, la décision attaquée fixe les contributions ex ante pour la période de contribution 2016 sur la base du niveau cible annuel fixé pour cette période.

268    Or, il est constant que, durant la période de contribution 2016, la requérante était un établissement au sens de l’article 2 et de l’article 3, paragraphe 1, point 13, du règlement no 806/2014, de sorte qu’elle constituait un établissement qui avait l’obligation de verser une contribution ex ante au titre de cette période, conformément à l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, lu conjointement avec l’article 2, l’article 67, paragraphe 4, et l’article 70, paragraphe 1, du règlement no 806/2014.

269    Dans ces conditions, l’obligation pour la requérante de verser une contribution ex ante au titre de l’année 2016 ne saurait être affectée par l’adoption ultérieure de la directive 2019/878, qui a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 7 juin 2019 et est entrée en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication, avec un délai de transposition qui expirait, en principe, au plus tard le 28 décembre 2020. En effet, aucune disposition de cette directive ne prévoit l’exclusion ex tunc de la requérante du champ d’application personnel de l’obligation de verser des contributions ex ante. Par conséquent, il n’y avait pas lieu pour le CRU de tenir compte de cette circonstance dans la décision attaquée aux fins de la fixation de ces contributions.

270    Eu égard à ce qui précède, le onzième moyen doit être écarté comme non fondé.

8.      Sur la motivation de la détermination du niveau cible annuel

271    Il convient de rappeler qu’un défaut ou une insuffisance de motivation constitue un moyen d’ordre public pouvant, voire devant, être soulevé d’office par le juge de l’Union (voir arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 34 et jurisprudence citée).

272    En l’espèce, les parties ont été interrogées, par une mesure d’organisation de la procédure et lors de l’audience, sur les éventuels défauts de motivation dont serait entachée la décision attaquée en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel.

273    Il résulte des réponses des parties que celles-ci s’opposent sur la question de savoir si la décision attaquée est suffisamment motivée à cet égard, la requérante estimant que tel n’est pas le cas, tandis que le CRU est d’avis opposé.

274    Dans ces circonstances, et bien que la requérante ne critique pas la motivation de la détermination du niveau cible annuel dans sa requête et son mémoire en adaptation, le Tribunal estime qu’il lui appartient d’examiner d’office si le CRU a motivé à suffisance de droit, dans la décision attaquée, la détermination du niveau cible annuel.

275    À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, au terme de la période initiale, les moyens financiers disponibles dans le FRU doivent atteindre le niveau cible final, qui correspond à au moins 1 % du montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants.

276    Selon l’article 69, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, au cours de la période initiale, les contributions ex ante doivent être réparties aussi uniformément que possible dans le temps jusqu’à ce que le niveau cible final mentionné au point 275 ci-dessus soit atteint, mais en tenant dûment compte de la phase du cycle d’activité et de l’incidence que les contributions procycliques peuvent avoir sur la position financière des établissements.

277    L’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 précise que, chaque année, les contributions dues par l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants ne dépassent pas 12,5 % du niveau cible final.

278    En ce qui concerne le mode de calcul des contributions ex ante, l’article 4, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 prévoit que le CRU détermine leur montant sur la base du niveau cible annuel, compte tenu du niveau cible final, et sur la base du montant moyen des dépôts couverts de l’année précédente, calculé trimestriellement, pour tous les établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants.

279    De même, selon l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, le CRU calcule la contribution ex ante pour chaque établissement sur la base du niveau cible annuel, qui doit être établi au regard du niveau cible final et conformément à la méthode exposée dans le règlement délégué 2015/63.

280    Afin d’examiner si le CRU a respecté son obligation de motivation en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel, il convient tout d’abord de rappeler que, même si l’auteur d’une décision n’est pas obligé, dans la motivation de celle-ci, de spécifier tous les éléments de fait et de droit pertinents, il n’en demeure pas moins que cette motivation doit exposer au moins les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 169 et jurisprudence citée).

281    Ensuite, lorsque le CRU adopte une décision fixant les contributions ex ante, il doit porter à la connaissance des établissements concernés la méthode de calcul de ces contributions (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 122).

282    Il doit en aller de même pour la méthode de détermination du niveau cible annuel, ce montant revêtant une importance essentielle dans l’économie d’une telle décision. En effet, ainsi qu’il ressort de l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81, le mode de calcul des contributions ex ante consiste en la répartition dudit montant entre tous les établissements concernés, de sorte qu’une augmentation ou une réduction de ce même montant entraîne une augmentation ou une réduction correspondante de la contribution ex ante de chacun de ces établissements.

283    Il ressort de ce qui précède que les établissements redevables des contributions ex ante doivent pouvoir comprendre, à la lecture de la décision attaquée, au moins les principales étapes de la méthode de calcul du montant du niveau cible annuel pour la période de contribution concernée.

284    En l’espèce, ainsi qu’il ressort du considérant 80 de la décision attaquée, le CRU a fixé le montant du niveau cible annuel à 7 007 654 704 euros.

285    Au considérant 60 de la décision attaquée, le CRU a rappelé avoir déterminé ce niveau cible compte tenu, notamment, du montant pronostiqué du niveau cible final, qui devait être atteint à la fin de la période initiale, ainsi que des moyens financiers déjà disponibles dans le FRU.

286    Le CRU a exposé la démarche suivie pour déterminer le niveau cible annuel aux considérants 62 à 79 de la décision attaquée.

287    Au considérant 62 de la décision attaquée, le CRU a expliqué que la fixation du niveau cible annuel à un huitième de 1 % du montant des dépôts couverts de l’année précédente ne serait pas suffisante pour atteindre le niveau cible final dans le cas où il faudrait s’attendre à une croissance des dépôts couverts dans le futur.

288    Aux considérants 63 à 66 de la décision attaquée, le CRU a précisé que, afin de tenir compte de l’évolution prévue des dépôts couverts pendant la période initiale, il avait analysé – à défaut de données fiables sur l’évolution des dépôts couverts des établissements – les taux de croissance des dépôts des ménages et des dépôts des sociétés commerciales non financières, en s’appuyant sur les données publiées par la Banque centrale européenne (BCE). Il a noté que, sur la base de cette analyse, un taux de croissance annuel des dépôts couverts d’environ 3 % était le scénario le plus réaliste.

289    En outre, le CRU a effectué, aux considérants 67 à 77 de la décision attaquée, une évaluation de la phase du cycle d’activité et de l’incidence procyclique potentielle que les contributions ex ante pourraient avoir sur la situation financière des établissements. À ce dernier égard, il a, notamment, indiqué avoir pris en compte le fait que les contributions ex ante pour 2016 allaient être substantiellement plus élevées que les contributions perçues pour 2015 par les autorités de résolution nationales sur la base de la directive 2014/59.

290    À l’issue de cette évaluation, le CRU a conclu, au considérant 78 de la décision attaquée, que, compte tenu des évolutions défavorables au sein du secteur bancaire et du niveau d’incertitude caractérisant l’économie mondiale en 2016, il était approprié, en vue de ne pas aggraver les effets procycliques des contributions ex ante sur la solvabilité du secteur bancaire, de retenir un taux de croissance inférieur à celui qui avait été pronostiqué sur la base des taux de croissance des dépôts des ménages et des dépôts des sociétés commerciales non financières, à savoir un taux de croissance inférieur à 3 %.

291    Au regard de ces considérations, le CRU a prévu, au considérant 80 de la décision attaquée, un coefficient qu’il a appliqué pour déterminer le niveau cible annuel (ci-après le « coefficient »), et il a fixé sa valeur à 1,05 %. Puis, il a calculé le montant du niveau cible annuel en multipliant le montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements en 2015 par ce coefficient et en divisant le résultat de ce calcul par huit, conformément à la formule mathématique suivante :

Objectif0 [montant du niveau cible annuel] = 5 339 158 631 522 [Total dépôts couverts2015] * 0.0105 * ⅛ = EUR 7 007 654 704.

292    S’agissant du caractère suffisant de cette motivation, premièrement, il convient de rappeler que la période de contribution 2016 correspond à la première année de la période initiale de huit ans. Ainsi, bien qu’il ressorte du considérant 60 de la décision attaquée que le niveau cible annuel devrait être fixé en tenant compte des moyens financiers déjà disponibles dans le FRU, les établissements pouvaient savoir que cet élément n’avait aucun impact sur le calcul du niveau cible annuel pour la période de contribution 2016.

293    Par ailleurs, il ressort, notamment, des considérants 60 et 80 de la décision attaquée que le CRU a déterminé le niveau cible annuel en suivant deux étapes principales. Dans un premier temps, il a déterminé le montant pronostiqué du niveau cible final et, dans un second temps, il a divisé ce montant par huit afin de tenir compte du fait que la période initiale comportait huit années de contribution (voir points 285 à 291 ci-dessus).

294    En revanche, rien n’indique que le calcul du niveau cible annuel pour la période de contribution 2016 a été effectué selon une formule mathématique différente de celle figurant au considérant 80 de la décision attaquée ou qu’il comportait d’autres étapes supplémentaires non exposées dans la décision attaquée.

295    Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que le CRU a omis d’exposer, dans la décision attaquée, les principales étapes de la méthode de calcul du montant du niveau cible annuel pour la période de contribution 2016.

296    En ce qui concerne, deuxièmement, le montant pronostiqué du niveau cible final, il convient de relever que ce montant peut être déduit de la formule mathématique figurant au considérant 80 de la décision attaquée, comme la requérante l’admet elle-même et comme le CRU l’a confirmé à l’audience. Plus concrètement, en multipliant les deux premiers éléments de cette formule, à savoir le montant des dépôts couverts des établissements en 2015 (soit 5 339 158 631 522 euros) et le coefficient (soit 0,0105), il est possible d’obtenir le montant pronostiqué du niveau cible final, à savoir environ 56 milliards d’euros.

297    S’agissant, troisièmement, de la manière dont le CRU a déterminé le montant pronostiqué du niveau cible final, il résulte du considérant 59 de la décision attaquée que le CRU a fondé son analyse sur le fait que, selon l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, ce montant devait correspondre à au moins 1 % du montant des dépôts couverts, au terme de la période initiale, de l’ensemble des établissements agréés dans tous les États membres participants.

298    À cet égard, il ressort des considérants 62 et 63 de la décision attaquée que le CRU a pris en compte l’évolution pronostiquée des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés dans tous les États membres participants, et ce à partir du montant de ces dépôts tel qu’il se présentait en 2015 et jusqu’à la fin de la période initiale, soit jusqu’à la fin de l’année 2023.

299    Par ailleurs, il découle, notamment, des considérants 66 et 78 de la décision attaquée que le CRU a identifié, dans un premier temps, un taux de croissance annuel desdits dépôts couverts de 3 % entre 2015 et 2023, mais qu’il a, dans un second temps, revu à la baisse ce pourcentage afin de prendre en compte l’analyse de la phase du cycle d’activité et l’incidence procyclique potentielle que les contributions ex ante pourraient avoir sur la situation financière des établissements (voir points 289 et 290 ci-dessus).

300    Ainsi, il résulte de la décision attaquée que le CRU a retenu un taux de croissance annuel des dépôts couverts inférieur à 3 % entre 2015 et 2023 afin de déterminer le niveau cible final.

301    Enfin, il convient de relever que, ainsi qu’il découle des considérants 64 et 79 de la décision attaquée, le CRU ne disposait pas, au moment de la détermination du niveau cible annuel pour la période de contribution 2016, de données fiables sur l’évolution probable des dépôts couverts des établissements entre 2015 et 2023, du fait qu’une nouvelle définition des dépôts couverts n’avait été introduite qu’un an plus tôt par la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil, du 16 avril 2014, relative aux systèmes de garantie des dépôts (JO 2014, L 173, p. 149). À défaut de telles données, le CRU a dû évaluer l’évolution pronostiquée desdits dépôts sur la base des taux de croissance des dépôts des ménages et des dépôts des sociétés commerciales non financières, ainsi que cela ressort du considérant 64 de la décision attaquée.

302    Dans ces circonstances particulières et compte tenu, en outre, du fait que la décision attaquée portait sur la première période de contribution après l’adoption du règlement no 806/2014, les établissements, en tant qu’opérateurs avisés, pouvaient raisonnablement s’attendre à ce que, pour déterminer le niveau cible annuel pour cette période, le CRU tienne également compte du montant pronostiqué du niveau cible final, tel qu’il figurait dans l’exposé des motifs de la proposition COM(2013) 520 final de la Commission, du 10 juillet 2013, qui a abouti à l’adoption de ce règlement, selon lequel la Commission a estimé que le niveau cible final correspondrait à 55 milliards d’euros.

303    Eu égard à ce qui précède, les établissements étaient en mesure de comprendre les principales modalités selon lesquelles le CRU allait déterminer le niveau cible final, aux fins de la détermination du niveau cible annuel pour la période de contribution 2016.

304    Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

305    En premier lieu, la requérante critique le fait que la décision attaquée ne contient ni le montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants pronostiqué pour la fin de la période initiale ni le montant pronostiqué du niveau cible final.

306    À cet égard, il suffit de rappeler que, ainsi qu’il a été relevé au point 296 ci-dessus, le montant pronostiqué du niveau cible final peut être déduit de la formule mathématique figurant au considérant 80 de la décision attaquée.

307    En ce qui concerne, par ailleurs, le montant des dépôts couverts pronostiqué pour la fin de la période initiale, ce montant ne constitue pas, dans l’économie de la décision attaquée, une donnée essentielle sans laquelle la requérante ne pouvait pas comprendre les principales étapes de la méthode suivie par le CRU, décrite au point 293 ci-dessus.

308    En second lieu, la requérante soutient que la décision attaquée ne fournit pas d’éléments chiffrés qui permettent de comprendre les raisons pour lesquelles le CRU a fixé le coefficient précisément à 1,05 %. En outre, les éléments chiffrés figurant dans la décision attaquée seraient contradictoires. En effet, le fait que le CRU a appliqué le coefficient de 1,05 % signifierait que la détermination du niveau cible annuel se base sur une croissance cumulée des dépôts couverts de 5 % sur les huit années de la période initiale, alors qu’il serait précisé dans la décision attaquée que cette détermination est fondée sur un taux de croissance « annuel » des dépôts couverts d’environ 3 %. Ce dernier taux conduirait à une croissance cumulée des dépôts couverts nettement supérieure à 5 % à la fin de la période initiale. Par ailleurs, il ne serait pas précisé si la référence à une « approche conservatrice », au considérant 79 de la décision attaquée, signifie que le niveau cible annuel a dû être fixé, par mesure de sécurité, à un niveau élevé, ou si elle signifie plutôt que le CRU s’est fondé sur une croissance faible des dépôts couverts.

309    Cette argumentation repose, d’une part, sur la prémisse erronée selon laquelle le CRU a retenu, aux fins de la détermination du niveau cible final, un taux de croissance annuel des dépôts couverts « d’environ 3 % ». En effet, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 300 ci-dessus, il ressort de la décision attaquée, notamment de son considérant 78, que le CRU a considéré qu’il était approprié de « fixer le niveau cible annuel pour 2016 sur la base d’un taux de croissance des dépôts couverts pronostiqué inférieur à celui identifié sur la base du taux de croissance observé des dépôts des ménages et des dépôts des sociétés commerciales non financières », à savoir un taux inférieur à 3 %. Ainsi, il peut être déduit de ce considérant que le CRU a retenu un taux compris entre 0 % et 3 %. En outre, en soulignant qu’il avait suivi une « approche conservatrice », le CRU a indiqué, en substance, qu’il avait considéré qu’il était approprié, pour les motifs qu’il a exposés dans la décision attaquée, de retenir un taux de croissance annuel se situant dans la partie inférieure de cette fourchette.

310    À cet égard, le CRU a précisé à l’audience, sans être contredit sur ce point par la requérante, que le montant du niveau cible final de 56 milliards d’euros, fixé par la décision attaquée, correspondait à un taux de croissance annuel des dépôts couverts d’environ 0,6 %. Or, un tel taux de croissance annuel appliqué à la somme de 5 339 158 631 522 euros correspond, après huit années, à un taux cumulé de 4,92 % et n’est donc pas incohérent, contrairement à ce que soutient la requérante, avec un taux de croissance cumulé au bout de ladite période de huit ans d’environ 5 %, comme cela est reflété dans le coefficient de 1,05 %.

311    Sur ce point, la décision attaquée n’est donc entachée d’aucune incohérence.

312    D’autre part, s’agissant de la critique de la requérante selon laquelle la décision attaquée ne fournit pas d’éléments chiffrés qui permettent de comprendre les raisons pour lesquelles le CRU a fixé le coefficient précisément à 1,05 %, il convient de relever, premièrement, qu’il pouvait être déduit des éléments mentionnés dans la décision attaquée et de ceux rappelés aux points 309 et 310 ci-dessus que ce coefficient correspondait à un taux cumulé de croissance des dépôts couverts escomptés au bout de la période initiale de huit ans d’environ 5 %, ce qui se traduisait en l’espèce par un taux de croissance annuel d’environ 0,6 %. Ce dernier taux se situe ainsi dans la partie inférieure de la fourchette comprise entre 0 % et 3 % retenue par le CRU, ce qui est cohérent avec son approche conservatrice justifiée par l’évaluation de la phase du cycle d’activité et de l’incidence procyclique potentielle que les contributions ex ante pourraient avoir sur la situation financière des établissements. Un opérateur avisé, comme la requérante, pouvait donc comprendre l’articulation entre ces éléments. Deuxièmement, le coefficient de 1,05 % permettait au CRU, dans les circonstances particulières de l’espèce rappelées au point 302 ci-dessus, de rapprocher le niveau cible final du montant pronostiqué de ce niveau, tel qu’il ressortait des travaux préparatoires du règlement no 806/2014. Troisièmement, s’agissant de la fixation d’un coefficient visant à refléter, en substance, un pronostic économique fondé sur plusieurs facteurs évolutifs, incertains ou variables, il serait excessif d’exiger une motivation spécifique pour chacun des choix techniques ou chacun des éléments chiffrés sur lesquels s’appuie le raisonnement, dès lors que la décision attaquée fait ressortir clairement le raisonnement suivi pour permettre d’en contester ultérieurement le bien-fondé devant la juridiction compétente (voir, en ce sens, arrêt du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a., C‑341/06 P et C‑342/06 P, EU:C:2008:375, point 108 et jurisprudence citée).

313    Eu égard à ce qui précède, il convient de conclure que, contrairement à ce que soutient la requérante, la décision attaquée n’est pas entachée d’un défaut de motivation en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel pour la période de contribution 2016.

C.      Conclusion

314    Aucun des moyens invoqués par la requérante n’étant fondé, il convient de rejeter le recours dans son ensemble.

V.      Sur les dépens

315    Selon l’article 133 du règlement de procédure, il est statué sur les dépens dans l’arrêt qui met fin à l’instance. Aux termes de l’article 219 dudit règlement, applicable à la présente procédure après renvoi, il appartient au Tribunal de statuer sur les dépens relatifs, d’une part, aux procédures engagées devant le Tribunal et, d’autre part, à la procédure de pourvoi devant la Cour.

316    En outre, conformément à l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

317    En l’espèce, la Cour, dans l’arrêt sur pourvoi, a annulé l’arrêt initial et a réservé les dépens. Il convient donc de statuer, dans le présent arrêt, sur les dépens afférents à la procédure initiale devant le Tribunal, à la procédure de pourvoi devant la Cour et à la présente procédure après renvoi.

318    Le CRU ayant succombé dans la procédure de pourvoi devant la Cour, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante afférents à cette procédure.

319    La requérante ayant succombé sur le fond dans la procédure de renvoi devant le Tribunal, sur la base des arguments qu’elle avait avancés dans le cadre de la procédure devant le Tribunal antérieure au pourvoi, il y a lieu de décider qu’elle supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le CRU afférents à ces deux procédures.

320    Enfin, conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Conseil et la Commission supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Conseil de résolution unique (CRU) supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par NRW.Bank afférents à la procédure de pourvoi devant la Cour, dans le cadre de l’affaire C662/19 P.

3)      NRW.Bank supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le CRU afférents à la procédure de renvoi devant le Tribunal, dans le cadre de l’affaire T466/16 RENV, ainsi qu’à la procédure initiale devant le Tribunal, dans le cadre de l’affaire T466/16.

4)      Le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne supporteront leurs propres dépens.

Kornezov

De Baere

Petrlík

Kecsmár

 

Kingston

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 février 2024.

Signatures


Table des matières


I. Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du présent recours

II. Décision attaquée

III. Conclusions des parties

IV. En droit

A. Sur les exceptions d’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), de l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), ainsi que de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63

1. Sur le neuvième moyen, tiré de l’exception d’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63

a) Observations liminaires

b) Sur la portée de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63

c) Sur la légalité de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63

1) Sur la première branche, tirée de la méconnaissance des travaux préparatoires de la directive 2014/59

2) Sur la deuxième branche, tirée de la violation de l’objectif d’allègement des budgets publics

3) Sur la troisième branche, tirée de la méconnaissance du principe d’alignement des contributions ex ante sur le profil de risque et du principe d’égalité de traitement

2. Sur le dixième moyen, tiré des exceptions d’illégalité de l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous b), et de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63

B. Sur les moyens portant sur la légalité de la décision attaquée

1. Sur les deuxième et troisième moyens, tirés d’une violation par la décision attaquée de l’article 41 de la Charte et de l’obligation de motivation en raison de l’absence de base juridique pour le remplacement, avec effet rétroactif, des décisions initiales

2. Sur le quatrième moyen, tiré d’une insuffisance de motivation de la décision attaquée en ce qui concerne le calcul de la contribution ex ante de la requérante

a) Observations liminaires

b) Sur la première branche portant sur l’absence de motivation individuelle de la décision attaquée

c) Sur la deuxième branche, portant sur l’absence de communication des données individuelles des autres établissements

d) Sur la troisième branche, portant sur une insuffisance de motivation en ce qui concerne la constitution des bins

3. Sur le sixième moyen, tiré d’une violation des « exigences générales de procédure » résultant de l’article 41 de la Charte, de l’article 298 TFUE, des principes généraux du droit et du règlement intérieur du CRU

4. Sur les premier et septième moyens, tirés d’une violation de l’article 41, paragraphes 1 et 2, sous a), de la Charte en raison du non-respect du droit d’être entendu

a) Sur la première branche, portant sur l’insuffisance du délai pour soumettre des observations dans le cadre de la procédure de consultation

b) Sur la deuxième branche, portant sur le fait que la décision attaquée aurait été définitivement établie préalablement à la procédure de consultation

5. Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation par la décision attaquée du droit à une protection juridictionnelle effective

6. Sur le huitième moyen, tiré de l’illégalité de la décision attaquée au regard de l’article 3, point 28, et de l’article 5, paragraphe 1, sous f), du règlement délégué 2015/63

7. Sur le onzième moyen, tiré d’une violation des principes généraux du droit, en ce que la décision attaquée ne serait pas fondée sur les éléments de droit en vigueur à la date de son adoption

8. Sur la motivation de la détermination du niveau cible annuel

C. Conclusion

V. Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’allemand.

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